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« Sous les pas des frères »

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Haude Morvan

Annexes

Texte intégral

1 – Tableau récapitulatif des papes et cardinaux morts avant 1305 et inhumés chez les Frères Prêcheurs

Nom, date et lieu de mort Lieu de la sépulture Forme et emplacement de la tombe dans l’église
Ottone de Tonengo († fin 1250 ou début 1251, à Lyon) Église dominicaine de Lyon Sous une croix
Guglielmo de Sabine († mars 1251, à Lyon) Église dominicaine de Lyon Sous une croix, à côté d’Ottone de Tonengo
Hugues de Saint-Cher, O.P. (†1263, à Orvieto) Première sépulture à San Domenico d’Orvieto Seul le texte de l’épitaphe est connu
Deuxième sépulture dans l’église dominicaine de Lyon Plate-tombe entre le chœur des frères et le sanctuaire
Clément IV (†1268, à Viterbe) Viterbe, Santa Maria in Gradi Tombe pariétale (aujourd’hui partiellement conservée) contre le mur nord de l’abside principale
Annibaldo Annibaldi della Molara, O.P. (†1272, à Orvieto) Orvieto, San Domenico Plaque tombale près de l’autel majeur
Eudes de Châteauroux (†1273, à Orvieto) Orvieto, San Domenico Au pied de la grille devant l’autel de la Vierge
Robert Kilwardby, O.P. (†1279, à Viterbe) Viterbe, Santa Maria in Gradi Dans la chapelle Saint-Dominique
Guillaume de Bray (†1282, à Orvieto) Orvieto, San Domenico Tombe pariétale (aujourd’hui partiellement conservée), probablement près de la tombe du cardinal de Châteauroux
Latino Malabranca, O.P. (†1294, à Pérouse) Première sépulture dans l’église dominicaine de Pérouse Seul le texte de l’épitaphe est connu
Deuxième sépulture à Rome, à Santa Maria sopra Minerva Dans une des quatre chapelles orientales
Hugues Aycelin, O.P. (†1297, à Rome) Première sépulture à Rome, à Sainte-Sabine Plaque tombale devant l’autel majeur (documentée par un dessin du XVIIe siècle)
Deuxième sépulture dans l’église dominicaine de Clermont-Ferrand Tombe pariétale contre le mur sud de la seconde travée orientale (aujourd’hui conservée à son emplacement d’origine)
Benoît XI, O.P. (†1304, à Pérouse) Pérouse, San Domenico Vecchio Plaque tombale devant l’autel majeur et cénotaphe pariétal dans la nef (tous deux conservés)

2 – Tableau récapitulatif des papes et cardinaux morts avant 1305 et inhumés chez les Frères Mineurs (les prélats dont le lieu de sépulture est incertain ont été exclus du tableau)

Nom, date et lieu de mort Lieu de la sépulture Forme et emplacement de la tombe dans l’église
Pierre de Bar-sur-Aube (†1253) Assise, San Francesco Pas d’information
Giordano Pironti (†1269, à Viterbe) Viterbe, San Francesco Seule l’épitaphe est connue, retrouvée après le bombardement de 1944
Bonaventure, O.F.M. (†1274, à Lyon) Lyon, église des Cordeliers Sacristie
Vicedomino Vicedomini (†1276, à Viterbe). Il prit l’habit franciscain sur son lit de mort Viterbe, San Francesco Tombe pariétale dans le bras gauche du transept (aujourd’hui conservée)
Adrien V (†1276, à Viterbe) Viterbe, San Francesco Tombe pariétale contre le mur est du bras droit du transept (aujourd’hui conservée)
Bentivegna de Bentivegni, O.F.M. (†1290, à Todi) Todi, San Fortunato Pas d’information
Bernard de Languissel (†1290, à Orvieto) Orvieto, San Francesco Plaque tombale devant l’autel majeur
Simon de Beaulieu (†1297, à Orvieto) Orvieto, San Francesco Plaque tombale devant l’autel majeur
Matteo d’Acquasparta, O.F.M. (†1302, à Rome) Rome, Santa Maria in Aracoeli Tombe pariétale dans le bras nord du transept (aujourd’hui conservée)

