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Male ablata

 | 
Jean-Louis Gaulin
, 
Giacomo Todeschini

L’usure dans une ville sainte

Dynamique d’un discours entre religion, politique et conscience communale (Cologne, XVe siècle)*

Franz-Josef Arlinghaus

Résumé

À Cologne, au XVe siècle, la question de l’usure a développé une dynamique particulière parce qu’elle se trouvait à l’interface entre les revendications politico-religieuses du seigneur de la ville et les besoins politico-religieux de la commune. L’enjeu des débats n’était cependant pas une question de religion ou de politique, mais plutôt la capacité à décider de l’appartenance d’une personne à la communauté, qui découlait des accusations d’usures. Ainsi ces revendications concurrentielles du seigneur de la ville et de la commune étaient donc principalement de nature sociale et s’appuyaient sur les structures de socialisation prémodernes dans laquelle les communautés, si elles en avaient le pouvoir, cherchaient à régir tous les aspects de la vie de leurs membres. Cette discussion entre la ville et l’évêque a développé une dynamique qui a contribué de manière décisive au développement du concept de «commune» comme autorité responsable pour tous les domaines de la vie sociale et privée des habitants.

Texte intégral

  • * Je remercie vivement Maud Harivel, université de Berne, pour la traduction en français.
  • 1 Historisches Archiv der Stadt Köln (désormais cité HAStK), C 17, fol. 16r, 16 juin 1469. Un regeste (...)

1Le vendredi 16 juin 1469, l’official de la ville de Cologne, c’est-à-dire le juge ecclésiastique, envoya un mandat aux moines de l’Ordo sanctae crucis de la ville. Les moines furent priés d’exhumer et de bannir de la terre consacrée le chevalier Johan vanme Geysbuch inhumé chez eux. Il aurait en effet été avéré, après sa mort, que vanme Geysbusch était de toute évidence un usurier ; tel fut le verdict rendu par l’official (« myt ordell na syme dode erkant… eyn offenbaren woecherer gestorven zo sijn »). Les descendants du mort s’adressèrent alors au conseil de la ville. Les autorités municipales rassemblèrent une délégation de haut-rang, appelée « Schickung », afin de traiter l’affaire avec l’official. Les trois hommes, dont faisait partie le maire de Cologne Johan vanme Dauwe, argumentèrent en disant, entre autres, que vanme Geysbuch se trouvait encore sous la protection du duc et de la duchesse von Jülich1.

2Au premier coup d’œil, la position des deux camps ne nous étonne guère : d’un côté, le juge ecclésiastique, défenseur des normes religieuses sur la prohibition des prélèvements d’intérêts, qu’il voulait sanctionner même après la mort du coupable ; et de l’autre côté, les représentants d’une métropole du commerce d’importance qui, avec la famille du mort, soutenaient un autre courant de pensée plus pragmatique. Pourtant, cette première impression est trompeuse. L’incident est plutôt la preuve que les débats sur l’usure à Cologne – et peut-être ailleurs – se trouvaient sur la ligne de démarcation entre la sphère éthico-religieuse et celle relevant de la politique et du droit constitutionnel. Mais ces deux champs discursifs ne doivent pas être séparés dans des catégories différentes qui seraient l’Église d’une part et la ville d’autre part. En effet, le diocèse connut des phases politico-constitutionnelles significatives tout comme le conseil lorsqu’il chercha à s’établir en tant qu’unique institution éthico-religieuse de la ville. C’est précisément cet enchevêtrement des mêmes intérêts et motivations dans les deux camps, selon mon hypothèse, qui créa une dynamique favorisant de manière décisive la formation d’une conscience communale.

  • 2 Le concept remonte à L. Hänselmann, Einleitung, dans L. Hänselmann (éd.), Die Chroniken der deutsch (...)
  • 3 « Zwar wollte man gewiß in Glauben und Leben kirchlich und katholisch sein, ja die… Eingriffe der B (...)

3Mon objectif est de démontrer que les débats intensifs menés autour du prêt à intérêt illicite à Cologne au XVe siècle développèrent une nouvelle conception de la commune sans qu’elle ait été préméditée. Elle incorporait, bien sûr, la sphère religieuse, et la considérait comme une partie intégrante de l’identité urbaine. Cette conception alla bien plus loin que la simple idée largement diffusée depuis le haut Moyen Âge d’une commune fondée sur la religion, que l’on retrouve dans la recherche sous le concept de « communauté sacrée » (« Sakralgemeinschaft »). Ce concept signifie à l’origine la coopération entre le clergé et la bourgeoisie – malgré des dissensions – principalement lors des processions et des fêtes ecclésiastiques2. Le discours sur l’usure renvoie plutôt à une perception de soi, grâce à laquelle la ville s’octroya peu à peu pendant le bas Moyen Âge la « responsabilité de décider quel est le meilleur chemin vers la salvation » (la « Verantwortung für die rechte Gestaltung des Heilswegs ») formulée par Bernd Möller en 19623. Cependant, cette nouvelle conception de la commune, selon laquelle les autorités communales étaient, bien évidemment, pensées comme des autorités religieuses responsables, aussi bien du bon comportement éthique et moral des habitants que de l’organisation de la vie religieuse, ne parvint à maturité qu’au XVIe siècle au cours de la Réforme.

  • 4 Voir aussi à ce propos B. Moeller (op. cit.) pour la fin du XVIe siècle. R. Schilling, Stadtrepubli (...)

4En effet, elle impulsa une nouvelle image de soi des villes qui se généralisa seulement à partir du XVIe siècle, au fil de la Réforme, dans presque toutes les communes allemandes. Une conception selon laquelle les autorités communales étaient, bien évidemment, pensées comme des autorités religieuses responsables4 aussi bien du bon comportement éthique et moral des habitants que de l’organisation de la vie religieuse. Selon moi, les débats sur l’usure au XVe siècle contribuèrent de manière décisive à porter à maturité une telle conception de la ville et à lui octroyer un profil autonome par rapport à l’Église.

