Avant-Propos
p. VII-VIII
Texte intégral
1De 1994 à 1999, l’École française de Rome a participé à l’exploration archéologique du site de Cencelle dans le cadre d’une enquête collective chapeautée par l’Université de Roma La Sapienza. C’est sur cette colline qu’avait été établie en 854 Leopolis, ville nouvelle voulue par le pape Léon IV pour servir de refuge à la population du port antique de Centumcellae, victime des raids arabes menés sur la côte tyrrhénienne, tout en permettant au siège de Pierre de s’affirmer à la fois idéologiquement et matériellement à proximité immédiate de la Tuscie lombarde. Il faut toutefois rappeler que l’on sait très peu de choses, en dehors de ce que disent les textes, sur les premiers temps d’occupation de la cité. Sauf exception, la fouille de Cencelle n’est pas tant celle de « la ville de Léon » dont le Liber pontificalis nous a laissé le récit de fondation, et dont subsiste l’inscription qui couronnait la porte orientale, que celle d’un établissement de taille limitée, flottant dans une enceinte surdimensionnée héritée de l’époque étrusque, reconstruit de manière systématique durant la période communale à un moment où l’évêque avait de longue date regagné l’établissement côtier d’origine. À défaut de traces consistantes de structures en place, spécialement dans le secteur III confié à l’EFR, c’est donc le matériel céramique, associé à quelques éléments lithiques de remploi décorés ou inscrits datables du haut Moyen Âge, qui fournit les informations les plus fiables sur les IXe-XIe siècles. Celles-ci sont toutefois encore plus modestes que ce qui a pu émerger dans d’autres secteurs. L’apport principal, partout, est fourni par les niveaux de la fin du Moyen Âge. Cencelle est alors une commune rurale fortifiée. Jouissant d’une forte croissance à partir des années 1220 environ, le castrum, par sa position de tête de pont pour le contrôle de la Maremme, gardait de l’importance pour la papauté, qui le plaça sous sa protection directe en 1290, en lui affectant un châtelain. L’établissement fit toutefois vite retour à la gestion du recteur du Patrimoine de Saint-Pierre, ce qui se traduisit par une intégration dans l’économie d’élevage, dont les effets délétères, conjugués avec ceux des troubles du Grand Schisme, entraînèrent l’abandon progressif de l’ancienne cité1.
2 Les structures matérielles mises au jour dans le secteur III témoignent de cette prospérité tardive. Situé au débouché de la porte orientale de la ville, c’est-à-dire de son accès principal, l’îlot, bordé au nord et au sud par deux rues pavées, est composé dans son dernier état de deux unités d’habitation. La première est une maison à pièce unique (32m2), sur un niveau, au sol pavé, dont le matériel fut scellé par un incendie. Elle dispose d’une réserve séparée, destinée au stockage alimentaire. La seconde, de module plus réduit (17, 50 m2), dotée d’une entrée sous auvent au rez-de-chaussée, est en revanche pourvue d’un étage dallé et pourvu d’une latrine. On accède au niveau supérieur par un escalier externe depuis une cour fermée jouxtant la rue et flanquée d’un appentis. Au sud-est de l’îlot, c’est-à-dire dans la situation la plus périphérique possible, un atelier de travail du fer distribué en deux pièces, l’une pour la préparation du minerai, l’autre pour le réchauffement et le battage du métal.
3La fouille de Cencelle a déjà donné lieu à plusieurs publications. La principale à ce jour, dédiée au quartier sud-oriental, a paru en 2012 sous la coordination de Francesca Romana Stasolla, sur la base de contributions fournies dès 20032. Si le secteur fouillé par l’EFR avait pu être présenté dans ce volume3, cela n’avait été que de manière synthétique et limitée pour l’essentiel à la chronologie de l’occupation, aux structures maçonnées et à l’organisation de l’espace. Les chapitres consacrés au matériel, réduits à la portion congrue, n’avaient pu prendre en compte qu’une partie minime des résultats, d’où l’importance d’en programmer la publication de manière autonome. Tandis que Claudia Minniti a intégré les analyses ostéologiques dans ses études d’histoire de l’alimentation4, que Vasco La Salvia a pu exploiter les données relatives au travail du métal5, Enrico Cirelli a progressivement repris et mis en forme tout ce qui concernait la céramique. Son travail débouche aujourd’hui sur le présent ouvrage, qui ne se résume pas en une présentation morphologique et chronologique du matériel, mais servira désormais de guide à toute enquête sur la question de la production et de la circulation en Latium méridional.
Notes de bas de page
1 Jamme 2005, p. 353-406.
2 Stasolla 2012. L’EFR n’a pas été associée à l’exposition romaine de 2014 : Forma e vita di una città medievale. Leopoli-Cencelle ; voir Pani Ermini – Somma – Stasolla 2014.
3 Bougard – Cirelli 2012, p. 181-195.
4 Minniti 2009, p. 273-284 ; 2010, p. 361-368.
5 La Salvia – Mihok 1999, p. 192-212 ; La Salvia 2000, p. 83-90 ; La Salvia – Mihok 2000, p. 155-174 ; 2003, p. 125-128.
Auteur
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