3 – Mort de Guglielmo de Sabine dans la Cronica ordinis de Géraud de Frachet (Cronica prior) (Vitae fratrum, p. 333-335)

1Item eisdem temporibus cum dominus Innocencius papa predictus de Lugduno recedere vellet et versus urbem Romam redire, cum diceret cardinalibus, ut se ad recessum pararent, dominus Guillelmus quondam Mutinensis episcopus, tunc autem Sabinensis episcopus cardinalis, qui socius fuerat beati Dominici, vir sanctus et miri in Ihesum Christum fervoris, respondit : « Pater, ad vite huius recessum me oportet parare, quia hac nocte apparens michi dominus Otho, Portuensis episcopus cardinalis, qui sepultus est in domo fratrum predicatorum, dixit : “Non oportet te, frater sollicitum esse de isto recessu, quia mecum remanebis Lugduni.” » Sicque post paucos dies completum est ; nam dictus dominus Sabinensis obiit et juxta dictum cardinalem sepultus est in ecclesia fratrum predicatorum juxta crucem sinistram.
Quum XL precedenti consecraretur ecclesia ipsa a domino Innocencio supradicto, et ipse dominus Sabinensi, cum eodem papa eam pariter circuiret, veniens ad crucem illam dicebat, ut videtur prescius futurorum « Consecretur hoc sepulcrum » quousque ab assistente capellano correctus « hoc templum » addebat
.
« À la même époque, comme le pape Innocent voulait quitter Lyon pour rentrer à Rome, alors qu’il l’avait annoncé aux cardinaux afin qu’ils se préparent au départ, le seigneur Guillaume évêque de Modène puis cardinal évêque de Sabine, qui fut un ami de saint Dominique, homme saint et d’une ferveur en Jésus Christ admirable, lui répondit : “Père, il convient de me préparer au retrait de cette vie, car cette nuit en m’apparaissant le seigneur Othon, cardinal évêque de Porto, qui est enterré dans le couvent des Frères Prêcheurs, m’a dit : ‘Mon frère, il ne faut pas que tu sois troublé à cause de ce départ, car tu resteras avec moi à Lyon.’” Et après peu de jours, ce fut accompli : en effet, ledit seigneur de Sabine mourut et, selon ce qu’avait dit le cardinal, il fut enterré dans l’église des Frères Prêcheurs à côté de la croix gauche.
Lorsque quarante jours auparavant l’église avait été consacrée par le pape Innocent et le seigneur de Sabine lui-même, alors que le pape en faisait le tour en même temps, le cardinal, venant à cette croix, dit, comme s’il présageait des événements à venir : “Que soit consacré ce tombeau”, ce à quoi il ajouta, corrigé par un chapelain présent : “cette église” ».

4 – Mort de Guglielmo de Sabine dans la Cronica ordinis de Géraud de Frachet revue par Humbert de Romans (Cronica posterior) (Vitae fratrum, p. 333-335)

