L’habitat de l’âge du fer de Monterenzio Vecchio (province de Bologne, Italie)
Étude préliminaire du mobilier
p. 77-92
Résumés
L’habitat de l’âge du Fer de Monterenzio Vecchio (Province de Bologne, Italie) se situe sur les hauteurs apennines de l’antique Étrurie padane à proximité de la capitale étrusque Felsina, actuelle ville de Bologne en Émilie-Romagne. Ce site archéologique, encore inédit et partiellement étudié, se caractérise par un faciès étrusco-ombrien couvrant un horizon chronologique fin vie-ve siècle av. J.-C. Une étude préliminaire du mobilier, engagée dans le cadre d’un projet de recherche dirigé par D. Vitali, s’est notamment intéressée aux fibules et à la diversité des classes céramiques et des récipients.
The Iron Age habitat in Monterenzio Vecchio (Province of Bologna, Italy) is located on the Apennine Mountains of the ancient Padan Etruria near the Etruscan capital Felsina, current Bologna in Emilia-Romagna. This archaeological site, still unpublished and partially studied, is characterized by an Etruscan-Umbrian facies covering a chronological horizon from the end of the 6th to the 5th century BC. A preliminary analysis of its furniture as part of a research project supervised by D. Vitali focused on the fibulae and on the variety of ceramic classes and containers.
Entrées d’index
Mots-clés : habitat, âge du fer, Monterenzio Vecchio, Étrurie padane, étrusco-ombrien, typologie, fibule, type Certosa, type Casalfiumanese, céramique, bucchero padan, céramique fine étrusco-padane, céramique grise, céramique semi-grossière, céramique grossière
Index chronologique : âge du fer
Keywords : habitat, Iron Age, Monterenzio Vecchio, Padan Etruria, Etruscan-Umbrian, typological analysis, fibula, Certosa type, Casalfiumanese type, pottery, Padan bucchero, Etruscan-Padan fine ceramics, grey ceramics, crude pottery, semicrude pottery
Index géographique : Monterenzio Vecchio, Étrurie padane
Texte intégral
1Monterenzio Vecchio se situe à une trentaine de kilomètres au sud-est de Bologne, dans les Apennins tosco-émiliens, sur la crête surplombant les rivières Idice et Sillaro à environ 600 m d’altitude. C’est un site de hauteur idéalement situé sur les voies de communication entre la plaine du Pô au nord avec l’Étrurie padane, dont le centre économique et politique est Felsina (actuelle Bologne), les cols toscans au sud, aux portes de l’Étrurie septentrionale, et le territoire ombro-romagnol à l’est (fig. 1).
Fig. 1 — Carte de l’Étrurie padane avec localisation du site de Monterenzio Vecchio.

DAO : L. Apostolides, d’après Sassatelli 2008, p. 101.
2Les labours entrepris sur le versant occidental de la colline de Monterenzio Vecchio dès la fin du xixe siècle ont mis au jour des objets métalliques, appartenant à un ensemble funéraire guerrier de type celtique daté de la fin du ive siècle av. J.-C. (Gozzadini, 1882, p. 432 ; Vitali, 1984, p. 41, note 18). Puis, le démantèlement du cimetière de l’ancienne église paroissiale au sommet de cette colline, en 1975, a révélé des niveaux d’occupation et une importante quantité de céramique datés de l’âge du Bronze récent (xiiie siècle av. J.-C. ; Guerra et al., 2009, p. 192-195). En 1988, de nouveaux labours sur le versant occidental, faisant notamment affleurer des scories de fer et de la céramique, ont amorcé les premières fouilles par une campagne de sauvetage durant laquelle huit sépultures à inhumations celto-étrusques furent découvertes (Lejars, Verger et Vitali, 2001, p. 524).