  • 5 L’œuvre-standard pour l’espace germanophone encore valable aujourd’hui est : A. Löther, Prozessione (...)

5Pourquoi la question de l’usure – si tant est que la thèse sur le développement d’une nouvelle identité communale au XVe siècle est juste – pourquoi, donc, le débat sur l’usure devrait-il jouer un rôle central ? On peut sûrement penser à d’autres aspects comme, par exemple, les processions qui se développèrent depuis le XIVe siècle sous la férule de la commune5. Le discours sur l’usure, c’est ma seconde hypothèse, gagne cependant une dynamique particulière, une dynamique qui découle justement des deux aspects déjà cités : d’une part, la motivation politique en se défendant contre l’intervention de l’archevêque, et d’autre part, la motivation religieuse par le souci d’une ville libérée des péchés. C’est l’imbrication d’une politique concrète – la mise à l’écart de l’évêque – dans une perception de soi éthico-religieuse déjà présente, qui fit de l’usure un moment-clé d’une identité communale entièrement nouvelle. Le discours sur l’usure contribua considérablement à former une identité urbaine dans laquelle le politique et le religieux s’amalgamèrent, un phénomène encore inconnu au XIVe siècle en Allemagne. Cette nouvelle conception se manifesta, entre autres, dans des représentations nouvelles de la justice communale, comme Derick Baegert le mit en scène à la fin du XVe siècle dans l’hôtel de ville de Wesel. Je reviendrai sur ce point plus tard.

  • 6 G. Todeschini, Usury in Christian Middle Ages. A reconsideration of the historiographical tradition (...)
  • 7 Voir à ce propos d’ici peu F.-J. Arlinghaus, Inklusion/Exklusion. Funktion und Formen des Rechts in (...)
  • 8 Voir note 3.

6Au premier abord, il semble que ces deux hypothèses aient été développées seulement sur la base d’une structure discursive – en l’occurrence le seigneur-évêque d’un côté, de l’autre la commune, qui tous deux réclamèrent pour eux seuls un certain champ discursif. Mais quelle signification est alors rattachée à l’usure illicite comme thème en soi ? Tout comme Giacomo Todeschini l’a particulièrement souligné, dans les discussions sur l’enjeu de l’usure, celle-ci n’a jamais été aux yeux des juristes et des théologues un concept abstrait d’éthique économique. Le discours savant sur l’usure contenait plutôt une signification politique tout comme symbolique et il s’orientait vers un système de coordination dont l’objectif premier consistait « to separate fidelity from infidelity, reliability from untrustworthiness, citizens from foreigners »6. L’usure est donc ainsi identifiée comme un thème à travers lequel on pouvait généralement négocier l’appartenance à une communauté, que ce soit l’inclusion ou l’exclusion7. La commune, ce « corpus christianum en miniature » (« corpus christianum im kleinen8 »), dont l’autoperception en tant qu’autorité s’est affirmée, ne peut plus pour cette même raison tolérer qu’une autre institution, même s’il s’agit de l’Église, décide qui lui appartient et qui non. Le discours autour de l’usure dépasse donc le simple cadre d’un conflit sur les responsabilités respectives de deux autorités.

  • 9 Sur le rapport des juifs avec la ville entière à Cologne dans le bas et le haut Moyen Âge qui est s (...)
  • 10 « Indeed, the ancient theological representation of Judas’ avarice and unfaithfulness, the theologi (...)

7Pour soutenir cette affirmation, il est essentiel d’examiner l’action du conseil de la ville de Cologne contre les juifs, non seulement parce que la question du « prêt à intérêt » joue ici aussi un rôle central, mais surtout parce que les champs politique et religieux s’imbriquèrent très étroitement lors des débats sur le droit de séjour des juifs à Cologne et sur leur expulsion. On trouve donc dans les discours sur l’exclusion des juifs une structure analogue aux débats sur les prêts d’intérêt illégitime des chrétiens. En effet, les deux fils conducteurs, « politique » et « religion », agirent ici aussi en interaction et ces débats contribuèrent également à la formulation d’une nouvelle perception de soi communale. Bien plus important : le véritable enjeu pour la commune était de pouvoir décider l’inclusion des juifs à la communauté – aussi discriminatoire qu’elle ait pu être – ou bien leur exclusion9. Pour cela, le discours se fonde en partie sur un modèle de pensée déjà élaboré par les Pères de l’Église puis développé par les canonistes qui rassemble sans distinction l’avarice, les intérêts, la mécréance, le judaïsme et l’infamie (et donc la menace d’exclusion10).

La ville sainte, les juifs et l’usure

  • 11 H. Jakobs, Eugen III. und die Anfänge europäischer Stadtsiegel, nebst Anmerkungen zum Bande IV der (...)
  • 12 Trèves occupait la troisième place sur les cinq villes qui, selon le recensement de Rosenplüt, pouv (...)

8Dès le IXe siècle, la métropole du Rhin réclama le titre de « ville sainte », et se donna comme objectif d’occuper une place significative après Jérusalem et Rome. Les très nombreuses reliques religieuses qu’abritaient Cologne depuis l’Antiquité, auxquelles s’ajoutèrent au XIIe siècle celles de « saints de marque » – les rois mages – semblèrent justifier cette auto-évaluation11. Au XVe siècle, la réputation de Cologne comme « ville sainte » n’était plus à faire, si bien qu’Hans Rosenplüt dans son Éloge à Nuremberg rangea la ville rhénane à la quatrième place, certes derrière Jérusalem, Rome et Trêves, mais tout de même devant sa ville natale, Nuremberg.12

  • 13 « Zu dem anderen Maile want unse Stat von Coelne eyne von den heiligsten Steiden der Cristenheit ge (...)
  • 14 Voir l’analyse de Von Den Brincken, Rechtfertigungsschreiben… cit., p. 316.

