Cahier iconographique
p. 101-126
Texte intégral
Fig. no 1 : Théâtre du Chêne Noir, ancienne église du couvent Sainte‑Catherine
Le théâtre du Chêne Noir s’est installé en 1971 dans l’ancienne chapelle Sainte-Catherine, qui était jusqu’alors utilisée comme garage automobile. Ce couvent de sœurs cisterciennes s’était fixé ici au milieu du XIIIe siècle, par la volonté de l’évêque Zoen Tencarari qui y fut enterré. À la fin du XIVe siècle, la protection du cardinal Hugues de Saint-Martial permit d’édifier la vaste chapelle qui subsiste aujourd’hui. Ici comme dans de multiples lieux d’Avignon, le théâtre a aidé à retrouver le patrimoine médiéval de la ville.
© Paul Payan
Fig. no 2 : Isidore Dagnan, Vue d’Avignon et du Pont Saint‑Bénézet, 1833
Avignon, Musée Calvet, Inv. 836.28. Acquis en 1836 par la Fondation Calvet.
Sous le regard des visiteurs romantiques du début du XIXe siècle, peintres et écrivains, les ruines d’Avignon prennent des teintes sombres et tragiques, celles d’un Ancien Régime révolu et rejeté. On commence pourtant à goûter le charme de ces vieilles pierres, et à redécouvrir un Moyen Âge d’évasion et de rêves.
© Fondation Calvet
Fig. no 3 : Le Palais des Papes et la cathédrale Notre-Dame-des-Doms
La cathédrale Notre-Dame-des-Doms et le Palais paraissent confondus dans un même ensemble, alors que la cathédrale est beaucoup plus ancienne (XIIe s.) et qu’elle a longtemps incarné le pouvoir dominant de l’évêque, dans une ville partagée entre plusieurs seigneurs. Le Palais a été édifié à partir de l’ancien palais épiscopal, d’abord transformé par Jean XXII, puis radicalement agrandi sous Benoît XII (1334-1342) et Clément VI (1342-1352). L’actuelle place du Palais n’existait pas au XIVe siècle. Elle a été dégagée au début du XVe siècle, sur l’ordre de Benoît XIII, afin de créer un glacis défensif pour renforcer la protection de l’édifice.
© Paul Payan
Fig. no 4 : Palais des Papes, la Chambre du Pape
Située dans la tour principale du Palais édifié sous Benoît XII, la chambre du pape est agrémentée d’une étonnante décoration profane aux motifs de rinceaux végétaux peuplés d’oiseaux et de petits animaux, qui rappelle que le « palais vieux » n’avait pas l’austérité qu’on lui prête parfois.
© Fabrice Lepeltier
Fig. no 5 : Pontifical de la curie romaine (début XIVe s.)
Avignon, Bibliothèque municipale, ms. 203, fol. 1. ;
Ce manuscrit destiné à guider la liturgie pontificale comporte une décoration typiquement italienne et a certainement été ramené de Rome au début du XIVe siècle par le cardinal Jacopo Stefaneschi, alors le plus influent des prélats italiens à la cour d’Avignon. Grâce à lui, les liens artistiques avec l’Italie sont maintenus.
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Fig. no 6 : Vierge en ivoire, 1er quart du XIVe s. (?), Ivoire sculpté et peint
Villeneuve-lez-Avignon, Musée Pierre-de-Luxembourg ;
Cette délicate statuette sculptée dans une défense d’éléphant est caractéristique du raffinement de la sculpture française de la fin du XIIIe siècle. Venue probablement de Paris, elle se retrouve à Villeneuve dans les collections du cardinal Arnaud de Via. Les palais de ces grands princes d’Église sont des lieux propices à la rencontre de productions artistiques variées et de très grande qualité.