3Le potentiel archéologique de Monterenzio Vecchio a suscité la mise en place de programmes de recherches de 1999 à 2009, conjointement menés par l’Université de Bologne, l’UMR 8546 CNRS-École Normale Supérieure et l’École française de Rome. Les campagnes de fouilles se sont intéressées aux âges des métaux et ont ainsi mis en évidence un habitat de l’âge du Bronze récent au sommet de la colline et une occupation de l’âge du Fer sur le versant occidental, composée de vestiges de différentes natures échelonnés de la fin du vie siècle au iiie siècle av. J.-C. Elle inclut une nécropole celto-étrusque de la fin du ive siècle-début iiie siècle av. J.-C., dont une cinquantaine de sépultures, principalement à inhumation, nous sont parvenues. Le mobilier qui accompagnait les défunts (hommes en majorité, femmes et enfants), renvoie aux faciès étrusque et nord-alpin de type laténien, et à une communauté de guerriers1. En contrebas, un dépôt votif du ve siècle av. J.-C. et un habitat de la fin du vie siècle et du ve siècle av. J.-C. ont été mis au jour2. Le dépôt votif comporte près de 530 vases miniatures de forme cylindrique ou tronconique, d’environ 2 cm de hauteur et de diamètre, et près de 125 scories majoritairement de fer, répartis sur une surface de 15 m2. L’habitat, qui fait l’objet de cette publication, se caractérise par de multiples structures et un abondant mobilier. Un décalage chronologique d’environ un siècle apparaît entre l’habitat et la nécropole de l’âge du Fer. Cette dernière ainsi que le dépôt votif sont comparables aux découvertes du site de Monte Bibele, qui domine la vallée de l’Idice depuis l’ouest3. Les témoignages de l’âge du Fer dans la vallée de l’Idice constituent des découvertes éparses. Les sites les plus notables sont le complexe de Monte Bibele et la nécropole celto-étrusque de Monterenzio Vecchio pour la période celto-étrusque. L’âge du Cuivre, l’âge du Bronze et l’époque romaine sont largement représentés (Vitali, 1983, indice).
4La découverte de l’habitat de la fin du vie siècle et du ve siècle av. J.-C. résulte de l’extension de la fouille du dépôt votif (« secteur stipe »). Au sud de ce dernier, de nombreux trous de poteaux ont été mis en évidence. La stratigraphie présente des creusements asynchrones de ces structures suggérant des remaniements de la zone. Leur distribution rend délicate la distinction d’unités architecturales cohérentes. À l’ouest des trous de poteaux, plusieurs sondages ont révélé un niveau de sol en place avec des indices de plancher et diverses strates anthropiques provenant de dépôts colluviaux d’est en ouest. Elles se caractérisent par une stratigraphie complexe, notamment composée de couches charbonneuses, de foyers, de morceaux de torchis, de restes de faune et de mobilier céramique et métallique.
Étude préliminaire du mobilier
5Le mobilier issu de l’habitat se classe en différents types de matériaux : métal (alliage cuivreux et fer), céramique, terre à bâtir rubéfiée (torchis), verre, tabletterie, scories et ossements de faune. Il provient de toute l’emprise de la fouille du « secteur stipe » correspondant à l’habitat, plus précisément de la zone de concentration des trous de poteaux et des niveaux anthropiques situés à l’ouest de celle-ci. Il est conservé dans les réserves du Musée archéologique « Luigi Fantini » de Monterenzio (fig. 2).
Fig. 2 — Exemples de mobilier de l’habitat de Monterenzio Vecchio.

1. Bague à chaton ; 2. Pince à épiler ; 3. Fragment de râpe ; 4. Pièce ajourée ovoïdale ; 5. Rivet et sa contre-plaque ; 6. Rivet ; 7. Crochet ( ?) ; 8. Fusaïole.
DAO : L. Apostolides, échelle 1/2.