9Cependant, être une ville choisie par Dieu d’une manière particulière, n’avait pas que des répercussions dans l’historiographie et les récits d’histoire panégyrique. Lorsque le conseil de Cologne expulsa les juifs de la ville en 1424, il le justifia dans une lettre adressée au roi Sigismond avec, entre autres, l’argument que Cologne était une des villes les plus saintes de la Chrétienté (« Coelne eyne von den heiligsten Steiden der Cristenheit genant ») et qu’on ne pouvait donc pas se permettre que la communauté juive foule la terre sainte de ses pieds non chrétiens (« daz die Juetscheit mit yren uncristlichen Voessen die heilige Erde daenbynnen billich nit me treiden ensuelden »)13. Une déclaration anti-juive clairement fondée sur la religion. Il faut cependant se garder de surestimer cet aspect. La lettre provient en effet de l’année 1431, elle fut donc écrite huit ans après l’expulsion et la raison invoquée n’est que l’un des sept arguments énumérés. Tout d’abord sont citées de prétendues tentatives de mission des juifs auprès des chrétiens, le « prosélytisme », puis le souci de ne pas pouvoir protéger les juifs des croisés hussites. À la troisième place, on retrouve l’usure sans qu’elle ne soit mentionnée en relation directe avec la sainteté de la ville14.

  • 15 omnibus ipsorum Iudeorum tam necessitatibus quam voluptatibus satisfiat nec solum usuras exigunt ym (...)
  • 16 M. Schmandt, Judei, cives et incole… cit. n. 13, p. 199 et suiv.
  • 17 Ibid.

10Mais cette argumentation est celle d’une lettre de la ville au roi datant de l’année 1431. L’argumentation était toute autre pendant les premières décennies du XVe siècle et les années proches de 1424, date de l’expulsion des juifs. Dans une lettre au pape Martin V, dans laquelle la ville réclame la citation de l’archevêque car il voulait empêcher l’expulsion des juifs – qui étaient en effet sous sa protection – le prêt à intérêt des juifs joua un rôle considérable. Le conseil prétendit que les juifs avaient infligé tellement de dommages aux habitants, par leur usure et la vente de gages en dessous de leur valeur, que ceux-ci en étaient réduits au vol et même à la prostitution15. L’argument de l’usure, à qui l’on accorda une place de premier rang dans la lettre au pape, était, d’une certaine manière, dans l’air du temps, comme le remarque Matthias Schmandt dans son étude16. Les membres du conseil, qui participaient aux activités diplomatiques nécessaires dans le cadre de l’expulsion des juifs, étaient aussi membres d’une commission au concile de Constance qui s’occupait de l’achat de rentes ecclésiastiques. Cette commission se réunit à la demande du prieur de la chartreuse de Cologne, qui voulait savoir si la fortune de personnes entrant dans les ordres pouvait être légalement investie dans des rentes perpétuelles porteuses d’intérêts appartenant à la commune17. Dans le premier quart du XVe siècle, l’usure était donc un sujet qui préoccupait les habitants de Cologne aussi bien en ville que hors les murs.

  • 18 Ibid. (avec la littérature).
  • 19 F.-J. Ziwes, Territoriale Judenvertreibungen im Südwesten und Süden Deutschlands im 14. und 15. Jah (...)

11En réalité, la recherche s’accorde en grande partie pour dire que ce n’était pas les réflexions religieuses qui constituèrent la raison décisive pour l’expulsion des juifs. Comme d’autres archevêques avant lui, Dietrich von Moers avait essayé par l’intermédiaire des juifs qui se trouvaient de jure sous sa protection de limiter de facto l’autonomie de Cologne et de faire prévaloir ses droits comme seigneur de la ville. Si les juifs n’étaient plus dans la ville – c’est ce que pensait le Conseil – un obstacle de poids, dont le métropolite et ses successeurs auraient pu se servir pour limiter l’autonomie politique de la commune, était ôté18. D’autres villes, entre autres Strasbourg et Zurich, avaient cherché avant Cologne à appliquer cette tactique et durent constater à quel point ce n’était pas simple. En effet, les seigneurs, quand ce ne furent pas les juifs eux-mêmes, surent très bien défendre leurs droits19.

  • 20 Voir M. Schmandt, Judei, cives et incole… cit. n. 13, p. 199 et suiv.
  • 21 videlicet archiepiscopus Iudeos extra civitatem fecit ad iudicium sue camere evocari, et civitas, q (...)

12Il en résulte une image mitigée : l’expulsion des juifs fut justifiée par différents arguments qui étaient certes tous teintés de considérations religieuses, fait peu étonnant, mais qui n’avaient pas toujours le même accent. Envers le roi, on insistait sur la sainteté de la ville en général ; dans une lettre au pape, on soulignait, par contre, les conséquences néfastes qui résultaient de l’usure des juifs décrites dans un ton très sévère. Bien évidemment, Cologne a accordé sa stratégie d’argumentation en fonction de son interlocuteur et de la situation ; le Conseil de la ville se montra à cette occasion particulièrement bien informé20. Mais les véritables préoccupations des habitants de Cologne, c’est-à-dire la limitation de l’influence des seigneurs sur la ville, ne se trouvaient citées que dans les négociations directes avec l’archevêque. Un aspect important à cet égard était le reproche fait à ce dernier de pouvoir convoquer les juifs installés à Cologne devant son tribunal situé hors de la ville et que les juifs, de leur côté, pouvaient faire poursuivre en justice suos concives devant le tribunal de l’archevêque21.

13On ne peut cependant pas dire que les scrupules mentionnés dans les écrits et les normes éthico-religieuses étaient seulement feints ; ils font appel à des discours généraux qui peuvent déployer leur efficacité justement parce qu’ils peuvent faire l’objet d’un consensus.

  • 22 Les juifs furent déjà expulsés de Cologne une première fois en 1349, mais ils s’y réinstallèrent da (...)
  • 23 Une de mes études sur cet aspect est en cours de préparation.