© Villeneuve-lez-Avignon, Musée Pierre-de-Luxembourg / Jean‑Luc Maby
Fig. no 7 : Psautier-Livre d’Heures (v. 1340)
Avignon, Bibliothèque municipale, ms. 121, fol. 7. ;
Ce somptueux manuscrit était peut-être destiné à un couple picard, mais il ne fait guère de doute qu’il a été réalisé à Avignon dans ces nouveaux ateliers d’enlumineurs où se mêlent des influences diverses : un style italien sensible dans le traitement des architectures et de certains personnages, et une délicatesse aristocratique qui évoque plutôt le style français, visible ici dans le combat entre un chevalier et un cavalier maure.
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Fig. no 8 : Simone Martini, Frontispice du Virgile de Pétrarque (enluminure, v. 1340)
Milan, Bibliothèque Ambrosienne, ms. A79, fol. 1v. ;
Cette délicate miniature a été peinte à la demande de Pétrarque par le célèbre peintre siennois Simone Martini, venu à Avignon achever sa carrière. Elle était destinée à servir de frontispice à un manuscrit de Virgile que possédait Pétrarque. La capitale pontificale était alors propice à la rencontre d’artistes talentueux, cherchant dans l’Antiquité les ferments de l’innovation.
© Veneranda Biblioteca Ambrosiana / Gianni Cigolini / Mondadori Portfolio / Bridgeman Images
Fig. no 9 : Simone Martini, Fresques du tympan de la cathédrale Notre‑Dame‑des‑Doms (v. 1340)
Avignon, Palais des Papes ;
Simone Martini n’a pas travaillé pour la décoration du Palais, mais il est l’auteur des fresques ornant le tympan de la cathédrale Notre-Dame-des-Doms. Très dégradées, elles ont depuis été déposées pour être exposées au Palais. Le dessin préparatoire, ou sinopie, permet de mesurer le talent de l’artiste et l’innovation iconographique d’une Vierge à l’Enfant dite « d’humilité ».
© Fabrice Lepeltier
Fig. no 10 : Grande Chapelle du Palais des Papes
L’agrandissement du Palais voulu par Clément VI comprenait un véritable défi pour le maître d’œuvre Jean de Louvres : édifier la Grande Chapelle pontificale à l’étage, au-dessus de la salle de la Grande Audience. L’immense espace ainsi dégagé, soutenu par un énorme contrefort enjambant la rue Peyrolerie, permettait de déployer tout le faste de la liturgie pontificale et les innovations musicales de l’ars nova.
© Fabrice Lepeltier
Fig. no 11 : Palais des Papes, Chambre dite du Cerf
Dans la nouvelle tour de la Garde-Robe, accolée à la tour du Pape, Clément VI a aménagé là son studium, un espace de retrait et de travail, orné d’un décor riche et complexe représentant toutes les formes de chasse et de pêche, dont une chasse au cerf qui a donné son surnom à cette chambre. On a pu y lire la représentation allégorique du pouvoir du souverain pontife sur le monde et la nature.
© Fabrice Lepeltier
Fig. no 12 : Palais des Papes, Chapelle Saint‑Martial
Clément VI a confié à son peintre officiel, Matteo Giovannetti, la décoration des deux petites chapelles de la tour Saint-Jean, donnant sur les espaces de réception du Palais. Dans celle-ci, il fallait raconter avec précision la légende peu connue de saint Martial, présenté comme l’évangélisateur des Gaules, une manière de justifier en images la présence pontificale à l’ouest des Alpes.
© Fabrice Lepeltier
Fig. no 13 : Tombeau d’Innocent VI. Villeneuve‑lez‑Avignon, Chartreuse
On ne connaît pas de réels portraits des papes d’Avignon. Les gisants de leurs tombeaux restent la trace la plus proche de leur physionomie. Celui d’Innocent VI, situé dans la chartreuse qu’il avait fondée à Villeneuve sur l’emplacement de son palais cardinalice, est le mieux conservé.
