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Envoûtant Ventoux

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Franck Petit

I – Le Ventoux, Terre Sacrée

Texte intégral

  • 1 Jully (Jean-Jacques), « Les Trompettes en terre cuite du Mont Ventoux », Les Carnets du Ventoux, Ju (...)

1Lors des fouilles opérées pour les fondations de l’Observatoire du Ventoux, le sol a révélé de nombreux fragments de poterie que l’on a pu identifier comme des débris de trompette. À l’image du dieu Pan, les bergers ont toujours aimé jouer du pipeau ou de la flûte. Dans les Alpes, les pasteurs se servaient plus particulièrement de trompettes en terre cuite. Partant, plusieurs érudits en ont déduit qu’il pouvait exister autrefois au sommet du Ventoux un temple ou un lieu de culte dédié au Dieu de la montagne. Les débris de trompette en poterie retrouvés au sommet en quantité assez importante seraient les traces d’une pratique religieuse que les bergers du Ventoux adoptaient dans le but de rendre leur Dieu plus favorable. Ont été retrouvés non pas des trompettes intactes, mais des fragments avec une embouchure, d’autres avec un pavillon, d’autres encore avec une anse percée d’un trou. Plusieurs morceaux présentaient une forme semi- circulaire. Ces débris devaient être les éléments de trompettes recourbées sur elles-mêmes, afin de donner un son plus grave. Elles étaient munies de deux anses trouées pour en assurer le port, pendues à l’épaule à l’aide d’une lanière1.

  • 2 De cette légende est née l’idée d’un livre de réflexion religieuse : Jossua (Jean-Pierre), La chèvr (...)

2Du côté nord du Ventoux, la fausse porte dénommée Saint Jean, qui apparaît rapidement sur la route montante et tortueuse après le site du Groseau, est aussi à l’origine d’une légende mi-païenne, mi-chrétienne, qui révèle toute la liberté que certains comtadins ont prise à l’égard de la religion dominante en France. Pour les chrétiens, ce « portail » formé d’une concrétion calcaire noircie et entourée d’un bourrelet de pierre plus claire s’ouvrirait un court instant le jour de Noël entre la lecture de l’épitre et celle de l’Évangile pour dévoiler au fond d’un couloir sombre une chèvre en or que personne n’a pu véritablement approcher, soit parce qu’elle sort très peu de temps, soit parce qu’on risque d’être enfermé si l’on rentre dans la montagne. Dans sa version « laïque », l’ouverture du rocher se ferait entre le premier coup de minuit et le dernier coup de minuit annoncé par la cloche dans la nuit du solstice d’hiver. Là encore, pendant ce court instant, se dévoilerait l’animal caprin, toujours en or, dont la parenté est très proche avec le veau en or que les Hébreux, comme des païens, adoraient dans l’Ancien Testament2.

3Cette légende de la porte Saint Jean est très intéressante par les symboles qu’elle véhicule. Elle montre d’abord que la montagne du Ventoux protège le territoire – comme une sentinelle – et, surtout, ses habitants. Plus largement, elle révèle que le « Géant de Provence » mène à la divinité à travers la chèvre d’or. On y trouve une satisfaction spirituelle. Plus prosaïquement, le Ventoux dévoile toute la richesse qu’on peut y trouver du point de vue matériel – eau, neige, bois, pierre pour la construction, chasse, élevage, culture. Le Ventoux est en définitive la montagne qui révèle Dieu – et ses créations – à l’homme.

4Symétriquement, il doit être craint. Déjà, dans la lettre de Pétrarque, l’idée était exprimée qu’il fallait être inconscient de vouloir grimper sur le Ventoux. Un vieux pâtre s’était efforcé de dissuader le poète et son frère de mener leur ascension. Ce berger n’avait rapporté que « regret et fatigue, le corps et les habits déchirés aux roches et aux buissons d’épines ». La tentation d’approcher la chèvre d’or cachée derrière le portail Saint Jean peut même conduire à la perte, après « fermeture » du rocher. De nos jours, la crainte vient majoritairement des obstacles naturels – pentes raides, efforts mal maîtrisés, instabilité du pierrier, rudesse du climat, difficulté à s’abriter, manque d’eau sous la canicule qui peuvent conduire à l’épuisement, voire à la mort. C’est d’ailleurs là une autre manifestation du sacré sur le Ventoux, celle qui rappelle le passage de la vie à la mort, autrement dit celle qui mène l’homme à Dieu à la divinité, en un mot à l’éternité.

  • 3 Ces développements sont inspirés en grande partie d’une conférence donnée à Mazan le 19 décembre 20 (...)

5Depuis plus d’un siècle, le Ventoux est aussi devenu un lieu de performance pour l’homme, avec le développement des courses automobiles et des étapes cyclistes. Là encore, on y trouve du bon et du mauvais. Néanmoins, dans l’exercice sportif, il y a l’idée d’améliorer la condition physique, d’augmenter les capacités tant corporelles que mentales, d’établir des challenges, des records et des victoires : le Ventoux est devenu la montagne qui révèle l’homme à l’homme3.

1– Le Ventoux qui révèle Dieu à l’homme

  • 4 Abbé E. Bourgue (Curé de Bedoin), Histoire de Bédoin. Bédoin Souvenirs. Carpentras, Imprimerie Bata (...)
  • 5 Robb (Graham), Une histoire buissonnière de la France, Paris, Flammarion, 2013.
  • 6 Expilly (Jean-Joseph), Dictionnaire géographique, politique et historique des Gaules, Paris, 1766, (...)

6Dieu se révèle à l’homme sur le sommet du Ventoux par la chapelle de la Sainte Croix. Elle avait été élevée, initialement, sur le point culminant du Mont Ventoux, légèrement au-dessus de l’actuel Restaurant du Vendran et devant l’Observatoire. La tradition populaire fait remonter sa construction à l’époque de Charlemagne ; certains l’attribuent même à Charlemagne. Mais cette légende n’a jamais reçu confirmation de la part des archivistes, des historiens et des érudits. Pour l’Abbé Bourgue, rédacteur d’une Histoire de Bédoin en 19654, cette chapelle a vu le jour au commencement du XVIe siècle, de l’an 1500 à 1504 – comme l’indiquait une date gravée sur un des murs extérieurs du chœur –, sur une commande de Pierre de Valetariis (1461-1514), évêque de Carpentras, neveu du pape Sixte IV. Dès l’origine, le fondateur la dota d’un reliquaire pour contenir des morceaux de la « Vraie Croix ». La tradition rapporte qu’un ermite avait été désigné par l’évêque de Carpentras pour veiller sur ces fragments divins5, ce qui peut expliquer l’appellation actuelle du « clapier de l’ermite ». Il n’est pas rare, d’ailleurs, de présenter le jas des Pèlerins, dans les écrits antérieurs au XXe siècle, comme « l’Ermitage ». Quoi qu’il en soit, ces reliques furent enlevées lors des troubles de religion qui animèrent le Comtat-Venaissin à la fin du XVIe siècle6. Un bref du Pape Léon X, du 21 août 1518, avait réglé la perception des aumônes à cet oratoire. En 1533, une Dame fit présent d’un calice en or pour cette chapelle, dont se chargea d’abord le syndic, puis le consul de Bédoin. Subissant l’outrage du temps et des climats rudes des hauteurs notamment de l’alternance des gels et des dégels, de la fonte des neiges –, cette chapelle a également été dégradée par la main de l’homme.

