• Contenu principal
  • Menu
OpenEdition Books
  • Accueil
  • Catalogue de 15381 livres
  • Éditeurs
  • Auteurs
  • Facebook
  • X
  • Partager
    • Facebook

    • X

    • Accueil
    • Catalogue de 15381 livres
    • Éditeurs
    • Auteurs
  • Ressources numériques en sciences humaines et sociales

    • OpenEdition
  • Nos plateformes

    • OpenEdition Books
    • OpenEdition Journals
    • Hypothèses
    • Calenda
  • Bibliothèques

    • OpenEdition Freemium
  • Suivez-nous

  • Newsletter
OpenEdition Search

Redirection vers OpenEdition Search.

À quel endroit ?
  • ENS Éditions
  • ›
  • Sociétés, espaces, temps
  • ›
  • Enquêter sur les relations professionnel...
  • ›
  • Partie II. « Trouver sa place » : ce que...
  • ›
  • Enquêter en (ex-)syndicaliste ? Retour s...
  • ENS Éditions
  • ENS Éditions
    ENS Éditions
    Informations sur la couverture
    Table des matières
    Liens vers le livre
    Informations sur la couverture
    Table des matières
    Formats de lecture

    Plan

    Plan détaillé Texte intégral Pourquoi enquêter sur le syndicalisme ? Carte de visite militante et triple risque d’enclicage Confiance contre implication : la réciprocité de la relation ethnographique Paradoxes de l’observation participante en milieu militant « Neutralité axiologique », ou recherche scientifique et militante ? Positionnement d’enquête et position dans le champ académique Bibliographie Notes de bas de page Auteur

    Enquêter sur les relations professionnelles

    Ce livre est recensé par

    • Samuel Zarka, La Nouvelle Revue du Travail, mis en ligne le 30 avril 2025. URL : https://journals.openedition.org/nrt/19824 ; DOI : https://doi.org/10.4000/13uoa
    Précédent Suivant
    Table des matières

    Chapitre 7

    Enquêter en (ex-)syndicaliste ? Retour sur un positionnement d’enquête militant en terrain syndical

    Gabriel Rosenman

    p. 157-174

    Texte intégral Bibliographie Notes de bas de page Auteur

    Texte intégral

    […] contre l’orthodoxie méthodologique qui s’abrite sous l’autorité de Max Weber et de son principe de « neutralité axiologique » (Wertfreiheit), je crois profondément que le chercheur peut et doit mobiliser son expérience, c’est-à-dire ce passé, dans tous ses actes de recherche. Mais qu’il n’est en droit de le faire qu’à condition de soumettre tous ces retours du passé à un examen critique rigoureux.1

    1Longtemps organisations de référence du mouvement ouvrier, les syndicats ont suscité nombre de travaux historiographiques, sociologiques ou de science politique – en particulier lors des décennies d’après-guerre et dans le sillage du pic d’influence du marxisme universitaire. Mais cette centralité de l’objet syndical a ensuite largement pâti de la « crise du syndicalisme » (Mouriaux 1998) survenue au début des années 1980. En France, la plupart de ces travaux ont donc précédé le « tournant réflexif » des sciences sociales, laissant largement en friche jusqu’à une période récente les réflexions épistémologiques et méthodologiques émergeant d’autres champs de recherche, notamment sur le genre. Le syndicalisme présente pourtant des particularités intéressantes en tant qu’objet d’étude, à la croisée de la sociologie de l’action collective, de la sociologie des relations professionnelles et de la sociologie du travail. Il présente également une difficulté évidente quant aux modalités de l’observation participante : à la différence des nombreux mouvements sociaux basés sur une communauté de vues, l’adhésion à une section syndicale se fonde sur une communauté de condition. Pour s’engager dans une section syndicale, il faut en effet le plus souvent travailler pour l’entreprise concernée, ce qui explique sans aucun doute la rareté des enquêtes recourant à l’observation participante en terrain syndical.

    2C’est à ce chantier qu’entend contribuer le présent chapitre, grâce au rapport particulier à la pratique syndicale dont je bénéficie après une dizaine d’années en tant que cheminot et militant à la SNCF. En opérant un retour réflexif sur mon parcours biographique et sur les enquêtes que j’ai menées en terrain syndical, je me propose en effet d’interroger les effets d’un double rapport, à la fois militant et scientifique, à l’objet syndical : il s’agira ainsi de mettre en lumière « combien la porosité des frontières entre recherche et engagements participe à la production d’un savoir objectif » (Naudier et Simonet 2011, p. 16). Je m’efforcerai d’éclairer ce que peut signifier « enquêter en (ex-)syndicaliste » : pour reprendre la définition que donne Nancy Scheper-Hughes de « l’anthropologue comme camarade », mon positionnement d’enquête militant me situe en effet « à l’intérieur des événements humains, comme un être réactif, réflexif et moralement engagé, qui “choisit son camp” et porte des jugements » (Scheper-Hughes 1995, p. 419)2. Pour ce faire, cette contribution s’appuiera sur deux recherches menées en milieu syndical, et combinant à chaque fois immersion ethnographique, entretiens semi-directifs, exploitation d’archives syndicales et approche statistique. La première est une enquête portant sur la direction du syndicat cheminot Sud-Rail qui se propose d’analyser les évolutions de la composition de son bureau fédéral (BF) sur une période de vingt ans et de mettre en lumière l’articulation entre professionnalisation syndicale et renouvellement des dirigeants. La seconde est une recherche doctorale en cours sur la pratique des caisses de grève dans le mouvement ouvrier français : étudiant diverses expériences, depuis les origines du mouvement syndical jusqu’aux conflits les plus récents (cheminot·es, postier·ères, femmes de chambre, mouvement interprofessionnel de l’hiver 2019), j’y éclaire la tension entre tactique de lutte éphémère et institution syndicale de service aux adhérents. Ces deux enquêtes ont non seulement bénéficié des savoir-faire et des liens d’interconnaissance issus de mon expérience syndicale, mais elles ont aussi été largement déterminées par mon insertion militante sur le terrain, qui en est le corollaire. Elles illustrent ainsi la façon dont l’observation participante en milieu syndical peut faciliter l’accès aux pratiques militantes et en permettre la compréhension, lesquelles risqueraient autrement de demeurer hors de portée de la connaissance sociologique. En partant de ma propre expérience, il s’agira donc tout d’abord de présenter, en amont de l’enquête, les ressorts du choix du syndicalisme comme objet d’étude, puis d’examiner l’effet d’un positionnement militant sur les pratiques d’enquête en terrain syndical, pour enfin aborder les enjeux relatifs à la « neutralité axiologique ».

    Pourquoi enquêter sur le syndicalisme ?

    3On pourrait dire que le ressort principal du choix du syndicalisme comme objet d’étude est ce que Johanna Siméant-Germanos appelle la « libido politique » (Siméant-Germanos 2002, p. 20) : un ensemble de valeurs, de sympathies et de désirs qui sont propres au chercheur et qui situent le fondement de la recherche à l’extérieur du champ scientifique. Si j’ai ainsi choisi de travailler sur le syndicat Sud-Rail et sur les caisses de grève, c’est en raison de leur utilité pour le combat ouvrier, et parce que cela voulait dire enquêter sur des luttes pour lesquelles j’ai de la sympathie, sur des personnes dont je partage les préoccupations. Comme l’écrit Lilian Mathieu, ce sont ainsi des « ressorts non scientifiques mais normatifs [qui sont] au principe du choix d’un objet de recherche. L’enjeu, plus ou moins conscient ou explicite, peut être d’assurer une forme de légitimation de la cause dont on est membre ou sympathisant par une publicisation de ses enjeux et de son action » (Mathieu 2015, § 7). En d’autres termes, ces enquêtes visaient sans aucun doute, d’une part, à faire connaître plus largement un syndicat particulièrement combatif et à contribuer à sa réflexion interne, et, d’autre part, à analyser divers exemples d’une tactique de lutte décisive, dans l’espoir d’en diffuser les « meilleures » pratiques.