© Fabrice Lepeltier
Fig. no 14 : Ancienne livrée du cardinal Annibale di Ceccano
La vingtaine de cardinaux qui entourent le pontife sont les grands princes de l’Église, souvent critiqués pour leur train de vie fastueux. D’abord logés dans des maisons réquisitionnées, d’où le terme de « livrées », ils se font construire rapidement de véritables palais richement décorés. Celui du cardinal Annibal di Ceccano, transformé aujourd’hui en bibliothèque municipale, est un des mieux préservés.
© Paul Payan
Fig. no 15 : Avignon dans le manuscrit de Pierre Salmon, Réponses à Charles VI et Lamentations (v. 1400)
Paris, BnF, fr. 23279, fol. 81. ;
Cette miniature montre comment l’on pouvait imaginer Avignon depuis Paris, à la fin du XIVe siècle : une ville dense où se serrent églises et riches demeures, entourée de remparts et surplombée d’un palais représenté ici comme un château fort du Nord.
© Bibliothèque nationale de France
Fig. no 16 : Église Saint-Didier
Cette vieille église paroissiale d’Avignon fut reconstruite entièrement en 1356 grâce au don laissé par le cardinal Bertrand de Deaux dans son testament. Le nouvel édifice est caractéristique d’un gothique méridional, où les formes venues du Nord se combinent aux traditions locales fidèles à la simplicité des espaces et à la rigueur du mur.
© Paul Payan
Fig. no 17 : Ancienne église du prieuré-collège de Saint‑Martial
Le prieuré-collège de Saint-Martial est une des rares fondations religieuses liées à la papauté d’Avignon, au temps où la rivalité du Schisme donnait à la ville un nouvel enjeu. Il abrita notamment le tombeau du cardinal de La Grange, et l’architecture résolument gothique de son chœur témoigne de l’influence grandissante de la France.
© Paul Payan
Fig. no 18 : Page du manuscrit d’Opicino de Canistris
Bibliothèque Vaticane, Vat. Lat. 6435, fol. 53v. ;
Cette fascinante carte anthropomorphe de la Méditerranée est l’une des nombreuses dessinées par Opicino de Canistris en 1337, dans le secret de son logement avignonnais. Outre le désarroi psychologique de son auteur, cette œuvre ésotérique et mystique montre surtout une remarquable maîtrise de la cartographie et une vision symbolique du monde exprimant les espoirs et les désillusions suscités pas le spectacle de la cour pontificale d’Avignon.
© Biblioteca Apostolica Vaticana
Fig. no 19 : Anonyme, Pierre de Luxembourg (fin XVe s.)
Avignon, Musée du Petit Palais ;
Le souvenir de ce jeune homme était encore très vif à Avignon au moment de la réalisation de ce tableau. Le cardinal Pierre de Luxembourg, venu de la région de Metz, n’a passé pourtant que quelques mois dans la ville, avant de mourir à Villeneuve le 2 juillet 1387, âgé seulement de 17 ans. Mais sa piété maladive et sa charité démesurée, en contraste complet avec le spectacle des grands prélats de la cour, lui ont acquis une popularité immense, et il fut à sa mort immédiatement considéré comme un saint par une population avide de miracles.
© Fabrice Lepeltier
Fig. no 20 : Place des Corps-Saints, chapelle Saint‑Michel et de Tous les Saints et couvent des Célestins
Conformément à sa volonté, Pierre de Luxembourg fut enterré ici, dans le cimetière des pauvres, contre la chapelle de Tous les Saints. C’est là qu’est venue quelques années plus tard Marie Robine, pour vivre en recluse à proximité du saint. C’est aussi pour entretenir sa mémoire que le pape Clément VII décida la fondation d’un couvent de célestins. Celui-ci doit beaucoup aux dons venus de la cour de France, ce qui explique le style très septentrional de l’église au plan trop ambitieux pour être achevé dans le contexte tendu du Grand Schisme.
