Antisémitisme
p. 311-320
Remerciements
Nous remercions Samuel Vernet pour la lecture attentive de cette fiche et pour nos échanges constructifs.
Texte intégral
1Antisémitisme, n. m. Racisme anti-juif.
Ces mots [antisémitisme, antisémite] ont été formés à la fin du xixe siècle quand se développa en France un mouvement raciste et xénophobe d’hostilité contre les juifs. Chez les propagandistes de l’époque, l’antisémitisme prétend combattre le « sémitisme » attribué aux juifs et supposé être nuisible à la civilisation dite « aryenne » ; cette interprétation pseudo-historique n’est plus retenue, et les mots antisémite, antisémitisme ne concernent plus que le racisme antijuif. (Rey 2000, p. 3455-3456)
2Le phénomène est antérieur au mot qui le désigne (le terme « antisémitisme » est attesté en 1886) ; on sait en effet que dans les Évangiles l’antijudaïsme chrétien accuse déjà la communauté juive de trahison1 et de déicide.
Circonscrire l’antisémitisme
3L’Alliance internationale pour la mémoire de l’Holocauste (IHRA)2 propose une définition assez large de l’antisémitisme, « opérationnelle » et « non contraignante ». Le 26 mai 2016, elle a été adoptée par les trente et un États membres de l’IHRA :
L’antisémitisme est une certaine perception des Juifs qui peut se manifester par une haine à leur égard. Les manifestations rhétoriques et physiques de l’antisémitisme visent des individus juifs ou non et/ou leurs biens, des institutions communautaires et des lieux de culte.3
4Même si elles sont interreliées, on peut distinguer trois formes d’antisémitisme. La première repose sur des stéréotypes rebattus, comme ceux de la richesse et de la cupidité, qui constituent des images éculées de l’antisémitisme. En témoigne l’exemple d’Ilan Halimi, qui mourait le 13 février 2006 après avoir été enlevé et torturé pendant un mois par un groupe se faisant appeler le « gang des barbares », dirigé par Youssouf Fofana. Ce meurtre reposait sur un stéréotype antisémite. De condition modeste, Ilan Halimi était pourtant supposé riche et les autrices et auteurs de ce crime pensaient pouvoir obtenir de l’argent par rançon. De même, lors d’une manifestation en juillet 2021 contre le passe sanitaire, une jeune femme brandissait une pancarte avec les noms de plusieurs responsables politiques ou médiatiques dont la plupart sont juif.ives, avec au centre de la pancarte le slogan « Mais Qui ? », qui sous-entendait que la responsabilité des décisions ou de la situation sanitaire serait le fait « d’un complot juif »4. On trouvait aussi le nom d’Emmanuel Macron associé à celui de Rothschild, famille d’origine juive allemande. À travers ces personnes, il s’agit ainsi de dénoncer la prétendue richesse, le pouvoir des Juifs et des Juives et leur influence, en particulier sur la politique et l’opinion publique.
5Par une forme de glissement, la deuxième forme d’antisémitisme, qui s’appuie sur les mêmes stéréotypes, se caractérise par des positions anti-élitistes5 mises en avant ces dernières années, en France notamment, par des mouvements sociaux comme celui des Gilets jaunes ou celui des opposants aux vaccins. Ainsi, dans l’exemple de la pancarte portant le slogan « Mais Qui ? », le « Q » est orné de cornes, ce qui peut renvoyer à l’image du diable et/ou au mouvement complotiste QAnon, venu des États-Unis. Le projet secret, l’ennemi, le complot renvoient sans le dire à la rhétorique antisémite d’extrême droite selon laquelle le lobby juif contrôlerait le monde. Il y aurait donc
un « système » omnipotent, tentaculaire et mal défini qui incarne la corruption et l’oppression dont sont victimes les « petites gens ». Dans la plupart des cas, le système ou les élites ne sont pas dénoncés explicitement comme juifs et l’antisémitisme est exprimé avec le langage de la méfiance envers l’establishment. (Chapelan 2021, p. 32)
6Ainsi, ces détenteurs et détentrices du pouvoir se verraient attribuer un statut à part et des privilèges particuliers. Cet antisémitisme structurel est également alimenté par « une panique morale face aux transformations des sociétés occidentales » (Proust et al. 2020, p. 385) et une « concurrence mémorielle », notamment de la part des descendant.es de combattants africains, qui ne se sentiraient pas aussi reconnu.es que les victimes de la Shoah (Couvelaire 2019). Il y aurait ainsi de prétendues inégalités de traitement, comme l’affirme ce post sur un profil Facebook du Figaro le 30 juin 2020 : « Dès que tu critiques Israël tu es antisémites on a le droit de se moquer des autres mais pas des juifs »6. Ces affirmations « sont basées sur l’idée que la communauté juive bénéficie d’une immunité par rapport à la critique » (Chapelan 2021, p. 33).