    4Mais, au-delà de cette « libido politique », le positionnement d’enquête militant que j’ai adopté trouve surtout ses racines dans mon parcours biographique. En effet, avant d’enquêter sur les syndicats et les grèves, j’ai moi-même été syndicaliste et organisateur de grèves pendant plusieurs années, et cet engagement a fortement déterminé les conditions de mon entrée sur ces terrains d’enquête : les précisions suivantes permettront de comprendre à la fois « d’où je parle » et la façon dont les enquêté·es m’ont accueilli. J’ai découvert le militantisme alors que j’étais étudiant à l’université de Nanterre, en participant aux nombreuses mobilisations qui ont agité la jeunesse lors des années 2000. Dans la foulée de la longue grève étudiante de 2006 contre le « contrat première embauche » (CPE), j’ai décidé d’abandonner mes études de philosophie et d’anglais après la licence pour m’« établir » (Linhart 1978) comme salarié d’exécution dans une grande entreprise et y construire une implantation militante. En raison de la massification de l’enseignement supérieur et de la proportion croissante de salarié·es surdiplômé·es occupant des postes d’exécution, cette démarche m’a confronté à un déclassement moins prononcé que celui qu’ont vécu les normalien·nes maoïstes des années 1960 en entrant à l’usine. Le contraste avec mes socialisations antérieures, familiale (parents universitaires de « première génération ») comme scolaire (lycée bourgeois et classes préparatoires), s’est néanmoins avéré important. Mon premier choix s’est porté sur la SNCF, symbole à mes yeux de la combativité ouvrière depuis la grève de 1995, et j’y ai donc candidaté. Si j’ai d’abord essuyé un refus pour un poste de technicien (niveau bac + 2), j’ai par contre été recruté un mois plus tard sur un poste d’opérateur (niveau bac), et j’ai donc passé les neuf années suivantes comme aiguilleur, agent de manœuvre et agent-départ, à Mantes-la-Jolie puis à la gare Saint-Lazare. J’ai adhéré au syndicat Sud-Rail dès ma titularisation et j’y ai progressivement pris diverses responsabilités militantes, mon manque de connaissance de l’environnement ferroviaire étant compensé par l’expérience militante et les capitaux scolaires issus de mon passage à l’université. J’ai d’abord participé aux tournées syndicales et aux réunions de section, puis j’ai été élu délégué du personnel, membre du CHSCT puis du CE3. J’ai également assuré des mandats internes d’animateur de section et de membre du bureau régional du syndicat, avant de finir par représenter le syndicat de Saint-Lazare dans les débats nationaux de la fédération Sud-Rail. En conséquence, j’ai aussi été amené à animer des grèves au niveau local : présider des assemblées générales, y représenter le syndicat, y faire des propositions d’action et de stratégie… C’est dans ce cadre que j’ai notamment proposé la mise en place d’une caisse de grève locale pour la gare Saint-Lazare, pour la première fois depuis 1995, lors de la grève nationale des cheminot·es au printemps 2016, et que j’ai ensuite été désigné pour la gérer avec d’autres grévistes. Puis, après presque dix ans d’activité syndicale, j’ai finalement décidé de quitter la SNCF pour reprendre mes études en m’inscrivant dans un master de sciences sociales. Si ce désengagement a pris la forme consciente d’une démoralisation temporaire, il résulte en réalité de la combinaison de facteurs conjoncturels (rencontre amoureuse) et structurels (surcharge de responsabilités militantes, épuisement lié au fait de circuler constamment entre des milieux éloignés socialement et culturellement).

    5Je bénéficie, grâce à cette expérience, d’une connaissance intime du champ syndical et du milieu cheminot, on pourrait même dire d’une compréhension « indigène »4. Je suis familier du travail en horaires décalés, de l’environnement de travail du monde ferroviaire et de l’identité professionnelle des cheminot·es, du jargon et des nombreux sigles de la SNCF, par exemple. J’ai aussi fait l’expérience des relations entre exécutant·es et hiérarchie ou entre syndicats et direction, notamment à travers les instances représentatives du personnel. De même pour le fonctionnement de la fédération Sud-Rail et sa tradition militante, ou pour le type de préoccupations qui anime les dirigeant·es syndicaux·ales et les contraintes qui pèsent sur elles et eux. De la même manière, en enquêtant sur les caisses de grève, j’ai été confronté à une forte impression de familiarité, devant des situations militantes, des discussions stratégiques, des pratiques syndicales : j’ai reconnu chez les militant·es enquêté·es de nombreuses questions que je m’étais posées quand j’étais à leur place. Cette expérience militante m’a également fortement inscrit dans divers réseaux d’interconnaissance, au sein desquels j’ai ensuite été amené à évoluer lors des enquêtes de terrain : qu’il s’agisse en effet du milieu cheminot de la gare Saint-Lazare, que j’ai quotidiennement côtoyé au travail, du milieu militant de la fédération Sud-Rail et de Solidaires 92, avec qui j’ai milité plusieurs années, ou de militant·es et dirigeant·es syndicaux·ales d’autres milieux et organisations, que j’ai été amené à fréquenter régulièrement lors d’activités diverses. Dans la plupart des cas, les milieux sur lesquels j’ai ensuite enquêté me connaissaient donc préalablement comme militant, et c’est en tant que tel qu’ils m’ont en général accueilli. Pour la même raison, les différentes positions d’enquête qui m’ont été assignées reflétaient également mes prises de position militantes antérieures : mon expérience militante s’est en effet traduite par une position située, au sein des enjeux internes au champ syndical. Même après plusieurs années et une reprise d’études, je suis demeuré associé à mon étiquette antérieure de dirigeant régional de Sud-Rail Saint-Lazare, avec toutes les assignations implicites que cette étiquette pouvait charrier.

    Carte de visite militante et triple risque d’enclicage

    6Pour autant, je n’ai pas seulement subi ces assignations : c’est en effet de manière délibérée que je me suis à chaque fois présenté en terrain inconnu comme un ancien syndicaliste cheminot ayant repris des études de sciences sociales. J’ai ainsi fait de mon expérience militante une carte de visite, dans le double objectif d’inspirer confiance aux enquêté·es et d’amener la discussion avec eux sur le terrain d’un échange entre militants avertis. Et c’est bien dans ce cadre que se sont déroulés la plupart des entretiens, comme en attestent de nombreux échanges plus ou moins implicites. Mes interlocuteurs et interlocutrices ont, par exemple, souvent fait référence à des connaissances supposément partagées du fait de mon parcours antérieur (« comme tu sais, comme tu es de ce champ-là, enfin tu étais de ce champ-là »5). Mais ils et elles m’ont également renvoyé plus précisément à certaines dimensions de mon identité professionnelle (« tu sais comment ça se passe à la SNCF »6) ou syndicale (« la grève commence le 2 avril si j’ai bonne mémoire, mais c’est toi qui es à Sud-Rail »7). Une enquêtée a même ressenti le besoin de justifier sa pratique militante selon des critères politiques (« c’est très réformiste tout ça, je suis d’accord »8), sans que cela réponde au moindre commentaire de ma part. Enfin, on peut également mesurer l’importance de cette carte de visite militante par l’usage qu’en ont fait les enquêté·es eux·elles-mêmes : pour m’introduire auprès des travailleurs et travailleuses sans-papiers dont il organisait la grève, un postier syndicaliste m’a ainsi présenté comme « camarade et chercheur »9. Lors d’une visite à l’usine Permaswage en grève, cet enjeu a même suscité une forme de rappel à l’ordre de la part du dirigeant local de la CGT avec qui j’avais d’abord pris contact : alors que je m’étais seulement présenté comme sociologue devant les autres grévistes, il a jugé nécessaire d’ajouter immédiatement « surtout, c’est un cheminot ! »10. Ainsi, c’est comme si l’accès au terrain, ou tout au moins à certains terrains de discussion avec les enquêté·es, était conditionné par le partage d’une certaine expérience militante ou professionnelle commune (Landour 2013).

    7Malgré cette carte de visite militante, et malgré une importante familiarité avec les pratiques et les acteurs et actrices syndicaux·ales, mes expériences d’enquête n’ont pas échappé à certaines contraintes qui semblent inhérentes aux terrains syndicaux, du fait de leur caractère fortement clivé. J’ai par exemple été systématiquement confronté à un triple processus d’« enclicage », selon la formulation qu’en a donné Jean-Pierre Olivier de Sardan : « le chercheur peut toujours être assimilé, souvent malgré lui, mais parfois avec sa complicité, à une “clique” ou une “faction” locale », et risque ainsi « d’en reprendre les points de vue » et de « se voir fermer les portes des autres “cliques” locales » (Olivier de Sardan 1995, p. 102). Enquêtant sur des grèves en cours et sur leurs implications financières pour les grévistes, j’ai tout d’abord dû assurer ces dernier·ères de mon absence de lien avec un camp adverse, dans lequel se mêlaient indistinctement leur employeur, l’État et les médias : présenter mon parcours syndical et le positionnement militant de mes recherches est ainsi ce qui m’a presque toujours permis de désamorcer leur méfiance initiale. À une seule occasion, c’est au contraire mon statut académique qui a joué ce rôle, lorsqu’un syndicaliste du secteur bancaire m’a envoyé le SMS suivant avant de m’accorder un entretien : « par précaution, je souhaiterais voir ta carte d’étudiant. Tu comprends ma prudence, je ne veux pas me faire infiltrer par un flic »11. La méfiance, fréquente en terrains clivés, est encore renforcée ici par la nature particulièrement sensible des enjeux financiers. Malgré la mise en transparence des finances syndicales imposée par l’État depuis 2008, l’habitus syndical semble en effet maintenir l’argent de la grève dans une certaine « zone grise » : à l’image du conseil d’un syndicaliste du textile en 1906, il s’agit de ne « pas crier trop haut ce que l’on possède et encore moins ce que l’on ne possède pas » (Rist 1933, p. 438). Obtenir leur confiance a donc nécessité de s’inscrire dans leur camp et d’abandonner toute idée d’équidistance ou de neutralité entre grévistes et employeur : comme l’écrit Ghislaine Gallenga, « en de telles circonstances, il ne sert à rien d’afficher des signes de “neutralité” […]. La grève ne connaît que la logique de rapports de force paroxystiques et radicalisés » (Gallenga 2005, p. 728).

