Faire le OFF
| ,Préface
Texte intégral
1Cette étude sur les sociologies des publics du Festival OFF s'intitule judicieusement Faire le OFF. « Faire le Festival d'Avignon » relève d'une expérience singulière, idéale et idéalisée dans une carrière de spectateur.
2Ont été étudiées dans cette enquête les relations que les publics entretiennent avec le Festival OFF dans sa globalité, au-delà des critères esthétiques. Une des conclusions en est que le festivalier du OFF cherche à « constituer un cadre logistique le plus solide possible au sein duquel il ou elle va pouvoir s'épanouir par des parcours artistiques inventifs pendant son séjour ». Cette ambivalence entre un mode inventif de fréquentation - dont les hybridations se complètent souvent avec une fréquentation du Festival d'Avignon - et un socle solide au niveau des logements et du transport révèle l'identité principale du Festival OFF, et explique sa différenciation par rapport au festival « officiel ». Ce dernier s'est, dès ses origines, bâti en affichant une volonté originale dans la manière de « fabriquer » son public, avec une part du contrat élaboré en direction du public qui constitue un des moteurs de la forme festivalière à l'œuvre, qui en justifie à la fois les dynamiques et les configurations à partir desquelles on s'est représenté la manifestation avignonnaise. Le plaisir ne nait donc pas seulement de l'œuvre elle-même mais également dans le moment de la représentation. Le plaisir, lorsqu'il naît de ce moment, résulte toujours d'une coïncidence particulière et rare entre soi et les autres. Ce moment précis où l'on se vit « soi-même comme un autre » dirait Ricœur, un moment propre à toutes les expériences culturelles marquantes de notre vie.
3On « fait » effectivement le OFF, dans cette ville où les arts vivants se répandent un mois comme un liquide, partout, dans tout espace de rez-de-chaussée, et surtout dans les rues, dans chaque place, il faut « faire » son chemin, son parcours, son festival. Ce parcours est souvent exigeant : fatigue, chaleur, foule ou mistral violent rendent le rituel souvent masochiste. Il est très exigeant aussi de par la diversité des genres proposés qui en font à la fois la richesse, et la « jungle » que certains critiquent. Une exigence qui n'a eu de cesse de demander à son public d'apprendre à se réinventer afin d'évoluer au rythme des différentes éditions du Festival OFF.
4Si le Festival OFF est souvent qualifié de « festival parisien », l'étude de Quentin Amalou et de Damien Malinas révèle l'importance du public local, devant le public parisien et d'Île-de-France, et ses modes de consommation spécifiques du théâtre à l'année et en juillet. Elle nous éclaire aussi sur l'importance des publics jeunes et âgés, et leurs pratiques. Ce sont des apports considérables pour notre compréhension de ce qui fait la spécificité de cet événement culturel si singulier qui se déroule à Avignon en juillet. Cette étude constitue par conséquent un outil important et utile pour les professionnels du Festival OFF, et au-delà pour toute personne souhaitant approcher l'environnement de ce moment délicieux de l'été provençal.
© Éditions Universitaires d’Avignon, 2019