Envoûtant Ventoux
|II – Le Ventoux, lieu d’observation scientifique
Texte intégral
1Le Ventoux n’est pas seulement une terre sacrée et magique, qui s’annonce paisiblement de loin. Ceux qui y montent sont aussi des observateurs, venant approcher de plus près la nature, la flore, la faune, la pierre et le ciel. Leur approche est plus scientifique que spirituelle, même s’ils n’hésitent pas à chaque fois à magnifier la dimension spirituelle du lieu. Par le sud, l’ascension est facilitée par une route ouverte depuis 1882. On peut aussi venir par le nord depuis Malaucène, sur une route inaugurée par Édouard Daladier lui-même le 4 septembre 1932, en présence de M. Monis, Préfet de Vaucluse, M. Louis Cornillac, Conseiller Général et Maire de Malaucène, le docteur Paul Pamard, Président de l’Automobile- Club de Vaucluse et M. Languereau, ingénieur en chef du Département. Une dernière route permet, depuis 1950, de se rendre de Sault au Chalet Reynard, pour rattraper ensuite la route de Bédoin menant à l’Observatoire.
2Depuis le sud, la route commence sur une plaine légèrement inclinée depuis le lieu-dit Saint Estève, où dominent des rangées de ceps, des oliviers et des cerisiers. Puis d’un seul coup, après un virage en épingle à cheveu, qui faisait la joie des participants aux courses de côte du Ventoux, la route grimpe en sinuant entre les chênes et les épineux. Le rythme de la course est donc modifié, de même que le paysage. Il faut maintenant « négocier » les virages entre les parois rocheuses (7 au total). Un peu plus loin, les cèdres de l’Atlas, majestueux, font leur apparition. Après quelques kilomètres, on devine entre les branchages le pavillon Rolland, avec sa citerne, qui servait de refuge au cantonnier. Ensuite, le hêtre, plutôt de petite taille, devient dominant et se remarque particulièrement en automne avec son feuillage chaud et doré, mêlé à celui, également flamboyant, des érables. Après quelques nouveaux virages, on sort d’une forêt de conifères (pins noirs), mêlés à des chênes, à des grenadiers et à des églantiers, pour découvrir au milieu des plissements des combes caillouteuses le chalet Reynard, avec sa petite station de ski.
L’accès au pierrier
3On poursuit alors l’ascension jusqu’à la Fontaine de la Grave – dont l’eau, qui ne tarit jamais, sort à la température constante de 7 degrés -et son pavillon adjacent, servant de refuge au cantonnier et à tous ceux qui le souhaitent. La végétation se fait maintenant plus rare et rase. Des plaques de genévriers survivent au milieu des pierres. Parfois, un arbre isolé ou deux parviennent à se maintenir : dans le cailloutis, quelques pins à crochets – souvent de petite taille – se font une place, souvent courbés sous l’effet du vent dont on devine la violence à cette hauteur ; enfin, la pierre devient omniprésente et, même tranchante, en changeant d’ailleurs de couleur ; auparavant grise, elle apparaît parfois jaune sous le soleil, enfin plus blanche sur les hauteurs, donnant ainsi au Ventoux l’impression, depuis la plaine, qu’il est recouvert à toute époque d’une mantille de neige. Mais ce n’est qu’illusion. Le caillou se fait aussi plus petit, à la suite d’une désagrégation continue et accélérée par le gel, la neige, la pluie et le vent. Lorsqu’on marche dans le pierrier, on entend une sorte de cliquetis qui, immanquablement, fait penser à un bruit métallique, comme si on progressait avec des chaînes aux pieds. On désigne cet endroit la « casse », obtenue par des ruissellements intensifs et des dégels succédant aux gels, par opposition aux « éboulis », qui ne se forment qu’à la faveur d’une chute de pierres provoquée par la pesanteur à l’occasion, le cas échéant, d’un orage. Il est toujours préférable de suivre la route, les chemins ou les petits sentiers – tel le sentier du facteur, qui mène au sommet –, plus accessibles, que de se lancer dans le pierrier instable, où la chute serait fatale.
4Brusquement, dans cet univers de pierres tourmentées et nues, la tour de l’Observatoire fait son apparition, comme une boussole, un phare ou une sorte de clocher, mais sans le village qu’il protège habituellement. C’est une image saisissante et inoubliable que de voir cette unique tour au milieu d’une mer de caillou, née de la casse ou des éboulis. Au gré des virages, elle disparaît puis réapparaît, un peu plus large, un peu plus haute.
5Au niveau du Col des Tempêtes, la chaine des Alpes apparaît déjà au nord, par morceaux, puis se fera ininterrompue au sommet du Ventoux. En été, souvent sous un ciel limpide, on imagine mal qu’à cette hauteur 1 912 mètres – les tempêtes de pluie et de neige se déchainent sur le pierrier, avec le renfort de la foudre qui « laboure les flancs du Ventoux », selon l’expression de Jean-Henri Fabre. Dans le fracas de l’orage, le Ventoux est comme un grand vaisseau en perdition, avec comme voilures ses rochers blancs. Le vent, qu’aucune montagne voisine ne freine, ne détourne ou n’arrête, s’y exprime avec une violence inouïe – avec des pointes de plus de 250 km/h, voire plus de 300 km/h –, à tel point qu’il faut parfois se tenir pour ne pas tomber. Exposé une fois à une tempête de vent, à la suite d’une ascension collective et nocturne avec le service sportif de l’Université d’Avignon, je m’étais réfugié dans la camionnette frileuse qui nous attendait. Mais le véhicule était secoué comme un panier à salade qu’on agite nerveusement !
Les cinq étages de la végétation sur le Ventoux
- 1 V. le document intitulé : Ventoux.pdf, une montagne d’exception, Muséum d’histoire naturelle de Mar (...)
6On s’est précédemment contenté de suivre la progression d’une ascension du Ventoux en montrant ses difficultés et, surtout, l’évolution de la végétation. Ce travail avait déjà été fait de manière scientifique en 1811 par Esprit Requien (1788-1851), fondateur du Musée d’Histoire naturelle d’Avignon. Il avait alors démontré que la végétation du Ventoux s’étage en altitude selon cinq zones, de 300 mètres au piémont jusqu’au sommet1.