14Cependant, il est plus important de savoir que le conseil revendiqua deux compétences, au cours du conflit avec le seigneur de la ville, qui ne furent pas formulées d’une manière aussi explicite pendant le XIVe siècle : d’une part, le droit de décision de manière définitive sur l’autorisation de séjour des juifs à Cologne22, et d’autre part, le droit de décision en matière d’usure. Dans les deux cas, on se trouvait dans des domaines qui étaient à imputer à la sphère politico-ecclésiastique du seigneur-archevêque. À mon avis, le conflit ne se limita pas à l’usurpation de quelques droits ; la revendication formulée était plutôt l’expression et la conséquence d’une nouvelle compréhension de la commune qui eut son origine seulement pendant et au sein de ces débats. Le discours de l’usure s’avère être par là un thème central, qui permit à la commune d’échafauder la conception d’une communauté au caractère universel incluant implicitement les aspects juridiques, économiques et même religieux de l’existence humaine23. Et cela va bien au-delà du concept de « communauté sacrée ». Il est ici important de souligner que pour la ville le concept gagna en clarté seulement lors de la confrontation et de la démarcation entre l’archevêque et ses institutions religieuses et juridiques qui furent transférées dans les propres institutions de la ville – dont font partie les « maîtres de l’usure » (« Wuchermeister ») mentionnés par la suite.

L’usure chrétienne dans la Cologne sainte

  • 24 W. Stein, Akten 1… cit. n. 6, no 18, p. 69, « Morgensprache vom Wucher », vers 1355.
  • 25 W. Stein, Akten 1… cit. n. 6, no 6, p. 53, Eidbuch, 5 mars 1341, supplément probablement après 1367
  • 26 W. Stein, Akten 1… cit. n. 6, « Morgensprachen zum Wucher », no 69, p. 223 et suiv., après le 18 ma (...)

15Nous avons fait un détour par l’expulsion des juifs de Cologne, parce qu’il a clairement été démontré qu’on ne peut expliquer qu’en partie par des raisons économiques et religieuses, les accusations d’usure portées contre eux. Elles se laissent plutôt fortement déduire des ambitions réelles de pouvoir politique du conseil communal. La lutte contre l’usure n’était cependant pas dirigée seulement contre la population juive de Cologne. Dans l’histoire communale, la problématique de l’usure fut déjà clairement appréhendée en 1355. Dans la « Morgensprache » sur l’usure (édits du conseil lus sur la place publique), il est stipulé que personne, homme ou femme, ne peut pratiquer l’usure. Qui enfreignait la loi devait payer une amende dont le montant correspondait à la somme investie ; s’il était conseiller, il devait être exclu du conseil, et s’il était simple habitant, il devait être banni de la ville pour un an24. Le règlement énonce de façon lapidaire que ce n’est pas le tribunal du conseil qui peut décider en matière d’usure, mais le conseil lui-même25. Apparemment, le conseil revendiqua des compétences pour lui seul en la matière. La loi fut régulièrement répétée par le Conseil avec de légères variations26.

  • 27 « Ind soilen die vurs. boissen seess van unsen heren vam rade tzertzijt, die dartzo geschickt werde (...)
  • 28 L’archevêque la cite en 1439-1440 parmi d’autres institutions municipales pour s’en plaindre ; L. E (...)
  • 29 W. Stein, Akten 1… cit. n. 6, no 201, p. 398, 22 ou 23 février 1464, « Befugnisse der Wuchermeister (...)
  • 30 HAStK, Rm 10-2, Ratsmemoriale 1440-1472, fol. 140r, un regeste détaillé dans : Beschlüsse 1… cit. n (...)
  • 31 HAStK, Rm 10-2, fol. 173v, regeste : Beschlüsse 1… cit. n. 1, 1471, no 73, p. 454, lundi 17 juin 14 (...)

16Cependant, on ne se limita pas seulement à promulguer des normes. En 1424, la même année où les juifs furent expulsés de Cologne, l’affaire fut détaillée dans une « Morgensprache ». Celle-ci contenait également les fondations d’un nouvel organe. Une commission composée de six conseillers, ainsi qu’il était stipulé, devait maintenant s’occuper du recouvrement des amendes qui avaient été déclarées à cause des affaires d’usure27. Cette commission obtint très vite – tout comme d’autres organes du conseil – un caractère constitutionnel sous le nom de « Wuchermeister », maîtres de l’usure28. Le devoir de ces maîtres consistait à détecter les prêts à intérêt usuraire, et à mener une sorte d’enquête préliminaire en écoutant des témoins, en interrogeant des suspects et en examinant leurs livres de compte pour pouvoir en instruire le Conseil29. Les compétences des maîtres de l’usure qui ont été décrites dans les statuts semblent donc avoir été réellement mises en pratique. Lorsqu’en 1470, Ulrich van Holtorp et Johan Norff accusèrent d’usure leur partenaire en affaire, Wymmer van Poelheim, les maîtres – avec d’autres envoyés du conseil – menèrent des interrogatoires, mais en vérité sans grand succès en la circonstance30. En 1471, ils rapportèrent au Conseil la plainte de Johan Sonderlant contre Beeligijn Oeverbach ainsi que la contre-plainte de ce dernier pour empêchement juridique. La décision que l’affaire ne présentait aucun cas d’usure et qu’il fallait donc renvoyer la plainte principale devant le tribunal de la cité fut cependant prise par le Conseil31. Il est donc évident que le Conseil de Cologne s’appuyait certes sur les décisions issues du travail préliminaire des maîtres de l’usure, mais qu’il s’attribua à lui seul le droit de prendre une décision dans ce domaine. Le conseil était donc le tribunal compétent pour le prêt à intérêt illicite à Cologne, pendant que les simples plaintes de dettes devaient être traitées par les tribunaux de la ville. Les autorités communales se positionnaient donc dans ces affaires au premier plan car il s’agissait de bien davantage que de la simple répression d’un délit mineur.