    8D’autre part, le risque d’enclicage s’est également posé au niveau des relations intersyndicales, notamment du fait de mon histoire militante à Sud-Rail. Les oppositions qui traversent le champ syndical m’ont en effet semblé suffisamment puissantes pour susciter chez les dirigeant·es fédéraux·ales d’autres organisations une réaction de méfiance à mon égard, menaçant d’appauvrir la qualité de nos échanges. Si j’ai donc privilégié une approche prudente, en faisant d’abord silence sur mon passé militant, c’était pour éviter que les dirigeant·es de la caisse de grève confédérale de la CFDT ou de la fédération CGT des cheminot·es, par exemple, ne me perçoivent comme l’informateur potentiel d’un syndicat concurrent. De manière très concrète, j’ai ainsi préféré les contacter sans passer par des réseaux militants communs, mais plutôt en me recommandant d’autres sociologues. À une occasion, la crainte que les traces de mon passé militant ne soient trop visibles sur internet m’a même amené à utiliser mon deuxième prénom pour initier la relation d’enquête, ce qui s’est finalement avéré difficile à tenir et surtout inutile. À chaque fois, je me suis en effet davantage livré en fin d’entretien, après avoir abordé les enjeux les plus délicats, lors d’échanges plus informels, toujours pour répondre à une interpellation sur les raisons de mon intérêt pour les caisses de grève. Et je me suis alors rendu compte que mes a priori semblaient pour le moins exagérés : un dirigeant syndical n’a par exemple accordé aucune attention à la présentation de mon parcours, quand un autre a en revanche exprimé une complicité immédiate en commençant à me tutoyer et en me confiant son passé de militant d’extrême gauche12.

    9Si ce jeu sur mon identité militante s’est donc avéré inutile dans le cadre des entretiens, il m’a en revanche permis d’assister à une scène de « coulisses » typique au sein de la CGT cheminots. Avec la complicité d’un dirigeant local, je me suis en effet mêlé aux militant·es de la CGT après une assemblée générale de cheminot·es grévistes en banlieue parisienne, et j’ai ainsi pu assister au débriefing organisé à l’occasion de la visite du secrétaire général de la fédération. Cette scène m’a donné accès à une approche interne des caisses de grève au sein de la CGT cheminots, notamment concernant le bilan critique de la cagnotte de 2018 et le conflit avec Info’Com-CGT. L’absence de filtre qui a caractérisé cet échange s’illustre notamment dans la mobilisation d’un « langage de coulisse » (Goffman 1973, p. 124) : les attaques ad hominem et les critiques acerbes des autres organisations (y compris à l’intérieur de la CGT) y contrastaient très fortement avec le style policé et la tonalité respectueuse de l’AG publique. Ma présence lors de cette discussion n’a été rendue possible que par un double quiproquo : d’un côté, les militant·es locaux·ales ne me connaissant pas, mes apartés avec le dirigeant local ont pu les amener à me prendre pour un cheminot cégétiste en déplacement ; de l’autre, le dirigeant fédéral ne connaissant pas toutes les personnes présentes, ma présence dans le local syndical et ma maîtrise du jargon ferroviaire ou des enjeux militants ont pu me faire passer pour un militant local à ses yeux. Sans jamais avoir à mentir sur mon appartenance à la CGT, j’ai toutefois eu un rôle actif dans l’entretien du quiproquo : alors qu’un premier échange entre sociologue et dignitaire syndical devrait, selon l’usage, se dérouler sur le mode du vouvoiement, le simple fait de le tutoyer dans un tel contexte a suffi à inscrire implicitement notre échange dans le registre des rapports entre camarades.

    10Enfin, le risque d’enclicage existe aussi à l’échelle intrasyndicale, du fait des conflits internes qui traversent de nombreuses structures. Enquêtant sur le syndicat Info’Com-CGT, j’ai par exemple fait l’erreur de contacter un ancien dirigeant en me recommandant de son successeur : je n’avais pas mesuré à quel point la succession avait été conflictuelle, et, alors que la conversation était bien engagée, la simple mention du dirigeant actuel a provoqué un refus d’entretien immédiat et l’échec de toutes mes tentatives ultérieures13. À l’inverse, c’est justement mon insertion militante dans le syndicat Sud-Rail qui m’a permis de m’entretenir avec des militant·es des différentes factions de ce syndicat. Connaissant mes prises de position antérieures, chacun·e a pu se faire sa propre idée sur mes motivations, et trouver un rôle à me donner dans les rapports de force internes : si certain·es ont pris l’entretien comme une occasion de se faire décerner un « brevet de radicalité », d’autres s’en sont servi pour régler leurs comptes avec certain·es dirigeant·es, ce que l’instance ne leur permettait sans doute pas de faire dans des cadres formels.

    Confiance contre implication : la réciprocité de la relation ethnographique

    11Une autre contrainte fréquemment rencontrée sur les terrains syndicaux est l’enfermement dans une forme de « langue de bois », c’est-à-dire la difficulté à faire sortir des dirigeant·es expérimenté·es du discours officiel de leur organisation. Là encore, cette contrainte est accentuée par la dimension clivée des situations de grève ou de concurrence intersyndicale : les dirigeant·es font alors preuve d’une vigilance à toute épreuve pour ne rien dire qui pourrait laisser entrevoir les faiblesses de leur organisation ou de la lutte qu’ils mènent. Et là encore, le positionnement militant dans l’enquête est ce qui m’a permis, à chaque fois, de percer cette cuirasse. Ce n’est qu’en donnant aux entretiens ou aux discussions informelles une tonalité d’échanges entre militant·es que j’ai pu amener les dirigeant·es, d’une part, à me transmettre des informations sensibles (notamment financières) sans crainte que cela puisse desservir leur combat, et, d’autre part, à se livrer davantage sur des dimensions biographiques et stratégiques, ou encore à formuler des doutes qu’ils n’expriment pas devant des « non-initiés ». Cette dimension relativement horizontale des échanges a notamment été facilitée par le partage de préoccupations communes liées à mes objets de recherche. Ainsi, mes interlocuteur·rices au sein de Sud-Rail partageaient ma curiosité sur l’histoire de la fédération et souhaitaient également percer le mystère du processus de renouvellement/professionnalisation de leurs propres instances dirigeantes. Les enquêté·es impliqué·es dans des caisses de grève étaient quant à elles et eux en demande de « bonnes pratiques », d’exemples issus d’autres secteurs ou d’autres périodes historiques susceptibles de les inspirer. En résumé, l’adoption d’un positionnement d’enquête militant est ce qui m’a à chaque fois permis de gagner la confiance des enquêté·es, sans laquelle il n’est le plus souvent pas possible d’accéder aux coulisses syndicales ou aux récits intimes des militant·es. Mais ce positionnement militant a également un coût, puisque la confiance obtenue m’oblige en retour : je me sens tenu par un pacte implicite à ne pas trahir les intérêts des enquêté·es ou leurs combats, ce qui implique parfois de laisser certaines dimensions dans l’ombre. Qu’il s’agisse par exemple de règlements de compte internes et d’attaques ad hominem, ou encore de pratiques de lutte à la légalité incertaine, je ne me sens en effet pas autorisé à « laver le linge sale » en public. Une telle impression reflète de manière intéressante à la fois mon sentiment de faire partie de la « famille » et la force du cadre de confiance au sein duquel les entretiens se sont déroulés.