7L’étage méditerranéen, le premier, occupe le flanc sud jusqu’à 800 mètres, mais ne dépasse pas 600 mètres sur l’ubac. On y trouve une dominante de chênes verts. Dans cette zone, les pins d’Alep, les chênes Kermès, les genévriers de Phénicie, les cades, les nerpruns Alaterne, les pistachiers térébinthes se mêlent aussi aux garrigues et aux pelouses à brachypodes rameux.
8Le deuxième étage, dit collinéen, remonte jusqu’à 1 000 mètres. C’est le domaine du chêne blanc, du pin sylvestre, du sorbier domestique, de l’érable de Montpellier, de l’érable à feuille d’obier, de l’alisier blanc et du buis.
9Le troisième étage, dit montagnard (1 000-1 600 mètres), accueille le hêtre rabougri en y associant sur le versant nord des sapins, du buis, des lys Martigon, des chèvrefeuilles des Alpes, des framboisiers, des églantiers (de montagne, de pimprenelle et des Alpes). Sur le flanc sud, plus sec, les espèces végétales se font moins nombreuses : on trouvera, par exemple des renoncules de montagne, des néotties et des euphorbes douces. La prairie du Mont-Serein est un écrin qui abrite des gentianes jaunes, des gentianes printanières et des gentianes des champs. Quelques ifs se mêlent aux hêtres.
10Le quatrième étage, dit subalpin, commence vers 1 600 mètres. Il est l’univers des pins à crochets, tordus par la force du vent, et des genévriers prostrés. Les clairières abritent le panicaut épine blanche. Localement trois plantes rares émaillent ce milieu : la fougère de Villars, l’actée en épi, le sceau de Salomon à feuilles verticillées.
11Le dernier étage est constitué de la calotte sommitale, également appelée étage pseudo-alpin. On y trouve des pelouses d’altitudes avec une riche flore alpine sous influence méditerranéenne : ibéris de Candolle, alysson à feuilles en coin, doronic à grandes feuilles, euphorbe de Loiseleur, pavot orangé, pensée du Mont Cenis...
L’horizon vu du Ventoux
12Une fois arrivé au sommet, on ne peut que s’émerveiller de l’horizon à perte de vue, en réalité des horizons s’ouvrant de tout côté. Joseph Guérin (1773-1850) considérait déjà en 1829 qu’aucune montagne n’offrait un si bel observatoire. Effectivement, même les montagnes plus hautes des Alpes ou des Pyrénées n’offrent pas un tel panorama, aussi ouvert (360 degrés), avec des horizons aussi lointains et aussi diversifiés. La raison de cette exemplarité tient à la situation du Ventoux, qui apparaît comme une montagne seule au milieu « d’un pays qui n’est pas le sien », pour reprendre l’expression de Jean Giono.
13Au sud, par temps clair, on distingue au loin la mer Méditerranée, de même que Marseille, Notre Dame de la Garde et l’étang de Berre. Les reflets d’argent de l’eau se détachent des teints mats et colorés des terres et des habitats.
14À l’ouest, le lacet du Rhône, sorte de ruban argenté, et Avignon, véritable amas de maisons concentrés, se devinent aisément, à la suite d’une succession de petites villes et de villages, de forêts, de prés, de vignes et de routes dessinées comme des traits, avec une association et une déclinaison de couleurs vertes, brunes et jaunes.
15C’est du nord à l’est que le paysage change du tout au tout. Ce ne sont qu’échines tranchantes et déchirures immaculées dans un massif de fonte : se dévoilent à l’œil, comme des convulsions enregistrées sur un électroencéphalogramme, plusieurs chaînes de montagnes, étagées les unes par rapport aux autres, parfois couvertes de forêts vertes, souvent sombres dans les ravins, drapées de neige étincelante pour les plus élevées et irradiées de lumière. La dernière ligne de montagnes coupe l’horizon comme une scie irrégulière : « Des chaînes prolongées, des sommets dentelés, des cimes en forme d’autels, de dômes, d’obélisques, de pyramides, s’élancent de toutes parts », écrivait Joseph Guérin dans son Panorama du Vaucluse, d’Avignon, du Mont-Ventoux et du Col- Longet (1829).
L’émerveillement du sommet
16Tous les ascensionnistes sont restés au sommet un long moment, sous l’effet de l’émerveillement. Le bien-être physique, qui fait suite à l’effort prolongé du marcheur ou du cycliste, se mêle au bonheur de la rétine, au cœur comblé et à la paix retrouvée. L’air froid de l’altitude vous remplit les poumons, mais il vous procure de la douceur. Le silence des cimes participe de cette harmonie avec la Création. Un accord profond vous lie à un paysage sans personne, à la fois désincarné et intrinsèquement naturel. C’est le seul endroit où on ne voit plus le sommet, puisqu’on y est ! Curieusement, là-haut, après un sentiment de domination du monde, on devient réceptif en se laissant envahir par les choses. Le temps s’estompe, à tel point qu’on a le sentiment d’être pleinement disponible ; l’être disparaît, pour accepter de ne plus être au centre du monde ! Il fait harmonieusement partie du tout, dans une sorte de paix triomphante. Le soleil vous pénètre doucement et finit par vous envahir pleinement ; adieu, les soucis, les chicaneries, les révoltes, les remords, les regrets, les rancoeurs !
Identification des sommets voisins et lointains
17Revenons aux réalités présentes ; du sommet du Ventoux, l’observation de la partie montagneuse mérite maintenant d’être affinée ; en partant du nord, à droite de Vaison la Romaine et de Pierrelatte, se dressent le Tarnague (1 411 mètres), le Mont Gerbier de Jonc (1 551 mètres) et le Mont Mézenc (1 753 mètres).
18Entre Montélimar et Valence apparaissent la Lance (1 338 mètres) et le Mont Pilat (1 432 mètres).