2Eius quoque temporibus cum curia esset apud Lugdunum sepulti sunt duo cardinales apud fratres, scilicet dominus Odo Portuensi eius specialis amicus, et dominus Guillelmus Sabinensis, qui fuit amicissimus ordinis et beati Dominici ab inicio familiaritate cum eo in curia pape contracte. Horum primus, cum esset sepultus jam apud fratres et curia se pararet, ut dicebatur ad eundum Januam, secundus qui fuerat amicissimus illius defuncti, in sompnis erat sollicitus, ut sibi videbatur, de habendo hospicio apud Januam. Et ecce primus apparens ei dicebat « Domine Guillelme, ne sitis sollicitus de hospicio apud Januam, quia hic habetis hospicium in eternum. » Quod ipse narravit pape et cardinalibus ; et post paucos dies infirmatus est et mortuus et juxta eum in ecclesia fratrum sepultus.
Acciderat autem pocis diebus ante, quod cum super locum sepulcri sui in consecracione ecclesie fratrum ipse deberet consecrare crucem, que ibi erat et inungendo dicere deberet secundum ordinarium « consecretur hoc templum » dicebat : « consecretur hoc sepulcrum » ; et sub illa cruce est sepulcrum suum.
Dominus quoque Raynerius ibidem manens elegit sepulturam apud fratres ; sed monachi quidam nigri, apud quos manens mortuus est, prestiterunt impedimentum, et delatus est apud Cistercium
.
« À cette époque, alors que la curie était à Lyon, deux cardinaux ont été inhumés chez les frères, à savoir le seigneur Othon de Porto son ami intime, et le seigneur Guillaume de Sabine qui fut un grand ami de l’ordre et du bienheureux Dominique, depuis qu’il avait noué le début d’une familiarité avec lui à la curie du pape. Alors que le premier d’entre eux [Othon] était déjà enterré chez les frères et que la curie se préparait, comme on le disait, à partir pour Gênes, le second [Guillaume], qui avait été un grand ami du défunt, fut agité dans son sommeil et se voyait en train d’obtenir le gîte à Gênes. Et voici que le premier lui apparaissant lui dit : “Seigneur Guillaume, ne sois pas troublé par ce gîte à Gênes, parce qu’ici tu auras un gîte pour l’éternité”. Il raconta cela au pape et aux cardinaux et, quelques jours plus tard, il tomba malade, mourut et fut enterré juste à côté [d’Othon] dans l’église des frères.
Or, il était advenu peu de jours avant que Guillaume lui-même, sur le lieu de sa tombe, lors de la consécration de l’église des frères, ait dû consacrer une croix qui se trouvait là. En l’oignant, au lieu de dire “je consacre cette église” il dit “je consacre ce tombeau”. Et en effet son tombeau se trouve sous cette croix.
Le seigneur Raniero aussi, séjournant de même [à Lyon] élut sépulture chez les frères ; mais certains moines noirs, chez qui il habitait lorsqu’il mourut, empêchèrent cela et il fut transporté à Cîteaux. »

5 – Description de la tombe de Hugues Aycelin par François Duchesne (Histoire de tous les cardinaux françois de naissance, Paris, 1660, I, livre 2, p. 313-318)