Le mobilier métallique
6Une cinquantaine d’objets métalliques en fer ou en alliage cuivreux ont été recensés sur l’ensemble de l’habitat. Concernant le mobilier en fer, il s’agit de clous entiers ou fragmentés. Le mobilier en alliage cuivreux est varié et comprend plusieurs fibules, une bague à chaton, une pince à épiler, un fragment de râpe, un rivet, un rivet et sa contre-plaque, un crochet ( ?), une pièce ajourée ovoïdale ainsi que des fragments indéterminés dont certains sont torsadés (fig. 2). Une analyse typologique des onze fibules exploitables4 a mis en évidence trois groupes morphologiques (Apostolides, 2015-2016). Ils sont définis par la forme du corps, la section du pied, le bouton sur ce dernier et le profil de l’arc, avec des variantes déterminées par la présence ou non d’un décor5. Deux groupes font référence au type italique Certosa et le dernier au type ombro-romagnol Casalfiumanese (fig. 3).
Fig. 3 — Fibules de l’habitat de Monterenzio Vecchio.

1 à 9. Fibules de type Certosa (groupe 1). 10. Fibule de type Certosa (groupe 2). 11. Fibule de type Casalfiumanese.
DAO : L. Apostolides, échelle 1/2.
Les fibules de type Certosa
7Le type Certosa tire son nom de la plus grande nécropole étrusque de Bologne (421 sépultures), fouillée par Antonio Zannoni au cours de la seconde moitié du xixe siècle, où une grande quantité de ces fibules a été découverte (Zannoni, 1876). Les fibules de type Certosa de l’habitat de Monterenzio Vecchio sont en alliage cuivreux et se classent en deux groupes distincts d’après leurs caractéristiques morphologiques.
8Concernant le premier groupe, elles se définissent chez neuf individus par un arc à profil allongé ou courbe à section hémisphérique, ovoïdale ou losangique. Le ressort se compose de deux spires unilatérales et l’ardillon se loge dans le porte-ardillon d’un pied à section en « J » surmonté d’un bouton simple relevé (fig. 3, n° 1 à 9). Elles peuvent être ornées d’un décor de « points » sur la face supérieure de l’arc, à proximité du pied. Ces fibules se rapprochent d’exemplaires mis au jour sur d’autres sites d’Étrurie padane comme dans les sépultures des nécropoles de Bologne (Certosa, De Luca ou encore Arnoaldi ; Teržan, 1976, type IV), de Montericco d’Imola (Province de Bologne ; Eles Masi, 1982, types 17 et 18) ou encore du site du Forcello (Province de Mantoue ; De Marinis et Rapi, 2007, p. 254, fig. 152, n° 5, p. 255, fig. 153, n° 2 et p. 258, fig. 156, n° 2) dans des contextes datés de la seconde moitié du vie siècle à la seconde moitié du ve siècle av. J.-C.
9Le second groupe, illustré par un unique exemplaire sur le site, se définit par un profil de l’arc courbe à section hémisphérique, un ressort composé de deux spires unilatérales, un ardillon logé dans le porte-ardillon d’un pied à section en « T » surmonté d’un double bouton relevé (fig. 3, n° 10). Cette fibule est ornée d’un décor dentelé incisé sur la face supérieure du pied. Cette variante du type trouve des analogies notamment dans des sépultures de la nécropole de Montericco d’Imola et de San Martino in Gattara (Province de Ravenne ; Eles Masi, 1982, p. 375, type 33).
La fibule de type Casalfiumanese
10Un autre type de fibule se distingue sur le site de Monterenzio Vecchio, le type Casalfiumanese. Il est représenté par une unique fibule manifeste en alliage cuivreux. L’arc est de forme losangique, interrompu en son centre par deux appendices latéraux de forme ovoïdale (vue supérieure). Son profil est courbe. Le ressort se compose de deux spires unilatérales, l’ardillon se loge dans le porte-ardillon d’un pied long à section en « C » avec un bouton non-relevé à son extrémité. Les appendices latéraux et le pied sont agrémentés de lignes parallèles incisées (Zuffa, 1949-1950, p. 104 ; Eles Masi, 1982, p. 36, 8.7 à 10, tav. 6, type 30A ; fig. 3, n° 11). Les fouilles ont également livré un raté de fabrication en alliage cuivreux qui semblerait se rapprocher de ce type, en s’appuyant sur la morphologie du corps losangique et de la languette à la base du ressort.
