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Le peuple et l’argent

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Clara Berrendonner

Chapitre 2 – Administrer la pecunia publica

Texte intégral

  • 1 Eich 2005, p. 12. Nicolet 1994a, p. X, qualifie de « primitiviste » l’école opposée à sa propre co (...)

1L’historiographie de la fin du XIXe siècle avait fondé l’idée de la déficience des finances publiques romaines sur un argument majeur, le caractère embryonnaire de l’administration qui aurait dû assumer le prélèvement fiscal, la gestion des documents comptables et la supervision des mouvements de fonds publics. Les travaux postérieurs furent traversés par un débat sur la nature de l’administration républicaine qui faisait dans une certaine mesure écho à la controverse des primitivistes et des modernistes sur l’économie antique1. La conception « minimaliste » de l’administration républicaine subit de sérieuses retouches, tant de la part des historiens anglo-saxons des années 1930-1940 que de Cl. Nicolet et de son école, mais la tendance inverse fut réaffirmée avec force à partir des années 1970, au point de sembler à l’heure actuelle constituer une sorte de doxa.

  • 2 Frank 1933, p. 149 et 154, avec pour exemple l’exploitation des mines d’Hispanie ou l’acheminement (...)
  • 3 Jones 1949, p. 38-55 = Jones 1960, p. 151-175, notamment p. 157 : « The picture which I have endea (...)
  • 4 Le terme d’officers était utilisé par Jones 1949, p. 39 = Jones 1960, p. 154, tandis que Nicolet 1 (...)

2Autour de 1930, peut-être influencé par l’interventionnisme observable, sous des formes bien évidemment très différentes, tant du côté de l’administration Roosevelt que de l’URSS ou des totalitarismes européens, T. Frank2 avait affirmé que la cité romaine, dans la première moitié du IIe siècle av. J.-C., recourait préférentiellement à la régie directe. Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, alors que s’enracinait l’idée que l’État devait prendre en charge un certain nombre de tâches et employer à cette fin un nombre suffisant de fonctionnaires, A. H. M. Jones3 s’intéressa pour sa part aux appariteurs des magistrats romains et souligna l’existence, dans la Rome républicaine, d’« officiers »4 permanents, sélectionnés en vertu de compétences techniques. 

  • 5 Badian 1972, mais voir déjà Fraccaro 1956-1975, I, p. 27 (texte d’une conférence de 1948) et Toynb (...)
  • 6 Badian 1972, p. 13-14 et 52 : les fonctions de la cité romaine se limitaient à assurer la pax deor (...)
  • 7 Badian 1972, p. 12-13 et 21.
  • 8 Badian 1972, p. 13, 17, 23, 34-36, 118 déclare à plusieurs reprises que les profits des sociétés d (...)
  • 9 Badian 1972, p. 15, 21, 121, n. 25, suivi par Brunt 1990, p. 354 et 378.

3En 1972, l’ouvrage qu’E. Badian5 consacra aux publicains représenta un tournant. Le parcours personnel d’E. Badian, autrichien ayant fui le nazisme, s’apparentait à celui des principaux promoteurs du courant néo-libéral. Ceux-ci, dans l’immédiat après-guerre, avaient fondé leur réflexion sur le rejet viscéral d’un rôle extensif de l’État dont l’Allemagne hitlérienne avait montré les dérives. Il s’agissait donc pour l’historien de « draw the proper line between the proper function of the state and the proper function of private enterprise6 ». Il fallait considérer comme un préjugé anachronique l’idée que des tâches comme l’approvisionnement ou la perception fiscale devaient être assurées par les pouvoirs publics7, et corriger la vision moralisatrice selon laquelle les adjudicataires de marchés publics ne prenaient en compte que leurs profits aux dépens des intérêts de la collectivité8. La République romaine, parce qu’elle avait su s’appuyer sur les acteurs privés, n’avait en définitive jamais eu qu’une « state machinery minimal »9.

  • 10 Nicolet 1979b, p. 69 = Nicolet 2000, p. 297.
  • 11 Sur la perception fiscale : Nicolet 1976a, p. 13-14 et 230-231 ; Nicolet 1979a, p. 260-261 et 264  (...)
  • 12 Nicolet 1976a, p. 232 ; Nicolet 1994c, p. 221-222 = Nicolet 2000, p. 292.
  • 13 Nicolet 1994a ; Moatti 1998 ; Moatti 2011.
  • 14 Nicolet 1976a, p. 14 : « À la fin de la République, l’État commence à créer des sortes de réserves (...)
  • 15 Nicolet 1984.
  • 16 Cohen 1984, p. 33, 38, 41-43 et 46-48.
  • 17 Purcell 1983, p. 125-173 ; Badian 1989, p. 582-603.

4Cl. Nicolet, qui curieusement qualifia le livre d’E. Badian d’« éloquent, quoi qu’un peu ironique plaidoyer en faveur de la ‘libre entreprise’ »10, ne remit globalement pas en cause ses vues sur la délégation aux priuati, dans la Rome républicaine, du prélèvement fiscal et des transports de fonds et de biens publics11, se limitant à souligner que les instances institutionnelles romaines exerçaient un réel contrôle sur la rédaction et l’application des contrats publics12. Par conséquent, sa réflexion porta principalement sur le degré de développement atteint par l’administration romaine. Celui-ci fut examiné à partir de deux dossiers, celui des archives publiques, étudiées dans le cadre du programme intitulé « La mémoire perdue »13, et celui des personnels administratifs14, envisagés à l’intérieur d’une enquête sur la notion d’ordo15. B. Cohen16, dont les travaux s’inscrivaient dans la même veine, souligna que l’administration romaine comptait un nombre non négligeable d’agents et que les procédures visaient à assurer l’indépendance des employés publics par rapport aux magistrats qu’ils assistaient. L’historiographie anglo-saxonne postérieure, pour sa part, s’intéresserait aux appariteurs dans une autre perspective, l’analyse de la mobilité sociale17, ce qui la conduirait à faire passer au second plan la question des activités de ces personnels.

  • 18 L’école allemande (W. Eck, P. Eich, R. Haensch, A. Kolb) s’est en particulier illustrée dans ce do (...)
  • 19 Une série de travaux sur les appariteurs fait exception : Schulz 1997, notamment p. 143-183 et 200 (...)
  • 20 Mateo 1999 ; Malmendier 2002 ; Aubert 2003 ; Torrent 2014a-b-c.
  • 21 Eck 1986, p. 105 ; Kunkel 1995, II, p. 105 ; Malmendier 2002 a structuré son ouvrage sur les publi (...)
  • 22 Eich 2005, p. 52 : « Es überrascht daher nicht, dass das Rom der Republik [...] nur eine schwache (...)
  • 23 Eich 2005, p. 52 : l’aristocratie, comme groupe de gouvernement, ne pouvait admettre ni un modèle (...)
  • 24 Eich 2005, p. 55, 59-60 : le nombre des agents n’évolua guère entre l’époque où Rome n’était qu’un (...)
  • 25 Eich 2005, p. 55 et 60-61 : il n’y avait pas de délimitation claire des activités publiques et pri (...)
  • 26 Weber 2005, p. 157-169.
  • 27 Permanence de l’organisation administrative ; séparation des sphères publique et privée en matière (...)
  • 28 Fonctions exercées exclusivement au service de l’administration ; possession de compétences.
  • 29 Les aptitudes techniques des agents déterminent une répartition des tâches par dossiers et une hié (...)
  • 30 Wolters 2006, p. 36: « Die Finanzstruktur des römischen Staates unterschied sich in ihren Grundsät (...)

5Si les travaux concernant les différentes facettes de l’administration impériale18 se sont multipliés ces dernières années, la période pré-augustéenne a été moins étudiée19. La bibliographie sur les publicains s’est pour sa part considérablement étoffée depuis quinze ans, surtout grâce aux travaux des juristes20, mais elle s’est davantage intéressée à la nature du contrat passé entre l’autorité publique et la societas publicorum ou à l’organisation interne de cette dernière qu’au rôle des publicains comme relais ou substituts de l’administration romaine. C’est donc généralement au travers de remarques incidentes que l’on discerne, dans la bibliographie contemporaine, l’acceptation à peu près générale des thèses d’E. Badian21. Celles-ci ont notamment infusé la synthèse la plus poussée, à ma connaissance, sur la notion d’« administration romaine républicaine ». La section intitulée « Die republikanischen Grundlagen » de l’ouvrage de P. Eich, Zur Metamorphose des politischen Systems in der römischen Kaiserzeit. Die Entstehung einer « personalen Bürokratie » im langen dritten Jahrhundert, publié à Berlin en 2005, explique l’inachèvement de l’administration républicaine, notamment dans sa dimension financière22, par les caractères structurels du régime de la res publica libera23, par l’inadaptation des Romains à la situation créée par l’accroissement de l’empire24, et par leur incapacité à séparer sphères publique et privée25. Dans la mesure où M. Weber26 avait fondé sa définition de l’administration sur le critère de l’organisation rationnelle, elle-même mesurable à l’aune d’une série de principes généraux27, de l’existence d’un personnel répondant à des caractéristiques précises28 et d’une organisation du travail spécifique29, il faudrait classer « l’administration romaine » parmi les formes de « proto-administration », en l’occurrence les « administrations patrimoniales », qui ne réussirent jamais à penser le territoire qu’elles avaient à gouverner autrement que comme un oikos30.

6Dès lors, il s’agit de cerner les caractères typologiques de « l’administration républicaine du Trésor », afin de déterminer s’il faut souscrire aux conclusions de P. Eich. À cette fin, trois questions seront successivement examinées. Tout d’abord, si la délégation à des priuati de tâches qui nous semblent relever des attributions fondamentales de la puissance publique est l’indice d’une incapacité à construire une administration, dans quelle mesure les Romains, entre 264 et 49 av. J.-C., eurent-ils recours à ce type de solution ? Ensuite, à Rome même, jusqu’à quel point la structuration des services supervisés par les questeurs était-elle adaptée aux tâches de gestion des deniers publics qu’ils avaient à remplir ? Peut-on, pour terminer, porter un jugement sur le degré de « rationalité administrative » atteint par les « bureaux » de l’Aerarium républicain ?

1 – La question du recours à la délégation

7La délégation d’activités régaliennes à des priuati constitue l’un des éléments qui ont conduit à classifier l’administration romaine des finances publiques parmi les exemples d’administration imparfaite. Deux points ont à cet égard retenu l’attention, le recouvrement des impôts et les transferts de fonds publics. Tous deux engagent la possibilité d’une administration fiscale, tandis que du second dépend également l’existence d’une administration chargée de l’exécution des dépenses publiques.

La perception fiscale

  • 31 Marquardt 1888, p. 225 ; Frank 1933, p. 139 ; plus récemment Tan 2015, p. 214 ; Tan 2017, p. XXVII (...)
  • 32 Cic. off. 2, 76 ; Val. Max. 1, 4, 3 ; Plin. nat., 33, 56.
  • 33 Nicolet 1976a, p. 201 et 228 ; Nicolet 1979a, p. 240 et 247.
  • 34 Nicolet 1976b, p. 51 : « Les tribuns du trésor peuvent donc apparaître, d’une certaine manière, co (...)
  • 35 Cerami 1986, p. 34-35 ; Cerami 1995, p. 373.

8Les descriptions classiques de l’évolution de la fiscalité républicaine31 font de la troisième Guerre de Macédoine une rupture dans l’histoire de l’impôt romain. L’incroyable ampleur du butin remporté sur Persée32 aurait permis, pour reprendre le mot de Cl. Nicolet, « l’exportation de la fiscalité », autrement dit le passage du tributum acquitté par les citoyens à une ponction fiscale pesant majoritairement sur les provinces33. Toutefois, le principe de la délégation du prélèvement à des personnels non publics serait, lui, demeuré une constante. Alors qu’avant 167 av. J.-C., la levée du tributum était confiée aux tribuni aerarii, après cette date, le recouvrement des uectigalia provinciaux serait revenu aux publicains34. Le système fiscal romain aurait donc reposé sur le rapport juridique d’impôt – relation de droit entre trois sujets, dont le percepteur – et non sur l’obligation tributaire, où le contribuable est lié à l’État par un rapport exclusif35. Le réexamen des sources confirme-t-il cette conception ?

Avant 167 av. J.-C. : les tribuni aerarii se chargeaient-ils vraiment de la perception du tributum ?

  • 36 Lange 1876-1879, I, p. 540 ; Willems 1885, II, p. 357 ; Marquardt 1888, p. 221 ; Schwahn 1939, col (...)
  • 37 Marquardt 1888, p. 221 ; Clerici 1943, p. 439 ; Nicolet 1976a, p. 218 ; Muñiz Coello 2011, p. 137.

9Depuis le XIXe siècle, on considère généralement que la perception du tributum36 – ainsi que la distribution de la solde, d’ailleurs37 étaient déléguées par les autorités publiques à des intermédiaires, les tribuni aerarii.

  • 38 Nicolet 1976b, p. 39-46 et 48-50.
  • 39 D.H. 4, 14, 2.
  • 40 Varro ling. 5, 181 : Tributum dictum a tribubus, quod ea pecunia, quae populo imperata erat, tribut (...)
  • 41 Il s’agit du passage sur les uiduae attributae aux détenteurs du cheval public pour le financement (...)
  • 42 D.H. 19, 16, 3.

10Cl. Nicolet, dans son volume dédié au tributum, est le seul à avoir étayé cette idée sur une réelle démonstration38. Denys d’Halicarnasse39 désigne le cadre de perception du tributum dans le système servien par le terme rare de symmorie. Or, dans l’Athènes du IVe siècle av. J.-C., la symmorie était l’unité fiscale à l’intérieur de laquelle on rassemblait l’eisphora. Des responsables nommés proeispherontes étaient chargés de faire l’avance du montant de cette contribution de guerre. Denys rapprocherait donc le fonctionnement des systèmes fiscaux athénien et romain. Le passage du De Lingua Latina40 qui décrit l’activité des tribuni aerarii déclare en outre que de la pecunia leur était attributa pour qu’ils la versent aux soldats ; or, le parallèle de Liv. 1, 43, 941 montrerait que le verbe attribuere signifiait « affecter au Trésor comme débiteur ». Il faudrait en déduire que les tribuni aerarii faisaient l’avance à l’Aerarium du montant total de l’impôt de guerre, et recevaient délégation de puissance publique pour se rembourser sur les contribuables. Par ailleurs, lorsque Denys d’Halicarnasse42 fait allusion à la restitution du tributum à laquelle Fabricius Luscinus aurait procédé en 283 av. J.-C., il indique que les bénéficiaires furent les idiôtai. Ces particuliers devraient être identifiés avec les tribuni aerarii.

  • 43 Willems 1885, II, p. 357, suivi par Hill 1952, p. 155 et 213.
  • 44 Soit dit en passant, je ne suis pas sûre que l’épisode de 196 av. J.-C. puisse être utilisé pour p (...)

11Tout en défendant l’idée d’une délégation de la perception du tributum aux tribuni aerarii, les historiens ont souligné que ce système avait été précocement abandonné au profit de la régie directe : les tribuni aerarii auraient alors été remplacés, dans leurs tâches, par les questeurs. P. Willems43 en voyait la preuve dans un épisode de 196 av. J.-C. durant lequel des arriérés de tributum furent réclamés aux membres des collèges sacerdotaux. Le récit de Tite Live montrait selon lui que les questeurs étaient alors responsables du recouvrement de l’impôt de guerre44 :

Liv. 33, 42, 2-4 (trad. CUF G. Achard).

Sed magnum certamen cum omnibus sacerdotibus eo anno fuit quaestoribus urbanis Q. Fabio Labeoni et L. Aurelio. 3. Pecunia opus erat, quod ultimam pensionem pecuniae in bellum conlatae persolui placuerat priuatis. 4. Quaestores ab auguribus pontificibusque quod stipendium per bellum non contulissent petebant. Ab sacerdotibus tribuni plebis nequiquam appellati, omniumque annorum per quos non dederant exactum est.

Mais un grand conflit opposa cette année-là les questeurs urbains, Q. Fabius Labeo et L. Aurelius, à l’ensemble des prêtres. On avait en effet besoin d’argent parce que l’on avait décidé de faire aux particuliers le dernier versement du déboursement des sommes qui avaient été données pour la guerre. Les questeurs demandaient cet argent aux augures et aux pontifes parce qu’ils n’avaient pas versé de contributions pendant le conflit. Les prêtres en appelèrent en vain aux tribuns de la plèbe et l’on exigea l’arriéré de toutes les années pendant lesquelles ils n’avaient pas donné.

  • 45 Clerici 1943, p. 447, n. 3.
  • 46 Nicolet 1976b, p. 54.

12La fin du système des tribuni aerarii, selon P. Willems, devait remonter à l’année 326 av. J.-C. L’instauration de la prorogation et le passage de quatre à six légions auraient rompu l’équilibre qui existait précédemment entre montant global du stipendium et tributum exigé des contribuables, ce qui aurait contraint le Trésor à prendre en charge la différence et l’aurait donc incité à contrôler lui-même la perception. L. Clerici45 jugeait pour sa part qu’il fallait plutôt mettre en relation la disparition des tribuni aerarii avec l’augmentation du nombre des questeurs au IIIe siècle av. J.-C. Cl. Nicolet46, enfin, privilégiait l’époque de la deuxième Guerre punique. La levée, à ce moment-là, d’un nombre considérable de légions aurait accru le montant du tributum dans des proportions trop importantes pour que des particuliers pussent désormais en faire l’avance. La cité romaine aurait donc évolué vers une gestion directe de la contribution de guerre et du paiement de la solde, mais la suspension du tributum suite à la troisième Guerre de Macédoine aurait interrompu ce mouvement.

  • 47 Gabba 1977, p. 30 ; Gabba 1979, p. 411 = Gabba 1988, p. 85.
  • 48 Walter 1860, I, p. 273, n. 53. Cic. Verr. II 1, 34 ; 3, 165 ; fam. 2, 17, 4 (= SB n° 117) ; Phil. (...)
  • 49 Nicolet 1966-1974, I, p. 45 ; Nicolet 1976a, p. 219 a affirmé que les sommes correspondant aux ind (...)
  • 50 Voir chapitre 1, « Les contributions de guerre : tributum ex censu et impôt acquitté par les uidua (...)

13Toutefois, l’idée que les tribuni aerarii assumaient à haute époque la tâche de réunir le tributum apparaît en elle-même problématique. E. Gabba47 notamment avait émis des doutes sur la reconstruction proposée par Cl. Nicolet et il semble, de fait, difficile de souscrire aux arguments de ce dernier. Ce n’est pas parce que Denys explique à son lectorat hellénophone une structure administrative romaine en la rapprochant d’un équivalent athénien qu’il sous-entend nécessairement que les deux réalités fonctionnaient exactement de la même manière. Par ailleurs, dans un contexte financier, attribuere ne signifie usuellement que « affecter une somme à »48. Le parallèle établi par Cl. Nicolet entre le financement de la solde et celui des indemnités équestres mérite donc discussion49. Tite Live (1, 43, 9) suggère en particulier que les sommes correspondant à l’aes equestre passaient par le Trésor Public. Par ailleurs, si l’interprétation que nous avons plus haut fournie de Polybe (6, 39, 13 et 15) est recevable50, l’aes hordearium était également versé dans les caisses de la cité aux IIIe–IIe siècles. Enfin, en Denys 19, 16, 3, les idiôtai peuvent très bien être les citoyens romains, envisagés individuellement.

14Les passages qui font état des activités des tribuni aerarii sont en fait fort peu nombreux :

Varro ling. 5, 181 (trad. J. Collart légèrement modifiée).

Tributum dictum a tribubus, quod ea pecunia, quae populo imperata erat, tributim a singulis pro portione census exigeba<n>tur. Ab hoc ea quae assignata erat attributum dictum ; ab eo quoque quibus attributa erat pecunia, ut militi reddant, tribuni aerarii dicti ; id quod attributum erat, aes militare ; hoc est quod Plautus ait : « cedit miles, aes petit » ; et hinc dicuntur milites aerarii, ab aere quod stipendia facerent.

Le mot tributum (contribution) vient de tribus (les tribus) parce que cet argent, qui était exigé du peuple, était perçu dans le cadre de la tribu (tributim) sur chacun proportionnellement à son cens. Les fonds alloués à la suite de ces opérations ont reçu le nom d’attributum (crédit) ; par suite également, les personnes à qui ces crédits étaient remis, à charge pour eux de payer l’armée, ont reçu le nom de tribuni aerarii. Le crédit lui-même s’appela aes militare (l’argent de la solde). C’est bien ce que dit Plaute :

Un militaire se présente, il réclame sa solde

De là vient l’expression milites aerarii (soldats), dérivée de aes (solde), parce que les intéressés touchaient une solde (stipendium).

 

Plin. nat. 34, 1 (trad. CUF H. Le Bonniec).

Hinc aera militum, tribuni aerarii et aerarium…

D’où les expressions : aera militum (solde des soldats), tribuni aerarii (tribuns du trésor), aerarium (trésor public)…

 

Gell. 6, 10, 2 (trad. CUF R. Marache).

Verba Catonis sunt ex primo Epistolicarum Quaestionum : Pignoriscapio ob aes militare, quod aes a tribuno aerario miles accipere debebat, uocabulum seorsum fit.

Il y a une phrase de Caton tirée du premier livre des Questions épistolaires : « Pignoriscapio, relatif au paiement militaire que le soldat devait recevoir d’un tribunus aerarius (trésorier payeur public), forme un mot par lui-même ».

 

Cf. Gaius inst. 4, 26-27 (trad. CUF J. Reinach).

26. Per pignoris capionem lege agebatur de quibusdam rebus moribus, de quibusdam lege. 27. Introducta est moribus rei militaris. Nam et propter stipendium licebat ab eo qui distribuebat, nisi daret, pignus capere ; dicebatur autem ea pecunia quae stipendii nomine dabatur, aes militare.

On procédait par prise de gage tantôt en vertu de la coutume, tantôt en vertu de la loi. Cette action a été introduite par la coutume en matière d’émoluments militaires. Même en matière de solde, il était permis au soldat, au cas où le payeur était en défaut, de prendre gage sur lui ; cet argent, qu’on donnait à titre de solde, s’appelait indemnité militaire.

 

Fest. p. 2 L. : Aerarii tribuni a tribuendo aere sunt appellati.

Les tribuni aerarii sont appelés ainsi, du fait qu’ils versent l’argent de la solde.

 

  • 51 Certains manuscrits ont de tribunis aerariis.

Ps. Ascon., Verr. II 1, 34, p. 233 St. : pecunia attributa quae in stipendium militum de aerario a tribunis aerariis adnumerari quaestori solet51.

 

L’argent affecté est d’habitude décompté au questeur pour (le paiement de) la solde des soldats, sur l’Aerarium, par les tribuni aerarii.

On considère traditionnellement que Plaut. Aul. 525-531, évoque les attributions d’un tribunus aerarius, puisque le texte de Varron cité supra y renvoie (trad. CUF A. Ernout) :

Vbi nugiuendis res soluta est omnibus,
ibi ad postremum cedit miles, aes petit.
itur, putatur ratio cum argentario ;
miles inpransus astat, aes censet dari.
ubi disputata est ratio cum argentario,
etiam ipsus ultro debet argentario :  
spes prorogatur militi in alium diem.

Quand vous avez réglé le compte de tous ces vendeurs d’inutilités, voici pour le bouquet un soldat qui vient réclamer son argent. On va chez son banquier, on fait son compte avec lui. Le soldat reste là, le ventre creux, croyant qu’il va toucher son argent. Mais, tout compte fait, c’est vous qui vous trouvez encore débiteur du banquier. On renvoie le soldat avec des promesses pour un autre jour.

  • 52 L’Oxford Latin Dictionary II, p. 1709, suggère « To put down in writing, make a record of (items i (...)

Il est délicat d’établir s’il faut ajouter au corpus Paul Fest. p. 269 L. : Primanus tribunus erat, qui primae legioni tributum scribebat, autrement dit si tribunus est ici équivalent de tribunus (aerarius). Comme l’expression tributum scribere n’est pas attestée par ailleurs, son sens est difficile à préciser52 : fait-elle référence à la perception du tribut (mais le cadre de la levée, selon Varron, était la tribu et non la légion), ou à la répartition de son produit, c’est-à-dire de la solde, entre les légionnaires ?

  • 53 Andreau 1968, p. 485 ; Andreau 1987, p. 350-353 et 544-545.
  • 54 Gaius inst. 4, 26-27 met sur le même plan la pignoris capio exercée par le soldat sur le tribunus (...)
  • 55 Varro ling. 5, 181.

15Les textes qui mentionnent explicitement les tribuni aerarii n’évoquent qu’une seule activité, le paiement de la solde. L’Aulularia de Plaute indique que cette opération pouvait (ou devait ?) s’effectuer à Rome, auprès du banquier du tribunus aerarius53, et on sait par Aulu Gelle que le citoyen-soldat avait le droit de recourir à la pignoris capio en cas de non versement de ce qui lui était dû54. Le seul texte qui pourrait éventuellement suggérer que les tribuni aerarii jouaient un rôle dans la perception du tributum est le commentaire aux Verrines du Pseudo-Asconius, mais le texte peut aussi signifier que les tribuni aerarii étaient des personnages liés au Trésor, qui remettaient aux soldats le montant du stipendium, et que l’argent transitait en amont par le questeur, qui apparaissait comme destinataire de la sortie sur les « registres » publics. Ceci expliquerait que le lemme varronien consacré au mot tributum55 s’achève par une remarque indiquant que l’on appelait les soldats aerarii, parce qu’ils touchaient l’aes militare. Les tribuni aerarii auraient été ceux qui s’occupaient du versement de cet aes aux citoyens-soldats, de sorte à limiter les tâches des services de l’Aerarium. Rien donc ne me semble étayer formellement l’idée que les tribuni aerarii faisaient l’avance à la cité du montant du tributum.

  • 56 Nicolet 1966-1974, I, p. 39 et 604-608 : ce niveau de cens devait être équivalent ou voisin de cel (...)

16Dans la mesure où ils étaient chargés d’une tâche intéressant la collectivité – effectuer les paiements concernant la solde, ces personnages devaient être sélectionnés, comme l’avait démontré Cl. Nicolet, sur la base d’une qualification censitaire56.

  • 57 Plb. 6, 39, 15 et Cic. Verr. II 1, 36 montrent que les questeurs, au moins depuis le IIe siècle av (...)
  • 58 L’emploi de l’imparfait chez Gell. 6, 10, 2, citant Caton, ne signifie pas nécessairement que le r (...)
  • 59 Suet. Iul. 41, 2 ; Nicolet 1966-1974, I, p. 623-624. Le De Lingua Latina de Varron est contemporai (...)
  • 60 Nicolet 1966-1974, I, p. 595-597 et 611-613, qui estime que le vivier des chevaliers et des tribun (...)

17Dès lors, deux questions subsidiaires se posent. D’une part, comme il semble que sur les théâtres d’opération extérieurs, la solde était distribuée « par la voie hiérarchique » (du questeur aux tribuns des soldats puis aux centurions57), et comme l’expression tribuni aerarii pourrait avoir signifié quelque chose comme « tribuns de la solde des soldats », faut-il identifier tribuni aerarii et tribuni militum ? D’autre part, les « tribuns du Trésor », qui constituèrent une décurie judiciaire à partir de la loi Aurelia de 70 av. J.-C., tout en portant le même titre que les tribuni aerarii médio-républicains, avaient-ils un rapport avec ces derniers ? Varron parle des tribuni aerarii à l’imparfait, ce qui laisse entendre qu’ils n’étaient plus actifs à sa propre époque, alors que le Pseudo-Asconius semble considérer qu’ils jouaient encore un rôle au début du Ier siècle avant notre ère58 : il est alors peut-être envisageable de situer la disparition des tribuni aerarii entre l’époque cicéronienne et la rédaction du De Lingua Latina. Or, la suppression de la décurie judiciaire des tribuni aerarii fut décidée durant la dictature de César59. Cette coïncidence chronologique conduirait à identifier les deux groupes connus sous le nom de tribuni aerarii. Dès lors, comme entre 16 et 25 jurés de la décurie siégeaient dans le cadre d’une quaestio, l’album devait comporter plusieurs centaines de noms60. Les tribuni aerarii auraient ainsi été sensiblement plus nombreux que les tribuns des soldats, ce qui conduirait à distinguer les deux catégories.

 

  • 61 Liv. 4, 60, 6 (406 av. J.-C.).
  • 62 Les citoyens-soldats non enrôlés auraient acquitté leur part de la contribution de guerre au momen (...)
  • 63 Liv. 23, 31, 1 (La concomitance chronologique apparaît également en Liv. 5, 10, 2-10 et 7, 27, 4).
  • 64 Plb. 6, 19-20.
  • 65 C’était l’hypothèse de Revillout 1866, p. 8.

18S’il faut donc renoncer à l’idée que les tribunii aerarii faisaient l’avance du montant du tributum, quelle était la procédure suivie pour la levée de la contribution de guerre ? Les sources sont malheureusement des plus silencieuses. Le texte de Tite Live qui raconte la création de la solde et du tribut61 montre soit les contribuables aller individuellement à l’Aerarium pour y verser leur quote-part, soit les portions du tributum, déjà acquittées dans des circonstances inconnues, être acheminées vers le Trésor – le tout probablement sous la surveillance d’un responsable public. Quoi qu’il en soit, l’opération précède immédiatement le vote par le peuple de la déclaration de guerre. Il serait donc envisageable que le paiement du tributum ait été concomitant du dilectus62. Un autre passage de Tite Live63 associe, de fait, les deux opérations. Dans ce cas, en se fondant sur la description polybienne de l’enrôlement des citoyens romains64, on supposera que les consuls et les tribuni militum supervisaient la récolte de l’impôt de guerre65.

  • 66 Erdkamp 1998, p. 85-110 ; Roth 1999, p. 147-154 ; Ñaco del Hoyo 2003, p. 26-46 et 202-210 notammen (...)
  • 67 Liv. 23, 21, 5 ; Liv. 28, 25, 9 ; 28, 34, 11 ; Plb. 15, 18, 6 ; Liv. 30, 16, 3 ; App. Pun. 235-238 (...)
  • 68 Liv. 23, 31, 1-2 (215 av. J.-C.) ; Plb. 11, 28, 5 (206 av. J.-C.) ; Liv. 40, 35, 4 (180 av. J.-C.) (...)

19Les travaux récents sur la fiscalité romaine républicaine ont souligné son caractère non systématique jusque dans la seconde moitié du IIe siècle av. J.-C66. Les Romains fondèrent leur supériorité sur l’usage de faire supporter à leurs adversaires le coût des campagnes militaires : les indemnités ponctuelles imposées aux ennemis vaincus jouèrent en ce sens un rôle essentiel. Or, les sources qui se rapportent aux années 264-167 av. J.-C. – la période, donc, où la contribution de guerre civique était a priori régulièrement levée – sont autant susceptibles de faire état d’une indemnisation des légions à partir d’un prélèvement improvisé sur le terrain67 que d’un envoi de fonds publics depuis Rome68. Le « circuit court » aurait mis le prélèvement destiné à la solde sous l’autorité directe des magistrats, qui agissaient par le bras des légions.

20Par conséquent, antérieurement à la soumission de la Macédoine, il semblerait que les Romains aient confié les tâches de levée de la contribution de guerre et les opérations assimilables avant tout à des responsables publics.

Après 167 : Le recours aux publicains pour le prélèvement fiscal dans les provinces ?

  • 69 Jones 1974, p. 161-162 ; Nicolet 1976a, p. 232 : « sous-traitée à des publicains, l’administration (...)

21Du coup, il faudrait conclure que c’est le développement d’une taxation provinciale régulière qui provoqua une rupture majeure dans les méthodes du prélèvement fiscal romain. L’éloignement géographique, joint aux difficultés de la pacification qui, durant tout le IIe siècle, monopolisèrent les forces armées et interdirent la mise en place d’une administration civile, auraient contraint les autorités de l’Vrbs à s’appuyer sur des priuati, les publicains69.

22Le texte fondamental à partir duquel on a établi une typologie fiscale des provinces est le fameux passage qui ouvre le De Frumento de Cicéron :

Cic. Verr. II 3, 12 : Inter Siciliam ceterasque prouincias, iudices, in agrorum uectigalium ratione hoc interest, quod ceteris aut impositum uectigal est certum, quod stipendiarium dicitur, ut Hispanis et plerisque Poenorum quasi uictoriae praemium ac poena belli, aut censoria locatio constituta est, ut Asiae lege Sempronia ; Siciliae ciuitates sic in amicitiam fidemque accepimus ut eodem iure essent quo fuissent, eadem condicione populo Romano parerent qua suis antea paruissent.

Sur les terres soumises à redevance, la différence entre la Sicile et les autres provinces, Messieurs les jurés, réside dans le fait qu’aux autres provinces ou est imposée une redevance fixe, qui est dite « de sujétion », comme pour les Espagnols et la plupart des Africains, quasiment une récompense de notre victoire et une sanction pour nous avoir fait la guerre ; ou est mis en place un système d’affermage censorial, comme en Asie par la loi Sempronia. Nous avons reçu les cités de Sicile dans notre amitié et notre bonne foi pour qu’elles aient la même situation de droit qu’elles avaient eue, pour qu’elles obéissent au peuple romain dans la même condition où elles obéissaient à leurs maîtres par le passé.

  • 70 Marquardt 1888, p. 244.
  • 71 C’est l’idée que l’on trouve aussi par exemple chez Jones 1974, p. 161 ; Duncan-Jones 1990, p. 188 (...)
  • 72 Pour la première interprétation : Aguillar Guillén – Ñaco del Hoyo 1997, p. 75 ; Genovese 1993, p. (...)

23Les interprétations proposées de ce texte dans les deux dernières décennies ont avant tout contribué à corriger la lecture qu’en avait faite J. Marquardt70. Ce dernier considérait que le uectigal certum, également nommé stipendium par les sourcescorrespondait à un impôt qui portait à la fois sur le sol et sur les personnes. Il en concluait que Cicéron brossait un tableau général de la fiscalité provinciale71. Or, les premiers mots de Cicéron précisent qu’il va traiter de l’agrorum uectigalium ratio. Les contributions récentes ont par conséquent rappelé que le passage avait pour seul objet ou bien l’impôt sur les produits du sol ou bien les terres soumises à redevance72

  • 73 Jones 1974, p. 162 et 176. Dans le même sens, Lo Cascio 1986, p. 34 ; Richardson 1994, p. 588. Fra (...)
  • 74 Cum omnibus in aliis uectigalibus, Asiae, Macedoniae, Hispaniae, Galliae, Africae, Sardiniae, ipsi (...)

24Alors que, pour A. H. M. Jones, l’opposition entre provinces soumises à un uectigal certum et provinces relevant d’un régime de locatio censoriale recoupait l’opposition entre territoires de perception directe et zones d’intervention des publicains73, M. Genovese a invoqué le témoignage des Verrines, II 3, 2774 pour souligner que les deux types de fiscalité provinciale pouvaient s’accompagner d’une présence des societates publicorum. Après avoir vérifié si on a des traces de recours à la régie directe pour le prélèvement des différents impôts provinciaux, on recensera donc les attestations de l’implication des « fermiers » dans la perception des uectigalia et on examinera les modalités de leur intervention dans les différentes provinces, afin de voir la place qu’ils occupaient dans le système fiscal républicain.

La cité romaine recourait-elle à la régie directe ?

25Les traces d’une supervision directe par le pouvoir romain du prélèvement fiscal dans les provinces sont plutôt ténues, et elles ne se rapportent pas uniquement aux agri uectigales.

  • 75 Ñaco del Hoyo 2005, p. 371-372 ; Ñaco del Hoyo 2007, p. 224-225. Ñaco del Hoyo 2003, p. 112-113 in (...)
  • 76 CIL I², 2513 = AE, 1913, 162 = ILLRP 388 = ILAfr 422 : Q(uinto) Numerio Q(uinti) f(ilio) / Rufo q( (...)
  • 77 Lex agr. l. 83 = CIL I², 585 = Crawford 1996, I, n° 2, p. 121-122 (le texte est lacunaire dans la (...)
  • 78 Ørsted 1985, p. 86.

26T. Ñaco del Hoyo75 avait pensé trouver dans une inscription républicaine d’Utica76, hommage des stipendiarii de différents pagi à un questeur, un indice suggérant que la perception de l’impôt, dans l’Africa Vetus, était assurée directement par les autorités provinciales. Toutefois, l’influence que le magistrat pouvait exercer sur la répartition de la charge fiscale entre les communautés locales est également susceptible d’expliquer l’existence de la dédicace. Un passage de la loi agraire de 111 av. J.-C., qui semble se référer à l’ager publicus africain objet de locatio77, considère apparemment comme équivalents le paiement des taxes au peuple ou au publicain, mais le terme populus est-il synonyme de « recouvrement par régie directe » ? P. Ørsted78 comprenait pour sa part que l’affermage pouvait indifféremment être réalisé ou par le gouverneur dans la province, ou par les censeurs à Rome.

  • 79 Plu. Luc. 4, 1 ; App. Mith. 260.
  • 80 Rostovtzeff 1941, II, p. 1574-1575 (suivi par De Laet 1949, p. 71 et Badian 1972, p. 109) a versé (...)
  • 81  Cic. prov. 10 : Statuit [Gabinius] ab initio, et in eo perseuerauit, ius publicano non dicere ; pa (...)
  • 82 Caes. civ. 3, 32, 4 : Erat plena lictorum et imperiorum prouincia, differta praefectis atque exact (...)
  • 83 Brunt 1956, p. 17-25 = Brunt 1990, p. 1-8 ; Merola 2001a, p. 53-54 et 108 ; Santangelo 2007, p. 11 (...)
  • 84 Maganzani 2002a, p. 99 ; Morrell 2017, p. 81.
  • 85 De Laet 1949, p. 87.
  • 86 Cic. Verr. II 3, 50, 86-87, 89, 92-93, 102, 200, 228.
  • 87 Cic. Verr. II 3, 33, 50, 75, 84, 105, 178, 200, 228, avec l’emploi des termes procurator ou praefe (...)
  • 88 Genovese 1999, notamment p. 252 et 425.

27Par ailleurs, différents épisodes datés du Ier siècle av. J.-C. ont été interprétés comme des réformes visant à renforcer le contrôle de l’autorité romaine sur le prélèvement fiscal dans les provinces hellénophones. Le premier cas correspondrait à la décision prise par Sylla, à l’époque de la première Guerre de Mithridate, d’exclure les publicains d’Asie79. Puis, entre 57 et 56 av. J.-C., L. Calpurnius Piso aurait fait lever par sa propre familia servile le portorium qu’il avait institué en Macédoine80, tandis qu’en Syrie, A. Gabinius81 aurait introduit la régie directe pour la perception des taxes provinciales. Enfin, en 49-48 av. J.-C., Q. Caecilius Metellus Scipio aurait fait lever des contributions en Syrie par des praefecti et des exactores82. Toutefois, aucun de ces cas ne semble absolument probant. La mesure syllanienne correspondit probablement à une tentative de délégation de la perception aux communautés locales, qui anticipait en quelque manière la réforme césarienne de 48-4783. M. Rostovtzeff a par ailleurs peut-être trop imputé aux gouvernements provinciaux de Pison et Gabinius. La réforme de Pison ne paraît avoir concerné qu’un portorium, qui plus est de création récente. Par ailleurs, le Discours sur les provinces consulaires, 10 semble décrire seulement une série de mesures ponctuelles prises en faveur des contribuables84, non « un essai révolutionnaire d’éliminer entièrement les sociétés vectigaliennes du système fiscal de la Syrie »85. Enfin, l’intervention en Syrie des agents de Scipion se plaça dans le contexte de la guerre civile, et ne concerna pas la fiscalité régulière, mais des ponctions exceptionnelles. En revanche, peut-être faut-il voir dans la préture de Verrès en Sicile une tentative avortée pour contrôler plus étroitement la perception de la dîme. Cicéron présente comme une innovation scandaleuse la possibilité offerte aux esclaves du temple de Vénus Erycine de se porter adjudicataires86, et dénonce comme une preuve des malversations de Verrès l’implication de ses appariteurs dans la levée de l’impôt provincial87. Dans la mesure où le gouverneur semble avoir tenté, notamment par le biais de ses édits, d’améliorer l’efficacité du prélèvement fiscal88, il est envisageable qu’il ait aussi cherché à en confier la perception à des agents qui dépendaient directement de lui.

28À l’exception donc peut-être de l’ager publicus africain, de certains décimateurs dans la Sicile de Verrès et du portorium de Macédoine mis en place en 57-56, on n’a pas trace, pour le recouvrement des impôts provinciaux, d’une intervention de personnels qui relèveraient directement des pouvoirs publics. Qui plus est, si l’hypothèse avancée pour la Sicile est recevable, il faut conclure qu’il n’est pas possible d’établir un lien entre un type de fiscalité provinciale et un mode spécifique de prélèvement. Dès lors, faut-il penser que le recours aux « fermiers de l’impôt » était la règle générale dans les provinces ?

Les contractants impliqués dans le prélèvement fiscal dans les provinces à l’époque républicaine

  • 89 L’opinion de Mateo 1999, p. 70 et 89-90 et 2001, qui considère que les sociétés de publicains avai (...)

29Le tableau ci-dessous synthétise les renseignements dont nous disposons sur la délégation du prélèvement fiscal dans les provinces à des individus ou des sociétés qui avaient passé contrat à cette fin avec la cité romaine89.

  • 90 Redemptor en revanche était apparemment utilisé pour qualifier un contractant qui fournissait aux (...)

30Le dépouillement a été effectué à partir des listes et tableaux déjà présents dans les ouvrages et articles de Ivanov 1910, p. 91-112, Nicolet 1966-1974, I, p. 344-346 et Nicolet 2000, p. 315-319, Ehrhardt 2002, p. 135-153 et Dufour 2010, p. 194-195. Ces auteurs ont été contrôlés et complétés par la recherche dans la BTL et les bases de données épigraphiques des occurrences de conductor, manceps, portitor, publicanus, scripturarius, decumanus, magister, promagister, socii et societas90, et des expressions contenant les verbes conducere, emere, redimere, ainsi que des attestations littéraires et épigraphiques (SEG 1975-2015) de telonès, demosiônès, et des périphrases comportant les verbes exagoraxein, ergolabein ou misthousthai.

  • 91 Il me semble en effet que sa catégorie de uectigalia assimilables à des impôts directs peut en fai (...)

31Par ailleurs, pour identifier les revenus fiscaux, on s’est appuyé sur la typologie proposée par France 2007a, p. 361-364, en la modifiant légèrement91 (impôts sur les biens et les personnes des communautés provinciales, uectigalia assimilables à des impôts indirects – taxes à la circulation et droits sur les ventes et les mutations -, uectigalia correspondant à des redevances domaniales).

32Les points d’interrogation en début de ligne indiquent les cas incertains.

  • 92 Di Stefano 1998, p. 707-748.
  • 93 Crawford 1996, I, n° 12, p. 241 : copie de Cnide, col. 4, l. 13-16.
  • 94 Crawford 1996, I, n° 12, p. 265.
  • 95 Je ne suis pas tout à fait sûre qu’il faille retenir l’attestation, car Vial 1984, p. 346 et Migeo (...)
  • 96 Cic. Verr. II 2, 170 : dans ce contexte, les mêmes sommes pouvaient apparaître indifféremment sur (...)
  • 97 Crawford 1996, I, n° 19, p. 334.
référence date région acteurs
du prélève-
ment,
dénomi-
nation,
position
juridique
activités particula-
rités
diverses
Plaut. Truc.146 IIe  ? publicani scriptura
Liv. 45, 29, 11 167 Macédoine exercentes mines Cf. 45, 18, 3-5 : publicani
Varro Men. 329  ?  ? portitor portorium
Val. Max. 6, 9, 8 ; Ps. Ascon. Verr. II, 2, 32 p. 264 St. avant 132 Sicile P. Rupilius, operas publicanis dedit ;
Ex publicano factus consul
portorium
Lucil. 671-672 Marx 130-120 Asie publica-
nus, scriptu-
rarius
scriptura
D.S. 35, 38 avant 119  ? C. Marius
dèmosiônès
 ?
Sherk 1969, n° 12 (SC de agro Pergameno)92, l. 22 129 ou 101 Asie dèmosiônai terres
Lex agr., l. 83 111 Afrique publicanus scriptura
sur l’ager
publicus,
probable-
ment
decuma
Str. 14, 1, 26 fin IIe Asie dèmosiônai telos du
Lac Seli-
nusia
Str. 4, 1, 13 après 106 Transalpine tôn ônèsamenôn polloi lacs des Tectosages cession au profit du Trésor
IvPrien., 111, l. 134 et 140 (cf. IvPrien., 117) = SEG 51, 1611 102 ? Asie dèmosiônai salines
ILS 8770, IvIlion 71 102 ? après 89 ? Asie  ? dèmosiônia exemption des terres d’Athéna
lex de prouinciis praetoriis93 101 Macédoine périphrase faisant référence aux publicains ?94 mention des dèmosiai prosodoi
D.S. 37, 5-6 99-97 av. J.-C. Asie esclave des dèmosionai  ? sévérité de Mucius Scaevola à l’endroit des publicains
 ?ID 176495 93 Asie ? esclave des koinônoi dek[atès] dîme d’Asie ?
Sherk 1969, n° 22
(SC de Asclepiade, l. 16 du texte latin et 23 du texte grec)
78 av. J.-C. Asie, Eubée  ? uectigal, misthousthai
Monum. Ephes., l. 72-73 75 av. J.-C. Asie dèmosiônès perception de la dîme et du 20e sur le vin et l’huile
Monum. Ephes., l. 74-78; cf. Vell. 2, 6, 3? / perception du portorium
Monum. Ephes., l. 78 / mention d’un geôruchikos nomos = lex metallis dicta
 ?BCH, 96, 1972, p. 443-471 80-70 ? Asie dèmosiônai  ? ambassade du koinon à Rome 
 ?Plu. Sert. 24, 5 76-72  Asie telonai  ?
 ?Plu. Luc. 7, 6 et 20, 1 74, puis 70 Asie telonai  ?
Cic. Verr. II 3, 13 Ier Sicile / ciuitates censoriae locatio censoriale
Dig. 50, 16, 203 Sicile / portorium lex censoria
Cic. Font. 19 76-74 ? Transalpine Titurius, Porcius, Munius, Seruaeus, C. Annius portorium uini
Cic. Verr. II 3, 18 75 Sicile publicani uini et olei decumas et frugum minutarum uenditio par les consuls
Cic. Verr. I 3 73-70 Sicile div. in Caec. 33 ; Verr. II 3, 175 : mancipes ; Verr. II 2, 32 ; 3, 20-21, 25-29, 31 et 104 (Apronius) ; 32-34, 38, 50 (Venerii serui) ; 51, 53-56 et 58, 61, 66, 72, 75, 84 (A. Valentius) ; 86 (Diognetus Venerius) ; 90 (P. Naevius Turpio) ; 91-92 (Symmachus Venerius) ; 97, 99 (Venuleius) ; 100-101 (M. Caesius) ; 102 (Cn. Sergius) ; 103, 109-110, 112-113, 117, 131, 147 : decumanus ; 32, 77 (Aeschrio) ; 89 (Bariobal Venerius) : publicanus ;
3, 71 : Apronius emptor
dîme
Cic. Verr. II 2, 169-191 ; 3, 165 et 167-168 73-70 socii, societas P. Vettius Chilo, magister ; L. Tullius, magister ; P. Servilius, magister ; C. Antistius, magister ;
2 scribae magistri ;
L. Vibius, magister
L. Carpinatius pro magister sur place pour la scriptura ;
 L. Canuleius sur place pour le portus
2, 188 : esclave chargé des tabulae
scriptura et sex publica, portorium (2, 185 : uicesima portorii Syracusis ; stations de perception à Agrigentum, Lilybaeum, Panhormus, Thermae, Halaesa, Catina, Messana) argent destiné au frumentum emptum prêté à intérêt ; P. Vettius réclame que les intérêts soient versés au peuple ou à la société
2,169 : prêt à intérêts aux interlocuteurs de Verrès96

2, 182 : les tabulae sont conservées chez les magistri ; elles sont classées par année puis par mois pour le portorium (pour les biens exportés)
2, 186 : la société a des tabulae accepti et expensi, classées par années, mois, et dates
2, 187 : il est interdit par la loi de sortir les registres des publicains de la province
Sherk 1969 n° 23 (SC d’Oropos) ;
Cic. nat. deor. 3, 49
73 Macédoine dèmosiônai l. 23-24, 29, 31-34, 65, 67

chôrôn prosodos

agri in Beotia excepti lege censoria
Jacoby 1923-1999, III, 434, 27, 5-6 73 Pont dèmosiônai dèmosiônia
Val. Max. 6, 9, 7 avant 66 av. J.-C. Asie T. Aufidius cum Asiatici publici exiguam admodum particulam habuisset
Lex Antonia de Termessibus, col. II, l. 31-3697 68 av. J.-C. Cilicie quei publica populi Romani uectigalia redempta habebunt…
publicanei
uectigalia
 ? Cic. Font. 2 avant 69 Afrique ? publicani  ?
Cic. Manil. 15-16 66 Asie ei qui exercent atque exigunt, publicani, familiae maximae portus, decuma, scriptura, salinae
Cic. leg. agr. 2, 50 63 Bithynie, Chersonèse,
Macédoine
publicani agri regii locatio censoria, certissimum uectigal
Cic. leg. agr. 2, 51 63 Cyrénaïque publicani ager publicus = anciennes terres royales Cf. Cic. Planc. 63
Cic. Att. 1, 17, 9= SB n° 17; ad Q. fr. 1, 1, 6 et 32-33; off. 3, 88; Planc. 35; Att. 1, 18, 7= SB n° 18; 2, 1, 8= SB n° 21; Suet. Iul. 20, 3; App. BC 2, 13

Cf.? Cic. Att. 7, 7, 5= SB n° 130 (50, Asie, publicani pro-césariens)
61-59 Asie Cic. Att. 1, 17, 9 = SB n° 17 : Asiam qui de censoribus conduxerunt ;
publicani, therapontes
publica publica male redempta
1, 1, 34 : l’impôt provincial acquitte le prix de la paix apportée par Rome
1, 1, 35 : la lex censoria n’est pas nécessairement respectée dans la conclusion des pactiones
Planc.
35 : loi césarienne pour la rectification des contrats
Cic. Att. 2, 15, 4 = SB n° 35 59  ? publicani ager publicus
 ? Cic. Att. 2, 16, 2 = SB n° 36 59 Mons Antilibanus publicani  ?
Cic. Att. 2, 16, 4 = SB n° 36 59 Asie publicani portorium circumuectionis
Cic. Pis. 87  57-56 Macédoine publicani portorium
Sherk 1969 n° 25 (SC de agris Mytilenaeorum) 55 Asie / dèmosiônia
 ? Cic. Planc. 32 et 34 Avant 54  ? societates, publicani
Cn. Plancius, magister
 ?
Cic. prov. 10-11; D.C. 39, 59, 2;
Cf. en 54 Cic. ad Q. fr. 3, 2, 2
58-57, puis 54 Syrie publicani
publicani seruus
D.C. : telônai

Cic. ad Q. fr. 2, 13, 2 : L. Lamia
uectigalia Tensions avec Gabinius, qui a accordé des exemptions de uectigalia et stipendium ; mention des pactiones
Cic. prov. 12 : la lex censoria garantit les pertes dues aux ennemis
? Cic. fam. 13, 9, 1-3= SB n° 139 54 Bithynie socii Bithyniae, Bithynica societas, publicani
P. Rupilius magister
Cn. Papius qui est in operis eius societatis
 ? leg. agr. 2, 50 évoque les agri
Cic. Att. 5, 13, 1= SB n° 106; Att. 5, 14, 1= SB n° 107 51 Cilicie publicani  ? pactiones faites fin juillet
Cf. Cic. Att. 6, 1, 16 = SB n° 115 
Cic. Att. 5, 15, 3= SB n° 108; 5, 16, 1= SB n° 109; 5, 21, 4= SB n° 114; cf. fam. 8, 7, 1= SB n° 92? 51-50 Cilicie publicani
magistri
tabellarii
(à Iconium notamment)
scriptura, portus, dioceses ? Cic. Att. 6, 1, 15-16 = SB n° 115 ; fam. 3, 8, 4 = SB n° 70 : dispositions concernant les publicains dans l’édit du gouverneur
Cic. Att. 5, 13, 1 = SB n° 106 51 Asie decumani dîme ?
Cic. fam. 13, 65 51 Asie socii, societas
P. Terentius Hispo qui operas in scriptura pro magistro dat
scriptura mention des pactiones
 ? Cic. fam. 5, 20, 9 50 Asie publicani à Éphèse  ? dépôt de fonds par Cicéron, ensuite saisis par Pompée
 ? Caes. civ. 3, 3, 2 49 provinces obtenues par Pompée societates  ?
 ? Caes. civ. 3, 103, 1 48 Chypre societates
familiae
 ?
 ? Caes. civ. 3, 31-32 48 Syrie et Asie publicani  ?
 ? Cic. Att. 11, 2, 3 48 Asie publicani  ? argent laissé en dépôt chez eux par Cicéron
D.C. 42, 6, 3 48 Asie telônai impôt provincial la réforme césarienne introduit un phoros
Cic. Att. 11, 10, 1 = SB n° 221 47 Asie P. Terentius Hispo, operas … dedit scriptura et portorium
 ?Bell. Alex.70, 7 47 Pont familiae publicanorum  ?
 ?Chiron, 19, 1989, p. 127-164, l. 62 = SEG 39, 1290 = AE 1989, 684 44 Sardes, Asie dèmosiônai impôt concernant les terres ?
IG XII suppl., 261 =
Robert 1989 p. 113 = Mendoni – Zoumbaki 2008, p. 99-101
Ier Andros, Asie G. Vareius, dèmosiônès
Dig. 39, 4, 15 Républi-que ou César Crète / mines
Cic. Phil. 2, 48 avant 44 Hispanie socii cinabre
  • 98 Ñaco del Hoyo 2003, p. 85 et 194-248, 202-210 notamment.
  • 99 La loi agraire de 111 av. J.-C. pourrait suggérer que les redevances sur les terres de Corinthe et (...)
  • 100 Dufour 2010, p. 166.