    12Le positionnement d’enquête militant a également joué un rôle important quant aux modalités de l’observation participante et aux relations d’enquête nouées lors des terrains ethnographiques. Comme l’écrit Olivier Schwartz, « pour que l’enquête fonctionne, il faut accepter d’entrer sans réticence dans toute situation qui, si peu que ce soit, permet d’échanger une position d’observateur extérieur contre celle de partenaire ou d’acteur au sein du groupe étudié » (Schwartz 1993, p. 270). Et, comme c’est souvent le cas en terrains militants, mes expériences d’observations participantes se sont donc traduites par différents degrés de participation aux activités militantes des syndicalistes enquêté·es. Mais si « l’injonction à l’engagement est explicite et permanente […] quand on travaille sur des mouvements sociaux ou politiques » (Combes et al. 2011, p. 19), la puissance des assignations que j’ai ressenties a en revanche été proportionnelle à mon degré de familiarité avec les enquêté·es : l’intensité de mon implication militante durant l’enquête a été fonction de la force des liens qui me liaient antérieurement aux enquêté·es. J’ai ainsi expérimenté une absence d’assignation sur les terrains où je ne connaissais personne (grève de femmes de chambre), la possibilité de prendre part à un échange de bons procédés ponctuel là où mes rapports antérieurs étaient occasionnels (bureau fédéral de Sud-Rail), l’injonction à reprendre une activité militante quotidienne sur un terrain où existaient des habitudes militantes antérieures (grève de postier·ères du 92), et même l’inclusion d’office dans le groupe étudié là où mes liens étaient les plus forts et les plus quotidiens (grève des cheminot·es de la gare Saint-Lazare). Abordant chacun de ces terrains dans une position d’observateur relativement passif, les différents degrés d’implication militante que j’y ai endossés ont donc correspondu à chaque fois à un impératif surgi du terrain lui-même. J’ai par exemple participé à des actions d’occupation et à des collectes d’argent avec les postier·ères, car c’est ce à quoi ils et elles invitaient tous les soutiens extérieurs ; et si je suis intervenu lors de réunions du comité de grève des cheminot·es de Saint-Lazare et lors de leurs réunions syndicales internes, c’est parce que les participant·es m’ont directement invité à le faire. Quelles que soient mes intentions de départ, c’est donc toujours dans l’interaction avec les enquêté·es que s’est déterminée ma position d’enquête : comme l’écrit Christophe Broqua, « on ne décide pas seul de la distance à l’objet, mais conjointement avec les acteurs, dans un processus de négociation qui, s’il n’est pas toujours verbal, n’en est pas moins effectif » (Broqua 2009, p. 113).

    Paradoxes de l’observation participante en milieu militant

    13À plusieurs reprises, l’adoption d’un positionnement d’enquête militant a également donné lieu à une manifestation aiguë du « paradoxe de l’observateur », selon la formulation qu’en a donnée Olivier Schwartz : « pour étudier un groupe social, il faut l’observer, mais l’observer c’est le “perturber”, donc rendre sa connaissance difficile ou impossible » (Schwartz 1993, p. 271). En acceptant de tenir des rôles militants actifs pendant l’enquête, je n’ai en effet pu faire autrement que de « perturber » le terrain que j’observais, parfois de manière relativement significative. Lors de mon enquête sur le bureau fédéral de Sud-Rail, j’ai ainsi accepté la sollicitation de l’un des enquêté·es : comme contrepartie implicite d’un accès facilité au terrain, il m’a demandé de composer une série d’affiches et d’autocollants permettant à la fédération de s’adresser aux usager·ères lors de la grève du printemps 2018. L’implication dans cette « transaction » (Mathieu 2015, § 8) militante a d’abord modifié ma situation d’enquête : un membre du BF qui m’appelait « l’étudiant » depuis le début de l’enquête m’a ainsi surnommé « le rédacteur d’affiches »14, et un autre y faisait encore référence deux ans plus tard (« en 2018, d’ailleurs, tu nous avais fait un paquet d’affiches »15). Mais surtout, si j’ai pu observer le rôle des membres du BF dans la grève, ce fut donc dans un environnement saturé par mes propres productions iconographiques. Et c’est également dans ce cadre que j’ai été amené à réaliser l’affiche d’appel à dons pour la première caisse de grève nationale dans l’histoire de la fédération… avant de la prendre pour objet d’étude dès l’année suivante.

    14De manière un peu différente, la combinaison de mon positionnement d’enquête militant et du caractère multisitué de ma recherche sur les caisses de grève m’a également assigné à un double rôle d’expert et d’intermédiaire. J’ai ainsi été sollicité plusieurs fois pour donner des conseils à des animateurs de caisses, concernant le périmètre ou les règles de répartition à adopter : j’ai par exemple été contacté par les animateurs et animatrices de la coordination « Facs et Labos en lutte » avant le lancement de leur caisse de solidarité16, ce qui n’est pas très surprenant dans la mesure où il s’agissait à la fois d’une structure jeune et inexpérimentée et de mon propre secteur professionnel. C’était plus inattendu de la part des responsables de la caisse d’Info’Com-CGT, c’est-à-dire de la principale structure d’aide financière aux grévistes depuis plusieurs années. L’aide qu’ils avaient versée aux grévistes de la RATP en décembre 2019 était en effet paralysée par des tensions entre les structures syndicales de la CGT, de l’UNSA et de Solidaires, et ils cherchaient dans les expériences récentes de caisses de grève des idées pour contraindre ces derniers à travailler ensemble : j’ai pu les orienter vers la « cagnotte de soutien aux cheminots », qui avait fait face à des problèmes similaires en 2018, et les mettre en lien avec son initiateur17. De manière plus prévisible, j’ai aussi été sollicité par les responsables de la caisse des cheminot·es de la gare Saint-Lazare pour leur servir d’intermédiaire avec Info’Com-CGT, auprès de qui ils et elles voulaient faire une demande d’aide financière : je les ai donc aidés à calculer le montant de l’aide demandée, avant de la transmettre aux responsables d’Info’Com et d’organiser la « cérémonie » de remise du chèque aux grévistes18. Satisfait·es de cette expérience et de mon rôle d’intermédiaire, les grévistes de Saint-Lazare ont ensuite incité des grévistes d’autres sites à me solliciter : j’ai ainsi été contacté par des cheminot·es du Havre et de Strasbourg que je ne connaissais pas, et qui m’approchaient en disant « j’ai entendu que tu étais en lien avec Info’Com »19. Un dirigeant de Sud-Rail, que je connais pourtant assez bien, m’a même demandé d’organiser un versement pour sa gare, en pensant que je faisais partie des animateur·rices de la caisse d’Info’Com (« toi qui es dans le sérail »20). Enfin, les responsables de la CGT-HPE (Hôtels de prestige et économiques), à l’origine des nombreuses grèves de femmes de chambre, m’ont également sollicité pour organiser une rencontre entre militant·es et syndicats impliqués dans des expériences récentes de caisses de grève (femmes de chambre, postier·ères du 92, Info’Com-CGT, usine PSA d’Aulnay-sous-Bois, raffinerie Total de Grandpuits…)21. Après avoir enquêté séparément sur chacune de ces expériences, j’étais donc censé jouer le rôle de cheville ouvrière dans le premier événement militant qui réunirait l’ensemble de ces acteur·rices dans la même salle. Si cet événement n’a pas (encore ?) eu lieu, sa simple évocation a suffi à me plonger dans un abîme de perplexité. Mes premiers résultats de recherche (Rosenman 2019) illustraient en effet l’existence d’un « espace social » spécifique reliant ces acteur·rices marginaux·ales du mouvement syndical dans une trame de convergences politiques et de collaborations ponctuelles : critique commune des « bureaucraties syndicales », implication dans des réseaux militants liés à l’extrême gauche, dons réciproques entre caisses et participations croisées aux initiatives des un·es et des autres, en particulier dans le cadre du « Front social »22. La participation de tous·tes ces acteur·rices à un même événement dédié à la pratique des caisses de grève pourrait donc représenter un développement déterminant, mais quel sens lui donner s’il résultait principalement de mon intermédiation ?

    15Si toutes ces situations mêlant observation ethnographique et intervention militante ont quelque chose d’assez vertigineux, elles n’ont en revanche rien de nouveau : Maxime Leroy23, le juriste auteur de la première étude sociologique d’ensemble sur la CGT (Leroy 1913), n’avait-il pas lui-même participé directement à l’écriture de la Charte d’Amiens avant de la prendre pour objet d’étude ? Mais, aujourd’hui comme à l’époque, ces expériences soulèvent bien la question d’une hypothétique limite d’engagement maximal pour un sociologue, même en situation d’observation participante : elles invitent ainsi à réinterroger la notion canonique de « neutralité axiologique ».

    « Neutralité axiologique », ou recherche scientifique et militante ?