19Plus à droite, dans la direction de Saint Léger du Ventoux et de Buis Les Baronnies – que l’on distingue réellement –, on identifie au loin le Veyrou (1 589 mètres) et la Montagne d’Angèle (1 606 mètres).
20Dans la direction de Grenoble, le massif du Vercors dévoile le Grand Veymont (2 341 mètres) et le Mont Aiguille (2 085 mètres).
21Dans la chaîne de Belledonne, domine le Taillefer (2 857 mètres). Le Pic du Lac blanc se dresse un peu plus à droite (2 980 mètres), un peu avant la Tête de l’Aupet (2 627 mètres), qui annonce le Massif du Dévoluy, fermé à droite par la Meije (3 983 mètres). On tombe déjà dans le massif de l’Oisans, puis dans celui des Ecrins, où s’étirent la Barre des Écrins (4 102 mètres) et le Pic de Coolidge (3 375 mètres).
22En dirigeant son regard un peu plus à l’est, apparait le Mont Pelvoux (3 914 mètres) au milieu du massif du même nom.
23Dans la perspective s’ouvrant sur le Queyras, l’œil habitué devinera le Mont Viso (3 841 mètres). Puis vers l’Est, s’affichent la Tête de Moyse (3 109 mètres) et les 3 Évêchés (2 818 mètres).
Le ciel vu du Ventoux : l’Observatoire historique de 1882
- 2 Galas (Jacques), « Construire là-haut », Les Carnets du Ventoux, Juin 1993, p. 16.
24À la fin du XIXe siècle, le site exceptionnel du Ventoux justifia l’installation d’un observatoire météorologique2 ; plusieurs ascensions collectives permirent de se persuader de son utilité, après les déclarations favorables du docteur Alfred Pamard (1837-1920), Président de la Commission météorologique du Vaucluse, dès 1875.
- 3 Longuet (Jean-Denis), « Le Ventoux du temps des Profanes », Les Carnets du Ventoux, 4e trimestre 19 (...)
25La première expédition eut lieu du 25 au 26 juillet 1876, sous la houlette de l’inspecteur des forêts Grimbold. Les premières observations échouèrent en raison du mistral, qui ne permettait pas de tenir debout ! Une autre ascension eut lieu les 13 et 14 août 1878, en présence du directeur du bureau central de météorologie, venu de Paris. Cette fois-ci, les observations météorologiques purent se tenir. La nuit se fit, même pour les citadins, dans la paille du Jas des Pèlerins ! Un feu d’artifice fut lancé pour avertir les habitants de Bédoin du succès de cette échappée. Parallèlement, un avant-projet de route fut élaboré en 1875 par M. Morard, ingénieur de l’arrondissement avec la collaboration de M. Vinet, agent voyer et Gabriel Provane, chef cantonnier de Bédoin. En 1877, l’adjudication de la route fut effectivement donnée à Bédoin et Gabriel Provane fut chargé, au nom de sa ville, de la surveillance des travaux, auxquels participèrent MM. Morard et Vinet3.
- 4 Ughetto (André), « Dossier : Les routes d’accès au Mont Ventoux », Les Carnets du Ventoux, 4e trime (...)
- 5 La commission est présidée par le docteur Alfred Pamard ; le vice-président est Marius Bouvier ; le (...)
26En 1880, donation est faite au département par Bédoin d’un vaste terrain de près d’un hectare pour envisager la construction de cet observatoire (décret du 25 février 1880). On commença d’abord par consolider et agrandir un chemin d’accès dès le printemps 18804. La chaussée empierrée devait avoir 6 mètres de large et un fossé côté montagne, pour le protéger des eaux de ruissellement. Sur l’initiative convaincante de la commission météorologique du Vaucluse5, le bâtiment fut ensuite construit entre 1882 et 1886, à l’aide de pierres de taille et de moellons prélevés dans des carrières situées près de la fontaine de la Grave. On s’aperçut plus tard que ces pierres étaient sensibles au gel ; c’est pourquoi on les remplaça en 1897, notamment pour les parties particulièrement exposées, par de la pierre de Crillon.
- 6 On leur doit d’ailleurs une Notice sommaire sur l’Observatoire du Ventoux, Avignon, Ed. Seguin frèr (...)
- 7 Jacques Galas, préc., p. 16.
27Le docteur Alfred Pamard (1837-1920) et l’ingénieur des Ponts et Chaussées Marius Bouvier (1828-1898)6, chargés par cette commission météorologique de faire aboutir le projet, surent intéresser à sa réalisation toutes les autorités nationales (ministères de l’Instruction Publique, de l’Agriculture et des Travaux Publics), le Conseil Central de Météorologie ayant vanté dès 1879 l’opportunité de construire un tel Observatoire. Un grand nombre de sociétés, de conseils généraux, de communes, et même de particuliers, apportèrent aussi à cette œuvre leur contribution financière : « Le budget, monté de bric et de broc mais dans l’allégresse, montre qu’on a pu soutirer péniblement 50 000 F. de subventions à l’État, 5 500 F. aux départements voisins, 6 558 F. aux communes (…). Les dons individuels atteindront le niveau de 25 000 F. Parmi les généreux donateurs, il faut signaler R.L. Bischoffsheim de Paris qui alloua royalement 10 000 F. et Melsens, l’homme du paratonnerre qui versa 2 500 F. (…) »7.
28Le 16 mai 1882, M. de Mahy, Ministre de l’Agriculture arriva sur le Mont Ventoux à bord d’une calèche attelée de quatre chevaux. Il vint poser la première pierre de l’Observatoire, après avoir participé à un déjeuner champêtre organisé au niveau de la Grave, en compagnie de près de 80 officiels, dont Ruelhens, conservateur de la bibliothèque royale de Belgique, et Favier, maire de Bédoin. Installé au point culminant le bâtiment initial fut creusé dans le roc, les débris ayant permis de créer le vaste terre-plein où vint aboutir la route d’accès. M. de Mahy déclara :
Je suis venu avec joie vous voir donner la loi au vent et à la tempête ! ». Dans son allocution, le docteur Pamard, très ému de voir l’aboutissement de ses démarches administratives et de ses efforts personnels, compara le futur observatoire à un « temple élevé à la science, à cette déesse qui grandit l’homme et le moralise.