33La distribution géographique et chronologique des sources, pour autant qu’on puisse l’évaluer quantitativement, est extrêmement inégale. Les régions de la Méditerranée orientale sont nettement surreprésentées, en raison de l’abondance des témoignages concernant la province d’Asie. La plus ancienne trace de l’implication de « fermiers » dans le prélèvement fiscal remonte à 167 av. J.-C. Une dizaine d’attestations seulement se rapportent ensuite au IIe siècle. Dans la mesure où elles ont majoritairement trait aux redevances perçues sur l’ager publicus, elles semblent confirmer le tableau, brossé par T. Ñaco del Hoyo98, d’une fiscalité provinciale demeurée irrégulière jusqu’aux années 140-130 av. J.-C., moment où les Romains durent tirer les conséquences de l’épuisement du butin pris sur Persée99. En revanche, près de la moitié des sources concerne les années 100-44 av. J.-C. Cette particularité, qui traduit bien évidemment l’importance quantitative du corpus cicéronien, signale peut-être aussi que le recours aux publicains fut beaucoup plus massif au Ier siècle100.

  • 101 Lex agr. l. 83 = CIL I², 585 = Crawford 1996, I, n° 2, p. 121-122 ; Monum. Ephes. l. 72-73 = AE, 2 (...)
  • 102 Voir la Sicile de Verrès et l’Asie en Cic. fam., 13, 65 = SB n° 134. Les autres témoignages, il es (...)

34Les sources littéraires font référence aux adjudicataires le plus souvent de façon générique, au pluriel, tandis que les documents normatifs envisagent le rapport entre le contribuable et le « fermier », au singulier, mais le publicain renvoie là à la societas101. La mention explicite d’une structuration des adjudicataires en societas n’est pour sa part pas très fréquente. Le terme pourrait avoir été surtout employé pour les groupes qui affermaient le recouvrement de la scriptura et des portoria102.

  • 103 On en a trace pour l’Asie en 75, 66, 59 et 47 av. J.-C., pour la Macédoine en 57, pour la Cilicie (...)
  • 104 Scriptura : Sicile en 73-70, Asie en 66, 51 et 47 av. J.-C., Cilicie en 51 (Trapenard 1908, p. 19- (...)
  • 105 Dont l’Eubée, rattachée apparemment à cette province : Picard 1979, p. 295.
  • 106 Pour la Sicile, c’était l’hypothèse de Rostowzew 1902, p. 350-352, reprise par Carcopino 1914, p.  (...)

35Au dernier siècle de la République encore, les activités des adjudicataires de l’impôt paraissent avoir très majoritairement concerné la perception des portoria103 et des redevances correspondant à un droit d’usage sur l’ager publicus104. Les termes très vagues utilisés par les textes, qui n’évoquent bien souvent que les uectigalia, interdisent certes les conclusions définitives, mais la délégation à des « fermiers » du recouvrement de l’impôt provincial sur les terres n’est formellement attestée qu’en Macédoine105, en Asie et en Sicile. Le recours à l’affermage pourrait donc avoir caractérisé ou les anciennes grandes monarchies hellénistiques, dont l’organisation fiscale aurait été reprise telle quelle par le pouvoir romain106, ou, de façon assez paradoxale, les territoires des cités grecques, peut-être parce que les divisions politiques intérieures des communautés empêchaient une répartition non conflictuelle de la charge fiscale en leur sein.

  • 107 D.S. 37, 5-6 ; Cic. Manil. 16 ; App. BC 2, 13 pour l’Asie ; Cic. prov. 10-11, pour la Syrie ; peut (...)

36Concrètement, le recouvrement des divers impôts dans les provinces était probablement assuré par un personnel servile107, mais la documentation disponible ne permet pas de cerner précisément les tâches qui leur étaient confiées.

37Dans la mesure où la perception fiscale dans les provinces n’était pratiquement jamais effectuée par les pouvoirs publics romains et où l’affermage concernait apparemment des types d’impôts bien particuliers et des régions déterminées, comment la cité romaine républicaine procédait-elle en général au recouvrement des rentrées fiscales provinciales ?

L’organisation de la fiscalité provinciale

  • 108 Merola 2001a. Ce point était déjà mis en avant par Spagnuolo Vigorita 1997, p. 175 et Spagnuolo Vi (...)
  • 109 Les imperatores qui réorganisèrent des provinces ou en instituèrent de nouvelles dans le courant d (...)

38L’un des acquis de l’ouvrage consacré par G. D. Merola à la fiscalité de la province d’Asie108 est d’avoir mis en lumière la fonction essentielle que, dès l’époque républicaine, les cités assumaient dans la perception de l’impôt provincial, et ce, quelle qu’ait été l’organisation fiscale générale de la prouincia109. Il en découle que les oppositions terme à terme généralement utilisées pour classer les différentes fiscalités provinciales (recours aux publicains u. régie directe, impôt perçu en nature u. impôt perçu en argent) sont en fait peu opératoires.

  • 110 Ñaco del Hoyo 2003, p. 192, pour l’Hispanie de la fin du IIe siècle av. J.-C.
  • 111 C’est l’hypothèse qui a été avancée pour l’Africa Vetus, à partir de l’inscription d’Utica évoquée (...)
  • 112 Pour l’époque impériale, France 2003, p. 209-225, notamment p. 210 = France 2017, p. 425-438, nota (...)
  • 113 Orejas – Sastre 1999, p. 172.

39Dans les provinces régies par le système du uectigal certum, les communautés (cités110 ou pagi111) se voyaient probablement assigner une part de l’impôt fixe globalement dû par la province (ou en négociaient le montant avec le gouverneur112), puis les responsables locaux répartissaient l’effort fiscal à l’intérieur de la population. Ceci ne préjugeait en rien des modalités concrètes du recouvrement, dans lequel pouvaient intervenir des « fermiers » locaux113.

  • 114 Ces conventions précisaient le montant et les modalités du versement de l’impôt. Genovese 1999, p. (...)
  • 115 Cic. Verr. II 3, 102 ; Genovese 1999, p. 454.
  • 116 Cic. Verr. II 3, 34. Genovese 1999, p. 426-429, à partir de Cic. Verr. II 3, 117, pour les innovat (...)
  • 117 Sherwin-White 1984, p. 232-233 et n. 117 ; Merola 2001a, p. 65 et 103.
  • 118 Maganzani 2002a, p. 134-135.
  • 119 Cottier et al. 2008, p. 40-45.
  • 120 Merola 2001a, p. 108-113.
  • 121 Cic. ad Q. fr. 1, 1, 33 = SB n° 1.
  • 122 Plu. Caes. 48, 1 ; App. BC 2, 385 ; 5, 19 ; D.C. 42, 6, 3 ; Merola 2001a, p. 72-75 ; Le Teuff 2017 (...)
  • 123 App. BC 4, 316 qui, toutefois, se réfère à une période troublée marquée par les levées arbitraires

40Dans les régions où la levée de l’impôt était affermée par l’autorité romaine, les percepteurs procédaient en concluant des pactiones avec les contribuables114. Toutefois, dans ce cas aussi, les magistrats locaux avaient un rôle à jouer. D’une part, ils procédaient à l’enregistrement des pactiones aux archives civiques115. En outre, dans la Sicile de Verrès, ils semblent avoir été tenus responsables du bon accomplissement des prestations fournies au décimateur116. De plus, la pactio pouvait également se négocier de façon globale, à l’échelle de la cité, et les autorités romaines, au moins en Asie, semblent avoir incité à une évolution en ce sens117. La documentation concernant la fiscalité indirecte soumise à affermage fournit un éclairage complémentaire sur les compétences des pouvoirs publics locaux. Il était possible, au lieu de calculer le montant de la scriptura due par chaque éleveur, de conclure des pactiones avec les cités de la région118. Les lignes 40-42 du règlement douanier de la province d’Asie119 montrent en outre qu’aux yeux de l’autorité romaine, les publicains et les cités étaient des entités fonctionnellement équivalentes. En cas d’absence du personnel attaché au poste de douane, le contribuable devait s’adresser au magistrat supérieur de la cité la plus proche et procéder à une déclaration écrite des biens qu’il transportait ; en contrepartie, il recevait probablement un récépissé des autorités civiques. G. D. Merola estime donc qu’en pratique, la majorité des déclarations se faisait devant les magistrats des cités120. Quoi qu’il en soit, pour revenir à la fiscalité pesant sur les terres provinciales, la fin de la période républicaine vit sans doute l’affirmation du rôle des communautés civiques, puisque les cités d’Asie, qui à l’époque syllanienne n’avaient pas été aptes à assurer seules le prélèvement fiscal121, s’en montrèrent apparemment capables après la réforme césarienne de 48-47 av. J.-C122. Un passage d’Appien123 pourrait suggérer qu’à l’époque triumvirale, les sommes correspondant à l’impôt provincial étaient versées directement au gouverneur.

  • 124 Ceci arrivait lorsque les responsables locaux se révélaient incompétents ou que les divisions poli (...)
  • 125 C’était bien sûr le cas pour la dîme du blé de Sicile, et les dîmes sur le vin, l’huile et les fru (...)
  • 126 Cic. Att. 6, 1, 15-16 = SB n° 115 (20 février 50) montre que l’édit du gouverneur contenait des él (...)
  • 127 Comme on l’a vu, ce fut probablement le cas en Asie suite à la réforme de César, ce qui suggère qu (...)

41Au total, il ressort que la cellule fondamentale de la perception fiscale, dans les provinces, était la cité, et que les publicani ou plus largement les « fermiers de l’impôt » étaient utilisés surtout en cas d’incapacité des communautés civiques124. De plus, dans les régions d’affermage, les autorités provinciales supervisaient assez étroitement le système fiscal, d’abord en procédant parfois elles-mêmes à la locatio125, ensuite en agissant sur les pactiones126, enfin en réceptionnant le produit de l’impôt127.

 

42Il semble donc que le recouvrement de l’impôt, dans la Rome républicaine, procédait de logiques variables selon l’époque et l’identité du contribuable. Jusqu’en 167, les citoyens-soldats romains paraissent avoir eu pour interlocuteurs les magistrats et les tribuns des soldats, probablement assistés d’un personnel administratif ou servile pour l’exécution concrète des tâches. L’« administration fiscale », extrêmement légère, devait en pratique coïncider avec les agents de l’Aerarium. À partir du moment où s’organisa le prélèvement d’une fiscalité provinciale régulière, les peuples de l’empire eurent affaire aux autorités de leurs propres communautés, mais aussi au personnel employé par les « fermiers de l’impôt » : ces deux catégories seraient ainsi assimilables à un semblant d’« administration fiscale ».

  • 128 Cic. Att. 4, 11, 1 = SB n° 86 permettrait de penser que sous la République, le consul apurait les (...)
  • 129 Voir le cas de la Sicile, où l’éventuelle remise d’argent résultait d’une procédure d’aestimatio.
  • 130 Maganzani 2002b, p. 219-234.
  • 131 Nicolet 1994c, p. 216 = Nicolet 2000, p. 278 et 292.

43Cette organisation hétérogène et extrêmement décentralisée n’empêchait pas un contrôle étroit du produit de l’impôt par les responsables publics romains, et une souplesse d’ensemble du système fiscal. En effet, à partir du milieu du IIe siècle av. J.-C., l’impôt provincial, s’il donnait lieu à affermage, amenait soit à un dépôt de numéraire au Trésor, lors du versement annuel de la tranche à payer par l’adjudicataire du contrat public128, soit à une remise de la masse fiscale – en nature ou en argent – au gouverneur de la province129. Il est par ailleurs vraisemblable que dans les régions de uectigal certum, le produit de l’impôt ait été versé au gouverneur. Les différentes formules existantes permettaient aux pouvoirs publics d’opérer un certain nombre de choix à la fois stratégiques et techniques. Fixerait-on a priori le montant dont on avait besoin ou tenterait-on de « maximiser » ce dernier par le recours à la locatio130 ? Exigerait-on du contribuable du numéraire ou des rentrées en nature ? Aurait-on besoin de ces revenus fiscaux dans la province où ils étaient perçus ou bien à Rome ? La fiscalité des diverses provinces, à cet égard, se complétait et était modifiable au gré des circonstances pour répondre aux besoins de l’Vrbs131.

Les transports de fonds publics

  • 132 Nicolet 1979a, p. 265 ; Nicolet 1994c, p. 222 = Nicolet 2000, p. 287 ; Kolb 2000, p. 46-47 ; Wolte (...)

44Si les recettes fiscales aboutissaient le plus souvent dans les mains des autorités provinciales ou urbaines, la thèse selon laquelle les Romains cherchaient à reporter sur des intermédiaires les risques inhérents aux transports de fonds132 mérite réexamen. Elle aussi, en effet, a contribué à conforter l’idée d’une délégation systématique des tâches administratives à des priuati.

L’acheminement matériel des fonds publics

  • 133 Cadiou 2008, p. 509-516, pour la péninsule ibérique ; Wolters 2006, p. 25-26 et 36-40.
  • 134 Peut-être Zonar. 8, 14 ; Liv. 27, 10, 11-13 ; Plb. 10, 19, 2 ; Sall. Jug. 36, 1 ; Plu. Pomp. 11, 2
  • 135 Sall. Jug. 104, 3 (le questeur Cn. Octavius Ruso achemine depuis Rome l’argent de la solde destiné (...)
  • 136 App. Hisp. 23 ; Liv. 30, 36, 1 ; 38, 40, 6 ; 39, 29, 6 ; 45, 41, 7 ; Oros. 5, 15, 25 ; Plu. Luc. 3 (...)
  • 137 Liv. 39, 29, 6.
  • 138 Liv. 32, 2, 1 ; Plb. 21, 32a, 9 ; Liv. 38, 38, 9 et App. Syr. 198.
  • 139 D.S. 29, 13 ; Liv. 38, 37, 7.

45Les rares études qui, dans les dernières années, se sont intéressées à la manière dont les deniers publics étaient transportés à l’époque républicaine ont souligné que ces transferts étaient placés sous la responsabilité directe des magistrats133. Les mouvements de fonds entre les services de l’Aerarium et les provinces paraissent avoir concerné essentiellement les sommes destinées à la guerre, surtout à partir du moment où le stipendium fut versé sur les théâtres d’opérations. Il semble que la règle ait été que le général romain134 ou son questeur135 apportassent, en début de campagne, les fonds nécessaires. En sens inverse, tant que le Trésor fut alimenté principalement par des rentrées extraordinaires, le butin fut acheminé jusqu’à l’Aerarium par le magistrat supérieur136, qui pouvait déléguer la tâche à son questeur137. Le paiement des indemnités de guerre, quant à lui, prévoyait soit un versement à Rome même138, ce qui revenait à faire assumer par l’ennemi vaincu les difficultés du transport, soit une remise sur le terrain à un magistrat romain139, qui donnait elle-même lieu ou à un emploi immédiat sur place, ou à un envoi à Rome.

  • 140 Plu. Cato Mi. 38, 1-39, 3 ; Morrell 2017, p. 121 ; Calvelli 2020, p. 252.
  • 141 Sur ce mode de transport pour le numéraire, voir également Plu. CG 2, 10.
  • 142 Sur le tonnage des navires, Rathbone 2003, p. 199, n. 1 et 201 (les navires « moyens », utilisés p (...)

46La description la plus détaillée d’un transport de fonds publics, dans la Vie de Caton le Jeune140, concerne le produit de la vente du trésor royal de Chypre suite à la publicatio de l’île. L’argent fut ramené à Rome par bateau, dans des amphores141. Plutarque donne la valeur totale des fonds transportés et la contenance des récipients. On peut calculer, sur la base d’une équivalence d’un talent pour 6000 drachmes, qu’il y eut 3360 amphores : quelques navires pouvaient donc suffire142. Le biographe détaille en outre le système ingénieux utilisé par Caton pour se prémunir contre un éventuel naufrage.

  • 143 Probablement Vell. 1, 13, 4, pour le transport du butin de Corinthe ; Cic. fam. 2, 17, 4 = SB n° 1 (...)
  • 144 Kolb 2000, p. 46 ; Wolters 2006, p. 41.
  • 145 Rickman 1980, p. 41 ; Nicolet 1991a, p. 128-130 = Nicolet 2000, p. 236-238 ; Nicolet 1991b, p. 474 (...)
  • 146 Cic. Verr. II 3, 172. Cic. Planc. 64 et dom. 25 sont plus allusifs.

47D’autres magistrats chargés de superviser des transferts de valeurs semblent avoir exigé des sûretés143, ce qui implique qu’ils avaient passé un marché public pour réaliser l’opération. L’historiographie a donc eu tendance à considérer que l’acheminement des impôts provinciaux reposait, contrairement à celui des rentrées irrégulières, sur les intermédiaires privés144. Le raisonnement repose en fait sur l’analogie établie avec le transport des impôts prélevés en nature, connu essentiellement par le dossier sicilien145. Un passage du De Frumento146 fait en effet allusion aux mancipes qui amenaient jusqu’en Italie le blé prélevé dans l’île. Or, il n’est pas certain que le rapprochement soit valable, pour la simple raison que l’acheminement de quantités considérables de céréales réclamait nécessairement un bien plus grand nombre de navires que le déplacement de numéraire ou de lingots. En définitive, deux options sont possibles. Soit on postule que les modalités des transports de fonds étaient identiques pour les rentrées exceptionnelles et pour les recettes régulières, et il faut conclure plutôt au contrôle direct de ces transferts par les autorités romaines, probablement à bord de navires de guerre ; soit, au contraire, on conclut à la représentativité de l’unique exemple donné par la correspondance cicéronienne. En l’état des sources, il me semble qu’il faut s’en tenir à un non liquet.

La permutatio

  • 147 La définition est d’Andreau 1978, p. 51. Cf. Fest. p. 234 L. ; Cic. Att. 12, 24, 1 = SB n° 263. Ba (...)

48Une autre preuve de l’archaïsme de l’administration romaine a été vue dans son incapacité à maîtriser les opérations sophistiquées de transferts de numéraire. Les societates publicorum auraient par conséquent été les partenaires obligés de la cité pour réaliser des permutationes, « transferts de fonds sans transport matériel d’espèces »147.

  • 148 Cic. fam. 3, 5, 4 = SB n° 68 (27-28 juillet 51) ; Cic. fam. 2, 17, 7 = SB n° 117 (18 juillet 50). (...)
  • 149 Cic. ad Q. fr. 1, 3, 7 = SB n° 3 (Ides de juin 58) ; peut-être Pis, 48 ; Att. 5, 13, 2 = SB n° 106 (...)
  • 150 Verboven 2002, p. 135.
  • 151 En dehors d’un contexte financier, le mot permutatio est employé pour les échanges de provinces en (...)

49En fait, la permutatio est connue exclusivement par Cicéron, qui en fait état à sept ou huit reprises, et deux ou trois fois seulement à propos d’argent public148. Les permutationes entre particuliers149, pour allusives que soient les données de la correspondance cicéronienne, pourraient avoir été une forme particulière de prêts150. Ceux-ci auraient eu pour origine un ordre de remboursement adressé par un créancier à son débiteur, mais au profit d’un tiers. Ce dernier devenait par là même à son tour débiteur du créancier initial. Si l’hypothèse est valable, cet « échange »151 permettait d’obtenir l’équivalent d’un transfert de fonds, ou pour le bénéficiaire de la permutatio, ou pour le créancier initial.

  • 152 Cic. fam. 3, 5, 4 = SB n° 68 (27-28 juillet 51). Fallu 1974, p. 204 et 256.
  • 153 Cic. Ver. II 3, 165 : cum posita esset pecunia apud eas societates unde erat attributa, binis cent (...)
  • 154 Sur ce point, France 2011, p. 236 = France 2017, p. 397. La circulation des fonds pouvait aussi s’ (...)
  • 155 Cic. Verr. 3, 165 ; Fam., 2, 17, 7 = SB n° 117.

50La seule attestation totalement explicite de permutatio publica se rapporte à la prise de fonctions de Cicéron comme gouverneur de Cilicie. L’opération, qui se fit à Laodicée, réclamait un délai152. L’interprétation de l’épisode repose sur un rapprochement avec une phrase du De Frumento, qui elle n’utilise pas le terme permutatio153. À l’époque où il était gouverneur de Sicile, Verrès avait reçu l’argent nécessaire aux achats de blé public par l’entremise des sociétés de publicains responsables de la perception de la scriptura et du portorium. Il faudrait déduire du modèle des permutationes privées que l’Aerarium faisait un prêt aux publicains, puis leur donnait instruction de rembourser à un gouverneur de province154. Ceci expliquerait que la permutatio se soit accompagnée d’un versement d’intérêts155.

  • 156 La question était posée par Jonkers 1940, p. 185. Andreau 2001, p. 48 et 213-214 semble considérer (...)

51Toute la difficulté consiste donc à déterminer si ce type de solution technique était ou non usuel156. Le corpus cicéronien donne en tout cas l’impression que la procédure était également utilisée pour faire fructifier les fonds publics. On ajoutera que la permutatio n’est attestée qu’après la Guerre Sociale : elle pourrait donc éventuellement témoigner d’une évolution qui permit au Trésor de prêter de l’argent public.

52Par conséquent, il n’est en rien prouvé que les transports de fonds publics étaient majoritairement délégués à des intermédiaires. Le recours à la permutatio lui-même est susceptible d’être interprété autant comme une solution financière recherchant l’intérêt du Trésor que comme un moyen de transférer les deniers publics sur une longue distance.

 

  • 157 Badian 1972, p. 13 ; Torrent 2014b, p. 72, n. 13, 78, 80 ; Torrent 2014c, p. 57 et 65.
  • 158 Malmendier 2002, p. 1-5, 50-53, 55, avec les remarques de Maganzani 2002b, p. 219 et 223.
  • 159 L’hypothèse de Cancelli 1957, p. 60 se révèle à cet égard plus intéressante : la substitution des (...)

53Il paraît en définitive nécessaire de redimensionner les fonctions des « fermiers de l’impôt » dans le système fiscal de la Rome républicaine. Il semble que leur implication dans le recouvrement de l’impôt provincial fut relativement limitée dans le temps et dans l’espace, et qu’elle fut conçue comme complémentaire, plus qu’antithétique, du rôle assumé par les cités. En outre, les sociétés de publicains ne furent probablement pas systématiquement investies de la tâche de transporter les fonds publics. Il faut toutefois conclure que les adjudicataires servirent bien d’équivalent à une « administration fiscale », dans la mesure où ils furent la solution communément adoptée pour le recouvrement des redevances « domaniales ». Cependant, la manière dont l’historiographie a envisagé ces agents a projeté sur les réalités antiques les notions contemporaines d’« entreprise privée »157 ou de « privatisation »158 du prélèvement fiscal, alors qu’il n’est en rien assuré que les Romains pensaient suivant de telles catégories159. Il convient donc de revenir sur le statut des sociétés vectigaliennes, pour tenter de comprendre en quoi consistait la délégation de puissance publique dont elles jouissaient.

La position juridique des contractants avec la cité romaine

  • 160 Les textes essentiels sont Dig. 17, 2, 5 = Ulpien libro trigesimo primo ad edictum : Societates co (...)
  • 161 Malmendier 2002, p. 251-257.
  • 162 Orestano 1968, I, p. 7-82, 121, 174-175 ; Onida 2016, p. 382-383.

54Des droits spécifiques dont disposaient les societates publicorum durant la République, c’est l’éventuelle possession d’une « personnalité juridique » qui a principalement retenu l’attention des romanistes160. Or, comme le relève U. Malmendier161, la doctrine est demeurée divisée sur la date à partir de laquelle les sociétés vectigaliennes furent considérées comme des corpora, et la notion de « personnalité juridique » est moderne162. Il paraît donc préférable d’examiner les prérogatives qui étaient accordées par la lex censoria aux sociétés adjudicataires des impôts, afin de cerner les fondements de leur légitimité, et ainsi éclairer leur statut.

  • 163 Monum. Ephes., l. 71 = AE, 2008, 1353 = Cottier et al. 2008, p. 54.
  • 164 Spagnuolo Vigorita 1997, p. 176 ; Cottier et al. 2008, p. 126.
  • 165 Cic. prov. 12 : si qui frui publico non potuit per hostem, hic tegitur ipsa lege censoria.
  • 166 Cic. Verr. II 3, 27 : Cum omnibus in aliis uectigalibus Asiae, Macedoniae, Hispaniae, Galliae, Afr (...)
  • 167 Varro rust. 2, 1, 16 ; Monum. Ephes., l. 21-22, 46-47, 50-53, 53-56 = AE 2008, 1353 = Cottier et a (...)
  • 168 Lex agr., l. 37 = Crawford 1996, I, n° 2, p. 117 : […sei quid publicanus eius rei causa a quo eoru (...)

55Les publicains disposaient à la fois de certains privilèges et d’un droit de recourir à la coercition. Le Monumentum Ephesenum163 indique que les douaniers, pour les besoins de leurs activités, devaient utiliser un local situé dans un lieu public, et qu’au besoin ils pouvaient en faire bâtir un. Les commentateurs164 ont vu dans cette clause la concession d’un droit d’usage sur le sol public et en ont conclu que les édifices construits par les publicains devenaient propriété du peuple romain. Par ailleurs, la lex censoria accordait une garantie – sans doute un moratoire ou une exemption exceptionnelle de paiement des sommes dues au Trésor – à qui avait affermé des publica et avait été empêché de remplir ses obligations par les ennemis de Rome165. La situation des sociétés vectigaliennes était par conséquent en quelque mesure assimilée à celle de la res publica. Enfin, en cas de manquement du contribuable, les publicains se voyaient reconnaître le droit de recourir à la prise de gage (pignoris capio)166 et à la confiscation des biens (commissum)167. L. Maganzani a souligné, sur la base d’un passage de la loi agraire de 111 qui caractérise comme un oportere le rapport du débiteur de l’impôt envers le percepteur, que le contribuable était, à l’égard du publicain, tenu par une obligation fiscale similaire à celle qu’il avait envers l’autorité publique168.

  • 169 Non uidi Heyrovsky 1881. Szlechter 1947, p. 369 (la lex agr., l. 85 qualifie la lex censoria de le (...)
  • 170 Pernice 1884, p. 111-135 ; Éliachévitch 1942, p. 21 ; Blanch Nougues 2018, p. 622-629.
  • 171 De nombreux auteurs ont adopté sur le sujet une position médiane : Kniep 1896, p. 112-118 et 141-1 (...)
  • 172 Pernice 1884, p. 124 et 126-127.
  • 173 On en aurait une autre mention en Dig. 47, 8, 2, 20 (Ulpian., Libro quinquagensimo sexto ad Edictu (...)
  • 174 Spagnuolo Vigorita, 1999, p. 193 et Spagnuolo Vigorita 1997, p. 156-157 (qui revenait toutefois en (...)
  • 175 Monum. Ephes., l. 4 = AE, 2008, 1353 = Cottier et al. 2008, p. 26. Voir également l. 29-30 p. 36, (...)
  • 176 Maganzani 2002a, p. 65-66. Voir déjà Mommsen 1889-1896, IV, p. 117, n. 3.

56S’il est clair que les pouvoirs accordés aux publicains découlaient de la lex émise par le censeur, la nature de ce texte – édictale169 ou contractuelle170 – demeure objet de débat171. A. Pernice172, tenant de la conception contractuelle, se fondait sur Gaius inst. 4, 28, qui distinguerait la lex censoria comme source de la pignoris capio du publicain et la lex (comitiale ?) comme acte constituant l’impôt173, pour chercher dans cette dernière le fondement des prérogatives accordées aux adjudicataires. T. Spagnuolo Vigorita174 a posé les bases d’une critique de cette thèse, en relevant que dans le Monumentum Ephesenum, les renvois internes au texte le désignent alternativement comme nomos misthôseôs et nomos dèmôsionias175, ce qui suggère que les expressions latines équivalentes, lex censoria et lex uectigalis, étaient synonymes. L. Maganzani, à la suite de G. Klingenberg, estime donc que les pouvoirs des publicains étaient indépendants de toute disposition législative ou sénatoriale, mais qu’ils constituaient un principe général commun à toutes les leges censoriae176.

  • 177 Nicolet 1966-1974, I, p. 339 ; Starace 2016, p. 362. Déjà Pernice 1884, p. 129 : « halbamtlichen C (...)
  • 178 Sur le sens de publicanus, Ørsted 1985, p. 71-72 ; Malmendier 2002, p. 28. Les mouvements des regi (...)
  • 179 Cic. Verr. II 2, 181 ; Manil. 17 ; prov. 10 ; Planc. 23-24, 35 ; ad Q. fr. 1, 1, 32 et 35 = SB n°  (...)
  • 180 Ferrer Maestro 2003, p. 85, qualifie les sociétés de publicains d’« auténtica administracion parae (...)

57Au final, la remarque incidente que faisait Cl. Nicolet dans L’ordre équestre, « les sociétés de publicains ne peuvent être considérées tout à fait comme des sociétés de droit privé »177, oriente vers une conception du statut des publicains vraisemblablement plus exacte que celle développée dans la bibliographie postérieure. L’étymologie même de publicanus indique que les adjudicataires de l’impôt avaient quelque chose à voir avec la sphère publique178. Qui plus est, Cicéron qualifie régulièrement les publicains d’ordo179, c’est-à-dire de groupe statutaire qualifié pour l’exercice de tâches intéressant la collectivité180. D’une certaine manière, ce terme d’ordo pourrait être la traduction la plus appropriée pour la notion romaine d’« administration ». Les Romains n’auraient ainsi pas opposé agents publics et agents privés dans l’accomplissement d’activités essentielles pour la cité, telles que le recouvrement des impôts, mais ils auraient affecté des missions spécifiques à des groupes préalablement qualifiés à cette fin par les pouvoirs publics.

 

  • 181 Cet enregistrement se faisait en fait en deux étapes. D’une part, comme un certain nombre de publi (...)
  • 182 Monum. Ephes., l. 71 = AE, 2008, 1353 = Cottier et al. 2008, p. 54, pour les publicains adjudicata (...)
  • 183 Ceci ne vaut que pour les publicains, car on n’a pas trace d’une rémunération des tribuni aerarii.
  • 184 Les agents tels que les promagistri ou les scribes devaient disposer de compétences, mais les indi (...)

58Le rôle assumé par les ordines dans le prélèvement fiscal et l’acquittement de la dépense publique majeure qu’était la solde incite donc à conclure que la cité romaine républicaine avait développé une notion originale de l’« administration », qui au moins sur un point répond aux critères wébériens. Parce qu’ils faisaient l’objet d’une sélection et d’un enregistrement par les autorités181, parce qu’ils exerçaient leurs activités dans un lieu public182, parce qu’ils étaient – certes indirectement – rémunérés sur fonds publics183, publicani et tribuni aerarii présentaient les caractères de permanence nécessaires à l’existence d’une administration. Les sociétés de publicains, par ailleurs, étaient dotées d’une organisation interne visiblement hiérarchisée qui devait permettre une certaine répartition des tâches et le contrôle des personnels. La minceur du dossier concernant les tribuni aerarii interdit toutefois de savoir s’il en était de même pour eux. On notera cependant que publicains et « tribuns du Trésor », qualifiés en vertu d’un niveau censitaire, ne semblent ni avoir été choisis en fonction de compétences techniques184, ni avoir exercé leurs activités exclusivement au service de l’Aerarium : une partie d’entre eux au moins siégeait dans les jurys des quaestiones. « L’administration fiscale » de la Rome républicaine demeurait sur ce point imparfaite. Les services centraux du Trésor Public présentaient-ils par conséquent un caractère plus abouti ?

2. Les services de l’Aerarivm

59S’il est un lieu où une administration financière est susceptible d’avoir développé ses ramifications, c’est à Rome même, au siège de l’Aerarium. Après avoir tenté de reconstituer, à partir des données directes, l’architecture interne des services du Trésor Public, on examinera ce que ses activités peuvent révéler de son organisation, afin de juger de l’adéquation de cette structure avec les tâches qu’elle avait à remplir.

La structuration générale des services du Trésor Public

  • 185 Arangio-Ruiz – Olivieri 1925, p. 80-127 ; Manganaro 1988, p. 155-190 ; Migeotte 2014, p. 79-81 et (...)
  • 186 On distinguait les caisses des hiéromnamons, des tamiai et des sitophylaques, ainsi que le sitonio (...)
  • 187 Mommsen 1889-1896, III, p. 75-80 et IV, p. 190-191, suivi par Willems 1885, II, p. 372 et 388-389  (...)
  • 188 Sur lequel voir introduction, « L’Aerarium Sanctius ».
  • 189 Bogaert 1968, p. 403-408 ; Gabrielsen 2008, p. 115-130.
  • 190 Plb. 23, 14, 5, Liv. 38, 55, 13 et Val. Max. 3, 7, 1 f, pour le fameux épisode de l’ouverture du T (...)
  • 191 Marquardt 1888, p. 79.

60La description des services de l’Aerarium républicain, dans l’historiographie du XIXe siècle, paraît s’être inspirée des données concernant certaines cités grecques hellénistiques. À Tauromenion185 par exemple, la transcription épigraphique des comptes civiques indique que les fonds de la collectivité étaient répartis entre plusieurs caisses désignées par référence soit aux responsables publics qui les géraient, soit à la destination des sommes186. T. Mommsen187 estima qu’à Rome, de la même manière, à côté de l’Aerarium et de l’Aerarium Sanctius188, une caisse des pontifes et une caisse des édiles recueillaient respectivement l’argent destiné aux banquets et sacrifices pontificaux et le produit des amendes édiliciennes. Par ailleurs, on sait qu’afin de pallier la lourdeur de la procédure d’ouverture de leur trésor, différentes communautés grecques mirent sur pied, à partir du IVe siècle, une dèmosia trapeza pour effectuer les opérations financières courantes, changer les espèces étrangères qui leur parvenaient et faire fructifier les fonds publics par le biais de prêts accordés aux particuliers189. Or, l’ouverture de l’Aerarium semble elle aussi avoir été un processus complexe, dépendant de dispositions législatives et des décisions des magistrats190 ; en outre, on a trace à Rome, au IVe siècle av. J.-C. puis à l’époque de la deuxième Guerre punique, de collèges de mensarii, interprétés par J. Marquardt comme une banque publique191. Les services du Trésor Public républicain s’articulaient-ils bien en une pluralité d’arcae et en une mensa publica ?

Entre combien d’arcae les fonds publics étaient-ils répartis ?

  • 192 Plin. nat. 33, 19, à propos de l’édilité curule de Cn. Flavius en 304 av. J.-C., suggère que le ma (...)
  • 193 Liv. 10, 23, 11-13 ; 10, 33, 9 ; 10, 47, 4 ; 27, 6, 19 ; 33, 25, 3 ; 33, 42, 8-11 et 34, 53, 3-7 ; (...)
  • 194 Plb. 3, 26, 1.
  • 195 C’était l’hypothèse de Palmer 1997, p. 17-21 (qui estimait que cette caisse avait été créée en 304 (...)
  • 196 Liv. 30, 39, 7 : Pecuniam ex aerario scribae uiatoresque aedilicii clam egessisse per indicem comp (...)
  • 197 Le fait que Tite Live ne mentionne pas d’autorisation sénatoriale concernant l’utilisation des ame (...)
  • 198 Le bâtiment n’est connu que par Liv. 24, 10, 9. Hülsen 1898, col. 1537 ; Palombi 1993, p. 136-137  (...)

61L’existence d’une caisse administrée par les édiles ressortait, selon T. Mommsen, des passages de l’œuvre livienne qui montrent ces magistrats financer, apparemment de leur propre initiative192, des opérations édilitaires, des ornements urbains et des ludi sur les amendes levées par leurs soins193. Qui plus est, Polybe194, lorsqu’il évoque le lieu de conservation des traités romano-carthaginois sur le Capitole, cite un tamieion des agoranomes susceptible de correspondre à une arca aedilium curulium195. Toutefois, sous l’année 202/201 av. J.-C., Tite Live mentionne un vol commis au Trésor par les appariteurs d’un édile curule, apparemment dans l’exercice de leurs fonctions. En outre, en 200, des statues de bronze réalisées à partir des amendes édiliciennes ornèrent l’Aerarium196. Dans la mesure où il paraît peu vraisemblable que Tite Live ait désigné comme aerarium, sans davantage de précisions, un « Trésor des édiles curules », il faut probablement conclure que si elle exista jamais197, l’arca aedilium curulium cessa de fonctionner de manière indépendante à partir de la deuxième Guerre punique. À titre d’hypothèse, on mettra cette évolution en rapport ou avec les difficultés financières de la guerre, qui auraient nécessité le regroupement de tous les fonds publics disponibles dans la caisse principale de la cité, ou avec des circonstances contingentes. On sait en effet que l’Atrium publicum du Capitole fut frappé par la foudre en 214 av. J.-C.198 : les éventuels dégâts causés en cette occasion au Capitole, alors que la cité manquait des ressources disponibles pour effectuer des travaux, purent conduire à fondre la caisse des édiles dans le Trésor Public.

  • 199 S’il faut bien, à la suite de Mommsen 1907, III, p. 130, n. 9 et De Visscher 1963, p. 148-150, con (...)
  • 200 Gell. 1, 12, 18.
  • 201 Varro ling. 5, 180 ; Gaius inst. 4, 13.
  • 202 Par ailleurs, les terres publiques mises à la disposition des collèges sacerdotaux n’impliquent pa (...)

62L’arca pontificum n’est pour sa part attestée épigraphiquement qu’à partir de l’époque impériale. Qui plus est, les rares sources qui évoquent les revenus censés avoir alimenté cette caisse suggèrent qu’en fait, les éventuelles amendes sépulcrales199, les biens des Vestales mortes intestat200 et les sacramenta201 étaient versés au Trésor Public202.

  • 203 Liv. 37, 51, 2-5 ; Val. Max. 1, 1, 2 (242 av. J.-C.) ; Liv. 37, 51, 1-5 (189 av. J.-C.) ; Liv. 40, (...)
  • 204 Liv. 1, 20, 5.

63On ignore où allaient les multae infligées par le grand pontife, mais le fait que le peuple ait été amené à se prononcer sur ces dossiers203 pourrait indiquer que l’Aerarium y était intéressé. De plus, la phrase de Tite Live204 qui fait allusion aux ressources dont Numa aurait doté le collège pontifical est si vague qu’elle peut parfaitement renvoyer à un financement par le Trésor. Rien ne prouve, par conséquent, que les frais du culte public aient été pris en charge par une arca spécifique et plus généralement qu’aux IIe et Ier siècles av. J.-C., les dépenses publiques aient été acquittées sur d’autres caisses que l’Aerarium.

L’Vrbs disposait-elle d’une banque publique ?

  • 205 Liv. 7, 21, 5-8 ; 23, 21, 6 ; 24, 18, 12-14 ; 26, 35, 1-36, 12. Contrairement à Nicolet 1963, p. 4 (...)
  • 206 Pollera 1983-1984, p. 452 ; Maselli 1986, p. 15 ; Petrucci 1991, p. 49, n. 90 ; Storchi Marino 199 (...)
  • 207 Andreau 1999, p. 117-118.
  • 208 Mommsen, 1889-1896, IV, p. 354-356.
  • 209 Liv. 22, 60, 3-4. Coudry 2012, p. 120.
  • 210 Il me semble donc que c’est plutôt à cette opération de 214 qu’il faut lier la création des triumu (...)
  • 211 Par ailleurs, même si Tite Live ne l’indique pas explicitement, les triumuiri semblent s’être occu (...)
  • 212 Maselli 1986, p. 14 ; Andreau 1987, p. 232, 235 n. 61 et 237 ; Andreau 1999, p. 115. Ñaco del Hoyo (...)

64Différents passages de Tite Live, qui se rapportent aux années 352, puis 216-210 av. J.-C.205, évoquent la création, suite à une disposition législative, de quinqueuiri ou triumuiri mensarii. Faut-il pour autant estimer que les Romains se dotèrent d’une banque publique dès l’époque médio-républicaine ? Ni la durée ni la teneur des activités des mensarii ne paraissent autoriser une telle conclusion. En effet, contrairement aux banques publiques des cités grecques, les mensae romaines ne furent apparemment ouvertes que sur de courtes périodes, pour répondre à des crises ponctuelles206. Par ailleurs, elles ne semblent ni avoir pratiqué le change, ni avoir été chargées des opérations courantes concernant les fonds publics, ni avoir prêté la pecunia publica. En 352 av. J.-C. certes, les quinqueuiri mensarii éteignirent sur fonds publics les dettes d’un certain nombre de citoyens capables de fournir des sûretés à l’Aerarium, mais le Trésor ne paraît pas avoir exigé d’intérêts207. T. Mommsen208 rattachait pour sa part la mise en place de triumuiri mensarii en 216 av. J.-C. au projet, avancé au Sénat, de prêter des fonds publics aux familles des prisonniers de Cannes qui n’auraient pas eu les moyens de racheter leurs proches par elles-mêmes209. Toutefois, comme cette solution ne fut en définitive pas mise en œuvre, l’hypothèse de T. Mommsen doit être écartée. Selon Tite Live, les triumuiri mensarii furent institués pour répondre à un manque de liquidités ; on les voit en 214 s’apprêter à acquitter le prix des uolones achetés par les pouvoirs publics en 216210 ; en 210, ils procèdent à l’encaissement des valeurs déposées par les citoyens dans le cadre de l’emprunt public destiné au financement de la flotte211. Comme l’ont justement souligné G. Maselli et J. Andreau212, les attributions des mensarii romains ne paraissent pas avoir excédé la tenue d’un service de caisse. Dans la mesure où l’existence des tribuni aerarii suggère que l’Aerarium n’était pas directement accessible aux particuliers, il n’est pas exclu qu’une structure spécifique ait été ponctuellement mise en place lorsque le Trésor avait, par exception, à traiter avec un grand nombre de priuati

  • 213 Tucci 2005, p. 33. Cic. Att. 8, 7, 3 (= SB n° 155, 21 février 49) : Ad Philotimum scripsi de uiati (...)
  • 214 Malrieu 2005, p. 95 et 114.
  • 215 Shackleton Bailey 1965-1968, IV, p. 334 pensait que le passage faisait allusion soit à un dépôt qu (...)
  • 216 Marquardt 1888, p. 81 et n. 2. Les inscriptions en question sont CIL VI, 298 et 8463.
  • 217 Cic. Quinct. 17 : Cum pecuniam C. Quinctius P. Scapulae debuisset, per te, C. Aquili, decidit P. Q (...)
  • 218 Contra Petrucci 1991, p. 112 (qui supposait que les transactions entre citoyens romains s’étaient (...)
  • 219 Andreau 1987, p. 208-209.

65D’autres éléments inciteraient a priori à localiser une banque publique dans l’aedes de Iuno Moneta. On pourrait en effet inférer d’une phrase de la correspondance cicéronienne que les sénateurs étaient autorisés à souscrire un prêt d’argent public auprès de ce temple213. Toutefois, comme les sanctuaires romains ne paraissent pas avoir pratiqué le crédit, mais s’être limités à accueillir des dépôts214, il paraît préférable de ne pas retenir cette interprétation du texte215. De son côté, J. Marquardt déduisait des inscriptions impériales qui mentionnent des officinatores nummularii attachés aux services de la Monnaie216 que le temple de Iuno Moneta abritait une mensa publica où l’on pratiquait le change. Cependant, comme il ne portait à l’appui de cette assertion que le Pro Quinctio, 17217, qui doit en fait faire allusion à tout autre chose218, il vaut mieux, avec J. Andreau219, considérer que les nummularii de Moneta contrôlaient en interne la production des espèces neuves.

66L’Aerarium tardo-républicain semble donc avoir été organisé de façon relativement centralisée, autour au plus de deux caisses, l’une destinée aux opérations courantes, l’autre, l’Aerarium Sanctius, formant un fonds de réserve. Les Romains, en outre, ne paraissent pas avoir repris à leur compte l’institution grecque de la banque publique.

L’architecture interne du Trésor Public : les données directes livrées par les sources

  • 220 Voir introduction, « Les lieux d’exercice des questeurs et de leurs appariteurs ».

67Par ailleurs, comment la caisse centrale du Trésor Public était-elle administrée ? Comme on l’a vu, contrairement à ce qu’affirmait T. Mommsen, rien ne prouve que les édiles curules et leurs appariteurs aient été impliqués dans sa gestion220. En revanche, il est clair que les « bureaux » de l’Aerarium étaient placés sous la direction des questeurs. Les personnels sous leurs ordres ne sont pour leur part connus que par un nombre restreint de textes épigraphiques et littéraires.

Les questeurs du Trésor

  • 221 Rhet. Her. 1, 21 ; Cic. Att. 2, 6, 2 = SB n° 26 ; fam. 2, 17, 4 = SB n° 117 ; Lig. 35 ; off. 2, 29 (...)
  • 222 Dans les sources littéraires ferait exception Val. Max. 2, 2, 8, qui utilise la formule quaestor A (...)
  • 223 Lex agr., l. 46 = CIL I², 585 = Crawford 1996, I, n° 2, p. 118 ; lex de XX quaestoribus, col. I, l (...)
  • 224 Lex repet., l. 68 et 79, d’où reconstruction de la l. 66 = CIL I², 583 = Crawford 1996, I, n° 1, p (...)
  • 225 Peut-être lex repet., l. 72 (le texte est restitué) = CIL I², 583 = Crawford 1996, I, n° 1, p. 72.
  • 226 Lex Bantina, l. 24 = CIL I², 582 = Crawford 1996, I, n° 7, p. 201 ; lex de XX quaestoribus, col. I (...)
  • 227 C’est l’opinion de Pina Polo – Díaz Fernández 2019, p. 79.

68Les textes et les inscriptions désignent très majoritairement les magistrats qui avaient le Trésor Public pour sphère de compétence comme quaestor(es) urbanus/(i), quaestor(es) Vrbis, tamias(i) o(i) kata polin ou tamias tès poleôs221. Les expressions, moins fréquentes, qui lient explicitement ces responsables publics à l’Aerarium sont attestées presque exclusivement par l’épigraphie222 : on trouve quaestor quei aerarium prouinciam optinebit223, quaestor quoi aerarium (uel urbana) prouincia obuenerit224, queiue quaestor aerarium uel urbanam prouinciam habebit225, quaestor ad aerarium226. À première vue, la prouincia urbana semblerait donc équivalente à l’Aerarium227.

  • 228 Becker 1843-1867, II/2, p. 338, n. 848 ; Lange 1876-1879, I, p. 389 et 891-892 ; Willems 1872, p.  (...)
  • 229 Plu. Cato Mi. 18, 5 ; 16, 9 et 18, 6.
  • 230 Lange 1876-1879, I, p. 893-894 tirait de Cic. Sest. 8 l’idée qu’à partir de Sylla, deux questeurs (...)
  • 231 Les questeurs urbains attestés pour la période 81-49 av. J.-C. sont :
  • 232 Cic. Flacc. 30.
  • 233 Certains de ces postes, comme la prouincia aquaria ou la prouincia Ostiensis, n’étaient pas nécess (...)

69L’historiographie moderne a généralement considéré qu’il y eut, à partir de 421 av. J.-C., deux questeurs attachés au Trésor228, mais Plutarque229 cite deux collègues de Caton d’Utique à la questure urbaine. Si l’on exclut une confusion du biographe, on pensera soit qu’en raison de besoins particuliers à l’année 64, trois postes de questeurs avaient été exceptionnellement affectés à l’Aerarium, soit que la lex Cornelia de XX quaestoribus avait accru le nombre des quaestores urbains230, soit que des membres du collège questorien présents à Rome pouvaient ponctuellement intervenir à l’Aerarium. Les Fastes de la questure urbaine pour les années 81-49 av. J.-C. sont extrêmement lacunaires, mais la situation de 64 trouva peut-être des précédents en 81 et 74231. Comme un passage du Pro Flacco232 suggère que dans les années 60 av. J.-C., deux questeurs étaient toujours spécifiquement chargés d’assurer les dépenses publiques, il faut probablement conclure que les questeurs qui se trouvaient à Rome (parce qu’ils occupaient la prouincia aquaria ou parce qu’ils étaient attachés aux consuls) étaient utilisés, selon les besoins, pour des tâches d’ordre financier. Les expressions prouincia urbana et aerarium prouincia ne seraient donc pas des synonymes stricts : la province urbaine aurait englobé différents postes qui permettaient d’intervenir à l’Aerarium233, mais deux questeurs étaient plus spécifiquement chargés de l’administration du Trésor Public.

  • 234 Schol. Cic. in Clod. et Cur. fr. XI p. 87 St. : Apud aerarium sortiri prouincias et quaestores sol (...)
  • 235 Cic. fam. 7, 30, 1 (= SB n° 265, début 44), pour des élections questoriennes interrompues.
  • 236 Cic. Phil. 2, 50. Willems 1872, p. 259 ; Willems 1880, p. 298 ; Mispoulet 1882-1883, I, p. 127 ; K (...)
  • 237 Dig. 1, 13, 1, 2 (Ulp. Libro singulari de officio quaestoris) : Ex quaestoribus quidam solebant pr (...)
  • 238 Harris 1976, p. 105. Mommsen 1889-1896, IV, p. 231, n. 1 estimait pour sa part que le SC en questi (...)
  • 239 Lex Cornelia de XX quaestoribus, col. I, l. 10, 14, 18, 26, 30 = CIL I², 587 = Crawford 1996, I, n (...)

70L’affectation des questeurs à l’Aerarium résultait généralement d’une sortitio234. Elle suivait l’élection de l’ensemble du collège questorien par les comices tributes présidés par un consul235, puis la détermination des provinces questoriennes pour l’année à venir, opérée par un SC ou, exceptionnellement, une loi236. Un extrait du Liber singularis de officio quaestoris d’Ulpien, conservé au Digeste237, suggère qu’un SC de 138 ou 137 av. J.-C. modifia la procédure de tirage au sort d’au moins certaines des provinces questoriennes238. L’entrée en fonctions des quaestores urbani, au début du Ier siècle av. J.-C., était apparemment fixée au 5 décembre239.

  • 240 Plu. Cato Mi. 18, 7. Lange 1876-1879, I, p. 890 et n. 7 considérait que le passage ne faisait état (...)
  • 241 Mommsen 1889-1896, I, p. 43.

71La répartition du travail entre questeurs du Trésor n’est éclairée que par un passage de la Vie de Caton d’Utique, qui suggère que chaque magistrat pouvait se saisir des dossiers traités par ses collègues240. T. Mommsen postulait que les questeurs chargés de l’Aerarium se partageaient les tâches par roulement241.

Les agents de l’Aerarium

  • 242 Lex Cornelia de XX quaestoribus, col. I, l. 7-8 = CIL, I², 587 = Crawford 1996, I, n° 14, p. 294. (...)
  • 243 Liv. 40, 29, 3-10 (181 av. J.-C.) : 3. Eodem anno in agro L. Petilii scribae sub Ianiculo, dum cul (...)
  • 244 La datation républicaine des documents est fondée sur l’absence de cognomen des personnages.
  • 245 CIL I², 587 = Crawford 1996, I. n° 14, p. 293-300 = ILMN, I, p. 70-71, n° 29 ; Rotondi 1912, p. 35 (...)
  • 246 Tac. ann. 11, 22, 6 : lege Sullae uiginti (quaestores) creati supplendo senatui, cui iudicia tradi (...)
  • 247 Le point est d’importance car l’historiographie moderne s’est heurtée à la difficulté de mettre en (...)
  • 248 D’une part, mesures transitoires à charge des consuls, d’autre part changements introduits par la (...)

72Les questeurs du Trésor étaient assistés par des appariteurs qui devaient être citoyens romains242. Trois catégories d’apparitores questoriens sont attestées à l’époque républicaine, les scribae, les uiatores et les praecones. Ces personnages sont connus par quelques textes littéraires243, par moins d’une dizaine d’épitaphes, toutes datées du Ier siècle av. J.-C.244, et surtout par un exceptionnel document épigraphique, la lex Cornelia de XX quaestoribus245 (voir annexe 3). La loi, qui peut être datée des années 81 ou 80 av. J.-C., visait à accroître le nombre des questeurs afin de répondre aux besoins suscités par la multiplication des provinces et par la réforme syllanienne des quaestiones246. La partie conservée du texte porte sur l’augmentation du nombre des appariteurs des questeurs – dont on ne sait au juste s’il s’agit des seuls quaestores urbani ou de tous les questeurs247 – et sur ses conséquences administratives. De la section concernant les scribes ne restent que quelques lignes qui concernent le traitement de ces personnels, tandis que les dispositions relatives aux uiatores et praecones ont trait à leur recrutement248, au montant de leur salaire et à l’affichage officiel de leurs noms.

73Il ressort de l’épigraphie funéraire que la titulature officielle des appariteurs du Trésor comprenait leur spécialité et l’adjectif quaestorius, qui indiquait à quel collège de magistrats ils étaient rattachés. Le tout pouvait être développé par la mention ab Aerario et éventuellement, pour les scribes, par la référence aux décuries d’appartenance.