11Le type Casalfiumanese a été identifié pour la première fois sur le site de Podere Malatesta situé à Casalfiumanese en Émilie-Romagne, sur la rive droite du Sillaro (Zuffa, 1949-1950). Il est caractéristique du territoire ombro-romagnol et est attesté par de nombreux exemplaires dans la nécropole de Montericco d’Imola, datés des vie et ve siècles av. J.-C. (Colonna, 1974, p. 11-19 ; Eles Masi, 1982, p. 158). Leur diffusion semble s’étendre de la Province de Modène (Sassatelli et Macellari, 2002, p. 420, fig. 6 et 7), au Picénum (actuelle région des Marches ; Lollini, 1985, p. 327). Autour de Bologne, le site de Monte Bibele (Vitali, 1985, p. 9-10, Abb. 6, 1) ou encore la sépulture 88 de la nécropole villanovienne Ca’dell’Orbo à Villanova di Castenaso (Tovoli et Vitali, 1979, p. 60-62, fig. 37) ont également livré des fibules de ce type.
Le mobilier céramique : la céramique locale
12Le mobilier céramique mis au jour sur l’habitat de Monterenzio Vecchio comptabilise plusieurs milliers de fragments. Une analyse préliminaire de ce mobilier a permis de distinguer six classes céramiques d’après les caractéristiques technologiques des pâtes6 : le bucchero padan, la céramique grise, fine étrusco-padane, semi-grossière, grossière – qui renvoient à une production locale – et la céramique de type attique à vernis noir et à figures rouges. Des récipients de formes et de tailles variées ont été identifiés par type de pâte dans le cadre de l’étude d’un échantillon de fragments des classes locales uniquement, composé d’une quarantaine d’individus. La sélection repose sur la pertinence des fragments, la diversité des caractéristiques morphologiques et l’état de conservation. Peu de formes ont pu être restituées intégralement, en raison de la conservation de la seule base ou partie haute. Le caractère préliminaire de l’étude a déterminé l’élaboration d’une typologie ouverte afin d’être complétée ultérieurement7.
13Au sein de chaque classe céramique, les récipients ont été classés selon leur forme, ouverte ou fermée, puis d’après leur forme spécifique (par exemple cruche) dans laquelle les types et les variantes ont été définis. Dans le cas des parties hautes conservées des récipients, les critères typologiques primaires retenus sont le profil du corps et la profondeur de la vasque, complétés en second lieu par la forme du bord et de la lèvre. Les parties inférieures subsistantes des récipients ont été classées à partir de la forme de la base et du corps. Aussi, une synthèse des résultats de cette analyse présente un premier état des classes céramiques et formes sur le site de Monterenzio Vecchio.
Le bucchero padan (fig. 4)
14Le bucchero padan est une pâte tournée de couleur noire produite dans la plaine du Pô aux vie et ve siècles av. J.-C. (De Marinis et Rapi, 2007, p. 242-243, notes).
15Sur le site de Monterenzio Vecchio, la qualité de la pâte est variable, avec une granulométrie fine à semi-grossière (inclusions infimes à 1 mm) et une couleur anthracite à noire en surface et en fracture ou brun-rouge en fracture. Certains fragments présentent une qualité supérieure avec une pâte épurée d’un noir homogène en surface et en fracture, déterminée par la maitrise des techniques de cuisson. Les surfaces internes et externes des récipients ont un aspect plus ou moins brillant lié à leur polissage. Les premières formes identifiées sur le site sont le bol, le pot et probablement la cruche. Le bol se classe en plusieurs types (au minimum six types), définis par un corps à profil arrondi, arrondi écrasé ou caréné, et la profondeur de la vasque. Ces types sont subdivisés en variantes à partir de la forme du bord et de la lèvre. Après restitution de la forme, en raison du caractère lacunaire des récipients, leur diamètre est compris entre 12 et 20 cm. Les pots sont constitués d’un corps globulaire, ovoïde ou biconique et peuvent être ornés de cordons aplatis. Enfin, la cruche est une forme supposée par la présence d’une anse à double cordon.