7Enfin, on peut discerner une troisième forme d’antisémitisme, en lien avec l’antisionisme. L’antisionisme, qui est une opposition au sionisme, est une notion très délicate à manier :
Au sens strict : qui s’oppose à l’installation d’un foyer national juif en Palestine. Notion ambiguë, parce qu’elle peut recouvrir l’opposition de principe à Israël ou à la politique israélienne en général, l’opposition à la politique de colonisation des territoires palestiniens occupés ou le refus du caractère juif de l’État. Voire n’être que l’expression socialement acceptable d’un racisme anti-juif. (Collectif 2022, p. 15)
8Quand l’antisionisme prend la forme d’une remise en question du droit d’Israël à exister, voire d’un déni de ce droit (c’est-à-dire quand il considère l’État d’Israël comme illégitime ou qu’il le nie et le rejette, alors qu’il a été reconnu en tant qu’État en 1947 par la communauté internationale), on peut considérer qu’il est question d’antisémitisme. Ce déni est souvent associé au stéréotype selon lequel les Israéliens et les Israéliennes, et/ou les Juifs et les Juives, seraient comme étranger.ères à leur propre État-nation, distanciation qui s’opère en insistant sur le statut d’apatride et de « peuple errant » originel des Juifs et des Juives. Dans cette même idée de nier la réalité du peuple juif, l’antisémitisme s’exprime aussi à travers la relativisation de l’antisémitisme et de l’holocauste, voire du négationnisme, manifestations souvent basées sur le sarcasme (Rinn 2006), façon de tourner en dérision toute une communauté avant de la nier.
9D’une façon ou d’une autre, les actes antisémites construisent un bouc émissaire, un ennemi qui, parce que juif, serait responsable de bien des maux, et pourrait alors être objet de haine jusqu’à être nié, voire éliminé. Si l’antisémitisme s’est manifesté dans des contextes historiques et nationaux singuliers (pogroms en Pologne et en Russie au xixe siècle, affaire Dreyfus en France) et s’il a atteint son paroxysme dans l’horreur avec la Shoah, il perdure aujourd’hui et s’exprime à travers profanations, insultes ou assassinats. En 2019, deux jours avant une cérémonie d’hommage à Ilan Halimi, les deux arbres plantés à sa mémoire ont été vandalisés. Régulièrement, le portrait de Simone Veil est profané, notamment par des croix gammées. En 2020, Agnès Buzyn subit une campagne antisémite virulente sur les réseaux sociaux, dans laquelle elle est présentée en train d’empoisonner un puits, crime dont la communauté juive était accusée au Moyen Âge. En 2015, parmi les attentats qui ont touché la France, l’un visait l’Hyper Cacher de la porte de Vincennes (5 morts), après celui qui, en 2012 à Toulouse, avait ciblé une école juive (4 morts). Dans la nuit du 3 au 4 avril 2017, une sexagénaire juive, Sarah Halimi, est assassinée, battue et défenestrée.
L’antisémitisme en discours
10Ces différentes formes d’antisémitisme s’actualisent à travers des insultes directes, comme « mort aux juifs » dans les graffitis sur les murs des villes. Ces insultes ne sont généralement pas signées, pour éviter les poursuites judiciaires. Mais plus encore, cet antisémitisme se déploie à travers une rhétorique détournée (Serre-Floersheim 2019) où fleurissent blagues, métaphores et allusions qui reposent sur une mémoire discursive (Paveau 2013), c’est-à-dire sur le fait de renvoyer à des connaissances culturelles (voire des stéréotypes) partagées et historicisées. Chloé Vincent (2021) montre comment, lors de la campagne pour la vaccination en Israël, le stéréotype de la cupidité juive est mobilisé dans des blagues, notamment sur Facebook :
|
11Ces phénomènes s’accompagnent, notamment sur les réseaux sociaux, d’éléments de connivence, qui peuvent rallier une « communauté déviante » (Proust et al. 2020, p. 399) telle qu’elle se manifeste par ailleurs dans les spectacles de Dieudonné, communauté qui s’affirme à travers des signes comme la quenelle (salut nazi inversé), l’ananas (avec le mot-valise Shoananas), le soleil (image des puissant.es) ou les émoticônes de connivence, comme les clins d’œil (Chapelan 2021, p. 32).