29L’observatoire a été construit par l’entrepreneur Joseph Lyon, sur le plan des ingénieurs Bouvier et Morard, remanié par l’architecte du Département, M. Olagnier. Gabriel Provane fut aussi chargé pour le compte de la ville de Bédoin de surveiller les travaux d’édification de l’observatoire. En 1884, on demanda à François Auguste Blanc, qui allait s’installer en 1885 dans l’aile ouest (premiers éléments du bâtiment achevés), d’effectuer les premiers relevés météorologiques. Les débuts furent difficiles, les fils du télégraphe et les poteaux étant brisés par le vent et la glace. Mais un premier rapport sur les observations fut tout de même publié.
30Initialement nommé garde forestier à Saint Christol, François Auguste Blanc y avait rencontré une jeune fille, l’avait épousée puis conduite, en voyage de noces, au sommet du Ventoux. Ils y vécurent seuls, approvisionnés en vivres et charbon par un voiturier de Bédoin. Ils notaient quotidiennement, au prix d’une veille permanente, par les froids les plus vigoureux et les vents les plus violents, les relevés météorologiques réglementaires. Cinq ans plus tard, le couple eut un enfant, le premier à naître au sommet du Ventoux ! Le 27 juin 1889, François Auguste Blanc se rendit devant l’officier d’État-Civil de Bédoin pour lui déclarer la naissance d’un enfant qu’il voulait prénommer « Ventoux ». Ce prénom n’étant pas dans le calendrier, l’agent communal refusa de l’enregistrer. On accola donc à Ventoux le prénom du grand- père : cela donna « Philippe-Ventoux Blanc ».
« On a fienté sur le Ventoux »
- 8 Ughetto (André), « Dossier : Les routes d’accès au Mont Ventoux », Les Carnets du Ventoux, 4e trime (...)
31Jean-Henri Fabre a poussé ce cri d’indignation, un jour de septembre 1884, en découvrant horrifié, depuis son refuge de Sérignan, la construction jugée massive qui venait de se poser au sommet du Géant de Provence : « On a fienté sur le Ventoux »8.
- 9 Il existe sur l’aile est de l’observatoire une plaque indiquant : « En souvenir de deux enfants de (...)
32Dès 1886, la commission météorologique du Vaucluse fut d’accord pour que l’Administration des forêts dispose dans l’observatoire d’un logement de 4 pièces, deux au rez de chaussée, deux à l’étage, dans l’aile est du Bâtiment. Il y avait donc dans cette bâtisse aux allures de château un logement pour l’observateur, placé sous la hiérarchie du Ministère de l’Agriculture – parfois assisté d’un observateur auxiliaire – et un autre pour le personnel forestier, souvent de passage, notamment pendant les opérations de reboisement. À tel point que le deuxième observateur Pierre Provane9 (1875-1922) a longtemps été indemnisé pour entretenir pendant les longs mois des saisons froides le logement forestier. Il est intéressant de noter que ce logement forestier était, pour partie (2 pièces au rez-de-chaussée), mis à la disposition d’hôteliers indépendants dans le cadre d’une concession : François Vendran, aubergiste, en fit une annexe hôtelière. Camille Reynard, de Bédoin, disposa aussi pendant un temps de cette concession pour y ouvrir un café hôtel (concession sur la période 1897-1899). Finalement, le 20 septembre 1903, l’hôtel de l’Observatoire du Mont-Ventoux, situé près du virage de la dernière rampe menant à l’Observatoire et exploité par François Vendran – repris plus tard par son fils Raoul Vendran –, est inauguré. Huit chambres permettaient d’accueillir à la belle saison les touristes avides de grand air, invités à donner leur impression dans un livre d’or.
33On trouve dans le premier guide du touriste au Mont Ventoux, édité par Joseph Brun de Carpentras et rédigé par Moulinas (1895) une description complète du bâtiment de l’Observatoire, avant son extension en 1966 :
(L’édifice) a 30 mètres de long sur 10 mètres de large ; sa façade est orientée au Midi et abritée des vents du Nord. Il est formé de deux ailes et d’une partie centrale. Toutes les pièces sont voûtées. Deux citernes voûtées en maçonnerie sont adossées à l’Ouest de la façade. Elles contiennent 30 mètres cubes d’eau chacune et elles se remplissent facilement chaque année avec l’eau de pluie ou la fonte des neiges. Au centre est un escalier couvert donnant accès sur la plate-forme des instruments placés au Nord, derrière le bâtiment. Le tout est protégé par un paratonnerre Melsens, et un télégraphe met l’observateur en communication avec Carpentras. L’aile gauche est destinée au logement de l’observateur : l’aile droite au logement du garde forestier ; au centre est la salle d’hivernage pour les graines de vers à soie. Les fenêtres sont à double vitrage avec volets extérieurs. Les portes extérieures sont pleines et doublées de portes vitrées à l’intérieur. La plate-forme où se trouvent les instruments a 22 mètres de long sur 12 mètres de large. Les instruments avaient été fixés solidement au sol ou abrités autant que possible contre accidents.
34Malheureusement, la force du mistral, qui agglomérait du givre sur les instruments, en a fait tomber certains ou ployer les autres. À cette époque, il y avait sur la plate-forme d’observation, directement desservie depuis l’observatoire par un passage couvert – encore existant de nos jours –, le matériel suivant, en plus des aigrettes de paratonnerre : un anémomètre ; un actinomètre ; un évaporomètre ; plusieurs pluviomètres ; une girouette. C’est durant l’hiver 1886-1887 que des avaries importantes sont relevées au sommet, en raison d’un hiver de glace et de neige : 41 aigrettes du paratonnerre sont détruites, l’anémomètre est brisé, les girouettes en fer sont tordues. Dans l’immédiat, seul le paratonnerre est réparé et durant l’été 1888, M. Hondaille, professeur d’agriculture à Montpellier, viendra s’installer au sommet pour diriger les opérations de rétablissement des matériels.