    16L’injonction à la neutralité pèse en effet de manière spécifique sur les recherches en terrains militants : le ou la chercheur·e, particulièrement s’il ou elle mène une enquête ethnographique, y est d’emblée suspecté·e de biais ou de partialité, d’autant plus s’il ou elle partage avec les enquêté·es des propriétés sociales, des convictions ou, pire, des appartenances organisationnelles (Broqua 2009). La validité scientifique des enquêtes serait ainsi comme inversement proportionnelle à l’implication militante de leurs auteur·rices. Les enquêtes en terrain syndical pâtissent du même soupçon délégitimant, ce qui semble avoir longtemps handicapé les questionnements réflexifs sur le rapport des chercheur·es à l’objet syndical. Selon Sophie Béroud, Karel Yon et Baptiste Giraud, le renouvellement de perspective est surtout le fait des « plus jeunes sociologues et politistes » : leur « rapport à l’action syndicale, qui se nourrit souvent d’ailleurs d’un lien de proximité militante avec tel ou tel segment de l’espace syndical, les incite […] à réinvestir ce champ de recherche à partir d’un intérêt – scientifique et politique – pour l’analyse des conditions de possibilité de la reproduction ou du renouveau de l’engagement et des mobilisations syndicales » (Giraud et al. 2018, p. 14).

    17Prendre acte de cette « proximité militante » et de ce double intérêt « scientifique et politique » revient à tourner le dos à la conception dominante de la « neutralité axiologique », qui se résume bien souvent à une « bienséance académique qui voudrait que la qualité de l’analyse sociologique soit directement corrélée à l’occupation d’une sorte de lieu neutre, présumé à l’écart de toutes déterminations et intentionnalités sociales » (Geay 2015, § 1). Or, on sait désormais à quel point cette conception découle d’une opération de traduction de la notion de Wertfreiheit qui est profondément orientée politiquement, dénaturant le sens que lui donnait Max Weber pour en faire « la désignation euphémisée d’un apolitisme droitier » (Weber et Kalinowski 2005, p. 208). Comme l’écrivait déjà Michel de Certeau en 1974 : « la “neutralité” renvoie à la métamorphose des convictions en idéologies dans une société technocratique et productiviste anonyme qui ne sait plus désigner ses choix ni repérer ses pouvoirs (pour les avouer ou les dénoncer) » (Certeau 1974, p. 15). S’affranchir de cette mystification équivaut au contraire à reconnaître que « la problématisation, le choix de la méthode, la façon de mener son terrain et d’en analyser le contenu sont déterminés par la position sociale et par le positionnement politique du ou de la chercheur·e » (Clair 2016, p. 70) : c’est le présupposé théorique qui fonde la possibilité de « faire du terrain en féministe » ou d’enquêter en (ex-)syndicaliste.

    18Si l’adoption d’un positionnement de recherche militant s’est jouée avant et pendant l’enquête de terrain, elle a également des conséquences après celle-ci, au moment de l’écriture. C’est bien sûr le moment où l’on formalise les choix théoriques et où l’on administre la preuve, mais c’est aussi le moment où l’on détermine les destinataires privilégié·es de la recherche. Je me suis en effet à chaque fois lancé dans l’écriture avec le souci que mes textes soient lisibles par les militant·es syndicaux·ales, et avec l’ambition qu’ils puissent leur être utiles. J’ai donc découvert avec plaisir que mes premiers articles avaient circulé dans certains segments du mouvement syndical, que mon mémoire sur Sud-Rail avait été lu dans le syndicat, ou encore que celui sur les caisses de grève était disponible sur les sites internet d’Info’Com-CGT et de la CGT-HPE. Si cette démarche de restitution aux acteur·rices conditionne souvent la poursuite de la relation d’enquête (Dunezat 2011), elle constitue également une perspective qui peut transformer la manière d’écrire : on n’écrit pas de la même manière selon que l’on s’adresse uniquement à ses pairs dans le milieu académique, ou que l’on cherche également à être lu et discuté par le milieu enquêté. Comme l’écrit Nicolas Hatzfeld, lui aussi ancien établi : « je ne peux m’empêcher, dans l’écriture de bien des textes, d’installer une relation imaginaire avec des interlocuteurs engagés. Cette relation trouve parfois l’occasion de se réaliser et de concrétiser l’échange au long cours entre recherche et engagement » (Hatzfeld 2009, p. 161).

    19C’est également ainsi que l’on peut comprendre l’effort constant de nombreux·euses historien·nes et sociologues du syndicalisme pour faire bénéficier les organisations syndicales des apports de leurs recherches : en écrivant pour diverses publications syndicales, en participant à des sessions de formation militante, ou encore en participant au conseil scientifique de l’Institut de recherche de la FSU ou à celui de l’Institut d’histoire sociale de la CGT. L’intention de mettre sa pratique des sciences sociales au service du mouvement social et syndical ne va pourtant pas de soi : elle se heurte en effet à une forte délégitimation des populations subalternes et de leurs organisations militantes. Cette délégitimation reproduit la « hiérarchie des crédibilités » qu’évoque Howard Becker pour désigner la pression sociale qui nous incite à donner spontanément plus de valeur aux propos des dominant·es, par exemple les directions d’entreprise, qu’à ceux des subalternes. C’est pour cette raison que l’accusation de biais émerge principalement quand « la recherche donne foi, d’une quelconque manière réelle, à la perspective du groupe subordonné dans une relation hiérarchique »24 (Becker 1967, p. 240), alors que le biais le plus fréquent est au contraire en faveur des dominant·es, au point de constituer la norme. Les procès en partialité visent en effet les recherches qui se mettent au service des organisations militantes ou syndicales, alors qu’y échappent systématiquement, par exemple, les recherches en management menées au profit des directions d’entreprise, celles en économie orthodoxe au profit des gouvernements et institutions financières, celles en chimie pour l’industrie pharmaceutique ou en physique pour l’industrie nucléaire. Comme si le rôle de la recherche pouvait être, sans problème déontologique, d’aider les dominant·es à perpétuer leur domination, mais non d’aider les dominé·es à la combattre.

    20Qu’il s’agisse d’amener des militant·es à percevoir les contraintes et les paradoxes qui les enserrent ou de les aider à dénaturaliser leurs pratiques, que l’on réinscrive leurs expériences dans une perspective historique qui peut leur échapper ou qu’on leur fasse découvrir des pratiques dont ils et elles pourraient s’inspirer, la recherche peut présenter de nombreuses formes d’utilité pour des mouvements militants. Plutôt que de prétendre à une neutralité artificielle, la recherche en sciences sociales gagnerait donc à assumer cette éventuelle dimension militante, à condition toutefois de s’appuyer sur les critères de la recherche scientifique comme sur des garde-fous. Comme le propose Howard Becker, il s’agit de « choisir un camp comme nos engagements personnels et politiques nous l’imposent, d’utiliser nos ressources théoriques et techniques pour éviter les distorsions que cela pourrait introduire dans notre travail, de limiter prudemment nos conclusions, de reconnaître la hiérarchie des crédibilités pour ce qu’elle est, et de répondre autant que faire se peut aux accusations et aux doutes que l’on rencontrera certainement »25 (ibid., p. 247).

    Positionnement d’enquête et position dans le champ académique

    21Pour conclure, je voudrais tenter un pas de plus dans l’effort réflexif et interroger la démarche même à laquelle je viens de me livrer. Écrire une telle contribution, centrée sur la défense d’un positionnement d’enquête militant et s’éloignant de la conception orthodoxe de la « neutralité axiologique », n’est en effet pas évident pour un jeune chercheur précaire, encore moins dans le contexte actuel26. Pourquoi donc prendre le risque d’une telle prise de position ? Un premier élément de réponse tient sans doute à l’impératif de fidélité que m’a imprimé l’expérience de l’établissement : le choix de l’objet syndical et mon positionnement d’enquête doivent beaucoup à mon parcours militant antérieur et, comme chez d’autres anciens établis, la volonté de mener des recherches utiles au mouvement ouvrier vient en partie compenser le sentiment d’avoir déserté la ligne de front. Mais il est difficile d’objectiver plus avant ce sentiment de dette sans s’aventurer en terrain psychanalytique. Le second élément de réponse semble plutôt relever des logiques internes au milieu académique (Bourdieu 2003) : défendre une recherche militante depuis une position d’outsider me permet peut-être d’adopter dans le champ universitaire une position homologue à celle que les syndicalistes que j’étudie occupent dans le champ des relations professionnelles. Comme si l’objet étudié pouvait en quelque sorte déteindre sur celles et ceux qui s’y consacrent.

    Bibliographie

    Des DOI sont automatiquement ajoutés aux références bibliographiques par Bilbo, l’outil d’annotation bibliographique d’OpenEdition. Ces références bibliographiques peuvent être téléchargées dans les formats APA, Chicago et MLA.