12Il est difficile de ne pas considérer ces éléments de discours, qui pris séparément pourraient sembler anodins, à leur juste mesure, non seulement parce qu’ils réactivent par intertextualité des événements traumatiques, mais aussi parce qu’ils renvoient, dans toute leur historicité, à des glissements possibles, verbaux et physiques, alors ouvertement antisémites. Si la portée antisémite d’un propos se mesurait à l’aune des intentions énonciatives et de leur réception (ce que l’analyse linguistique ne permet pas d’évaluer), il est clair que tout propos équivoque, vu le traumatisme causé par les pogroms puis par la Shoah, deviendrait porteur de consonances antisémites.
L’antisémitisme dans le cadre du conflit Hamas-Israël en mai 2021
Présentation du contexte et du corpus
13À partir du 10 mai 2021, le conflit israélo-palestinien a connu l’escalade qui a fait le plus de victimes depuis les combats de l’été 2014 – malgré un cessez-le-feu au bout de seulement onze jours7. Pour recueillir les premières réactions en ligne aux événements, les données de notre analyse se limitent à la période du 10 au 13 mai 2021, lorsque les tensions ont basculé vers une escalade du conflit. Nous avons privilégié les articles qui traitaient à la fois des tirs de roquettes du Hamas et des représailles de l’armée israélienne. Sur les sites web de certains médias (notamment The Guardian, BBC et Süddeutsche Zeitung), la fonction « commentaires » avait été désactivée pour les articles traitant du conflit israélo-palestinien, tandis que sur d’autres sites, comme ceux du Monde ou du Times, la liberté du débat avait été restreinte grâce au placement des articles et sections de commentaires derrière un verrou d’accès payant ; c’est pourquoi notre étude traite en priorité des fils de discussion sur les profils Facebook des grands médias. Nous avons pu ainsi recueillir un grand nombre et une gamme plus large de réactions.
14Le corpus français se compose des cent premiers commentaires postés en réaction à quinze articles partagés sur les pages Facebook de sept grands médias français (Le Monde, Libération, Le Figaro, Le Parisien, Le Point, L’Express et 20 Minutes).
Le recours aux stéréotypes
15La plupart des commentaires antisémites identifiés comme tels visent Israël et les Israélien.nes, et par glissement les Juifs et les Juives. Des attributs négatifs sont assignés à la population israélienne, dont les actes sont condamnables aux yeux des utilisateur.rices. Plus précisément, ces derniers et dernières ont tendance à accuser les Israélien.nes d’amoralité, car ils tueraient des civils innocents :
| |||
|
16Ils et elles les accusent aussi de mensonge :
|
17Le commentaire (3) renvoie au stéréotype d’un statut à part attribué à Israël : c’est l’idée qu’Israël, à la différence des autres États, n’est jamais tenu pour responsable par la communauté internationale de ses actes de violence à l’encontre des Palestiniens et des Palestiniennes – ou du moins qu’il est traité avec des ménagements extrêmes. Ces formes de prétendus privilèges peuvent aussi alimenter la conviction de certain.es utilisateur.rices que les Juif.ives et Israël contrôlent le monde sur le plan économique et politique. En réaction à un article publié par Le Monde et partagé sur sa page Facebook, un.e utilisateur.rice poste ce commentaire :
|
18Le propos montre que les utilisateur.rices ont tendance à imputer des actes malveillants aux Israélien.nes en les diabolisant, mais aussi à leur prêter un pouvoir exorbitant et tentaculaire en les accusant d’exercer une influence sur les médias.