Religion, droit, politique et économie : la dynamique de la superposition

  • 32 Arlinghaus, Inklusion/Exklusion, en préparation.
  • 33 Voir la note 24.

17Lors de la poursuite de l’usure par le conseil et l’expulsion des juifs, il n’y eut pas que des recoupements thématiques. Le fait que la même norme connotée religieusement soit employée par la ville contre les juifs aussi bien que contre les usuriers chrétiens n’était qu’un point commun. Tout comme l’archevêque revendiqua le droit de pouvoir décider seul sur le sort de « ses » juifs à Cologne, de la même manière revendiqua-t-il le droit de décider seul sur l’usure à travers le tribunal ecclésiastique. Le conseil de la ville considérait par contre cela comme un empiétement sur l’autonomie communale. Ici, le concept d’autonomie signifie tout d’abord avoir l’autorisation et le pouvoir de dégrader des membres de la communauté pour des fautes commises et ainsi de les marginaliser voire même de les exclure complètement32. Cela concerne dans une certaine mesure les punitions citées plus haut pour usure qui prévoient de retirer au conseiller usurier son siège au conseil de la ville ou bien au bourgeois son droit de cité33. De là découlent les disputes autour de la juridiction qui était depuis toujours une des raisons principales de la confrontation interminable entre les seigneurs. Dans la revendication du conseil de punir lui-même l’usure, la composante éthique-religieuse joua un rôle de premier ordre.

  • 34 Holtschmidt, Kölner Ratsverfassung, p. 30, ne voit pas encore – et avec raison – les « maîtres en i (...)

18Dans ce cadre, l’usure était le seul délit où une institution communale entra en conflit avec la justice cléricale de l’Église avec la même compétence, c’est-à-dire les maîtres de l’usure. Certes, des « Inhibitiensmeister34 » (maîtres en inhibition) apparurent également dans le premier tiers du XVe siècle à côté des maîtres de l’usure dont le rôle était de négocier de manière générale avec l’official sur tous les recours qu’il exerçait lors de procès devant les tribunaux du conseil. Mais leurs compétences étaient d’ordre général tandis que les maîtres de l’usure se concentraient, comme cela a déjà été mentionné, sur un délit particulier.

  • 35 L. Ennen, Geschichte der Stadt Köln, 3… cit. n. 28, p. 470.
  • 36 Les maîtres en inhibition (Inhibitienmeister) sont nommés à côté ; ibid.

19En 1471, l’archevêque Ruprecht du Palatinat se plaignit, entre autres choses, que la ville avait érigé une potence sur les terres de l’archevêché et qu’en plus elle poursuivait en justice l’usure et l’adultère alors que cela relevait des compétences du tribunal ecclésiastique35. Déjà en 1439, l’archevêque avait exigé la suppression de toutes les nouvelles institutions juridiques de la commune en désignant par là en particulier les maîtres municipaux de l’usure36.

  • 37 Beschlüsse des Rates der Stadt Köln 1320-1550, Bd. 2 : 1513-1520, éd. M. Groten, Düsseldorf, 1989 ((...)

20Si depuis 1424, du point de vue de la ville, on était parvenu, par l’expulsion des juifs, à retirer au seigneur une part considérable de sa marge d’influence, la question de l’usure resta – parmi d’autres sujets – un point central de la confrontation entre la ville et le seigneur bien au-delà de la fin du Moyen Âge37. Avec l’établissement de l’institution des maîtres de l’usure, qui devaient traiter de ce sujet – à peu près au moment où eut lieu l’expulsion des juifs – la ville prit clairement position contre l’archevêque et le tribunal ecclésiastique, soulignant par là même son autonomie, ainsi que cela a été montré auparavant.

  • 38 Beschlüsse 1… cit. n. 1, p. 408, no 1470/157, 26 mars 1470 ; voir ibid. p. 385, no 41, 28 février 1 (...)

21Les simples habitants et artisans de Cologne étaient parfaitement au courant du conflit et surent l’utiliser à leur profit. Régulièrement, des personnes contre qui les maîtres de l’usure voulaient intenter un procès en informèrent l’official qui émit alors des protestations et revendiqua cette compétence pour lui. L’avantage pour les accusés était que, dorénavant, l’affaire elle-même ne pouvait pas être traitée rapidement. En effet, les représentants des communes et l’official entraient d’abord en négociation sur les questions de compétence. Par exemple, et cela arriva souvent, une députation du conseil dût, en 1470, veiller à ce que le recours qu’une certaine Sophia Schaluyns avait obtenu contre les maîtres de l’usure soit retiré par l’official38.

  • 39 W. Stein, Akten 1… cit. n. 1, p. 425, no 227, Art. 1, § 35, Eidbuch von 1471 (livre de serment de 1 (...)
  • 40 Beschlüsse 2… cit. n. 37, p. 218, no 1515/17, 16 janvier 1515.

22Le fait qu’il ne soit que partiellement question du remboursement est bien sûr dû au genre particulier des sources qui constituent la base de ce texte. Selon le règlement, le gain obtenu devait en effet être remboursé aux débiteurs39 mais, dans la documentation du conseil, les délinquants réfractaires qui s’adressaient au tribunal ecclésiastique et leurs contacts avec l’official jouaient un rôle bien plus important que la question du remboursement. Ainsi vers 1514, les maîtres de l’usure reçurent l’ordre du conseil d’envoyer Johannes de Confluencia à la tour (c’est-à-dire en prison) pour le prélèvement illicite d’intérêts. Le seul problème était que Confluencia avait déjà été relaxé par le juge ecclésiastique. Il fallut donc traiter l’affaire de nouveau avec le tribunal ecclésiastique et pour cette raison, le cas a été consigné dans un « Ratsmemoriale » dans lequel les décisions du conseil ont été enregistrées40.

  • 41 HAStK, Rm 10-3, Ratsmemoriale 1473-1501, fol. 62v ; (21 octobre 1476). Regeste dans : B. Kuske (éd. (...)
  • 42 HAStK, Rm 10-3, fol. 103v ; Beschlüsse 1… cit., p. 608, no 1478/65, 13 octobre 1478.