35L’intérieur de l’observatoire ne fut véritablement achevé qu’à la fin des années 1880. Les baraquements en bois de La Grave, qui servaient aux travaux, furent remplacés par une maison cantonnière. En 1891, l’observateur obtint un véritable gros poêle en faïence. Le hangar à chevaux que l’on voit sur les cartes postales du début du XXe siècle fut construit en 1898.
36L’Observatoire a accueilli pendant la guerre 1914-1918 des militaires dans le logement forestier, alors que son service de météorologie fonctionna au ralenti, jusqu’à disparaître. En 1920, le président de la Commission météorologique du Vaucluse remercia son observateur, pour des raisons inconnues. Dans une note du ministère de l’Agriculture, on se demandait si l’on ne pouvait pas détacher sur ce poste un garde forestier :
Il faut quelqu’un qui ne craigne ni le froid, ni la solitude, qui est complète en hiver, bien qu’il n’y ait pas beaucoup de neige (…). Le travail n’est pas fatigant (…). Il exige une intelligence suffisante pour manier les quelques instruments assez primitifs que l’on a là-haut (…).
37L’État s’intéressa un peu plus au site de l’Observatoire et se fit concéder le 31 avril 1931 sur le logement initial un bail emphytéotique de 99 ans. Peu à peu, le service de météorologie se modernisa, puis fut transféré en 1968 dans de nouveaux locaux à Carpentras Serres. En plus d’un service d’observation météorologique, s’était adjoint dès le début des années 1930 un service de radiogoniométrie, destiné au radioguidage des avions. Le tourisme commença son essor. C’est à cette époque que la ville de Bédoin accepta de vendre aux propriétaires d’un grand hôtel d’Avignon 6 hectares sur le flanc sud du Ventoux, dans le secteur de Perrache, pour y construire un hôtel de luxe, « L’Hôtel de la Forêt », qui fut inauguré en 1931, mais qui se révéla rapidement un échec économique.
L’extension de l’Observatoire en 1966
38Le bâtiment annexé que l’on voit actuellement, avec sa tour de 42 mètres de hauteur surmontée d’une antenne importante, a été construit à l’ouest de l’observatoire initial. Édifié en 1966, il est actuellement affecté à la base aérienne 115 Orange-Caritat. Il accueille aussi un émetteur de télévision, construit au sommet du Ventoux dans les années 1960. Depuis 2007, cet émetteur diffuse la TNT.
- 10 Peyre (Olivier), « Le Gardien du phare », Les Carnets du Ventoux, Juin 1993, p. 21.
39La tour couverte de bois, qui surplombe les précipices vertigineux de Fonfiole, sert de relais hertzien10. Elle a été construite en 1955. Enfin, sur l’arête occidentale, un dernier bâtiment en forme de boule sur un présentoir – dit le Radôme – a été implanté en 1995 par la Direction générale de l’Aviation civile pour protéger un radar assurant la sécurité de l’espace aérien.
- 11 Étude géologique de la région du Ventoux, éd. C. Coulet et G. Masson, 1883.
40Sur l’une des façades du bâtiment initial est apposée une plaque rappelant l’ascension de Pétrarque. Une autre plaque évoque le souvenir du géologue Franz Leenhardt (1846-1922), qui s’était attaché à une analyse minutieuse du massif11 – et a laissé une carte géologique encore appréciée de nos jours. Mais bien avant que cet observatoire ne soit dressé sur ce lieu jugé très favorable pour l’étude de la météorologie, plusieurs savants s’étaient déjà aventurés sur le Ventoux pour y faire des expériences scientifiques et en livrer des éléments de physique, de géologie, de botanique et de naturalisme.
Une succession d’érudits et de savants
41Avant la fin du XVIIIe, on trouve quelques écrits d’érudits, de nobles, d’hommes d’église et de lettrés qui poursuivaient en même temps plusieurs recherches très diverses : histoire, géologie, astronomie, archéologie, numismatique, herboristerie, médecine. Leur mission était immense : ils devaient éclairer le peuple de leurs découvertes.
42En 1561, le botaniste Luigi Anguillaria vint examiner les plantes et fleurs présentes sur les pentes du Ventoux. De formation scientifique – il fit ses études de médecine à Montpellier –, Thomas Platter (1574-1628) laissa un premier écrit attestant lui aussi de sa volonté « d’herboriser » sur le Ventoux lors d’une ascension en 1598.
43Nicolas Fabri de Peiresc (1580-1637), Conseiller au Parlement de Provence, laissa ensuite une description complète de la grotte dénommée Baume de la mine, au nord du Ventoux, à proximité du lieu-dit le Contrat. Cette excavation, creusée de la main de l’homme, est souvent dite « Grotte de l’Or » et encouragea même nombre d’ascensions de personnes motivées par le lucre. Ce nom lui vient de la présence de pyrites de fer de couleur jaune. On pense qu’il s’agit de l’une de ces petites mines de fer que les Sarrazins avaient mises en exploitation vers le début du VIIème siècle.
44En 1711, le Père Antoine Jean de Laval (1664-1728) fit un voyage sur le Ventoux en vue de déterminer la hauteur et la latitude de cette montagne. De cet épisode, il reste un très joli texte publié dans Le journal de Trévoux de mai 1714. Le docteur Michel Darluc (1717-1783), adepte de la chimie et de la botanique, fit lui-même l’ascension du Ventoux, ce qui lui permit de lui consacrer plusieurs pages dans le premier des trois volumes de son Histoire de la Provence.
- 12 Le Mont Ventoux : Recueil de textes anciens et modernes, Graveson, Le Nombre d’Or, 1977, p. 211. ; (...)
- 13 Guérin (Joseph), Panorama d’Avignon, de Vaucluse, du Mont Ventoux et du Col Longet, Avignon, Guicha (...)