  • 7 Hue (Jean-Louis), L’Apprentissage de la marche, Paris, Grasset, 2010.
  • 8 Avignon, Archives départementales du Vaucluse, 11 M 364 : Note de l’Académie de Vaucluse, 11 M 364.

7Elle fut partiellement démolie une première fois par les Calvinistes, sous le commandement de Puy-Montbrun, en 1562. Il n’en resta bientôt que l’abside, là où se tenait le sanctuaire, qui était protégé par un treillis de fer. Il n’empêche que des messes continuèrent à y être dites par un vicaire de Bédoin le jour de la fête de l’exaltation de la Sainte Croix, devant un public qui pouvait atteindre 500 pèlerins, venant non pas seulement du Comtat-Venaissin, mais également du Dauphiné, du Languedoc et de toute la Provence. Tout le monde ne pouvait rentrer dans la chapelle. Un bloc rocheux servait d’autel à cette cérémonie7. Un bref apostolique du 18 janvier 1624 concéda des indulgences spéciales aux pèlerins8. Thomas Platter (1574-1628), chirurgien de son état, donna quelques éléments de description de cet édifice à la suite de son ascension du Ventoux en 1598.

  • 9 Le Roy Ladurie (Emmanuel) et Liechtenhan (Francine-Dominique), Le voyage de Thomas Platter 1595 - 1 (...)

8Après avoir dépassé un grand nombre de croix, qui marquaient la place où des pèlerins avaient trouvé la mort, par accident ou par fatigue, il atteignit le sommet, ruisselant de sueur. Devant la chapelle – également dénommée chapelle de la Haute-Croix – était dressée une croix en bois, sur laquelle l’ascensionniste fit sécher ses vêtements ! Dans la chapelle s’accumulait de la neige « à hauteur d’un homme et demi ». C’est le vent qui poussait cette neige à l’intérieur. Dans cette neige abondante, il fit refroidir son vin chauffé par le soleil9.Vers la fin du XVIIe siècle, César de Vervins, chanoine théologal du chapitre d’Avignon, la fit reconstruire et laissa par testament, en date du 12 novembre 1701, une pension de 12 livres pour son entretien. C’est lui-même qui fit construire, près du sommet du Ventoux, le Bâtiment souvent visité par les pèlerins et les ascensionnistes, que l’on appelle le Jas des Pèlerins.

9En juin 1711, le Père Jésuite Antoine Jean de Laval (1664-1728) en donnait la description suivante : il s’agit d’un bâtiment vouté de 20 mètres (10 toises) sur huit (4 toises), sans aucune ouverture, ne recevant le jour que par une porte et un petit oculus placé au-dessus de celle-ci :

  • 10 Laval (Antoine J. de), « Voyage du Mont-Ventoux, pour déterminer la hauteur et la latitude de cette (...)

(…) On y sent le relent, odeur fade et désagréable causée par l’humidité des murailles et de la voûte, toujours couvertes d’eau qui distille en plusieurs endroits, quoi qu’il n’y eût pas de neige sur le toit, qui est de pierre plates10.

10C’est sur la porte renversée de cette chapelle que se jetèrent certains compagnons du Père de Laval pour y dormir et se refaire de la fatigue, alors que d’autres restèrent près du feu.

11Le culte cessa dans cette chapelle en 1793, alors que le Jas des Pèlerins fut en même temps rebaptisé « Le Bâtiment ». Elle fut détruite par les révolutionnaires en 1794, puis relevée en 1818, mais il fallut attendre 1872 pour qu’elle soit rendue au culte. Pour Jean-Henri Fabre (1823- 1915), qui l’a visité plusieurs fois, cet édifice n’était guère élégant. Il le décrit en septembre 1842, dans l’Indicateur d’Avignon, comme une « informe et rustique chapelle ». Ce qui lui plaisait particulièrement, c’était en réalité le site naturel, cet environnement quasi-divin :

De larges pierres plates sans aucun ciment ont servi pour la construction où l’art n’a pas présidé. Au-dessus de la porte s’élève une croix en sapin qui se détache sur le bleu des cieux et semble annoncer de loin aux hommes que l’éternité a les yeux ouverts sur eux. Elle est sainte, elle est divine cette pensée d’élever ainsi sur les lieux culminants le signe du salut, comme pour nous dire qu’à ses pieds nous sommes près des cieux. Oh ! C’est là, en face de ces gigantesques monuments de la nature qui jettent dans votre âme des idées d’infini, et qui semblent vous écraser dans votre néant ; c’est là que tout coeur sent un soupir s’exhaler, que toute lèvre laisse tomber une parole d’adoration et que toute bouche trouve des prières pour bénir et louer son dieu (…).

12En 19 août 1878, le juriste Eugène Barrême laissa de cette chapelle une description plus minutieuse, à la suite d’une ascension touristique du Ventoux qu’il fit avec quelques amis, notamment le docteur Georges Taulier (1849-1899), qui deviendra sénateur du Vaucluse :

  • 11 « Une excursion au Mont Ventoux », Revue sextienne (Aix-en-Provence, A. Makaire), 1881.

(…) Impossible de voir à deux pas devant soi. Il faut chercher sa route à tâtons. Je trouve enfin une suite de marches grossièrement pratiquées dans le sol, j’escalade rapidement ces degrés et j’arrive sur une sorte de plate-forme où se dresse au milieu du brouillard une croix de fer brisée par la foudre et dont les montants vibrent lugubrement, comme un diapason colossal, sous les chocs répétés de la tempête. Vis- à-vis s’ouvre un trou noir dans lequel les nuées s’engouffrent avec les rafales. C’est l’entrée de la chapelle de Sainte Croix, bâtie au sommet du Ventoux. Mes compagnons y sont déjà réunis et s’occupent de notre installation. Dans un coin pétille un grand feu qui jette de fauves reflets et fait danser des ombres sur les murs humides et crevassés. Cette scène a je ne sais quoi d’imprévu et de fantastique qui nous émeut fortement, nous citadins blasés, avides d’émotions. Sur un signe du docteur, Sap pousse la porte massive qui tourne en gémissant sur ses gonds rouillés, puis, s’accrochant aux aspérités de la muraille, il grimpe jusqu’à une sorte d’œil- de-bœuf, se tient d’une main par un prodige d’équilibre à une saillie et ferme cet orifice avec les pierres que les Jouve lui lancent adroitement. Une fois à l’abri, on procède à l’éclairage de la chapelle. Jetons un coup d’œil sur notre hospitalière demeure. Elle n’a aucun caractère artistique ou monumental. C’est une voûte basse, longue et étroite, bâtie, dit-on aux temps de Charlemagne, mais je la crois plus récente. Une grille en fer la divise par le travers en deux parties inégales. La première forme la nef : c’est là que se réunissent les fidèles au jour du pèlerinage ; c’est là que nous sommes installés et que le mulet lui-même (pourquoi ne pas l’avouer, on nous pardonnera en faveur de l’intention), a trouvé un asile contre les éléments déchaînés. La seconde, beaucoup moins profonde, constitue le chœur. Le sol et les murs y sont entièrement boisés. Au milieu s’élève un autel également en bois orné de candélabres en métal d’un assez joli travail. Autour sont suspendus quelques tableaux aux cadres vermoulus et aux couleurs effacés par l’humidité (…)11.