Fig. 4 — Formes de récipients en bucchero padan de l’habitat de Monterenzio Vecchio.

1 à 7. Bols ; 8. Bol couvercle ; 9 à 11. Pots.
DAO : L. Apostolides, échelle 1/3.
La céramique grise (fig. 5)
16La production de la céramique grise s’étend du ve au iiie siècles av. J.-C. dans la plaine padane (De Marinis et Rapi, 2007, p. 243). Cette classe céramique se définit à Monterenzio Vecchio par une pâte tournée à granulométrie fine à semi-grossière (inclusions infimes à 1 mm), de couleur gris à gris-bleu en surface et en fracture. Les formes initiales recensées sont de nouveau le bol, avec au minimum deux types dont le corps est à profil arrondi ou arrondi et écrasé, avec une vasque profonde, et le diamètre d’ouverture respectivement de 18,5 et 16,5 cm ; la coupe, représentée par un pied en trompette, le pot à corps ovoïde, globulaire ou biconique et la cruche. Celle-ci a été façonnée avec une argile dépurée de couleur gris-bleu relativement homogène en surface et en fracture. Elle se caractérise par un bec oblique, une ouverture trilobée et une anse démarrant sur la lèvre, avec un col de 7 cm de diamètre et un épaulement d’environ 15 cm de diamètre. Ce type de cruche est représenté dans la plaine padane par des exemplaires en céramique grise, bucchero padan et céramique fine étrusco-padane. Des exemplaires en céramique grise datés du ve siècle et du début du ive siècle av. J.-C. proviennent de tombes des nécropoles de Bologne (Macellari, 2002, p. 83, tombe 23, tav. 4, n° 2), de Marzabotto (Morpurgo, 2010, p. 198, n° 185, I, 1, a) ou encore de Spina (Patitucci Uggeri, 1984, p. 162, fig. 6, type 34°).
Fig. 5 — Formes de récipients en céramique grise de l’habitat de Monterenzio Vecchio.

1 et 2. Bols ; 3. Coupe ; 4 à 6. Pots ; 7. Cruche.
DAO : L. Apostolides, échelle 1/3.
La céramique fine étrusco-padane (fig. 6)
17La céramique fine étrusco-padane est présente dans la plaine du Pô dès la fin du vie siècle et tout au long du ve siècle av. J-C. (Colonna, 1974, p. 7-8 ; De Marinis et Rapi, 2007, p. 231). À Monterenzio Vecchio, la pâte est épurée et tournée de couleur jaune orangé à rosé, en surface et en fracture. Les récipients peuvent être ornés d’un décor peint de bandes linéaires, plus rarement ondulées, et de formes géométriques comme des cercles concentriques, dans les tons marron, rouge ou orange. Parmi les formes de récipients identifiées sur le site, les bols sont particulièrement représentés. Le profil du corps est arrondi ou caréné et le diamètre à l’ouverture varie entre 8,5 cm et 20 cm. Le plat et la cruche apparaissent également sur le site.
Fig. 6 — Formes de récipients en céramique fine étrusco-padane de l’habitat de Monterenzio Vecchio.

1 à 6. Bols ; 7. Plat ; 8 et 9. Cruches.
DAO : L. Apostolides, échelle 1/3.