45Joseph Xavier Bénezet Guérin (1775-1850) fait également partie de ces savants du XIXe siècle qui n’hésitaient pas à couvrir plusieurs champs scientifiques. La liste de ses titres atteste de cette curiosité insatiable : Docteur en Médecine, Professeur de Physique au Collège Royal d’Avignon, Conservateur et Bibliothécaire du Muséum Calvet, Médecin de la Maison Royale de santé, Médecin honoraire de l’Hôpital Sainte Marthe, membre des Académies d’Avignon, Gottingue, Turin et de plusieurs autres Sociétés Savantes nationales et étrangères. Il a laissé de ses deux premières ascensions, le 12 janvier 1798 et le 9 janvier 1799, des témoignages instructifs, notamment sur le climat de la cime12. Les lignes qu’il a écrites à la suite de ses observations depuis le Mont Ventoux dans son ouvrage sur les panoramas du Vaucluse (1829) sont également précieuses pour la richesse des descriptions13. Elles sont d’ailleurs plus l’œuvre du naturaliste que du médecin. Du sommet du Ventoux, il indique distinguer au loin la mer (au sud), le Rhône (à l’ouest) et le Mont-Blanc (au nord-est). Si la mer peut effectivement être observée (de même que Marseille, Notre Dame de la Garde et l’étang de Berre), si le lacet du Rhône et Avignon se devinent, on peut remettre en cause sa dernière interprétation, personne n’ayant pu clairement identifier le Mont-Blanc dans la chaîne des Alpes qui se décline depuis le Mont-Ventoux.
46Avec Esprit Requien (1788-1851), on aborde une nouvelle période où la spécialisation des scientifiques est plus marquée. Plutôt que de s’intéresser à tout, cet éminent naturaliste s’adonne spécifiquement à la botanique, également à la minéralogie et à la biologie animale. Il laissera au Musée Calvet une collection immense : un herbier riche de 300 000 échantillons, un grand nombre de fossiles, cristaux, animaux empaillés, ainsi que les spécimens récoltés avec Jean-Henri Fabre (1823-1915), qui sera conservateur du musée de 1866 à 1873.
47Mais Esprit Requien, homme de terrain et d’observation, a peu écrit. Ses notes d’observations et ses herbiers permirent à Charles Martins (1806-1889), médecin, botaniste et géologue, de poursuivre ses travaux. Ce dernier ne fut pas insensible aux charmes du Mont Ventoux. Sa contribution à la connaissance de cette montagne tient dans deux travaux publiés dans la Revue des deux mondes : une Topographie botanique – largement inspirée des découvertes d’Esprit Requien –, et, surtout, un très bel article intitulé « Le Mont-Ventoux en Provence ».
- 14 Flahault (Charles), « Herborisation au Mont Ventoux en 1895 », Les Carnets du Ven- toux, 2e trimest (...)
48Charles Flahault (1852-1935), professeur de botanique et membre de l’Institut, fut connu pour ses travaux sur la flore, la végétation méditerranéenne et son intérêt pour les problèmes forestiers et le reboisement. Il a laissé de ses herborisations une série de lettres, notamment adressées à sa mère, dans lesquelles il raconte ses impressions, son enthousiasme et ses découvertes. Ses correspondances ont fait l’objet d’un ouvrage « Charles Flahault, Herborisations en zig-zag, souvenirs d’un botaniste » édité par les Presses du Languedoc à Montpellier en 1999. Il a parcouru le Ventoux du 7 au 16 octobre 1895 et a laissé de ce passage vauclusien plusieurs lettres pittoresques et très détaillées14.
49Mais celui qui a sans doute le mieux contribué à la connaissance de la botanique du Ventoux est Jean-Henri Fabre (1823-1915) qui, toute sa vie durant, a habité dans l’horizon du Ventoux. Mort à 92 ans, ce scientifique de premier ordre ne connut véritablement la reconnaissance et la gloire qu’à la fin de sa vie ; le Président de la République lui-même vint lui rendre visite dans son harmas de Sérignan.
50Jean-Henri Fabre fit sa première ascension du Mont-Ventoux à 19 ans suivie de près de 60 autres ascensions, souvent accompagné d’amis ; sa première expérience a été relatée dans l’Indicateur d’Avignon du 29 septembre 1842. En août 1865, il publia à la suite d’une nouvelle ascension du Ventoux – la vingt-troisième – « Souvenirs entomologistes », où il livra ses observations avec un art achevé qui fait encore l’admiration. Son constat est parfois désarmant : « On ne saurait mieux comparer le Ventoux qu’à un tas de pierres concassées pour l’entretien des routes ». Mais il avait un sens acéré de l’observation, un carnet de notes et un crayon qui ont marqué les esprits. Il savait remarquer entre les cailloux les plantes et les fleurs rares : « Encore épargné par la dent de troupeaux, le sommet du Ventoux est en juillet un vrai parterre ; sa couche de pierrailles est émaillée de fleurs ». Jean-Henri Fabre se prêta ensuite à une description minutieuse et inédite de chaque spécimen floral de la montagne.
51Franz Leenhardt (1846-1922) fut le premier géologue à dresser une carte complète du Mont-Ventoux. Il réalisa également une longue étude sur la composition du sol montagneux, après une analyse sur le terrain de plusieurs années. En 1877, le pasteur Alexandre Westphal (1861-1951), qui fit l’ascension avec lui, montra combien il était difficile de se faire aider ou comprendre sur les hauteurs :
Nous avions perdu l’orientation ; le jour tombait, nous marchions sans rencontrer personne. Enfin, sur une croupe, se dessine la silhouette d’un homme avec un fusil. Nous le hélons, il disparaît ; nous nous mettons à sa poursuite, il s’esquive. Comme je m’étonnais, mon guide, philosophe, laissa tomber ces mots : dans ces régions inhabitées, un homme qui en rencontre deux n’a qu’une envie, c’est de se sauver.
Le Ventoux reconnu réserve de biosphère en 1990
52La réserve de biosphère est une reconnaissance par l’UNESCO de zones modèles conciliant la conservation de la biodiversité et le développement durable. Le Ventoux a reçu cette qualification en 1990. Il revient au Syndicat Mixte d’Aménagement et d’Équipement du Mont Ventoux (SMAEMV) d’animer et de mettre en oeuvre les actions de la Réserve de Biosphère du Mont Ventoux.