13En 1891, une croix est nouvellement plantée sur le site par M. Rodon, Vicaire général, de retour de Terre Sainte. On garde une trace d’une dernière messe célébrée dans l’enceinte de cette chapelle en 1905, avant qu’elle ne s’effondre toute seule. Il est vrai que sans entretien, le bâtiment a dû s’abîmer très vite sous la neige et dans le vent qui soufflait avec furie sur la calotte sommitale. Il servait par ailleurs très souvent d’écurie pour les chevaux et les mulets, ce qui ne devait pas favoriser son entretien.

14Mais l’édifice religieux fut relevé une nouvelle fois. Au début des années 1930, un comité, présidé par le colonel Romieu – ancien commandant de la Légion d’Orient pendant la guerre 1914-1918, propriétaire du domaine de la Madelène à Bédoin –, fut constitué en vue d’étudier sa reconstruction. En 1933, l’abbé Bousquet, de Bédoin, et l’abbé Robert, de Flassan, ouvrirent une souscription pour financer la reconstruction. Une nouvelle chapelle fut élevée en 1936 grâce à la générosité des fidèles et, en particulier, de Mademoiselle Patras de Raxis – dont le nom figure sur une plaque de marbre adossée à la grande croix de béton placée devant la chapelle – et de la Société des Amis du Mont-Ventoux, présidée par le docteur Pamard. Elle a été bénie le 19 juillet 1936 devant une nombreuse foule – près de 2 500 personnes – par Monseigneur Gabriel de Llobet, Évêque d’Avignon. L’assemblée entonna à cette occasion la Prouvençau é catouli et l’abbé Brémond, co-célébrant, livra à la communauté, au moment du Credo, un hymne O santo crous de sa composition.

  • 12 Lettre du 3 septembre 1934 de l’ingénieur en chef des Ponts et chaussées à l’Inspecteur principal d (...)

15D’architecture simple, ressemblant à une bergerie d’altitude, cette chapelle a été construite en pierre, couverte de dalles de pierre ou de béton, d’après un plan du peintre et professeur de dessin Pierre de Champeville (1885-1950). Plusieurs éléments ont été utilisés en réemploi, pour ne pas rompre la continuité avec l’édifice écroulé. Le Ministère de l’Air a lui- même pris en charge le transfert des matériaux sur l’emplacement de la nouvelle chapelle et la mise en l’état de la plate-forme destinée à la recevoir12.

16Trapue, elle donne l’impression de s’arc-bouter pour résister au mistral venant du nord. Les contreforts qui se trouvent à chaque angle accentuent cette impression. Une immense croix de béton se dresse devant le porche qui permet aux randonneurs de s’abriter.

17À l’intérieur se trouve, sous une voûte en béton, un autel éclairé par un puits de lumière constitué de pavés de verre. À l’extérieur, les joints des pierres sont de couleur ocre, comme pour rappeler la terre brune du hameau des « Bruns » (Bédoin) ; à l’intérieur, le sol est recouvert de dalles de pierre inégales. Une porte en métal ferme cette église, mais laisse aux promeneurs la possibilité d’apercevoir l’autel, éclairé par la lumière du plafond.

18Contre le mur est de la chapelle, une pierre commémorative rappelle la tradition des feux de la Saint Jean. Le 23 juin, un grand feu est allumé, encore de nos jours, et vaut signal pour que tous les feux de la vallée soient allumés en même temps en signe de paix et d’amitié.

L’intercession divine sur le Ventoux pour éradiquer la peste

19Au début du XVIe siècle, la peste sévissait à Avignon. Les consuls s’étaient réfugiés dans les alentours de la ville, notamment à Montfavet, et mirent à l’ordre du jour d’une réunion du Conseil municipal, en juin 1518, la question de la protection des populations. Impuissants devant la diffusion rapide et persistante d’un microbe qui n’était pas encore identifié, les consuls décidèrent d’envoyer plusieurs d’entre eux brûler un cierge dans la chapelle sommitale de la Sainte Croix.

20Le 5 juin 1518, le consul Marc de Froli, du Thor, fit le déplacement jusqu’à la Sainte Croix. Le lendemain, le consul Joachim de Saze, de Carpentras, fit de même, accompagné par le « Courrier de la ville », Baudichon Falcon. Une messe y fut célébrée. L’événement est rapporté par une note de frais, découverte par le docteur Pansier, que Georges Brun a reproduite dans son ouvrage intitulé « Mont Ventoux ».

La foi qui déplace les foules : le pèlerinage de la Sainte Croix

21La population des hameaux et des villages situés au pied du Ventoux se rendait en pèlerinage au sommet du Mont Ventoux à certaines époques de l’année, pour rendre hommage à une relique de la Sainte Croix, abritée dans la chapelle. La coutume était de ramener avec soi des branches ou des bûches de fayard, ou même d’épicéa, qu’on ne trouvait qu’à cette hauteur et qu’on avait précautionneusement fait bénir à la chapelle, pour prouver qu’on était bien monté au sommet. Ces morceaux de bois et de branches servaient ensuite à orner les maisons ou étaient destinés à alimenter le bûcher de l’hospice.

  • 13 Pèlerinage au Mont-Ventoux, par François Seguin, suivi de Santo-Croux douas letro a ma bravo sore t (...)

22Une confrérie de la Sainte Croix avait son siège dans l’église de Bédoin. Elle était chargée d’entretenir la chapelle et de préparer les offices qui s’y tenaient. On trouve une trace de ces pèlerinages dès le XVIe siècle, à travers le témoignage de Thomas Platter. Ceux qui s’adonnaient à cette ascension gagnaient des indulgences, à tout le moins la considération des gens de la plaine ; mais c’est au XIXe siècle qu’on trouve le récit le plus complet de cet évènement, dans l’ouvrage rédigé par M. François- Joseph Seguin (1812-1878) à l’occasion de l’inauguration de la nouvelle croix en fer érigée devant cette chapelle le 14 septembre 185113. Dans le même ouvrage, on trouve le récit en provençal par le poète catholique Jean Roumanille (1818-1891) de ses aventures et de ses émotions de pèlerin. Ce jour de pèlerinage, qui correspond à la fête de l’Exaltation de la Croix, avait été choisi pour la cérémonie de la bénédiction qui devait être faite par M. Martin, Vicaire général du diocèse.

23Le départ des pèlerins se fit à minuit, au son d’une décharge de l’artillerie municipale. Une longue caravane de mulets et d’ascensionnistes s’ébranla et s’engagea dans les chemins accidentés qui menaient au Ventoux. Le maire et le Curé de Bédoin la suivaient à pied, le bâton à la main et la gourde au côté, rempli d’une « goutte de vie ». L’ascension se fit sans embuche, à la lueur favorable d’une lune généreuse : « Salut à la montagne ! », écrit François Seguin, avec le souvenir du Golgotha, sur lequel un Dieu fait homme a voulu devenir obéissant jusqu’à la mort de la Croix ! Puis les combes, les arbres, les rochers se succédèrent : « Nous étions dans la Combe Filiole, vallée de désolation, bordée de rochers inaccessibles, violemment déchirés. Le sol, de toutes parts, n’offrait aux yeux qu’un immense amas de débris concassés (…). Nous avons passé le Pic de l’aiguille ; le froid devient plus intense, et les touffes des hêtres plus rapprochées annoncent la proximité de l’Ermitage ». On voyait des feux allumés en divers points et on entendait des sons inarticulés, des cris, des chants et des exclamations. Puis peu à peu, l’aube est parue et le sommet s’est rapproché : « On abandonne le bois, et, à la base du cône de la montagne, le signal de la marche processionnelle est donné par le chant de l’hymne Vexilla Regis prodeunt ». C’est avec ce chant, quatorze fois interrompu par le murmure de la prière d’une multitude agenouillée dans les stations, que la foule atteignit le sommet : il y avait alors 2 000 chrétiens.