18Les fragments identifiés comme éléments de cruches, soit les fonds, panses, épaules, anses et becs à ouverture trilobée, permettant d’identifier au minimum sept individus, sont le plus souvent pourvus d’un décor linéaire et géométrique. La cruche à ouverture trilobée est une forme largement attestée sur le territoire ombro-romagnol dont certains exemplaires sont ornés d’un décor de bandes linéaires et ondulées (Eles Masi, 1982, p. 356-357, types 1A à 5)8. Deux représentations ornithomorphes stylisées, dans les tons marron et rouge, semblent également orner le col et la panse d’une cruche (Guerra et al., 2009, p. 197). La reconstitution partielle permet d’identifier la présence d’une étoile à huit branches à gauche d’un des volatiles et d’en deviner éventuellement une seconde à la droite de celui-ci (fig. 7). Ce schéma iconographique (volatile + étoile) semble s’inspirer de décors anciens vus sur des récipients de production grecque dès l’âge du Bronze cycladique et repris par le monde étrusque, comme l’atteste le décor d’un cratère à couvercle produit à Vulci au viiie siècle av. J.-C9.
Fig. 7 — Décors ornithomorphes provenant de l’habitat de Monterenzio Vecchio.

Clichés : L. Apostolides.
La céramique semi-grossière (fig. 8)
19Cette classe céramique fait référence à une pâte tournée à granulométrie semigrossière (inclusions comprises entre 0,25 et 1 mm) dans les tons orange-rouge à marron-noir en surface et en fracture. Le pot à corps ovoïde est une forme également représentée au sein de cette classe céramique, auquel s’ajoutent la jarre, de 19 à 20,5 cm de diamètre à l’ouverture après restitution de la forme d’après les exemplaires étudiés, et le mortier. Ce dernier, dont la fonction précise n’est pas déterminée10, se caractérise par l’incorporation de nombreux grains sur la surface interne conférant un aspect râpeux et un large diamètre à l’ouverture de 26 cm.
Fig. 8 — Formes de récipients en céramique semi-grossière de l’habitat de Monterenzio Vecchio.

1. Mortier ; 2. Pot ; 3 et 4. Jarres.
DAO : L. Apostolides, échelle 1/3.
La céramique grossière (fig. 9)
20La céramique grossière de l’habitat se distingue par une pâte non-tournée à grosses inclusions (> 1 mm) dont la couleur en surface et en fracture varie de l’orangé-rouge au marron-noir voire gris. Elle renvoie à des récipients de formes diversifiées notamment le bol, le pot, le couvercle à anse apicale, le dolium ou encore le vase miniature. La présence de cette dernière forme semble faire référence à un possible culte domestique à l’instar des habitats de Romagne des vie et ve siècles av. J.-C. (Miari, 2000, p. 241-242). Toutefois, leur récurrence en contexte d’habitat tend à les intégrer au set de vaisselle domestique ainsi destiné à la conservation d’épices par exemple (Buoite et Zamboni, 2013, p. 122). Le couvercle à anse apicale (Eles Masi, 1982, p. 128, tav. 71 et 72.18) ou encore le pot à languette (Eles Masi, 1982, p. 352, type 13) se rapprochent également d’exemplaires découverts en Romagne.
Fig. 9 — Formes de récipients en céramique grossière de l’habitat de Monterenzio Vecchio.

1 et 2. Bols ; 3. Vase miniature ; 4. Couvercle à anse apicale ; 5 à 7. Pots.
DAO : L. Apostolides, échelle 1/3.
Les graffites (fig. 4, n° 4 et fig. 6, n° 3)
21Les onze graffites recensés sur le site sont de nature non-alphabétique, incisés avant ou après cuisson sur des récipients en céramique dont la seule forme identifiable avec certitude est le bol11. Ils sont réalisés le plus souvent sur la face externe des récipients, rarement sur la face interne, sous le pied ou sur la panse. Ces graffites concernent majoritairement le bucchero padan avec six exemplaires12, tandis que la céramique fine étrusco-padane comptabilise trois graffites13 et la céramique grise deux graffites14.