  • 249 Brennan 2000, I, p. 449, qui évoque un rôle des préteurs et des édiles, ne repose sur rien.
  • 250 Col. I, l. 32-33.
  • 251 Angius 2016 ; David 2019.
  • 252 Pour Angius 2016, p. 421, les librarii se définissaient par un type d’activité (ils étaient des co (...)
  • 253 David 2019, p. 93 et 96.
  • 254 Mommsen 1889-1896, I, p. 402-403.
  • 255 Mommsen 1848, p. 9 ; Mommsen 1889-1896, I, p. 388 : l’argument est que les épitaphes d’appariteurs (...)
  • 256 Karlowa 1885-1901, I, p. 196-198 ; Mommsen 1889-1896, I, p. 397-398, 413 et 417. Pour les scribes  (...)
  • 257 Angius 2016, p. 410. Il me semble que c’est l’idée également envisagée par Kunkel 1995, II, p. 112 (...)
  • 258 Angius 2016, p. 409 et 411 et David 2019, p. 91, 97-101, 108, 121 et 127.

74Le terme de décurie réapparaît dans la loi Cornelia. La tâche de recrutement des appariteurs, confiée aux consuls et aux questeurs249, y est qualifiée de lectio. Or, ce mot paraît désigner d’une part l’intégration des appariteurs dans une entité nommée decuria, d’autre part leur insertion dans un ordo250. Quelle nuance y avait-il entre le fait d’appartenir à une décurie et celui d’appartenir à un ordo ? Les deux études les plus récentes consacrées aux appariteurs, celles d’A. Angius et celle de J.-M. David251, présentent des points de convergence mais aussi des différences notables252. Sur la définition de la décurie, J.-M. David253 s’inscrit dans la continuité de T. Mommsen254. Ce dernier considérait que les décuries constituaient une sorte de vivier, auquel on appartenait en pratique de façon viagère255, et à l’intérieur duquel les magistrats puisaient par tirage au sort les employés qui les serviraient pour l’année. Les titulatures épigraphiques des appariteurs montraient selon lui qu’étaient affectées aux questeurs trois décuries de scribes, une décurie de uiatores et une de praecones256. Dans cette optique, la sortitio des appariteurs aurait consisté essentiellement à sélectionner les appariteurs qui seraient actifs telle année. A. Angius257, de son côté, fait des décuries des « unités de service » en charge telle année, et de la sortitio la procédure de répartition des appariteurs entre les magistrats. A. Angius et J.-M. David258 concordent sur l’idée que des appariteurs sortis de charge aient pu continuer à servir en n’étant plus membres des décuries, soit comme « prestataires privés » de services à l’administration civique pour A. Angius, soit comme appariteurs personnellement attachés à un magistrat pour J.-M. David. Le terme d’ordo renverrait alors à l’ensemble constitué par les appariteurs membres des décuries et par ceux qui les avaient quittées.

  • 259 Col. I, l. 8-11, 13-15, 17-19, 21-23, 25-27, 29-31. Purcell 2001, p. 654 et 660.
  • 260 Gabba 1983, p. 490 ; Varvaro 1995, p. 583 ; Angius 2016, p. 410.
  • 261 Col. I, l. 32-33. Le terme s’applique aux uiatores et praecones, qui relevaient donc du même ordo (...)
  • 262 CIL VI, 435.
  • 263 CIL VI, 1810.
  • 264 CIL VI, 1944.
  • 265 CIL VI, 40702.
  • 266 David 2019, p. 123.
  • 267 Cohen 1984, p. 50.
  • 268 Sur la dignité des appariteurs, David 2012, p. 263-280 ; Angius 2016, p. 412 et 416-418.
  • 269 Purcell 2001, p. 654 rappelle que la lex Iulia theatralis attribuait aux décuries d’appariteurs de (...)
  • 270 Lex Cornel., col. I, l. 1-6 et col. II, l. 31-37 ; Plu. Cato Mi. 16, 10. Mommsen 1848, p. 7 avait (...)
  • 271 Tab. Heracl., l. 80-81 = CIL I², 593 = Crawford 1996, I, n° 24, p. 366 : quei scribae librarei mag (...)
  • 272 Romano 1990, p. 35 et 70-73 ; Horsfall 1976, p. 79. Les collèges d’appariteurs disparaissent de la (...)
  • 273 Outre AE 1987, 67 et CIL VI, 33421 supra, AE 1939, 153 = Paribeni 1938, p. 260 : M(arcus) Claudius (...)
  • 274 Fest. p. 446-448 L. : Scribas proprio nomine antiqui et librarios et poetas uocabant ; at nunc dic (...)

75Il me semble que le texte de la lex Cornelia conduit à faire de la décurie un groupe d’appariteurs de même nature qui assisteront durant l’année de leur mandat un certain type de magistrats259. La logique de la procédure transitoire mise en place pour assurer l’accroissement du nombre des appariteurs amène à conclure que la décurie des uiatores et celle des praecones des questeurs avaient chacune quatre membres après le vote de la loi de Sylla260. Le collège des questeurs urbains avait en outre à son service un nombre indéterminé de scribes, mais qui devait être plus important puisque cette catégorie d’appariteurs formait trois décuries. Le terme d’ordo, quant à lui, qualifie dans la lex Cornelia les uiatores et praecones questoriens261, et, dans les inscriptions d’époque impériale, les licteurs des trois décuries consulaires262, les scribes des tribuns de la plèbe263, la décurie des hérauts des consuls264 et celle des nomenclatores265. J-M. David266 en déduit qu’à l’époque impériale, decuria et ordo étaient devenus de quasi-synonymes. B. Cohen267 pour sa part avait noté que la lex Cornelia évoquait les décuries tant qu’elle se référait à l’organisation pratique du travail des appariteurs, mais qu’elle parlait d’ordo quand elle faisait allusion à leur dignité268. L’appartenance à un ordo, comme on l’a vu dans le cas des publicains, donnait accès à certaines prérogatives269. Les appariteurs, d’une part, recevaient un traitement des caisses civiques270. La Table d’Héraclée271 indique par ailleurs qu’un groupe de scribes au moins avait droit de faire usage des lieux publics dans l’exercice de ses activités. Les appariteurs pourraient en outre s’être vu concéder par les autorités le droit de se constituer en collège272. Un petit groupe d’inscriptions tardo-républicaines témoigne en effet du regroupement des personnels administratifs, peut-être par catégories (scribae d’une part, uiatores de l’autre, praecones enfin) dans de telles structures273. Un lemme de Festus274 suggère que l’initiative des pouvoirs publics s’accompagna, dans le cas des scribes, de l’octroi d’un locus publicus.

 

  • 275 Sur les esclaves publics, voir Mommsen 1889-1896, I, p. 366-378 ; Halkin 1897, p. 71-77 et 102-106 (...)
  • 276 Eder 1980, p. 152-156.
  • 277 En revanche, CIL VI, 1930, sous l’Empire, évoque un tabularius uiatorum quaestoriorum ab Aerario e (...)

76La présence dans les services du Trésor d’un nombre conséquent de serui publici275 semblerait par ailleurs, au regard des effectifs limités des appariteurs, attendue276, mais les sources d’époque républicaine277 sont absolument muettes à leur sujet.

L’organisation du travail des employés du Trésor

  • 278 Dans ce cas, il n’y aurait aucun rapport entre nombre des décuries et nombre des magistrats qu’ell (...)

77Les données rassemblées jusqu’ici fournissent-elles des renseignements sur la manière dont le travail s’organisait à l’intérieur des services de l’Aerarium ? La décurie pourrait avoir été une unité structurant les « bureaux » du Trésor, puisqu’elle recoupait la distribution des appariteurs en groupes « fonctionnels », scribes, hérauts et uiatores278. Rien ne permet cependant de déterminer, dans le cas des scribes, si l’existence de trois décuries recouvrait trois types d’activités différents.

  • 279 Cic. dom. 74 et Pis. 61 ; Fest. p. 446-448 L. ; Ascon. Mil. p. 32 St. indique qu’en 52, les codice (...)
  • 280 Fallu 1974, p. 49. Jouanique 1968, p. 23 et 25, fait pour sa part de referre le terme qui désigne (...)
  • 281 Fest. p. 508-510 L. : Viatores appellantur, qui magistratibus apparent, … quod ex agris plerumque (...)
  • 282 Mommsen 1848, p. 38 ; Mommsen 1889-1896, I, p. 416, d’après Cic. Verr. II 3, 183 et le sac de monn (...)
  • 283 Karlowa 1885, I, p. 197 ; Mommsen 1889-1896, I, p. 416 ; Habicht 1958, col. 1932.
  • 284 Cic. Sest. 57 (pour le royaume de Ptolémée en 58) ; Phil. 2, 64 (pour les biens de Pompée durant l (...)

78Les scribes s’occupaient en tout cas des documents comptables279. Cicéron, dans le Contre Pison, évoque la remise au Trésor des comptes d’un gouverneur de province suivant les modalités prévues par la loi Iulia de pecuniis repetundis. Il décrit alors les opérations accomplies par les scribes au moyen de deux expressions, referre rationes et perscribere, qui semblent faire allusion respectivement à la réception des pièces et à leur transcription sur les registres publics280. Les tâches des uiatores, quant à elles, sont plus difficiles à cerner. Les historiens modernes en ont fait les porteurs des messages des magistrats281, les employés chargés de transporter les sacs de monnaies282 ou encore des caissiers283. Enfin, il semble que les hérauts aient présidé aux ventes publiques effectuées au profit du Trésor284.

  • 285 Cic. nat. deor. 3.74 : Veniamus in forum. Sessum it praetor. Quid ut iudicetur ? qui tabularium in (...)
  • 286 CIL I², 1490. Voir supra n. 238.
  • 287 Mommsen 1889-1896, I, p. 392 et 398, qui mettait (cf. Mommsen 1848, p. 36) en rapport le nombre de (...)
  • 288 Ou éventuellement servir, en corps, de témoins lors de la rédaction d’un chirographe. David 2012, (...)
  • 289 Jakab 2011, p. 277-278 et 284-292 ; Sirks 2016, p. 265-266. Sur le formulaire de chirographes cons (...)

79Un passage du De Natura Deorum de Cicéron285 témoigne en outre de l’existence d’une hiérarchie interne aux scribes. Cicéron évoque une affaire de falsification de documents publics dans laquelle avait été imitée la signature des sex primi. Ces personnages, dont on possède une occurrence épigraphique pour l’époque républicaine286, ont été qualifiés par T. Mommsen de « bureau » de la décurie287. En fait, à lire Cicéron, ils semblent avoir été les agents habilités à rédiger et signer les chirographes288, c’est-à-dire les documents par lesquels le Trésor reconnaissait avoir reçu de l’argent d’un individu ou lui en devoir289. Les sex primi détenaient le pouvoir de rendre l’Aerarium débiteur d’un tiers ou d’éteindre une dette envers le Trésor Public : la hiérarchie des agents correspondait ainsi à l’importance des tâches qui leur étaient confiées.

80Il y avait donc une organisation interne des services de l’Aerarium, même si elle nous demeure en bonne part inconnue du fait de l’indifférence des sources aux questions administratives et aux personnels jugés secondaires. Dès lors, est-il possible de procéder plus avant par un autre biais ? En précisant quelles étaient les attributions des questeurs du Trésor, sera-t-on capable de dessiner en creux les contours des « bureaux » qui travaillaient sous leurs ordres ?

Les activités des quaestores ad Aerarium comme indice de celles des services du Trésor

  • 290 Plb. 6, 12, 8.
  • 291 Sur les pouvoirs des questeurs, Gell. 13, 12, 6 et 13, 13.
  • 292 Cic. leg. 3, 6.
  • 293 Cic. Font. 5.
  • 294 Sur les compétences questoriennes en général, Muñiz Coello 2014, p. 520-522.
  • 295 Pina Polo – Díaz Fernández 2019, p. 86-87, 90, 95, 171, 173, 179, 202 ; Díaz Fernández – Pina Polo (...)

81Polybe290, au livre VI des Histoires, semble décrire, de façon générique, les questeurs comme les subordonnés des consuls en matière financière291. Toutefois, comme il a évoqué dans la phrase qui précède la faculté des consuls de disposer à leur gré des fonds publics militiae, il doit faire là référence aux seuls questeurs affectés hors de Rome. Les sources latines, pour leur part, assignent deux missions principales aux questeurs du Trésor, custodire (surveiller)292 et tractare (manier)293 les deniers publics. Les compétences de ces magistrats consistaient en effet en premier lieu à assurer la bonne garde des richesses entreposées au Trésor. Le second grand pan de leurs attributions avait trait à la supervision des opérations d’encaissement et de décaissement, et par conséquent aux activités qui en amont déterminaient ces mouvements de fonds. La tenue des documents comptables constituait le corollaire de ces opérations. Enfin, quelques tâches plus ponctuelles incombaient également aux questeurs294. Les questeurs étaient donc simplement des « caissiers », et en aucune façon des « contrôleurs financiers de la République », comme l’ont récemment écrit F. Pina Polo et A. Díaz Fernández295.

La surveillance des valeurs conservées à l’Aerarium

  • 296 Lex repet., l. 67-68 = CIL I², 583 = Crawford 1996, I. n° 1, p. 72.
  • 297 Sur la litis aestimatio, Zumpt 1871, p. 395-411 ; Greenidge 1901, p. 502-503 ; Mommsen 1907, III, (...)
  • 298 de Longperier 1868, p. 58-59 et 119-121 ; Saglio 1896, p. 1142 ; RPC, I, p. 715, n° 5409-5410 (san (...)
  • 299 Fallu 1979, p. 102-107.
  • 300 Les deux dimensions (chronologie et source d'obligation) se recoupaient de toute façon.

82La lex repetundarum296 (voir annexe 4), dans sa section relative aux conséquences de la litis aestimatio297, confie aux questeurs du Trésor la tâche de ranger les fonds qu’ils distribueront ensuite à titre de « dommages et intérêts ». Il est précisé que l’argent doit être entreposé dans des corbeilles (fisci) scellées. Certaines monnaies d’époque impériale sont apparemment ornées de la représentation d’un fiscus : ces cistes cylindriques, au couvercle muni d’une poignée et fermé par deux bandes de cuir ou de bronze entrecroisées, auraient été si communément associées aux activités des questeurs qu’elles auraient fini par constituer les insignes de leur magistrature298. La lex repetundarum déclare en outre que les corbeilles doivent porter des indications permettant, sans les ouvrir, d’identifier leur contenu et probablement de le mettre en correspondance avec des documents récapitulatifs rédigés lors de l’entrée des fonds à l’Aerarium. Dans le cas envisagé, chaque corbeille avait à arborer le nom du magistrat qui avait présidé à la litis aestimatio, la provenance de l’argent – c’est-à-dire le nom du condamné et/ou de ses praedes – et le montant. Ces données coïncident avec les rubriques suivant lesquelles étaient ordinairement structurés les documents comptables romains, date ou source d'obligation, ab/per quem, quantum299. Toutefois, au point où nous sommes, rien ne permet de déterminer à quoi correspondaient exactement les documents récapitulatifs dont nous venons de parler. Si les « étiquettes » des fisci servaient également de repère pour le rangement matériel des fonds, le classement devait reposer sur la date d’entrée de l’argent au Trésor Public ou sur le magistrat responsable de l’acte300, peut-être sur le type de recette auquel se rattachait la somme, mais pas sur l’affectation prévue pour elle. Il est vraisemblable que la rédaction des « étiquettes » des fisci et des documents de synthèse revenait aux scribes.

  • 301 App. BC 4, 187, dans un contexte privé, fait référence aux coffres de fer dans lesquels on garde l (...)
  • 302 App. BC 2, 98 montre Caton, à la veille de sa mort, faire mettre sous scellés les caisses publique (...)
  • 303 Zonar. 8, 6.

83La lex repetundarum est l’unique document qui indique concrètement comment les deniers publics étaient conservés à l’Aerarium. On ne sait donc si elle fournit des indications universellement valables ou limitées au cas particulier de l’indemnisation des victimes d’extorsion. Les fisci étaient-ils ainsi réservés aux sommes qui ne faisaient que transiter par le Trésor, ou étaient-ils utilisés dans tous les cas de figure301 ? Le principe des scellés était-il habituel302, afin de garantir la sécurité des fonds publics y compris à l’intérieur des locaux de l’Aerarium, ou s’appliquait-il seulement aux sommes déjà affectées, qui n’auraient plus été considérées exactement comme une propriété publique, mais en partie comme celle de leurs futurs détenteurs ? Si la mise sous scellés du numéraire était systématique, à quel niveau de responsabilité s’effectuait-elle ? Zonaras303 indique que les magistrats romains envoyés à l’étranger, ainsi que ceux qui avaient à traiter des affaires d’importance, se voyaient délivrer un sceau par le Trésor Public. Il est probable que cet objet servait notamment à certifier leurs actes financiers. On en conclura qu’à Rome, c’étaient peut-être les questeurs eux-mêmes qui disposaient du pouvoir de mettre les fonds sous scellés. Une seconde possibilité serait que les sex primi soient intervenus pour ce type de tâche, dans la mesure où l’établissement des chirographes nécessitait lui aussi la possession d’un sceau.

84Certains indices suggèrent donc à nouveau que les services de l’Aerarium étaient structurés de façon hiérarchique. Le degré de responsabilité des différents agents se manifestait par la possession d’instruments – notamment un sceau – qui permettaient de lier l’entrée des fonds dans les caisses publiques à l’action d’un individu et par conséquent de lui en demander éventuellement compte.

Les opérations d’encaissement et de décaissement

  • 304 Plb. 23, 14, 5 ; Liv. 38, 55, 13 ; Val. Max. 3, 7, 1 f ; indirectement Plu. Apopht. Scipio 9 = Mor (...)
  • 305 Plb. 6, 13, 2 ; Cic. Verr. II 1, 34 ; 1, 37 ; Cic. Verr. II 3, 177 ; Cic. Font. 1-2 ; Cic. Flacc. (...)
  • 306 Plaut. Bacch. 1075 ; Cic. Font. 3 ; Cic. fam. 2, 17, 4 = SB n° 117 ; Liv. 23, 41, 7 ; Liv. 32, 2, (...)
  • 307 Cf. la sanction de cette lex : Lintott 1990, p. 9-10.
  • 308 Pina Polo – Díaz Fernández 2019, p. 92. Voir également, pour la souscription de 210 av. J.-C., Flo (...)
  • 309 Pina Polo – Díaz Fernández 2019, p. 97.

85Les questeurs avaient par ailleurs la garde des clés de l’Aerarium, ou plus exactement de l’endroit où étaient entreposées les réserves de numéraire et de métaux précieux304. Leur présence physique était donc indispensable dès lors qu’un paiement était effectué comptant par le Trésor Public305 ou à son bénéfice306. Les encaissements explicitement rapportés aux questeurs concernent l’argent offert à la cité par les veuves et les orphelins en 214 av. J.-C., l’amende à percevoir d’un magistrat qui n’aurait pas respecté la loi sur les provinces prétoriennes307, mais surtout le butin amassé par les magistrats romains et les indemnités de guerre imposées aux ennemis vaincus308. Les décaissements, pour leur part, sont attestés peut-être pour les dépenses des mêmes veuves et orphelins, et de façon sûre pour les praemia309, les fonds délivrés aux questeurs provinciaux, la merces des appariteurs et les indemnités touchées par les victimes d’extorsion. Les textes qui évoquent ces opérations recourent, pour les encaissements, aux verbes exigere (recouvrer) et accipere (recevoir) (deferre, redigere ou tradere quand la situation est envisagée du point de vue de celui qui effectue le versement au Trésor), et pour les décaissements, à dare/apodidomi, (dis)soluere (réaliser un paiement) ou numerare (compter les pièces à l’occasion d’un paiement). La procédure suivie lors de ces entrées et de ces sorties de fonds permet-elle d’établir quelles catégories de personnels étaient impliquées et, dans la mesure du possible, comment s’organisait leur travail ?

 

  • 310 Voir le vocabulaire employé en Plu. Cato Mi., 17, 3 (grammata et dogmata). Il ne semble pas que ce (...)
  • 311 Liv. 42, 6, 6, pour les indemnités exigées d’Antiochos III : il y avait une date prévue pour chaqu (...)
  • 312 Coudry 2004, p. 530-544.
  • 313 C’est ce que l’on peut inférer de Frontin aq. 100, 3, qui indique que les personnels du service de (...)

86L’accès à l’Aerarium paraît avoir été ouvert soit par un SC, soit par la convocation d’un magistrat310. Les ambassadeurs étrangers qui venaient remettre une indemnité de guerre devaient par exemple se plier à un calendrier311 et à un iter administratif qui les mettaient en relation avec un magistrat supérieur et avec le Sénat312 : ils se présentaient donc ensuite au Trésor munis d’un SC. Il est vraisemblable que les apparitores étaient pour leur part convoqués une fois dans l’année pour toucher leur traitement313.

  • 314  Mantovani 2000, p. 667-668, n. 63. Le fait que l’argent destiné aux victimes transitait par le Tré (...)
  • 315 Mommsen 1907, III, p. 26, jugeait que les sûretés étaient fournies avant la litis aestimatio.
  • 316 Mommsen 1905-1910, I, p. 58 estimait que donner des praedes revenait à payer l’amende, donc s’acqu (...)
  • 317 Moreau 2019, p. 150.
  • 318 Dans la procédure récupératorienne prévue par la copie de Cnide de la loi sur les provinces prétor (...)
  • 319 Ceci implique que l’on pouvait également déposer une requête, sans doute auprès du questeur, pour (...)

87Le document qui livre le plus de détails sur les encaissements et les décaissements est la lex repetundarum, puisqu’elle envisage non seulement le paiement des indemnités aux victimes d’extorsion, mais aussi le recouvrement des sommes nécessaires à cette fin314. En l’occurrence, le condamné était tenu de donner au questeur, au plus tard lorsque s’ouvrait la litis aestimatio315, le nom de ses praedes (l. 66, restituée)316. Une fois le principe et le montant des « dommages et intérêts » fixés317, il devait sans doute s’acquitter au plus tôt (auprès du président de la quaestio, l. 62318) de la somme due aux victimes, puisqu’il fallait indemniser ces dernières dans les trois jours (l. 61). Si le condamné n’était pas en mesure de réunir l’intégralité des fonds nécessaires ou refusait de le faire (l. 62), le questeur procédait au recouvrement du reste de la somme auprès des praedes (l. 67). Condamné et garants devaient donc répondre aux injonctions du questeur. Quant au dédommagement, il s’effectuait soit dans les trois jours (l. 61), soit dans un court délai suivant une date où les plaignants étaient convoqués par voie d’affichage (l. 62-64). Une personne qui n’aurait pu être alors présente avait ensuite cinq ans pour faire valoir ses droits (l. 64 et 66)319.

  • 320 Ordo signifie l’ordre des écritures dans un registre comptable en Cic. Q. Rosc. 6 et Scaur. 18.
  • 321 Cic. Font. 4 : Extra ordinemne pecunia est data ? immo uero nummus nullus sine litteris multis com (...)
  • 322 Cf. Plu. Cato Mi. 17, 3-4. Sur le sens des pecuniae extraordinariae, Jouanique 1968, p. 8. Andreau (...)
  • 323 Le parallèle du dépôt au Trésor du butin de Servilius Vatia Isauricus va dans ce sens : Cic. Verr. (...)

88Une fois dans les locaux du Trésor, l’interlocuteur des services de l’Aerarium devait probablement commencer par se faire reconnaître, et donc produire des documents à cette fin. La lex repetundarum (l. 69) précise que le versement d’indemnités aux victimes d’extorsion était effectué par le questeur extra ordinem, ce qui pourrait a priori signifier « en dehors de l’ordre normal prévu pour les paiements »320, mais doit plus vraisemblablement, par comparaison avec un passage du Pro Fonteio321, être compris comme « en dehors de la procédure usuelle », c’est-à-dire sans être porté sur les « registres comptables »322. Habituellement, une personne qui remettait des valeurs à l’Aerarium devait soit accompagner ces dernières d’un inventaire qui faisait l’objet d’une vérification, soit assister à un décompte et à l’établissement d’un inventaire par les services du Trésor323. Ceux-ci lui délivraient alors sans doute un récépissé, avant de reporter toutes ces données sur les « registres publics ». Des personnels se chargeaient ensuite de ranger le numéraire ou les objets suivant un principe de classement qui permettait de mettre en rapport données des « registres » et contenu des locaux du Trésor : ceci implique que les objets au moins aient été étiquetés. Un décaissement, pour sa part, devait donner lieu à une inscription sur les « registres publics », à un décompte devant le bénéficiaire, et peut-être à la réception d’une reconnaissance de paiement établie par ce dernier. Si les sommes conservées au Trésor Public étaient bien classées par date d’entrée à l’Aerarium et par provenance des fonds, les décaissements réclamaient en outre la production de documents internes permettant de savoir où l’on avait pris de l’argent en vue d’une sortie. Si les fonds se trouvaient dans un fiscus, il fallait à cette occasion le désceller, puis le resceller et mettre à jour son étiquette.

 

89Il ressort de ce qui précède que les encaissements et les décaissements réclamaient avant tout le concours des scribes. C’est encore une fois de la lex repetundarum que l’on peut déduire le plus grand nombre d’éléments. La loi suggère qu’au moins un agent de l’Aerarium devait assister à la litis aestimatio, pour enregistrer dans un premier temps la liste des praedes de chaque condamné, relever le nom des bénéficiaires d’indemnisation et le montant qui leur était dû, et peut-être leur délivrer un document qui leur permettrait ensuite de faire valoir leurs droits. Lorsque le condamné s’acquittait de ce qu’il devait, un scribe portait vraisemblablement sur un « registre public » la somme versée, établissait une reconnaissance de paiement, mais aussi, dans la mesure où la somme transitait par les mains du préteur, un récépissé destiné à ce dernier. Des opérations à peu près similaires devaient accompagner les versements des praedes. Enfin, au bout de cinq ans, il fallait éventuellement porter au crédit du peuple romain le reliquat correspondant aux sommes non réclamées par les victimes. Lors du versement des « dommages et intérêts », des repères étaient sans doute apposés sur la liste des ayants-droit pour identifier les personnes effectivement indemnisées, et peut-être celles-ci remettaient-elles une reconnaissance de paiement. On ne sait si les mêmes scribes ou une autre catégorie d’agents se chargeaient de la manipulation des espèces, de leur rangement puis de leur extraction des fisci. Des personnels spécifiques intervenaient peut-être pour rédiger les documents destinés à l’affichage sur le Forum (la convocation des ayants-droits et la liste des bénéficiaires, assortie du montant de l’indemnité touchée, qui était sans doute une copie du document établi le jour de la litis aestimatio). Enfin, il est probable qu’un praeco procédait à la proclamation orale de ces documents exposés, et que des uiatores avertissaient les praedes d’avoir à répondre aux injonctions du questeur.

 

90Le témoignage de la lex repetundarum incite par conséquent à penser que l’Aerarium employait plusieurs catégories de scribes, en fonction de la complexité des tâches à accomplir et probablement du degré de responsabilité qui en découlait. L’élaboration de copies pour affichage, en particulier, pourrait avoir été confiée à des personnels subalternes, tandis que tout ce qui réclamait l’apposition d’une signature ou d’un sceau serait revenu aux sex primi.

91À ma connaissance, aucune source ne permet de déterminer plus précisément comment le travail était réparti à l’intérieur des « bureaux » du Trésor. Dans le cas prévu par la lex repetundarum, où une entrée, l’amende, était destinée à alimenter une sortie précise, les « dommages et intérêts », faisait-on suivre toute la procédure par un même scribe – ce qui aurait présenté l’avantage de faciliter la reconnaissance des ayants-droits par les services de l’Aerarium, ou différents employés publics intervenaient-ils ?

92Quoi qu’il en soit, le législateur paraît avoir été particulièrement attentif à la publicité qui devait accompagner les sorties de fonds publics, ainsi qu’au respect de délais visant probablement à assurer l’efficacité des services administratifs. La lacune de la l. 67 de la lex repetundarum ne permet pas de conclure de façon certaine, mais il semble que le Trésor Public se soit vu reconnaître le droit de réclamer immédiatement, par l’entremise des questeurs, ce qui lui était dû, tout comme il avait à indemniser les victimes d’extorsion dans les meilleurs délais.

Les tâches questoriennes en amont des encaissements et décaissements

93Les questeurs étaient par ailleurs investis de tâches concrètes qui se situaient en amont des encaissements et décaissements, et en constituaient le préalable.

Les activités des questeurs qui avaient trait aux monnaies

94Afin de garantir le bon déroulement des paiements effectués par ou au profit de l’Aerarium, les questeurs du Trésor étaient amenés à vérifier la qualité des métaux qui parvenaient à l’Aerarium, à faire frapper des monnaies ou à procéder à des opérations de change.

La vérification des valeurs métalliques lors de leur entrée au Trésor

  • 324 Liv. 32, 2, 1-2 : Carthaginienses eo anno argentum in stipendium impositum primum Romam aduexerunt (...)
  • 325 Gell. 7, 5, 1, pour la paix romano-carthaginoise qui clôtura la deuxième Guerre punique ; Plb. 21, (...)
  • 326 Bogaert 1976, p. 7 (et plus largement p. 6-12 pour les différentes méthodes d’essai employées dans (...)
  • 327 Cette hypothèse pourrait être étayée par le fait qu’en 199, les Carthaginois furent contraints d’e (...)
  • 328 Andreau 1987, p. 73-74, 182-184, 348-349 et 356.
  • 329 Andreau 1987, p. 504 estime qu’en 199 av. J.-C., les Carthaginois durent livrer du métal non monna (...)
  • 330 Andreau 1987, p. 73.
  • 331 Papi 2002, p. 47 et 56.
  • 332 C’est l’opinion d’Andreau 1987, p. 504.

95Un épisode isolé324, relatif au premier versement de l’indemnité de guerre due par les Carthaginois au sortir de la deuxième Guerre punique, indique que les questeurs faisaient contrôler la pureté du métal qui entrait au Trésor Public. Les traités de paix semblent en effet avoir fixé précisément non seulement le montant des indemnités de guerre et l’unité dans laquelle elles seraient livrées, mais le poids total de métal et la qualité de la matière première325. En 199 av. J.-C., la technique utilisée fut l’essai par le feu326. Deux hypothèses seraient donc a priori envisageables, que les questeurs se soient appuyés pour ce genre d’opération sur les gens de métier du Forum327, ou sur les employés de la Monnaie. Dans les relations financières entre priuati, l’essai des monnaies était pratiqué par les argentarii, avant que cette activité ne devînt la prérogative d’un métier spécifique, les nummularii328 ; quant au métal non monnayé329, il était probablement vérifié par les orfèvres330. Les tabernae de certains de ces professionnels se trouvaient sur le Forum, à quelques pas de l’aedes Saturni331. Toutefois, dans la mesure où aucune source ne montre les questeurs s’adresser à des gens de métier et où les personnels de la Monnaie étaient aptes à assurer ce travail, il est sans doute préférable de penser que la vérification des valeurs métalliques destinées à l’Aerarium était effectuée par des agents publics332

  • 333 Andreau 2001, p. 169-170.
  • 334 Les tessères semblent avoir attesté qu’un sac de monnaies avait fait l’objet d’un contrôle : Andre (...)

96J. Andreau333 a avancé une intéressante hypothèse qui permettrait alors de cerner la fonction des tessères nummulaires. Marquées au nom d’esclaves qui font état de leurs domini sans les identifier par un titre ou une profession, les tesserae nummulariae pourraient avoir été des instruments utilisés par les sociétés de publicains dans leurs rapports avec les pouvoirs publics334. L’Aerarium aurait donc accepté, sans peut-être les vérifier lui-même, les sacs de numéraire préalablement contrôlés par ses partenaires officiels.

  • 335 Plin. nat. 33, 132 : Miscuit denario triumuir Antonius ferrum, miscent aera falsae monetae ; alii (...)
  • 336 Pedroni 2006, p. 78.
  • 337 C’est la date traditionnelle attribuée à la préture de Gratidianus depuis Münzer 1928c, n° 42, col (...)
  • 338 Cic. off. 3, 80 : cum praetor esset collegiumque praetorium tribuni plebi adhibuissent, ut res num (...)
  • 339 Lo Cascio 1979, p. 231-236 et 2018, p. 143 (les mesures de Gratidianus visaient à assurer l’effica (...)
  • 340 Lo Cascio 1982, p. 206-207 (alors que suite aux années de guerre civile, la valeur des monnaies ne (...)
  • 341 Crawford 1964a, p. 3 (Pline fait état de monnaies formées d’un mélange d’argent et de fer, ce qui (...)
  • 342 Santalucia 1982, p. 53. Crawford 1964b, p. 31 avait l’air de considérer que les priuati pouvaient (...)
  • 343 Burnett 1982, p. 135-136.
  • 344 Les tessères ne semblent avoir été utilisées que par des particuliers, et pour des monnaies qui ét (...)
  • 345 Zehnacker 1979, p. 171 ; Lo Cascio 1982, p. 207-208 et 2018, p. 143 ; Heinrichs 2008, p. 266.

97Par ailleurs, des particuliers pouvaient-ils faire vérifier des valeurs métalliques par les services du Trésor Public ? Pline l’Ancien335 crédite le préteur M. Marius Gratidianus (86336 ou 85 av. J.-C.337) de l’initiative d’une loi qui aurait eu à voir avec la probatio des monnaies d’argent. Comme Cicéron338 rapporte au même magistrat un édit qui aurait, lui, défini des sanctions concernant la res nummaria, dans un contexte de fluctuation monétaire, les historiens modernes ont avancé différentes interprétations, soit en combinant les données de Cicéron et de Pline339, soit en les dissociant340, le témoignage de Pline étant alors parfois écarté comme douteux341. L’encyclopédiste pourrait-il en fait avoir fait référence à une norme qui permit aux priuati de faire vérifier à l’Aerarium les monnaies qu’ils possédaient342 ? A. Burnett343 avait estimé que les mesures de Marius Gratidianus étaient contemporaines des premières tessères nummulaires, et donc que le préteur avait offert aux particuliers la possibilité de faire contrôler leurs espèces au Trésor, et de disposer ensuite de sacs de monnaies cachetés et garantis. Toutefois, les plus anciennes tessères connues sont antérieures de dix ans à la préture de Gratidianus, et aucun employé de l’Aerarium n’apparaît sur ces documents344. H. Zehnacker, E. Lo Cascio et J. Heinrichs345 pensent de leur côté que Gratidianus pourrait avoir établi le principe d’un contrôle officiel des deniers. Cependant, il me semble qu’aucune source n’atteste que les particuliers avaient le droit de se présenter de leur propre initiative au Trésor Public ou à la Monnaie pour y faire examiner ou échanger le numéraire en leur possession.

 

  • 346 Il faudrait donc penser les rapports des questeurs et des triumvirs monétaires sur le modèle de ce (...)
  • 347 Crawford 1974, I, p. 42 et II, p. 602 et 615-616.
  • 348 Pedroni 1993, p. 73 reprend la même perspective, avec des nuances. En revanche, Buttrey 1977-1978, (...)
  • 349 Barthélémy 1847, p. 364 ; Blanchet 1896, p. 19 ; Crawford 1974, II, p. 617 ; Pedroni 1993, p. 73 ; (...)
  • 350 À l’époque où l’on pensait que le triumvirat monétaire était une fonction intermittente, Blanchet (...)
  • 351 Pink 1952, p. 57-58 et 60 ; Breglia 1964, p. 142 ; Crawford 1974, II, p. 603 et 617 ; Pina Polo – (...)
  • 352 Pink 1952, p. 53 avait envisagé cette possibilité, sur la base d’une comparaison des triumvirs mon (...)
  • 353 En d’autres termes, je ne vois pas pourquoi l’intermédiaire des questeurs aurait été nécessaire à (...)

98Plus généralement, le dossier de la vérification des métaux et des monnaies lors de leur entrée au Trésor Public amène à s’interroger sur les rapports que les questeurs entretenaient avec les responsables de l’atelier monétaire, les triumuiri monetales. Certains auteurs estiment que les monétaires furent créés pour décharger les questeurs urbains de tâches – en l’occurrence la frappe des monnaies – qui leur revenaient initialement346. En revanche, M. H. Crawford347 jugeait dans le Roman Republican Coinage que la fabrication des didrachmes d’argent fut à l’origine placée sous la responsabilité des censeurs348 : l’instauration du triumvirat monétaire n’aurait donc en rien amputé les compétences questoriennes. Le ralliement postérieur de M. H. Crawford à la chronologie du monnayage romain proposée par A. Burnett rend toutefois problématique l’adossement des émissions de didrachmes aux années censoriales. À l’époque tardo-républicaine, la répartition des tâches entre questeurs et monétaires a pour sa part été envisagée soit comme une complémentarité technique349, soit sous la forme d’une alternance dans la supervision des frappes350. K. Pink, L. Breglia et M. H. Crawford351 ont estimé que les questeurs exerçaient une autorité sur les monétaires. Toutefois, cette idée ne semble étayée ni par l’hypothèse d’une désignation initiale des triumvirs monétaires par les questeurs352, ni par des indices qui suggèreraient que les questeurs étaient les donneurs d’ordre en matière de frappes353. Il me semble donc qu’en l’absence de données explicites, il est plus économique de penser à la coopération de deux services administratifs indépendants, le Trésor et la Monnaie, que de faire du second une subdivision du premier.

Les frappes questoriennes

  • 354 C’est peut-être aussi au rôle joué par les questeurs dans les frappes monétaires qu’il faut rattac (...)
  • 355 Sydenham 1952, p. XLIX ; Pink 1956, p. 59 ; Breglia 1964, p. 140 ; Zehnacker 1973, I, p. 59 ; Craw (...)
  • 356 Peut-être la première expédition contre les Cimbres et les Teutons pour RRC 286, la première année (...)
  • 357 RRC 330 : Crawford 1974, I, p. 73.
  • 358 RRC 396.
  • 359 Respectivement, RRC 326 et 331-333 et RRC 375 et 381.

99Reste donc à rendre compte de la mention des questeurs sur un certain nombre de légendes monétaires (voir annexe 5)354. Les monnaies questoriennes, qui sont attestées à partir des années 110 av. J.-C., ont généralement été interprétées comme des émissions exceptionnelles355. Ces séries arborent différents types de légendes : on y trouve soit les seules formules onomastiques des questeurs, soit ces noms complétés par la mention (ex) SC et éventuellement une indication concernant la destination des pièces, ou encore par le nom et la fonction d’un magistrat supérieur. Il semble par conséquent que les légendes renvoyaient à l’instance institutionnelle qui décidait des frappes et à celle qui exécutait cet ordre. La combinaison de l’iconographie monétaire et des légendes suggère que les émissions questoriennes financèrent des campagnes militaires imprévues356, un achat public de blé357, peut-être des ludi358, et qu’elles célébrèrent les victoires gauloises de Marius et la dictature de Sylla359. Il s’agissait donc ou de frappes militaires d’urgence, dont l’importance stratégique réclamait qu’on les confiât à des magistrats plus importants que les triumvirs monétaires, ou de séries éminemment politiques, dont un magistrat à imperium déléguait la production à un subordonné immédiat.

  • 360 On trouve les formes arg(entum ou –o) pub(licum ou –o) (RRC 325), ex a(rgento) p(ublico) (RRC 322, (...)
  • 361 Pink 1952, p. 56.
  • 362 Pedroni 2000, p. 135, 139-142, 145.
  • 363 Les monnaies en question sont recensées par Crawford 1973, p. 97, n° 37 a et 37 b, 38 a ; Crawford (...)
  • 364 Les formules onomastiques qui apparaissent sur les monnaies ne seraient donc pas celles de magistr (...)
  • 365 Domergue 1994, p. 101-105 ; Rowan 2013, p. 371 et 378.
  • 366 Crawford 1974, II, p. 605.
  • 367 Barlow 1977, p. 295-301 mettait la chronologie des monnaies argentum publicum en relation avec les (...)
  • 368 Crawford 1974, II, p. 605 ; Lo Cascio 1979, p. 233, n. 75.
  • 369 Pedroni 2000, p. 138.
  • 370 Barlow 1977, p. 298.
  • 371 Mattingly 1982, p. 23.
  • 372 À moins qu’on ne pense que les monnaies RRC 322, 324, 325, 344, 352-353, qui sont datées entre 102 (...)

100Les questeurs du Trésor, par ailleurs, sans apparaître directement sur les monnaies en question, doivent avoir été impliqués dans la fabrication des pièces d’argent qui portent une légende arg(entum/o) pub(licum/o)360. Comme ces monnaies n’appartiennent qu’à huit séries en tout, K. Pink361 pensa que les pouvoirs publics romains se procuraient en général le métal nécessaire aux frappes auprès d’acteurs économiques privés. Les exemplaires argentum publicum auraient été produits dans des situations de crise, telle que la Guerre Sociale, où la désorganisation des échanges contraignit les autorités à puiser ponctuellement dans les réserves métalliques du Trésor. L. Pedroni362 a plus récemment développé une théorie qui va dans le même sens. Prenant pour point de comparaison les monnaies coloniales de Paestum qui arborent peut-être une mention s(ua) p(ecunia)363, il juge que le métal utilisé pour les émissions monétaires romaines était usuellement fourni par des priuati364. Dans des circonstances anormales seulement, il aurait été tiré de l’Aerarium. Toutefois, les stocks métalliques considérables dont la res publica disposait, ne serait-ce que par les butins, les indemnités de guerre et les mines, rendent peu crédible l’idée qu’elle ait eu besoin d’intermédiaires pour s’approvisionner en métal365. Comme le relevait M. H. Crawford366, c’est précisément parce que toutes les émissions étaient produites à partir de métal public que la singularité des séries argentum publicum est patente. On a donc pensé que ces monnaies correspondaient soit à un contexte de guerre367, soit à un moment politique marqué par l’affirmation popularis du droit du peuple à contrôler les émissions368. Cependant, toutes les frappes réalisées par un même individu ne portent pas la marque argentum publicum, ce qui suggèrerait que le message politique popularis n’était pas revendiqué constamment369, et certains noms qui apparaissent sur les monnaies argentum publicum peuvent très difficilement avoir été ceux de populares370. En définitive, l’hypothèse d’H. Mattingly371, pour qui la formule argentum publicum désignerait des refrappes opérées sur des espèces déjà conservées au Trésor Public, me paraît la plus attractive372.

  • 373 Crawford 1974, II, p. 633. La dépense majeure aurait bien sûr été les frais d’entretien des armées
  • 374 Crawford 1974, II, p. 617-618 et 633.
  • 375 Crawford 1974, II, p. 641 : on obtient ainsi un chiffre minimum, en postulant qu’à chaque marque d (...)
  • 376 Crawford 1974, II, p. 694 et 696.
  • 377 Cette donnée pourrait être déduite de Cic. Pis. 86 et Caes. civ. 1, 23, 4.
  • 378 Crawford 1974, II, p. 698-703.
  • 379 Hersh, 1977, p. 36 ; Buttrey 1977-1978, p. 152. Zehnacker 1973, II, p. 160-162 avait par ailleurs (...)
  • 380 Les études d’archéologie expérimentale de Sellwood 1963, p. 226-228 avaient abouti à l’idée qu’on (...)
  • 381 Buttrey 2011, p. 108-110 a recensé les nombreuses incertitudes qui interdisent de tirer des conclu (...)
  • 382 Lo Cascio 1982, p. 87-89 était allé dans le même sens en soulignant en particulier qu’au IIe siècl (...)

101La suggestion d’H. Mattingly conduit en tous cas à réexaminer l’idée, développée par M. H. Crawford dans le Roman Republican Coinage, suivant laquelle la cité romaine émettait ses monnaies pour répondre aux exigences de la dépense publique373. Jusqu’à l’époque syllanienne, à l’exception de courtes périodes – les années 140 et 100-85 av. J.-C. – les paiements effectués par les autorités auraient été systématiquement acquittés en espèces neuves, afin notamment d’asseoir la confiance des citoyens dans la monnaie374. La méthode élaborée par M. H. Crawford pour déterminer l’importance quantitative d’une émission consista à évaluer d’abord le nombre de coins de revers utilisés. Le recensement des exemplaires conservés permettait d’estimer, lorsque ceux-ci portaient des marques de contrôle alphabétiques ou numérales qui formaient une série, le nombre total de coins qui avaient pu être employés pour telle émission375. L’exemple des deniers frappés en 82-81 av. J.-C. à l’intention des troupes du proconsul C. Annius (RRC 366) étaya le second point de son raisonnement376. Annius commanda vraisemblablement deux légions ; or, le coût d’une légion, au Ier siècle av. J.-C., se montait à 1,5 millions de deniers377 : Annius dut donc recevoir une dotation de trois millions. Dans la mesure où l’on connaît pour l’émission RRC 366 105 coins de revers, il faudrait conclure qu’un de ces objets permettait de fabriquer environ 30 000 pièces. L’application de ce ratio à l’ensemble des émissions connues illustrerait alors l’étroite corrélation entre le volume du monnayage romain et le montant de la principale dépense publique, l’entretien de l’armée378. La thèse de M. H. Crawford a suscité un certain nombre de critiques qui ont porté soit sur sa manière de calculer le nombre de coins de revers par émission379, soit sur le rapport établi entre nombre de coins de revers et nombre de pièces produites380. Les objections émises par T. Buttrey381 contre la possibilité d’établir, à partir de l’émission RRC 366, un quelconque rapport entre nombre de coins et volume des frappes conduisent à adopter une position extrêmement prudente sur la corrélation établie entre ampleur des émissions et montant de la dépense publique382.

  • 383 Pink 1952, p. 57 ; Crawford 1974, II, p. 617.

102Cependant, on peut convenir que certaines dépenses publiques au moins étaient financées par la production d’une émission : ce fut par exemple certainement le cas de RRC 330, ad fru(mentum) emu(ndum). L’hypothèse de M. H. Crawford est donc au moins utilisable à titre probatoire, pour reconstituer les relations qui en ces circonstances s’établissaient entre les services de l’Aerarium et ceux de la Moneta. Une fois prise la décision de procéder aux frappes, le Trésor devait fournir à l’atelier de la Monnaie la quantité de métal nécessaire, sous forme de lingots ou de numéraire usagé. L’étape de la fabrication achevée, les pièces neuves entraient au Trésor Public, en attendant leur décaissement383. Les questeurs avaient donc à superviser le travail des scribes, qui faisaient probablement figurer dans des « registres publics » la sortie des valeurs métalliques employées pour l’émission. A priori, on se demande si le passage des valeurs métalliques d’une institution à l’autre était, dans les usages de la comptabilité publique républicaine, considéré comme une sortie. Peut-être faut-il distinguer dans ce cas inscription sur les livres de comptes et inscription sur un livre de caisse. Des agents se chargeaient sans doute ensuite du transport matériel jusqu’à la Moneta, dont les responsables délivraient probablement un récépissé. Au retour, des scribes devaient remettre aux personnels de la Monnaie une attestation selon laquelle la quantité d’espèces requise, à la qualité vérifiée, leur avait bien été livrée. Les fonds, acheminés jusqu’à l’Aerarium, étaient portés sur les mêmes « registres publics », puis rangés.

Les opérations de change

  • 384 Cic. Att. 2, 6, 2 = SB n° 26, avril 59 : scripsi ad quaestores urbanos de Quinti fratris negotio. (...)
  • 385 Shackleton Bailey 1965-1968, I, p. 364 et p. 383-384 ; Jouanique 1968, p. 17. Ioannatou 2006, p. 2 (...)

103Les questeurs procédaient en outre à des opérations de change. Deux lettres de Cicéron à Atticus384, datées du printemps 59, font état d’une négociation qu’il avait entamée avec les questeurs urbains sur un dossier intéressant Quintus. On y apprend qu’un priuatus – certes de rang sénatorial – était susceptible d’écrire aux magistrats pour demander l’aménagement d’une disposition concernant l’un de ses proches, alors gouverneur d’Asie, puis de les relancer en leur adressant une personne de confiance. L’affaire concernait apparemment un paiement dont devait bénéficier Quintus. Il était prévu que la somme soit acquittée en cistophores, mais Cicéron souhaitait son versement en deniers. Visiblement, le consulaire n’obtint pas gain de cause, puisque dans sa seconde lettre il s’inquiéta même du caractère effectif du paiement. D. R. Shackleton Bailey, dans son commentaire à la correspondance cicéronienne, avait estimé que l’épisode concernait le versement de l’indemnité provinciale de Quintus, au moment où ce dernier fut prorogé pour une troisième année385.

  • 386 Dans ce cas, comme le Sénat devait voter une somme en unités de compte romaines, le Trésor se char (...)
  • 387 Cic. Quinct. 17, cité supra, « l’Vrbs disposait-elle d’une banque publique ? ».
  • 388 Pour l’hypothèse d’un « cours officiel du change » à Rome, Marquardt 1888, p. 81, n. 4, suivi par (...)
  • 389 Andreau 1987, p. 516.
  • 390 Cic. Verr. II 3, 181 : Ex omni pecunia quam aratoribus soluere debuisti certis nominibus deduction (...)
  • 391 Sur le sens du terme et ses occurrences, Bogaert 1968, p. 49 ; Bresson 2014, p. 527-533.

104La requête de Cicéron suggère peut-être que les indemnités des gouverneurs de province étaient versées dans la monnaie la plus usitée dans la région qu’ils administreraient386, et en tout cas qu’il arrivait que les services de l’Aerarium procédassent à des opérations de change. Comment effectuaient-ils ces dernières ? La question inclut différents aspects, d’une part, une nouvelle fois, le recours aux gens de métier ou l’appui sur les seuls personnels du Trésor, d’autre part l’existence d’équivalences officielles entre monnaies. Le second élément met en jeu un passage difficile du Pro Quinctio de Cicéron387, dans lequel on a parfois vu une allusion à l’usage d’afficher chaque jour les cours du change au temple des Castores. Le texte doit toutefois plus vraisemblablement se référer aux conversions compliquées suscitées par les fluctuations monétaires du denier et de l’as dans les années 80 av. J.-C. Soit donc l’on suppose a priori, sans disposer de sources, qu’il y avait un taux officiel pour les équivalences entre monnaies, soit l’on considère que le change s’effectuait par négociation388. Par ailleurs, sur la première question, J. Andreau389 pense que les autorités de l’Vrbs, ainsi que peut-être les sociétés de publicains, étaient les seules habilitées à convertir les fonds publics de l’unité monétaire « impériale » aux unités régionales. Les Verrines fournissent en effet un indice en ce sens390. Le gouverneur de Sicile prélevait un agio de change (collybus391) sur les espèces versées aux provinciaux au titre du frumentum emptum, et il semble que ce soient des agents administratifs dépendant directement de lui – ses scribes – qui procédaient dans ce cas. Ce parallèle inciterait à croire qu’à Rome, les opérations de change se faisaient plutôt à l’Aerarium, aux soins des scribes. Ces transactions fournissaient en tout cas aux pouvoirs publics, comme peut-être la permutatio, l’occasion de faire fructifier la pecunia publica.

La passation de marchés publics

105Les questeurs supervisaient par ailleurs la passation d’un certain nombre de marchés publics qui conditionnaient pour l’Aerarium soit une recette, soit un débours.

Les locationes qui donnaient lieu à une dépense

  • 392 Eu égard à la minceur du dossier disponible, nous avons par exception intégré au corpus les docume (...)
  • 393 En général, sur le ius hospitale, Mommsen 1864-1879, I, p. 343-345 ; Mommsen 1889-1896, IV, p. 255 (...)
  • 394 Ces honneurs étaient accordés aux ambassadeurs extérieurs morts durant leur mission à Rome, aux so (...)
  • 395 Tab. Heracl., l. 32-49 = CIL I², 593 = Crawford 1996, I, n° 24, p. 364 : quemquomque ante suum aed (...)
  • 396 La découverte d’éperons de navires inscrits au nom de questeurs, probablement sur le site de la ba (...)
  • 397 Trisciuoglio, 1998, p. 184-185.
  • 398 Tert. apol. 13, 5 ; nat. 1, 10, 22.
  • 399 Il s’agit de la perception, par le redemptor ayant affermé la surveillance d’un sanctuaire, des ta (...)

106Les locationes auxquelles procédaient les questeurs urbains sont attestées principalement par Tite Live pour les premières décennies du IIe siècle, et par un groupe assez limité de sources épigraphiques et littéraires qui se rapportent au IIIe siècle av. J.-C., puis à la période postérieure à 120 av. J.-C392. Ces marchés publics étaient circonscrits à des domaines bien spécifiques, les prestations fournies aux ambassadeurs étrangers393, l’organisation de funérailles publiques394, certains types d’opérations édilitaires395 et l’équipement de la flotte de guerre396. A. Trisciuoglio397 se fonde sur deux passages de Tertullien398 pour suggérer que les questeurs assistaient ordinairement les magistrats supérieurs dans la passation des contrats publics, afin notamment de dresser les documents comptables nécessaires. Même si le témoignage de Tertullien ne concerne pas l’époque républicaine, et si l’Ad Nationes paraît se référer plutôt à l’exactio des ultro tributa399, une certaine permanence des pratiques administratives sur la longue durée n’est pas exclue. Un des questeurs supervisait donc peut-être le travail des appariteurs qu’il mettait à la disposition des censeurs ou des consuls.