  • 14 Damian (Gérard), « Les Pèlerins de la randonnée », Les Carnets du Ventoux, 2e trimestre 2007, p. 29

24La Chapelle Sainte Croix s’était remplie de fidèles et il n’était plus possible d’y pénétrer. Un autel s’était donc improvisé à l’extérieur au point culminant, protégé par une hutte elle-même improvisée : « Chacun s’empresse d’apporter sa pierre ; l’autel est élevé ; on le recouvre de draperies. L’air est calme ; les flambeaux sont allumés ; le sacrifice de la nouvelle loi commence ; la foule émue et recueillie tombe à genoux ». Le vicaire Martin prononça ensuite une longue allocution, tenant embrassée la croix qu’il venait de bénir et montée sur un piédestal. Puis une immense acclamation porta à tous les échos du Ventoux le cri mille fois répété : Vive la Croix !, avant que la foule ne se disperse14.

Autres témoignages littéraires

25Dans sa nouvelle Les trois messes basses, issue des Lettres de mon moulin (édition de 1879), Alphonse Daudet (1840-1897) situait l’action dans la chapelle érigée en haut du Mont-Ventoux. Il donnait des lieux une vision assez fantaisiste – en évoquant l’existence passée, bien qu’imaginaire, d’un château dit de Trinquelage ; en ce qui concerne la chapelle du Mont-Ventoux, il se prêta à une description très fidèle, en lui donnant une dimension magique conforme à l’idée que s’en faisait l’opinion populaire :

(…) La chapelle se tient encore droite tout en haut du Mont Ventoux, dans un bouquet de chênes verts. Le vent fait battre sa porte disjointe, l’herbe encombre le seuil ; il y a des nids aux angles de l’autel et dans l’embrasure des hautes croisées dont les vitraux coloriés ont disparu depuis longtemps. Cependant, il paraît que tous les ans, à Noël, une lumière surnaturelle erre parmi ces ruines et qu’en allant aux messes et aux réveillons, les paysans aperçoivent ce spectre de chapelle éclairé de cierges invisibles qui brûlent au grand air, même sous la neige et le vent…

26En 1991, le théologien Jean-Pierre Jossua célébra le mont Ventoux en vantant sa dimension protectrice et sa stabilité rassurante :

S’il est l’emblème de la région, c’est d’ici, au nord-est, qu’on reconnaît sa majesté. Il élargit ses bras afin de protéger, dirait-on, les collines qui se rassemblent sous son manteau (…). Aucune montagne ne paraît plus forte, et aucune ne se prête à ce qui lui soit attribuée la louange des Psaumes.

27Il écrit même :

  • 15 Jossua (Jean-Pierre), La chèvre du Ventoux - Journal pour chercher la sagesse, Paris, Ed. du Cerf, (...)

Qui se fie en son Dieu ressemble au Mont Ventoux Rien ne l’ébranle, il est stable pour toujours15.

28Mais le témoignage littéraire le plus parlant sur la dimension mystique du Mont Ventoux vient sans aucun doute de l’écrivain et poète provençale Marie Mauron (1896-1986), qui a rédigé un long et grand poème à l’attention de ce qu’elle appelle le Dieu Ventoux. C’est peu dire qu’on approche d’un Mont Ventoux qui conduit l’homme à l’éternité.

2-Le Ventoux qui mène l’homme à l’éternité

  • 16 Ughetto (André), « Vélocio, une légende sans pareille dans le monde du cyclotou- risme », Les Carne (...)

29Personnellement, je n’ai jamais vu autant de stèles sur une Montagne ; il existe de nombreux témoignages honorifiques à l’attention de cyclistes tels Tom Simpson (1937-1967), Pierre Kraemer, mort en 1983, ou Vélocio16 (1853-1930) –, d’automobilistes – Maurice Trintignant – et de simples voyageurs qui sont morts soit sur le Mont Ventoux, soit ailleurs. À côté des reconnaissances officielles, il y a des intentions de prière ou de souvenir qui, soit se greffent spontanément sur des stèles ou des édifices existants, soit sont déposés entre ou sur les rochers, comme pour rappeler qu’à cette hauteur, la personne dont on rappelle l’existence a plus de chances d’atteindre l’éternité et la sérénité qui l’accompagne.

30Au début de l’ère chrétienne, on appréciait déjà de se faire enterrer sur le flanc de la montagne, comme le montre cette découverte, près du hameau des Baux, d’une stèle funéraire trouvée dans un champ, en forme de poupée, avec base rectangulaire pour être fixée au sol, et disque portant une inscription datant du IIe siècle.

L’origine discutée du clapier de la femme morte

  • 17 Madelène (Henri De la), Contes comtadins, Paris, Charpentier, 1974, p. 207-296.

31Henry de la Madelène (1825-1887) a raconté, dans son roman Jean des Baumes17 la mort de Félise, la femme d’un contrebandier solitaire et rebelle à la société, qui habitait dans le Mont Ventoux. Jean des Baumes avait pris l’habitude de prier près du tombeau improvisé de Félise et de jeter pieusement une pierre sur le tumulus grossier qui, bientôt, augmenté de la pierre de tous les passants, s’appela le « Clapier de la femme morte ». Mais cette interprétation littéraire ne fait pas l’unanimité ; la mémoire des anciens évoque le souvenir du décès d’une femme sans famille qui gardait les cochons sur le Ventoux, à proximité des forêts nourricières. À la suite de sa mort subite, elle a pu être enterrée sur place, avec comme tombe un simple amoncellement de cailloux.

Le mystère du Col de l’homme mort

32Il existe aussi entre le Mont Ventoux et la ville de Montbrun un col connu des cyclistes, dénommé le Col de l’Homme mort ; dans le sens de la montée, ce sont plus de 4 kilomètres qui mènent lentement dans la forêt. Dans le sens de la descente, s’ouvre un panorama magnifique sur le plateau d’Albion. Personne ne connait avec certitude l’origine de cette désignation. Certains considèrent qu’il s’agit même d’une déformation de la locution « l’orme mort ». Quoi qu’il en soit, il n’y a pas un cycliste qui ne se souvienne de ce passage et, surtout, de l’impression provoquée par le nom de ce col.

La neige comme linceul

  • 18 Brun (Georges), Le Mont Ventoux, Graveson, Le Nombre d’or, 1969.

33Dans son ouvrage intitulé Mont Ventoux18, Georges Brun retrace l’histoire de la disparition de M. Astier, cuisinier de l’Observatoire, qui était parti le mercredi 29 janvier 1936 avec un militaire Georges Garayt lui aussi attaché à l’Observatoire – pour aller chercher le courrier : ils n’ont jamais reparu. Le militaire fut rapidement retrouvé mort à environ 1 km à l’est du Col des Tempêtes, succombant au froid (- 4°C), à la neige et au mistral rugissant (140 kilomètres à l’heure), perdu dans la nuit noire. De son côté, Astier avait chuté dans le ravin de Font Fiole, mais son corps ne fut découvert que deux jours plus tard, le visage complètement défiguré par sa chute. Ce dernier était tombé en flèche sur la pente de neige extrêmement rapide qui plonge du Col des Tempêtes en entonnoir dans le ravin de Font Fiole, avait franchi les falaises verticales qui coupent le ravin et s’était arrêté sur la pente d’éboulis couverte de neige à 350 mètres au moins en dessous de la corniche. Des traces sur la neige indiquaient qu’il s’était traîné avec les mains, avant de succomber à ses blessures.