19Le conflit israélo-arabe a causé des victimes innocentes du côté palestinien, notamment des enfants. Au-delà d’un conflit que l’on peut juger déséquilibré du point de vue des forces en présence, certain.es utilisateur.rices y ont vu la confirmation du stéréotype classique du meurtre d’enfants selon lequel les Juifs et les Juives tueraient des enfants de religion chrétienne pour se livrer à des rituels religieux avec leur sang. Ainsi peut-on lire dans la section commentaires d’un article publié par 20 Minutes :
|
20et ailleurs, en réaction à un article du Point :
|
21Ces commentaires montrent comment les stéréotypes antisémites classiques sont actualisés et adaptés au contexte social.
L’analogie comme figure de discours
22L’usage de l’analogie qui compare Israël à l’Allemagne nazie sert aussi la rhétorique antisémite. L’analogie avec le nazisme met sur un même pied les conditions et les actes de violence subis par les victimes dans les deux cas (les Juif.ives dans le scénario nazi et les Palestinien.nes dans le scénario moyen-oriental). Dans un commentaire d’un article du Parisien, un.e utilisateur.rice décrit par exemple Gaza comme
|
23Un commentaire d’un article du Monde établit également l’analogie en comparant des discours :
|
24L’analogie avec le nazisme permet donc à l’internaute de rejeter l’argument, exposé dans un commentaire précédent, selon lequel Israël n’agit qu’en légitime défense. Si cet argument de légitime défense peut être mis en doute et discuté, faire l’amalgame entre le discours pro-israélien et celui du Troisième Reich relève d’un glissement qui participe d’une dérive antisémite.
Un discours de vérité, entre effacement énonciatif et interpellation
25Le point de vue de l’auteur ou de l’autrice de commentaires antisémites n’est généralement pas exprimé explicitement en tant que tel et le discours s’actualise dans un effacement énonciatif, ce qui permet de présenter les points de vue comme une vérité générale et incontestable (Rabatel 2012). Ainsi dans le commentaire :
|
26l’utilisateur.rice ne prend pas en charge son énoncé et l’assertion « le monde est payé par ces demons » est présentée comme une certitude, « on voit bien », validant ainsi le complot des Juif.ives qui contrôlent le monde.
27Dans certains commentaires, les utilisateur.rices apostrophent violemment leurs cibles au moyen de menaces, d’imprécations ou de vœux de mort, c’est-à-dire de malédictions. Dans l’exemple suivant, l’utilisateur.rice ne prend pas en charge son énonciation et mobilise des références religieuses universelles, et donc incontestables, pour activer la malédiction :
|
Les jeux de mots
28Pour condamner le rôle d’Israël dans le conflit israélo-arabe, certain.es utilisateur.rices ont recours à des jeux de mots tels qu’« Isra-Hell » ou « Israhate », ou à d’autres éléments sémiotiques spécifiques de la communication assistée par ordinateur, à l’instar des émojis (« 🤮🤮 » ou « 👹👿👹👿👹👿 »), en même temps qu’à des stéréotypes antisémites – dans ce cas, l’utilisateur.rice condamne les actes d’Israël ou compare les Israélien.nes à la figure du diable.
Synthèse
29L’antisémitisme peut prendre des formes très diverses. Au-delà des agressions physiques, des meurtres et des profanations, il se manifeste sur le plan discursif par des insultes, mais également par des discours dissimulés où allusions, métaphores et mémoire sont mobilisées à des fins de stigmatisation et de haine. Qu’ils rendent compte de peurs face aux changements et stigmatisent des « élites » à travers des théories du complot ou qu’ils visent l’État d’Israël, ces procédés réactivent bien souvent des stéréotypes ancestraux qui alimentent la haine.
Bibliographie
Becker Matthias et Allington Daniel éd, 2021, Decoding Antisemitism. Une étude par IA du discours et de l’iconographie de la haine en ligne, second rapport d’analyse discursive, Berlin, Alfred Landecker Foundation. En ligne : [https://decoding-antisemitism.eu/publications/second-discourse-report/].
Chapelan Alexis, 2021, « L’affaire Dieudonné-Soral en France », Decoding Antisemitism. Une étude par IA du discours et de l’iconographie de la haine en ligne, second rapport d’analyse discursive, M. Becker et D. Allington éd., Berlin, Alfred Landecker Foundation, p. 31-33. En ligne : [https://decoding-antisemitism.eu/publications/second-discourse-report/].