3Les historiens ne demeurent pas d’accord du lieu de sa sepulture ; les uns veulent qu’il soit enterré dans l’Eglise de Saincte Sabine à Rome, à cause qu’il y a une table de cuivre en cette Eglise à main gauche, proche du grand Autel, dans laquelle est la representation de ce Cardinal, avec six vers Latins, qui expriment ses tiltres et ses qualitez, mais qui ne marquent pas qu’il y soit inhumé ; au lieu que celuy cy-dessus coté, dit expressément qu’il gist en l’Eglise des Jacobins de Clermont, qui est l’opinion des autres, et la plus probable à nostre sens ; car il n’y a sans difficulté que ses entrailles à Saincte Sabine, et son corps et ses os à Clermont, comme il l’avoit ordonné par ses Testamens, voulant qu’au lieu où il decederoit, ses intestins fussent inhumez, et que son corps fust apporté en l’Eglise des Jacobins de Clermont, et par ainsi estant mort à Rome, il est indubitable de dire qu’il n’y a que ses entrailles à Saincte Sabine et que son corps est au Couvent de Sainct Dominique de Clermont, sous un des plus superbes Tombeaux qui soit en France, et que l’on n’auroit pas basty si somptueusement pour n’y renfermer que de l’air et du vent, ou le simple cœur de ce Prelat, comme l’asseurent quelques Historiens, puis qu’il ne faut pas tant d’estenduë pour un cœur, que l’on a coustume d’enchasser dans une urne, et non pas dans un monument, tel qu’est celuy du Cardinal de Billon, qui se void dans le Chœur de l’Eglise de ce Monastère au sortir de la Sacristie, sous la seconde vouste à main droite, vers le grand Autel, et sous les secondes vitres, du costé de l’Epistre, taillé dans le mur en Arcade au dedans, dont la face qui est en dehors, soustenuë de deux pilastres, l’un deça, l’autre delà, s’esleve en forme de pyramide, la pointe de laquelle est cimée d’un Crucifix : et cette forme de pyramide est accompagnée de quatre autres pyramides veritables, sçavoir d’une maistresse, et d’une moindre de chaque costé : les deux maistresses sises sur les pilastres, et cimées des images de la Vierge, et de Sainct Jean l’Evangeliste, et les deux moindres de fleurons : le frontispice, ou la façade de ce monument a dix-neuf pieds de hauteur, et onze en travers. L’Arcade qui est au dedans est de douze pieds de haut, de sept pieds et quatre doigts de long, et de deux pieds et demy de large, enfoncée dans la muraille, le tout d’une belle pierre blanche, excepté les deux pilastres, qui sont de pierre de grain, le tout peint et enrichy de figures, corniches, chapiteaux et autres pieces d’Architecture. Sous cette Arcade est posée l’Arche sepulcrale, eslevée de terre d’environ quatre pieds, et partagée en deux parties, dont l’une qui est de pierre d’environ deux pieds de hauteur, luy sert de baze ; et l’autre est de cuivre doré de pareille élevation. Le ventre de la partie de l’Arche, qui est de pierre, est relevé de portiques et de niches au nombre de neuf, dont le fonds est blanc, à clefs pendantes. Sous la cinquiesme et sixiesme niche à demy brisées, est la representation du corps de ce Cardinal, orné de ses habillemens d’Evesque dans un lict de parade, ou plutost sous un dais : et les sept restantes qui sont des deux costez, sont remplies de sept Religieux de l’Ordre de S. Dominique, chacun desquels tient un Livre à la main, et semble reciter les Pseaumes pour le repos de l’ame du defunct, le tout en plate peinture : ces deux Arches sont jointes ensemble par un cercle de cuivre doré, large de deux poulces, diapré, émaillé, et chargé de roses, garny de deux lames aussi de cuivre doré, sur lesquelles sont écrites deux lignes en vieux carracteres Gothiques, qui marquent positivement, que le corps du Cardinal de Billon repose sous ce sepulchre : au dessus de ce cercle est posée l’arche de cuivre doré, le flanc de laquelle est émaillé d’azur, semé de Fleurs de lys d’or, et enrichy de neuf niches aussi de cuivre doré, soustenuës de pilastres de mesme matiere, qui sont en relief : chacune desquelles niches est garnie d’une figure de pareille estoffe, dont la premiere et la derniere qui ont de longues vestes, la teste découverte, et de grands cheveux, tiennent des gands plyez en la main ; la deux, la quatre, la cinq, la six et la huict, sont des Religieux revestus de longs habits, qui tiennent des livres fermez, la teste nuë et razée à la Monacale, la troisiesme et la septiesme representent deux Evesques habillez Pontificalement la Crosse en main : dans les espaces vuides entre ces niches, et au dessous de la table du Tombeau sont dix écussons remplis de diverses armoiries, parties desquelles ont esté détachées et dérobées, et ne restent à present que celles de la famille de ce Cardinal, les unes pleines, les autres brisées d’un lambel de gueules : à main droite sont celles d’Auvergne, qui sont : D’or au gonfanon de gueules, frangé de synople ; et joignant cét écusson dans les mesmes espaces, d’autres armoiries, qui sont : D’or à deux fasces de sable, le tout en relief.