© Paul Payan
Fig. no 21 : Chronique de Giovanni Sercambi (v. 1400)
Lucques, Bibliothèque de l’Archivio di Stato, ms. 107, fol. 101v. ;
Ce dessin illustrant la chronique lucquoise de Giovanni Sercambi évoque le siège du Palais en 1398, à la suite de la soustraction d’obédience française. En dépit de simplifications, le dessinateur italien semble très bien renseigné sur la configuration des lieux et le déroulement de l’épisode, accentuant l’opposition entre les armes du pape et celles du roi de France, de chaque côté du pont dont ce dessin constitue la plus ancienne représentation connue.
© 2021. Photo Scala, Florence - courtesy of the Ministero Beni e Att. Culturali e del Turismo
Fig. no 22 : Peñíscola
L’histoire de la papauté d’Avignon se termine sur ce rocher dominant la mer, au sud de Barcelone, dernier refuge de Benoît XIII. Il y avait fait transporter une partie du trésor et de la grande bibliothèque du Palais. Après sa mort en 1422, un pâle successeur conservera encore la tiare quelques années sous le nom de Clément VIII, avant de faire sa soumission au légat Pierre de Foix en 1429.
© Paul Payan
Fig. no 23 : Enguerrand Quarton, Le Couronnement de la Vierge, huile sur toile marouflée sur bois (1453‑1454)
Villeneuve-lez-Avignon, Musée Pierre-de-Luxembourg ;
Ce grand retable destiné à orner la chapelle funéraire du pape Innocent VI dans la chartreuse de Villeneuve a été commandé à Enguerrand Quarton, un peintre venu du Nord mais ayant fait toute sa carrière en Provence. Il est un des grands représentants de ce que les historiens de l’art ont appelé « l’école d’Avignon », preuve de la persistance d’un fort dynamisme artistique et culturel plusieurs années après le départ de la cour pontificale. Ici, le peintre s’est plu à évoquer le paysage de Villeneuve et d’Avignon dans la partie basse de la composition, censée représenter Rome et Jérusalem.
© Villeneuve lez Avignon, Musée Pierre‑de‑Luxembourg / Jean‑Luc Maby
Fig. no 24 : Petit Palais
Le Petit Palais fut la résidence de l’évêque d’Avignon, dépossédé par Benoît XII de son palais jouxtant la cathédrale. L’élégante façade renaissante a été réalisée à la fin du XVe siècle à la demande du légat Giulano Della Rovere, brillant prélat amateur d’art, et qui devint plus tard à Rome le pape Jules II.
© Empreinte d’ailleurs
Fig. no 25 : Retable Peruzzi (v. 1480)
New York, Metropolitan Museum of Art ;
Les commanditaires de ce grand retable, offert au couvent des Franciscains d’Avignon, et qui sont représentés au premier plan, font partie d’une grande famille d’origine italienne, les Peruzzi, tellement bien intégrés à la fin du XVe siècle à la société avignonnaise qu’ils ont transformé leur nom en Pérussis. La ville d’Avignon qui apparaît en arrière-plan reste alors une ville singulière, marquée par la présence monumentale du Palais et appartenant toujours au pape, séparée du royaume de France par un pont immense et un fleuve turbulent dont la possession sera longtemps disputée.
Domaine public
Fig. no 26 : Programme de la Semaine d’art en Avignon, 1947
Que faire d’un palais aussi gigantesque et impressionnant ? L’installation des militaires après la Révolution lui a sans doute évité la démolition, et leur départ a permis par de lourdes restaurations de retrouver peu à peu son aspect médiéval. Mais c’est finalement le théâtre, à la suite de l’expérience audacieuse de Jean Vilar en 1947, qui est parvenu à le réinvestir, non sans hésitations ni difficultés, lui redonnant par un usage détourné sa dimension ostentatoire et littéralement spectaculaire.
© Association Jean Vilar
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