Introduction
p. 349-351
Texte intégral
1Parmi les caractéristiques urbaines de l’Aventin, il est bien connu que la colline présenta la particularité d’accueillir un grand nombre d’édifices religieux dont l’implantation remonte pour certains aux origines de la cité. Il s’agit là d’une donnée importante pour saisir l’identité de cet espace et mieux appréhender l’organisation de son tissu urbain. Elle n’avait pas échappé à A. Merlin. L’étude des cultes associés à ces espaces sacrés, de leurs conditions d’arrivée et d’implantation sur la colline, mais aussi l’analyse des évolutions particulières qu’ils connurent à Rome, avaient ainsi occupé une place notable dans l’œuvre du chercheur. Depuis, ces connaissances ont bien sûr connu d’importantes avancées.
2Certaines figures divines installées sur l’Aventin ont ainsi fait l’objet d’études spécifiques. Pour n’en citer que quelques-unes, rappelons la monographie qu’H. Le Bonniec avait consacrée en 1958 à Cérès, Liber, Libera1, à laquelle J.-M. Pailler a apporté quelques éclairages complémentaires, dans le cadre de son étude sur le scandale des Bacchanales2. B. Combet‑Farnoux a dédié une enquête spécifique au Mercure romain, parue en 19803, et bien d’autres études, publiées dans les milieux de recherche français, italiens ou anglo-saxons, sont également venues compléter nos connaissances sur les dieux de la colline4. Outre les aspects strictement cultuels et fonctionnels, certaines de ces études se sont également intéressées à l’aspect architectural et à la localisation des sanctuaires qui accueillaient ces divinités sur l’Aventin. Sur ces questions, les nombreux dictionnaires de topographie romaine parus tout au long du XXe siècle, jusqu’au Lexicon Topographicum Urbis Romae dirigé par E.M. Steinby et l’Atlante di Roma antica dirigé par A. Carandini, ont aussi apporté une contribution notable, en proposant un état des sources et des études disponibles sur chacun de ces édifices.
3Quelques travaux ont également envisagé la topographie des sanctuaires de l’Aventin dans une perspective d’ensemble. À la fin des années 1990, P. Chini a ainsi publié une cartographie des principaux sanctuaires implantés sur la colline jusqu’à l’époque impériale5. Offrant un état des lieux général nécessaire, cette étude destinée à un large public n’a cependant pas donné lieu à une analyse plus approfondie de ce que l’on pouvait déduire de cette organisation spatiale des espaces sacrés de l’Aventin. Une étude plus poussée sur la disposition topographique des sanctuaires du Grand Aventin et son impact sur l’organisation du maillage urbain de la colline a été proposée plus tard par D. Bruno6. Enfin, F. Marcattili a présenté une analyse fonctionnelle des cultes de l’Aventin, et envisagé leur articulation dans une perspective globale, permettant de dégager les principales logiques politiques, culturelles et sociales qui ont progressivement guidé et déterminé leur genèse ou leur requalification7.
4À la lumière de ces plus récentes études, et sans prétendre à l’exhaustivité sur un sujet qui mériterait, à n’en pas douter, qu’une étude spécifique lui soit entièrement dédiée, cette partie propose d’abord quelques mises à jour et discussions nécessaires sur la cartographie religieuse de l’Aventin. Dans un second temps, il est proposé d’explorer de nouvelles perspectives d’analyse sur l’organisation et les spécificités fonctionnelles de certains cultes de cette colline.
5Le premier chapitre propose donc un recensement de l’ensemble des sanctuaires implantés sur l’Aventin entre la fin de la République et le début de l’Empire. Cet inventaire des lieux de culte vise à proposer une présentation générale de la disposition topographique des édifices religieux de la colline, restituée sous forme de carte (pl. VII), à partir de l’ensemble des données disponibles. Hormis quelques structures dégagées au sud de l’église S. Sabina, il ne subsiste que très peu de vestiges des édifices religieux appartenant à cette période, et leur état fragmentaire rend souvent leur identification très délicate. En raison de ce manque de données matérielles, les connaissances relatives à la planimétrie et à l’emprise au sol des sanctuaires de l’Aventin sont largement tributaires des données de la Forma Urbis Marmorea (FUM) ou plan de marbre sévérien. Ces documents et leur positionnement soulèvent tout un ensemble de problèmes particulièrement complexes qui déterminent notre compréhension de la topographie et de l’organisation générale du tissu urbain de la colline. Il sera donc nécessaire de tenir compte de ces éléments et des débats auxquels ils ont donné lieu dans le présent travail de restitution cartographique. Il s’agira enfin d’identifier les logiques d’implantation qui se dégagent de cette restitution de l’organisation spatiale des sanctuaires de l’Aventin, et de les confronter aux observations déjà formulées par ailleurs8.
6Dans le second chapitre, il est proposé de centrer la réflexion sur quelques caractéristiques fonctionnelles spécifiques qui peuvent être associées à certains sanctuaires de l’Aventin entre la fin de la République et le début du Principat. L’objectif ici n’est pas de considérer de manière indépendante les fonctions propres à chaque sanctuaire mais plutôt de dégager quelques systèmes fonctionnels qui s’élaborent plus largement autour d’un ou plusieurs sanctuaires de la colline, et s’articulent éventuellement avec d’autres édifices voués aux mêmes figures divines à l’échelle de la Ville, et même parfois au-delà. Il est également proposé de faire un pas de côté, pour s’écarter de la lecture des cultes de l’Aventin à la lumière des spécificités politiques, culturelles ou sociales classiquement attribuées à la colline (rôle de l’Aventin dans le conflit patricio-plébéien notamment)9. L’objectif est d’explorer d’autres fonctions signifiantes des cultes de l’Aventin, particulièrement celles qui concernent les populations en marge du corps civique de la cité, et semblent faire également système.
7Cette approche non exhaustive des sanctuaires et des cultes de l’Aventin vise ainsi à ouvrir de nouvelles perspectives dans l’analyse du paysage religieux de la colline.
Notes de bas de page
1 Le Bonniec 1958.
2 Pailler 1988.
3 Combet-Farnoux 1980.
4 Ainsi, Lunais 1979, à propos du culte de Luna et Spaeth 1996, a proposé une nouvelle monographie sur le culte de Cérès. Il faut également signaler les monographies de Brouwer 1989, et plus récemment Mastrocinque 2014 dédiées à Bona Dea. De nombreux articles, cités dans cette troisième partie, ont été également dédiés à l’étude de l’un ou l’autre des cultes de l’Aventin.
5 Chini 1998c.
6 Bruno 2006. Cette étude préliminaire, qui propose un panorama synchronique de la topographie religieuse du Grand Aventin, précède les développements sur la topographie globale de la colline, présentés cette fois dans une perspective diachronique, dans Bruno 2012.
7 Marcattili 2012.
8 En particulier celles de Bruno 2006.
9 Dans cette perspective, voir l’analyse très complète de Marcattili 2012.
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