    Format

    • APA
    • Chicago
    • MLA
    Becker, H. S. (1967). Whose Side Are We On?. In Social Problems (Vols. 14, Issues 3, pp. 239-247). Oxford University Press (OUP). https://doi.org/10.2307/799147
    Bourdieu, P. (2003). L’objectivation participante. In Actes de la recherche en sciences sociales: Vol. n° 150 (Issues 5, pp. 43-58). CAIRN. https://doi.org/10.3917/arss.150.0043
    Broqua, C. (2009). L’ethnographie comme engagement : enquêter en terrain militant. In Genèses: Vol. n° 75 (Issues 2, pp. 109-124). CAIRN. https://doi.org/10.3917/gen.075.0109
    Clair, I. (2016). Faire du terrain en féministe. In Actes de la recherche en sciences sociales: Vol. N° 213 (Issues 3, pp. 66-83). CAIRN. https://doi.org/10.3917/arss.213.0066
    Gallenga, G. (2005). Une ethnologue dans la grève. In Ethnologie française: Vol. Vol. 35 (Issues 4, pp. 723-732). CAIRN. https://doi.org/10.3917/ethn.054.0723
    Geay, B. (2015). Commitment and reflexivity. Investigating militancy. In SociologieS (1–). OpenEdition. https://doi.org/10.4000/sociologies.5146
    Giraud, B., Yon, K., & Béroud, S. (2018). Sociologie politique du syndicalisme (1–). Armand Colin. https://doi.org/10.3917/arco.berou.2018.01
    Hatzfeld, N. (2010). De l’action à la recherche, l’usine en reconnaissances. In Genèses: Vol. n° 77 (Issues 4, pp. 152-165). CAIRN. https://doi.org/10.3917/gen.077.0152
    Linhart, R. (1978). L’établi. In Actes de la recherche en sciences sociales (Vols. 19, Issue 1, pp. 29-45). PERSEE Program. https://doi.org/10.3406/arss.1978.2585
    Mathieu, L. (2015). Sociology of commitments or committed Sociology?. In SociologieS (1–). OpenEdition. https://doi.org/10.4000/sociologies.5150
    Naudier, D., & Simonet, M. (2011). Introduction. In Des sociologues sans qualités ? (1–, pp. 5-21). La Découverte. https://doi.org/10.3917/dec.naudi.2011.01.0005
    Becker, Howard S. “Whose Side Are We On?”. Social Problems. Oxford University Press (OUP), January 1967. https://doi.org/10.2307/799147.
    Bourdieu, Pierre. “L’objectivation Participante”. Actes De La Recherche En Sciences Sociales. CAIRN, December 1, 2003. https://doi.org/10.3917/arss.150.0043.
    Broqua, Christophe. “L’ethnographie Comme engagement : Enquêter En Terrain Militant”. Genèses. CAIRN, August 28, 2009. https://doi.org/10.3917/gen.075.0109.
    Clair, Isabelle. “Faire Du Terrain En féministe”. Actes De La Recherche En Sciences Sociales. CAIRN, June 20, 2016. https://doi.org/10.3917/arss.213.0066.
    Gallenga, Ghislaine. “Une Ethnologue Dans La grève”. Ethnologie française. CAIRN, December 1, 2005. https://doi.org/10.3917/ethn.054.0723.
    Geay, Bertrand. “Commitment and Reflexivity. Investigating Militancy”. SociologieS. OpenEdition, November 2, 2015. https://doi.org/10.4000/sociologies.5146.
    Giraud, Baptiste, Karel Yon, and Sophie Béroud. “Sociologie Politique Du Syndicalisme”. []. Armand Colin, 2018. https://doi.org/10.3917/arco.berou.2018.01.
    Hatzfeld, Nicolas. “De l’action à La Recherche, l’usine En Reconnaissances”. Genèses. CAIRN, May 10, 2010. https://doi.org/10.3917/gen.077.0152.
    Linhart, Robert. “L’établi”. Actes de la recherche en sciences sociales. PERSEE Program, 1978. https://doi.org/10.3406/arss.1978.2585.
    Mathieu, Lilian. “Sociology of Commitments or Committed Sociology?”. SociologieS. OpenEdition, November 2, 2015. https://doi.org/10.4000/sociologies.5150.
    Naudier, Delphine, and Maud Simonet. “Introduction”. Des Sociologues Sans qualités ?. La Découverte, May 1, 2011. https://doi.org/10.3917/dec.naudi.2011.01.0005.
    Becker, Howard S. “Whose Side Are We On?”. Social Problems, vol. 14, no. 3, Oxford University Press (OUP), Jan. 1967, pp. 239-47. Crossref, https://doi.org/10.2307/799147.
    Bourdieu, Pierre. “L’objectivation Participante”. Actes De La Recherche En Sciences Sociales, vol. n° 150, no. 5, CAIRN, 1 Dec. 2003, pp. 43-58. Crossref, https://doi.org/10.3917/arss.150.0043.
    Broqua, Christophe. “L’ethnographie Comme engagement : Enquêter En Terrain Militant”. Genèses, vol. n° 75, no. 2, CAIRN, 28 Aug. 2009, pp. 109-24. Crossref, https://doi.org/10.3917/gen.075.0109.
    Clair, Isabelle. “Faire Du Terrain En féministe”. Actes De La Recherche En Sciences Sociales, vol. N° 213, no. 3, CAIRN, 20 June 2016, pp. 66-83. Crossref, https://doi.org/10.3917/arss.213.0066.
    Gallenga, Ghislaine. “Une Ethnologue Dans La grève”. Ethnologie française, vol. Vol. 35, no. 4, CAIRN, 1 Dec. 2005, pp. 723-32. Crossref, https://doi.org/10.3917/ethn.054.0723.
    Geay, Bertrand. “Commitment and Reflexivity. Investigating Militancy”. SociologieS, OpenEdition, 2 Nov. 2015. Crossref, https://doi.org/10.4000/sociologies.5146.
    Giraud, Baptiste, et al. Sociologie Politique Du Syndicalisme. [], Armand Colin, 2018. Crossref, https://doi.org/10.3917/arco.berou.2018.01.
    Hatzfeld, Nicolas. “De l’action à La Recherche, l’usine En Reconnaissances”. Genèses, vol. n° 77, no. 4, CAIRN, 10 May 2010, pp. 152-65. Crossref, https://doi.org/10.3917/gen.077.0152.
    Linhart, Robert. “L’établi”. Actes de la recherche en sciences sociales, vol. 19, no. 1, PERSEE Program, 1978, pp. 29-45. Crossref, https://doi.org/10.3406/arss.1978.2585.
    Mathieu, Lilian. “Sociology of Commitments or Committed Sociology?”. SociologieS, OpenEdition, 2 Nov. 2015. Crossref, https://doi.org/10.4000/sociologies.5150.
    Naudier, Delphine, and Maud Simonet. “Introduction”. Des Sociologues Sans qualités ?, La Découverte, 1 May 2011, pp. 5-21. Crossref, https://doi.org/10.3917/dec.naudi.2011.01.0005.

    Cette bibliographie a été enrichie de toutes les références bibliographiques automatiquement générées par Bilbo en utilisant Crossref.

    Becker Howard S., 1967, « Whose side are we on? », Social Problems, vol. 14, no 3, p. 239-247.

    10.2307/799147 :

    Bourdieu Pierre, 2003, « L’objectivation participante », Actes de la recherche en sciences sociales, no 150, p. 43-58.

    10.3917/arss.150.0043 :

    Broqua Christophe, 2009, « L’ethnographie comme engagement : enquêter en terrain militant », Genèses, no 75, p. 109-124.

    10.3917/gen.075.0109 :

    Certeau Michel (de), 1974, « L’opération historique », Faire de l’histoire, vol. 1 : Nouveaux problèmes, J. Le Goff et P. Nora dir., Paris, Gallimard, p. 3-41.

    Clair Isabelle, 2016, « Faire du terrain en féministe », Actes de la recherche en sciences sociales, no 213, p. 66-83.

    10.3917/arss.213.0066 :

    Combes Hélène, Hmed Choukri, Mathieu Lilian, Siméant-Germanos Johanna et Sommier Isabelle, 2011, « Observer les mobilisations. Retour sur les ficelles du métier de sociologue des mouvements sociaux », Politix, no 93, p. 7-27.

    Dunezat Xavier, 2011, « Travail militant et/ou travail sociologique ? Faire de la sociologie des mouvements sociaux en militant », Des sociologues sans qualités ?, D. Naudier et M. Simonet dir., Paris, La Découverte, p. 80-97.

    Gallenga Ghislaine, 2005, « Une ethnologue dans la grève », Ethnologie française, vol. 35, no 4, p. 723-732.

    10.3917/ethn.054.0723 :

    Geay Bertrand, 2015, « Engagement et réflexivité. Enquêter sur le militantisme », SociologieS. En ligne : [https://doi.org/10.4000/sociologies.5146].