La table du sepulchre avec sa corniche ou bordure, tient deux pieds et demy de large, la corniche estant eslevée de la table de plus d’un poulce de hauteur, et de largeur de deux doigts, garnie de diverses moresques, et émaillée de différends compartimens d’or et d’azur à la Mosaïque, chargée de neuf écussons en relief de la Maison et des alliances de ce Cardinal ; et aux deux bouts de cette bordure du costé du mur, sont aussi deux autres écussons en relief, dont l’un est des armes pleines de ce Prelat, et l’autre est au Dauphin pâmé d’azur. Le plat fonds de la Table sepulchrale est orné et chargé de divers autres écussons entremeslez, les uns de la Maison du defunct de differentes façons, et les autres de France ancienne, de Dauphiné, de Savoye, de Ferrare, d’Avignon, de Clermont, d’Auvergne, avec un autre écu qui est d’or au saultoir de sable ; l’enfileure de ces écussons fait trois rangs le long de l’arche, dont le premier est composé de trente-deux, le second de trente-trois, et le troisiesme est en partie couvert des habits de la figure de ce Cardinal, qui est couchée sur le milieu de la table ; et tous ces espaces qui sont entre ce grand nombre d’écussons, sont garnis d’Aigles d’or faits au burin, les aisles esployées : sur le haut de la mesme table autour de la teste de Hugues de Billon, est une autre arcade simple, au dessous de laquelle sont les Armes de ce Cardinal en plus grande estenduë que les autres, accostées de deux écussons d’Avignon, le tout en émail plat ; et les espaces qui sont au dessous de cette arcade, sont semées de Fleurs de lys d’or, sur un champ d’azur.
Sur le milieu de la table de ce Monument magnifique, est couchée la figure du Cardinal Hugues, longue de cinq pieds, revestuë Pontificalement, la Chasuble sur le dos, le Fanon au bras gauche emaillé d’or et d’argent aussi bien que la Tunique de dessous, qui se voit à la chute de la Chasuble ; comme aussi les pentoufles qui sont à ses pieds ; elle a les mains jointes, eslevées et couchées sur l’estomach, la Crosse à costé, la Mythre en teste greslée de perles et de pierreries, la face tournée devers le peuple, la teste posée sur un petit coussin d’email, et les pieds appuiez sur le dos d’une lyonne, le tout de cuivre doré.
Au dessus de cette table, à l’entour de l’époisseur du mur, est une eslevation de pierre d’environ huict pouces de haut, peinte de diverses couleurs, qui fait fonds à treize niches, neuf desquelles se voyent dans le dossier, et deux autres en relief à chaque bout, toutes à clefs pendantes, et percées d’or, garnies de figures de plus d’un pied et demy de grandeur, qui semblent faire les obseques du trepassé, estant toutes habillées de longs vestemens, et couvertes de chapperons et bonets, excepté les trois qui tiennent le milieu, et qui ont la teste découverte ; proche desquelles est représenté un Officiant à droit, tenant l’encensier, et à gauche un porte cierge, et à costé deux Evesques vestus Pontificalement les Crosses en main ; au mesme costé droit sont deux Chanoines ou Chantres enchappez, tenans des livres ouverts ; et à gauche dans le mesme dossier, sont deux figures à longues robbes, dont l’une a la teste nuë, de longs cheveux, la main droite gantée et eslevée, et l’autre a la teste couverte d’un chapperon, et tient ses gands pliez en la main gauche : au retour et au haut du sepulchre, sont deux autres niches remplies de deux figures de Jacobins, ayans la teste couverte de chapperons, et tenans en main des livres ouverts, et dans lesquels ils semblent lire et chanter : à la pointe sont pareillement deux autres niches posées en mesme situation, dans l’une desquelles est la figure d’une Abbesse tenant une crosse en la main droite un peu couchée, et en la gauche, un livre fermé, et dans l’autre, celle d’une femme vestuë de long, et couverte d’un chapperon : au