Conclusion
22Cette première synthèse fournit une documentation jusque-là inédite d’un échantillon d’objets mis au jour sur l’habitat de Monterenzio Vecchio. Au terme de cette analyse, les caractéristiques étrusques et ombro-romagnoles se manifestent à travers les fibules de type Certosa et Casalfiumanese et les formes de la vaisselle céramique. La localisation du site, à proximité du centre étrusco-padan de Felsina, des cols toscans en direction de l’Étrurie septentrionale et du territoire ombroromagnol, favorise les échanges culturels. Le site se distingue ainsi par une mixité culturelle faisant référence à un faciès étrusco-ombrien des vie et ve siècles av. J.-C.
Bibliographie
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Vitali 1984
Vitali Daniele, « Nuovi dati per la Pre-Protostoria della valle dell’Idice », in Delbianco Paola et Zuffa Mario (dir.), Culture figurative e materiali tra Emilia e Marche : studi in memoria di Mario Zuffa, Rimini, 1984, p. 33-50.
Vitali 1985
Vitali Daniele, Monte Bibele (Monterenzio) und andere Fundstellen der keltischen Epoche im Gebiet von Bologna (Kleine Schriften aus dem vorgeschichtlichen Seminar Marburg, 16), Marburg, 1985.
Vitali 2003
Vitali Daniele, La necropoli di Monte Tamburino a Monte Bibele (Studi e scavi, 19), Bologne, 2003.
Vitali, Guidi et Minarini 1997
Vitali Daniele, Guidi Federica et Minarini Laura, « La stipe votiva di Monte Bibele (Monterenzio, Bologna) », in Pacciarelli Marco (dir.), Acque, grotte e Dei, Musei : 3000 anni di culti preromani in Romagna, Marche e Abruzzo, Catalogo della mostra, Musei civici di Imola, 1997, Ancône, 1997, p. 127-153.
Zannoni 1876
Zannoni Antonio, Gli scavi della Certosa di Bologna, Bologne, 1876.
Zuffa 1949-1950
Zuffa Mario, « Antichità del podere Malatesta (Casalfiumanese) », Emilia preromana : rivista del Centro emiliano di studi preistorici, 2, 1949-1950, p. 97-129.
Notes de bas de page
1 Pour davantage d’informations sur la nécropole, voir les rapports publiés dans les MEFRA 2001 à 2011.
2 Datations proposées par Daniele Vitali et Thierry Lejars dans le rapport de fouille 2007 (inédit).
3 Pour la nécropole, voir Vitali, 2003, et pour la stipe votiva voir Vitali, Guidi et Minarini, 1997.
4 Treize individus au total proviennent de l’habitat parmi lesquels une fibule de type Certosa en alliage cuivreux perdue (n° 74) et une fibule fragmentaire en alliage cuivreux dont subsistent seulement l’ardillon et le ressort (n° 96).
5 Cette analyse typologique des fibules s’inspire de Guillaumet, 1984.
6 Granulométrie d’après l’échelle de Wentworth, couleur en surface et en fracture, traitements de surface et décors, techniques de façonnage et de cuisson.
7 Principe de classification mis en place par Jean-Paul Morel (Morel, 1981). La typologie de la céramique de l’habitat de Monterenzio Vecchio est développée dans Apostolides, 2015-2016.
8 Les exemplaires trouvés dans la tombe 1886 Cassa dei Risparmi et la tombe 41 de la nécropole de Montericco d’Imola (type 3) comportent un décor à rapprocher des cruches de Monterenzio Vecchio.
9 Concernant l’âge du Bronze cycladique, un petit vase exposé au Musée archéologique d’Athènes (n° 5748), provenant de Mélos, présente ce schéma iconographique. Pour le cratère à couvercle de Vulci, voir Pallottino, 1992, p. 130, n° 107.
10 Pour davantage d’informations, voir Rossi, 2005.
11 La conservation lacunaire de la majorité des fragments comportant un graffite ne permet pas d’identifier avec certitude toutes les formes de récipients hormis le bol.
12 Trois se situent sous le pied, deux sur la face externe de la panse et un seul sur la face interne de la panse.
13 Deux sous le pied et un sur la face externe de la panse.
14 Localisés sous le pied et sur la face externe de la panse.

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