53Depuis 1996, un Comité de gestion, regroupant élus, administrations, gestionnaires, usagers de l’espace, associations locales, assiste la structure coordinatrice dans ses choix. Ce Comité a rédigé le plan de gestion de la Réserve de biosphère, définissant les actions à mettre en œuvre pour :
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la protection et la mise en valeur du patrimoine naturel, des sites et des paysages,
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le soutien au développement économique durable,
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l’éducation.
54Un Conseil scientifique, composé de représentants des sciences de la nature et des sciences de l’homme, accompagne la structure coordinatrice dans ses actions.
Le Ventoux reconnu « site Natura 2000 » en 2010
55Un site « Natura 2000 » correspond à une zone spéciale de conservation de la faune et la flore. A été désigné sous l’appellation « site Natura 2000 Mont Ventoux » l’espace délimité par les cartes jointes à l’arrêté du 2 juin 2010, s’étendant sur une partie du territoire des communes suivantes du département de Vaucluse : Aurel, Beaumont-du-Ventoux, Brantes, Bédoin, Saint Léger-du-Ventoux, Sault, Savoillan. Cette qualification permet la protection des types d’habitats naturels et des espèces de faune et flore sauvages qui figurent également en annexe de l’arrêté du 2 juin 2010. Cette liste ainsi que les cartes permettant de délimiter le « Site Natura 2000 Mont Ventoux » peuvent être consultées à la préfecture de Vaucluse, dans les mairies des communes situées dans le périmètre du site, à la direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement de Provence-Alpes-Côte d’Azur ainsi qu’à la direction de l’eau et de la biodiversité au ministère de l’Écologie, de l’Énergie, du Développement durable et de la Mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat.
- 15 Cabasse (Céline), « Natura 2000 : une chance pour le Mont Ventoux », Les Carnets du Ventoux, 3e tri (...)
56L’objectif de la démarche Natura 2000, issue de la Directive européenne habitats (1992), est de préserver, voire de restaurer les « habitats » naturels – milieu naturel où vit une espèce ou un groupe d’espèces – et les espèces qui les accompagnent15.
57Les habitats identifiés sur le Ventoux sont d’abord de type forestier, comme la hêtraie, la hêtraie sapinière ou la pinède naturelle de pins à crochets. Ils correspondent aussi à des habitats de milieux ouverts, tels que les pelouses à brome ou les landes à genêts de Villars abritant de nombreuses espèces rares. Le Ventoux compte enfin des habitats rocheux, falaises ou éboulis, où une flore et une faune toutes particulières constituée en particulier d’oiseaux – trouvent refuge.
5828 espèces inscrites dans la directive européenne Habitats de 1992 ont pu être identifiées au sein du Site Natura 2000 Mont-Ventoux :
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5 espèces d’insectes (dont l’Appolon et l’Alexanor)
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6 espèces de reptiles (dont la vipère d’Orsini)
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1 espèce de batraciens (le Crapaud accoucheur)
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13 espèces de chauve-souris
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1 espèce de mammifères (le chamois)
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2 espèces végétales (dont l’Ancolie de Bertoloni)
59À ces espèces, il faut bien sûr ajouter les nombreuses autres espèces remarquables que l’on trouve sur le Mont Ventoux.
Le Ventoux reconnu « réserve biologique intégrale » en 2010
- 16 Arrêté du 10 novembre 2010 portant création de la réserve biologique intégrale du mont Ventoux.
60Est créée le 10 novembre 2010 par arrêté ministériel16 la réserve biologique intégrale (RBI) du mont Ventoux, d’une surface de 806,74 ha, en forêt domaniale du Toulourenc et en forêt domaniale du Mont Ventoux. L’objectif de la réserve biologique intégrale est la libre expression des processus d’évolution naturelle d’écosystèmes forestiers représentatifs du massif du mont Ventoux, à des fins d’accroissement et de préservation de la diversité biologique et d’amélioration des connaissances scientifiques. Les parties de la forêt domaniale du Toulourenc et de la forêt domaniale du Ventoux comprises dans cette réserve biologique intégrale sont gérées en application d’un aménagement prenant la forme d’un plan de gestion de la réserve biologique intégrale du mont Ventoux.
61La qualification de « réserve biologique intégrale » implique un certain nombre d’interdictions : toute exploitation forestière est interdite. Toute autre intervention humaine susceptible de modifier la composition ou la structure des habitats naturels est proscrite, sauf exception. Afin d’atteindre les objectifs de la réserve biologique intégrale et pour la sécurité du public, tout prélèvement d’espèces animales, végétales ou de champignons est prohibé ; si la circulation pédestre est autorisée sur les sentiers de randonnée ayant été balisés avec l’autorisation de l’ONF, il est interdit de baliser de nouveaux itinéraires de randonnée pédestre ou autre, et d’ouvrir tout nouveau sentier ou piste ; les chemins carrossables sont fermés à la circulation publique de tous véhicules, à l’exception de la circulation des vélos et des chevaux sur les itinéraires balisés à cet effet et des véhicules circulant dans le cadre de la gestion de la réserve (y compris pour des études scientifiques et pour la régulation des ongulés) ou d’opérations de secours. Toute activité bruyante y est proscrite. Le camping et le bivouac (campement installé pour une seule nuit) sont enfin impossibles, sauf autorisation délivrées par l’ONF dans le cadre d’études.
62Figure 9. L’auberge Vendran sous la neige
Notes
1 V. le document intitulé : Ventoux.pdf, une montagne d’exception, Muséum d’histoire naturelle de Marseille ; disponible sur internet.