  • 400 Soit parce qu’elles portaient sur des travaux ou des dépenses de faible envergure (Mommsen 1889-18 (...)
  • 401 Sur l’identité, en général, du magistrat locator et probator, Trisciuoglio 1998, p. 141-147.
  • 402 C’est explicite en Cic. Phil. 9, 16 ; Liv. 45, 13, 12 ; 45, 14, 6 et 9 ; Val. Max. 5, 1, 1 c-e, et (...)
  • 403 Les travaux évoqués par CIL VI, 358 résultaient, selon Mommsen 1889-1896, IV, p. 257, n. 1, d’un « (...)
  • 404 Cic. Phil. 14, 38 renvoie apparemment à un autre type d’iter administratif, où la locatio fut conf (...)
  • 405 On sait en effet que lors de la vacance de la censure, magistrature généralement investie de la pr (...)
  • 406 L’analyse des l. 32-49 de la Table d’Héraclée se trouve dans Dirksen 1820, II, p. 218-267 ; Hardy (...)
  • 407 Tab. Heracl., l. 20-21 et 24-28 = CIL I², 593 = Crawford 1996, I, n° 24, p. 363-364.
  • 408 Trisciuoglio 1998, p. 106.
  • 409 Mommsen 1889-1896, IV, p. 208 et n. 1.
  • 410 Trisciuoglio 1998, p. 106.
  • 411 Cic. Verr. II 1, 142 : il s’agit des censeurs, consuls, préteurs et questeurs.
  • 412 Tab. Heracl., l. 32-49 = CIL I², 593 = Crawford 1996, I, n° 24, p. 364.

107Les locationes questoriennes ont généralement été considérées comme des actes relevant de l’administration extraordinaire400. Comment, de fait, expliquer l’implication des questeurs dans la passation de marchés publics qui relevaient généralement d’autres magistrats, en premier lieu les censeurs ou, au Ier siècle av. J.-C., les consuls ? Les éperons de navires fabriqués à l’époque de la première Guerre punique et estampillés au nom des questeurs qui en effectuèrent la probatio suggèrent que ces magistrats avaient également procédé à la locatio401, peut-être en raison de l’absence de Rome des magistrats supérieurs. Dans d’autres circonstances, notamment pour les présents diplomatiques, les honneurs funèbres402 et les travaux publics ponctuels403, un SC confiait aux questeurs le soin de passer le marché. La sententia cicéronienne qui clôt la IXe Philippique permet de reconstruire comment jouait alors la mécanique des institutions : la décision sénatoriale enjoignait aux consuls de demander aux questeurs de procéder à la locatio. Les magistrats inférieurs agissaient donc sur ordre des magistrats supérieurs404. Une situation similaire doit avoir prévalu pour la probatio des travaux d’entretien des aqueducs urbains, à moins qu’on n’ait eu là une transmission « en cascade » des responsabilités, des censeurs aux édiles puis aux questeurs405. Pour les travaux publics ordinaires, le transfert des dossiers des édiles aux questeurs pourrait avoir été la norme. En effet, si la tuitio de la voirie à l’intérieur de l’Vrbs, pour les portions de rues situées en façade des bâtiments publics ou pour les sections relevant de riverains qui auraient manqué à leurs obligations406, revenait aux édiles407, ces magistrats passaient par l’intermédiaire des questeurs urbains pour contracter avec un redemptor408. T. Mommsen409 rendait compte de cette répartition des tâches par la nature même des pouvoirs édiliciens : les édiles avaient la procuratio du patrimoine civique, donc sa surveillance, mais pas sa disposition ; tout acte qui impliquait une dépense publique revenait donc aux questeurs. A. Trisciuoglio410 ajoute que les édiles n’apparaissent pas dans la liste, donnée par Cicéron dans les Verrines411, des magistrats aptes à recevoir des sûretés. Il me semble, de fait, que la procédure d’adtributio du riverain défaillant, dans la Table d’Héraclée412, montre que les édiles ou leurs appariteurs n’avaient pas le pouvoir d’inscrire quoi que ce soit sur les « registres comptables » publics, et donc qu’ils n’étaient pas directement impliqués dans l’administration du Trésor. 

 

  • 413 Sur ce point, Brélaz 2003, p. 27-56.
  • 414 Tab. Heracl., l. 37 = CIL I², 593 = Crawford 1996, I, n° 24, p. 364.
  • 415 Brélaz 2003, p. 43.
  • 416 Trisciuoglio 1998, p. 166-168, pour cette variété de contrats.
  • 417 Trisciuoglio 1998, p. 181-183. Selon Karlowa 1885-1901, II, p. 30, cela se faisait par voie d’édit (...)
  • 418 Cic. Verr. II 1, 142 : Vbi illa consuetudo in bonis praedibus praediisque uendundis omnium consulu (...)
  • 419 CIL I², 698 = X, 1781 (trad. française dans Aubert 2003, p. 10-12).
  • 420 Trisciuoglio 1998, p. 214.
  • 421 Trisciuoglio 1998, p. 220-226, pour l’existence de ce type d’actes administratifs.
  • 422 Trisciuoglio 1998, p. 228-239, contra Brélaz 2003, p. 48-49. 
  • 423 Nicolet 1987, p. 6, n. 11. L’expression pecunia facta apparaît en Cic. Verr. I 16 (Vt primum e pro (...)

108Le déroulement des locationes questoriennes413 n’est pas évoqué par les sources qui les mentionnent. Seule la Table d’Héraclée414 précise que l’affermage devait se faire au Forum, à la vue de tous. Si l’on raisonne donc de façon théorique, il semble probable que la rédaction de la lex locationis, pour les marchés relevant de l’administration ordinaire, n’incombait pas aux questeurs : le texte devait alors être tralatice415. Pour les actes de l’administration extraordinaire, les questeurs se contentaient vraisemblablement de reproduire dans le cahier des charges le contenu du SC qui avait accompagné la prise de décision416. À première vue, leur marge d’autonomie, en matière de rédaction des leges locationis, était donc restreinte. Le questeur avait ensuite à faire annoncer la tenue du marché public et à porter à la connaissance des citoyens les clauses de la lex locationis417. Au jour dit, une fois la licitatio conclue, la réception des sûretés personnelles et réelles418 donnait validité à la conclusion du contrat et, si l’on utilise comme point de comparaison la lex parieti faciendo de Puteoli419, permettait peut-être le déblocage de la première tranche du paiement420. Le questeur faisait enregistrer les données dans les archives, et délivrait peut-être une copie de ce document à l’adjudicataire. On ne sait, dans le cas des travaux publics, si les questeurs suivaient de près les activités de ce dernier, par exemple en vérifiant la qualité des matériaux utilisés, et s’ils oeuvraient à la réparation d’éventuels dommages subis par des tiers421. L’exactio ou la probatio donnait, enfin, lieu au paiement des prestations fournies, à la rédaction d’un procès-verbal pour archivage et peut-être à la délivrance à l’adjudicataire d’un document recognitif422. La Table d’Héraclée prévoyait, pour le paiement du redemptor venu se substituer au riverain qui n’aurait pas entretenu la rue située devant son immeuble, une procédure spécifique. Le montant des enchères était porté sur les « registres publics », dans ce qui semble avoir été une catégorie comptable, la pecunia facta423. Le riverain défaillant était « attribué » à l’adjudicataire des travaux, qu’il devait rémunérer sous trente jours. Faute de quoi, il était soumis à une majoration, voire passible de poursuites judiciaires.

 

  • 424 Ceci signifie-t-il que le riverain défaillant devait faire transiter la somme destinée au redempto (...)

109Au regard de la procédure reconstruite à l’instant, les questeurs, lorsqu’ils étaient amenés à passer un marché public, devaient s’appuyer sur différentes catégories d’agents administratifs. Les scribes, une nouvelle fois, jouaient probablement un rôle essentiel. Il leur revenait de tirer des archives les documents nécessaires à l’élaboration de la lex locationis ; de relever, au moment de la passation du marché, le nom du manceps/redemptor, le prix atteint et la liste des sûretés produites, et de reporter ces données dans les « registres publics » ; éventuellement de délivrer, suite à l’exactio ou la probatio, un quitus à l’adjudicataire. Le paiement de ce dernier donnait lieu à inscription sur les « registres publics », aux opérations habituelles d’extraction des fonds et de correction des inventaires internes de l’Aerarium. Lorsque la procédure prévue par la Table d’Héraclée s’appliquait, un employé public devait en outre vérifier si le paiement du redemptor par le riverain défaillant avait bien été effectué dans les trente jours424, et, dans le cas contraire, mettre à jour les « registres comptables » pour y faire figurer la majoration, et peut-être délivrer « une lettre d’introduction » à l’adjudicataire, afin qu’il puisse se présenter devant le préteur et demander l’ouverture d’une action de pecunia credita.

  • 425 Martin 1986, p. 329 ; Buchwitz 2009, p. 359-369.

110Dans les dossiers concernant les travaux publics, la vérification de la conformité du bâtiment livré semble notamment avoir comporté des opérations de mesure425. Des personnels techniques, sur lesquels on ne dispose d’aucun renseignement, assistaient alors peut-être les questeurs.

111Des employés spécifiques, par ailleurs, réalisaient sans doute les panneaux annonçant la tenue de la licitatio et les clauses du cahier des charges. Un praeco devait intervenir pour proclamer oralement ces annonces, puis pour mener les enchères au jour dit.

112Enfin, la méthode suivie pour contraindre les propriétaires d’immeubles à remplir leurs obligations d’entretien de la voirie conduisait sans doute à utiliser un uiator pour leur notifier leur adtributio.

Les marchés publics qui donnaient lieu à une recette

  • 426 Val. Max. 2, 2, 8 ; Scheid 2005, p. 261-263.
  • 427 Les animaux destinés aux sacrifices faisaient l’objet d’une probatio qui pouvait parfois se placer (...)
  • 428 Mommsen 1889-1896, IV, p. 252 ; Pina Polo – Díaz Fernández 2019, p. 91. Garcia Morcillo 2005, p. 4 (...)
  • 429 Plaut. capt. 34, 110-111, 452-453.
  • 430 C’est du moins l’opinion de Talamanca 1955, p. 155-156, qui estime toutefois que l’allusion très g (...)

113Les adjudications qui aboutissaient à une entrée dans les caisses publiques, quant à elles, relevaient soit de l’administration ordinaire, soit d’opérations plus ponctuelles. La vente aux bouchers de la viande ou des peaux des animaux sacrifiés426 suivait sans doute systématiquement les sacrifices publics427. La régularité avec laquelle étaient tenues ces enchères amenait sans doute à ce que des liens se nouassent entre questeurs et gens de métier. T. Mommsen rangeait également dans les actes administratifs courants la vente du butin et des prisonniers de guerre ramenés à Rome428. Toutefois, on n’en a trace, dans les textes relatifs aux années 264-49 av. J.-C., que chez Plaute429, dans un contexte de fiction littéraire, et la pratique la plus commune consistait sans doute à vendre les prisonniers de guerre sur le théâtre des opérations430, et à rapporter à Rome le numéraire ainsi récolté.

  • 431 Pina Polo – Díaz Fernández 2019, p. 93.
  • 432 Liv. 28, 46, 4 ; Hyg. lim. grom. p. 115 La. = p. 82, l. 23-24 Campbell = 2, 23 Guillaumin ; contr. (...)
  • 433 Sacchi 2002, p. 77 et 83 ; Sacchi 2004, p. 200, 202, 207 et 210-211.
  • 434 Crawford 1996, I, n° 2, p. 118. Le texte, sans les restitutions, est le suivant :
  • 435 Mommsen 1905-1910, I, p. 118 ; Crawford 1996, I, p. 55. Les questions ouvertes sont en effet nombr (...)
  • 436 Le fait que la loi, l. 47, utilise l’expression magistratus Romanus suggère que plusieurs catégori (...)
  • 437 Lintott 1992, p. 262.

114Les uenditiones opérées plus ponctuellement par les questeurs concernaient en premier lieu les terres publiques431. La seule uenditio de portions d’ager quaestorius campanien432 qui soit précisément datée remonte à l’année 205 av. J.-C. O. Sacchi a vu dans ces terres un équivalent des trientabula et dans leur affermage un moyen, pour la cité romaine, de rembourser les créanciers qui lui avaient prêté de l’argent en 210433. Les lignes 43-48 de la loi agraire de 111 av. J.-C434., pour leur part, sont si lacunaires que les commentateurs ont le plus souvent jugé leur interprétation désespérée435. Si elles forment bien un ensemble, elles pourraient avoir eu trait à des assignations opérées dans le cadre d’une déduction coloniale (l. 43-44), puis à la passation d’un marché public portant sur des terres. Cette locatio était accompagnée d’écritures relatives à des sûretés, effectuées par un magistrat qui doit avoir été un questeur du Trésor (l. 46). Dans le cas envisagé par la loi agraire, rien n’assure que ce soit bien le questeur qui ait été investi de la tâche de procéder à l’affermage436, mais il semble qu’il ait supervisé les opérations plus proprement liées à la tenue des comptabilités publiques. Comme le suggérait A. Lintott437, le rapprochement des lignes 46 et 73 de la lex agraria incite à penser que le dépôt de sûretés s’appliquait tant que le paiement effectif n’avait pas eu lieu.

  • 438 Cic. Verr. II 1, 52 (adresse à Verrès) : Quid tum hos de te iudicaturos arbitratus es, cum uideren (...)
  • 439 Gaius inst. 4, 146 ; Ps. Ascon. Verr. II 1, 52 p. 236 St. et Verr. II 1, 61 p. 239 St. Rivière 201 (...)
  • 440 Alors qu’une réponse positive avait été donnée à cet égard par Klingmüller 1921, col. 982, Carrell (...)
  • 441 Carrelli 1938, p. 455 jugeait que la confiscation des biens du condamné faisait de l’Aerarium leur (...)
  • 442 Talamanca 1955, p. 161 et 172 et n. 2 ; Buongiorno 2016, p. 649-650.
  • 443 Salerno 1990, p. 190.
  • 444 Talamanca 1955, p. 173. Sur la procédure de vente des garanties fournies par les praedes, qui appa (...)

115Seule une allusion de Cicéron suggère que les questeurs s’occupaient des ventes de biens suivant une condamnation pénale438. Cicéron associe la figure du questeur à celle du sector, adjudicataire en bloc des biens alors mis aux enchères439. Les romanistes ont débattu de la position juridique de ce personnage, c’est-à-dire ont cherché d’une part à déterminer si l’acquisition du dominium ex iure Quiritium sur les biens du condamné entraînait automatiquement la transmission des créances et des dettes de ce dernier440, d’autre part à préciser les liens que le sector entretenait avec l’Aerarium441. Sur ce dernier point, M. Talamanca442 concluait que la sectio bonorum présentait l’avantage, pour les services du Trésor, de limiter le nombre des interlocuteurs auxquels ils avaient affaire. Il jugeait en outre que la revente des biens acquis par le sector était indispensable au versement de la somme qu’il devait à l’Aerarium : le sector, lorsqu’il avait remporté la licitatio, se limitait donc à donner des sûretés. En revanche, F. Salerno estima que comme dans les ventes aux enchères privées, le prix d’achat devait être réglé comptant443. M. Talamanca444 pensait en outre que la vente des garanties données par les praedes revenait également aux questeurs. Il me semble en tout cas qu’il est quelque peu imprudent d’étayer cette idée par le chapitre 64 des règlements d’Irni et de Malaca : d’une part, la lex Flauia traite du cas de municipes latins d’époque impériale, d’autre part, elle confie alors la mise aux enchères aux magistrats supérieurs, aussi bien au niveau local que dans le modèle romain qui sert de référence.

  • 445 Dans le cas des enchères concernant la viande : le règlement de Furfo (CIL IX, 3513) confiait en e (...)
  • 446 Les consuls, pour éventuellement la vente de la praeda et celle des terres publiques ; le préteur, (...)

116Quoi qu’il en soit, dans le cas des marchés publics qui occasionnaient une recette, les questeurs paraissent une nouvelle fois avoir agi soit comme relais des édiles445, soit sur ordre d’un magistrat à imperium, consul ou préteur446.

 

  • 447 Garcia Morcillo 2005, p. 48.
  • 448 Plu. Cato Mi. 36, 4 ; Morrell 2017, p. 120 ; Calvelli 2020, p. 213-229.
  • 449 Cf. Cic. dom. 52 et Sest. 57. Calvelli 2020, p. 220.

117Les textes sont muets sur la procédure suivie lors de la tenue des enchères questoriennes. M. Garcia Morcillo447 invoque donc l’épisode de la vente du Trésor royal de Chypre par Caton pour éclairer le rôle des questeurs et celui des personnels qui les assistaient. Plutarque448 fait état de la réalisation d’un inventaire des biens mis à l’encan, et souligne que Caton assista en personne aux opérations : sa présence n’était donc pas nécessairement requise. Le biographe mentionne également l’étroite surveillance que le magistrat exerça sur les employés et les hérauts. Il faut probablement comprendre que les scribae et les praecones étaient les appariteurs principalement impliqués dans les ventes publiques449. Les scribes établissaient la liste des objets mis aux enchères, relevaient le nom des adjudicataires et les prix atteints avant de reporter ces données dans les « registres », et délivraient sans doute une reconnaissance de paiement au moment du versement effectif des fonds. Le praeco, pour sa part, menait les enchères elles-mêmes.

Les interventions questoriennes en matière judiciaire

  • 450 Pernice 1873-1900, I, p. 351 ; Klingmüller 1921, col. 982 ; Carrelli 1938, p. 454 ; Scherillo 1953 (...)

118La vente des biens des condamnés portait sur des bona préalablement publicata450, ce qui amène à examiner le rôle joué par les questeurs dans la procédure de confiscation.

  • 451 La source principale de Tite Live sur l’épisode, Valerius Antias, situait le procès de l’Asiaticus (...)
  • 452 Lex repet., l. 56-58 = CIL I², 583 = Crawford 1996, I, n° 1, p. 71 : [de praedibus dandis bonisue (...)
  • 453 Sur la procédure, Mommsen 1907, III, p. 378-381.
  • 454 Liv. 38, 54, 3-38, 55, 13 (Val. Ant. 45 P. = 46 Chassignet = 46 Beck-Walter = 49 et 51 Cornell). L (...)
  • 455 Gell. 6, 19, 1-8. Bandelli 1972, p. 310 estimait que ces annales devaient avoir été rédigées peu a (...)
  • 456 Mommsen 1864-1879, II, 1879, p. 454 faisait du procès de L. Scipion le premier cas de répression d (...)
  • 457 Bandelli 1974-1975, p. 107.
  • 458 De Sanctis 1907-1957, IV/1, p. 595 ; Gagé 1953, p. 34-35 ; Gruen 1995, p. 76. Je ne vois cependant (...)
  • 459 Fraccaro 1956-1975, I, p. 310 ; Scullard 1951, p. 294 ; Bandelli 1972, p. 312.
  • 460 Liv. 38, 54, 3 formule l’acte d’accusation par pecunia capta ablata coacta ab rege Antiochos, ce q (...)
  • 461 Bauman 1983, p. 208-209.
  • 462 Santalucia 1998, p. 102, tout en jugeant le cas incertain, classe le tribunal qui jugea L. Scipion (...)

119Les textes concernant le procès de L. Cornelius Scipio Asiaticus, qui se tint en 187 ou 184/183 av. J.-C.451, ainsi que deux inscriptions datées de la fin du IIe siècle av. J.-C.452 indiquent que la non fourniture de praedes par un condamné entraînait la confiscation immédiate de son patrimoine au profit de la cité453. Au regard de la documentation épigraphique, la publicatio des biens était susceptible d’intervenir ou dans le cadre d’un procès devant une quaestio de repetundis, entre la condamnation et la litis aestimatio, ou à l’issue d’un procès récupératorien intenté au contrevenant à une loi. La nature du tribunal devant lequel L. Scipion fut traduit est pour sa part discutée. Deux versions concurrentes de la procédure ont été transmises par les sources, celle de Tite Live reprise à Valerius Antias454, et celle d’Aulu Gelle, empruntée à Cornelius Nepos et à travers lui à de ueteres annales455. Les historiens modernes ont privilégié l’une ou l’autre de ces traditions : Aulu Gelle inciterait à penser que Lucius avait dû affronter un procès tribunicien pour amende456 (suivi éventuellement d’une procédure récupératorienne destinée à assurer la restitution de la pecunia regia d’Antiochos457), Tite Live qu’une quaestio mise en place par un plébiscite aurait débouché sur un procès pour amende devant le concile458. À la suite de P. Fraccaro, qui voyait dans la quaestio citée par Antias un artifice stylistique destiné à éviter la narration de deux procès consécutifs devant le peuple, G. Bandelli459 a montré que l’annaliste avait reconstruit la procédure sur le modèle des quaestiones de repetundis postérieures460, ce qui contribuait à brouiller son récit. Toutefois, R. A. Bauman461 souligne a contrario que l’inclusion des subordonnés de L. Scipion parmi les accusés, incompatible avec la procédure de repetundis post-gracchienne, est attestée pour la quaestio Maeniana de 314 av. J.-C. En définitive, deux options semblent ouvertes : dans la mesure où Aulu Gelle pourrait se prévaloir de sources plus anciennes, le procès tribunicien pour amende ; d’autre part, la quaestio temporaire462.

  • 463 Fraccaro 1956-1975, I, p. 288, 377 et 402, qui est suivi par González Romanillos 2018, p. 251, ava (...)
  • 464 Liv. 38, 60, 1 : elle reposait sur une loi, un SC et une décision de justice.
  • 465 Liv. 38, 60, 3-4.
  • 466 Je ne comprends pas pourquoi Bandelli 1974-1975, p. 108 juge que la missio in bona est un élément (...)
  • 467 Les autres mentions de la confiscation des biens de Lucius se trouvent dans le fragment 63 de D.C. (...)
  • 468 Sur cette procédure, Betti 1942, I, p. 316-318, § 95 ; Salerno 1990, p. 164-166. La lex repetundar (...)
  • 469 L’intervention du préteur urbain dans ce contexte doit aussi s’expliquer par le fait qu’a priori, (...)
  • 470 On pense ici à un inventaire des biens publics.

120Le récit livien comme celui d’Aulu Gelle confortent en tout cas l’interprétation de T. Mommsen, suivant laquelle la déclaration de praedes ne fut exigée de Lucius qu’une fois la condamnation prononcée463. Le rappel par le préteur Terentius Culleo de la légitimité de la sanction patrimoniale infligée au consulaire464 et le fait que l’intercessio tribunicienne ne porta ensuite pas sur cette dernière, mais sur la pertinence de l’incarcération de Lucius465, suggèrent que la confiscation des biens pour non fourniture des praedes était considérée comme normale466. Concrètement, le texte de Tite Live467 est le seul à préciser que le préteur confiait la missio in bona468 aux questeurs. On peut imaginer que sur ordre prétorien469, ces magistrats s’appuyaient sur la professio que le condamné avait effectuée lors du dernier cens et qui donnait une estimation de sa fortune. L’enregistrement des bona sur les « registres publics »470 et leur proscriptio suffisaient-ils à acter la publicatio, ou bien les magistrats prenaient-ils concrètement possession des biens, par exemple en les faisant mettre sous scellés ? Quoi qu’il en soit, les appariteurs amenés à assister alors les questeurs du Trésor étaient les scribes, les employés chargés de la rédaction des documents destinés à l’affichage, les uiatores, et un praeco pour la proclamation des futures enchères.

 

  • 471 Liv. 33, 42, 4 (196 av. J.-C.) : quaestores ab auguribus pontificibusque quod stipendium per bellu (...)
  • 472 Rudorff 1859, II, p. 309, § 93.
  • 473 Dig. 48, 13, 11 (9), 6 (Paul, L. s. de iudic. publ.).
  • 474 Humbert 1886, I, p. 50.
  • 475 La manus iniectio était l’une des actions de la loi : elle était évoquée par Gell. 20, 1, 45 et Ga (...)
  • 476 Franchini, 2008, p. 354.

121Deux textes font par ailleurs allusion au travail accompli par les questeurs afin de recouvrer les arriérés dûs à l’Aerarium471. Leur formulation elliptique rend délicate la reconstitution de la procédure suivie. A. F. Rudorff472 tirait des passages du Digeste relatifs à la lex Iulia de peculatu473 l’idée que les débiteurs de l’Aerarium étaient passibles de saisie, prise de gage ou amende. Selon G. Humbert474, les questeurs pouvaient dans ce contexte recourir à la manus iniectio475. L. Franchini476 pense à un recours à la bonorum sectio.

  • 477 Plu. Cato Mi. 17, 6-7 ; D.C. 47, 6, 4 (lors de la proscription de 43 av. J.-C., les noms des meurt (...)
  • 478 Hinard 1985, p. 204-207.
  • 479 César aurait soit présidé cette quaestio, soit été accusateur devant elle : Suet. Iul. 11, 2. Drog (...)
  • 480 Mommsen 1889-1896, IV, p. 236 et 240-243.

122Un cas connexe apparaît dans la biographie plutarchéenne de Caton d’Utique477. En 64, Caton réclama la restitution au Trésor Public des praemia touchés par les meurtriers des proscrits syllaniens. Plutarque, qui reste imprécis sur le chef d’accusation, commence par évoquer la détention illégale d’argent public (17, 6), puis indique que les accusés furent condamnés pour assassinat (17, 7). Dion Cassius caractérise pour sa part l’activité de Caton par le verbe apètèse. Fr. Hinard478 jugeait que les assassins de proscrits furent poursuivis en deux temps, d’abord devant la quaestio de peculatu, ensuite devant la quaestio de sicariis479, qui dut s’appuyer sur la condamnation émanant de la première cour. Or, T. Mommsen480 soulignait que les questeurs urbains étaient exclus de la juridiction civile et qu’en matière criminelle, leurs activités ne sont attestées que pour la période antérieure aux XII Tables. Il serait donc envisageable que les magistrats responsables du Trésor aient vu leurs fonctions limitées à l’accusation, qu’ils intentaient peut-être comme l’aurait fait un priuatus

Les tabulae publicae à caractère financier

  • 481 Ps. Ascon. Verr. II 1, 11, p. 226 St. : Quaestores urbani aerarium curabant eiusque pecunias expen (...)
  • 482 Litterae (Vell. 2, 37, 5, pour un document susceptible d’avoir été rédigé par un questeur provinci (...)
  • 483 Torelli 1992, pl. IV.9-12.
  • 484 Mattingly 1936, III, p. 417, n° 1206.
  • 485 J. AJ 14, 221 indique que les décisions des consuls de 44 av. J.-C. concernant les Juifs devaient (...)

123Le troisième grand pan des activités questoriennes consistait dans la tenue des « registres comptables » publics481. Les sources littéraires désignent ces objets par les termes tabulae ou deltoi482. Au IIe siècle de notre ère, les reliefs communément appelés Anaglypha Traiani, dans la scène qui représente l’effacement des dettes envers les caisses publiques483, ainsi que quelques monnaies d’Hadrien qui commémorent vraisemblablement la même mesure484 montrent d’imposantes tabulae qui semblent être unies en diptyques485 et consolidées par une courroie horizontale centrale.

  • 486 Ps. Ascon. Verr. II 1, 11 p. 226 St. ; Cic. Font. 3 ; Plu. Cato Mi. 18, 7 ; Lex repet., l. 58 = CI (...)
  • 487 Cic. Font. 2, qui précise qu’elles étaient relatives ad ueteris aeris alieni rationem. On a donc c (...)
  • 488 Suet. Aug. 32, 4. Cf. Plu. Cato Mi. 17, 2.
  • 489 Tab. Heracl., l. 40-41 = CIL I², 593 = Crawford 1996, I, n° 24, p. 364.
  • 490 Si l’interprétation que nous avons proposée plus haut de l’expression pecunia facta est exacte.
  • 491 On peut peut-être déduire de Plu. Cato Mi. 17, 2 et 18, 5 l’existence de registres des créanciers (...)
  • 492 Par exemple, les tabulae dodrantariae et quadrantariae n’auraient concerné que les engagements ant (...)

124La nature des tabulae financières conservées à l’Aerarium, toutefois, est loin d’être claire. Les textes font état soit de « registres » en général486, soit de tabulae spécifiques – dodrantariae et quadrantariae487, ueterum aerari debitorum488, pecuniae factae489. Il y aurait donc eu différents recueils, qui auraient correspondu à des types d’opérations financières – sommes engagées (?)490, constitution de dettes (?) et créances publiques491 –, à des catégories d’interlocuteurs du Trésor, et éventuellement à des synthèses récapitulatives pour des périodes déterminées492. Deux questions se posent donc. Combien de « registres financiers » les locaux du Trésor Public abritaient-ils au total ? Comment la masse des documents annexes produits ou conservés à l’Aerarium était-elle classée respectivement à ces « registres » ?

« Livre de caisse », « livres de compte » et autres documents financiers

  • 493 La deuxième concernait les mouvements de fonds effectués par l’intermédiaire des banques.
  • 494 Ce dernier abritait également la caisse publique de la cité délienne.
  • 495 Migeotte 2014, p. 593-595. Ce système avait notamment pour avantage de contraindre à « l’équilibre (...)
  • 496 Cic. Verr. II 1, 36 ; Pis. 61.
  • 497 Lex repet., l. 69 = CIL I², 583 = Crawford 1996, I, n° 1, p. 72.
  • 498 Plin. nat. 33, 55-56.
  • 499 Pour le contenu des nomina, Fallu 1974, p. 42-43 ; Fallu 1979, p. 103. Voir également Thilo 1980, (...)
  • 500 Minaud 2005, p. 64-65, à partir de Cic. top. 16 et du Dig. 15, 1, 49, 2.
  • 501 Andreau 2007, p. 85 et 87.
  • 502 Cic. Font. 3 : res ipsa tamen ac ratio litterarum confectioque tabularum habet hanc uim ut ex acce (...)

125Le premier point concerne notamment la possibilité de distinguer un « livre de caisse » de « livres de comptes ». Les comptes épigraphiques du sanctuaire de Délos, dans la première moitié du IIe siècle av. J.-C., fournissent un éclairage sur la manière dont pouvaient éventuellement s’articuler les deux types de données. À Délos, la première section des comptes493 était présentée sous la forme d’un inventaire des jarres dans lesquelles était thésaurisé l’argent de la caisse sacrée conservée dans le sanctuaire494. Les vases correspondant à l’encaisse disponible en début d’exercice y étaient séparés des jarres de l’année en cours, où les revenus du sanctuaire étaient versés et où l’on puisait pour satisfaire aux dépenses nécessaires. Les comptes coïncidaient en pratique avec un relevé des étiquettes des vases, qui mentionnaient l’origine et le montant de la somme conservée, l’existence éventuelle d’un retrait, sa date et son importance. Il y avait donc un livre de caisse et un « grand livre »495. L’organisation des comptabilités publiques romaines reposait-elle sur des principes similaires ? La possibilité que les magistrats en poste à l’extérieur de Rome aient rendu un bilan mentionnant un reliquat sans reverser ce dernier à l’Aerarium496 suggère que les « registres comptables » du Trésor Public n’étaient pas strictement assimilables à un « livre de caisse ». A contrario, si la formule extra ordinem de la lex repetundarum497 signifie bien « non porté sur les registres comptables », elle implique que certaines sommes qui apparaissaient sur les étiquettes de fisci conservés à l’Aerarium ne se retrouvaient pas sur les tabulae publicae. Par conséquent, il semble que les comptes publics romains, tout en étant organisés de façon bien différente de ceux de Délos, incluaient et un « registre comptable » et un « livre de caisse ». Les données concernant le contenu du Trésor à différentes dates, transmises par l’Encyclopédie de Pline l’Ancien498, pourraient avoir été tirées de ce dernier « registre ». La nature du « registre comptable » principal est pour sa part difficile à préciser. É. Fallu499 avait estimé que les comptabilités publiques présentaient des similitudes structurelles avec le codex accepti et expensi tenu par les citoyens romains sui iuris : ce dernier était conçu non comme un livre de caisse, mais comme le relevé des obligations juridiques qui, en matière financière, unissaient le dominus à des tiers500. Toutefois, J. Andreau501 a objecté qu’aucune source ne nomme un « registre comptable » public codex ou tabulae accepti et expensi. Deux sources502, à propos des tabulae publicae des questeurs, utilisent les expressions accepta et data ou pecuniae expensae et acceptae, mais cela appuie-t-il la thèse d’É. Fallu ou indique-t-il seulement que l’on portait sur les « registres questoriens » des entrées et des sorties ?

  • 503 Plu. QR 42.
  • 504 C’est l’interprétation de Corbier 1974, p. 679. Mazzei 2009, p. 330 comprend quant à elle les cont (...)
  • 505 Le sens le plus fréquent de symbolaion semble être « un contrat concernant un prêt » (Lidell-Scott (...)
  • 506 Plu. QR 43 explique l’enregistrement des ambassadeurs étrangers au Trésor Public par les prestatio (...)
  • 507 Liv. 29, 37, 12 : cum in leges iurasset C. Claudius et in aerarium escendisset, inter nomina eorum (...)
  • 508 Ps. Ascon. div. in Caec. 8 p. 189 St. ; Liv. 4, 24, 7. Mommsen 1889-1896, IV, p. 72 ; Fraccaro 193 (...)
  • 509 Dans la section per quem de chaque item (voir infra, « L’organisation interne des tabulae »). La L (...)
  • 510 Cic. Pis. 61.

126Par ailleurs, à côté du « registre comptable » de la cité, il est envisageable que l’Aerarium ait abrité différents documents de synthèse. On trouve en effet parfois mention du fait qu’étaient conservés à l’Aerarium certains types de données, comme si elles y étaient regroupées thématiquement. Les chapitres des Questions romaines consacrés au temple de Saturne indiquent ainsi que les symbolaia y étaient archivés503. On peut comprendre par ce mot ou les contrats publics504, ou les documents attestant des obligations financières – dettes et créances – de la cité romaine505. La liste des ambassadeurs étrangers officiellement reçus à Rome506, quant à elle, ne constituait sans doute qu’une subdivision d’un probable recueil des créanciers de la cité. Le récit livien de la censure de 204 av. J.-C.507 suggère en outre que les censeurs, à l’issue de leur mandat, déposaient au Trésor Public une copie de la liste des citoyens qu’ils avaient faits aerarii. Dans la mesure où ces derniers étaient pénalisés par une majoration de leurs obligations fiscales508, ils apparaissaient peut-être sur le « registre » des débiteurs de l’Aerarium. Il est plus délicat de fixer si les praedes fournis par les condamnés ou les adjudicataires étaient cités au fil des différents dossiers509, ou si leurs noms étaient rassemblés dans un « registre » à part. Enfin, un passage du Contre Pison510 suggère qu’un scribe de l’Aerarium réalisait une copie conforme des rationes des gouverneurs de province à leur retour à Rome, mais on ne sait si ces documents rejoignaient un « fonds d’archives » spécifique ou si leur contenu était reporté dans le « registre comptable » principal de la cité romaine.

  • 511 On pense ici aux tabulae pecuniae factae et aux tabulae dodrantariae et quadrantariae, ainsi peut- (...)
  • 512 Par exemple, dans le « livre de caisse », l’inventaire du butin d’un magistrat devait correspondre (...)

127Au total, les archives financières de l’Vrbs pourraient n’avoir été composées que d’un nombre limité de tabulae : à côté des « registres questoriens » et d’un « livre de caisse », qui en constituaient les éléments essentiels, on n’aurait trouvé que des documents destinés à faciliter le fonctionnement pratique des services du Trésor, récapitulatifs des dossiers en cours511, contrats publics, catalogue des créanciers et des débiteurs de la cité, éventuellement des praedes. Il semblerait plus fonctionnel, dans ces derniers cas, de penser à des listes nominales alphabétiques. On ne sait comment étaient conservées les multiples autres pièces comptables dont nous avons supposé l’existence. Certaines devaient être recopiées dans les deux « registres » principaux comme pièces justificatives512.

L’organisation interne des tabulae

  • 513 Le débat porte en fait sur la hiérarchie des deux dimensions, chronologique et thématique : Purser (...)
  • 514 Humbert 1886, p. 47 ; Glautier 1972, p. 333 ; Thilo 1980, p. 180.
  • 515 Un nomen est un article qui correspond à une relation juridique d’obligation financière impliquant (...)
  • 516 Fallu 1974, p. 52-61 invoque deux principaux éléments en ce sens. D’une part, les sociétés de publ (...)
  • 517 On a pensé que comme les aduersaria étaient menstrua (Cic. Q. Rosc. 7), on les transcrivait pureme (...)
  • 518 Cic. Att. 2, 9, 1 = SB n° 29.
  • 519 Les occurrences de nomina citées par É. Fallu ne sont pas non plus déterminantes, car les textes e (...)
  • 520 Cic. Pis. 90, qui reproche à l’ancien gouverneur de Macédoine d’avoir falsifié ses comptes, évoque (...)
  • 521 Cic. fam. 2, 17, 4 = SB n° 117. On séparait donc les sommes votées par le Sénat et dont l’usage de (...)
  • 522 Le « praescriptum » du texte (Monum. Ephes., l. 1-7 = AE 2008, 1353 = Cottier et al.2008, p. 26-28 (...)
  • 523 Nicolet 1994b, p. 151.
  • 524 Cette hypothèse est proposée par Minaud 2005, p. 136-137 et 310, à partir notamment du dossier égy (...)
  • 525 C’est ce que suggèrent les quittances de la colonie de Pompéi à l’époque julio-claudienne, où la m (...)

128Eu égard au quasi silence des sources sur les comptabilités publiques, les modernes ont tenté de comprendre l’organisation interne des tabulae publicae par comparaison avec les documents privés, eux-mêmes reconstitués grâce aux allusions des sources littéraires. Deux hypothèses513 ont été avancées quant à la distribution générale de la matière à l’intérieur du « registre comptable » public, l’une chronologique, suivant l’ordre des opérations514, l’autre thématique, par nomina515, avec un sous-classement géographique, au moins pour les uectigalia516. Or, aucune de ces deux solutions ne paraît totalement satisfaisante. En effet, il n’est pas assuré que les comptabilités privées aient elles-mêmes été dressées de façon purement chronologique517. D’autre part, le passage de Cicéron518 qui montre que dans les rationes remises par les magistrats en poste dans les provinces, les gratifications formaient une rubrique distincte, ne suffit pas à prouver que tous les « registres comptables » publics étaient structurés thématiquement519. En effet, les comptes des magistrats étaient le produit d’un travail de synthèse qui tendait probablement à rassembler recettes et dépenses par postes520. En outre, le critère privilégié lorsque l’on distinguait les beneficia était peut-être la source d’obligation, puisqu’ils résultaient de la seule volonté du magistrat, non d’un SC. D’ailleurs, les mêmes rationes paraissent avoir séparé deux « entrées » en vertu de ce principe, les fonds remis au départ de Rome et la praeda, ce qui explique qu’à l’époque tardo-républicaine les questeurs aient administré les premiers, les préfets la seconde521. Les données du Monumentum Ephesenum, pour peu que la comparaison soit exploitable, ne permettent pas non plus, semble-t-il, de trancher entre l’hypothèse chronologique et l’hypothèse thématique522. Seul le fait que les archives de l’Aerarium semblent avoir été dans certains cas classées chronologiquement incite à penser que les « registres comptables » fonctionnaient sur le même principe523, mais il faut convenir que l’argument est ténu. Certes, l’option chronologique paraît a priori difficilement compatible avec la complexité de ce que devait être la gestion financière de la cité romaine tardo-républicaine. Toutefois, s’il faut bien penser l’organisation des comptabilités publiques sur le modèle des comptabilités privées, il est possible que les tabulae publicae questoriennes n’aient fait que centraliser l’essence des données financières dispersées entre les différentes archives de la Ville et les services des gouverneurs de province524. Prenons pour exemple la principale source de revenus de la cité romaine, les uectigalia provinciaux : il suffisait que figurât dans le « registre » des questeurs le montant versé annuellement par le manceps de telle société de publicains, avec un système de renvoi interne525 permettant de retrouver la lex locationis correspondante, soit dans la probable copie des contrats publics conservée à l’Aerarium, soit dans les tabulae censoriae.

  • 526 Arangio-Ruiz – Olivieri 1925, p. 80-127 ; Manganaro 1988, p. 155-190 ; Migeotte 2014, p. 79-81.
  • 527 Cic. Verr. II 1, 36 : accepi [...] uiciens ducenta triginta quinque milia quadringentos decem et s (...)
  • 528 Le travail de synthèse était patent dans le cas des comptes de Verrès, puisque le magistrat s’étai (...)
  • 529 Dans la mesure où il suppose que les tabulae publicae étaient organisées par nomina, Fallu 1974, p (...)
  • 530 Contrairement à ce qu’affirment Pina Polo – Díaz Fernández 2019, p. 87.

129On pourrait a priori tenter de reconstituer les règles de rédaction des « registres comptables » à partir des comptes épigraphiques connus aux IIe et Ier siècles av. J.-C. pour quelques cités grecques, notamment Délos et Tauromenion. À Tauromenion526, les comptes étaient « publiés » suivant une disposition en trois rubriques, esodoi, exodoi, loipon. Or, le bilan comptable rendu par Verrès à la fin de sa questure provinciale527 paraît avoir été structuré suivant des catégories identiques (accepi, dedi, reliqui). Toutefois, dans les deux cas, ces rationes étaient des bilans528 qui visaient à démontrer la qualité de la gestion des magistrats – appréciable à l’existence et au montant d’un reliquat, ainsi qu’à attester précisément de l’emploi des fonds publics529. Elles n’éclairent donc pas l’organisation de la matière dans les « registres comptables »530.

  • 531 Cic. S. Rosc. 74 : Pretium dedit. Cui dedit ? Per quem dedit ? Vnde aut quantum dedit ? Jouanique (...)
  • 532 Cic. Ver. II 2, 188 ; Dig. 1, 13, 1, 2 et 2, 13, 6, 6 ; Cic. Quinct. 17 ; Cic. fam. 5, 20, 6 = SB (...)
  • 533 Fallu 1973, p. 209-238, notamment p. 215-216 ; Fallu 1974, en particulier p. 42-48 et 246-295 ; Fa (...)
  • 534 Cette dernière était exprimée par ob. Par ailleurs, c’est dans cette section que les quittances de (...)
  • 535 Immédiatement après la date.

130Les spécialistes des comptabilités antiques ont utilisé un texte relatif aux comptabilités privées531, différents passages concernant les « registres » des publicains et les rationes des gouverneurs de provinces532 pour déterminer quelles informations figuraient dans les articles comptables, ainsi que leur ordre d’exposition533. Ils en ont conclu qu’on mentionnait le nom de la personne qui effectuait un paiement ou touchait de l’argent, éventuellement au nom de qui elle agissait, le montant de la somme et la motivation de l’opération534, peut-être la date, l’unité de compte et le iussum. P. Jouanique comme É. Fallu jugent que la donnée qui apparaissait en tête d’article535 était l’identification nominale du créancier ou du débiteur de la cité.

  • 536 Andreau 1974, p. 331-338 ; Hüttemann 2017, p. 19-20, 177-179, 181-183, 185-187, 189-191, 193-194, (...)
  • 537 Cic. Manil. 67 : classis.
  • 538 Crawford 1996, I, p. 118, n° 1, l. 46 ; Cic. ad Q. fr. 1, 3, 7 = SB n° 3.

131En pratique toutefois, il paraît plus sûr de ne prendre en considération que les données concernant les « registres comptables » urbains d’époque républicaine, en les croisant avec celles des quittances délivrées par les autorités pompéiennes au banquier L. Caecilius Iucundus536, puisque ces dernières constituent l’un des rares exemples de documents comptables publics se rapportant à une colonie romaine qui nous soient parvenus. Dans les sources littéraires et épigraphiques, le terme de nomen, au sens financier, semble renvoyer soit à la motivation du mouvement de fonds537, soit à l’interlocuteur du Trésor Public538. Les items des « registres comptables » publics devaient donc au moins faire mention de ces deux informations. Les quittances de la colonie de Pompéi, si leur formulaire reflète en quelque mesure celui des « registres publics » dont elles constituaient des extraits, citaient pour leur part d’abord la date de l’opération, puis le nom de l’esclave public qui l’effectua, la nature de l’acte financier, l’interlocuteur de la cité et son représentant éventuel, le montant de la somme en jeu, la motivation (avec rappel de l’existence d’éventuels paiements antérieurs, quand le versement se faisait par « tranches »), le iussum, le lieu et la date consulaire de rédaction de l’acte. L’évocation initiale des duovirs pourrait avoir eu une double fonction, chronologique – ce qui aurait permis de localiser l’opération dans les « registres publics » – mais aussi juridique, comme renvoi à la source d’obligation. Du coup, deux possibilités paraissent envisageables, celle d’une rédaction qui faisait figurer en tête le donneur d’ordre de la recette ou de la dépense, et celle d’une présentation rapportant chaque écriture à un employé public.

Le travail des employés publics

  • 539 SC, lois, édits, ainsi peut-être que leges locationis, listes des praedes et professiones.

132À la lumière de ces données, il faut, semble-t-il, distinguer deux volets dans le travail des scribes de l’Aerarium, selon que les documents qu’ils rédigeaient étaient destinés à usage interne ou aux interlocuteurs du Trésor. Dans le premier cas, certains employés publics pourraient avoir été affectés à la transcription pure et simple de documents établis par d’autres « services administratifs »539. Ce travail mécanique pouvait être confié à de simples copistes. La rédaction de l’item dans un « registre comptable » réclamait davantage d’expérience, puisqu’il fallait être capable d’extraire des pièces fournies les éléments correspondant aux différents points du formulaire. Peut-être confiait-on par conséquent cette tâche à des agents spécifiques.

  • 540 Plu. Cato Mi. 18, 9, s’il fait allusion à ce type d’actes, pourrait suggérer que ces copies s’effe (...)
  • 541 Mommsen 1889-1896, I, p. 400 ; Willems 1885, II, p. 218 ; Moatti 2007, p. 221 et n. 21. Voir, dans (...)
  • 542 Mommsen 1889-1896, VII, p. 201 jugeait que les traductions grecques de SC étaient élaborées sous l (...)
  • 543 Rowe 2008, p. 247.
  • 544 Par exemple Rhet. Her. 1, 21 ; Plin. nat. 33, 55-56 (qu’il est donc sans doute vain d’utiliser, co (...)
  • 545 Voir sur ce point les remarques de Minaud 2005, p. 179-197, pour les comptabilités privées.

133L’Aerarium délivrait en outre à ses interlocuteurs des quittances, des copies conformes de pièces comptables540 et des bilans. On a vu plus haut que les reconnaissances de paiement étaient l’apanage des sex primi. Peut-être faut-il en déduire que les mêmes agents s’occupaient de la liste des créanciers et débiteurs du Trésor Public. Certains documents officiels qui accordaient par exemple des immunités fiscales prévoyaient que les bénéficiaires pussent obtenir un duplicata auprès des services du Trésor541. On ne sait si les « bureaux » de l’Aerarium réalisaient dans ce cadre des traductions grecques, et donc s’ils employaient des personnels bilingues542. G. D. Rowe543, à partir des indications du Monumentum Ephesenum, estime que l’élaboration d’une « copie conforme » donnait lieu à une certification par un scribe puis à l’apposition de scellés sur l’exemplaire. Si la même procédure était en vigueur à l’époque républicaine, l’usage d’un sceau engageait la responsabilité des scribes les plus importants. Enfin, différentes sources544 suggèrent qu’à intervalles périodiques, on dressait un bilan de l’encaisse disponible, à l’intention du Sénat. Peut-être y avait-il des personnels spécialisés dans les opérations arithmétiques545, mais l’enjeu politique de telles synthèses requérait sans doute lui aussi l’intervention des sex primi.

Les tâches plus ponctuelles dont étaient investis les questeurs : accusations capitales, organisation de ludi et supervision de procédures administratives

134Enfin, les questeurs intentaient des procès, organisaient des jeux et supervisaient différentes procédures administratives.

  • 546 Santalucia 1998, p. 76-78. Les seules mentions concernent le procès évoqué par Varro ling. 6, 90 ( (...)
  • 547 Mommsen 1907, I, p. 178-179.
  • 548 Kunkel 1962, p. 35-36.
  • 549 Santalucia 1998, p. 78.
  • 550 Garofalo 1985, p. 413, n. 15.
  • 551 Thomas 1981, p. 663.

135Les activités judiciaires des questeurs sont très peu attestées à partir du IIIe siècle av. J.-C546. T. Mommsen547 avait fait de l’intervention du questeur dans les procès capitaux une conséquence de la prouocatio, qu’il concevait comme un appel. Selon lui, le magistrat supérieur qui avait énoncé la sentence en première instance déléguait le dossier à un subordonné, afin de ne pas risquer d’être désavoué par les comices. W. Kunkel548 affirmait pour sa part qu’on ne dispose d’aucune source permettant d’établir que les questeurs du Trésor étaient compétents en matière de meurtre, mais il négligeait les témoignages relatifs au procès de Q. Fabius Eburnus. B. Santalucia549 juge que les questeurs conservèrent à l’époque tardo-républicaine des attributions sur les causes capitales, mais qu’elles étaient limitées aux affaires de droit commun. Comme Varron ne précise pas quel était le chef d’accusation dans l’affaire de Trogus, mais qu’Orose emploie le terme parricidium pour désigner le crime d’Eburnus, L. Garofalo550 en déduit que les questeurs s’occupaient de parricidia, à comprendre au sens générique de « meurtres », alors que Y. Thomas551, à l’inverse, privilégiait un sens technique du terme. Dans la mesure où le procès d’Eburnus réprima l’exécution d’une sentence capitale qui avait été prononcée dans le cadre d’un jugement domestique, je me demande si l’intervention des questeurs ne fut pas suscitée, dans une perspective « antiquaire », pour réaffirmer la prééminence de la justice civique dans les causes engageant la vie d’un citoyen. Le rôle d’accusateur assumé par les questeurs dans les procès comitiaux n’aurait donc été qu’extrêmement épisodique et sans lien avec leurs attributions financières.

 

136En revanche, l’édition de jeux et les différents actes administratifs auxquels procédaient les questeurs sont susceptibles d’avoir eu une incidence sur l’Aerarium.

  • 552 Cic. Planc. 63. Voir également Cic. Att. 12, 2, 2 = SB n° 238.
  • 553 Mattingly 1956, p. 189-203, à partir du denier RRC 421, dont il restituait la légende en Pr(aenest (...)
  • 554 Veyne 1975, p. 89-92.
  • 555 Hölscher 1967, p. 146 et n. 915.
  • 556 La tentative de Mattingly 1956, p. 196, pour écarter cet argument en arguant de la réforme césarie (...)
  • 557 Rawson 1985, p. 109, sur la base du cognomen d’Atilius Praenestinus, acteur évoqué chez Térence.
  • 558 Vell. 2, 27, 6 indique en revanche que les ludi Victoriae de Sylla étaient des ludi circenses.
  • 559 Gonzalez Vazquez 2001, p. 890-899.

137Les questeurs – les seuls questeurs urbains ou l’ensemble des questeurs ? – organisaient, au Ier siècle avant notre ère, des jeux à Préneste552. H. B. Mattingly553 et à sa suite P. Veyne554 avaient vu dans ces ludi ceux instaurés par Sylla pour commémorer sa victoire sur les marianistes, mais cette idée a été critiquée par T. Hölscher555. De fait, la Lettre à Atticus qui évoque les jeux questoriens de Préneste indique qu’ils avaient lieu au printemps, alors que les ludi Victoriae de Sylla se tenaient à la fin octobre556. E. Rawson557 supposait pour sa part l’existence d’une tradition théâtrale ancienne à Préneste : les ludi qui y auraient été donnés auraient donc été scaenici558. L’organisation de ce type de cérémonies, dans la Rome républicaine, donnait lieu à la passation d’un contrat avec un auteur et une troupe559. A priori donc, les agents administratifs impliqués et la procédure suivie étaient identiques à ceux observés pour l’adjudication des marchés publics. Toutefois, on ignore comment étaient financés les jeux questoriens, et s’il ne s’agissait pas de manifestations purement évergétiques.

 

138Les tâches administratives assumées par les questeurs du Trésor consistaient quant à elles à recueillir le serment des responsables publics, peut-être à ventiler les jurés des quaestiones entre les différentes cours, et éventuellement à enregistrer les dénonciations.

  • 560 Mommsen 1889-1896, II, p. 292, suivi par Tibiletti 1953, p. 62-63 ; Gabba 1958, p. 103 ; Lintott 1 (...)
  • 561 App. BC 1, 137.
  • 562 Lex de prouinciis praetoriis, copie de Delphes, bloc C, l. 13 = Crawford 1996, I, n° 12, p. 243. C (...)

139Contrairement à ce que pensait T. Mommsen560, il n’est pas certain que la ligne 17 de la lex latina Bantina permette de conclure que les questeurs recueillaient le iusiurandum in legem des magistrats au temple des Castores. Le texte semble en effet faire allusion à deux serments différents, celui que tout magistrat prononçait à son entrée en fonction, qui devait présenter les caractères de publicité les plus manifestes et était donc probablement souscrit devant le sanctuaire des Dioscures, et le serment, fait devant les questeurs, de ne pas contrevenir à la loi tout juste votée. Si la procédure était bien identique pour les magistrats et les sénateurs, elle se tenait à l’Aerarium. D’ailleurs, Appien561, lorsqu’il évoque le iusiurandum de Marius à la lex Appuleia agraria, déclare que le consul prêta serment à l’aedes Saturni. La lex Bantina et la loi sur les provinces prétoriennes562 indiquent que les responsables publics juraient par Jupiter et les dieux Pénates, donc le dieu poliade et les divinités liées aux origines et à la pérennité de Rome.