Le Ventoux comme sépulture

34Le 10 septembre 1956 ont été retrouvés près de la route menant à Sault, sous un tas de pierre, les restes du corps d’Anne-Marie Pélissier, âgée de 11 ans. Cette enfant avait été enlevée par un mystérieux automobiliste le 25 mai 1955, route de Roquemaure, à Orange. Pour rappeler le souvenir de cette tragédie, une tombe a été dressée à l’endroit où le corps fut déposé par le ravisseur. La vue de ce tombeau laisse à chaque fois des frissons au promeneur. Heureusement, en matière de meurtre, la réalité se fait moins présente que la fiction. On a vu apparaître ainsi en 2014 un film de Thierry Peythieu, intitulé « Meurtre au Mont Ventoux », qui avait pour premier rôle l’actrice Ingrid Chauvin. Si ce lieu a été choisi, c’est aussi parce qu’il est source de légendes locales, inspirées du caractère mystérieux et sacré du « Géant de Provence ».

L’électrochoc causé par la mort tragique de Tom Simpson (1937- 1967)

35Tom Simpson, qui n’avait jamais caché l’habitude de se doper, trouva la mort le 13 juillet 1967 à moins de trois kilomètres du sommet du Ventoux, lors de la 13e étape du Tour de France, surnommée – non sans raison – « l’étape de la soif » (Marseille-Carpentras). Plusieurs facteurs convergents permettent aujourd’hui d’expliquer cette mort tragique, qui ne tient pas seulement à l’absorption de produits dopants : ce sont la fatigue, la canicule (35 °C), l’effort violent, la privation d’eau, la prise d’amphétamines – plusieurs tubes de Tonédron furent retrouvés dans les poches du cycliste –, l’ingestion de cognac offert par des spectateurs qui ont provoqué le dépassement des capacités thermorégulatrices du corps, entraînant d’abord un malaise puis l’évanouissement du champion. Dans un premier temps, Tom Simpson se fit remarquer par des zig-zag lors de sa progression, peu à peu ralentie. Il tomba une première fois de vélo. Ne se doutant pas de la gravité de son état, plusieurs spectateurs aidèrent le sportif à se remettre en selle. Mais 250 mètres plus loin, il s’écroula de son vélo en sortant de la route. Alerté, le Docteur Dumas se précipita auprès de Tom Simpson. Il le trouva inanimé, les yeux vides, sans expression. Une première piqûre tenta de soutenir son rythme cardiaque. On lui insuffla également, en vain, de l’oxygène. En désespoir de cause, le bouche-à-bouche fut pratiqué, sans effet. C’est pourquoi la décision fut prise de procéder à son évacuation par hélicoptère. Son corps était resté près de 40 minutes sur le dos dans le caillou devant des spectateurs impuissants et des cyclistes poursuivant leur course, sans connaître la raison du malaise. Un hélicoptère l’emmena sur l’hôpital d’Avignon, mais il mourut pendant l’évacuation, entre 17h30 et 17h40. Se doutant qu’il fallait une analyse approfondie des tissus humains pour mieux connaître les raisons de son décès, les médecins refusèrent de délivrer l’autorisation d’inhumation.

36Selon le rapport d’autopsie, « le décès (…) est dû à un collapsus cardiaque imputable à un syndrome d’épuisement dans l’installation duquel ont pu jouer certaines conditions atmosphériques défavorables (chaleur, anoxémie, humidité de l’air), un surmenage intense, l’usage de médicaments du type de ceux découverts sur la victime qui sont des substances dangereuses. À cet égard, les experts toxicologues confirment qu’il a été décelé dans le sang, les urines, le contenu gastrique et les viscères du défunt, une certaine quantité d’amphétamine et de méthyl- amphétamine, substances qui entrent dans la composition des produits pharmaceutiques retrouvés dans les vêtements de Simpson (…). Les mêmes experts précisent que la dose d’amphétamine absorbée par Simpson n’a pu, à elle seule, déterminer sa mort ; qu’elle a pu, par contre, l’entraîner à dépasser la limite de ses forces et, par là-même, favoriser l’apparition de certains troubles liés à son épuisement ».

37Faisant l’effet d’un électrochoc sur le monde du vélo et son public favori, on modifia les pratiques du cyclisme de compétition. Le ravitaillement en eau fut ouvertement autorisé et à partir de 1968, des contrôles anti- dopage furent effectués à l’arrivée des étapes.

38Malgré les précautions prises, la montée du Ventoux est restée une épreuve redoutable pour le sportif, professionnel ou amateur, qui s’y mesure. Par exemple, en mai 2008, on annonça encore la mort d’un cycliste par crise cardiaque. Le 29 mai 2012, un cycliste belge a succombé après avoir gravi le versant sud du Mont Ventoux : l’homme, âgé de 43 ans, s’est effondré, terrassé par une crise cardiaque, alors qu’il venait de mettre pied à terre au sommet du Ventoux par le versant sud. L’alerte a été donnée par son épouse qui le suivait en voiture. Le 9 septembre 2015, un cycliste belge de 32 ans est mort sur la route du Ventoux, côté Sud, après avoir percuté dans la descente une voiture qui arrivait en face. Moins d’un mois plus tard – le 29 septembre 2015 –, un autre cycliste de 64 ans mourra d’une crise cardiaque après avoir dépassé le chalet Liotard.

39Ces accidents ne sont d’ailleurs pas l’apanage du cyclisme. Une femme avait été retrouvée morte dans la neige, dans les années 1960, le visage labouré par des pierres : alors que son mari avait été cherché de l’aide au sommet du Ventoux, elle a pu se cogner le visage au sol en chutant. Mais l’explication n’avait guère convaincu, en raison de l’abondance de la neige ce jour (c’était d’ailleurs la cause de l’accident de leur DS Citroën). C’est pourquoi a été retenue l’idée qu’elle avait pu recevoir des pierres balayées par le mistral.

40La randonnée peut aussi mal finir, surtout en raison des risques de chute. Le 11 juin 2014, on retrouva inanimé un marcheur au lieu-dit les Alazards à Beaumont-du-Ventoux dans le Vaucluse, avec une blessure fatidique à la tête. La course de côte a laissé également son tribut : le 20 juin 1970, le belge André Willem s’est tué à bord d’une Lotus F3, en percutant un arbre peu après le départ. Bien sûr, il ne faut pas faire de la cime comtadine une montagne trop noire ou trop violente. Sa vue et son ascension procurent des plaisirs à chaque fois renouvelés, dès lors qu’on fait preuve de prudence. Le Ventoux est surtout la montagne qui révèle, dans la performance physique et morale, l’homme à l’homme.