2 Galas (Jacques), « Construire là-haut », Les Carnets du Ventoux, Juin 1993, p. 16.
3 Longuet (Jean-Denis), « Le Ventoux du temps des Profanes », Les Carnets du Ventoux, 4e trimestre 1999, p. 45.
4 Ughetto (André), « Dossier : Les routes d’accès au Mont Ventoux », Les Carnets du Ventoux, 4e trimestre 1998, p. 9.
5 La commission est présidée par le docteur Alfred Pamard ; le vice-président est Marius Bouvier ; les autres membres sont le marquis de l’Espine, président de la société d’agricul- ture ; Paul de Gasparin, originaire d’Orange ; Henri Fabre, docteur ès sciences ; Grimaud, directeur de l’École normale ; Chrestian, conservateur du musée de Sault.
6 On leur doit d’ailleurs une Notice sommaire sur l’Observatoire du Ventoux, Avignon, Ed. Seguin frères, 1883 ; v. aussi Alfred Pamard, L’Observatoire du Mont-Ventoux, com- munication faite à l’Académie de Vaucluse, le 7 février 1918, Avignon, Ed. Seguin frères, 1918.
7 Jacques Galas, préc., p. 16.
8 Ughetto (André), « Dossier : Les routes d’accès au Mont Ventoux », Les Carnets du Ventoux, 4e trimestre 1998, p. 9.
9 Il existe sur l’aile est de l’observatoire une plaque indiquant : « En souvenir de deux enfants de Bédoin : Gabriel Provane (1839-1921), concepteur de la route Bédoin-sommet du Ventoux (1877-1882), chevalier de la légion d’honneur ; Pierre Provane (1875-1922), chevalier des arts et lettres, 1er météorologue officiel de l’Observatoire du Ventoux, 1897 ».
10 Peyre (Olivier), « Le Gardien du phare », Les Carnets du Ventoux, Juin 1993, p. 21.
11 Étude géologique de la région du Ventoux, éd. C. Coulet et G. Masson, 1883.
12 Le Mont Ventoux : Recueil de textes anciens et modernes, Graveson, Le Nombre d’Or, 1977, p. 211. ; Maureau ( Alain), « Joseph Guérin (1773-1850), vainqueur de la première hivernale au Mont Ventoux », Les Carnets du Ventoux, Déc. 1998, p. 37.
13 Guérin (Joseph), Panorama d’Avignon, de Vaucluse, du Mont Ventoux et du Col Longet, Avignon, Guichard, 1829.
14 Flahault (Charles), « Herborisation au Mont Ventoux en 1895 », Les Carnets du Ven- toux, 2e trimestre 2000, p. 87.
15 Cabasse (Céline), « Natura 2000 : une chance pour le Mont Ventoux », Les Carnets du Ventoux, 3e trimestre 2003, p. 14.
16 Arrêté du 10 novembre 2010 portant création de la réserve biologique intégrale du mont Ventoux.
Table des illustrations
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Titre | Figure 1. Le domaine du Pré Fantasti – Territoire de Caromb |
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Titre | Figure 2. Le Radome (crête ouest du Ventoux) |
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Titre | Figure 3. Le portail Saint-Jean – Route de Malaucène au sommet du Ventoux |
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Titre | Figure 4. Le Col des Tempêtes |
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Titre | Figure 5. Stèle en souvenir de Tom Simpson, mort pendant le Tour de France de 1967 |
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Titre | Figure 6. Vue sur L’Observatoire – Route de Bédoin au sommet du Ventoux |
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Titre | Figure 7. Vue sur L’Observatoire en automne, avec les étages de végétation |
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Titre | Figure 8. Panorama hivernal sur les Alpes depuis le sommet du Ventoux |
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Titre | Figure 10. Pierre de Champeville, apôtre du tourisme |
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Titre | Figure 11. Archange de la cathé- drale de Carpentras (Jacques Bernus) |
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Titre | Figure 12 Chalet privatif au sud du Ventoux, près des pistes de ski du chalet Reynard |
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Titre | Figure 13. Tombeau de Mgr Buty, Cathédrale de Carpentras (Jacques Bernus) |
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Titre | Figure 14. La Légende de Saint- Gens (Pierre Bernus) |
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Titre | Figure 15. Sainte-Marie, Saint-Bruno et Saint-Maurice, Eglise de l’Observance (Jacques Bernus) |
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Titre | Figure 16. La fontaine du Groseau (Territoire de Malaucène) |
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Titre | Figure 17. Cèdre de l’Atlas dans le vieux cimetière de Bédoin |
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Titre | Figure 18. Cerisier à balai |
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Titre | Figure 19. La cédraie (Territoire de Bédoin) |
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Titre | Figure 20. Fête de la forêt en 2013, dans le secteur de Perrache (Sud du Ventoux) |
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Titre | Figure 21. Fleurs du pierrier : Velar humble |
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Titre | Figure 22. Sabline à grandes fleurs |
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Titre | Figure 23. Fleurs du pierrier : Androsace velue |
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Titre | Figure 24. Fleurs du pierrier : Centaurée axilaire |
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Titre | Figure 25. Fleurs du Pierrier : Serpolet |
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Titre | Figure 26. Fleurs du Ventoux : Valériane tubéreuse |
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Titre | Figure 27. Fleur du pierrier : campanule des Alpes |
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Titre | Figure 28. Fleur du pierrier : Crépis pygmée |
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Titre | Figure 29. Les lamas du Ventoux |
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Titre | Figure 30. Le jas des Pèlerins |
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Titre | Figure 31. Le jas de Perrache, après restauration par l’APARE (2014) |
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Titre | Figure 32. Le jas des mélettes, après restauration (la mélette dési- gnant une petite figue noire) |
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Titre | Figure 33. Le jas du Roussas |
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Titre | Figure 34. La poignée du jas des Abéiès |
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Titre | Figure 35. Troupeau de moutons lors de la dépaissance au sommet du Ventoux |
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Titre | Figure 36. Fenestron du jas des Abéiès |
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Titre | Figure 37. La citerne du jas de Pié-Gros |
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Titre | Figure 38. Le jas du Mourre au milieu d’une cédraie |
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Titre | Figure 39. Le jas de la Couanche |
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Titre | Figure 40. Le jas de Baumasson |
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Titre | Figure 41. Le jas des Abéiès |
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Titre | Figure 42. Le jas Forest |
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© Éditions Universitaires d’Avignon, 2016