  • 563  D.C. 39, 7, 4 : ἐγράψατο γὰρ αὐτὸν ὁ Μίλων καὶ οὐκ ἐσήγαγε μέν ῾οὔτε γὰρ οἱ ταμίαι, δι᾽ ὧν τὴν ἀπο (...)
  • 564 Cic. ad Q. fr. 2, 1, 2 = SB n° 5 (vers le 15 décembre 57) semble faire référence à l’affaire et su (...)
  • 565 Zumpt 1865-1869, II, p. 199-202.
  • 566 Cic. Cluent. 121.
  • 567 Greenidge 1901, p. 446 et n. 3.
  • 568 Cic. Verr. II 2, 79.
  • 569 Lengle 1933, p. 290-292. Shackleton-Bailey 1980, p. 172, à partir de Cic. ad Q. fr. 2, 1, 2 = SB n (...)
  • 570 Kunkel 1963, col. 753-754 = Kunkel 1974, p. 73, à partir de Cic. Planc. 36.
  • 571 C’était d’ailleurs déjà le cas pour les jurés de la Lex repet., l. 14 = CIL I², 583 = Crawford 199 (...)
  • 572 Cf. Cic. Phil. 5, 15.

140Le tirage au sort des jurés n’est attesté que par un passage de Dion Cassius563. En 57 av. J.-C., Milon ne serait pas parvenu à intenter à Clodius un procès de ui, en raison du calendrier politique et institutionnel. Comme les élections édiliciennes précédaient celles des questeurs, Clodius serait parvenu à acquérir l’immunité liée à l’exercice d’une magistrature, avant que n’entrassent en charge les nouveaux questeurs, qui devaient procéder à la sortitio des jurés564. A priori, il est difficile de déterminer si ce tirage au sort concernait toutes les quaestiones ou seulement la quaestio de ui. A. W. Zumpt565 pensait que Dion ne pouvait en tout cas faire allusion à la sortitio des jurés en vue du procès de Clodius, puisque cette opération avait probablement lieu dès le dépôt de l’accusation. Comme le Pro Cluentio566 indique que le préteur établissait chaque année l’album des jurés des quaestiones, il fallait également exclure l’hypothèse d’une implication des questeurs dans la rédaction de cette liste générale. A. W. Zumpt en concluait que les questeurs élaboraient, en s’appuyant sur les données du cens, un document préparatoire qui rassemblait les noms des citoyens répondant aux qualifications censitaires requises pour siéger dans une quaestio, puis qu’ils transmettaient au préteur une liste resserrée résultant d’un tirage au sort : le préteur dressait ensuite l’album sur cette base. Toutefois, cette reconstruction complexe ne repose sur aucune source. A. H. J. Greenidge567, de son côté, hésitait entre plusieurs solutions, celle d’A. W. Zumpt, une erreur de Dion Cassius, et l’idée que les questeurs répartissaient, par tirage au sort, les jurés entre des décuries. Il supposait ainsi qu’en dépit de l’introduction par la loi Aurelia de trois grandes décuries de iudices (sénateurs, chevaliers et tribuni aerarii), la ventilation des jurés entre des unités fonctionnelles elles aussi appellées decuriae, attestée dans la législation syllanienne568, avait perduré. À ma connaissance cependant, rien n’assure qu’après 70 av. J.-C., le terme décurie ait désigné autre chose que les trois ordres de iudices. J. Lengle569 pensait quant à lui que les questeurs ventilaient, sous l’autorité du préteur, les jurés de l’album entre les différentes quaestiones. W. Kunkel570 a suggéré qu’après le vote de la loi Aurelia, l’album des jurés fut peut-être structuré par tribus571, chacune regroupant un nombre égal de sénateurs, chevaliers et tribuni aerarii : les questeurs intervenaient donc peut-être pour affecter par tirage au sort telles tribus à telle quaestio. Quoi qu’il en soit, une nouvelle fois, les magistrats responsables de l’Aerarium s’appuyaient probablement sur les scribes pour ce tirage au sort. Il faut par ailleurs déduire de ce qui précède que l’album des jurés des quaestiones, ainsi que la composition des différentes cours, étaient conservés au Trésor Public572.

  • 573 Suet. Iul. 17, 1-2.
  • 574 Sur ce personnage, Gundel 1958, n° 6, col. 1844-1850.
  • 575 Cerami 1998, p. 178-179 ; Russo Ruggeri 2011, p. 76-78.
  • 576 Cerami 1998, p. 177.
  • 577 Münzer 1936, n° 12, col. 1218.
  • 578 En outre, les manuscrits ne montrent pas de variante à cet endroit.

141Par ailleurs, Suétone573 affirme qu’en 63 av. J.-C., César fut dénoncé comme complice de Catilina, devant le quaestor Novius Niger, par l’index L. Vettius574. Selon P. Cerami, la qualification de maiestas retenue contre les Catiliniens expliquerait l’intervention d’indices : le modèle suivi aurait été celui de la quaestio syllanienne de maiestate, dont la loi constitutive prévoyait le recours aux dénonciateurs575. Or, aussi bien dans les quaestiones ex SC que dans les quaestiones perpetuae, la vérification de la recevabilité des dénonciations paraît être revenue au président de la cour576. Cette tâche ayant été assumée de facto par Cicéron, l’hypothèse de F. Münzer577, qui proposait de faire de Novius Niger non un quaestor, mais un quaesitor, semble difficilement tenable578. On voit donc mal quel rôle pourrait avoir joué un questeur dans la procédure de 63 av. J.-C., à moins qu’il n’ait été chargé par le consul d’une première phase de réception des dénonciateurs, peut-être parce qu’il était également prévu qu’ils reçoivent un praemium. À ce titre, ils avaient à être inscrits au nombre des créanciers du Trésor Public.

  • 579 Voir introduction, « Le Trésor de la mémoire publique ». 
  • 580 App. BC 1, 131 ; Lex de prouinciis praetoriis, copie de Delphes, bloc C, l. 21 = Crawford 1996, I, (...)

142Deux possibilités, d’ailleurs compatibles, sont en définitive envisageables : les tâches confiées aux questeurs découlaient ou de leurs attributions de gardiens des archives civiques579, ou d’administrateurs du Trésor. Dans le premier cas, il faudrait penser que la liste des individus qui avaient prêté serment à une loi constituait peut-être une sorte d’annexe au texte législatif déposé à l’Aerarium, ou, pour les généraux, que la mention du iusiurandum figurait dans le SC qui leur accordait le triomphe. Toutefois, dans la mesure où le refus de prêter serment était sanctionné entre autres par une amende580, on peut aussi estimer que les questeurs étaient chargés d’inscrire automatiquement les récalcitrants sur la liste des débiteurs de l’Aerarium. Quoi qu’il en soit, les agents administratifs qui assistaient alors les magistrats devaient être les scribes.

 

  • 581 Cette image des questeurs découle notamment de Plu. Cato Mi. 16, 3, mais elle vise à dessiner en c (...)

143Au total, l’apparente diversité des attributions questoriennes se ramène en fait à la gestion d’un service de caisse, dans ses trois composantes principales, surveillance des fonds publics, supervision des encaissements et décaissements, tenue des « registres comptables ». Les autres opérations auxquelles procédaient les questeurs, et qui avaient des incidences sur l’Aerarium, demeuraient ponctuelles : le quaestor agissait alors soit comme l’exécutant de l’ordre d’un magistrat supérieur, soit comme son remplaçant. Du coup, la compétence des magistrats qui se trouvaient à la tête de l’Aerarium paraît n’avoir eu qu’une importance relative. L’historiographie du XIXe siècle avait construit l’image d’une administration supervisée à la fois par les édiles curules et les questeurs et souligné le paradoxe qui consistait à confier les finances civiques à des jeunes gens dépourvus de toute expérience581. En fait, rien n’assure que les édiles curules contribuaient à la surveillance des archives de l’Aerarium et l’on peut inférer notamment de la Table d’Héraclée qu’ils n’avaient pas pouvoir de faire enregistrer des données sur les « registres comptables ». Les magistrats placés à la tête de l’Aerarium étaient donc bien identifiés et, dans leur mission essentielle, non exposés aux empiètements d’autres responsables publics de même rang. De plus, les actes relevant des questeurs étaient somme toute peu nombreux, les procédures répétitives et la marge d’initiative laissée à ces jeunes gens très limitée. Ils avaient apparemment toute latitude pour superviser la vente aux enchères de la viande des sacrifices, mais aucune liberté dans la rédaction du cahier des charges des marchés publics, et bien souvent n’avaient qu’à exécuter l’ordre d’un magistrat supérieur, auquel ils pouvaient se référer en cas de besoin.

144Ainsi, les services du Trésor Public n’étaient pas nécessairement très étoffés, la coopération avec Moneta ou les sociétés de publicains permettant de déléguer certaines tâches techniques comme la vérification et le comptage du numéraire entrant. En pratique, l’essentiel des activités des agents de l’Aerarium devait tourner autour de la rédaction des comptabilités publiques, ce qui permet de définir le Trésor Public romain comme un service comptable. L’Aerarium se caractérisait comme une institution fermée aux simples citoyens, dont le personnel était structuré hiérarchiquement, et dont le travail s’organisait apparemment suivant des règles de procédure, puisque l’accès aux services était conditionné par la délivrance de documents officiels et que les « registres comptables » respectaient un formulaire précis.

3. Trésor Public et « rationalité administrative »

145Dès lors, dans quelle mesure peut-on conclure que l’architecture des « bureaux » du Trésor Public répondait à la définition wébérienne de la « rationalité administrative » et permettait de remplir efficacement les tâches qui lui étaient confiées ?

Le Trésor Public républicain peut-il être qualifié d’administration ?

146Les règles qui régissaient la structuration des services de l’Aerarium autorisent bien, semble-t-il, à les qualifier d’« administration », c’est-à-dire à considérer qu’ils correspondent aux principaux critères wébériens de « l’organisation rationnelle ». En effet, les éléments réunis jusqu’à présent amènent à penser que le fonctionnement du Trésor Public républicain exprimait une tendance à la centralisation, à l’émergence d’une sphère publique et, dans une certaine mesure, à la reconnaissance de la notion de compétence comme fondement de la hiérarchie administrative. Toutefois, il faut reconnaître que cette évolution demeura inaboutie. L’administration républicaine des finances publiques paraît, du coup, n’avoir coïncidé ni avec le modèle wébérien de « l’administration patrimoniale », ni avec celui de la « bureaucratie ».

 

  • 582 Dont l’une, l’Aerarium Sanctius, n’était animée que par des mouvements de fonds très simples (en g (...)
  • 583 Notamment, par le biais de la rédaction de documents de synthèse, favoriser le suivi des dossiers (...)
  • 584 Par exemple l’affichage de certains documents, tel qu’on l’observe dans la Lex repetundarum.

147Si la reconstruction des « registres publics » que nous avons proposée est recevable, elle implique que le Trésor était pensé comme une entité destinée à synthétiser les données administratives et comptables produites par d’autres services, notamment ceux de la Monnaie, des censeurs, des édiles et des magistrats en poste dans les provinces. La concentration des activités de l’Aerarium autour de deux caisses au plus582 contribuait à renforcer ce caractère de centralité. Ceci implique que pour fonctionner, les différentes composantes du système devaient recourir à des échanges d’informations et donc de documents, sous la forme de lettres, de bilans comptables fournis par les gouverneurs à la fin de leur mandat et de copies conformes de certaines pièces. L’impression qui domine est que le Trésor Public avait besoin de produire et de réceptionner un nombre conséquent de pièces administratives pour assurer le bon déroulement de ses relations avec les magistrats supérieurs et le Sénat, faciliter son propre fonctionnement583 et se mettre en conformité avec la loi584.

  • 585 Le consensus des historiens s’est établi sur l’idée d’une perpétuation des appariteurs dans leurs (...)
  • 586 Nicolet 1979b, p. 80 = Nicolet 2000, p. 303.
  • 587 Hi qui sunt ex collegio sex primorum, habent a tutelis excusationem, sed non simpliciter, sed post (...)
  • 588 Suet. Dom. 9, 6 : Scribas quaestorios negotiantis ex consuetudine sed contra Clodiam legem uenia i (...)
  • 589 Rotondi 1912, p. 288, suggérait de rapporter la loi au tribunat de P. Clodius Pulcher. Il est suiv (...)
  • 590 Mommsen 1889-1896, I, p. 385, n. 2.
  • 591 Ou d’éviter les ententes entre personnels administratifs et priuati qui avaient affaire aux servic (...)
  • 592 Si l’on prend pour point de comparaison la Lex Vrsonensis, ch. 62 = Crawford 1996, I, n° 25, p. 40 (...)
  • 593 Badian 1989, p. 599 avait noté que 20 des 27 gentilices portés par les scribes connus pour l’époqu (...)
  • 594 Mommsen, ap. CIL, I, 202, p. 110 ; Mommsen 1848, p. 8 ; Mommsen 1889-1896, I, p. 387 ; Mommsen 190 (...)
  • 595 Varvaro 1995, p. 582.
  • 596 Par contrecoup, on doit écarter l’hypothèse mommsénienne suivant laquelle les questeurs tiraient a (...)
  • 597 Varvaro 1995, p. 586.

148Par ailleurs, l’organisation interne du Trésor témoignait d’une volonté de séparer la sphère publique des relations inter-personnelles. L’administration, au sens large, de l’Aerarium présentait un caractère de permanence585, y compris en ce qui concernait les publicains, puisque l’appellation géographique des grandes sociétés suggère qu’elles étaient reconduites d’un lustre sur l’autre586. Le Fragment 124 du Vatican587 montre que les pouvoirs publics souhaitaient réserver l’activité des sex primi à la cité, en les exemptant des tutelles. En outre, une lex Clodia588à la chronologie il est vrai incertaine589 – interdisait aux scribes questoriens de negotiari. T. Mommsen pensait que cette mesure concernait exclusivement les scribes des questeurs provinciaux590, mais l’objectif du législateur pourrait avoir été plus largement d’obliger les scribes à se consacrer exclusivement à leur tâche591. Qui plus est, les agents de l’administration financière travaillaient dans des lieux publics et le plus souvent avec des moyens qui ne leur appartenaient pas en propre. Par ailleurs, la rémunération des apparitores était acquittée sur fonds publics et son montant probablement fixé par la loi592. Au moins à partir de l’époque syllanienne, leur travail ne dépendait pas de relations personnelles avec les responsables publics, ce qui leur assurait un certain degré d’indépendance. En effet, s’il est vraisemblable que les relations de patronat infléchissaient la lectio des appariteurs593, la lex Cornelia de XX quaestoribus prévoyait que ces agents ne prendraient leurs fonctions que trois ans plus tard : ils serviraient donc des questeurs avec lesquels ils n’avaient aucun lien594. En outre, la nomination des appariteurs est apparemment rapportée par la loi Cornelia au collège questorien dans son ensemble595 : il faut sans doute y voir une volonté d’obtenir un consensus des magistrats sur le choix des personnels administratifs596. Enfin, les l. 14-18 de la 2e colonne du texte veillaient à ce que la sélection des appariteurs ne fût à l’avenir infléchie par aucun privilège ou mesure de favoritisme597.

  • 598 David 2007, p. 48 ; David 2012, p. 278 ; David 2019, p. 112 et 114 suppose que l’acquisition de co (...)
  • 599 Plu. Cato Mi. 16, 4-5.
  • 600 Ce point dépend du lieu où étaient effectuées les traductions grecques des documents officiels. Ci (...)
  • 601 S’il faut bien comprendre en ce sens la rhadiourgia de Plu. Cato Mi. 16, 5 (Fezzi 2003, p. 52). Su (...)
  • 602 Mommsen 1889-1896, I, p. 388-389, n. 5, suivi par Cohen 1984, p. 44 et David 2012, p. 273 et n. 74

149Les citoyens qui travaillaient dans les locaux du Trésor constituaient un groupe hiérarchiquement organisé en fonction, semble-t-il, de leurs compétences. Certes, la qualité des employés de l’Aerarium est difficile à apprécier, puisqu’on ignore comment ils étaient formés598. L’image qui ressort de la biographie plutarchéenne de Caton d’Utique est dans l’ensemble négative, appuyant sur les erreurs dues à l’inexpérience, la malhonnêteté et l’indiscipline des scribes599, mais la validité d’un tableau qui tend à démontrer la supériorité ontologique du magistrat sur ses subordonnés paraît problématique. En revanche, il est sûr que les personnels se répartissaient en unités nommées décuries qui correspondaient à des types de fonctions, uiatores, hérauts et scribes. Ce que l’on sait des scribes, qui formaient l’essentiel des effectifs, permet de supposer qu’existaient différents degrés de spécialisation (personnels qui réalisaient les documents destinés à l’affichage ; simples copistes ; agents confirmés, capables de transcrire dans les tabulae publicae, en respectant les règles formulaires, la teneur des pièces comptables ou de rédiger, à partir de « registres » sans doute ordonnancés chronologiquement, des documents récapitulatifs thématiques) et peut-être de compétences linguistiques600. L’appartenance aux degrés supérieurs de que l’on pourrait anachroniquement qualifier d’« organigramme » de l’Aerarium se manifestait par la possession d’un sceau et se traduisait dans la capacité exclusive d’agir avec les interlocuteurs extérieurs à l’institution. Il était par conséquent possible d’identifier les auteurs des actes administratifs les plus importants et de les contrôler. La répression des actions illicites des agents n’est documentée que dans les cas de falsification de documents publics601. Plutarque ne s’attarde pas sur le détail de la procédure alors suivie : T. Mommsen pensait qu’elle avait un caractère disciplinaire602.

 

  • 603 Le parcours de Cornelius Surus (AE 1959, 147 = 1968, 33 = 1987, 67) illustrerait ce point : dans l (...)
  • 604 David 2012, p. 276.
  • 605 Voir les notices prosopographiques que leur a consacrées Nicolet 1966-1974, II, n° 10, p. 762-765 (...)
  • 606 Badian 1989, p. 601 notait à juste titre que l’usage d’acheter une place dans une décurie constitu (...)
  • 607 Maganzani 2002a, p. 161-215.

150En revanche, sur d’autres points, l’évolution de la Rome républicaine vers la « rationalité administrative » resta de toute évidence inachevée. Les membres des ordines étaient souvent qualifiés pour plusieurs attributions, notamment la participation aux jurys des quaestiones : ils ne se consacraient par conséquent qu’en partie à l’administration des finances publiques603. Les societates publicorum utilisaient leurs propres moyens, recrutaient et rémunéraient leurs personnels à leur convenance. Au siège de l’Aerarium, la sélection des agents de l’administration financière ne répondit jamais à des procédures complètement abstraites. L’obligation faite aux questeurs d’accepter les « remplaçants » présentés par leurs appariteurs faisait que le recrutement des employés publics finissait, dans une proportion qu’il est difficile d’apprécier, par échapper aux magistrats et à la loi, pour revenir aux personnels eux-mêmes. On ne sait dans quelle mesure les relations clientélaires, à la faveur de telles opérations, jouaient à nouveau604. L’attribution des marchés publics concernant la perception fiscale dans les provinces, qui qualifiait les membres de l’ordo publicanorum, pourrait avoir été entachée de collusions. La majorité des personnages désignés par les sources comme manceps, auctor ou magister d’une société avait en effet des liens de parenté avec des sénateurs605, même si l’on ne peut établir de rapport direct avec les responsables publics qui procédèrent à l’adjudication les concernant. Par ailleurs, la compétence ne paraît pas avoir été prise en considération dans la sélection des tribuni aerarii et des publicains : la qualification censitaire et la dignité primaient pour l’exercice des responsabilités au sein des ordines606. Enfin, le contrôle des agents administratifs n’était, pour autant qu’on puisse le déterminer, pas systématiquement effectué « en interne », et les procédures utilisables à cette fin très limitées. La poursuite des éventuels manquements des tribuni aerarii ou des employés des sociétés de publicains était laissée à l’initiative des personnes lésées607, et la voie judiciaire pratiquement la seule ouverte.

 

  • 608 De ce point de vue, l’administration impériale pourrait apparaître comme une forme de régression p (...)

151En définitive, les services de l’Aerarium, en l’état de nos connaissances, ne présentent pas les caractéristiques qui permettraient de les qualifier d’« administration patrimoniale » : les esclaves y demeurent invisibles ; les agents n’y portaient pas de titres empruntés au fonctionnement d’une maison privée608 ; le poids des relations personnelles et de l’arbitraire dans la prise de décision paraît avoir été l’objet de tentatives d’encadrement par la loi. Si l’administration du Trésor Public conservait des traits imparfaits, c’est parce qu’elle respectait le principe constitutif de la société politique romaine, sa dimension censitaire, qui contrevenait directement à l’octroi des responsabilités sur un critère exclusif de compétence, et parce que le comportement des élites sénatoriales laissait de toute évidence à désirer.

L’efficacité des services financiers

  • 609 Weber 2005, p. 185. La question de la « performance » est également posée par Nicolet 1994a, p. XV

152L’agencement des services de l’Aerarium garantissait-il leur efficacité, c’est-à-dire, pour reprendre une nouvelle fois les critères wébériens609, une exécution précise des tâches nécessaires, en un temps raisonnable et en proportionnant les moyens aux fins recherchées ?

  • 610 Cic. off. 3, 90 cite une série de questions envisagées dans le Livre des devoirs d’Hécaton, dont l (...)
  • 611 Il est difficile de fixer si les « mauvaises actions » des scribes évoquées par Plu. Cato Mi. 16, (...)
  • 612 Liv. 30, 39, 7.
  • 613 Plu. Cato Mi. 18, 9.
  • 614 Humbert 1886, I, p. 47-48.
  • 615 Contra Pina Polo – Díaz Fernández 2019, p. 89, n. 63 et Díaz Fernández – Pina Polo 2021, p. 51 et (...)
  • 616 Dig. 44, 3, 13 (Hermog.), à propos de la possibilité de se retourner contre qui a administré des f (...)
  • 617 Cic. leg. 3, 46.
  • 618 Volterra 1969, p. 31 relevait que les références internes très précises à des SC, présentes dans c (...)

153Si l’on tente d’apprécier la capacité des services du Trésor à remplir des missions qui tenaient essentiellement à la conservation des fonds publics et des archives civiques, au bon fonctionnement de l’arca publica ainsi qu’à la tenue des « registres comptables », on doit commencer par envisager si la sûreté des valeurs conservées à l’Aerarium était correctement assurée610. À ma connaissance, un seul épisode611, celui des appariteurs de 202/201 av. J.-C.612, fait état d’un vol accompli dans les locaux du Trésor, et il n’est pas indifférent que les coupables aient été des employés de la cité, donc des personnes susceptibles d’accéder aux bâtiments. L’efficacité de la conservation des archives demeure une question plus ouverte. Le passage de la Vie de Caton d’Utique613 qui évoque l’achat par ce dernier des documents comptables publics couvrant les années 81-64 av. J.-C. fait-il allusion à la réalisation de duplicata ou à la possibilité d’acquérir des « registres » qui sans cela auraient été destinés au rebut614 ? La première hypothèse me paraît plus crédible au regard du terme utilisé pour désigner ces pièces, biblia615. Quoi qu’il en soit, le texte de Plutarque témoigne du fait que les tabulae publicae étaient gardées à l’Aerarium pendant au moins dix-sept ans. Indirectement, une entrée du Digeste évoque de son côté une durée de vingt ans616. On ne sait par ailleurs s’il était aisé de retrouver un document dans les archives de l’Aerarium. Une réflexion désabusée de Cicéron, qui se rapporte aux lois617, suggère que non. Toutefois, le principe de classement des SC par années et mois semblerait a priori assez efficace618, si les tabulae portaient une mention externe permettant de les identifier : il suffisait de connaître la date d’un acte pour le localiser. En outre, les documents de synthèse nominaux constituaient sans doute une aide non négligeable en cas de besoin. Tout dépendait, en fait, de la rigueur du rangement matériel des « registres », sur laquelle on ne dispose d’aucun renseignement.

  • 619 J’ai bien conscience que cette conception de l’usage des comptabilités publiques est moderne, mais (...)
  • 620 Plin. nat. 33, 55-56 et Rhet. Her. 1, 21. Comme le laisse entendre la Rhet. Her., les allusions au (...)
  • 621 Voir les tabulae dodrantariae et quadrantariae et le travail effectué par Caton en 64 av. J.-C. po (...)

154Dans quelle mesure, par ailleurs, les archives comptables pouvaient-elles être utilisées comme des instruments de prévision et de prise de décision619 ? On trouve trace à différentes reprises d’un bilan de l’encaisse dressé par les questeurs620. S’il y avait bien un « livre de caisse », l’opération ne présentait pas de difficulté particulière. En revanche, la constitution d’un bilan à partir du « registre comptable » public se révélait une tâche plus complexe, puisque chaque item avait une date d’extinction différente. On a témoignage de mises à jour périodiques du « registre comptable public »621 qui doivent indirectement avoir créé les conditions nécessaires à la réalisation d’un tel bilan, mais ces entreprises ne sont, avant l’époque augustéenne, attestées qu’en 86 et 64 av. J.-C. Somme toute, il devait être assez simple d’établir si l’on pouvait financer une dépense ponctuelle immédiate, mais délicat de prévoir les disponibilités du Trésor à moyen et long terme.

  • 622 Pour le non-paiement des redemptores, Nicolet 1963, p. 419, 422 et 426 ; Andreau 2006, p. 104. Pou (...)
  • 623 Plu. Cato Mi. 17, 2.
  • 624 Plu. Cato Mi. 17, 2.
  • 625 Lex repet., l. 67 = CIL I², 583 = Crawford 1996, I, n° 1, p. 72.
  • 626 Ou éventuellement, au cas où une société de publicains n’aurait pas versé ce qu’elle devait, à l’e (...)
  • 627 Plu. Cato Mi. 17, 3 et 18, 4-8, à propos de l’enregistrement de créances de particuliers sur le Tr (...)

155D’autre part, dans leurs activités de manipulation des fonds publics, les services de l’Aerarium parvenaient-ils à s’acquitter des engagements pris envers leurs interlocuteurs, à garantir l’effectivité des versements en leur propre faveur, et à se protéger des malversations ? Sur le premier point, si l’on met à part les circonstances exceptionnelles de la deuxième Guerre punique622, la Vie de Caton d’Utique623 donne l’image d’une négligence ou d’une lenteur administrative qui amenaient les citoyens à désespérer d’obtenir leur dû du Trésor. Le contrôle des valeurs métalliques à leur entrée dans les caisses publiques garantissait en tout cas ensuite aux bénéficiaires d’un paiement la qualité du numéraire qui leur était versé, ce qui suggère que les autorités se souciaient au moins de la fides publica. En outre, l’Aerarium, toujours d’après la biographie de Caton d’Utique, éprouvait des difficultés à faire rentrer ses créances624. En témoigne également la lex repetundarum625, qui en cas de défaut d’un condamné impose au questeur de se retourner immédiatement contre les praedes. De fait, pour se faire payer ce qu’on lui devait, le Trésor n’avait d’autre recours qu’une procédure judiciaire initiée par les questeurs626. Ceci explique probablement que les services de l’Aerarium aient communément exigé des sûretés personnelles et réelles, qui leur donnaient un meilleur niveau de garanties et au pire la possibilité de se rembourser. Enfin, les abus au détriment du Trésor Public sont décrits par Plutarque comme un phénomène courant627, d’autant plus préoccupant qu’il émanait de sénateurs influents ou de magistrats supérieurs qui exerçaient des pressions sur les questeurs. Le tableau ainsi dessiné suggère que les services de l’Aerarium se montraient plus efficaces dans leurs activités de custodia que de manipulation des deniers publics, et, une nouvelle fois, que les failles de l’administration financière romaine étaient en bonne part liées au comportement des acteurs eux-mêmes, en particulier les membres des cercles sénatoriaux.

  • 628 Plu. Cato Mi. 17, 2.
  • 629 Cic. Att. 2, 6, 2 (= SB n° 26, avril 59) et Att. 2, 16, 4 (= SB n° 36, fin avril ou début mai 59). (...)
  • 630 Lex repet., l. 61-63 = CIL I², 583 = Crawford 1996, I, n° 1, p. 71. De plus, la loi exigeait de ch (...)

156La célérité des « bureaux » du Trésor semble, quant à elle, avoir été limitée. À côté de la Vie de Caton d’Utique628 déjà citée, la correspondance de Cicéron629, dans l’affaire de la somme attendue par Quintus, laisse également entendre que les courriers adressés aux questeurs pouvaient rester longtemps sans réponse. A contrario, la lex repetundarum630 témoigne d’une volonté de garantir les paiements dans des délais très resserrés, mais il est vrai que l’argent dont il s’agissait ne relevait pas à proprement parler de la pecunia publica. Dans la mesure où les intentions des acteurs historiques nous échappent, on ne peut en définitive établir si cette « inefficacité » de l’Aerarium résultait d’un défaut d’organisation ou d’une stratégie visant à faire passer les intérêts du Trésor avant ceux de ses interlocuteurs.

  • 631 On ne pouvait accéder aux services de l’Aerarium que sur SC ou convocation d’un magistrat ; les ci (...)
  • 632 Vérification des espèces, frappe des monnaies.
  • 633 Voir la permutatio et le collybus perçu lors des opérations de change.

157Enfin, l’adaptation des moyens du Trésor aux fins que ses services se proposaient d’atteindre paraît avoir été relativement satisfaisante. Le nombre des agents de l’Aerarium, qui a été invoqué comme un argument décisif démontrant la faiblesse de l’administration républicaine, demeure en fait impossible à fixer. Toutefois, l’agencement des services du Trésor devait permettre de pallier une éventuelle insuffisance en personnel. Différents indices laissent croire que l’Aerarium n’était pas accessible aux individus non habilités631, ce qui constituait un moyen somme toute efficace de diminuer la masse de travail de ses agents ; le Trésor Public romain n’exerçait pas certaines activités attestées dans les cités grecques, comme celle de banque publique ; la coopération avec d’autres entités, notamment Moneta et les societates publicorum, permettait de leur déléguer certaines opérations techniques632. D’une certaine manière, ce sont précisément les obstacles suscités par les insuffisances des services du Trésor qui semblent avoir donné lieu à des avancées dans la rationalisation de ses activités et l’efficacité de sa gestion : les jeux d’écritures comptables furent utilisés pour limiter les mouvements effectifs de fonds et prémunir la cité, grâce au système des sûretés, des défauts de paiements ; les difficultés financières du début du Ier siècle introduisirent l’idée que l’argent public pouvait produire un fructus633.

158Dès lors, une question doit être examinée. Dans la mesure où certaines des faiblesses des services du Trésor Public paraissent avoir été liées aux comportements mêmes des dirigeants romains, à la manière dont ils concevaient la pecunia publica et leur propre place dans la cité, faut-il chercher dans les apories du gouvernement aristocratique la raison fondamentale des limites du système républicain des finances publiques ?

Notes

1 Eich 2005, p. 12. Nicolet 1994a, p. X, qualifie de « primitiviste » l’école opposée à sa propre conception de l’administration romaine.

2 Frank 1933, p. 149 et 154, avec pour exemple l’exploitation des mines d’Hispanie ou l’acheminement des biens publics à l’échelle de l’empire ; Van Nostrand 1937, p. 128 : « direct state exploitation during the conquest period (…) was no doubt the rule ».

3 Jones 1949, p. 38-55 = Jones 1960, p. 151-175, notamment p. 157 : « The picture which I have endeavoured to draw of the Republican Civil Service will, I hope, correct the impression still too commonly given in textbooks that a Roman magistrate struggled single-handed with his official duties without any staff worthy of the name ».

4 Le terme d’officers était utilisé par Jones 1949, p. 39 = Jones 1960, p. 154, tandis que Nicolet 1984, essentiellement p. 20, prôna le caractère opératoire d’un rapprochement entre ordres administratifs romains et offices d’Ancien Régime.

5 Badian 1972, mais voir déjà Fraccaro 1956-1975, I, p. 27 (texte d’une conférence de 1948) et Toynbee 1965, II, p. 342.

6 Badian 1972, p. 13-14 et 52 : les fonctions de la cité romaine se limitaient à assurer la pax deorum, l’ordre à l’intérieur de la cité et sa défense extérieure.

7 Badian 1972, p. 12-13 et 21.

8 Badian 1972, p. 13, 17, 23, 34-36, 118 déclare à plusieurs reprises que les profits des sociétés de publicains étaient des plus mesurés. L’idée que les publicains, parce qu’ils sous-traitaient un certain nombre de prestations à de petits artisans ou commerçants, contribuaient à l’emploi et au développement économique apparaît p. 46-47.

9 Badian 1972, p. 15, 21, 121, n. 25, suivi par Brunt 1990, p. 354 et 378.

10 Nicolet 1979b, p. 69 = Nicolet 2000, p. 297.

11 Sur la perception fiscale : Nicolet 1976a, p. 13-14 et 230-231 ; Nicolet 1979a, p. 260-261 et 264 ; Nicolet 1979b, p. 76 = Nicolet 2000, p. 303. Sur les transports : Nicolet 1979a, p. 175-176 et 265 ; Nicolet 1994c, p. 220 = Nicolet 2000, p. 283 et 287.

12 Nicolet 1976a, p. 232 ; Nicolet 1994c, p. 221-222 = Nicolet 2000, p. 292.

13 Nicolet 1994a ; Moatti 1998 ; Moatti 2011.

14 Nicolet 1976a, p. 14 : « À la fin de la République, l’État commence à créer des sortes de réserves de fonctionnaires subalternes [...] qui constitueront comme l’embryon d’une administration [...]. Leur compétence professionnelle s’impose auprès de magistrats souvent inexpérimentés, la stabilité de leur situation contraste avec la rotation rapide des fonctions annuelles de leurs patrons. Très souvent, pour le citoyen, ce sont eux qui incarnent l’État » ; Cohen 1984, p. 29 : le faible nombre et le turn-over des magistrats romains impliquaient nécessairement, pour que la cité romaine pût fonctionner, l’existence d’un personnel administratif relativement nombreux et permanent.

15 Nicolet 1984.

16 Cohen 1984, p. 33, 38, 41-43 et 46-48.

17 Purcell 1983, p. 125-173 ; Badian 1989, p. 582-603.

18 L’école allemande (W. Eck, P. Eich, R. Haensch, A. Kolb) s’est en particulier illustrée dans ce domaine.

19 Une série de travaux sur les appariteurs fait exception : Schulz 1997, notamment p. 143-183 et 200-285 ; David 2007 ; Angius 2016 ; David 2019.

20 Mateo 1999 ; Malmendier 2002 ; Aubert 2003 ; Torrent 2014a-b-c.

21 Eck 1986, p. 105 ; Kunkel 1995, II, p. 105 ; Malmendier 2002 a structuré son ouvrage sur les publicains autour de la question de l’efficacité du recours à la « privatisation » ; Ñaco del Hoyo 2003, p. 238, fait de la paix augustéenne la condition nécessaire à l’établissement d’une organisation fiscale rationnelle, ce qui suggère que la République ne parvint jamais à atteindre la « rationalité administrative » ; Tan 2017, p. 41 et 53-64 souligne la centralité du recours à l’affermage.

22 Eich 2005, p. 52 : « Es überrascht daher nicht, dass das Rom der Republik [...] nur eine schwache Permeation des ‘Staatsgebietes’ durch die Administration zu konstatieren ist » ; p. 64 : « Weder war das aerarium so strukturiert noch das dort beschäftigte Personal so organisiert, dass die Staatskasse als Ausgangpunkt für eine Zentralisierung der Reichadministration geeignet gewesen wär».

23 Eich 2005, p. 52 : l’aristocratie, comme groupe de gouvernement, ne pouvait admettre ni un modèle où elle aurait été concurrencée par un groupe de techniciens tirant leur légitimité de compétences, ni un fonctionnement politique reposant sur la définition par un seul individu d’un objectif prioritaire et des moyens de le réaliser.

24 Eich 2005, p. 55, 59-60 : le nombre des agents n’évolua guère entre l’époque où Rome n’était qu’une petite cité-État et la fin de la République.

25 Eich 2005, p. 55 et 60-61 : il n’y avait pas de délimitation claire des activités publiques et privées du gouverneur de province ; le faible nombre des agents publics obligeait les magistrats à recourir à un entourage privé ; la perception fiscale était déléguée à des acteurs privés, les publicains.

26 Weber 2005, p. 157-169.

27 Permanence de l’organisation administrative ; séparation des sphères publique et privée en matière de financement, de recrutement des agents et de localisation de leurs activités ; encadrement de ces activités par des règles de procédure.

28 Fonctions exercées exclusivement au service de l’administration ; possession de compétences.

29 Les aptitudes techniques des agents déterminent une répartition des tâches par dossiers et une hiérarchie qui fait du plus compétent le donneur d’ordres ; le contrôle interne des activités des personnels est garanti par l’existence même de cette hiérarchie.

30 Wolters 2006, p. 36: « Die Finanzstruktur des römischen Staates unterschied sich in ihren Grundsätzen nicht von der eines privaten Haushalts ». Les traits constitutifs de « l’administration patrimoniale » sont la présence de personnel servile, le recrutement des agents en fonction des relations de patronat, la non-spécialisation des qualifications, l’existence de formes de rémunération variables, la prise de décision conditionnée par l’arbitraire ou la tradition.

31 Marquardt 1888, p. 225 ; Frank 1933, p. 139 ; plus récemment Tan 2015, p. 214 ; Tan 2017, p. XXVII, XXIX, 145, 151, 169, 173 ; France 2021, p. 29 et 151.

32 Cic. off. 2, 76 ; Val. Max. 1, 4, 3 ; Plin. nat., 33, 56.

33 Nicolet 1976a, p. 201 et 228 ; Nicolet 1979a, p. 240 et 247.

34 Nicolet 1976b, p. 51 : « Les tribuns du trésor peuvent donc apparaître, d’une certaine manière, comme les "prototypes" de ces publicains ».

35 Cerami 1986, p. 34-35 ; Cerami 1995, p. 373.

36 Lange 1876-1879, I, p. 540 ; Willems 1885, II, p. 357 ; Marquardt 1888, p. 221 ; Schwahn 1939, col. 2 et 59 ; de Plinval 1940, p. 297-302 ; Hill 1946, p. 61 ; Hill 1952, p. 52 ; Nicolet 1976a, p. 220 ; Nicolet 1976b, p. 49-50 et 54 ; Muñiz Coello 2011, p. 143 ; Rosenstein 2011, p. 139 ; Rosenstein 2016b, p. 91 ; Bleckmann 2016, p. 87 ; France 2021, p. 63.

37 Marquardt 1888, p. 221 ; Clerici 1943, p. 439 ; Nicolet 1976a, p. 218 ; Muñiz Coello 2011, p. 137.

38 Nicolet 1976b, p. 39-46 et 48-50.

39 D.H. 4, 14, 2.

40 Varro ling. 5, 181 : Tributum dictum a tribubus, quod ea pecunia, quae populo imperata erat, tributim a singulis pro portione census exigeba<n>tur. Ab hoc ea quae assignata erat attributum dictum ; ab eo quoque quibus attributa erat pecunia, ut militi reddant, tribuni aerarii dicti ; id quod attributum erat, aes militare.

41 Il s’agit du passage sur les uiduae attributae aux détenteurs du cheval public pour le financement de l’aes hordearium. Le sens d’attribuere est repris à Mommsen 1889-1896, VII, p. 354 : « déléguer à un tiers le droit de recevoir paiement du Trésor ».

42 D.H. 19, 16, 3.

43 Willems 1885, II, p. 357, suivi par Hill 1952, p. 155 et 213.

44 Soit dit en passant, je ne suis pas sûre que l’épisode de 196 av. J.-C. puisse être utilisé pour prouver que les questeurs s’occupaient à cette date de la levée du tributum. Les magistrats exercent peut-être, dans ce passage, leurs attributions de poursuite des débiteurs du Trésor.

45 Clerici 1943, p. 447, n. 3.

46 Nicolet 1976b, p. 54.

47 Gabba 1977, p. 30 ; Gabba 1979, p. 411 = Gabba 1988, p. 85.

48 Walter 1860, I, p. 273, n. 53. Cic. Verr. II 1, 34 ; 3, 165 ; fam. 2, 17, 4 (= SB n° 117) ; Phil. 9, 16 ; 14, 38. L’expression est notamment employée à propos des crédits censoriaux : Liv. 40, 51, 2 ; 44, 16, 9.

49 Nicolet 1966-1974, I, p. 45 ; Nicolet 1976a, p. 219 a affirmé que les sommes correspondant aux indemnités équestres ne transitaient pas par l’Aerarium : dans un système inspiré des liturgies grecques, un type de contribuables aurait été affecté à un type de bénéficiaires de l’impôt, qui disposaient de la pignoris capio pour se prémunir d’un éventuel non versement.

50 Voir chapitre 1, « Les contributions de guerre : tributum ex censu et impôt acquitté par les uiduae et les orbi ». 

51 Certains manuscrits ont de tribunis aerariis.

52 L’Oxford Latin Dictionary II, p. 1709, suggère « To put down in writing, make a record of (items in inventory) » ou « (in financial context) a) to write a promissory note for (a sum of money) b) to enter (accounts, sums of money paid out etc.) in a ledger ».

53 Andreau 1968, p. 485 ; Andreau 1987, p. 350-353 et 544-545.

54 Gaius inst. 4, 26-27 met sur le même plan la pignoris capio exercée par le soldat sur le tribunus aerarius chargé de lui remettre sa solde et les procédures destinées à garantir le versement des indemnités équestres. Il est donc possible que ce soient les tribuni aerarii qui aient également été chargés de ces dernières. Spagnuolo Vigorita 2003, p. 98, n. 78 juge ainsi qu’il est plus probable que la pignoris capio des cavaliers se soit exercée contre les tribuni aerarii que contre les uiduae et orbi.

55 Varro ling. 5, 181.

56 Nicolet 1966-1974, I, p. 39 et 604-608 : ce niveau de cens devait être équivalent ou voisin de celui des chevaliers.

57 Plb. 6, 39, 15 et Cic. Verr. II 1, 36 montrent que les questeurs, au moins depuis le IIe siècle av. J.-C., étaient chargés militiae de verser la solde aux troupes. Le récit de la mutinerie des soldats de Scipion en 206 suggère une intervention dans le même contexte des tribuns des soldats (Liv. 28, 29, 12 ; cf. également Fest. p. 358 L., s. v. Resignatum). En sens inverse l’épisode de 180 av. J.-C., où les troupes furent contraintes de rendre un trop-perçu sur la solde, indique que les sommes passaient vraisemblablement aussi par les mains des centurions (Liv. 40, 41, 8).

58 L’emploi de l’imparfait chez Gell. 6, 10, 2, citant Caton, ne signifie pas nécessairement que le rôle financier des tribuni aerarii avait disparu au milieu du IIe siècle av. J.-C., mais peut-être simplement que la solde n’était en général plus acquittée à Rome. Le « silence des sources » concernant les tribuni aerarii, de Plaute à Cicéron, ne me semble pas être un argument prouvant leur disparition, eu égard au très faible nombre en tout des textes qui les évoquent, à la perte des livres 46-142 de Tite-Live et à la rareté, également, des documents qui montrent quel rôle jouaient les questeurs dans le versement du stipendium.

59 Suet. Iul. 41, 2 ; Nicolet 1966-1974, I, p. 623-624. Le De Lingua Latina de Varron est contemporain des années où César réforma les institutions romaines (Traglia 1974, p. 31 ; Lehmann 1997, p. 16 ; Duso 2017, p. 17).

60 Nicolet 1966-1974, I, p. 595-597 et 611-613, qui estime que le vivier des chevaliers et des tribuni aerarii devait tourner autour de 1 000 personnes pour assurer le bon fonctionnement des huit quaestiones alors existantes.

61 Liv. 4, 60, 6 (406 av. J.-C.).

62 Les citoyens-soldats non enrôlés auraient acquitté leur part de la contribution de guerre au moment du dilectus. Ceci expliquerait peut-être aussi que les enseignes militaires, à haute époque, aient été entreposées à l’Aerarium.

63 Liv. 23, 31, 1 (La concomitance chronologique apparaît également en Liv. 5, 10, 2-10 et 7, 27, 4).

64 Plb. 6, 19-20.

65 C’était l’hypothèse de Revillout 1866, p. 8.

66 Erdkamp 1998, p. 85-110 ; Roth 1999, p. 147-154 ; Ñaco del Hoyo 2003, p. 26-46 et 202-210 notamment ; France 2007a, p. 341-343 = France 2017, 459-461.

67 Liv. 23, 21, 5 ; Liv. 28, 25, 9 ; 28, 34, 11 ; Plb. 15, 18, 6 ; Liv. 30, 16, 3 ; App. Pun. 235-238 ; Plb. 21, 13, 5 ; 21, 14, 3 ; 21, 14, 7 ; Liv. 37, 35-36 ; D.S. 29, 7 et 10 ; App. Syr. 29. Bleckmann 2016, p. 86 et n. 25 et p. 88 ; Rosenstein 2016a, p. 117-118.

68 Liv. 23, 31, 1-2 (215 av. J.-C.) ; Plb. 11, 28, 5 (206 av. J.-C.) ; Liv. 40, 35, 4 (180 av. J.-C.). À partir de l’exemple de la péninsule Ibérique, Cadiou 2008, p. 490-492 et 497-501, suivi par France 2021, p. 129 et 134-135, défend l’idée que le stipendium était toujours versé à partir de fonds publics acheminés depuis Rome, mais je ne suis pas sûre que l’on puisse le suivre : Rosenstein 2016a, p. 118-119 ; Ñaco del Hoyo 2019, p. 83.

69 Jones 1974, p. 161-162 ; Nicolet 1976a, p. 232 : « sous-traitée à des publicains, l’administration fiscale… » ; Nicolet 1979a, p. 264, à propos de la Sicile : « C’est la société [de publicains] qui est chargée de mettre en place la véritable administration fiscale » ; Lo Cascio 1986, p. 36 ; Aubert 1994, p. 325 ; Ñaco del Hoyo 2003, p. 115 ; Domergue 2008, p. 192 : la République « n’avait pas d’administration capable de percevoir ses revenus » ; Van Nijf 2008, p. 285 : « Tax farming was a convenient way of compensating for the absence of an adequate bureaucratic structure in the Republic ».

70 Marquardt 1888, p. 244.

71 C’est l’idée que l’on trouve aussi par exemple chez Jones 1974, p. 161 ; Duncan-Jones 1990, p. 188 ; Lintott 1993, p. 74 ; Richardson 1994, p. 586.

72 Pour la première interprétation : Aguillar Guillén – Ñaco del Hoyo 1997, p. 75 ; Genovese 1993, p. 174 ; Ñaco del Hoyo 2005, p. 370 ; Ñaco del Hoyo 2007, p. 228 (« land-taxation »). Pour la seconde, qui me semble préférable : France 2007b, p. 171-173 = France 2017, p. 383-384. Ñaco del Hoyo 2019, p. 78-80 juge désormais que l’expression uectigal certum ne fait pas, dans le cas de l’Hispanie, référence à une fiscalité régulière, mais aux réquisitions et achats forcés. Cependant, il est curieux que ces derniers aient pu être désignés comme des revenus au montant prédéterminé.

73 Jones 1974, p. 162 et 176. Dans le même sens, Lo Cascio 1986, p. 34 ; Richardson 1994, p. 588. France 2007b, p. 170 a pour sa part relevé que la typologie cicéronienne reposait sur des catégories mouvantes, puisque les territoires de uectigal certum étaient définis par le montant fixe de la contribution exigée, tandis que les régions de locatio censoriale étaient caractérisées par les modalités du prélèvement fiscal.

74 Cum omnibus in aliis uectigalibus, Asiae, Macedoniae, Hispaniae, Galliae, Africae, Sardiniae, ipsius Italiae quae uectigalia sunt, cum in his, inquam, rebus omnibus publicanus petitor atque pignerator… soleat esse…

75 Ñaco del Hoyo 2005, p. 371-372 ; Ñaco del Hoyo 2007, p. 224-225. Ñaco del Hoyo 2003, p. 112-113 invoquait en outre un argument a silentio : la loi agraire de 111 ne contient aucune mention explicite de l’affermage à des priuati du recouvrement de l’impôt versé par les stipendiarii. Dans ses travaux plus récents, Ñaco del Hoyo 2010, p. 175 et Ñaco del Hoyo 2019, p. 80-81 considère que stipendiarius fait référence à une sujétion s’exprimant par des paiements, et que ces derniers peuvent se référer au versement d’indemnités.

76 CIL I², 2513 = AE, 1913, 162 = ILLRP 388 = ILAfr 422 : Q(uinto) Numerio Q(uinti) f(ilio) / Rufo q(uaestori) / stipendiarii / pagorum Muxsi Gususi Zeugi.

77 Lex agr. l. 83 = CIL I², 585 = Crawford 1996, I, n° 2, p. 121-122 (le texte est lacunaire dans la partie qui détaille les types de contributions concernées) : […is pro eo agro loco uectigal decumas] scripturam populo aut publicano item dare debeto, utei pro eo agro loco, quem agrum locum populus [Romanus ex h(ac) l(ege) uenire iubebit, que]m agrum locum ceiuis Romanus ex h(ac) l(ege) possidebit, dare oportebit. Lintott 1992, p. 54 ; Ñaco del Hoyo 2003, p. 111.

78 Ørsted 1985, p. 86.

79 Plu. Luc. 4, 1 ; App. Mith. 260.

80 Rostovtzeff 1941, II, p. 1574-1575 (suivi par De Laet 1949, p. 71 et Badian 1972, p. 109) a versé au dossier Cic. prov. 5 : quis ignorat, Achaeos ingentem pecuniam pendere L. Pisoni quotannis, uectigal ac portorium Dyrrachinorum totum in huius unius quaestum esse conuersum… et Cic. Pis. 87 : uectigalem prouinciam, singulis rebus quaecumque uenirent certo portorio imposito, seruis tuis <pro> publicanis a te factum esse meministi ? Les manuscrits de l’In Pisonem, 87 ont en fait seruis tuis publicanis, que l’on a corrigé soit en éliminant publicanis (Nisbet 1961, p. 44 et 158), soit en introduisant la préposition pro entre tuis et publicanis (Grimal 1966, p. 146), ce qui dans les deux cas revient à modifier le texte pour lui donner le sens voulu par M. Rostovtzeff.

81  Cic. prov. 10 : Statuit [Gabinius] ab initio, et in eo perseuerauit, ius publicano non dicere ; pactiones sine ulla iniuria factas rescidit, custodia sustulit, uectigalis multos ac stipendiarios liberauit ; quo in oppido ipse esset aut quo ueniret, ibi publicanum aut publicani seruum esse uetuit. Cf. Cic. Pis. 41 et 48, sur les pertes enregistrées par les publicains ; Cic. ad Q. fr., 3, 2, 2 = SB n° 22 (11 octobre 54), sur leur hostilité envers Gabinius à son retour. Rostovtzeff 1941, II, p. 982-983 ; De Laet 1949, p. 87.

82 Caes. civ. 3, 32, 4 : Erat plena lictorum et imperiorum prouincia, differta praefectis atque exactoribus, qui praeter imperatas pecunias suo etiam priuato conpendio seruiebant.

83 Brunt 1956, p. 17-25 = Brunt 1990, p. 1-8 ; Merola 2001a, p. 53-54 et 108 ; Santangelo 2007, p. 111-117 ; Le Teuff 2010, p. 206-210 ; Le Teuff 2017, p. 68-69.

84 Maganzani 2002a, p. 99 ; Morrell 2017, p. 81.

85 De Laet 1949, p. 87.

86 Cic. Verr. II 3, 50, 86-87, 89, 92-93, 102, 200, 228.

87 Cic. Verr. II 3, 33, 50, 75, 84, 105, 178, 200, 228, avec l’emploi des termes procurator ou praefectus.

88 Genovese 1999, notamment p. 252 et 425.

89 L’opinion de Mateo 1999, p. 70 et 89-90 et 2001, qui considère que les sociétés de publicains avaient pour seule compétence le recouvrement fiscal, et qu’elles n’étaient pas impliquées dans l’exploitation de l’ager publicus, notamment les mines, est à l’heure actuelle admise par l’historiographie française et espagnole (Domergue 2008, p. 194 ; Bernard 2018, p. 360 et 362 ; Antolinos Marín – Días Ariño 2019, p. 301), mais elle repose sur des arguments fragiles (le sens à donner au verbe exercere quand il se rapporte aux publicains ; le postulat de l’imprécision du vocabulaire livien) et admet une exception pour les mines d’Italie. France 2021, p. 73 et p. 434-435, n. 33 juge que les publicains étaient, de façon générale, des contractants partenaires des autorités romaines. Le dossier mériterait donc d’être rouvert, mais par prudence, nous avons ici laissé de côté ces documents.

90 Redemptor en revanche était apparemment utilisé pour qualifier un contractant qui fournissait aux pouvoirs publics une prestation concrète (construction ou entretien de bâtiments publics ; fourniture d’hostiae, de blé ; organisation de funérailles…) : Ørsted 1985, p. 95.

91 Il me semble en effet que sa catégorie de uectigalia assimilables à des impôts directs peut en fait rentrer dans les droits sur les ventes et les mutations.

92 Di Stefano 1998, p. 707-748.

93 Crawford 1996, I, n° 12, p. 241 : copie de Cnide, col. 4, l. 13-16.

94 Crawford 1996, I, n° 12, p. 265.

95 Je ne suis pas tout à fait sûre qu’il faille retenir l’attestation, car Vial 1984, p. 346 et Migeotte 2014, p. 661 indiquent que la fiscalité délienne incluait différentes dîmes à l’époque hellénistique.

96 Cic. Verr. II 2, 170 : dans ce contexte, les mêmes sommes pouvaient apparaître indifféremment sur les comptes de L. Carpinatius, du scribe du préteur ou de son accensus.