23Il est peu probable que les habitants de Cologne renoncèrent véritablement au prêt à intérêt illégitime à cause des mesures prises par le conseil ou l’archevêque pendant le XVe siècle. Et, à vrai dire, les sources analysées délivrent si peu de renseignements à ce sujet qu’on doit en rester à l’état de supposition. On peut cependant facilement faire remarquer que le risque d’être poursuivi pour usure a augmenté à cette époque. En effet, les mesures très détaillées (contre ce phénomène) ne concernaient pas seulement les différentes formes de dissimulation du prêt à intérêt. Les maîtres de l’usure étaient aussi tenus de surveiller en particulier les courtiers lors de l’échange de biens entre acheteur et vendeur. On a donc l’impression que les autorités connaissaient très bien les pratiques commerciales et qu’elles surent prendre des mesures en conséquence. La plainte déposée par Whilelm von Bornhem et d’autres personnes en 1476 contre Johan Hageney le confirme. Le conseil écouta les maîtres de l’usure qui avaient mené l’enquête ainsi que les courtiers « der bij deme kouff gewest is » et ordonna à l’accusé de retirer les biens livrés ainsi que la somme d’argent prêtée pour annuler l’achat comme cela fut proposé par les acheteurs. Hageney perdit donc le droit sur ses intérêts. Et on le menaça de prison s’il ne mettait pas l’ordre à exécution41. En 1478, le conseil ordonna que les maîtres de l’usure, Heinrich Marburgh et Johan van Swekme, vendent les objets saisis chez Johan Xanctis, « umb der woecherlichen sachen », et déposent les bénéfices dans la chambre du trésor de la ville (Rentkammer)42.

  • 43 « … so haint unse heren verdragen ind den geschickden frunden zogesacht, off sij umb der sachen wil (...)

24Bien qu’il n’existe que peu de preuves supplémentaires d’interventions directes de la part des maîtres d’usure, l’effectivité de ces mesures est révélée, entre autres, par le fait que l’action des maîtres de l’usure semble avoir déclenché beaucoup de grognes et de résistances. Dès 1446 en effet, les autorités municipales se virent dans l’obligation de soutenir les maîtres de l’usure. Le conseil affirma explicitement qu’il les défendrait si jamais ils étaient attaqués dans l’exercice de leur fonction43. Dans tous les cas, les coûts des crédits ont sans doute augmenté en raison de la situation juridique incertaine, entre les maîtres de l’usure d’un côté, et l’official de l’autre. Mais ce n’est pas l’objectif de ce texte que d’approfondir ces questions. Il est préférable de s’interroger sur celles qui concernent la perception de la ville par elle-même qui résulta des débats sur l’usure.

  • 44 « Want unse heren vam rade gerne goede zo eren segen, dat man den woicher ind woecherliche sachen b (...)
  • 45 « Up den vurg. gudestach, want die woicherliche snoedicheit manncherleye bynnen Coelne gehandelt sa (...)

25Ces débats sur l’usure, suscités par les nombreux conflits entre la ville et l’archevêque, font clairement ressortir la question du pouvoir politique. Pourtant, et malgré cela, les raisons invoquées dans les règlements et les « Morgensprachen » étaient nettement d’ordre religieux. Par exemple, dans la Morgensprache de 1446, le conseil souligna que c’était l’honneur de Dieu qui les obligeait à poursuivre l’usure dans la ville44. Dans un règlement de 1464 sur les compétences des maîtres de l’usure, ces derniers furent tenus de découvrir et de poursuivre tous ceux qui, par cet acte pitoyable, furent – et je cite littéralement – « tachés45 ».

  • 46 « Ouch so vernement unse heren, dat vaste viell sůnterlicher sachen as mit boelerijen, oeverspiele (...)
  • 47 K.P. Jankrift, Schwarzer Tod und ‘Großes Sterben’. Seuchen im spätmittelalterlichen Köln, in Geschi (...)
  • 48 An die Pfarrherren wider den Wucher zu predigen (1539/40), dans M. Luther, Werke. Kritische Gesamta (...)

26Dans une « Morgensprache » datée du milieu du XVe siècle et qui couvrait un large spectre de sujets, il est dit au paragraphe 30 concernant l’usure, qu’il serait parvenu aux oreilles du conseil, qu’en ce moment, de nombreux actes de péchés – tels que l’usure, l’adultère ou des liaisons illégitimes – auraient été commis dans la ville. Par ces actes, Dieu serait outragé et irrité. La punition par la peste et la sécheresse ne pouvaient pas manquer ; on pria donc tous les chrétiens d’éviter de tels actes46, car le conseil de la ville s’y attaquerait fermement. Les prédictions du conseil ne devaient rien au hasard. En 1450, une vague de peste remonta le Rhin et atteignit Cologne en juin 1451 qu’elle frappa violemment. L’épidémie fit des ravages jusqu’en 1453 en Rhénanie et en Westphalie47. Mais ce qui importe, c’est que les liaisons illégitimes, l’adultère et l’usure furent mis sur le même plan. Le prêt à intérêt illicite se trouvait ainsi assimilé à la faute sexuelle qui mettait en danger de la même manière la pureté de la « Cologne sainte ». De tels péchés pouvaient alors provoquer des punitions divines bien concrètes puisque, pour ainsi dire, elles se trouvaient déjà devant la porte d’entrée. Ce paragraphe fait également allusion à de futures paroles de Martin Luther qui, dans un même souffle, nomma ensemble l’usure, l’adultère et la mort48. Il n’était donc pas pensable d’abandonner à l’autorité de l’official ou de l’archevêque la pureté de la ville et l’exclusion des membres « impurs ».