dessus et dans le vuide de ces niches sont peintes diverses armoiries, et dans l’espoisseur du mesme mur est un grand carré enfoncé à fonds d’azur, semé d’estoiles d’or, faisant un beau ciel, couronné de cinq niches en relief à clefs pendantes et percées, dans lesquelles sont cinq figures, dont l’une tient le milieu, et les quatre autres sont aux deux costez ; la première est une Vierge debout, couronnée, ayant la main gauche eslevée, avec un livre fermé, et la droite baissée, supportant un linceul qui traverse les autres figures ; et la derniere est un Sauveur, qui soustient ce mesme linceul, et les autres representent les Saincts de l’Ordre des Freres Prescheurs, revestus de leurs habits, ayant la teste nuë avec le rayon dessus, mais à genoux, tenans aussi un linceul ; du milieu duquel sort à demy corps, toute nuë, une figure qui s’esleve vers le Ciel avec les mains jointes, et qui represente l’ame du Cardinal de Billon, le tout en relief et de pierre blanche ; et dans le vuide sont deux Anges en platte peinture, qui tiennent des flambeaux allumez.
L’arc interieur, et la superficie concave de la voute qui couvre le sepulchre, est de gueules en forme de Ciel, semé d’estoiles d’or, cantonné de six pieces orbiculaires, accostées de demy cercles qui forment une croix, dont trois sont de chaque costé de la voute, et le fonds des ces six pieces est d’azur aux estoiles d’or, et en chaque piece est un Ange, dont l’un tient un cierge allumé sur un chandelier, l’autre un encensier, et les restans ont les mains estenduës pour enlever l’ame du feu Cardinal, les vuides et recoins de ces pieces sont chargez d’écussons à droit et à gauche, le tout en platte peinture : les dehors et l’aspect du Monument sont soustenus de deux pilastres de pierre de grain, à six faces divisées par des filets en demy relief, qui descendent du haut en bas, à fonds d’azur, semé d’estoiles d’argent, ornées de chapiteaux, couronnemens, fueillages, saillies, et petites clefs pendantes : et ces faces à fonds d’azur sont diversifiées d’écussons en l’ozange d’un costé et d’autre : sur ces pilastres sont posées deux niches couvertes, et attachées au mur, dans lesquelles sont les images des Apostres Sainct Pierre et S. Paul au naturel : De ces deux pilastres naist le fronton du Monument qui s’éleve en pyramide, et forme en bas une arcade à clefs pendantes, mais pleines, dans lesquelles sont à my relief, deux Anges tenans en main des encensiers ; et dans les coins de ces clefs sont representez deux autres petits Anges, alongez et comme couchez sur le costé, dont l’un tient un Soleil en main, et l’autre une Lune : Au dessus de cette arcade et clefs, est un cimier, sur lequel est posé un cercle d’environ deux pieds de haut, au milieu duquel est un Sauveur à plus de demy corps, tenant un monde en sa main gauche, et donnant la bénédiction de la droite, le tout à my relief ; et dans les vuides, et dehors de ce cercle aux coins d’en bas, sont deux Anges ; et au dessus de la pointe du fronton, est posé un Seraphim à six aisles, dont les montans qui forment une pyramide, sont chargez de fueillages, et le sommet de cette pyramide d’un crucifix, de longeur de plus d’un pied et demy.
Le sépulchre cy-dessus descrit, est clos et fermé par devant d’une grille de fer artistement elabourée, et percée à jour, de huict pieds de haut, qui s’ouvre à dix bastans, dont les tenons sont cimez de fueilles, et de dix chandeliers, pour mettre et allumer des cierges le jour que l’on célèbre l’Anniversaire de ce Cardinal.
Je ne m’arresteray pas dorénavant si long-temps à la description des Tombeaux des Princes de l’Eglise, quelques magnifiques qu’ils puissent estre ; parce que ce seroit une chose hors de mon sujet : mais je n’ay pû m’empescher de donner au public, quoy qu’assez succinctement, un échantillon de la beauté de celuy du cardinal de Billon, afin que la posterité sçache qu’on ne sçauroit trop reverer les cendres des hommes qui surpassent les autres en naissance et en vertu, et qui sont revestus des premieres et plus esclatantes dignitez de l’Eglise, entre lesquels ce Prelat a toûjours paru comme une des premieres lumieres de son temps, par le progrez, la conduite et la fin de sa vie ; et pour les enfermer dignement, il n’y a rien dans la nature d’assez relevé.

© Publications de l’École française de Rome, 2021

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