3-Le Ventoux qui révèle l’homme à l’homme

41L’identité d’un individu, d’une famille, d’un peuple se forge autant dans le spectacle de la nature qui l’entoure que dans son histoire. Toute culture a sa montagne magique : le Mont Fuji au Japon, le Kilimandjaro au Kenya, l’Athos en Grèce, l’Etna en Sicile, le Mont-Blanc dans les Alpes, le Canigou dans les Pyrénées, le Ballon de Guebwiller et le Hohneck dans les Vosges, etc.

42Avec ma grand-mère, j’avais souvent grimpé le Hohneck pendant les vacances passées dans les Vosges. On déjeunait à midi dans l’auberge paysanne qui s’était maintenue au sommet, avant d’aller marcher sur sa calotte. En Provence, ce sommet cosmique, cet Olympe – pour reprendre l’expression de René Char, reprise par Denis Jeambar – c’est le Mont Ventoux, sorte de vigie solitaire s’ouvrant au sud sur la Provence jusqu’à la mer. Pour l’amateur du Tour de France, elle représente une étape obligée et éprouvante, bien que motivante, entre les Pyrénées et les Alpes.

Le lieu des contrastes

43Le Mont Ventoux ne s’offre pas : il se mérite à vélo, à pied ou en courant, même en voiture, dont le moteur est mis à rude épreuve ; une fois en haut, le voyageur est toujours saisi par l’étrangeté du lieu, presque lunaire, par son dénuement, voire sa nudité ; par sa minéralité aussi – notamment le cliquetis des cailloux sous le pied. De la plaine, on s’interroge sur sa hauteur. L’humanité du Comtat laisse place, lorsqu’on s’élève, au désert : là-haut, même les oiseaux s’arrêtent de chanter et seules les fleurs de pierrier peuvent espérer s’y maintenir. La chaleur du bas s’évanouit devant la fraicheur de la cime. La verdure des flancs laisse peu à peu la place aux cailloux de la crête, à ce que l’on appelle chez les scientifiques la « casse ». L’habitat abrité dans la vallée disparaît progressivement lorsqu’on grimpe au sommet, très exposé au vent hurlant et giflant ; la limpidité du ciel peut se ternir dans la brume des hauteurs ; il n’est pas rare, sous un ciel radieux, de voir une masse nuageuse s’arrêter sur le Ventoux – on évoque alors la présence d’une « mer de nuages » – et y déverser eau à la belle saison, brouillard et neige en hiver.

La montagne miroir

44Pour Denis Jeambar, le Ventoux est aussi une montagne miroir qui permet tout simplement à l’homme de voir son oeuvre :

  • 19 Jeambar (Denis), « Ma montagne magique », Le Point, janvier 2007.

Vue du sommet du Ventoux, la Provence, c’est l’aboutissement de la notion de paysage, une terre dessinée par l’homme, une œuvre révélatrice d’une culture et d’une civilisation. Il faut être là-haut, sur cette étroite plate-forme désertique, brûlante en été, polaire en hiver pour prendre la mesure de cette réalité et de cette saisissante beauté19.

Le lieu où l’homme se mesure à lui-même et aux autres

45Le Ventoux est également le lieu où l’homme se mesure à lui-même et aux autres, dans le cadre des courses automobiles, motocyclistes et cyclistes. Le sportif devient une sorte de demi-dieu, en s’élevant presqu’à la hauteur des dieux. Le prestige dont il jouit devient immense, à tout le moins surdimensionné. Il s’érige en véritable héros, à l’image d’un Zeus, authentique reflet de la perfection divine. Les coureurs automobiles, les cyclistes et, dans une moindre mesure, les motards du Mont Ventoux n’ont pas échappé à cette promotion quasi-divine.

Les chevaux vapeur à l’épreuve du Ventoux : les courses de côte

46La première ascension en voiture – en réalité, en quadricycle à moteur- s’est faite sur une De Dion-Bouton, commandée par Marius Masse le 12 septembre 1900. Des courses de côte automobiles, impliquant également des motos et des side-cars, ont été organisées dès 1902 sur le Mont Ventoux par l’Automobile Club d’Avignon et le journal l’Auto-Vélo. Paul Chauchard (1871-1916), sur Panhard-Levassor, a été le premier vainqueur en 1902, ayant parcouru les 21,6 kilomètres en 27 minutes 17 secondes soit une moyenne de 47,501 km/h. En 1903, le record est battu par Danjean sur Richard-Brasier en 25 minutes 25 secondes. En 1904, Henri Rougier (1876-1956), sur Turcat-Méry, améliora le score en faisant 21 minutes 12 secondes sur le même trajet. La compétition suivante a été organisée le 17 septembre 1905, après une course de voiturettes gagnée par M. de la Touloubre, sur Darracq en 25 minutes 39 secondes, et par celle des motocyclettes dont le vainqueur avait été M. Lamberjack, sur Griffon, en 25 minutes 18 secondes. Le record de la montée est de nouveau amélioré par Alessandro Cagno (1883-1971), sur Fiat, en 19 minutes 13 secondes, qui a roulé avec une moyenne de 66,441 km/h. Le 13 septembre 1908, Paul Pablot (1873-1932), sur Brasier quatre cylindres, emporta le record avec 19 minutes 8 secondes soit une moyenne de 67 km/h. L’histoire de cette course se déroule en trois temps. La période écoulée entre 1902 et 1913 appartient aux pionniers. Ettore Bugatti (1881-1947) participa lui-même comme pilote à la course de côte de 1912.

  • 20 Mondon (Bernard), « Maurice Trintignant... L’adieu au Ventoux », Les Carnets du Ventoux, 3e trimest (...)

47On attribue la période de 1921 à 1936 aux « gentlemen drivers ». La dernière période, comprise entre 1947 à 1976, renvoie aux temps modernes, où la vitesse atteint des niveaux bien plus élevés. La moyenne de 100 km/h est dépassée en 1957 par Willy Daetwyler sur Maserati. En 1969, Peter Schetty sur Ferrari 212 E établit le record de 129,422 km/h. Parmi les champions de cette course de côte, on se doit d’évoquer Maurice Trintignant20, décédé en 2005, auquel la commune de Bédoin a rendu hommage en scellant une plaque commémorative située près de la ligne de départ, à la sortie du village en direction du Ventoux. De 1902 à 1936, le départ était donné à Bédoin, alors que l’arrivée se faisait au sommet. De 1937 à 1976, le départ se fit au virage de Saint Estève, avec une arrivée au chalet Reynard.

48Enfin, depuis une courte restauration de la course en 1988, le tracé se déroula sur 10 kilomètres. Le centenaire de la création de la compétition donna lieu à la toute dernière course de côte du championnat de France (2001).

49Depuis 2009, a été créée à partir de Malaucène la Ronde du Ventoux, présentée comme une version « Historic » de l’évènement initial ; elle s’est renouvelée par la suite. Cette course permit notamment à des motos et des side-cars anciens de se mesurer (2011, 2013 et 2015, par exemple).

Le Ventoux comme « Dieu du Mal » auquel il faut sacrifier (Roland Barthes)

50Roland Barthes est à l’origine d’une authentique mythologie sur le cyclisme. Dans son écrit sur « Le Tour de France comme épopée », il présente le Mont Ventoux comme un « Dieu du Mal » qui réclame des sacrifices humains :

Le Ventoux, lui, a la plénitude du mont, c’est un Dieu du Mal, auquel il faut sacrifier. Véritable Moloch, despote des cyclistes, il ne pardonne jamais aux faibles, se fait payer un tribut injuste de souffrances. Physiquement, le Ventoux est affreux : chauve (atteint de séborrhée sèche, dit l’Équipe), il est l’esprit même du Sec ; son climat absolu (il est bien plus une essence de climat qu’un espace géographique) en fait un terrain damné, un lieu d’épreuve pour le héros, quelque chose comme un enfer supérieur où le cycliste définira la vérité de son salut : il vaincra le dragon, soit avec l’aide d’un dieu (Gaul, ami de Phoebus), soit par pur prométhéisme, opposant à ce dieu du Mal, un démon encore plus dur (Bobet, Satan de la bicyclette).