27Revenons maintenant à Johan vanme Geysbuch que l’official voulait faire exhumer et enterrer en terre non bénie pour usure avérée. Si cela s’est vraiment passé ou si ses enfants et les membres du conseil, qui voulaient laisser reposer le mort en paix, eurent le dessus dans l’affaire, la réponse ne nous est pas parvenue, et n’a qu’une place de second rang dans notre argumentation. Vu le soutien apporté par le conseil aux enfants, on pourrait penser que le conseil de Cologne utilisa la lutte contre l’usure comme excuse pour diriger une action politique contre l’official en tant que représentant du seigneur-archevêque. Mais cette interprétation est à rejeter vu l’arrière-plan des sources communales à disposition qui traitent intensément le sujet. Le soutien des conseillers contre un usurier condamné par l’official et l’action massive du conseil contre les prêts à intérêts illicites sont deux revers d’une même médaille. Elles sont en effet l’expression d’une conscience communale qui s’est précisément formée durant de telles confrontations.

28L’aspiration à une plus grande indépendance vis-à-vis de l’évêque, c’est-à-dire la revendication de pouvoir décider seul de l’inclusion et de l’exclusion des membres de la communauté, et le souci d’une ville immaculée – ces deux enjeux forgèrent une dynamique qui devait par la suite transformer l’image de soi de la commune.

29Cette conception développée au fil de l’intrication de ces discours – et auxquels appartient également l’expulsion des juifs – n’était plus seulement celle d’une ville qui cherchait à se libérer de l’intervention du seigneur de la ville, elle n’était plus seulement celle d’une commune qui craignait la punition collective d’un dieu courroucé. Les revendications étaient en réalité ancrées bien plus profondément : dans le cas présent, nous sommes confrontés à une ville qui, certes, fait appel au clergé pour les messes et les processions, mais qui, pour le reste, considère les lois et les normes religieuses, c’est-à-dire le rapport de la communauté au transcendant, comme son domaine de responsabilité le plus élevé. Le sujet de l’usure dans lequel des questions éthico-religieuses et de pouvoir politique s’amalgamaient, contribua considérablement, selon moi, à former une identité communale qui devait presque se généraliser par la suite au fil de la réforme.

  • 49 B. Moeller, Reichsstadt und Reformation… cit., p. 117. Voir aussi, sous une autre perspective, la d (...)

30En effet, l’on sait que les villes protestantes du XVIe siècle – et pas seulement – se concevaient d’une manière très spécifique comme les vecteurs d’une discipline ecclésiastique universelle établie sur des principes religieux et qui bien sûr « prenaient part à la direction des affaires ecclésiastiques » (« an der Leitung der kirchlichen Angelegenheiten beteiligten »)49.

  • 50 On peut retrouver facilement sur Internet le tableau de Derick Baegert intitulé La prestation de se (...)
  • 51 Cf. D. Urbach, Weltgericht und städtische Selbstdarstellung : das Wandgemälde am Triumphbogen des U (...)

31Peu avant 1500, on retrouve déjà cette idée dans les représentations de la justice dans les hôtels de ville, par exemple le fameux tableau de Derick Baegert qui fut accroché à l’un des murs du conseil de la ville de Wesel en 1494. La Prestation de serment (Eidesleistung), tel est le titre du tableau, rappelle aux prêteurs du serment de ne pas se laisser séduire jusqu’au parjure par les avantages à court terme de l’existence terrestre. L’appel est lancé aux prêteurs du serment, pas au juge. En effet, ce dernier ne renvoie pas seulement, de façon exhortative, au jugement dernier, mais il est assis de manière complètement parallèle à la position et à la gestuelle de Jésus le Jour du jugement dernier50. La recherche en histoire juridique a largement fait ressortir que les images diffusaient des représentations significatives pour la pratique du droit – au début du XVIe siècle – notamment l’idée d’un tribunal municipal légitimé directement par Dieu51. Le discours sur l’usure au XVe siècle a, il me semble, considérablement contribué à l’élaboration de cette représentation.

Notes

1 Historisches Archiv der Stadt Köln (désormais cité HAStK), C 17, fol. 16r, 16 juin 1469. Un regeste détaillé : Beschlüsse des Rates der Stadt Köln 1320-1550, Bd. 1 : Die Ratsmemoriale und ergänzende Überlieferung 1320-1543, éd. M. Huiskes, Düsseldorf, 1990 (Publikationen der Gesellschaft für Rheinische Geschichtskunde, 65), p. 365, no 1469/19.

2 Le concept remonte à L. Hänselmann, Einleitung, dans L. Hänselmann (éd.), Die Chroniken der deutschen Städte vom 14. bis ins 16. Jahrhundert, Bd. 16 : Die Chroniken der niedersächsischen Städte, Bd. 2 : Braunschweig, Leipzig, 1880, p. IX-LXVII, p. XVIII et K. Frölich, Kirche und städtisches Verfassungsleben im Mittelalter, in Zeitschrift der Savigny-Stiftung für Rechtsgeschichte, Kanonistische Abteilung, 22, 1933, p. 188-287, p. 216 et p. 266, et A. Löther s’est interrogé sur l’emploi de ce concept dans le cadre des pratiques religieuses (ce qui veut dire principalement les processions) : A. Löther, Prozessionen in spätmittelalterlichen Städten. Politische Partizipation, obrigkeitliche Inszenierung, städtische Einheit, Cologne-Weimar-Vienne, 1999 (Norm und Struktur, 12), p. 2 et suiv.

3 « Zwar wollte man gewiß in Glauben und Leben kirchlich und katholisch sein, ja die… Eingriffe der Bürger in den kirchlichen Bereich hatten, wenn wir richtig sehen, im Grunde eben die Förderung des geistlichen Lebens zum Ziel. Aber man griff jedenfalls im Disziplinären und Administrativen ohne Bedenken zur Selbsthilfe und schrieb gegenüber der [kirchlichen] Hierarchie sich selbst die Verantwortung für die rechte Gestaltung des Heilswegs zu. Zugespitzt gesagt : Die deutsche Stadt des Spätmittelalters hatte eine Neigung, sich als corpus christianum im kleinen zu verstehen » ; (en italique dans le texte original), B. Moeller, Reichsstadt und Reformation. Neue Ausgbe. Mit einer Einleitung herausgegeben von Thomas Kaufmann, Berlin, 2011, p. 50 et suiv.