97 Crawford 1996, I, n° 19, p. 334.

98 Ñaco del Hoyo 2003, p. 85 et 194-248, 202-210 notamment.

99 La loi agraire de 111 av. J.-C. pourrait suggérer que les redevances sur les terres de Corinthe et d’Afrique, qui existaient en 111 av. J.-C., avaient été mises en place après 146.

100 Dufour 2010, p. 166.

101 Lex agr. l. 83 = CIL I², 585 = Crawford 1996, I, n° 2, p. 121-122 ; Monum. Ephes. l. 72-73 = AE, 2008, 1353 = Cottier et al. 2008, p. 54. Cf. Maganzani 2002a, p. 227 et 230 ; Nörr 2013, p. 116.

102 Voir la Sicile de Verrès et l’Asie en Cic. fam., 13, 65 = SB n° 134. Les autres témoignages, il est vrai plus nombreux, ne précisent pas en quoi consistait l’activité des sociétés : Cic. fam. 13, 9, 1-3 = SB n° 139, pour la Bithynie ; Planc. 32 et 34 ; Caes. civ. 3, 3, 2 et 3, 103, 1, pour Chypre.

103 On en a trace pour l’Asie en 75, 66, 59 et 47 av. J.-C., pour la Macédoine en 57, pour la Cilicie en 51, pour la Transalpine en 76-74 et pour la Sicile en 73-70 av. J.-C.

104 Scriptura : Sicile en 73-70, Asie en 66, 51 et 47 av. J.-C., Cilicie en 51 (Trapenard 1908, p. 19-20 et 29). Taxe sur l’exploitation des salines : Asie en 102 et 66 (Carusi 2008, p. 81-83 et 235-237). Taxe sur l’exploitation des gisements miniers : Asie en 75 av. J.-C., Transalpine et Hispanies au Ier siècle av. J.-C. Taxe sur les terres de l’ager publicus, notamment les anciennes terres royales : Macédoine en 73, 63 et 57 av. J.-C., Sicile en 73, Bithynie et Cyrénaïque en 63.

105 Dont l’Eubée, rattachée apparemment à cette province : Picard 1979, p. 295.

106 Pour la Sicile, c’était l’hypothèse de Rostowzew 1902, p. 350-352, reprise par Carcopino 1914, p. 3 et p. 57-70. On sait peu de choses sur la perception fiscale dans le royaume de Pergame, mais le Monum. Ephes., l. 67-71 = AE, 2008, 1353 = Cottier et al. 2008, p. 52 et 54 suggère une continuité des postes de douane romains par rapport aux postes attalides : Marek 2010, p. 325. Arnaud 2018, p. 464 considère en revanche qu’il y eut un renforcement du maillage des postes douaniers suite à la provincialisation de l’Asie.

107 D.S. 37, 5-6 ; Cic. Manil. 16 ; App. BC 2, 13 pour l’Asie ; Cic. prov. 10-11, pour la Syrie ; peut-être Caes. civ. 3, 103, 1, pour Chypre et Bell. Alex. 70, 7, pour le Pont ; Cic. Verr. II 2, 188, pour la SicileSur le sujet, Aubert 1994, p. 327 et 342 et Van Nijf 2008, p. 288-289.

108 Merola 2001a. Ce point était déjà mis en avant par Spagnuolo Vigorita 1997, p. 175 et Spagnuolo Vigorita 1999, p. 194-195.

109 Les imperatores qui réorganisèrent des provinces ou en instituèrent de nouvelles dans le courant du Ier siècle av. J.-C. prirent d’ailleurs soin de les structurer autour des cités. L’exemple de l’Orient est éclairant à cet égard, avec la division syllanienne de la province d’Asie en 44 circonscriptions fiscales vraisemblablement articulées sur les communautés civiques, ou avec l’organisation pompéienne en districts des provinces de Bithynie-Pont, Syrie et Cilicie, doublée de fondations urbaines (Str. 12, 3, 1 et 12, 3, 40 ; Vitucci 1947, p. 431, 433-434, 438 ; Merola 2001a, p. 53 et 63 ; Merola 2001b, p. 460-461 ; Le Teuff 2017, p. 69).

110 Ñaco del Hoyo 2003, p. 192, pour l’Hispanie de la fin du IIe siècle av. J.-C.

111 C’est l’hypothèse qui a été avancée pour l’Africa Vetus, à partir de l’inscription d’Utica évoquée plus haut n. 76 : Romanelli 1959, p. 47-48 et 69 et Romanelli 1974, p. 180 ; Picard 1963, p. 126-127 et Picard 1974, p. 125-126 ; Ñaco del Hoyo 2003, p. 105-109.

112 Pour l’époque impériale, France 2003, p. 209-225, notamment p. 210 = France 2017, p. 425-438, notamment p. 426.

113 Orejas – Sastre 1999, p. 172.

114 Ces conventions précisaient le montant et les modalités du versement de l’impôt. Genovese 1999, p. 40-43, avec la bibliographie antérieure p. 42-43, n. 88 ; Merola 2001a, p. 101-105, pour qui les pactiones permettaient, dans les provinces où l’impôt était théoriquement dû en nature, de négocier sa conversion en argent.

115 Cic. Verr. II 3, 102 ; Genovese 1999, p. 454.

116 Cic. Verr. II 3, 34. Genovese 1999, p. 426-429, à partir de Cic. Verr. II 3, 117, pour les innovations en ce sens introduites par les édits de Verrès.

117 Sherwin-White 1984, p. 232-233 et n. 117 ; Merola 2001a, p. 65 et 103.

118 Maganzani 2002a, p. 134-135.

119 Cottier et al. 2008, p. 40-45.

120 Merola 2001a, p. 108-113.

121 Cic. ad Q. fr. 1, 1, 33 = SB n° 1.

122 Plu. Caes. 48, 1 ; App. BC 2, 385 ; 5, 19 ; D.C. 42, 6, 3 ; Merola 2001a, p. 72-75 ; Le Teuff 2017, p. 66 et 69.

123 App. BC 4, 316 qui, toutefois, se réfère à une période troublée marquée par les levées arbitraires.

124 Ceci arrivait lorsque les responsables locaux se révélaient incompétents ou que les divisions politiques intérieures empêchaient de parvenir à une répartition de la masse fiscale, ou bien dans les régions où il n’y avait pas de cité.

125 C’était bien sûr le cas pour la dîme du blé de Sicile, et les dîmes sur le vin, l’huile et les fruits jusqu’en 75 av. J.-C., mais il se pourrait que dans les provinces organisées par Pompée, le gouverneur ait affermé la perception des impôts : Sherwin-White 1984, p. 233, n. 117, défendait cette thèse à partir de Cic. Att. 2, 16, 2 ( = SB n° 36) et Flacc. 91 (mais le second texte au moins me semble simplement évoquer des faits qui eurent lieu sous la préture de Globulus, non une intervention spécifique de ce dernier).

126 Cic. Att. 6, 1, 15-16 = SB n° 115 (20 février 50) montre que l’édit du gouverneur contenait des éléments relatifs aux pactiones et que ces dernières servaient de référence dans le règlement du contentieux entre publicain et contribuable : Ferrary 2018, p. 17. En outre, Cic. Att. 5, 14, 1 = SB n° 107 (27 juillet 51) indique que le gouverneur était tenu au courant de l’état d’avancement des conclusions de pactiones. Sur ce point, Maganzani 2002a, p. 88-100.

127 Comme on l’a vu, ce fut probablement le cas en Asie suite à la réforme de César, ce qui suggère que les provinces de uectigal certum fonctionnaient suivant ce principe, mais c’était également la situation en Sicile et donc peut-être partout où le gouverneur procédait à l’affermage.

128 Cic. Att. 4, 11, 1 = SB n° 86 permettrait de penser que sous la République, le consul apurait les comptes annuellement avec les publicains aux calendes de juillet. Les données du Monum. Ephes., l. 99-100 = AE 2008, 1353 (Cottier et al. 2008, p. 66-67) indiquent qu’à l’époque augustéenne, le versement à l’Aerarium devait être fait aux Ides d’Octobre.

129 Voir le cas de la Sicile, où l’éventuelle remise d’argent résultait d’une procédure d’aestimatio.

130 Maganzani 2002b, p. 219-234.

131 Nicolet 1994c, p. 216 = Nicolet 2000, p. 278 et 292.

132 Nicolet 1979a, p. 265 ; Nicolet 1994c, p. 222 = Nicolet 2000, p. 287 ; Kolb 2000, p. 46-47 ; Wolters 2006, p. 41. En fait, la notion de periculum uecturae n’apparaît que dans un seul passage de Cicéron (fam. 2, 17, 4 = SB n° 117).

133 Cadiou 2008, p. 509-516, pour la péninsule ibérique ; Wolters 2006, p. 25-26 et 36-40.

134 Peut-être Zonar. 8, 14 ; Liv. 27, 10, 11-13 ; Plb. 10, 19, 2 ; Sall. Jug. 36, 1 ; Plu. Pomp. 11, 2.

135 Sall. Jug. 104, 3 (le questeur Cn. Octavius Ruso achemine depuis Rome l’argent de la solde destinée aux troupes de Marius en Afrique ; contra Pina Polo – Díaz Fernández 2019, p. 97 et 165, il me semble qu’on ne peut exclure qu’il s’agisse du questeur militaire attaché à Marius, auquel ce dernier confia ensuite une mission diplomatique, car Sylla pourrait en 105 être devenu légat) ; Cic. Verr. II 1, 34 ; 1, 36 ; 3, 177.

136 App. Hisp. 23 ; Liv. 30, 36, 1 ; 38, 40, 6 ; 39, 29, 6 ; 45, 41, 7 ; Oros. 5, 15, 25 ; Plu. Luc. 36, 6.

137 Liv. 39, 29, 6.

138 Liv. 32, 2, 1 ; Plb. 21, 32a, 9 ; Liv. 38, 38, 9 et App. Syr. 198.

139 D.S. 29, 13 ; Liv. 38, 37, 7.

140 Plu. Cato Mi. 38, 1-39, 3 ; Morrell 2017, p. 121 ; Calvelli 2020, p. 252.

141 Sur ce mode de transport pour le numéraire, voir également Plu. CG 2, 10.

142 Sur le tonnage des navires, Rathbone 2003, p. 199, n. 1 et 201 (les navires « moyens », utilisés pour les transports interrégionaux, avaient une capacité de 1500 amphores) ; Wolters 2006, p. 25, n. 12 ; Nantet 2016, p. 121-126 et 133-134.

143 Probablement Vell. 1, 13, 4, pour le transport du butin de Corinthe ; Cic. fam. 2, 17, 4 = SB n° 117 (18 juillet 50), pour les sommes ramenées de Cilicie par Cicéron. De Martino 1982, p. 224-228 considère que le contrat avec le manceps était alors un prêt de biens publics, qui incluait une clause prévoyant la restitution à Rome, sans doute avec paiement d’intérêts.

144 Kolb 2000, p. 46 ; Wolters 2006, p. 41.

145 Rickman 1980, p. 41 ; Nicolet 1991a, p. 128-130 = Nicolet 2000, p. 236-238 ; Nicolet 1991b, p. 474 = Nicolet 2000, p. 360 ; Nicolet 1994c, p. 220 = Nicolet 2000, p. 283-284 ; Soraci 2003, p. 388-392, repris dans Soraci 2011, p. 89-96.

146 Cic. Verr. II 3, 172. Cic. Planc. 64 et dom. 25 sont plus allusifs.

147 La définition est d’Andreau 1978, p. 51. Cf. Fest. p. 234 L. ; Cic. Att. 12, 24, 1 = SB n° 263. Barlow 1978, p. 168-170 ; Petrucci 1991, p. 116-120 ; Hollander 2007, p. 40-42.

148 Cic. fam. 3, 5, 4 = SB n° 68 (27-28 juillet 51) ; Cic. fam. 2, 17, 7 = SB n° 117 (18 juillet 50). Peut-être Att. 11, 1, 2 = SB n° 211 (2e semaine de janvier 48) et 11, 2, 3 = SB n° 212 (mi-mars 48). En ad Q. fr., 1, 3, 7 = SB n° 3 (Ides de juin 58), je ne suis pas sûre que les fonds que Quintus veut faire parvenir à Marcus par permutatio soient les mêmes que ceux qui avaient été touchés par Cicéron au nom de son frère gouverneur d’Asie.

149 Cic. ad Q. fr. 1, 3, 7 = SB n° 3 (Ides de juin 58) ; peut-être Pis, 48 ; Att. 5, 13, 2 = SB n° 106 (26 juillet 51) ; 5, 15, 2 = SB n° 108 (3 août 51) et 7, 7, 2 = SB n° 130 (décembre 50) ; peut-être Att. 11, 1, 2 et 11, 2, 3 = SB n° 211-212 (2e semaine de janvier 48 et mi-mars 48) ; Att. 11, 24, 3 = SB n° 234 (6 août 47) ; Att. 12, 24, 1 = SB n° 263 (20 mars 45) ; 12, 27, 2 = SB n° 266 (23 mars 45) ; 15, 15, 4 = SB n° 393 (Ides de juin 44) cf. 15, 17, 1 = SB n° 394 (14 juin 44) ; 16, 1, 5 = SB n° 409 (8 juillet 44). Sur la permutatio comme service entre aristocrates, Andreau 1978, p. 51-53 ; Verboven 2002, p. 132-138 ; Ioannatou 2006, p. 332-335.

150 Verboven 2002, p. 135.

151 En dehors d’un contexte financier, le mot permutatio est employé pour les échanges de provinces entre magistrats ou pour les échanges de prisonniers durant les guerres. En matière d’argent, la permutatio serait non, comme on l’a souvent pensé, une opération de change (point déjà souligné par Thilo 1980, p. 228, n. 475), mais un échange de débiteurs.

152 Cic. fam. 3, 5, 4 = SB n° 68 (27-28 juillet 51). Fallu 1974, p. 204 et 256.

153 Cic. Ver. II 3, 165 : cum posita esset pecunia apud eas societates unde erat attributa, binis centesimis faeneratus est… pecunia publica ex aerario erogata, ex uectigalibus populi Romani ad emendum frumentum attributa.

154 Sur ce point, France 2011, p. 236 = France 2017, p. 397. La circulation des fonds pouvait aussi s’effectuer en sens inverse, du gouverneur au Trésor (Cic. fam. 2, 17, 7 = SB n° 117).

155 Cic. Verr. 3, 165 ; Fam., 2, 17, 7 = SB n° 117.

156 La question était posée par Jonkers 1940, p. 185. Andreau 2001, p. 48 et 213-214 semble considérer que la permutatio était le mode normal de transfert des fonds publics au dernier siècle de la République. De Ligt 2002, p. 60 juge que les publicains pouvaient aussi payer l’Aerarium sur les revenus des domaines fonciers qu’ils possédaient en Italie, ou procéder à des transports d’espèces.

157 Badian 1972, p. 13 ; Torrent 2014b, p. 72, n. 13, 78, 80 ; Torrent 2014c, p. 57 et 65.

158 Malmendier 2002, p. 1-5, 50-53, 55, avec les remarques de Maganzani 2002b, p. 219 et 223.

159 L’hypothèse de Cancelli 1957, p. 60 se révèle à cet égard plus intéressante : la substitution des priuati à l’autorité publique dans le rapport d’impôt aurait selon lui été destinée à éviter qu’en la matière, les citoyens ne fussent soumis à l’arbitraire des magistrats.

160 Les textes essentiels sont Dig. 17, 2, 5 = Ulpien libro trigesimo primo ad edictum : Societates contrahuntur siue uniuersorum bonorum siue negotiationis alicuius siue uectigalis siue etiam rei unius, qui indique que les sociétés vectigaliennes constituaient un type spécifique de sociétés, et Dig. 3, 4, 1 = Gaius libro tertio ad edictum prouinciale : Neque societas neque collegium neque huiusmodi corpus passim omnibus habere conceditur : nam et legibus et senatus consultis et principalibus constitutionibus ea res coercetur. Paucis admodum in causis concessa sunt huiusmodi corpora : ut ecce uectigalium publicorum sociis permissum est corpus habere uel aurifodinarum uel argentifodinarum et salinarum. Item collegia Romae certa sunt, quorum corpus senatus consultis aque constitutionibus principalibus confirmatum est, ueluti pistorum et quorundam aliorum, et nauiculariorum, qui et in prouinciis sunt. 1. Quibus autem permissum est corpus habere collegii societatis siue cuiusque alterius eorum nomine, proprium est ad exemplum rei publicae habere res communes, arcam communem et actorem siue syndicum, per quem tamquam in re publica, quod communiter agi fierique oporteat, agatur fiat, qui fournirait les éléments (autorisation par les pouvoirs publics, possession d’un patrimoine et représentation par un actor dans les actes juridiques) permettant d’apprécier si une société était un corpus. En général, les auteurs qui ne prennent en compte qu’un seul de ces critères affirment que les sociétés vectigaliennes disposaient de la personnalité juridique (Girard 1895, p. 257 ; Kniep 1896, p. 241-291 ; Badian 1972, p. 69-70 ; France 2001, p. 372-377, qui nuance son propos en France 2021, p. 283). L’argument majeur porte en fait sur la possibilité de trouver trace d’un actor d’une société de publicains à l’époque républicaine, dans la mesure où la seule source éventuelle, Cic. Planc. 32, évoque un auctor et non un actor. Ivanov 1910, p. 42, était plutôt réticent sur ce point précis ; Éliachévitch 1942, p. 315 invoquait Cic. Verr. II 3, 27, pour rappeler qu’à l’époque cicéronienne, le publicain lui-même agissait en justice et n’était pas représenté ; Cimma 1981, p. 95-96 et 178, 219, 226, 242 et 247 estime qu’on ne peut prouver la possibilité d’une représentation des sociétés de publicains pour l’époque républicaine, et donc qu’elles n’avaient au mieux disposé que d’une « personnalité juridique » limitée. Au contraire, Szlechter 1947, p. 333-334, 356 et 359-360 affirmait que, depuis le IIIe siècle av. J.-C., le manceps jouait en pratique le rôle d’un actor, et Nicolet 1979b, p. 72-80 = Nicolet 2000, p. 300-307, suivi par Dufour 2010, p. 174 et Meissel 2014, p. 526, identifie, sur la base du Pro Plancio, les termes auctor et actor. À mon avis, le raisonnement ne tient pas, car le plaidoyer prononcé par Plancius au Sénat pour la révision des baux des publicains n’était pas l’équivalent d’une représentation en justice. Par ailleurs, le Dig. 17, 2, 59 pr. = Pomponius libro duodecimo ad Sabinum : Adeo morte socii soluitur societas…haec ita in priuatis societatibus ait : in societate uectigalium nihilo minus manet societas… fait de l’exception des sociétés vectigaliennes au principe de l’extinction pour cause de mort d’un socius une caractéristique fondamentale de ces entités. Toutefois, Dufour 2010, p. 177 tire de différents passages du Pro Quinctio l’idée que les sociétés ordinaires de droit privé n’étaient pas automatiquement dissoutes à la mort d’un associé.

161 Malmendier 2002, p. 251-257.

162 Orestano 1968, I, p. 7-82, 121, 174-175 ; Onida 2016, p. 382-383.

163 Monum. Ephes., l. 71 = AE, 2008, 1353 = Cottier et al. 2008, p. 54.

164 Spagnuolo Vigorita 1997, p. 176 ; Cottier et al. 2008, p. 126.

165 Cic. prov. 12 : si qui frui publico non potuit per hostem, hic tegitur ipsa lege censoria.

166 Cic. Verr. II 3, 27 : Cum omnibus in aliis uectigalibus Asiae, Macedoniae, Hispaniae, Galliae, Africae, Sardiniae, ipsius Italiae quae uectigalia sunt, cum in his, inquam, rebus omnibus publicanus petitor ac pignerator ; Monum. Ephes., l. 55-56 et 87-88 = AE 2008, 1353 = Cottier et al. 2008, p. 48 et 60 ; Gaius inst. 4, 28 : Item lege censoria data est pignoris capio publicanis uectigalium publicorum populi Romani aduersus eos qui aliqua lege uectigalia deberent... Maganzani 2000, p. 132-153 ; Maganzani 2002a, p. 14, 16, 29-40, 48 ; Nörr 2013, p. 88-100.

167 Varro rust. 2, 1, 16 ; Monum. Ephes., l. 21-22, 46-47, 50-53, 53-56 = AE 2008, 1353 = Cottier et al. 2008, p. 34, 44-48. Klingenberg 1977, p. 14 et 62 ; Spagnuolo Vigorita 1997, p. 177-180 ; Maganzani 2000, p. 131-132 ; Maganzani 2002a, p. 47-48.

168 Lex agr., l. 37 = Crawford 1996, I, n° 2, p. 117 : […sei quid publicanus eius rei causa a quo eorum sibi deberi] dariue oportere de[icet…]. Maganzani 2000, p. 140 et Maganzani 2002a, p. 18, 121-123 et 258 critique à juste titre la conception de Pugliese 1963, p. 24, qui jugeait que le contribuable n’était obligé qu’envers le peuple romain, pas envers le collecteur d’impôt.

169 Non uidi Heyrovsky 1881. Szlechter 1947, p. 369 (la lex agr., l. 85 qualifie la lex censoria de lex dicta) ; Cancelli 1957, p. 68-71 (Liv. 43, 16, 2 utilise le vocabulaire de l’édit pour évoquer un règlement censorial ; de plus, la lex censoria avait un caractère tralatice, ce qui est typique de l’édit).

170 Pernice 1884, p. 111-135 ; Éliachévitch 1942, p. 21 ; Blanch Nougues 2018, p. 622-629.

171 De nombreux auteurs ont adopté sur le sujet une position médiane : Kniep 1896, p. 112-118 et 141-142 ; Magdelain 1978, p. 32-38 ; Malmendier 2002, p. 69-74.

172 Pernice 1884, p. 124 et 126-127.

173 On en aurait une autre mention en Dig. 47, 8, 2, 20 (Ulpian., Libro quinquagensimo sexto ad Edictum) : Si publicanus pecus meum abduxerit, dum putat contra legem uectigalis aliquid a me factum.

174 Spagnuolo Vigorita, 1999, p. 193 et Spagnuolo Vigorita 1997, p. 156-157 (qui revenait toutefois en définitive à la conception de Pernice, suite à l’interprétation erronée donnée des l. 9-10 du Monumentum Ephesenum à l’époque de sa découverte).

175 Monum. Ephes., l. 4 = AE, 2008, 1353 = Cottier et al. 2008, p. 26. Voir également l. 29-30 p. 36, l. 42 p. 44, l. 70 p. 52, l. 98 p. 66 (teimeutikos nomos), l. 132 p. 76.

176 Maganzani 2002a, p. 65-66. Voir déjà Mommsen 1889-1896, IV, p. 117, n. 3.

177 Nicolet 1966-1974, I, p. 339 ; Starace 2016, p. 362. Déjà Pernice 1884, p. 129 : « halbamtlichen Charakter der Publikanen ».

178 Sur le sens de publicanus, Ørsted 1985, p. 71-72 ; Malmendier 2002, p. 28. Les mouvements des registres des publicains étaient régulés par les pouvoirs publics, probablement parce que ces documents faisaient foi en justice (Ürögdi 1968, col. 1206). En revanche, il me semble que Cimma 1981, p. 74 va trop loin lorsqu’elle affirme que les registres comptables des publicains étaient considérés comme des documents publics.

179 Cic. Verr. II 2, 181 ; Manil. 17 ; prov. 10 ; Planc. 23-24, 35 ; ad Q. fr. 1, 1, 32 et 35 = SB n° 1 ; fam. 1, 9, 26 (= SB n° 20) ; 13, 9, 2 (= SB n° 139) ; 13, 10, 2 (= SB n° 277) ; Att. 2, 1, 8 (= SB n° 21) ; 2, 16, 2 (= SB n° 35) ; off. 3, 88. Béranger 1970, p. 238 ; Cohen 1975, p. 269. Plus généralement, Nicolet 1984, p. 7-21.

180 Ferrer Maestro 2003, p. 85, qualifie les sociétés de publicains d’« auténtica administracion paraestatal ».

181 Cet enregistrement se faisait en fait en deux étapes. D’une part, comme un certain nombre de publicains étaient chevaliers, la recognitio equitum effectuée par les censeurs devait constituer une première sélection. Venaient ensuite pour les tribuni aerarii, à partir de 70 av. J.-C., l’inscription sur l’album de la décurie judiciaire, et pour les publicains, l’enregistrement officiel lors de la passation du contrat public.

182 Monum. Ephes., l. 71 = AE, 2008, 1353 = Cottier et al. 2008, p. 54, pour les publicains adjudicataires du portorium d’Asie ; Cic. Catil. 4, 15 pourrait suggérer que les tribuni aerarii avaient leur siège à l’Aerarium.

183 Ceci ne vaut que pour les publicains, car on n’a pas trace d’une rémunération des tribuni aerarii.

184 Les agents tels que les promagistri ou les scribes devaient disposer de compétences, mais les individus chargés de la prise de décision dans la société, eux, répondaient principalement à un critère de fortune et de dignité.

185 Arangio-Ruiz – Olivieri 1925, p. 80-127 ; Manganaro 1988, p. 155-190 ; Migeotte 2014, p. 79-81 et 181 ; Battistoni – Campagna 2014, p. 688-690.

186 On distinguait les caisses des hiéromnamons, des tamiai et des sitophylaques, ainsi que le sitonion, qui finançait l’approvisionnement de la cité. En pratique toutefois, les deux types de dénominations tendaient à se superposer, puisque la caisse des hiéromnamons pourvoyait aux dépenses religieuses et celle des tamiai aux dépenses civiques.

187 Mommsen 1889-1896, III, p. 75-80 et IV, p. 190-191, suivi par Willems 1885, II, p. 372 et 388-389 ; Karlowa 1885-1901, I, p. 278-279 ; Marquardt 1888, p. 105 ; De Ruggiero 1895-1985, I, p. 631 ; Habel 1895, col. 425-426 ; Wissowa 1902, p. 343. Pour la caisse des édiles, Trisciuoglio 1998, p. 135 ; Daguet-Gagey 2015, p. 150, n. 143.

188 Sur lequel voir introduction, « L’Aerarium Sanctius ».

189 Bogaert 1968, p. 403-408 ; Gabrielsen 2008, p. 115-130.

190 Plb. 23, 14, 5, Liv. 38, 55, 13 et Val. Max. 3, 7, 1 f, pour le fameux épisode de l’ouverture du Trésor Public par Scipion l’Africain. Cic. har. resp. 55, illustré par Plu. TG 10, 8, indique en outre que la proclamation du iustitium par un magistrat donnait lieu à la fermeture de l’Aerarium.

191 Marquardt 1888, p. 79.

192 Plin. nat. 33, 19, à propos de l’édilité curule de Cn. Flavius en 304 av. J.-C., suggère que le magistrat avait la disposition matérielle des fonds qu’il utilisa en dépit de l’avis du Sénat.

193 Liv. 10, 23, 11-13 ; 10, 33, 9 ; 10, 47, 4 ; 27, 6, 19 ; 33, 25, 3 ; 33, 42, 8-11 et 34, 53, 3-7 ; 35, 10, 11 ; 35, 41, 9-10 ; 38, 35, 5-6 ; CIL I², 2675 c = ILLRP 45. Daguet-Gagey 2015, p. 150 ; Piacentin 2018, p. 106 et 115-118.

194 Plb. 3, 26, 1.

195 C’était l’hypothèse de Palmer 1997, p. 17-21 (qui estimait que cette caisse avait été créée en 304 et qu’elle avait dû disparaître à l’époque syllanienne), reprise par Papi 1999, p. 222. Sur le passage de Polybe, voir introduction, « Aerarium et ‘Tabularium’».

196 Liv. 30, 39, 7 : Pecuniam ex aerario scribae uiatoresque aedilicii clam egessisse per indicem comperti damnati sunt, non sine infamia Luculli aedilis. Liv. 31, 50, 1-3 : signa aenea quinque ex multaticio argento in aerario posuerunt.

197 Le fait que Tite Live ne mentionne pas d’autorisation sénatoriale concernant l’utilisation des amendes édiliciennes ne signifie pas nécessairement que le Sénat ne se prononçait pas à ce sujet. Le seul cas où l’absence de SC est avérée est le financement de l’aedicula Concordiae en 304.

198 Le bâtiment n’est connu que par Liv. 24, 10, 9. Hülsen 1898, col. 1537 ; Palombi 1993, p. 136-137 ; Mazzei 2009, p. 343-346 et 351 ; Filippi 2012, p. 197-198, n. 523 et 567 identifient le tamieion des édiles cité par Polybe et l’Atrium Publicum.

199 S’il faut bien, à la suite de Mommsen 1907, III, p. 130, n. 9 et De Visscher 1963, p. 148-150, considérer que le fragment de Tuder (CIL I², 1409 = CIL XI, 4632) concernait les amendes funéraires, et que Cic. leg. 2, 64 avait gardé mémoire de leur mention dans les XII Tables. Les amendes sépulcrales n’apparaissent dans les inscriptions qu’au Ier siècle de notre ère : Van Haeperen 2002, p. 330 ; Gregori 2004, p. 403.

200 Gell. 1, 12, 18.

201 Varro ling. 5, 180 ; Gaius inst. 4, 13.

202 Par ailleurs, les terres publiques mises à la disposition des collèges sacerdotaux n’impliquent pas nécessairement l’existence d’une caisse pontificale (on peut imaginer que ces domaines pourvoyaient partiellement en nature aux besoins de chaque collège, et que leurs revenus, versés à l’Aerarium, étaient réservés pour l’usage des prêtres). À ma connaissance, les prêtres romains n’acquittaient pas, à l’époque républicaine, de droit d’entrée lors de leur accession à un sacerdoce. L’argent versé par les fidèles qui fréquentaient les sanctuaires était, aux dires de Tert. nat. 1, 10, 22, perçu par un redemptor, qui avait acquis ce droit en contractant avec les pouvoirs publics romains. Cazanove – Estienne 2009, p. 27, se fondant sur l’inscription CIL I², 800, suggèrent qu’à l’époque républicaine, l’argent déposé par les fidèles dans les thesauroi était peut-être directement géré par les édiles, mais Trisciuoglio 1998, p. 33-74 et 100-106 considère qu’alors, ce qui relevait des ultrotributa donnait généralement lieu à affermage.

203 Liv. 37, 51, 2-5 ; Val. Max. 1, 1, 2 (242 av. J.-C.) ; Liv. 37, 51, 1-5 (189 av. J.-C.) ; Liv. 40, 42, 9-10 (180 av. J.-C.) ; Per. 47, 1 ; Cic. Phil. 11, 18 (131 av. J.-C.). Les interventions du peuple concernaient les amendes supérieures à la multa maxima.

204 Liv. 1, 20, 5.

205 Liv. 7, 21, 5-8 ; 23, 21, 6 ; 24, 18, 12-14 ; 26, 35, 1-36, 12. Contrairement à Nicolet 1963, p. 421, qui jugeait que l’épisode de 352 av. J.-C. constituait un doublet de celui de la deuxième Guerre punique, Pollera 1983-1984, p. 454 et Storchi Marino 1993, p. 247 concluent à la crédibilité de la tradition concernant l’année 352.

206 Pollera 1983-1984, p. 452 ; Maselli 1986, p. 15 ; Petrucci 1991, p. 49, n. 90 ; Storchi Marino 1993, p. 227 ; Gabrielli 2003, p. 133.

207 Andreau 1999, p. 117-118.

208 Mommsen, 1889-1896, IV, p. 354-356.

209 Liv. 22, 60, 3-4. Coudry 2012, p. 120.

210 Il me semble donc que c’est plutôt à cette opération de 214 qu’il faut lier la création des triumuiri mensarii : le collège aurait été chargé, puisque les caisses publiques étaient vides, d’inscrire les maîtres des esclaves achetés par la cité sur la liste des créanciers du Trésor.

211 Par ailleurs, même si Tite Live ne l’indique pas explicitement, les triumuiri semblent s’être occupés des fonds versés au Trésor en 214 par les veuves et les orphelins : Andreau 1987, p. 234.

212 Maselli 1986, p. 14 ; Andreau 1987, p. 232, 235 n. 61 et 237 ; Andreau 1999, p. 115. Ñaco del Hoyo 2011, p. 379-380 et Ñaco del Hoyo 2012, p. 14 fait des triumuiri mensari une commission spéciale chargée d’obtenir des plus riches citoyens non mobilisés des fonds pour le fonctionnement de la cité.

213 Tucci 2005, p. 33. Cic. Att. 8, 7, 3 (= SB n° 155, 21 février 49) : Ad Philotimum scripsi de uiatico siue a Moneta – nemo enim soluit – siue ab Oppis, tuis contubernalibus.

214 Malrieu 2005, p. 95 et 114.

215 Shackleton Bailey 1965-1968, IV, p. 334 pensait que le passage faisait allusion soit à un dépôt que Cicéron aurait préalablement fait au temple de Moneta, soit au fait que l’on pouvait y échanger de l’argent-métal contre du numéraire, à un cours officiel (cette deuxième hypothèse est préférée par Muñiz Coello 1999, p. 54 et Ioannatou 2006, p. 63 et 378, mais elle me semble difficilement soutenable : voir infra, « Les opérations de change »).

216 Marquardt 1888, p. 81 et n. 2. Les inscriptions en question sont CIL VI, 298 et 8463.

217 Cic. Quinct. 17 : Cum pecuniam C. Quinctius P. Scapulae debuisset, per te, C. Aquili, decidit P. Quinctius, quid liberis eius dissolueret. Hoc eo per te agebatur, quod propter aerariam rationem non satis erat in tabulis inspexisse, quantum deberetur, nisi ad Castoris quaesisses, quantum solueretur. Decidis statuisque tu propter necessitudinem, quae tibi cum Scapulis est, quid iis ad denarium solueretur : C. Quinctius devait de l’argent à P. Scapula : c’est sur ton intervention, C. Aquilius, que P. Quinctius convient de payer ce qu’il devait aux enfants de Scapula. C’est par toi que cette question devait être tranchée, parce qu’à cause de la comptabilité en as il ne suffisait pas de regarder dans les « registres comptables » pour savoir combien était dû ; il fallait demander au temple de Castor combien il fallait payer. Tu conviens de la somme et tu établis, en raison des liens étroits que tu as avec les Scapulae, ce qu’il fallait leur payer en deniers. Platschek 2005, p. 33-39.

218 Contra Petrucci 1991, p. 112 (qui supposait que les transactions entre citoyens romains s’étaient faites en monnaies gauloises), le passage semble plus vraisemblablement se référer aux conversions nécessitées par les fluctuations monétaires du denier et de l’as dans les années 80 av. J.-C. (sur la situation de la monnaie de bronze, Assenmaker 2017, p. 424). Crawford 1970, p. 45 et Thilo 1980, p. 94 et n. 94 comprenaient que dans les années qui suivirent la lex Valeria et les mesures de Marius Gratidianus, il fut nécessaire de disposer d’indications permettant de calculer le montant révisé des dettes.

219 Andreau 1987, p. 208-209.

220 Voir introduction, « Les lieux d’exercice des questeurs et de leurs appariteurs ».

221 Rhet. Her. 1, 21 ; Cic. Att. 2, 6, 2 = SB n° 26 ; fam. 2, 17, 4 = SB n° 117 ; Lig. 35 ; off. 2, 29 ; Phil. 9, 16 ; 14, 38 ; Verr. II 1, 11 ; 1, 37 ; 3, 123 ; Liv. 4, 43, 4 ; 33, 42, 2 ; 38, 58, 1 ; 39, 7, 5 ; 39, 19, 3 ; 42, 6, 11 ; Val. Max. 2, 8, 1 ; Suet. Aug. 36, 1 ; lex Bantina, l. 11, 20 = CIL I², 582 = Crawford 1996, I, n° 7, p. 200 ; fragment de Tarente, l. 20 = CIL I², 2924 = Crawford 1996, I, n° 8, p. 212 ; lex de XX quaestoribus, col. I, l. 1 = CIL I², 587 = Crawford 1996, I, n° 14, p. 294 ; SC de Asclepiade, l. 8 ; Tab. Heracl., l. 37 et 39 = CIL I², 593 = Crawford 1996, I, n° 24, p. 364 ; CIL VI, 358 = ILLRP 160 = ILS 3102 ; CIL I², 808 = VI, 3828 = 31603 = 40904 a = ILLRP 465 = ILS 5799 = AE 1995, 90 = 2000, 254 ; CIL I², 810 = XIV, 153 = ILLRP 435 = ILS 895. Dans les sources grecques : SC de Asclepiade, l. 26 ; J. AJ 14, 219.

222 Dans les sources littéraires ferait exception Val. Max. 2, 2, 8, qui utilise la formule quaestor Aerarii, mais il peut s’agir, chez un auteur d’époque impériale, d’un calque de praetor Aerarii.

223 Lex agr., l. 46 = CIL I², 585 = Crawford 1996, I, n° 2, p. 118 ; lex de XX quaestoribus, col. I, l. 1-3 = CIL I², 587 = Crawford 1996, I, n° 14, p. 294.

224 Lex repet., l. 68 et 79, d’où reconstruction de la l. 66 = CIL I², 583 = Crawford 1996, I, n° 1, p. 72-73.

225 Peut-être lex repet., l. 72 (le texte est restitué) = CIL I², 583 = Crawford 1996, I, n° 1, p. 72.

226 Lex Bantina, l. 24 = CIL I², 582 = Crawford 1996, I, n° 7, p. 201 ; lex de XX quaestoribus, col. I, l. 9, 15, 19, 23, 27, 31 = CIL I², 587 = Crawford 1996, I, n° 14, p. 294-295.

227 C’est l’opinion de Pina Polo – Díaz Fernández 2019, p. 79.

228 Becker 1843-1867, II/2, p. 338, n. 848 ; Lange 1876-1879, I, p. 389 et 891-892 ; Willems 1872, p. 259 ; Willems 1880, p. 299 ; Madvig 1881-1882, I, p. 440 ; Karlowa 1885-1901, I, p. 255 ; Mommsen, commentaire à la lex Cornelia, dans CIL I, p. 110 ; Mommsen 1889-1896, IV, p. 225 ; Wesener 1963, col. 809 et 811 ; De Martino 1972-1975, I, p. 233-234 ; Kunkel 1995, II, p. 512 et 514-515 ; Pina Polo – Díaz Fernández 2019, p. 80, pour la réfutation à juste titre de Crawford 1974, I, p. 313, qui pensait qu’un seul questeur était en charge de l’Aerarium.

229 Plu. Cato Mi. 18, 5 ; 16, 9 et 18, 6.

230 Lange 1876-1879, I, p. 893-894 tirait de Cic. Sest. 8 l’idée qu’à partir de Sylla, deux questeurs supplémentaires furent affectés à Rome au service des consuls, et pensait même que deux autres questeurs avaient pu être adjoints aux questeurs urbains. L’un de ces questeurs aurait assumé la prouincia aquaria.

231 Les questeurs urbains attestés pour la période 81-49 av. J.-C. sont :

83 ? : M. Fonteius (Cic. Font. 1).
81 : L. Valerius Triarius (Cic. Verr. II 1, 37), P. Cornelius Lentulus Sura (Cic. Verr. II 1, 37 ; Ps. Ascon. Verr. II 1, 37 p. 234 St.) 
81 ou 80 : A. Manlius A. f. (RRC 381).
74 : L. Plaetorius L. f. (RRC 396), P. (Cornelius) Lent(ulus) P. f. P. n. (RRC 397) ; Ser. Sulpicius Rufus (titulaire de la prouincia Ostiensis : Cic. Mur. 18).
66 : L. Domitius Ahenobarbus ? (Ascon. Mil. 22 p 39 St., avec la correction praetura en quaestura opérée par Manuce ; Schol. Bob. ad loc. p. 119 St., ad L. Domitium quaesitorem).
64: (M. Claudius) Marcellus (Plu. Cato Mi. 18, 3-4) ; M. Lollius (Plu. Cato Mi. 16, 6) ; M. Porcius Cato (Plu. Cato Mi. 16-18 ; Moralia 534 C-D = De la fausse honte, 15 ; Moralia 808 E = Préceptes politiques, 13 ; D.C. 47, 6, 4).
63: T. Fadius (Cic. Post red. in sen. 21) ; P. Sestius (Cic. Sest. 8 ; Schol. Bob. ad loc. p. 126 St.) ; P. Vatinius (titulaire de la prouincia aquaria : Cic. Vatin. 11-12).
61 : M. Curtius, P. Sextilius/Sestullius (Cic. Flacc. 30).
60 ou 58 : C. Trebonius (Cic. fam. 15, 21, 2 = SB n° 207 : il a refusé d’obéir aux ordres d’un tribun de la plèbe, donc il était à Rome).
59? Caecilius (Cic. Att. 2, 9, 1 = SB n° 29).
54 : Faustus Cornelius Sulla (Ascon. Scaur. p23 et 28 St. : était présent à Rome lors du procès de Scaurus) ; T. Ligarius (Cic. Lig. 35 : ou questeur en 56 ?).
49 : Cn. Nerius (RRC 441).
Pina Polo – Díaz Fernández 2019, p. 123-124 donnent pour leur part la liste suivante : M. Fonteius en 83 ; P. Cornelius Lentulus Sura et C. Valerius Triarius en 81 ; A. Manlius en 80 ; Cn. Cornelius Lentulus Marcellinus en 75 ? ; P. Cornelius Lentulus Spinther et L. Plaetorius en 71 ? ; M. Claudius Marcellus et M. Porcius Cato en 64 ; C. Cornelius Cethegus en 63 ? ; M. Curtius Peducaeanus et P. Sestullius en 61 ; C. Trebonius en 58 ? ; T. Ligarius en 54 ; Cn. Nerius en 49.

232 Cic. Flacc. 30.

233 Certains de ces postes, comme la prouincia aquaria ou la prouincia Ostiensis, n’étaient pas nécessairement pourvus chaque année : Muñiz Coello 2014, p. 519, n. 33 ; Pina Polo – Díaz Fernández 2019, p. 45, 49, 119.

234 Schol. Cic. in Clod. et Cur. fr. XI p. 87 St. : Apud aerarium sortiri prouincias et quaestores solebant et scribae, ut pro certo appareret in quam prouinciam uel cum quo praeside profiscerentur. Concrètement, la sortitio n’est en fait attestée que pour les questeurs provinciaux et pour la prouincia aquaria : Cic. diu. in Caec. 65 ; ad Q. fr. 1, 1, 11 = SB n° 1 ; 2, 3, 1 = SB n° 7 ; fam. 2, 19, 1 (= SB n° 116) ; fam. 13, 29, 3 (= SB n° 282) ; Vatin. 12 (pour la prouincia aquaria) ; Mur. 18. Cic. Mur. 18 évoque la loi Titia en vertu de laquelle Murena obtint sa province. Rotondi 1912, p. 333-334, suivi par Harris 1976, p. 105, estimait que cette loi instaura la prouincia aquaria, mais on pourrait tirer de Frontin. aq. 96 l’idée que la province existait depuis 116 ou 108 av. J.-C. Toutefois, d’autres interprétations ont été avancées : Hirschfeld 1877, p. 162 et n. 1, proposait soit de suivre Lange 1876-1879, I, p. 894, et de considérer que le titulaire de la prouincia aquaria ne s’occupait que de la comptabilité liée aux aqueducs, soit de conclure que la prouincia aquaria n’existait pas vraiment, et n’était qu’une expression dévalorisante de Cic. Vatin. 12 pour désigner la province de Vatinius (idem chez Pina Polo – Díaz Fernández 2019, p. 46). Robinson 1980, p. 53 juge que le SC de 116 ou 108 régla ponctuellement une situation exceptionnelle. Elster 2020, p. 281 estime que la prouincia aquaria fut pourvue de temps en temps entre 116 et 81, puis devint permanente à partir de Sylla ; la loi Titia serait quant à elle une disposition de 99 relative à l’organisation de la questure.

235 Cic. fam. 7, 30, 1 (= SB n° 265, début 44), pour des élections questoriennes interrompues.

236 Cic. Phil. 2, 50. Willems 1872, p. 259 ; Willems 1880, p. 298 ; Mispoulet 1882-1883, I, p. 127 ; Karlowa 1885-1901, I, p. 256 ; Mommsen 1889-1896, IV, p. 231, n. 1 ; Wesener 1963, col. 810 ; Pina Polo – Díaz Fernández 2019, p. 70.

237 Dig. 1, 13, 1, 2 (Ulp. Libro singulari de officio quaestoris) : Ex quaestoribus quidam solebant prouincias sortiri ex senatus consulto, quod factum est Decimo Druso et Porcina consulibus. Sane non omnes quaestores prouincias sortiebantur, uerum excepti erant candidati principis…

238 Harris 1976, p. 105. Mommsen 1889-1896, IV, p. 231, n. 1 estimait pour sa part que le SC en question avait institué les règles présidant à la détermination des provinces questoriennes.

239 Lex Cornelia de XX quaestoribus, col. I, l. 10, 14, 18, 26, 30 = CIL I², 587 = Crawford 1996, I, n° 14, p. 294-295 ; Cic. Verr. I 30 ; Schol. Gronov. Verr. I 30 p. 337 St. Willems 1872, p. 221 ; Willems 1880, p. 248 ; Madvig 1881-1882, I, p. 362 ; Karlowa 1885-1901, I, p. 186 et 259 (qui expliquait cette particularité par le fait que les questeurs recueillaient le serment prononcé par les autres magistrats lors de leur entrée en fonction) ; Mommsen 1889-1896, II, p. 275 et n. 4 ; Pina Polo – Díaz Fernández 2019, p. 65-67 (la mise en relation de la date d’entrée en fonctions des questeurs avec « l’examen des comptes de leurs prédécesseurs » procède d’une mauvaise compréhension de la procédure de dépôt des rationes à l’Aerarium – qui de toute façon ne concernait pas les magistrats en poste à Rome). La date du 5 décembre ne se serait imposée qu’à partir du IIe siècle (Lange 1876-1879, I, p. 896 ; Mispoulet 1882-1883, I, p. 126) ou à partir de Sylla (Pina Polo – Díaz Fernández 2019, p. 68 et 200).

240 Plu. Cato Mi. 18, 7. Lange 1876-1879, I, p. 890 et n. 7 considérait que le passage ne faisait état que d’un désaccord réglé à l’amiable ; Pina Polo – Díaz Fernández 2019, p. 81 y voient un usage de l’intercessio.

241 Mommsen 1889-1896, I, p. 43.

242 Lex Cornelia de XX quaestoribus, col. I, l. 7-8 = CIL, I², 587 = Crawford 1996, I, n° 14, p. 294. Il est vraisemblable que cette disposition était déjà en vigueur avant cette loi, afin qu’à Rome, les citoyens en contact avec les autorités publiques n’eussent pas eu à dépendre du bon vouloir de personnels serviles (Mommsen 1889-1896, I, p. 381). En revanche, les épitaphes des appariteurs montrent qu’il n’était pas nécessaire d’être ingénu, au moins pour les uiatores.

243 Liv. 40, 29, 3-10 (181 av. J.-C.) : 3. Eodem anno in agro L. Petilii scribae sub Ianiculo, dum cultores altius moliuntur terram, duae lapidae arcae, octonos ferme pedes longae, quaternos latae, inuentae sunt…4. Litteris Latinis Graecisque utraque arca inscripta erat, in altera Numam Pompilium, Pomponis filium, regem Romanorum, sepultum esse, in altera libros Numae Pompili inesse…9. Q. Petilius praetor urbanus studiosus legendi eos libros a L. Petilio sumpsit. 10. Et erat familiaris usus quod scribam eum quaestor Q. Petilius in decuriam legerat ; Cic. Catil. 4, 15 : Pari studio defendae rei publicae conuenisse uideo tribunos aerarios, fortissimos uiros ; scribas item uniuersos, quos cum casu hic dies ad aerarium frequentasset, uideo ab exspectatione sortis… ; Cic. dom. 74 : Scribae, qui nobiscum in rationibus monumentisque publicis uersantur ; Cic. Pis. 61 : Nummus interea, mi Caesar, neglectis ferculis triumphalibus, domi manet et manebit. Rationes ad aerarium rettuli continuo, sicut tua lex iubebat, neque alia ulla in re legi tuae parui. Quas rationes si cognoris, intelleges nemini plus quam mihi litteras profuisse. Ita enim sunt perscriptae scite et litterate ut scriba ad aerarium, qui eas rettulit, perscriptis rationibus, secum ipse caput sinistra manu perfricans commurmuratus sit : ratio quidem hercle apparet, argentum οἴχεται ; Cic. nat. deor. 3, 74 : Veniamus in forum. Sessum it praetor. Quid ut iudicetur ? qui tabularium incenderit. Quod facinus occultius : at se Q. Sosius splendidus eques Romanus ex agro Piceno fecisse confessus est. Qui transscripserit tabulas publicas : id quoque L. Alenus fecit, cum chirographum sex primorum imitatus est ; quid hoc homine sollertius ? cognosce alias quaestiones….sicae uenena peculatus, testamentorum etiam lege noua quaestiones ; Cic. In Clod. et Cur. frg. XI : Tanto prius ad aerarium uenit, ut ibi ne scribam quidam quemquam offenderet ; Gell. 13, 12, 5 : in M. Varronis Rerum Humanarum… 6. neque uocationem neque prensionem ut quaestores et ceteri qui neque lictorem habent neque uiatorem : cf. 13, 13, 5.

244 La datation républicaine des documents est fondée sur l’absence de cognomen des personnages.

Scribes : CIL I², 1313 = VI, 1816 = ILLRP 812 = ILS 1895 : L(ucii) Herenni(i) L(ucii) f(ilii) / Ste(llatina tribu) scr(ibae) q(uaestorii) ab / Aerario III / dec(uriarum) et liberteis / eius / q(uamquamuersum) p(edes) XII ; CIL I², 1490 = VI, 1827 = XIV, 3645 = ILLRP 813 = Mancini 1952, p. 16, n° 30 : P(ublius) Septumius P(ublii) f(ilius) // Col(lina tribu) scr(iba) q(uaestorius) / de sexs primis / P(ublius) Aquillius / Gallus / Fannia / uxsor ; CIL VI, 1814 : C(aii) Enni(i) Caii) f(ilii) Ter(entina tribu) / scri(bae) q(uaestorii) in f(ronte) p(edes) XX / in agr(o) p(edes) XX ; CIL VI, 1823 : M(arcus) Pompeius M(arci) f(iius) / Mai(cia tribu ?) / scr(iba) q(uaestorius) ; AE, 2010, 305 : M(arcus) Papirius M(arci) f(ilius) scr(iba) q(uaestorius) Cn(eus) Carisius L(ucii) f(ilius) pr(aetores) ex s(enatus) c(onsulto) muniu(erunt) ; CIL, VI, 33421 ? : [M(arco) Stlac ?]cio M(arci) l(iberto) / [cognomen ?] scrib(a) libr(ario) / [mag(istro) conl(egi) ?] quinquenn(ali) / [scrib(arum) libr(ariorum) ae]d(ilium) cur(ulium) aed(ilium) pl(ebis) q(uaestorum) / [lupercu]s Fabianus. Très éventuellement AE 1991, 115 : […F]uluiu[s …f(ilius) scr(iba) q(uaestorius) ab / a]erario I[II dec(uriarum) sibi et] Paullae […], mais l’état de la pierre ne permet en fait absolument pas de déterminer à quelle catégorie d’appariteurs elle se rapporte. AE 1991, 116 me semble également être beaucoup trop lacunaire pour être ajouté au corpus. Enfin, CIL I², 1299 = VI, 1862 = ILLRP 811, ne précise pas à quels magistrats il était rattaché, et pourrait donc avoir été un copiste privé : N(umerius) Decumius N(umerii) f(ilius) / Col(lina tribu) Vaarus scr(iba) / Volusia C(aii) l(iberta) Celsa / C(aius) Volusius C(aii) l(ibertus) Charit(us/o) / in fr(onte) p(edes) XIII in agr(o) p(edes) XVI. Giovagnoli 2021 propose d’ajouter CIL, VI, 10337, mais je ne suis pas sûre qu’il faille restituer à la ligne 3 de cette inscription q(uaestorius), car les attestations épigraphiques républicaines de scribes questoriens se présentent généralement sous la forme scr(iba) q(uaestorius), et la mention des décuries suit la titulature.

Viatores et praecones : AE 1959, 147 = 1968, 33 = 1987, 67 (Andreae 1957, col. 235-236, n° 20 ; Jory 1968, p. 125-126 ; More 1975, p. 241-262 ; Panciera 1986, p. 35-44 ; Romano 1990, p. 36 ; Di Stefano Manzella 2000, p. 252, n° 7 ; Purcell 2001, p. 657-659) : […Cor]nelius P(ublii) l(ibertus) Surus / [nome]nclator mag(ister) / [Capito]linus (quinquies ?) a(nnis) VIIII / [mag(ister ?) s]utorum praeco / [scr(iba ?) ab ae]rario ex tribus / [decuri]eis mag(ister) scribarum) poetar(um) ( ?) / [ludos] fecit in theatro lapidio / [ac]census co(n)s(ulis) et cens(oris) ; CIL VI, 1929 (si l’on postule que Q. Lucretius Q. l. avait un rapport avec le consul de 5 ap. J.-C. Q. Lucretius Vespillo, PIR, V, 412, et qu’il fut affranchi tôt) : Q(uinto) Lucretio Q(uinti) l(iberto) Gemello / uiatori quaestor(io) ab Aerar(io) / Q(uintus) Lucretius Q(uinti) l(ibertus) Chrestus / uiator quaestor(ius) ab Aerar(io) patrono fecit.
CIL
VI, 10621, s’il doit bien être daté de 23 av. J.-C., comme le pensait Mommsen 1891, p. 158, ferait en outre connaître un sex primus nommé L. Aelius.