51Dans son ouvrage « Mythologies », il compara les cyclistes aux guerriers homériques de l’Iliade. À ses yeux, les coureurs ne font que reproduire le duel entre Hector et Achille, lorsqu’ils se lancent dans l’ascension d’une montagne. Mais le dopage, qui est un sacrilège, est venu ternir le combat :

  • 21 Barthes (Roland), Mythologies, Paris, Seuil, 1957, p. 106.

Doper le coureur est aussi criminel, aussi sacrilège que de vouloir imiter Dieu ; c’est voler à Dieu le privilège de l’étincelle21.

Quelques palmarès remarquables sur le « Ventoux du ciel et du diable » (Jacques Goddet)

52Avec le début du XXe siècle apparaît une notion nouvelle, celle de record. On n’y songeait guère autrefois, sans doute parce que le temps se mesurait autrement, au rythme du soleil. Quoi qu’il en soit, la nouvelle ère qui s’ouvre tient pour essentielle la maîtrise du temps en prônant son accélération : il faut aller vite. D’où l’idée d’organiser des courses, notamment de vélos.

  • 22 Brun (Georges), Le Mont Ventoux : Recueil de textes anciens et modernes, Graveson, Le Nombre d’Or, (...)

53À Carpentras, deux personnes – MM. Curabec et Moulin – eurent l’idée d’organiser la première course de vélo sur le Mont Ventoux, avec un départ à Carpentras, au lieu-dit le Quinconce, et une arrivée sur la terrasse de l’Observatoire en août 1900. Une quarantaine de cyclistes prit part à cet événement sportif, à une époque où le changement de vitesse n’existait pas. C’est pourquoi les abandons furent nombreux, en général aux étapes les plus difficiles (Combe de Rolland, Chalet Reynard). Seuls trois coureurs arrivèrent au sommet : le vainqueur fut un bucheron habitant les Baux qui avait l’habitude d’aller à son travail en bicyclette ; le second était dénommé Francis Bouyer22, futur président du Conseil général ; le troisième, M. Viret, venait de Pernes.

  • 23 Ughetto (André), « Mont-Ventoux, le temps des compétitions cyclistes », Les Carnets du Ventoux, Déc (...)

54Ce n’est que plus tard, en 1951, que le Ventoux se fit connaître comme une étape du Tour de France23. Pour les habitants locaux, le passage du Tour a toujours été un évènement à ne pas manquer, une véritable fête quasi-votive, même si les autorités publiques – préfecture, gendarmerie, police, services de secours, communes concernées – doivent mettre en place une logistique coûteuse et compliquée. De toute façon, les retombées financières de cet évènement international, suivi par plusieurs millions de téléspectateurs (au moins 12 millions), sont toujours positives, même localement. Une marée humaine envahit en une journée les pentes surchauffées du Ventoux, particulièrement depuis le virage de Saint Estève. Il revient aux autorités publiques de canaliser cette foule se sentant en vacance, d’assurer la sécurité des spectateurs insouciants et des coureurs, enfin de préserver l’environnement fragile. Pas moins de 15 dates sont à retenir. On annonce un seizième passage du Mont Ventoux pour juillet 2016.

55Le 22 juillet 1951, Lucien Lazaridès passa le premier le Ventoux, mais Ferdi Kubler l’emporte au classement général. Le 9 juillet 1952, Jean Robic s’illustra sur le Ventoux, alors que Fausto Coppi remportera le tour. Le 18 juillet 1955, le grand champion Louison Bobet arracha la victoire. La quatrième arrivée sur le Mont Ventoux s’est faite le 13 juillet 1958, avec la victoire imposante de Charly Gaul. Le 6 juillet 1965, c’est Raymond Poulidor qui franchit en vainqueur le sommet du Ventoux. Le passage du 13 juillet 1967 sera marqué par le décès de Tom Simpson. Roger Pingeon finit par emporter le tour. Le 10 juillet 1970, c’est au tour d’Eddy Merckx de franchir le premier le sommet. Il s’écroula victime d’un malaise peu après. Une nouvelle traversée du Ventoux permit au français Bernard Thévenet de s’affirmer, le 13 juillet 1972, devant Luis Ocana, Eddy Merckx et Raymond Poulidor. Le 10 juillet 1974, Gonzalo Aja passa en tête sur la terrasse de l’Observatoire. Le 19 juillet 1987, le français Jean-François Bernard entra dans la légende, en franchissant le premier le col. Le 18 juillet 1994, Eros Poli s’imposa devant les grimpeurs aguerris. Le 13 juillet 2000, le « pirate » italien Marco Pantoni devança Lance Amstrong sur le sommet.

56Le 21 juillet 2002, Richard Virenque s’imposa en solitaire face à Alexandre Botcharov et Lance Amstrong. Il se fit une renommée en menant avec succès une échappée solitaire dans l’ascension du Ventoux et déclara : « Pour moi, le Ventoux incarne la montagne, mais aussi la Provence et une certaine magie (…). Au Ventoux, on peut tout connaître. Avoir très chaud ou mourir de froid, lutter contre la pente mais aussi contre le vent. Le Ventoux, il t’impose au combat, et quand tu arrives à le dompter, c’est fort ».

57Le 25 juillet 2009, c’est au sommet du Ventoux, au cours d’un sprint, que Juan Manuel Garate a réussi à prendre l’avantage et remporter l’étape du Ventoux. Peu de temps auparavant, Rama Yade, secrétaire d’État aux sports était venue visiter le « Mont chauve ». Enfin, le 14 juillet 2013, Chris Froome lâcha au sprint Contador et Quintana, pour s’imposer au sommet. Jacques Goddet (1905-2000), Directeur Général du Tour de France de 1946 à 1987 écrira à René Chauvin la lettre suivante, au sujet de cette course et, particulièrement, du sacrifice de Tom Simpson, lettre parue dans Les Carnets du Ventoux de 1987 :

Il fallait bien que dans ses œuvres les plus indispensables le Seigneur plaçât cette énorme et superbe proéminence, au service du Tour, entre Pyrénées et Alpes. Par sa beauté insolite, pour son élégance poétique aux senteurs provençales, butoir s’offrant aux coups du mistral, et pour sa rudesse impitoyable envers les champions pédalant comme envers tous les servants de la petite Reine.

Le Ventoux est là pour interdire le répit, pour maintenir le climat d’angoisse et d’incertitude. Et pour établir les vraies hiérarchies en soudant aux moments les plus opportuns les âmes et les esprits, comme les mollets et les reins.

Ventoux du ciel ! Ventoux du diable ! Il a été créateur de prouesses ! Il a suscité le drame ! Pour l’ambition de le vaincre, un Tommy a livré, sur les flancs brûlants du sommet, son corps d’athlète au sacrifice suprême. Sacrifice qui devrait démontrer, pour toujours, que la nature ne peut pas accepter que l’être humain, serait-il champion cycliste, ne respecte pas les règles fondamentales de la vie, ni celles, morales, du sport.