Collectif, 2022, Les mots du contre-pouvoir. Petit dico féministe, antiraciste et militant, Louvain-la-Neuve, Academia.
Couvelaire Louise, 2019, « Antisémitisme : en France, les différents visages d’une haine insidieuse et banalisée », Le Monde, 12 février 2019. En ligne : [https://www.lemonde.fr/societe/article/2019/02/12/en-france-les-differents-visages-d-une-haine-anti-juive-insidieuse-et-banalisee_5422326_3224.html].
Paveau Marie-Anne, 2013, « Mémoire, démémoire, amémoire. Quand le discours se penche sur son passé ». En ligne : [https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-00990033/document].
Proust Serge, Michalon Jérôme, Maurin Marine et Noûs Camille, 2020, « Dieudonné : antisémitisme, panique morale et communauté déviante », Déviance et Société, vol. 44, no 3, p. 383-419.
Rabatel Alain, 2012, « Positions, positionnements et postures de l’énonciateur », Travaux neuchâtelois de linguistique, no 56, p. 23-42.
Rey Alain éd, 2000, Dictionnaire historique de la langue française, Paris, Dictionnaires Le Robert.
Rinn Michael, 2006, « La mémoire courte de l’Internet. Analyse sémiodiscursive du déni de la Shoah », Communication et langages, no 147, p. 73-85.
Serre-Floersheim Dominique, 2019, La rhétorique de la haine. La fabrique de l’antisémitisme par les mots et les images, Paris, Honoré Champion.
Vincent Chloé, 2021, « Déploiement du vaccin contre le covid-19 en Israël – France », Decoding Antisemitism. Une étude par IA du discours et de l’iconographie de la haine en ligne, second rapport d’analyse discursive, M. Becker et D. Allington éd., Berlin, Alfred Landecker Foundation, p. 22-23. En ligne : [https://decoding-antisemitism.eu/publications/second-discourse-report/].
Notes de bas de page
1 Nous suivons ici la consigne proposée dans le rapport Decoding Antisemitism. Une étude par IA du discours et de l’iconographie de la haine en ligne : « Comme les stéréotypes incarnent des phénomènes d’ordre mental pouvant être reproduits au moyen de la langue, nous les écrivons en petites capitales conformément aux conventions linguistiques cognitives. » (Becker et Allington 2021, p. 7).
2 L’Alliance internationale pour la mémoire de l’Holocauste (IHRA) « rassemble des gouvernements et des experts dans le but de renforcer et de promouvoir l’éducation, le travail de mémoire et la recherche sur l’Holocauste et de mettre en œuvre les engagements de la déclaration de Stockholm de 2000 ». En ligne : [https://www.holocaustremembrance.com/fr/resources/working-definitions-charters/la-definition-operationnelle-de-lantisemitisme-utilisee-par].
3 « La définition opérationnelle de l’antisémitisme utilisée par l’IHRA ». En ligne : [https://www.holocaustremembrance.com/fr/resources/working-definitions-charters/la-definition-operationnelle-de-lantisemitisme-utilisee-par].
4 Les Protocoles des Sages de Sion est un texte inventé de toutes pièces par la police secrète du tsar en Russie et publié en 1903. Ce texte se présente comme un plan de conquête du monde établi par les Juifs et les francs-maçons. Diffusé mondialement, il alimente encore aujourd’hui des croyances autour d’un complot juif.
5 Cette forme d’antisémitisme n’est pas toujours comprise, dans la mesure où elle repose sur une mémoire discursive qui peut ne pas être partagée. Lors de l’université d’été de la France insoumise en 2021, durant le meeting de clôture, Jean-Luc Mélenchon déclare « L’ennemi ce n’est pas le musulman, c’est le financier ! ». Est-ce que le mot « financier » relève d’une pensée antisémite en raison de sa charge discursive autour de la « finance juive » ? Ne renvoie-t-il pas pour certain.es au seul ultralibéralisme, sans dérive antisémite, par le fait qu’une certaine mémoire se perd ?
6 Cité dans le rapport Decoding Antisemitism. Une étude par IA du discours et de l’iconographie de la haine en ligne, p. 33.