245 CIL I², 587 = Crawford 1996, I. n° 14, p. 293-300 = ILMN, I, p. 70-71, n° 29 ; Rotondi 1912, p. 353-354.

246 Tac. ann. 11, 22, 6 : lege Sullae uiginti (quaestores) creati supplendo senatui, cui iudicia tradiderat. Mommsen dans CIL I, p. 108-110 ; Lange 1876-1879, I, p. 893 ; Gabba 1983, p. 488.

247 Le point est d’importance car l’historiographie moderne s’est heurtée à la difficulté de mettre en correspondance nombre de questeurs et nombre d’appariteurs (David 2019, p. 83).

248 D’une part, mesures transitoires à charge des consuls, d’autre part changements introduits par la loi Cornelia, à appliquer par les questeurs.

249 Brennan 2000, I, p. 449, qui évoque un rôle des préteurs et des édiles, ne repose sur rien.

250 Col. I, l. 32-33.

251 Angius 2016 ; David 2019.

252 Pour Angius 2016, p. 421, les librarii se définissaient par un type d’activité (ils étaient des copistes) ; pour David 2019, p. 58, 100-101, 108, 121-122, 127, ils avaient un statut différent de celui des scribes (ils étaient des appariteurs qui avaient fait le choix de sortir des décuries pour se mettre au service personnel d’un magistrat. J.-M. David suppose que leur recrutement relevait d’une procédure de delatio ad Aerarium, déclaration auprès du Trésor Public qui conditionnait leur rémunération, sur le modèle des titulaires de beneficia, mais Beschi 2013, p. 190 soulève une objection en suggérant que la delatio ad Aerarium ne pouvait pas se faire ex post, ce qui empêcherait par exemple de reconnaître cette procédure dans le recrutement par Verrès du scribe Potamo). Librarius, lorsqu’il se rapporte dans les sources littéraires à un scribe public (Cic. leg. 3, 46 et 48 ; Balb. 14 ?), paraît surtout être un terme à connotation péjorative.

253 David 2019, p. 93 et 96.

254 Mommsen 1889-1896, I, p. 402-403.

255 Mommsen 1848, p. 9 ; Mommsen 1889-1896, I, p. 388 : l’argument est que les épitaphes d’appariteurs ne font jamais état d’itération dans l’exercice des fonctions. Purcell 2001, p. 655 ajoute que la compétence technique de ces personnels incitait à les remployer. Cependant, si l’on suit l’hypothèse de M. Varvaro (les questeurs, à partir de l’époque syllanienne, choisissaient trois ans à l’avance les appariteurs d’un futur collège questorien), il paraît normal qu’il n’y ait pas eu plus d’itération parmi les appariteurs que parmi les questeurs du Trésor. Chaque collège de magistrats distribuait quelques postes à des clients, et n’avait aucun intérêt à reconduire les clients des autres questeurs.

256 Karlowa 1885-1901, I, p. 196-198 ; Mommsen 1889-1896, I, p. 397-398, 413 et 417. Pour les scribes : CIL I², 1313 = VI, 1816 = ILLRP 812 = ILS 1895, à laquelle il faut ajouter de nombreuses inscriptions d’époque impériale. Pour les praecones et les uiatores : Lex Corn. col. I, l. 9, 14, 18, 22, 26, 29.

257 Angius 2016, p. 410. Il me semble que c’est l’idée également envisagée par Kunkel 1995, II, p. 112 et par Purcell 2001, p. 654.

258 Angius 2016, p. 409 et 411 et David 2019, p. 91, 97-101, 108, 121 et 127.

259 Col. I, l. 8-11, 13-15, 17-19, 21-23, 25-27, 29-31. Purcell 2001, p. 654 et 660.

260 Gabba 1983, p. 490 ; Varvaro 1995, p. 583 ; Angius 2016, p. 410.

261 Col. I, l. 32-33. Le terme s’applique aux uiatores et praecones, qui relevaient donc du même ordo (Cohen 1984, p. 51).

262 CIL VI, 435.

263 CIL VI, 1810.

264 CIL VI, 1944.

265 CIL VI, 40702.

266 David 2019, p. 123.

267 Cohen 1984, p. 50.

268 Sur la dignité des appariteurs, David 2012, p. 263-280 ; Angius 2016, p. 412 et 416-418.

269 Purcell 2001, p. 654 rappelle que la lex Iulia theatralis attribuait aux décuries d’appariteurs des places réservées au théâtre. En revanche, on n’a pas trace à l’époque républicaine d’une mesure équivalente.

270 Lex Cornel., col. I, l. 1-6 et col. II, l. 31-37 ; Plu. Cato Mi. 16, 10. Mommsen 1848, p. 7 avait rapproché ces données des indications fournies par Frontin aq. 100, 3 et en déduisait qu’une liste nominale des appariteurs devait préalablement être déposée à l’Aerarium afin que leur paiement fût autorisé. Cf. Varvaro, 1998a, p. 459-472 et 2000, p. 115-118.

271 Tab. Heracl., l. 80-81 = CIL I², 593 = Crawford 1996, I, n° 24, p. 366 : quei scribae librarei magistratibus apparebunt, ei quo minus loceis publiceis, ubei is, <quoi> quisque eorum apparebunt / ius erit, apparendi caussa utantur, e(ius) h(ac) l(ege) n(ihilum) r(ogatur).

272 Romano 1990, p. 35 et 70-73 ; Horsfall 1976, p. 79. Les collèges d’appariteurs disparaissent de la documentation à partir de l’époque augustéenne : Panciera 1991, p. 276-277. Peut-être les décuries acquirent-elles alors une structure collégiale, puisque différents passages du Digeste (29, 2, 25, 1 ; 37, 1, 3, 4 ; 46, 1, 22, qui ne précisent pas toutefois de quel type de décurie ils parlent) suggèrent qu’elles étaient dotées du corpus.

273 Outre AE 1987, 67 et CIL VI, 33421 supra, AE 1939, 153 = Paribeni 1938, p. 260 : M(arcus) Claudius M(arci) f(ilius) scr(ibarum) mag(ister) q(uaestoriorum) et aed(iliciorum) cur(ulium) arbitratu Philarguri Maioris (ou maioris) l(iberti) ; CIL I², 1356 = VI, 37148 = ILLRP 773 = ILS 9040 : T(itus) Perperna T(iti) f(ilius) / Quadra / mag(ister) scr(ibarum) / C(aius) Hostius L(ucii) f(ilius) Col(lina tribu) / redempt(or) / in fronte ped(es) XX in agr(o) ped(es) XX ; CIL, VI, 1933 (Di Stefano Manzella 2000, p. 253, n° 10 : 2e moitié du Ier siècle av. J.-C.) : Q(uintus) Considius Q(uinti) l(ibertus) Eros[s] / uiator aed(ilium) pl(ebis) lege Papiria / lupercus Quinctial(is) uetus / accensus co(n)s(ulis) / magister trium / decuriarum Considia Q(uinti) l(iberta) Ammia l(iberta) ; CIL, VI 1942 = 7446 = ILS 1918 : […] Valerius L(ucii) l(ibertus) / Stasimus mag(ister) / conl(egi) uiatorum. CIL, VI 1933, qui paraît mettre en relation décuries et structure collégiale, doit simplement faire référence à un collège des uiatores, dans la mesure où il semble qu’il y ait eu en tout trois décuries pour ces appariteurs, une pour les consuls et les préteurs, une pour les questeurs et une pour les magistrats de la plèbe (cf. CIL VI, 1887 et 1933 et 1935).

274 Fest. p. 446-448 L. : Scribas proprio nomine antiqui et librarios et poetas uocabant ; at nunc dicuntur scribae equidem librari, qui rationes publicas scribunt in tabulis. Itaque cum Liuius Andronicus bello Punico secundo scribsisset carmen, quod a uirginibus est cantatum, quia prosperius respublica populi Romani geri coepta est, publice adtributa est ei in Auentino aedis Mineruae, in qua liceret scribis histrionibusque consistere ac dona ponere ; in honorem Liui, quia is et scribebat fabulas et agebat.

275 Sur les esclaves publics, voir Mommsen 1889-1896, I, p. 366-378 ; Halkin 1897, p. 71-77 et 102-106 ; Rouland 1977, p. 261-278.

276 Eder 1980, p. 152-156.

277 En revanche, CIL VI, 1930, sous l’Empire, évoque un tabularius uiatorum quaestoriorum ab Aerario et un u(iatorum) q(uaestorium) ser(uus), et CIL VI, 2086, l. 64 (155 ap. J.-C.) fait état d’un publicus…promotus ad tabulas quaestorias transcribendas.

278 Dans ce cas, il n’y aurait aucun rapport entre nombre des décuries et nombre des magistrats qu’elles étaient censées servir.

279 Cic. dom. 74 et Pis. 61 ; Fest. p. 446-448 L. ; Ascon. Mil. p. 32 St. indique qu’en 52, les codices des librarii furent brûlés lors des funérailles de Clodius. Sur ce point, David 2012, p. 264.

280 Fallu 1974, p. 49. Jouanique 1968, p. 23 et 25, fait pour sa part de referre le terme qui désigne l’écriture comptable qui clôt une opération, et de perscribere celui qui renvoie à un versement d’argent. Le scribe ne procédait en tout cas pas à un contrôle comptable.

281 Fest. p. 508-510 L. : Viatores appellantur, qui magistratibus apparent, … quod ex agris plerumque homines euocabantur a magistratibus. Becker 1843-1867, II/2, p. 380 ; Karlowa 1885-1901, I, p. 197 ; Muñiz Coello 1996, p. 197 ; Kunkel 1995, II, p. 111 et 123 ; Angius 2016, p. 423 ; David 2019, p. 40.

282 Mommsen 1848, p. 38 ; Mommsen 1889-1896, I, p. 416, d’après Cic. Verr. II 3, 183 et le sac de monnaies représenté sur l’inscription CIL VI, 1932.

283 Karlowa 1885, I, p. 197 ; Mommsen 1889-1896, I, p. 416 ; Habicht 1958, col. 1932.

284 Cic. Sest. 57 (pour le royaume de Ptolémée en 58) ; Phil. 2, 64 (pour les biens de Pompée durant la dictature de César). David 2012, p. 267 ; David 2019, p. 52-55 ; Angius 2016, p. 422.

285 Cic. nat. deor. 3.74 : Veniamus in forum. Sessum it praetor. Quid ut iudicetur ? qui tabularium incenderit. Quod facinus occultius : at se Q. Sosius splendidus eques Romanus ex agro Piceno fecisse confessus est. Qui transscripserit tabulas publicas : id quoque L. Alenus fecit, cum chirographum sex primorum imitatus est ; quid hoc homine sollertius ? cognosce alias quaestiones….sicae ueneni peculatus, testamentorum etiam lege noua quaestiones. Moreau 1994, p. 139-140.

286 CIL I², 1490. Voir supra n. 238.

287 Mommsen 1889-1896, I, p. 392 et 398, qui mettait (cf. Mommsen 1848, p. 36) en rapport le nombre de 6 avec celui des trois décuries de scribes, suggérant que chaque décurie avait à sa tête deux sex primi (ou que la première décurie fournissait les sex primi). Idem chez Karlowa 1885-1901, I, p. 195.

288 Ou éventuellement servir, en corps, de témoins lors de la rédaction d’un chirographe. David 2012, p. 277 ; David 2019, p. 113.

289 Jakab 2011, p. 277-278 et 284-292 ; Sirks 2016, p. 265-266. Sur le formulaire de chirographes conservés, établis par les esclaves publics de la colonie de Pompéi, Leonhard 1899, col. 2301 ; Castresana Herrero 1987, p. 363-364 ; Andreau 1974, p. 14 et 331-332 ; Amelotti – Migliardi Zingale 1990, p. 297-304 ; Camodeca 1999, I, p. 36-37.

290 Plb. 6, 12, 8.

291 Sur les pouvoirs des questeurs, Gell. 13, 12, 6 et 13, 13.

292 Cic. leg. 3, 6.

293 Cic. Font. 5.

294 Sur les compétences questoriennes en général, Muñiz Coello 2014, p. 520-522.

295 Pina Polo – Díaz Fernández 2019, p. 86-87, 90, 95, 171, 173, 179, 202 ; Díaz Fernández – Pina Polo 2021, p. 47-48. Cette idée est en soi illogique, comme l’avait bien vu Willems 1885, II, p. 459 : comment des magistrats inférieurs auraient-ils pu exercer le moindre contrôle sur leurs collègues ou sur des magistrats supérieurs, qui pouvaient faire usage à leur égard d’un droit d’intercessio ?

296 Lex repet., l. 67-68 = CIL I², 583 = Crawford 1996, I. n° 1, p. 72.

297 Sur la litis aestimatio, Zumpt 1871, p. 395-411 ; Greenidge 1901, p. 502-503 ; Mommsen 1907, III, p. 24-28 ; Eder 1969, p. 208-209, n. 3 ; Venturini 1979, p. 207-217 ; Moreau 2019.

298 de Longperier 1868, p. 58-59 et 119-121 ; Saglio 1896, p. 1142 ; RPC, I, p. 715, n° 5409-5410 (sans légende, époque augustéenne).

299 Fallu 1979, p. 102-107.

300 Les deux dimensions (chronologie et source d'obligation) se recoupaient de toute façon.

301 App. BC 4, 187, dans un contexte privé, fait référence aux coffres de fer dans lesquels on garde l’argent et les livres. Cette possibilité existait donc.

302 App. BC 2, 98 montre Caton, à la veille de sa mort, faire mettre sous scellés les caisses publiques d’Utique : cela suggère qu’elles ne l’étaient pas jusqu’alors. Le passage peut toutefois se référer au bâtiment du trésor d’Utique, pas à son contenu.

303 Zonar. 8, 6.

304 Plb. 23, 14, 5 ; Liv. 38, 55, 13 ; Val. Max. 3, 7, 1 f ; indirectement Plu. Apopht. Scipio 9 = Moralia 196 F. En 49 av. J.-C., les clés du Trésor se trouvèrent entre les mains des consuls (D.C. 41, 17) : cette situation doit s’expliquer par le contexte de guerre civile.

305 Plb. 6, 13, 2 ; Cic. Verr. II 1, 34 ; 1, 37 ; Cic. Verr. II 3, 177 ; Cic. Font. 1-2 ; Cic. Flacc. 30 ; Cic. Phil. 14, 38 ; Liv. 24, 18, 14 ; Liv. 39, 19, 3 ; Val. Max. 3, 7, 1 f ; Sen. prov. 8 ; Plu. Cato Mi. 16, 10 et 17, 2 ; éventuellement Cic. inv. 2.124, si l’exemple ne renvoie pas aux pratiques des cités grecques. Lex repet., l. 61, 64, 66, 69 = CIL I², 583 = Crawford 1996, I, n° 1, p. 71-72 ; lex Cornel., col. I, l. 4 = CIL I², 587 = Crawford 1996, I, n° 14, p. 294.

306 Plaut. Bacch. 1075 ; Cic. Font. 3 ; Cic. fam. 2, 17, 4 = SB n° 117 ; Liv. 23, 41, 7 ; Liv. 32, 2, 2 ; Liv. 40, 41, 8 ; Liv. 42, 6, 11 ; Oros. 4, 17, 14 ; lex repet., l. 62, 67, 68 = CIL I², 583 = Crawford 1996, I, n° 1, p. 72-73 ; lex de prouinciis praetoriis, copie de Cnide, col. V, l. 43-45 = Blümel 1992, I, p. 13-32, n° 31 = Crawford 1996, I, n° 12, p. 244.

307 Cf. la sanction de cette lex : Lintott 1990, p. 9-10.

308 Pina Polo – Díaz Fernández 2019, p. 92. Voir également, pour la souscription de 210 av. J.-C., Flor. 1, 22 (2, 6), 25.

309 Pina Polo – Díaz Fernández 2019, p. 97.

310 Voir le vocabulaire employé en Plu. Cato Mi., 17, 3 (grammata et dogmata). Il ne semble pas que ces deux possibilités aient été fonction de la qualité de la personne qui se présentait à l’Aerarium (personnage officiel ou priuatus).

311 Liv. 42, 6, 6, pour les indemnités exigées d’Antiochos III : il y avait une date prévue pour chaque versement.

312 Coudry 2004, p. 530-544.

313 C’est ce que l’on peut inférer de Frontin aq. 100, 3, qui indique que les personnels du service des aqueducs, à l’époque augustéenne, touchaient en une fois leur traitement annuel.

314  Mantovani 2000, p. 667-668, n. 63. Le fait que l’argent destiné aux victimes transitait par le Trésor Public devait à la fois être dû au fait que son recouvrement ne pouvait être opéré que par un magistrat et manifester le caractère public du procès.

315 Mommsen 1907, III, p. 26, jugeait que les sûretés étaient fournies avant la litis aestimatio.

316 Mommsen 1905-1910, I, p. 58 estimait que donner des praedes revenait à payer l’amende, donc s’acquitter de ses obligations, mais dans ce cas, on ne voit pas pourquoi il aurait été possible que la totalité de la somme due ne fût ensuite pas réunie. Par ailleurs, Mommsen 1907, III, p. 27 ; Strachan Davidson 1912, II, p. 7 ; Crawford 1996, I, p. 107 rapprochaient la mention des praedes dans la lex repetundarum des lignes 10-11 de la lex Bantina (Crawford 1996, I, n° 7, p. 200), et en déduisaient qu’en cas de défaut de déclaration de praedes, les biens du condamné étaient automatiquement confisqués.

317 Moreau 2019, p. 150.

318 Dans la procédure récupératorienne prévue par la copie de Cnide de la loi sur les provinces prétoriennes, col. V, l. 40-42 (Crawford 1996, I, n° 12, p. 244), l’argent destiné à l’Aerarium transitait également par le préteur.

319 Ceci implique que l’on pouvait également déposer une requête, sans doute auprès du questeur, pour être reçu au Trésor Public.

320 Ordo signifie l’ordre des écritures dans un registre comptable en Cic. Q. Rosc. 6 et Scaur. 18.

321 Cic. Font. 4 : Extra ordinemne pecunia est data ? immo uero nummus nullus sine litteris multis commotus est. Le rapprochement est dû à Mommsen 1905-1910, I, p. 59.

322 Cf. Plu. Cato Mi. 17, 3-4. Sur le sens des pecuniae extraordinariae, Jouanique 1968, p. 8. Andreau 2007, p. 89 parle de « payments that did not conform to the regulations, that did not contain all the necessary information, for instance the name of the person and the reason for the operation ».

323 Le parallèle du dépôt au Trésor du butin de Servilius Vatia Isauricus va dans ce sens : Cic. Verr. II 1, 57.

324 Liv. 32, 2, 1-2 : Carthaginienses eo anno argentum in stipendium impositum primum Romam aduexerunt. Id quia probrum non esse quaestores renuntiauerunt, experientibusque pars quarta decocta erat, pecunia Romae mutua sumpta intertrimentum argenti expleuerunt. L’anecdote vise bien évidemment à illustrer la fides Punica.

325 Gell. 7, 5, 1, pour la paix romano-carthaginoise qui clôtura la deuxième Guerre punique ; Plb. 21, 32, 8-9, pour le traité romano-étolien de 189 av. J.-C. ; Plb. 21, 42, 19 et Liv. 38, 38, 13, pour la paix d’Apamée, avec le commentaire de Le Rider 1992, p. 267-277.

326 Bogaert 1976, p. 7 (et plus largement p. 6-12 pour les différentes méthodes d’essai employées dans l’Antiquité) ; Le Rider 1992, p. 270.

327 Cette hypothèse pourrait être étayée par le fait qu’en 199, les Carthaginois furent contraints d’emprunter la somme manquante, mais Andreau 2001, p. 216, tend à penser que les Puniques le firent auprès de la cité romaine.

328 Andreau 1987, p. 73-74, 182-184, 348-349 et 356.

329 Andreau 1987, p. 504 estime qu’en 199 av. J.-C., les Carthaginois durent livrer du métal non monnayé, car on n’aurait pas pratiqué l’essai par le feu sur du numéraire, pour lequel on recourait à la pierre de touche ou à des méthodes empiriques.

330 Andreau 1987, p. 73.

331 Papi 2002, p. 47 et 56.

332 C’est l’opinion d’Andreau 1987, p. 504.

333 Andreau 2001, p. 169-170.

334 Les tessères semblent avoir attesté qu’un sac de monnaies avait fait l’objet d’un contrôle : Andreau 1987, p. 491-493 ; Andreau 2001, p. 159.

335 Plin. nat. 33, 132 : Miscuit denario triumuir Antonius ferrum, miscent aera falsae monetae ; alii et ponderi subtrahunt, cum sit iustum LXXXIIII e libris signare. Igitur ars facta denarios probare, tam iucunda plebi lege, ut Mario Gratidiano uicatim totas statuas dicauerat.

336 Pedroni 2006, p. 78.

337 C’est la date traditionnelle attribuée à la préture de Gratidianus depuis Münzer 1928c, n° 42, col. 1826 (Broughton 1951-1986, II, p. 57 ; Brennan 2000, II, p. 380, 384, 460 et 748).

338 Cic. off. 3, 80 : cum praetor esset collegiumque praetorium tribuni plebi adhibuissent, ut res nummaria de communi sententia constitueretur ; iactabatur enim temporibus illis nummus sic, ut nemo posset scire, quid haberet. Conscripserunt communiter edictum cum poena atque iudicio constitueruntque, ut omnes simul in rostra post meridiem escenderent. Et ceteri quidem alius alio, Marius ab subselliis in rostra recta idque, quod communiter compositum fuerat, solus edixit.

339 Lo Cascio 1979, p. 231-236 et 2018, p. 143 (les mesures de Gratidianus visaient à assurer l’efficacité de la loi Papiria qui elle-même, en introduisant l’as semioncial, cherchait à garantir les échanges quotidiens opérés en monnaies de bronze : il s’agissait donc d’affirmer la valeur fiduciaire de cette monnaie, de fixer un rapport légal entre argent et bronze et d’obliger les citoyens à accepter la monnaie frappée par les pouvoirs publics) ; Santalucia 1979b, p. 5-9 et 1982, p. 53 (Gratidianus proposa une loi qui instaura des bureaux publics de vérification des monnaies, et émit un édit qui accordait une action privée contre qui aurait par dol payé avec de la fausse monnaie) ; Balbi De Caro 1993, p. 64 ; Heinrichs 2008, p. 266-267 ; Kay 2018, p. 155 (il s’agissait de contrôler le taux de change entre argent et bronze pratiqué par les changeurs).

340 Lo Cascio 1982, p. 206-207 (alors que suite aux années de guerre civile, la valeur des monnaies ne coïncidait plus avec la quantité de fin qu’elles contenaient, Gratidianus fit connaître auprès du public la nouvelle valeur légale, interdit de refuser les monnaies frappées par la Moneta romaine, et garantit que les pouvoirs publics assumeraient la tâche de vérifier les espèces en cas de besoin) ; Verboven 1994, p. 121 et 126-129 (Gratidianus dut encadrer l’activité des contrôleurs privés de monnaies) ; Pedroni 2006, p. 75-92 (Gratidianus promut le retour à l’as oncial ; il œuvra au rétablissement de la valeur de la monnaie d’argent ; parallèlement, la disposition évoquée par Pline aurait concerné spécifiquement la lutte contre la fausse monnaie).

341 Crawford 1964a, p. 3 (Pline fait état de monnaies formées d’un mélange d’argent et de fer, ce qui est techniquement impossible ; on connaissait avant Gratidianus des moyens de vérifier le titre des monnaies ; on ne peut pas non plus interpréter le passage de Pline comme une allusion à une reprise d’un contrôle des monnaies après une période d’interruption) ; Thommen 1989, p. 170.

342 Santalucia 1982, p. 53. Crawford 1964b, p. 31 avait l’air de considérer que les priuati pouvaient échanger leurs espèces à l’Aerarium, et Verboven 1994, p. 126 s’interroge, sur la base de cette remarque, sur l’existence d’un service de vérification des monnaies ouvert aux simples citoyens.

343 Burnett 1982, p. 135-136.

344 Les tessères ne semblent avoir été utilisées que par des particuliers, et pour des monnaies qui étaient transportées : Andreau 1982, p. 209 ; Andreau 1987, p. 485-500 et 505 ; Andreau 2001, p. 163 et 166.

345 Zehnacker 1979, p. 171 ; Lo Cascio 1982, p. 207-208 et 2018, p. 143 ; Heinrichs 2008, p. 266.

346 Il faudrait donc penser les rapports des questeurs et des triumvirs monétaires sur le modèle de ceux qui unissaient questeurs et triumvirs capitaux (Cascione 1999, p. 22). Cf. Revillout 1866, p. 13-14 ; Pink 1952, p. 50 ; Pink 1956, p. 62.

347 Crawford 1974, I, p. 42 et II, p. 602 et 615-616.

348 Pedroni 1993, p. 73 reprend la même perspective, avec des nuances. En revanche, Buttrey 1977-1978, p. 151 souligne qu’aucune source directe n’étaye cette idée.

349 Barthélémy 1847, p. 364 ; Blanchet 1896, p. 19 ; Crawford 1974, II, p. 617 ; Pedroni 1993, p. 73 ; Pedroni 2000, p. 135-136, 140-142, 144-146 ; Catalli 2001, p. 299.

350 À l’époque où l’on pensait que le triumvirat monétaire était une fonction intermittente, Blanchet 1896, p. 18 considéra que l’on pouvait expliquer les frappes questoriennes par l’absence de monetales.

351 Pink 1952, p. 57-58 et 60 ; Breglia 1964, p. 142 ; Crawford 1974, II, p. 603 et 617 ; Pina Polo – Díaz Fernández 2019, p. 107 et 111.

352 Pink 1952, p. 53 avait envisagé cette possibilité, sur la base d’une comparaison des triumvirs monétaires avec les triumvirs capitaux, qui auraient originellement été nommés par le préteur urbain (idem chez Catalli 2001, p. 304) ou plus vraisemblablement par les consuls (Cascione 1999, p. 23, n. 66). D’autres reconstructions ont été avancées : la plus commune fait des monétaires des magistrats élus annuellement (Pink 1952, p. 54 ; Crawford 1974, II, p. 602 ; Mattingly 1982, p. 10), mais Burnett 1977, p. 40-42 et 44 et Harl 1996, p. 210 jugent probable que les monétaires aient été nommés par les consuls jusqu’à l’époque césarienne.

353 En d’autres termes, je ne vois pas pourquoi l’intermédiaire des questeurs aurait été nécessaire à l’exécution des SC portant sur les questions monétaires.

354 C’est peut-être aussi au rôle joué par les questeurs dans les frappes monétaires qu’il faut rattacher l’allusion de Plin. nat. 33, 62 à une catégorie de feuilles d’or dites questoriennes.

355 Sydenham 1952, p. XLIX ; Pink 1956, p. 59 ; Breglia 1964, p. 140 ; Zehnacker 1973, I, p. 59 ; Crawford 1974, II, p. 601-603 ; Mattingly 1982, p. 16 ; Pedroni 2000, p. 140 et 145 ; Pina Polo – Díaz Fernández 2019, p. 107.

356 Peut-être la première expédition contre les Cimbres et les Teutons pour RRC 286, la première année de la guerre de Sertorius pour RRC 366, le déclenchement de la deuxième guerre de Mithridate pour RRC 397, la mobilisation des troupes par les consuls de 49 av. J.-C., en vue de la guerre civile, pour RRC 441.

357 RRC 330 : Crawford 1974, I, p. 73.

358 RRC 396.

359 Respectivement, RRC 326 et 331-333 et RRC 375 et 381.

360 On trouve les formes arg(entum ou –o) pub(licum ou –o) (RRC 325), ex a(rgento) p(ublico) (RRC 322, 352, 353), pu(blicum) (RRC 324), p(ublicum) (RRC 328), a pu(blico) ou a(rgento) pu(blico) (RRC 344). Pink 1952, p. 57 proposait d’ajouter RRC 338 et 337 et 340, mais Crawford 1974, I, p. 339 et II, p. 611 ne développe pas les sigles LPDAP et ELP comme une référence à l’argentum publicum ou au publicum. Idem pour RRC 385, où Sydenham 1952, p. XLIX comprenait SCDT comme s(enatus) c(onsulto) d(e) t(hesauro), tandis que Crawford 1974, I, p. 402 restitue s(tips) c(ollata) d(ei) t(hesauro), puisque le motif apollinien du revers paraît faire référence aux Ludi Apollinares.

361 Pink 1952, p. 56.

362 Pedroni 2000, p. 135, 139-142, 145.

363 Les monnaies en question sont recensées par Crawford 1973, p. 97, n° 37 a et 37 b, 38 a ; Crawford 1976-1977, catalogue p. 153-159 ; Pellegrino 2003, p. 128 ; RPC, I, p. 159-160. Crawford 1973, p. 53-54 comprenait la légende SPSC comme s(emis) P(aestum ou Paestanorum) s(enatus) c(onsulto), qui est la restitution la plus communément acceptée. L’hypothèse s(ua) p(ecunia) de L. Pedroni repose par conséquent sur des bases plus que fragiles.

364 Les formules onomastiques qui apparaissent sur les monnaies ne seraient donc pas celles de magistrats qui garantiraient la valeur de l’émission, mais celles des individus qui procuraient le métal à la cité : les personnages en question seraient ou les monétaires, ou des individus qui avaient affermé auprès des services de Moneta la fourniture de métal pour les frappes, ou des adjudicataires de l’impôt, dont le produit aurait été utilisé pour une émission.

365 Domergue 1994, p. 101-105 ; Rowan 2013, p. 371 et 378.

366 Crawford 1974, II, p. 605.

367 Barlow 1977, p. 295-301 mettait la chronologie des monnaies argentum publicum en relation avec les guerres gauloises de la fin du IIe et du début du Ier siècle av. J.-C., et en déduisait que le métal nécessaire à la fabrication avait été fourni par l’Aerarium Sanctius.

368 Crawford 1974, II, p. 605 ; Lo Cascio 1979, p. 233, n. 75.

369 Pedroni 2000, p. 138.

370 Barlow 1977, p. 298.

371 Mattingly 1982, p. 23.

372 À moins qu’on ne pense que les monnaies RRC 322, 324, 325, 344, 352-353, qui sont datées entre 102 et 85 av. J.-C., arboraient une indication garantissant leur qualité, à une période où le titre des deniers fut sujet à variation : Crawford 1974, II, p. 569 et tableau p. 570-571 donne un récapitulatif du taux d’argent présent dans les monnaies aux différentes périodes.

373 Crawford 1974, II, p. 633. La dépense majeure aurait bien sûr été les frais d’entretien des armées.

374 Crawford 1974, II, p. 617-618 et 633.

375 Crawford 1974, II, p. 641 : on obtient ainsi un chiffre minimum, en postulant qu’à chaque marque de contrôle correspondit un coin.

376 Crawford 1974, II, p. 694 et 696.

377 Cette donnée pourrait être déduite de Cic. Pis. 86 et Caes. civ. 1, 23, 4.

378 Crawford 1974, II, p. 698-703.

379 Hersh, 1977, p. 36 ; Buttrey 1977-1978, p. 152. Zehnacker 1973, II, p. 160-162 avait par ailleurs conclu de l’examen de l’émission RRC 340/1 que les ateliers n’exploitaient pas en général toutes les possibilités théoriques offertes par les séries de marques de contrôle : calculer a priori le nombre de coins de revers à partir de ces dernières conduisait à surévaluer la quantité de coins. Zehnacker 1978, p. 34 suggérait donc qu’une série de marques de contrôle n’avait été employée entièrement que si elle était représentée par deux tiers d’éléments conservés. Buttrey 2011, p. 105 relève de son côté que M. H. Crawford n’a pas tenu compte du facteur représenté par la durée de vie variable des différents coins.

380 Les études d’archéologie expérimentale de Sellwood 1963, p. 226-228 avaient abouti à l’idée qu’on ne pouvait frapper que 10000 pièces par coin. Mattingly 1977, p. 206-208 calculait pour sa part, pour l’émission de C. Annius, que le nombre de pièces frappées par coin de revers se montait à 15000. De Callataÿ 2006, p. 73 conclut en revanche d’une étude sur le taux de conservation des monnaies antiques qu’une productivité de 30 000 pièces par coin n’est pas « déraisonnable ».

381 Buttrey 2011, p. 108-110 a recensé les nombreuses incertitudes qui interdisent de tirer des conclusions fermes à partir de l’exemple de C. Annius : on ignore combien de légions Annius avait sous ses ordres, si elles servirent un an ou deux, si l’émission dont il bénéficia était destinée seulement à acquitter le stipendium ou également à financer d’autres postes de dépense, quelle était l’ampleur des retenues sur la solde, et en outre M. H. Crawford considère en bloc les deniers RRC 366 frappés en Italie et ceux produits dans la péninsule ibérique, alors que les deux ateliers sont susceptibles d’avoir fonctionné de façon différente. Du coup, suivant les réponses apportées à ces différentes questions, on obtient une estimation du nombre de pièces frappées par coin qui va de 1119 à 90 000. Voir en outre Buttrey 1977-1978, p. 152-153 ; Buttrey 1993, p. 336-339, 342 et 345 et Buttrey 1994, p. 341-352.

382 Lo Cascio 1982, p. 87-89 était allé dans le même sens en soulignant en particulier qu’au IIe siècle av. J.-C., les légions romaines actives dans les provinces étaient probablement soldées en partie en monnaies régionales.

383 Pink 1952, p. 57 ; Crawford 1974, II, p. 617.

384 Cic. Att. 2, 6, 2 = SB n° 26, avril 59 : scripsi ad quaestores urbanos de Quinti fratris negotio. Vide quid narrent, ecquae spes sit denari an cistophoro Pompeiano iaceamus ; Att. 2, 16, 4 = SB n° 36, fin avril ou début mai 59: Quaestores, autem, quaeso, num etiam de cistophoro dubitant?. Ioannatou 2006, p. 260 rapporte à la même affaire ad Q. fr. 1, 3, 7 = SB n° 3 (Ides de juin 58), ce qui signifierait que la somme, en définitive, fut bien versée par le Trésor (mais on ne sait dans quelle monnaie).

385 Shackleton Bailey 1965-1968, I, p. 364 et p. 383-384 ; Jouanique 1968, p. 17. Ioannatou 2006, p. 260 pensait pour sa part que les indemnités provinciales des gouverneurs étaient payées par tranche annuelle et que Quintus souffrit d’un retard de paiement. Toutefois, le fait que Cicéron ait pu craindre un non versement pur et simple suggère qu’il s’agissait plutôt d’une rallonge.

386 Dans ce cas, comme le Sénat devait voter une somme en unités de compte romaines, le Trésor se chargeait sans doute de la conversion. Il est aussi possible que la situation évoquée par les deux lettres de Cicéron ait été exceptionnelle. On peut en effet penser que le triomphe de Pompée de 61 av. J.-C. avait fait entrer au Trésor Public une masse considérable de cistophores qui n’avaient pas été refrappés en monnaies romaines, et que les services de l’Aerarium, dans les années qui suivirent, « écoulèrent » progressivement ces espèces en acquittant certains paiements publics dans cette monnaie (la dotation du gouverneur d’Asie permettant en quelque sorte de réexpédier les cistophores dans leur région d’origine).

387 Cic. Quinct. 17, cité supra, « l’Vrbs disposait-elle d’une banque publique ? ».

388 Pour l’hypothèse d’un « cours officiel du change » à Rome, Marquardt 1888, p. 81, n. 4, suivi par Maselli 1986, p. 119 ; Piazza 1987, p. 289. Contra, Crawford 1970, p. 45 et Thilo 1980, p. 94 et n. 94. Bresson 2014, p. 528-529 souligne la diversité des cas de figure sur ce point dans les cités grecques.

389 Andreau 1987, p. 516.

390 Cic. Verr. II 3, 181 : Ex omni pecunia quam aratoribus soluere debuisti certis nominibus deductiones fieri solebant, primum pro spectatione et collybo, deinde pro nescio quo cerario…Nam collybus esse qui potest, cum utuntur omnes uno genere nummorum ?… Scribae nomine de tota pecunia binae quinquagesimae detrahebantur…

391 Sur le sens du terme et ses occurrences, Bogaert 1968, p. 49 ; Bresson 2014, p. 527-533.

392 Eu égard à la minceur du dossier disponible, nous avons par exception intégré au corpus les documents postérieurs à l’année 49 av. J.-C.

393 En général, sur le ius hospitale, Mommsen 1864-1879, I, p. 343-345 ; Mommsen 1889-1896, IV, p. 255 ; VI/2, p. 214-215 ; VII, p. 370-372 ; Coudry 2004, p. 531-537, Ferrary 2007, p. 117-119 ; Grass 2015, p. 147-173. Les sources sont Liv. 45, 13, 12 ; 45, 14, 6 et 45, 14, 9 et Val. Max. 5, 1, 1d ; Liv. 45, 44, 7 et Val. Max. 5, 1, 1 d ; Val. Max. 5, 1, 1e. Le SC de Asclepiade indique que les questeurs devaient procéder à la locatio d’une résidence et de lautia destinés aux ambassadeurs étrangers : CIL I², 588 = Raggi 2001, p. 77-82, l. 7-8 du texte latin et l. 24-26 du texte grec. Sur ce texte, Gallet 1937, p. 401-402 ; Raggi 2001, p. 112-113. Plu. QR 43 indique en outre que la cité romaine prenait en charge si nécessaire les « frais médicaux » des ambassadeurs malades.

394 Ces honneurs étaient accordés aux ambassadeurs extérieurs morts durant leur mission à Rome, aux souverains étrangers et aux magistrats romains qui avaient rendu des services exceptionnels à la cité : Plu. QR 43 ; Val. Max. 5, 5, 1 c (pour Persée) ; Cic. Phil. 9, 16 (pour Ser. Sulpicius Rufus). Pina Polo – Díaz Fernández 2019, p. 103-104.

395 Tab. Heracl., l. 32-49 = CIL I², 593 = Crawford 1996, I, n° 24, p. 364 : quemquomque ante suum aedificium uiam publicam h(ac) l(ege) tueri oportebit, quei eorum eam uiam arbitratu eius aed(ilis) / quoius oportuerit, non tuebitur, eam uiam aed(ilis), quoius arbitratu eam tuerei oportuerit, tuendam locato ; / isque aed(ilis) diebus ne minus decem antequam locet aput forum ante tribunale suom propositum habeto, quam / uiam tuendam et quo die locatutus sit e<t> quorum ante aedificium ea uia sit ; eisque quorum ante aedificium / ea uia erit procuratoribusue eorum domum denuntietur facito, se eam uiam locaturum et quo die locaturus / sit ; / eamque locationem palam in foro per q(uaestorem) urb(anum) eumue quei aerario praerit facito. Quamta pecunia eam / uiam locauerit, tamtae pecuniae eum eos{q}ue, quorum ante aedificium ea uia erit, pro portioni quamtum / quoiusque ante aedificium uiae in longitudine et in latitudine erit, q(uaestor) urb(anus) queiue aerario praeerit in tabula<s> / publicas pecuniae factae referundum cu<r>ato. Ei <q>u<e>i eam tuemdam redemerit, tamtae pecuniae eum eos/ue adtribuito sine d(olo) m(alo). Sei is quei adtributus erit eam pecuniam diebus triginta proxum<e>is, quibus ipse aut pro/curator eius sciet adtributionem factam esse ei, <q>uoi adtributus erit, non soluerit neque satis fecerit, is, / quamtae pecuniae adtributus erit, tamtam pecuniam et ius dimidium ei, quoi adtributus erit, da<r>e debeto, / inque eam r<e>m is, quoquomque de ea re aditum erit, iudicem iudiciumue ita dato, utei de pecunia credita / <iudicem> iudicium{q}ue dari oporte<re>t. Quam uiam h(ac) l(ege) tuendam locari oportebit, aed(ilis), quem eam uiam tuendam locare oportebit, is eam uiam per / q(uaestorem) urb(anum) queiue aerario praerit tuendam locato, utei <quei redemerit> eam uiam arbitratu eius, quei eam uiam locandam / curauerit, tueatur. Quamtam pecuniam ita quaeque uia locata erit, t(amtam) p(ecuniam) q(uaestor) urb(anus) queiue aerario praerit / redemptorei, quoi e lege locationis dari oportebit heredeiue eius damdam adtribuendam curato. (trad. fr. dans Legras 1907, p. 17-19). Ce type de travaux relevait de la catégorie des sarta tecta : Trisciuoglio 1998, p. 7-11.
CIL I², 808 = VI, 3824 = VI, 31603 = VI, 40904 a = ILLRP 465 = AE 1995, 90 = AE 2000, 254 : [Haec] opera loc(ata) / [in refic(ienda) V]ia Caecilia de H[S n(ummum) ? / Ad refic(iendum) ? a]d mil(iarium) XXXV pontem in flu(u)io / [Farfaro pecuni]a adtributa est populo const(at) / [HS ? …]s(io ?) Q(uinti liberto) Pamphilo mancupi et ope[(ris) / magistro ( ?) cur(atore)] uiar(um) T(ito) Vibio T[e]muudino q(uaestore) urb(ano) / [Item uia gl]area sternenda af mil(iario) […ad / mil(iarium)… et per Ap]penninum muunien[da est af / mil(iario)…ad mil(iarium)…] XX pecunia adtributa [est populo / c]ons[t(at)] HS n(ummum) (150000 ?) L(ucio) Rufilio L(ucii) l(iberto) x[…/…]sti man[cu]pi cur(atore) uiar(um) T(ito) Vib[io / Temuudino q(uaestore) urb(ano) Af] mil(iario) LXX[XX]VIII ad mil(iarium) CXV […/ item per diuerticu]la Interamnium uo[rsus / uia sternenda est ad mil(iarium) …]XX pecunia adtri[buta est /… popu]lo const(at) HS (DC ? m(ilia) n(ummum) / mancupib(us) et oper(is) magistris ( ?) ] T(ito) Sepunio T(iti) f(ilio) x[…/… cur(atore) uia]r(um) T(ito) Vibio Tem[uudino / q(uaestore) urb(ano) Ad mil(iarium) …ad refic(iendos)] arcus dela[psos pec(unia) / adtr(ibuta) est pop(ulo) const(at) HS ? n(ummum)…] mancupi[bus / cur(atore) uiar(um) T(ito) Vibio Temuudino ] q(uaestore) urb(ano). Trisciuoglio 1998, p. 160, n. 1, fait du texte non une lex locationis, mais un document comptable lié à la passation du marché public.
CIL VI, 358 = ILLRP 160 (41 av. J.-C.) : P(ublio) Seruilio L(ucio) Antonio co(n)s(ulibus) / a(nte) d(iem) IIII K(alendas) Sext(iles) / locauit Q(uintus) Pedius q(uaestor) urb(anus) / murum Iunoni Lucinae / HS (380000 ?) / eidemque probauit. L’inscription proviendrait du couvent des sœurs de St. François de Paule sur l’Esquilin.
Frontin aq. 96 : Tutelam autem singularum aquarum locari solitam inuenio positamque redemptoribus necessitatem certum numerum circa ductus extra urbem, certum in urbe seruorum opificum habendi, et quidem ita ut nomina quoque eorum, quos habituri essent in ministerio per quasque regiones, in tabulas publicas deferrent ; eorumque operum probandorum curam fuisse penes censores aliquando et aediles, interdum etiam quaestoribus eam prouinciam obuenisse, ut apparet ex S. C. quod factum est C. Licinio et Q. Fabio cos (les manuscrits ont censoribus). L’interprétation du passage est problématique, et varie bien évidemment en fonction de celle qui est donnée de la prouincia aquaria. D’une part, le texte semble ne se rapporter qu’à la probatio des travaux, à l’intérieur de la ville de Rome : Rodgers 2004, p. 261. D’autre part, le SC de 116 ou 108 av. J.-C. qui confia cette responsabilité aux questeurs pourrait avoir été une disposition isolée : Del Chicca 2004, p. 377-378 ; Rodgers 2004, p. 261.

396 La découverte d’éperons de navires inscrits au nom de questeurs, probablement sur le site de la bataille des îles Égates (textes édités dans Tusa - Royal, 2012, p. 42-44 ; AE 2012, 635-636 et Prag 2017a, p. 287 ; AE 2014, 540 ; EDR 147214 et 147224-147229 ; Prag 2014a, p. 33-59 ; Prag 2014b, p. 199-201 ; Prag 2017b, p. 154-158 ; Prag 2019, p. 79-94), suggère que la passation des marchés publics concernant l’équipement de la flotte de guerre fut confiée dans les années qui précédèrent aux questeurs du Trésor.

397 Trisciuoglio, 1998, p. 184-185.

398 Tert. apol. 13, 5 ; nat. 1, 10, 22.

399 Il s’agit de la perception, par le redemptor ayant affermé la surveillance d’un sanctuaire, des taxes versées par les fidèles.

400 Soit parce qu’elles portaient sur des travaux ou des dépenses de faible envergure (Mommsen 1889-1896, IV, p. 256 ; Trisciuoglio 1998, p. 137 n. 95), soit parce qu’elles découlaient d’un SC (De Ruggiero 1925, p. 173 ; Trisciuoglio 1998, p. 110), soit parce qu’elles visaient à mettre des contribuables défaillants en conformité avec la loi (Trisciuoglio 1998, p. 106).

401 Sur l’identité, en général, du magistrat locator et probator, Trisciuoglio 1998, p. 141-147.

402 C’est explicite en Cic. Phil. 9, 16 ; Liv. 45, 13, 12 ; 45, 14, 6 et 9 ; Val. Max. 5, 1, 1 c-e, et dans le SC de Asclepiade.

403 Les travaux évoqués par CIL VI, 358 résultaient, selon Mommsen 1889-1896, IV, p. 257, n. 1, d’un « mandat extraordinaire du Sénat ». Dans ce cas, on peut penser qu’un ordre des consuls fit la médiation : la datation consulaire extrêmement développée qui ouvre l’inscription n’aurait pas une fonction purement chronologique, mais renverrait également au donneur d’ordre. L’inscription qui se rapporte aux travaux de la Via Caecilia montre de son côté un questeur oeuvrer en qualité de curator uiarum. Cette fonction exceptionnelle, peut-être introduite lors du tribunat de C. Gracchus, était alternativement confiée à des questeurs et à des personnages de rang au moins prétorien. Sur la base d’un SC, une loi comitiale donnait probablement au titulaire pouvoir d’affermer les travaux. L’exemple de César (Plu. Caes. 5, 9) a incité à faire de la cura uiarum une charge onéreuse, qui permettait de faire porter sur l’évergétisme les coûts d’aménagement de la voirie publique. Toutefois, le T. Vibius Temuudinus de l’inscription CIL I², 808 ne paraît pas avoir appartenu à une lignée particulièrement riche ou éminente. C’est donc peut-être simplement comme délégués des consuls que les questeurs étaient appelés à assumer une cura uiarum. Sur cette fonction, Mommsen 1889-1896, IV, p. 386-387 ; Coarelli 1996a, p. 58-59 ; Trisciuoglio 1998, p. 138. En revanche, le fait qu’un questeur ait pu assumer une cura uiarum ne signifie pas que la questure avait compétence sur la construction des routes, comme l’affirme Giovagnoli 2012, p. 208 (cf. Pina Polo – Díaz Fernández 2019, p. 105-107).

404 Cic. Phil. 14, 38 renvoie apparemment à un autre type d’iter administratif, où la locatio fut confiée aux consuls et où les questeurs se limitèrent à procéder au décaissement des sommes nécessaires. Il me semble en tout cas qu’on ne peut suivre l’idée d’Aubert 2003, p. 2, qui estime qu’à un contrat consensuel de mandat entre Sénat et questeur s’ajoutait un contrat de louage entre questeur et prestataire.

405 On sait en effet que lors de la vacance de la censure, magistrature généralement investie de la probatio des aqueducs, cette tâche revenait aux édiles (Daguet-Gagey 2015, p. 389). Il était apparemment possible de confier la question aux questeurs, comme en 116 ou 108 av. J.-C. A priori, plusieurs hypothèses semblent possibles : soit les édiles étaient empêchés ; soit les censeurs demandèrent spécifiquement au Sénat de confier la probatio aux questeurs, peut-être pour faciliter le règlement des redemptores.

406 L’analyse des l. 32-49 de la Table d’Héraclée se trouve dans Dirksen 1820, II, p. 218-267 ; Hardy 1924, p. 247-251 et 253-254 ; Nicolet 1987, p. 1-5 et et 7-10 ; Frei-Stolba 1989, p. 26, 28 et 30. Voir également les remarques de Pekary 1968, p. 113.

407 Tab. Heracl., l. 20-21 et 24-28 = CIL I², 593 = Crawford 1996, I, n° 24, p. 363-364.

408 Trisciuoglio 1998, p. 106.

409 Mommsen 1889-1896, IV, p. 208 et n. 1.

410 Trisciuoglio 1998, p. 106.

411 Cic. Verr. II 1, 142 : il s’agit des censeurs, consuls, préteurs et questeurs.

412 Tab. Heracl., l. 32-49 = CIL I², 593 = Crawford 1996, I, n° 24, p. 364.

413 Sur ce point, Brélaz 2003, p. 27-56.

414 Tab. Heracl., l. 37 = CIL I², 593 = Crawford 1996, I, n° 24, p. 364.

415 Brélaz 2003, p. 43.

416 Trisciuoglio 1998, p. 166-168, pour cette variété de contrats.

417 Trisciuoglio 1998, p. 181-183. Selon Karlowa 1885-1901, II, p. 30, cela se faisait par voie d’édit. Comme Mommsen 1889-1896, I, p. 232 notait qu’on n’a pas trace d’édit des questeurs, et que le ius edicendi était l’apanage des magistrats supérieurs, peut-être faut-il songer que les questeurs bénéficiaient en l’occurrence de l’aide des consuls.

418 Cic. Verr. II 1, 142 : Vbi illa consuetudo in bonis praedibus praediisque uendundis omnium consulum, censorum, praetorum, quaestorum denique, ut optima condicione sit is cuia res sit, cuium periculum ? Sur les sûretés, Frezza 1962, p. 3 et 9 ; Kaser 1980, p. 277, § 57.II.1 ; Cimma 1981, p. 64-69 ; Albanese 1982, p. 87-93 ; Biscardi 1991, p. 21-24 ; Van Gessel 2003, p. 95-122. Trisciuoglio 1998, p. 204, 215 et 220 juge que la remise des garanties se tenait après la conclusion du marché. Brélaz 2003, p. 34 suggère que le niveau des garanties requises était déjà précisé dans la lex locationis, et Trisciuoglio 1997, p. 197 souligne que le magistrat locator pouvait a priori exclure du marché les individus qui ne présentaient pas des sûretés suffisantes. Je me demande, même si on n’en trouve pas trace dans les sources, si les personnes désireuses de participer à un appel d’offre n’étaient pas appelées à faire une déclaration d’intérêt préalable, qui donnait l’occasion de vérifier leur statut civique et les garanties qu’elles pouvaient avancer. Trisciuoglio 1998, p. 187 souligne en effet qu’il fallait être citoyen romain pour remporter un marché public. Le magistrat qui procédait à la locatio devait par conséquent à un moment donné vérifier l’identité des adjudicataires, peut-être par le biais des listes du cens : Brélaz 2003, p. 42. 

419 CIL I², 698 = X, 1781 (trad. française dans Aubert 2003, p. 10-12).

420 Trisciuoglio 1998, p. 214.

421 Trisciuoglio 1998, p. 220-226, pour l’existence de ce type d’actes administratifs.

422 Trisciuoglio 1998, p. 228-239, contra Brélaz 2003, p. 48-49. 

423 Nicolet 1987, p. 6, n. 11. L’expression pecunia facta apparaît en Cic. Verr. I 16 (Vt primum e prouincia rediit, redemptio est huius iudici facta grandi pecunia) ; Verr. II 1, 92 (quo modo ex deciens HS sescenta sint facta, quo modo DC eodem modo quadrarint ut illa de Cn. Carbonis pecunia reliqua HS sescenta sint facta, quo modo Chrysogono expensa lata sint, cur id nomen infimum in lituraque sit, uos existimabitis) ; leg. 2, 51 (ueluti si minus quis cepisset, ne sacris alligaretur, et post de eius heredibus aliquis exegisset pro sua parte, id quod ab eo, quoi ipse heres esset, praetermissum fuisset eaque pecunia non minor esset facta cum superiore exactione quam heredibus omnibus esset relicta, qui eam pecuniam exegisset, solum sine coheredibus sacris alligari) et chez Sall. hist. 2, 34 M. (Quae pecunia ad Hispaniense bellum Metello facta erat). Au regard de ces témoignages, je me demande s’il ne faut pas comprendre simplement « sommes engagées ».

424 Ceci signifie-t-il que le riverain défaillant devait faire transiter la somme destinée au redemptor par le Trésor Public, comme dans la procédure d’indemnisation des victimes d’extorsions prévue par la lex repetundarum, ou bien que l’adjudicataire avait, au bout de trente jours, à faire une professio à l’Aerarium ?

425 Martin 1986, p. 329 ; Buchwitz 2009, p. 359-369.

426 Val. Max. 2, 2, 8 ; Scheid 2005, p. 261-263.

427 Les animaux destinés aux sacrifices faisaient l’objet d’une probatio qui pouvait parfois se placer dès l’élevage (Van Andringa 2007, p. 50).