    10.4000/sociologies.5146 :

    Giraud Baptiste, Yon Karel et Béroud Sophie, 2018, Sociologie politique du syndicalisme, Malakoff, Armand Colin.

    10.3917/arco.berou.2018.01 :

    Goffman Erving, 1973, La mise en scène de la vie quotidienne. 1, La présentation de soi, Paris, Minuit.

    Hatzfeld Nicolas, 2009, « De l’action à la recherche, l’usine en reconnaissances », Genèses, no 77, p. 152-165.

    10.3917/gen.077.0152 :

    Landour Julie, 2013, « Le chercheur funambule. Quand une salariée se fait la sociologue de son univers professionnel », Genèses, no 90, p. 25-41.

    Leroy Maxime, 1913, La coutume ouvrière. Syndicats, bourses du travail, fédérations professionnelles, coopératives, doctrines et institutions, Paris, Giard et Brière.

    Linhart Robert, 1978, L’établi, Paris, Minuit.

    10.3406/arss.1978.2585 :

    Mathieu Lilian, 2015, « Sociologie des engagements ou sociologie engagée ? Sur quelques problèmes axiologiques qui se posent à la sociologie des mobilisations », SociologieS. En ligne : [https://doi.org/10.4000/sociologies.5150].

    10.4000/sociologies.5150 :

    Mouriaux René, 1998, Crises du syndicalisme français, Paris, Montchrestien.

    Naudier Delphine et Simonet Maud, 2011, « Introduction », Des sociologues sans qualités ?, D. Naudier et M. Simonet dir., Paris, La Découverte, p. 5-21.

    10.3917/dec.naudi.2011.01.0005 :

    Olivier de Sardan Jean-Pierre, 1995, « La politique du terrain. Sur la production des données en anthropologie », Enquête, no 1, p. 71-109.

    Rist Charles, 1933, Essais sur quelques problèmes économiques et monétaires, Paris, Sirey.

    Rosenman Gabriel, 2019, Le nerf de la grève ? Stratégie de lutte et usage militant de l’argent dans les expériences récentes de caisses de grève en région parisienne, mémoire de master 2, EHESS / ENS.

    Scheper-hughes Nancy, 1995, « The primacy of the ethical: Propositions for a militant anthropology », Current Anthropology, vol. 36, no 3, p. 409-440.

    Schwartz Olivier, 1993, « L’empirisme irréductible », postface de Le hobo. Sociologie du sans-abri, N. Anderson, Paris, Nathan, p. 265-308.

    Siméant-Germanos Johanna, 2002, « Friches, hybrides et contrebandes : sur la circulation et la puissance militantes des discours savants », Discours savants, discours militants : mélange des genres, P. Hamman, J.-M. Méon et B. Verrier dir., Paris, L’Harmattan, p. 17-54.

    Weber Max et Kalinowski Isabelle, 2005, La science, profession et vocation. Suivi de « Leçons wébériennes sur la science et la propagande », Marseille, Agone.

    Notes de bas de page

    1 Bourdieu 2003, p. 55.

    2 Nous traduisons.

    3 Le CHSCT (Comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail) et le CE (Comité d’établissement) étaient des instances représentatives du personnel, remplacées depuis 2017 par un CSE (Comité social et économique).

    4 Voir à ce sujet le chapitre de Willy Gibard et Lucas Winiarski dans cette partie.

    5 Entretien avec Romain Altmann, secrétaire général d’Info’Com-CGT, le 22 janvier 2019.

    6 Entretien avec Éric Descamps, trésorier de la fédération Sud-Rail, le 11 mars 2020.

    7 Entretien avec Jean-Marc Salmon, initiateur de la collecte de soutien aux cheminot·es, le 19 novembre 2018.

    8 Entretien avec Tiziri Kandi, permanente de la CGT-HPE, le 21 novembre 2018.

    9 Cahier de terrain, 22 octobre 2019.

    10 Cahier de terrain, 9 octobre 2020.

    11 Cahier de terrain, 9 mars 2020.

    12 Cahier de terrain, octobre 2020.

    13 Cahier de terrain, 15 juin 2021.

    14 Cahier de terrain, 22 mai 2018.

    15 Entretien avec Éric Descamps, le 11 mars 2020.

    16 Cahier de terrain, avril 2020.

    17 Cahier de terrain, 24 décembre 2019.

    18 Cahier de terrain, 23 janvier 2020.

    19 Cahier de terrain, 6 février 2020.

    20 Cahier de terrain, 24 décembre 2019.

    21 Cahier de terrain, 25 juin 2021.

    22 Regroupement de syndicats locaux et de collectifs divers dénonçant l’inaction des confédérations syndicales.

    23 Voir la notice sur Maxime Leroy dans Le Maitron, ou Dictionnaire biographique du mouvement ouvrier.

    24 Nous traduisons.

    25 Nous traduisons.

    26 Les recherches militantes font l’objet d’une intense campagne de délégitimation après l’annonce par la ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, en février 2021, d’une enquête pour distinguer « ce qui relève de la recherche académique et ce qui relève du militantisme et de l’opinion ». Voir l’article de Soazig Le Nevé, « Frédérique Vidal lance une enquête sur “l’islamo-gauchisme” à l’université », Le Monde, 16 février 2021. En ligne : [https://www.lemonde.fr/societe/article/2021/02/16/frederique-vidal-lance-une-enquete-sur-l-islamo-gauchisme-a-l-universite_6070195_3224.html].

    Auteur

    Gabriel Rosenman

    Gabriel Rosenman est ATER à l’Institut des sciences sociales du travail (ISST, université Paris 1-Panthéon-Sorbonne), et doctorant en science politique au Centre Maurice Halbwachs (ENS/EHESS). Après avoir été cheminot et syndicaliste pendant une dizaine d’années, ses recherches s’intéressent à l’action collective, aux relations professionnelles et aux solidarités ouvrières. Sa thèse porte sur la pratique des caisses de grève dans le mouvement ouvrier français et a donné lieu à plusieurs publications : « Produire la solidarité par l’image ? Les caisses de grève et leurs représentations comme dispositifs de sensibilisation militants (2016-2020) », dans Images du travail, travail des images (no 12, 2022), « Les caisses de grève à l’épreuve de la grève interprofessionnelle », dans Mouvements (no 103, 2020), et « Aux sources des caisses de grève interprofessionnelles », dans Revue d’histoire du XIXe siècle (no 60, 2020).

    Précédent Suivant
    Table des matières

    Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.

    Voir plus de livres
    Eau et environnement

    Eau et environnement

    Tunisie et milieux méditerranéens

    Paul Arnould et Micheline Hotyat (dir.)

    2003

    Acteurs et territoires du Sahel

    Acteurs et territoires du Sahel

    Rôle des mises en relation dans la recomposition des territoires

    Abdoul Hameth Ba

    2007

    Le cheikh et le calife

    Le cheikh et le calife

    Sociologie religieuse de l’islam politique au Maroc

    Youssef Belal

    2011

    Fès, la fabrication d’une ville nouvelle (1912-1956)

    Fès, la fabrication d’une ville nouvelle (1912-1956)

    Charlotte Jelidi

    2012

    Palerme, illégalismes et gouvernement urbain d’exception

    Palerme, illégalismes et gouvernement urbain d’exception

    Fabrizio Maccaglia

    2009

    La mixité dans l’éducation

    La mixité dans l’éducation

    Enjeux passés et présents

    Rebecca Rogers (dir.)

    2004

    Les arabisants et la France coloniale. 1780-1930

    Les arabisants et la France coloniale. 1780-1930

    Savants, conseillers, médiateurs

    Alain Messaoudi

    2015

    Les arabisants et la France coloniale. Annexes

    Les arabisants et la France coloniale. Annexes

    Alain Messaoudi

    2015

    L'école républicaine et l'étranger

    L'école républicaine et l'étranger

    Une histoire internationale des réformes scolaires en France. 1870-1914

    Damiano Matasci

    2015

    Le sexe de l'enquête

    Le sexe de l'enquête

    Approches sociologiques et anthropologiques

    Anne Monjaret et Catherine Pugeault (dir.)

    2014

    Les agents immobiliers

    Les agents immobiliers

    Pour une sociologie des acteurs des marchés du logement

    Loïc Bonneval

    2011

    Réinventer les campagnes en Allemagne

    Réinventer les campagnes en Allemagne

    Paysage, patrimoine et développement rural

    Guillaume Lacquement, Karl Martin Born et Béatrice von Hirschhausen (dir.)

    2013

    Voir plus de livres
    1 / 12
    Eau et environnement

    Eau et environnement

    Tunisie et milieux méditerranéens

    Paul Arnould et Micheline Hotyat (dir.)