Le témoignage d’un cycliste amateur

58L’ascension du mont Ventoux, par Victor, Agoravox, 16 mai 2015

(…) Puis, au sortir de ce village, tu as quelques lignes droites d’un petit pourcentage jusqu’au fameux virage de Saint Estève. Pas de problème.

Mais à partir de là, tu attaques dans le dur : du huit pour cent. Et tu pédales, tu appuies. Tu as la forme, ça se passe bien. Tu grimpes avec ton premier souffle... Un, deux, aspiration sur deux coups de pédales, un temps mort sur un coup de pédale, un, deux, trois, tu souffles sur trois coups de pédales. Et tu recommences (…).

Puis tu arrives aux sept virages. Le premier, à droite, tu te sens costaud, tu le prends à la corde, d’un coup de rein rageur. Les six autres, tu élargiras de plus en plus ta trajectoire (…).

Te voilà dans la partie étouffante de l’ascension, dans la forêt de cèdres, de pins Lariccio, de chênes blancs, de chênes verts. La route monte, monte... Tu guettes les bornes : sommet 12 km, sommet 10 km... Au mois de mai, il fait encore frais, mais en juillet, la chaleur est terrible. Les cigales te foutent un raffut pas possible (…).

La sueur coule. Le goudron fond par plaques (…). Et c’est long, c’est long... Puis, après quelques virages à gauche, tu arrives au Chalet Reynard. Ouf... Un petit faux plat descendant de trois cents mètres en large virage à gauche (…).

Puis, virage à droite et te voilà sur la Lune, ou sur Mars.

De la caillasse blanche, squelette de pierres concassées. Tu le vois enfin le sommet. La flèche de l’antenne télé. Les bâtiments de l’ancien observatoire... À main droite, tu as cette pente qui monte vers un infini minéral. À main gauche, ta vue, si elle n’est pas trop embuée, découvre les vastes plaines provençales écrasées de soleil, avec au loin le scintillement serpentin du Rhône et l’éblouissement des serres de verres... Et voilà maintenant le vent. Il y a toujours du vent au Ventoux. Par définition. Tu l’as toujours dans le nez. Les lacets sont longs, très longs. Tu as mis le 28 depuis longtemps. Tu n’en peux plus. Tu te demandes ce que tu fous dans cette galère....

(…) Voilà le Col des Tempêtes. Tu tournes à gauche, le parapet, à main droite, te découvre les montagnes riantes, domestiques, humaines de la Drôme provençale. Le vent te rafraîchit. Le voilà le sommet. À quelques coups de pédales. Une pente raide de deux hectomètres, puis virage à droite et le dernier rampaillou, brutal, jusqu’au sommet ! Ouarff ! Tu gueules ta joie ! Tu oublies ta fatigue monumentale. Tu oublies cette heure et demie de torture. Ta compagne te sèches avec une serviette et te donnes un thermos de thé chaud. Le bonheur ! Voilà ce que c’est pour moi, l’Ascension ! Chacun son fantasme.

59Dans les années 2000, on vit apparaître une nouvelle épreuve sportive tout à fait originale, portée par l’association « Les Cinglés du Mont- Ventoux » : l’objet de la course organisée par cette structure est la grimpée du Mont-Ventoux trois fois, dans la même journée, par les trois routes de Bédoin, Malaucène et Sault (136 km et 4 285 m de dénivellation).

Notes

1 Jully (Jean-Jacques), « Les Trompettes en terre cuite du Mont Ventoux », Les Carnets du Ventoux, Juillet 1992, p. 139.

2 De cette légende est née l’idée d’un livre de réflexion religieuse : Jossua (Jean-Pierre), La chèvre du Ventoux - Journal pour chercher la sagesse, Paris, Ed. du Cerf, 2001.

3 Ces développements sont inspirés en grande partie d’une conférence donnée à Mazan le 19 décembre 2015 (dans le cadre des activités de l’Association philosophique, culturelle et sociale de Mazan et du Comtat-Venaissin) et d’un article que j’ai intitulé « Le Sacré du Ventoux », publié aux Etudes Comtadines (1er trimestre 2016). Nous remercions M. Jean- Paul Chabaud de l’avoir accueilli dans la revue qu’il a créée.

4 Abbé E. Bourgue (Curé de Bedoin), Histoire de Bédoin. Bédoin Souvenirs. Carpentras, Imprimerie Batailler, 1965, p. 55.

5 Robb (Graham), Une histoire buissonnière de la France, Paris, Flammarion, 2013.

6 Expilly (Jean-Joseph), Dictionnaire géographique, politique et historique des Gaules, Paris, 1766, p. 791.

7 Hue (Jean-Louis), L’Apprentissage de la marche, Paris, Grasset, 2010.

8 Avignon, Archives départementales du Vaucluse, 11 M 364 : Note de l’Académie de Vaucluse, 11 M 364.

9 Le Roy Ladurie (Emmanuel) et Liechtenhan (Francine-Dominique), Le voyage de Thomas Platter 1595 - 1599 : Le siècle des Platter, t. 2, Paris, Fayard, 2000.

10 Laval (Antoine J. de), « Voyage du Mont-Ventoux, pour déterminer la hauteur et la latitude de cette montagne », Journal de Trévoux, mai 1714, c. 895-918, ici c. 905 (reprint Genève, Slatkine, 1968, p. 240).

11 « Une excursion au Mont Ventoux », Revue sextienne (Aix-en-Provence, A. Makaire), 1881.

12 Lettre du 3 septembre 1934 de l’ingénieur en chef des Ponts et chaussées à l’Inspecteur principal des eaux et forêts (Arch. Dép., 11 M 364).

13 Pèlerinage au Mont-Ventoux, par François Seguin, suivi de Santo-Croux douas letro a ma bravo sore touneto, par Joseph Roumanille, Avignon, chez F. Seguin éd., 1852.

14 Damian (Gérard), « Les Pèlerins de la randonnée », Les Carnets du Ventoux, 2e trimestre 2007, p. 29.

15 Jossua (Jean-Pierre), La chèvre du Ventoux - Journal pour chercher la sagesse, Paris, Ed. du Cerf, 2001.

16 Ughetto (André), « Vélocio, une légende sans pareille dans le monde du cyclotou- risme », Les Carnets du Ventoux, 1er trimestre 2003, p. 19 ; Henry (Raymond), « Vélocio, un précurseur », Les Carnets du Ventoux, 3e trimestre 2006, p. 31.

17 Madelène (Henri De la), Contes comtadins, Paris, Charpentier, 1974, p. 207-296.

18 Brun (Georges), Le Mont Ventoux, Graveson, Le Nombre d’or, 1969.

19 Jeambar (Denis), « Ma montagne magique », Le Point, janvier 2007.

20 Mondon (Bernard), « Maurice Trintignant... L’adieu au Ventoux », Les Carnets du Ventoux, 3e trimestre 2005, p. 24.

21 Barthes (Roland), Mythologies, Paris, Seuil, 1957, p. 106.

22 Brun (Georges), Le Mont Ventoux : Recueil de textes anciens et modernes, Graveson, Le Nombre d’Or, 1977, p. 197.

23 Ughetto (André), « Mont-Ventoux, le temps des compétitions cyclistes », Les Carnets du Ventoux, Déc. 1994, p. 64.

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