428 Mommsen 1889-1896, IV, p. 252 ; Pina Polo – Díaz Fernández 2019, p. 91. Garcia Morcillo 2005, p. 44 déduit de Liv. 6, 4, 1-2, qui évoque les lendemains du triomphe de Camille sur Veii en 388 av. J.-C., que les ventes qui se déroulaient à Rome n’étaient pas, techniquement, des ventes sub corona, mais simplement des ventes sub hasta. Fest. p. 306 L. et Gell. 6, 4, 3 indiquent que les pouvoirs publics romains n’offraient aucune garantie à qui achetait aux enchères des prisonniers de guerre.

429 Plaut. capt. 34, 110-111, 452-453.

430 C’est du moins l’opinion de Talamanca 1955, p. 155-156, qui estime toutefois que l’allusion très générale de Varro rust. 2, 10, 4 se rapporte à des ventes de prisonniers de guerre effectuées à Rome ; Donadio 2016, p. 235-240.

431 Pina Polo – Díaz Fernández 2019, p. 93.

432 Liv. 28, 46, 4 ; Hyg. lim. grom. p. 115 La. = p. 82, l. 23-24 Campbell = 2, 23 Guillaumin ; contr. p125-126 La. = p. 92, l. 8-9 Campbell = 3, 6 Guillaumin ; contr. p. 131 La. = p. 96, l. 25-27 Campbell = 3, 23 Guillaumin ; Sic. Flacc. grom. p. 136-137 La. = p. 102, l. 34-p. 104, l. 7 Campbell = 1, 7 Guillaumin ; grom. p. 152 La. = p. 118, l. 26 Campbell = 3, 1 Guillaumin (cf. p118, l. 26-p. 120, l. 17).

433 Sacchi 2002, p. 77 et 83 ; Sacchi 2004, p. 200, 202, 207 et 210-211.

434 Crawford 1996, I, n° 2, p. 118. Le texte, sans les restitutions, est le suivant :

l. 43 […]<t>us est, dedit adsignauitue, quemue agrum locum de eo agro lo[…]pl sc quod M. Baebius tr pl IIIuir coloni<a>e deducend[…]

l. 44 […]m adsignatum esse fuiseue ioudicauerit utei in h l sc est quei l[…] extra eum agrum locum quei ager locus in ea cen[…]

l. 45 […]eum agrum locum quem ex h l colonei eiue quei in colonei numero […] oportebitue quod eius agri locei quoieique emptum est […]

l. 46 […]anceps praeuides praediaque soluti sunto eaque nomina mancup[…] quei aerarium prouinciam optinebit in tableis […]

l. 47 […]e mag Romano emit is pro eo agro loco pequnia<m> neiue praeuides nei[…] rem quod praes factus est populo obligatus est[…]

l. 48 […]m agrum locum manceps praesue factus est quodque […]aedium ob […]uei ager locus in Africa est quei Romae publice […]

435 Mommsen 1905-1910, I, p. 118 ; Crawford 1996, I, p. 55. Les questions ouvertes sont en effet nombreuses : dans la mesure où le passage se situe à la limite de la section de la loi qui porte sur l’Italie et de celle qui concerne l’Afrique, on ne sait à quel territoire elle se rapporte exactement ; le sens du terme emere (acheter ou louer) est débattu. Pour les différentes lectures des lignes 43-48, on consultera Mommsen 1905-1910, I, p. 73, 84-85 et 118 ; Hinrichs 1966, p. 283-285 ; Johannsen 1971, p. 284-300 ; Lintott 1992, p. 245-248 ; Crawford 1996, I, p. 169-171 ; De Ligt 2001, p. 182-217 ; Sacchi 2006, p. 421-423 ; Sacchi 2008, p. 538 et n. 3 ; Sisani 2015, p. 220-229.

436 Le fait que la loi, l. 47, utilise l’expression magistratus Romanus suggère que plusieurs catégories de responsables publics étaient susceptibles de passer le marché public en question.

437 Lintott 1992, p. 262.

438 Cic. Verr. II 1, 52 (adresse à Verrès) : Quid tum hos de te iudicaturos arbitratus es, cum uiderent te iam non contra accusatorem tuum, sed contra quaestorem sectoremque pugnare ? Cf. Gaius inst. 3, 78-79. Bruns 1882, II, p. 36 ; Talamanca 1955, p. 163 ; Pina Polo – Díaz Fernández 2019, p. 92.

439 Gaius inst. 4, 146 ; Ps. Ascon. Verr. II 1, 52 p. 236 St. et Verr. II 1, 61 p. 239 St. Rivière 2016, p. 16 ; Donadio 2016, p. 240-260, 262, 271-272 ; Buongiorno 2016, p. 643, 660, 668.

440 Alors qu’une réponse positive avait été donnée à cet égard par Klingmüller 1921, col. 982, Carrelli 1938, p. 455 n. 65 et p. 456 et Scherillo 1953, p. 201, Talamanca 1955, p. 161-171 conclut à un non liquet, mais estime cependant que dans certains cas, les pouvoirs publics pouvaient disposer du passage des créances et des dettes au sector. Donadio 2016, p. 272 estime pour sa part que la vente des biens aux enchères ne concernait que les res corporales.

441 Carrelli 1938, p. 455 jugeait que la confiscation des biens du condamné faisait de l’Aerarium leur propriétaire. Talamanca 1955, p. 159 a défendu l’idée que le sector acquérait bien un patrimoine, non le droit de le revendre. Par ailleurs, p. 162-163, il exclut que l’Aerarium ait pu être considéré comme l’héritier du condamné, et qu’il ait ensuite transmis ses droits au sector, dans la mesure où il est peu crédible qu’on ait, à l’époque républicaine, considéré que le Trésor était doté d’une personnalité juridique (idem chez Salerno 1990, p. 200 ; Donadio 2016, p. 241, 260, 271-272 ; Buongiorno 2016, p. 660). Enfin, p. 170, M. Talamanca postule qu’au moins à l’origine, le sector n’était pas obligé par les dettes du condamné, exception faite de celles que ce dernier pouvait avoir vis-à-vis de l’Aerarium.

442 Talamanca 1955, p. 161 et 172 et n. 2 ; Buongiorno 2016, p. 649-650.

443 Salerno 1990, p. 190.

444 Talamanca 1955, p. 173. Sur la procédure de vente des garanties fournies par les praedes, qui apparemmment comportait deux phases, la uenditio ex lege praeditoria et la uenditio in uaccum, Arangio-Ruiz 1960, p. 323.

445 Dans le cas des enchères concernant la viande : le règlement de Furfo (CIL IX, 3513) confiait en effet aux édiles la vente des produits des animaux sacrifiés.

446 Les consuls, pour éventuellement la vente de la praeda et celle des terres publiques ; le préteur, pour la mise à l’encan des biens des condamnés.

447 Garcia Morcillo 2005, p. 48.

448 Plu. Cato Mi. 36, 4 ; Morrell 2017, p. 120 ; Calvelli 2020, p. 213-229.

449 Cf. Cic. dom. 52 et Sest. 57. Calvelli 2020, p. 220.

450 Pernice 1873-1900, I, p. 351 ; Klingmüller 1921, col. 982 ; Carrelli 1938, p. 454 ; Scherillo 1953, p. 197.

451 La source principale de Tite Live sur l’épisode, Valerius Antias, situait le procès de l’Asiaticus après la mort de l’Africain (Liv. 38, 53, 8 et 38, 54, 8 : la dissuasio prononcée par L. Scipion contre la rogatio promue par L. Furius Purpurio aurait contenu une allusion à la mort de son frère Publius). Toutefois, Liv. 38, 56, 1-8 lui-même soulignait les contradictions entre les différentes traditions. La majorité des commentateurs modernes est d’avis que les faits durent suivre de peu la fin de la guerre contre Antiochos, et que les principaux protagonistes de l’affaire exercèrent leurs fonctions en 187 av. J.-C. (Münzer 1900a, n° 337, col. 1482 ; Fraccaro, 1956-1975, I, p. 376 ; Bandelli 1972, p. 314 ; Bandelli 1974-1975, p. 98 ; Bauman 1983, p. 199 ; Gruen 1995, p. 78 ; Beck 2005, p. 363 ; Briscoe 2008, p. 171 ; Brizzi 2006, p. 62-63).

452 Lex repet., l. 56-58 = CIL I², 583 = Crawford 1996, I, n° 1, p. 71 : [de praedibus dandis bonisue possidendis. Pr(aetor), quei eam rem quaesierit / e]um, quei ex h(ac) l(ege) condemnatus erit, q(uaestorei) praedes facito det de consili maioris partis sententia, quanti eis censuer[int. Sei ita p]raedes datei non erunt, bona eius facito puplice possideantur conq[uaerantur…q(uaestorei) / sc]riptum transdito, quaestor accipito et in taboleis popliceis scriptum habeto. Lex latin. Bantin., l. 10-11 = CIL I², 582 = Crawford 1996, I, n° 7, p. 200 : sei condemnatus / [erit pr(aetor) quanti erit praedes praediaqu]e ad q(uaestorem) urb(anum) det aut bona eius poplice possideantur facito. Le fragment de Clusium, l. 3 = CIL I², 597 = Crawford 1996, I, n° 9, p. 223 ([…bo]neis praedibusue eius ex [h(ac) l(ege) uendundeis ?]) me semble trop lacunaire pour être versé au dossier.

453 Sur la procédure, Mommsen 1907, III, p. 378-381.

454 Liv. 38, 54, 3-38, 55, 13 (Val. Ant. 45 P. = 46 Chassignet = 46 Beck-Walter = 49 et 51 Cornell). Le récit de l’annaliste détaillait un processus institutionnel complexe et mouvementé. Une rogatio tribunicienne visant, avec la collaboration du préteur urbain, à la mise en place d’une quaestio temporaire aurait d’abord été frappée d’une intercessio tribunicienne. Une seconde rogatio, à l’initiative du consulaire L. Furius Purpurio, aurait proposé d’élargir le champ des investigations et donné lieu à de vifs débat in contione. Les prises de position de Caton auraient conduit les tribuns de la plèbe auteurs de l’intercessio à retirer cette dernière, ce qui aurait permis un vote unanime du concile en faveur de la création de la quaestio. La cause, ensuite traitée par le préteur Q. Terentius Culleo, aurait consisté en une accusation pour peculatus, contre Lucius, deux de ses légats, son questeur et des appariteurs. Liv. 38, 55, 5 pourrait suggérer une accusation collective visant une societas, mais suggère en même temps que Lucius et les autres inculpés firent l’objet de procédures séparées. Tite Live relevait en outre que le montant des sommes réclamées à Lucius Scipion correspondait exactement à celui dont on avait demandé compte à Publius lors d’une séance mémorable au Sénat, qui dut constituer le premier acte de toute l’affaire (l’épisode est raconté également par Plb. 23, 14, 6-11 ; Val. Max. 3, 7, 1 e et Gell. 4, 18, 7-12). Le problème réside bien entendu dans le fait que Publius, légat de son frère durant la Guerre d’Antiochos, n’était pas le titulaire de l’imperium qui en théorie devait répondre des choix financiers pris durant la campagne. Fraccaro 1956-1975, I, p. 269, 296, 373, 375, et 399 ; De Sanctis 1907-1957, IV/1, p. 591 ; De Regibus 1959, p. 31 ; Scullard 1951, p. 291 ; Scullard 1970, p. 217 levaient la difficulté en suivant Val. Max. 3, 7, 1 e : la demande d’explications au Sénat aurait été adressée à Lucius, et Publius se serait limité à prendre la défense de son frère. De Sanctis 1907-1957, IV/1, p. 594 allait jusqu’à estimer que le premier procès narré par Tite Live comme étant celui de Publius avait en fait été celui de Lucius.

455 Gell. 6, 19, 1-8. Bandelli 1972, p. 310 estimait que ces annales devaient avoir été rédigées peu après l’époque gracchienne, dans la mesure où elles mettaient l’accent sur l’hostilité de Caton envers les Scipions. Seule l’inrogatio d’une multa par un tribun de la plèbe est ici évoquée.

456 Mommsen 1864-1879, II, 1879, p. 454 faisait du procès de L. Scipion le premier cas de répression du péculat par un procès devant le peuple ; Fraccaro 1956-1975, I, p. 376-377 et 400 ; Kienast 1951, p. 64 ; Bleicken 1955, p. 125 ; De Regibus 1959, p. 33 ; Scullard 1970, p. 219 ; Astin 1978, p. 61-62 ; Bandelli 1974-1975, p. 98 ; González Romanillos 2018, p. 249.

457 Bandelli 1974-1975, p. 107.

458 De Sanctis 1907-1957, IV/1, p. 595 ; Gagé 1953, p. 34-35 ; Gruen 1995, p. 76. Je ne vois cependant pas où, dans le récit transmis par Tite Live, apparaît une procédure devant les citoyens.

459 Fraccaro 1956-1975, I, p. 310 ; Scullard 1951, p. 294 ; Bandelli 1972, p. 312.

460 Liv. 38, 54, 3 formule l’acte d’accusation par pecunia capta ablata coacta ab rege Antiochos, ce qui renvoie à la définition du crime de repetundis élaborée au moins à partir de l’époque gracchienne : Venturini 1979, p. 248-292.

461 Bauman 1983, p. 208-209.

462 Santalucia 1998, p. 102, tout en jugeant le cas incertain, classe le tribunal qui jugea L. Scipion parmi les quaestiones extraordinariae. Bauman 1983, p. 208-210 a développé la démonstration la plus précise, en remarquant notamment qu’une quaestio était une solution appropriée eu égard à la difficulté de définir a priori, dans le cas de L. Scipion, le chef d’accusation.

463 Fraccaro 1956-1975, I, p. 288, 377 et 402, qui est suivi par González Romanillos 2018, p. 251, avait pour sa part estimé, à partir de Gell. 6, 19, 1-8, que l’amende et les praedes avaient été requis avant la fin du vote par le concile, mais il me semble que c’est forcer le texte. La condamnation de l’accusé me paraît, dans le récit d’Aulu Gelle, sous-entendue entre le réquisitoire concernant l’amende et la demande de praedes.

464 Liv. 38, 60, 1 : elle reposait sur une loi, un SC et une décision de justice.

465 Liv. 38, 60, 3-4.

466 Je ne comprends pas pourquoi Bandelli 1974-1975, p. 108 juge que la missio in bona est un élément dénué de fondement historique, à part en raison d’une méfiance de principe envers Valerius Antias.

467 Les autres mentions de la confiscation des biens de Lucius se trouvent dans le fragment 63 de D.C. et dans la Per. 38, 14.

468 Sur cette procédure, Betti 1942, I, p. 316-318, § 95 ; Salerno 1990, p. 164-166. La lex repetundarum, l. 57, utilise apparemment le verbe conquaerere pour qualifier cette activité des questeurs (cf. aussi Varro ling. 6, 79).

469 L’intervention du préteur urbain dans ce contexte doit aussi s’expliquer par le fait qu’a priori, les biens du condamné étaient protégés par une série d’interdits (Schulz 1951, p. 446-454). Le préteur signifiait ainsi qu’il n’accorderait pas de formule si on le lui demandait. Cic. Quinct. 60 donne, dans le cadre d’un procès privé, les cas prévus par l’édit du préteur pour la missio in possessionem.

470 On pense ici à un inventaire des biens publics.

471 Liv. 33, 42, 4 (196 av. J.-C.) : quaestores ab auguribus pontificibusque quod stipendium per bellum non contulissent petebant. Ab sacerdotibus tribuni plebis nequiquam appellati, omniumque annorum per quos non dederant exactum est, sur lequel voir Franchini 2008, p. 342-355 ; Plu. Cato Mi. 17, 5-7 : ὄντων δὲ πολλῶν οἷς Σύλλας ἐκεῖνος ἀποκτείνασιν ἄνδρας ἐκ προγραφῆς γέρας ἔδωκεν ἀνὰ μυρίας δισχιλίας δραχμάς, ἅπαντες μὲν αὐτοὺς ὡς ἐναγεῖς καὶ μιαροὺς ἑμίσουν, ἀμύνασθαι δ´ οὐδεὶς ἐτόλμα· Κάτων δὲ προσκαλούμενος ἕκαστον <ὡς> ἔχοντα δημόσιον ἀργύριον ἀδίκως ἐξέπραττεν, ἅμα θυμῷ καὶ λόγῳ τὸ τῆς πράξεως ἀνόσιον καὶ παράνομον ἐξονειδίζων. οἱ δὲ τοῦτο παθόντες εὐθὺς ἦσαν ἔνοχοι φόνῳ, καὶ τρόπον τινὰ προηλωκότες ἀπήγοντο πρὸς τοὺς δικαστὰς καὶ δίκας ἔτινον, ἡδομένων πάντων καὶ νομιζόντων συνεξαλείφεσθαι τὴν τότε τυραννίδα καὶ Σύλλαν αὐτὸν ἐφορᾶν κολαζόμενον.

472 Rudorff 1859, II, p. 309, § 93.

473 Dig. 48, 13, 11 (9), 6 (Paul, L. s. de iudic. publ.).

474 Humbert 1886, I, p. 50.

475 La manus iniectio était l’une des actions de la loi : elle était évoquée par Gell. 20, 1, 45 et Gaius inst. 4, 21-30. Noailles 1942b, p. 17 souligne qu’elle faisait naître le droit de ducere in ius devant le préteur. Il faudrait donc supposer, dans ce contexte, que le questeur se faisait l’instrument d’une procédure de type privé.

476 Franchini, 2008, p. 354.

477 Plu. Cato Mi. 17, 6-7 ; D.C. 47, 6, 4 (lors de la proscription de 43 av. J.-C., les noms des meurtriers ne furent pas inscrits sur les registres comptables publics, de sorte à éviter la tenue d’une procédure similaire à celle de 64).

478 Hinard 1985, p. 204-207.

479 César aurait soit présidé cette quaestio, soit été accusateur devant elle : Suet. Iul. 11, 2. Drogula 2019, p. 47-48.

480 Mommsen 1889-1896, IV, p. 236 et 240-243.

481 Ps. Ascon. Verr. II 1, 11, p. 226 St. : Quaestores urbani aerarium curabant eiusque pecunias expensas et acceptas in tabulas publicas referre consueuerant. Cf. Cic. Font. 1-2 et 3 ; Plu. Cato Mi. 18, 5 et 7 ; Lex repet., l. 58 = CIL I², 583 = Crawford 1996, I, n° 1, p. 71 ; Lex agr., l. 46 = CIL I², 585 = Crawford 1996, I, n° 2, p. 118 ; Tab. Heracl., l. 39-40 = CIL I², 593 = Crawford 1996, I, n° 24, p. 364.

482 Litterae (Vell. 2, 37, 5, pour un document susceptible d’avoir été rédigé par un questeur provincial) et biblia (Plu. Cato Mi. 18, 9 et 38, 2), semblent se rapporter à des pièces mobiles : cf. Moreau 1994, p. 130-132 ; Minaud 2005, p. 158-163. Sen. brev. 13, 4, qui ne se rapporte pas spécifiquement aux tabulae questoriennes, indique qu’un ensemble de tabulae reliées était nommé codex.

483 Torelli 1992, pl. IV.9-12.

484 Mattingly 1936, III, p. 417, n° 1206.

485 J. AJ 14, 221 indique que les décisions des consuls de 44 av. J.-C. concernant les Juifs devaient être reportées par les questeurs sur des diptyques. Il faut toutefois reconnaître que sur les Anaglypha Traiani, ce qui apparaît comme des diptyques pourrait également être des codices composés de plus de deux tabulae.

486 Ps. Ascon. Verr. II 1, 11 p. 226 St. ; Cic. Font. 3 ; Plu. Cato Mi. 18, 7 ; Lex repet., l. 58 = CIL I², 583 = Crawford 1996, I, n° 1, p. 71 ; Lex agr., l. 46 = CIL I², 585 = Crawford 1996, I, n° 2, p. 118.

487 Cic. Font. 2, qui précise qu’elles étaient relatives ad ueteris aeris alieni rationem. On a donc considéré que le texte faisait allusion à un état mis à jour des créances et peut-être des dettes de la cité romaine, suite au vote de la lex Valeria de aere alieno de 86 av. J.-C., qui effaçait les trois quarts du montant des dettes existantes (Jouanique 1960, p. 107 ; Clemente 1974, p. 101-102 ; Piazza 1987, p. 267-268 ; Lo Cascio 2018, p. 136 ; Elster 2020, p. 389-391, n° 127). Il faudrait ainsi traduire l’expression par « tables des trois quarts (effacés) et du quart (à acquitter) ».

488 Suet. Aug. 32, 4. Cf. Plu. Cato Mi. 17, 2.

489 Tab. Heracl., l. 40-41 = CIL I², 593 = Crawford 1996, I, n° 24, p. 364.

490 Si l’interprétation que nous avons proposée plus haut de l’expression pecunia facta est exacte.

491 On peut peut-être déduire de Plu. Cato Mi. 17, 2 et 18, 5 l’existence de registres des créanciers et des débiteurs du Trésor. Frank 1933, p. 271 estimait que comme la cité romaine n’avait elle-même pas de dettes, elle ne fut concernée par la lex Valeria que pour les sommes que lui devaient les particuliers, mais Cic. Font. 1 semble bien évoquer des paiements effectués par le Trésor Public. Yavetz 1970, p. 141 et Lo Cascio 1979, p. 221 et 234 jugent donc que la loi Valeria permit à l’Vrbs de rétablir des comptes publics dramatiquement éprouvés par la Guerre Sociale.

492 Par exemple, les tabulae dodrantariae et quadrantariae n’auraient concerné que les engagements antérieurs à 88 (Rotondi 1912, p. 347) ou 86 (Lovano 2002, p. 73).

493 La deuxième concernait les mouvements de fonds effectués par l’intermédiaire des banques.

494 Ce dernier abritait également la caisse publique de la cité délienne.

495 Migeotte 2014, p. 593-595. Ce système avait notamment pour avantage de contraindre à « l’équilibre budgétaire » : Chankowski 2002, p. 37-39 ; Chankowski 2008a, p. 332-336 ; Chankowski 2008b, p. 84-86 ; Migeotte 2008, p. 70.

496 Cic. Verr. II 1, 36 ; Pis. 61.

497 Lex repet., l. 69 = CIL I², 583 = Crawford 1996, I, n° 1, p. 72.

498 Plin. nat. 33, 55-56.

499 Pour le contenu des nomina, Fallu 1974, p. 42-43 ; Fallu 1979, p. 103. Voir également Thilo 1980, p. 170.

500 Minaud 2005, p. 64-65, à partir de Cic. top. 16 et du Dig. 15, 1, 49, 2.

501 Andreau 2007, p. 85 et 87.

502 Cic. Font. 3 : res ipsa tamen ac ratio litterarum confectioque tabularum habet hanc uim ut ex acceptis et datis quidquid fingatur aut surripiatur aut non constet appareat. Voir aussi Ps. Ascon. Verr. II 1, 11 p. 226 St. : Quaestores urbani aerarium curabant eiusque pecunias expensas et acceptas in tabulas publicas referre consueuerant.

503 Plu. QR 42.

504 C’est l’interprétation de Corbier 1974, p. 679. Mazzei 2009, p. 330 comprend quant à elle les contrats privés : Plutarque aurait attribué aux questeurs des fonctions comparables à celles des agoranomes grecs. Toutefois, les éléments du Monumentum Ephesenum incitent bien à croire que les baux publics étaient archivés au Trésor : Corbier 2008, p. 225. Brélaz 2003, p. 39 postule, sur la base du chapitre 63 du règlement d’Irni, l’existence d’un « dossier » récapitulatif de chaque locatio. Celui-ci aurait inclus un protocole de la licitatio, le cahier des charges résultant de la passation du contrat, le montant du marché, ainsi que le descriptif des praedes et des praedia.

505 Le sens le plus fréquent de symbolaion semble être « un contrat concernant un prêt » (Lidell-Scott).

506 Plu. QR 43 explique l’enregistrement des ambassadeurs étrangers au Trésor Public par les prestations financières dont ils bénéficiaient. Les questeurs avaient donc pour mission d’inscrire les représentants des puissances extérieures sur un document qui faisait d’eux l’équivalent de créanciers de l’Aerarium. Ce document résultait lui-même de la compilation de deux textes, un SC attestant que les ambassadeurs s’étaient bien vu reconnaître le droit à l’hospitalité publique, et une professio effectuée par les dits ambassadeurs (Cic. Flacc. 43), concernant le nombre de personnes qui constituaient leur suite. Coudry 2004, p. 534.

507 Liv. 29, 37, 12 : cum in leges iurasset C. Claudius et in aerarium escendisset, inter nomina eorum, quos aerarios relinquebat, dedit conlegae nomen.

508 Ps. Ascon. div. in Caec. 8 p. 189 St. ; Liv. 4, 24, 7. Mommsen 1889-1896, IV, p. 72 ; Fraccaro 1933, p. 170-172 = Fraccaro 1956-1975, II, p. 169-170 ; Piéri 1968, p. 115-117 et 120-122 ; Nicolet 1976a, p. 117-118 ; Bur 2018, p. 142-145. Savino 2004, p. 171 postule que les aerarii furent les seuls citoyens encore tenus, après 167 av. J.-C., au paiement du tributum. Il me semble que les témoignages concernant les aerarii suggèrent qu’ils n’étaient pas soumis au régime général du tributum, mais peut-être à la conlatio tributi in capita évoquée par Fest. p. 500 L.

509 Dans la section per quem de chaque item (voir infra, « L’organisation interne des tabulae »). La Lex agr., l. 46 = CIL I², 585 = Crawford 1996, I, n° 2, p. 118 cite les praedes à côté du manceps, ce qui pourrait signaler que leurs noms apparaissaient les uns à côté des autres dans les « registres ».

510 Cic. Pis. 61.

511 On pense ici aux tabulae pecuniae factae et aux tabulae dodrantariae et quadrantariae, ainsi peut-être qu’aux rationes des gouverneurs.

512 Par exemple, dans le « livre de caisse », l’inventaire du butin d’un magistrat devait correspondre à la section quantum de l’item qui lui était rapporté.

513 Le débat porte en fait sur la hiérarchie des deux dimensions, chronologique et thématique : Purser 1887, p. 210 et Fallu 1979, p. 103 estimaient en effet qu’à l’intérieur d’un nomen, les entrées et les sorties figuraient dans l’ordre chronologique.

514 Humbert 1886, p. 47 ; Glautier 1972, p. 333 ; Thilo 1980, p. 180.

515 Un nomen est un article qui correspond à une relation juridique d’obligation financière impliquant le titulaire du codex. Fallu 1974, p. 46-52 ; Fallu 1979, p. 102 met en avant une spécificité sur ce point des « registres comptables publics » respectivement aux codices accepti et expensi privés.

516 Fallu 1974, p. 52-61 invoque deux principaux éléments en ce sens. D’une part, les sociétés de publicains étaient le plus souvent actives dans le cadre d’une province, ce qui signifie que les revenus qu’elles versaient à l’Aerarium avaient des chances d’apparaître dans les comptabilités publiques comme « uectigal de telle province ». D’autre part, Cic. leg. agr. 1, 6 et 2, 48-51, suivant apparemment le texte de la rogatio Seruilia, énumère les terres publiques romaines dans un ordre qui ne correspond pas à la date de leur passage sous domination romaine, et qui pourrait donc être celui de leur affermage par les censeurs, suivant quatre grands secteurs, Oriens, Occidens, Septentrio et Meridies. En fait, l’hypothèse suivant laquelle les terres publiques auraient été regroupées en quatre grands secteurs ne répond pas à l’ordre de présentation du De Lege agraria, où l’on passe d’une extrémité de l’empire à l’autre, et je ne vois aucune référence à une présentation géographique dans les autres sources qu’É. Fallu invoque en ce sens (Cic. Manil. 14 ; Att. 2, 16, 1 = SB n° 36 ; App. BC praef. 7).

517 On a pensé que comme les aduersaria étaient menstrua (Cic. Q. Rosc. 7), on les transcrivait purement et simplement dans le codex (Purser 1887, p. 209 ; Jouanique 1968, p. 7-8), mais Minaud 2005, p. 70 a suggéré que les codices accepti et expensi des particuliers étaient structurés par nomina.

518 Cic. Att. 2, 9, 1 = SB n° 29.

519 Les occurrences de nomina citées par É. Fallu ne sont pas non plus déterminantes, car les textes en question ne précisent jamais à quelle échelle sont examinées les tabulae publicae ou les rationes : il peut toujours s’agir d’un item précis. D’autre part, il me semble que l’idée d’une organisation thématique des « registres » présente certaines difficultés au regard des règles formulaires suivies pour la rédaction des articles. La motivation de l’entrée ou de la sortie semble en effet avoir figuré dans le corps de chaque article, non avoir conditionné la distribution globale de la matière.

520 Cic. Pis. 90, qui reproche à l’ancien gouverneur de Macédoine d’avoir falsifié ses comptes, évoque l’inscription de sommes dont auraient été changés les genera. Or, la fam. 5, 20, 6 = SB n° 128 parle de la pecunia exacta comme s’il s’agissait d’une catégorie.

521 Cic. fam. 2, 17, 4 = SB n° 117. On séparait donc les sommes votées par le Sénat et dont l’usage devait être prévu à l’avance, des revenus supplémentaires acquis sur le terrain, et plus largement les actes du magistrat découlant d’un SC et ceux qu’il prenait de sa seule initiative, sur le théâtre des opérations. Sur tous ces aspects, Mommsen 1879, II, p. 438-440 ; Coudry 2009a, p. 53-55.

522 Le « praescriptum » du texte (Monum. Ephes., l. 1-7 = AE 2008, 1353 = Cottier et al.2008, p. 26-28), qui se rapporte à une situation valable pour la fin de l’époque julio-claudienne, contient l. 2-4 la précision que le texte a été copié à partir des deltoi des curatores uectigalium publicorum, [ek nomôn ? m]isthôseôs, etous a, dèmosiônas a, kèrôi a. L’existence de « registres » regroupant les leges locationis pourrait être un indice d’une division par thèmes des dits « registres », mais comme on connaît mal les compétences des curatores uectigalium publicorum de 62 ap. J.-C., et que leurs tâches purent se limiter à publier les leges locationis (Rathbone 2008, p. 274), peut-être faut-il voir dans deltoi et nomoi misthôseôs des synonymes (Nicolet 1994a, p. XIV). Par ailleurs, la plupart des commentateurs, par delà leurs divergences, conclurent de la mention d’un numéro de dèmosiôna qu’il devait y avoir un « registre » concernant soit un type d’impôt (Engelmann – Kniebe 1989, p. 37 et 39 ; Spagnuolo Vigorita 1997, p. 124-125 ; Rathbone 2008, p. 268 et n. 49), soit les contrats publics (Nicolet 1990a, p. 690-698 = Nicolet 2000, p. 343-352). On aurait donc un argument en faveur d’une classification thématique des tabulae publicae financières. En revanche, l’édition d’Oxford du règlement douanier, p. 100, oriente vers une traduction de dèmosiôna par « lustrum relatif à tel uectigal » : dans ce cas, l’organisation de la matière dans les « registres » des curatores uectigalium publicorum aurait été chronologique.

523 Nicolet 1994b, p. 151.

524 Cette hypothèse est proposée par Minaud 2005, p. 136-137 et 310, à partir notamment du dossier égyptien de Hieroninos, à l’époque impériale : un grand propriétaire possédait plusieurs domaines, qui chacun avait sa comptabilité propre. On ne centralisait que les informations nécessaires à la gestion de l’ensemble du patrimoine.

525 C’est ce que suggèrent les quittances de la colonie de Pompéi à l’époque julio-claudienne, où la mention d’un uectigal s’accompagne du nom des duumvirs qui l’ont affermé : Andreau 1974, p. 54-57.

526 Arangio-Ruiz – Olivieri 1925, p. 80-127 ; Manganaro 1988, p. 155-190 ; Migeotte 2014, p. 79-81.

527 Cic. Verr. II 1, 36 : accepi [...] uiciens ducenta triginta quinque milia quadringentos decem et septem nummos. Dedi stipendio, frumento, legatis, pro quaestore, cohorti praetoriae HS mille sescenta triginta quinque milia quadringentos decem et septem nummos. Reliqui Arimini HS sescenta milia.

528 Le travail de synthèse était patent dans le cas des comptes de Verrès, puisque le magistrat s’était arrangé pour le reliquat correspondît à un chiffre rond.

529 Dans la mesure où il suppose que les tabulae publicae étaient organisées par nomina, Fallu 1974, p. 47-52, notamment p. 48, et 1979, p. 102 conclut que les données tirées des rationes des magistrats avaient à être ventilées dans différents « registres » (celui du stipendium, du frumentum etc). Si Cicéron ne déforme pas la présentation des comptes de Verrès en additionnant l’ensemble des dépenses, la reconstruction d’É. Fallu n’est pas possible (toutes les dépenses du questeur devant apparaître au même endroit).

530 Contrairement à ce qu’affirment Pina Polo – Díaz Fernández 2019, p. 87.

531 Cic. S. Rosc. 74 : Pretium dedit. Cui dedit ? Per quem dedit ? Vnde aut quantum dedit ? Jouanique 1968, p. 9-18 ; Fallu 1979, p. 105-106.

532 Cic. Ver. II 2, 188 ; Dig. 1, 13, 1, 2 et 2, 13, 6, 6 ; Cic. Quinct. 17 ; Cic. fam. 5, 20, 6 = SB n° 128.

533 Fallu 1973, p. 209-238, notamment p. 215-216 ; Fallu 1974, en particulier p. 42-48 et 246-295 ; Fallu 1979, p. 97-112, surtout p. 102-108.

534 Cette dernière était exprimée par ob. Par ailleurs, c’est dans cette section que les quittances de Pompéi portent des renvois qui permettaient par exemple d’identifier l’année d’adjudication d’un contrat public.

535 Immédiatement après la date.

536 Andreau 1974, p. 331-338 ; Hüttemann 2017, p. 19-20, 177-179, 181-183, 185-187, 189-191, 193-194, 197-199 (les documents sont datés entre 53 et 62 ap. J.-C.).

537 Cic. Manil. 67 : classis.

538 Crawford 1996, I, p. 118, n° 1, l. 46 ; Cic. ad Q. fr. 1, 3, 7 = SB n° 3.

539 SC, lois, édits, ainsi peut-être que leges locationis, listes des praedes et professiones.

540 Plu. Cato Mi. 18, 9, s’il fait allusion à ce type d’actes, pourrait suggérer que ces copies s’effectuaient contre paiement.

541 Mommsen 1889-1896, I, p. 400 ; Willems 1885, II, p. 218 ; Moatti 2007, p. 221 et n. 21. Voir, dans le SC de Asclepiade, les l. 32-33 du texte grec, et le commentaire de Raggi 2001, p. 88.

542 Mommsen 1889-1896, VII, p. 201 jugeait que les traductions grecques de SC étaient élaborées sous l’autorité du magistrat auteur de la relatio, et qu’il n’y avait pas de traduction des lois. On trouve chez Mispoulet 1899, p. 90 ; Sherk 1969, p. 131 ; Volterra 1969, p. 29 l’idée que des traductions étaient faites à l’Aerarium. En revanche, Rowe 2008, p. 247 considère que la traduction se faisait dans la région d’origine du bénéficiaire.

543 Rowe 2008, p. 247.

544 Par exemple Rhet. Her. 1, 21 ; Plin. nat. 33, 55-56 (qu’il est donc sans doute vain d’utiliser, comme le font Kay 2014, p. 301 ou Tan 2017, p. 28, pour estimer l’état global des ressources publiques).

545 Voir sur ce point les remarques de Minaud 2005, p. 179-197, pour les comptabilités privées.

546 Santalucia 1998, p. 76-78. Les seules mentions concernent le procès évoqué par Varro ling. 6, 90 (le passage paraît faire état d’une accusation intentée devant le peuple par un questeur nommé M. Sergius. Le personnage n’est pas autrement connu, mais la mention dans le texte varronien des préteurs, au pluriel, permettrait de dater le procès après 241 av. J.-C. : Münzer 1921a, n° 18, col. 1692 ; Rivière 2021, p. 193-195) et le procès de Q. Fabius Eburnus, qui avait fait mettre à mort son fils (Val. Max. 6, 1, 5 ; Quint. decl. ma. 3, 17 ; Oros. 5, 16, 8). Gruen 1968, p. 232 et n. 36 pensait à un procès comitial – idem chez Garofalo 1985, p. 412 -, mais Thomas 1981, p. 662 souligne qu’on ne peut exclure que la cause ait été traitée devant la quaestio de sicariis.

547 Mommsen 1907, I, p. 178-179.

548 Kunkel 1962, p. 35-36.

549 Santalucia 1998, p. 78.

550 Garofalo 1985, p. 413, n. 15.

551 Thomas 1981, p. 663.

552 Cic. Planc. 63. Voir également Cic. Att. 12, 2, 2 = SB n° 238.

553 Mattingly 1956, p. 189-203, à partir du denier RRC 421, dont il restituait la légende en Pr(aeneste) l(udos) V(ictoriae) p(rimus) f(ecit), alors que la plupart des commentateurs ont intégré, plus logiquement, PR en pr(aetor) : Regner 1940, col. 1651 ; Bernstein 1998, p. 319.

554 Veyne 1975, p. 89-92.

555 Hölscher 1967, p. 146 et n. 915.

556 La tentative de Mattingly 1956, p. 196, pour écarter cet argument en arguant de la réforme césarienne du calendrier n’est pas très convaincante.

557 Rawson 1985, p. 109, sur la base du cognomen d’Atilius Praenestinus, acteur évoqué chez Térence.

558 Vell. 2, 27, 6 indique en revanche que les ludi Victoriae de Sylla étaient des ludi circenses.

559 Gonzalez Vazquez 2001, p. 890-899.

560 Mommsen 1889-1896, II, p. 292, suivi par Tibiletti 1953, p. 62-63 ; Gabba 1958, p. 103 ; Lintott 1978, p. 130 ; Crawford 1996, I, p. 197 (J. S. Richardson) ; Pellecchi 2005, p. 77 ; Pina Polo – Díaz Fernández 2019, p. 115.

561 App. BC 1, 137.

562 Lex de prouinciis praetoriis, copie de Delphes, bloc C, l. 13 = Crawford 1996, I, n° 12, p. 243. Cf. également Cic., Acad., 65.

563  D.C. 39, 7, 4 : ἐγράψατο γὰρ αὐτὸν ὁ Μίλων καὶ οὐκ ἐσήγαγε μέν ῾οὔτε γὰρ οἱ ταμίαι, δι᾽ ὧν τὴν ἀποκλήρωσιν τῶν δικαστῶν γενέσθαι ἐχρῆν, ᾕρηντο, καὶ ὁ Νέπως ἀπεῖπε τῷ στρατηγῷ μηδεμίαν πρὸ τῆς κληρώσεως αὐτῶν δίκην προσέσθαι : ἔδει δὲ ἄρα τοὺς ἀγορανόμους πρὸ τῶν ταμιῶν κατaστῆναι. Trad. CUF G. Lachenaud – M. Coudry : Milon en effet avait intenté une action contre lui, sans pouvoir le traîner en justice, les questeurs qui devaient procéder au tirage au sort des juges n’ayant pas été élus et Nepos ayant interdit au préteur d’autoriser tout procès avant le tirage au sort. Il fallait précisément que les édiles entrent en charge avant les questeurs ; Pina Polo – Díaz Fernández 2019, p. 116-117.

564 Cic. ad Q. fr. 2, 1, 2 = SB n° 5 (vers le 15 décembre 57) semble faire référence à l’affaire et suggérer que tout le problème résidait dans la date respective des élections et des procès.

565 Zumpt 1865-1869, II, p. 199-202.

566 Cic. Cluent. 121.

567 Greenidge 1901, p. 446 et n. 3.

568 Cic. Verr. II 2, 79.

569 Lengle 1933, p. 290-292. Shackleton-Bailey 1980, p. 172, à partir de Cic. ad Q. fr. 2, 1, 2 = SB n° 5 (décembre 57), estime que les questeurs pouvaient, sur instruction du préteur urbain, désigner les jurés pour les procès de ui.

570 Kunkel 1963, col. 753-754 = Kunkel 1974, p. 73, à partir de Cic. Planc. 36.

571 C’était d’ailleurs déjà le cas pour les jurés de la Lex repet., l. 14 = CIL I², 583 = Crawford 1996, I, n° 1, p. 66.

572 Cf. Cic. Phil. 5, 15.

573 Suet. Iul. 17, 1-2.

574 Sur ce personnage, Gundel 1958, n° 6, col. 1844-1850.

575 Cerami 1998, p. 178-179 ; Russo Ruggeri 2011, p. 76-78.

576 Cerami 1998, p. 177.

577 Münzer 1936, n° 12, col. 1218.

578 En outre, les manuscrits ne montrent pas de variante à cet endroit.

579 Voir introduction, « Le Trésor de la mémoire publique ». 

580 App. BC 1, 131 ; Lex de prouinciis praetoriis, copie de Delphes, bloc C, l. 21 = Crawford 1996, I, n° 12, p. 243 ; Lex latin. Bantina, l. 7-9 = CIL I², 582 = Crawford 1996, I, n° 7, p. 200.

581 Cette image des questeurs découle notamment de Plu. Cato Mi. 16, 3, mais elle vise à dessiner en contre-point le portrait idéalisé de Caton.

582 Dont l’une, l’Aerarium Sanctius, n’était animée que par des mouvements de fonds très simples (en général, il n’y avait que des entrées).

583 Notamment, par le biais de la rédaction de documents de synthèse, favoriser le suivi des dossiers sur la durée et rendre plus aisé le travail des agents de l’Aerarium, en leur fournissant des pièces qui leur permettent d’identifier rapidement leurs interlocuteurs et accélèrent donc l’ensemble des opérations administratives.

584 Par exemple l’affichage de certains documents, tel qu’on l’observe dans la Lex repetundarum.

585 Le consensus des historiens s’est établi sur l’idée d’une perpétuation des appariteurs dans leurs fonctions. Plu. Cato Mi. 16, 3 souligne le contraste entre la maîtrise des dossiers qu’avaient les appariteurs et l’inexpérience des questeurs.

586 Nicolet 1979b, p. 80 = Nicolet 2000, p. 303.

587 Hi qui sunt ex collegio sex primorum, habent a tutelis excusationem, sed non simpliciter, sed post unam. Toutefois, la dispense n’était pas totale. 

588 Suet. Dom. 9, 6 : Scribas quaestorios negotiantis ex consuetudine sed contra Clodiam legem uenia in praeteritum donauit. Cohen 1984, p. 46 ; Angius 2016, p. 412.

589 Rotondi 1912, p. 288, suggérait de rapporter la loi au tribunat de P. Clodius Pulcher. Il est suivi par Gruen 1974, p. 255 (pour qui l’action de Clodius témoignerait des mêmes préoccupations que celles de Caton d’Utique) ; Kunkel 1995, II, p. 113 ; Tatum 1999, p. 249. Toutefois, d’autres personnages d’époque augustéenne pourraient avoir été les rogatores de la disposition (PIR, II, C, 1167 : C. Clodius Licinus, cos suff. 4 ap. J.-C. ; C, 1183 : L. Clodius Rufus, peut-être cos suff. 7 ap. J.-C.) et il n’est donc pas certain que la lex Clodia soit républicaine.

590 Mommsen 1889-1896, I, p. 385, n. 2.

591 Ou d’éviter les ententes entre personnels administratifs et priuati qui avaient affaire aux services du Trésor.

592 Si l’on prend pour point de comparaison la Lex Vrsonensis, ch. 62 = Crawford 1996, I, n° 25, p. 400-401, qui, parce qu’elle se rapporte à une colonie romaine, calque vraisemblablement la législation de l’Vrbs. Le seul indice qui suggèrerait que les apparitores bénéficiaient de compléments de rémunération, découlant des relations qu’ils entretenaient avec les magistrats, est, lors de la découverte des livres de Numa, en 181 av. J.-C., le fait que le Sénat laissa le préteur Q. Petilius libre de fixer le niveau d’indemnisation d’un scribe de ses relations (Liv. 40, 29, 13). L’exemplarité du scribe fit que la somme ne fut finalement pas versée.

593 Badian 1989, p. 599 avait noté que 20 des 27 gentilices portés par les scribes connus pour l’époque républicaine étaient également attestés parmi les sénateurs. Le dossier des appariteurs questoriens montre que, dans 6 cas sur 9, on relève chez eux l’association d’un praenomen et d’un nomen connus pour un sénateur contemporain. Badian 1989, p. 586 estimait que le L. Petilius cité par Liv. 40, 29, 3 portait un gentilice forgé sur celui du préteur urbain Q. Petilius, et qu’il valait mieux suivre Cassius Hemina (frg. 37 P. = frg. 39 Santini = frg. 40 Chassignet = frg. 40 Beck-Walter = frg. 35 Cornell), qui faisait de l’inventeur des livres de Numa un Cn. Terentius. Toutefois, la tradition livienne démontre qu’au Ier siècle avant notre ère, il paraissait normal qu’un appariteur fût l’affranchi ou le descendant de l’affranchi d’un sénateur. On ajoutera que l’appariteur P. Septumius (CIL I², 1490 = VI, 1827 = XIV, 3645 = ILLRP 813 = Inscr. It., 4/1, n° 30) est connu par la même épitaphe que le sénateur P. Aquillius Gallus.

594 Mommsen, ap. CIL, I, 202, p. 110 ; Mommsen 1848, p. 8 ; Mommsen 1889-1896, I, p. 387 ; Mommsen 1905-1910, III, p. 456 ; Cohen 1984, p. 39 ; Badian 1989, p. 599 ; Varvaro 1995, p. 582 ; David 2007, p. 41, n. 27 ; David 2019, p. 78 et 84. A contrario, Gabba 1983, p. 490-491 jugeait que le système des nominations anticipées devait avoir un caractère transitoire, lié à la dimension exceptionnelle de la dictature syllanienne.

595 Varvaro 1995, p. 582.

596 Par contrecoup, on doit écarter l’hypothèse mommsénienne suivant laquelle les questeurs tiraient au sort celui d’entre eux qui procèderait aux désignations (Mommsen 1889-1896, I, p. 386).

597 Varvaro 1995, p. 586.

598 David 2007, p. 48 ; David 2012, p. 278 ; David 2019, p. 112 et 114 suppose que l’acquisition de compétences par les scribes se faisait dans le cadre de la décurie ; Angius 2016, p. 415-416 pense que l’apprentissage se faisait entre la lectio et l’entrée en charge, au sein du collège des scribes.

599 Plu. Cato Mi. 16, 4-5.

600 Ce point dépend du lieu où étaient effectuées les traductions grecques des documents officiels. Cic. Pis. 61 montre un scribe de l’Aerarium faire une plaisanterie en grec : le mot est en fait une citation de Plaute, mais on peut supposer que Cicéron n’aurait pas introduit dans son plaidoyer un élément nuisible à « l’effet de réel ».

601 S’il faut bien comprendre en ce sens la rhadiourgia de Plu. Cato Mi. 16, 5 (Fezzi 2003, p. 52). Sur ce passage, Cohen 1984, p. 44 ; Rosillo Lopez 2010, p. 128. Par ailleurs, l’identité sociale du L. Alenus ou Aienus ou Asenus coupable de falsification de documents publics et mentionné par Cic. nat. deor. 3, 74 n’est pas connue, mais Gnoli 1975, p. 337 pense que le passage renvoie à l’existence d’une quaestio perpetua peculatus pré-syllanienne. David 2012, p. 272 juge que les scribes étaient en quelque manière justiciables des quaestiones perpetuae, sur la base de Cic. Mur. 42 (quaestio peculatus…scriba damnatus).

602 Mommsen 1889-1896, I, p. 388-389, n. 5, suivi par Cohen 1984, p. 44 et David 2012, p. 273 et n. 74.

603 Le parcours de Cornelius Surus (AE 1959, 147 = 1968, 33 = 1987, 67) illustrerait ce point : dans la mesure où le personnage fut vraisemblablement magister sutorum, il pourrait avoir tiré une partie de ses revenus de l’exercice d’un métier (fabriquant de chaussures en gros, eu égard au niveau de fortune qu’il paraît avoir atteint ?), tout en remplissant concomitamment des fonctions d’appariteur. La lex Clodia, citée plus haut, suggère également que les scribes avaient tendance à cumuler plusieurs types d’activités.

604 David 2012, p. 276.

605 Voir les notices prosopographiques que leur a consacrées Nicolet 1966-1974, II, n° 10, p. 762-765 (L. Aelius Lamia) ; n° 44, p. 794-795 (T. Aufidius) ; n° 273, p. 981-983 (Cn. Plancius) ; n° 307, p. 1008-1009 (P. Rupilius) ; n° 386, p. 1072 (P. Vettius Chilo).

606 Badian 1989, p. 601 notait à juste titre que l’usage d’acheter une place dans une décurie constitue la preuve indirecte qu’un niveau censitaire précis était aussi probablement requis pour exercer des fonctions d’appariteur.

607 Maganzani 2002a, p. 161-215.

608 De ce point de vue, l’administration impériale pourrait apparaître comme une forme de régression par rapport à ce qui existait durant la République. Cf. les remarques de Nicolet 1990b, p. 123 et plus largement p. 126.

609 Weber 2005, p. 185. La question de la « performance » est également posée par Nicolet 1994a, p. XV.

610 Cic. off. 3, 90 cite une série de questions envisagées dans le Livre des devoirs d’Hécaton, dont la possibilité que des fonds soient dérobés par quelqu’un qui aurait creusé un tunnel jusqu’à un aerarium. Le passage ne semble donc pas se référer à des événements réels, mais constituer seulement un exemplum philosophique.

611 Il est difficile de fixer si les « mauvaises actions » des scribes évoquées par Plu. Cato Mi. 16, 4 correspondent à des vols.

612 Liv. 30, 39, 7.

613 Plu. Cato Mi. 18, 9.

614 Humbert 1886, I, p. 47-48.

615 Contra Pina Polo – Díaz Fernández 2019, p. 89, n. 63 et Díaz Fernández – Pina Polo 2021, p. 51 et 54, il ne s’agissait pas d’une utilisation de documents publics par un particulier, mais d’une mise à la disposition d’un sénateur du contenu de certaines archives de l’Aerarium.

616 Dig. 44, 3, 13 (Hermog.), à propos de la possibilité de se retourner contre qui a administré des fonds publics. Minaud 2005, p. 114.

617 Cic. leg. 3, 46.

618 Volterra 1969, p. 31 relevait que les références internes très précises à des SC, présentes dans certains documents épigraphiques, suggèrent que les archives étaient tenues avec soin.

619 J’ai bien conscience que cette conception de l’usage des comptabilités publiques est moderne, mais poser la question permet au moins d’essayer de cerner comment les autorités publiques romaines prenaient des décisions.

620 Plin. nat. 33, 55-56 et Rhet. Her. 1, 21. Comme le laisse entendre la Rhet. Her., les allusions au coût des mesures frumentaires (Cic. Sest. 103 ; off. 2, 72 pour la loi gracchienne ; ad Q. fr. 2, 5, 1 = SB n° 10, mars 56 et Sest. 55, pour la loi de Clodius) suggèrent qu’avant de voter ce type de décision, on vérifiait que les caisses publiques étaient capables d’en supporter les conséquences.

621 Voir les tabulae dodrantariae et quadrantariae et le travail effectué par Caton en 64 av. J.-C. pour récupérer les arriérés dûs à l’Aerarium et acquitter les paiements dûs par lui (Plu. Cato Mi. 17, 2).

622 Pour le non-paiement des redemptores, Nicolet 1963, p. 419, 422 et 426 ; Andreau 2006, p. 104. Pour le non-versement de portions du tributum, Liv. 33, 42, 2-4.

623 Plu. Cato Mi. 17, 2.

624 Plu. Cato Mi. 17, 2.

625 Lex repet., l. 67 = CIL I², 583 = Crawford 1996, I, n° 1, p. 72.

626 Ou éventuellement, au cas où une société de publicains n’aurait pas versé ce qu’elle devait, à l’exclusion par les censeurs de futurs marchés publics, mais les événements des années 61-59 av. J.-C. montrent que les sociétés vectigaliennes étaient capables d’anticiper ce genre de situation.

627 Plu. Cato Mi. 17, 3 et 18, 4-8, à propos de l’enregistrement de créances de particuliers sur le Trésor Public.

628 Plu. Cato Mi. 17, 2.

629 Cic. Att. 2, 6, 2 (= SB n° 26, avril 59) et Att. 2, 16, 4 (= SB n° 36, fin avril ou début mai 59). 

630 Lex repet., l. 61-63 = CIL I², 583 = Crawford 1996, I, n° 1, p. 71. De plus, la loi exigeait de chaque questeur, dans les cinq jours suivant son entrée en charge, qu’il procédât de façon prioritaire à la « mise en ordre » des sommes et des dossiers concernant les indemnisations.

631 On ne pouvait accéder aux services de l’Aerarium que sur SC ou convocation d’un magistrat ; les citoyens ne semblent pas avoir eu le droit de bénéficier à titre individuel des compétences des agents du Trésor, par exemple pour faire vérifier des monnaies ou changer des espèces ; différentes structures ou ordines servaient d’intermédiaires entre les particuliers et l’Aerarium, dès lors que des encaissements ou des décaissements massifs devaient avoir lieu ; rappelons, enfin, que la figure du sector a été interprétée comme un moyen, pour le Trésor, de n’avoir à faire qu’avec un seul interlocuteur.

632 Vérification des espèces, frappe des monnaies.

633 Voir la permutatio et le collybus perçu lors des opérations de change.

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