    2003

    Acteurs et territoires du Sahel

    Acteurs et territoires du Sahel

    Rôle des mises en relation dans la recomposition des territoires

    Abdoul Hameth Ba

    2007

    Le cheikh et le calife

    Le cheikh et le calife

    Sociologie religieuse de l’islam politique au Maroc

    Youssef Belal

    2011

    Fès, la fabrication d’une ville nouvelle (1912-1956)

    Fès, la fabrication d’une ville nouvelle (1912-1956)

    Charlotte Jelidi

    2012

    Palerme, illégalismes et gouvernement urbain d’exception

    Palerme, illégalismes et gouvernement urbain d’exception

    Fabrizio Maccaglia

    2009

    La mixité dans l’éducation

    La mixité dans l’éducation

    Enjeux passés et présents

    Rebecca Rogers (dir.)

    2004

    Les arabisants et la France coloniale. 1780-1930

    Les arabisants et la France coloniale. 1780-1930

    Savants, conseillers, médiateurs

    Alain Messaoudi

    2015

    Les arabisants et la France coloniale. Annexes

    Les arabisants et la France coloniale. Annexes

    Alain Messaoudi

    2015

    L'école républicaine et l'étranger

    L'école républicaine et l'étranger

    Une histoire internationale des réformes scolaires en France. 1870-1914

    Damiano Matasci

    2015

    Le sexe de l'enquête

    Le sexe de l'enquête

    Approches sociologiques et anthropologiques

    Anne Monjaret et Catherine Pugeault (dir.)

    2014

    Les agents immobiliers

    Les agents immobiliers

    Pour une sociologie des acteurs des marchés du logement

    Loïc Bonneval

    2011

    Réinventer les campagnes en Allemagne

    Réinventer les campagnes en Allemagne

    Paysage, patrimoine et développement rural

    Guillaume Lacquement, Karl Martin Born et Béatrice von Hirschhausen (dir.)

    2013

    Accès ouvert

    Accès ouvert freemium

    ePub

    PDF

    PDF du chapitre

    Suggérer l’acquisition à votre bibliothèque

    Acheter

    Édition imprimée

    ENS Éditions
    • amazon.fr
    • decitre.fr
    • mollat.com
    • leslibraires.fr
    • placedeslibraires.fr
    • lcdpu.fr
    ePub / PDF

    1 Bourdieu 2003, p. 55.

    2 Nous traduisons.

    3 Le CHSCT (Comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail) et le CE (Comité d’établissement) étaient des instances représentatives du personnel, remplacées depuis 2017 par un CSE (Comité social et économique).

    4 Voir à ce sujet le chapitre de Willy Gibard et Lucas Winiarski dans cette partie.

    5 Entretien avec Romain Altmann, secrétaire général d’Info’Com-CGT, le 22 janvier 2019.

    6 Entretien avec Éric Descamps, trésorier de la fédération Sud-Rail, le 11 mars 2020.

    7 Entretien avec Jean-Marc Salmon, initiateur de la collecte de soutien aux cheminot·es, le 19 novembre 2018.

    8 Entretien avec Tiziri Kandi, permanente de la CGT-HPE, le 21 novembre 2018.

    9 Cahier de terrain, 22 octobre 2019.

    10 Cahier de terrain, 9 octobre 2020.

    11 Cahier de terrain, 9 mars 2020.

    12 Cahier de terrain, octobre 2020.

    13 Cahier de terrain, 15 juin 2021.

    14 Cahier de terrain, 22 mai 2018.

    15 Entretien avec Éric Descamps, le 11 mars 2020.

    16 Cahier de terrain, avril 2020.

    17 Cahier de terrain, 24 décembre 2019.

    18 Cahier de terrain, 23 janvier 2020.

    19 Cahier de terrain, 6 février 2020.

    20 Cahier de terrain, 24 décembre 2019.

    21 Cahier de terrain, 25 juin 2021.

    22 Regroupement de syndicats locaux et de collectifs divers dénonçant l’inaction des confédérations syndicales.

    23 Voir la notice sur Maxime Leroy dans Le Maitron, ou Dictionnaire biographique du mouvement ouvrier.

    24 Nous traduisons.

    25 Nous traduisons.

    26 Les recherches militantes font l’objet d’une intense campagne de délégitimation après l’annonce par la ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, en février 2021, d’une enquête pour distinguer « ce qui relève de la recherche académique et ce qui relève du militantisme et de l’opinion ». Voir l’article de Soazig Le Nevé, « Frédérique Vidal lance une enquête sur “l’islamo-gauchisme” à l’université », Le Monde, 16 février 2021. En ligne : [https://www.lemonde.fr/societe/article/2021/02/16/frederique-vidal-lance-une-enquete-sur-l-islamo-gauchisme-a-l-universite_6070195_3224.html].

    Enquêter sur les relations professionnelles

    X Facebook Email

    Enquêter sur les relations professionnelles

    Ce livre est diffusé en accès ouvert freemium. L’accès à la lecture en ligne est disponible. L’accès aux versions PDF et ePub est réservé aux bibliothèques l’ayant acquis. Vous pouvez vous connecter à votre bibliothèque à l’adresse suivante : https://freemium.openedition.org/oebooks

    Acheter ce livre aux formats PDF et ePub

    Si vous avez des questions, vous pouvez nous écrire à access[at]openedition.org

    Enquêter sur les relations professionnelles

    Vérifiez si votre bibliothèque a déjà acquis ce livre : authentifiez-vous à OpenEdition Freemium for Books.

    Vous pouvez suggérer à votre bibliothèque d’acquérir un ou plusieurs livres publiés sur OpenEdition Books. N’hésitez pas à lui indiquer nos coordonnées : access[at]openedition.org

    Vous pouvez également nous indiquer, à l’aide du formulaire suivant, les coordonnées de votre bibliothèque afin que nous la contactions pour lui suggérer l’achat de ce livre. Les champs suivis de (*) sont obligatoires.

    Veuillez, s’il vous plaît, remplir tous les champs.

    La syntaxe de l’email est incorrecte.

    Référence numérique du chapitre

    Format

    Rosenman, G. (2024). Enquêter en (ex-)syndicaliste ? Retour sur un positionnement d’enquête militant en terrain syndical. In F. Alfandari, A. Bonanno, L. Cárdenas, S. Doumenc, W. Gibard, & L. Winiarski (éds.), Enquêter sur les relations professionnelles (1‑). ENS Éditions. https://doi.org/10.4000/books.enseditions.48277
    Rosenman, Gabriel. « Enquêter en (ex-)syndicaliste ? Retour sur un positionnement d’enquête militant en terrain syndical ». In Enquêter sur les relations professionnelles, édité par François Alfandari, Annaïs Bonanno, Lina Cárdenas, Saphia Doumenc, Willy Gibard, et Lucas Winiarski. Lyon: ENS Éditions, 2024. https://doi.org/10.4000/books.enseditions.48277.
    Rosenman, Gabriel. « Enquêter en (ex-)syndicaliste ? Retour sur un positionnement d’enquête militant en terrain syndical ». Enquêter sur les relations professionnelles, édité par François Alfandari et al., ENS Éditions, 2024, https://doi.org/10.4000/books.enseditions.48277.

    Référence numérique du livre

    Format

    Alfandari, F., Bonanno, A., Cárdenas, L., Doumenc, S., Gibard, W., & Winiarski, L. (éds.). (2024). Enquêter sur les relations professionnelles (1‑). ENS Éditions. https://doi.org/10.4000/books.enseditions.48077
    Alfandari, François, Annaïs Bonanno, Lina Cárdenas, Saphia Doumenc, Willy Gibard, et Lucas Winiarski, éd. Enquêter sur les relations professionnelles. Lyon: ENS Éditions, 2024. https://doi.org/10.4000/books.enseditions.48077.
    Alfandari, François, et al., éditeurs. Enquêter sur les relations professionnelles. ENS Éditions, 2024, https://doi.org/10.4000/books.enseditions.48077.
    Compatible avec Zotero Zotero

    1 / 3

    ENS Éditions

    ENS Éditions

    • Plan du site
    • Se connecter

    Suivez-nous

    • Flux RSS

    URL : http://www.ens-lyon.fr/editions/catalogue

    Email : editions@ens-lyon.fr

    Adresse :

    Bâtiment Ferdinand Buisson

    15 parvis René Descartes BP 7000

    69342

    Lyon

    France

    OpenEdition
    • Candidater à OpenEdition Books
    • Connaître le programme OpenEdition Freemium
    • Commander des livres
    • S’abonner à la lettre d’OpenEdition
    • CGU d’OpenEdition Books
    • Accessibilité : partiellement conforme
    • Données personnelles
    • Gestion des cookies
    • Système de signalement