7 L’analyse présentée est celle menée par Laura Ascone pour l’étude Decoding Antisemitism. Une étude par IA du discours et de l’iconographie de la haine en ligne, p. 12-14.
Auteurs
Professeure des universités à l’université Grenoble-Alpes, Claudine Moïse travaille en sociolinguistique ethnographique et interactionnelle. Ses terrains d’enquête sont, au Canada, le nord de l’Ontario et, en France, les quartiers populaires et périurbains, dans une perspective de sociolinguistique urbaine. Elle est très investie depuis les années 2000 dans un vaste projet sur la violence verbale, particulièrement la violence verbale institutionnelle et celle en lien avec la violence sexuelle. Elle a été responsable en 2014 d’un axe de recherche ANR sur les processus de convivialité et d’habitabilité, dans les espaces périurbains, et en 2016 d’un axe de recherche d’un projet H2020 sur les discours de radicalisation. Quelles que soient les données, elle cherche à rendre compte des changements sociaux et des identités des sujets à partir des pratiques langagières, entre autres mondialisées, et de l’analyse des intérêts de pouvoir en jeu dans les discours en circulation et dans les interactions verbales. Ces travaux l’ont amenée à approfondir l’étude de la valorisation du sujet dans l’interaction. En prenant en compte la subjectivité des locuteurs et leurs négociations langagières, elle tente de rendre compte des stratégies linguistiques en jeu dans la présentation de soi.
Lorenzi Bailly Nolwenn et Moïse Claudine éd., 2021, La haine en discours, Lormont, Le Bord de l’eau.
Moïse Claudine et Hugonnier Claire, 2019, « Discours homophobe. Le témoignage comme discours alternatif », Semen, no 47, p. 121-136.
Moïse Claudine, Meunier Emmanuel et Romain Christina, 2019 [2015], La violence verbale dans l’espace de travail. Analyses et solutions, Paris, Bréal.
Titulaire d’un doctorat en sciences du langage, Laura Ascone s’intéresse à la communication médiée par les réseaux sociaux ainsi qu’à l’analyse de l’expression des émotions et du discours de haine. Sa thèse, soutenue à l’université de Cergy-Pontoise (désormais université Paris-Seine), porte sur les stratégies rhétoriques et argumentatives adoptées aussi bien dans la propagande djihadiste que dans le contre-discours institutionnel. Elle a ensuite mené une recherche postdoctorale à l’université de Lorraine sur le discours de haine contre les migrants, dans le cadre du projet ANR « M-Phasis ». Actuellement, elle est chercheuse postdoctorale à la Technische Universität Berlin pour le projet international « Decoding Antisemitism: An AI-driven Study on Hate Speech and Imagery Online ». Elle fait également partie de différents réseaux de recherche qui s’intéressent à des questions sociales, tels que R2DIP (Réseau de recherches sur les discours institutionnels et politiques) et R2S (Risques, société et sécurité).
Ascone Laura, 2021, « Immigration et internet : le processus de distanciation dans le discours de haine contre les migrants sur YouTube », De l’émigration en Amérique latine à la crise migratoire, I. Tauzin-Castellanos éd., Morlaàs, Cairn, p. 255-270.
Ascone Laura, 2020, « Hate and threat in French jihadist propaganda », Hate Speech in Asia and Europe. Beyond Hate and Fear, M. Kang, M.-O. Rivé-Lasan, W. Kim et P. Hall éd., Londres, Routledge, p. 76-92.
Ascone Laura, 2020, « La spontanéité des émotions mise à l’épreuve sur internet : exprimer, susciter, manipuler », Lublin Studies in Modern Languages and Literature, vol. 44, no 1, p. 125-134.
Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
Un dialogue atlantique
Production des sciences du langage au Brésil
Eni Puccinelli Orlandi et Eduardo Guimarães (dir.)
2007
Des sons et des sens
La physionomie acoustique des mots
Frederico Albano Leoni Philippe-Marie Théveny (trad.)
2014
Entre expression et expressivité : l’école linguistique de Genève de 1900 à 1940
Charles Bally, Albert Sechehaye, Henri Frei
Anamaria Curea
2015
Voix et marqueurs du discours : des connecteurs à l'argument d'autorité
Jean-Claude Anscombre, Amalia Rodríguez Somolinos et Sonia Gómez-Jordana Ferary (dir.)
2012