4 Voir aussi à ce propos B. Moeller (op. cit.) pour la fin du XVIe siècle. R. Schilling, Stadtrepublik und Selbstbehauptung. Venedig, Bremen, Hamburg und Lübeck im 16. und 17. Jahrhundert, Cologne-Weimar-Vienne, 2012 (Städteforschung : Reihe A, Darstellungen, 84), p. 141 et suiv. ; voir aussi B. Hamm, Von der spätmittelalterlichen ‘reformatio’ zur Reformation. Der Prozeß normativer Zentrierung von Religion und Gesellschaft in Deutschland, in Archiv für Reformationsgeschichte, 99, 1993, p. 7-81, p. 62 : « Man darf allerdings im obrigkeitlichen Drängen nach Übernahme kirchlicher Verantwortung und Ausweitung oder Intensivierung von Frömmigkeit … nicht nur die Motive der Machterweiterung… und die Tendenz zu einer Instrumentalisierung von Kirche und Frömmigkeit erkennen. Die obrigkeitlichen Eingriffe in den kirchlichen Bereich geschehen in einem frömmigkeitsekklesiologischen Gesamtzusammenhang, innerhalb dessen das Einflußgefälle nicht nur vom Staat auf die Kirchen, sondern in eminent normgestaltender Weise auch von Vertretern der Kirche… auf den Staat zu verläuft ».

5 L’œuvre-standard pour l’espace germanophone encore valable aujourd’hui est : A. Löther, Prozessionen in spätmittelalterlichen Städten…, cit. n. 2. La question sur l’apport des processions à une nouvelle auto-perception communale est cependant à peine abordée.

6 G. Todeschini, Usury in Christian Middle Ages. A reconsideration of the historiographical tradition (1949-2010), dans F. Ammannati (éd.), Religione e istituzioni religiose nell’economia europea 1000-1800 / Religion and religious institutions in the European economy 1000-1800, Florence, 2012 (Fondazione Istituto Internazionale di Storia Economica “F. Datini” Prato, Serie II : Atti delle “Settimane di Studi” e altri Convegni, 43), p. 119-130, p. 126. Les dispositions qui figurent dans le « Eidbuch » (livre de serment) de Cologne de 1471 confirment cela. Il est tout d’abord précisé qu’aucun négoce d’usure d’aucune sorte ne sera toléré à Cologne. Il est ensuite souligné que les « marchands honorables », qui pratiquent leurs affaires selon la vieille tradition doivent rester non contrôlés ; W. Stein (éd.), Akten zur Geschichte der Verfassung und Verwaltung der Stadt Köln im 14. und 15. Jahrhundert, 2 Bde., Bd. 1, Bonn, 1893 (Publikationen der Gesellschaft für Rheinische Geschichtskunde, 10), p. 425, no 227, Art. 1, § 35, Eidbuch von 1471 (livre de serment de 1471).

7 Voir à ce propos d’ici peu F.-J. Arlinghaus, Inklusion/Exklusion. Funktion und Formen des Rechts in der spätmittelalterlichen Stadt. Das Beispiel Köln, Konstanz (en préparation) (Historische Kulturwissenschaften).

8 Voir note 3.

9 Sur le rapport des juifs avec la ville entière à Cologne dans le bas et le haut Moyen Âge qui est similaire par bien des aspects à celui d’autres groupes avec la ville au XIIIe siècle, voir C. Cluse, Die mittelalterliche jüdische Gemeinde als “Sondergemeinde” – eine Skizze, dans P. Johanek (éd.), Sondergemeinden und Sonderbezirke in der Stadt der Vormoderne, Cologne-Weimar, 2004 (Städteforschung, A 59), p. 29-51, p. 29 et suiv.

10 « Indeed, the ancient theological representation of Judas’ avarice and unfaithfulness, the theological association of these attributes with heretics, Jews, and outcasts, and the juridical idea that usury is a typical form of ‘infamy’, became related even more closely from the middle of the twelfth century through the continuous textual collaboration of canonists and Romanists » ; G. Todeschini, The incivility of Judas : ‘manifest’ usury as a metaphor for the ‘infamy of fact’ (infamia facti), dans J. Vitullo, D. Wolfthal (dir.), Money, morality and culture in Late Medieval and Early Modern Europe, Farnham, 2010, chap. 2, p. 34.

11 H. Jakobs, Eugen III. und die Anfänge europäischer Stadtsiegel, nebst Anmerkungen zum Bande IV der Germania Pontifica, Köln-Wien, 1980 (Studien und Vorarbeiten zur Germania Pontifica, 7), p. 8, note 31 (avec la littérature). Même l’auto-représentation visuelle fait écho en permanence aux représentations de la Jérusalem céleste : B. Roeck, Identität und Stadtbild. Zur Selbstdarstellung der deutschen Stadt im 15. und 16. Jahrhundert, dans G. Chittolini, P. Johanek (dir.), Aspetti e componenti dell’identità urbana in Italia e in Germania (secoli XIV-XVI) / Aspekte und Komponenten der städtischen Identität in Italien und Deutschland (14.-16. Jahrhundert), Bologne, 2003 (Annali dell’Istituto Storico Italo-Germanico in Trento / Contributi, 12), p. 11-24, p. 12 et suiv. ; sur les symboles des sceaux des villes insérés dans un contexte plus large, voir : A. Haverkamp, Heilige Städte im hohen Mittelalter, dans F. Graus (dir.), Mentalitäten im Mittelalter. Methodische und inhaltliche Probleme, Sigmaringen, 1987 (Vorträge und Forschungen, 25), p. 119-156, p. 123 et suiv.

12 Trèves occupait la troisième place sur les cinq villes qui, selon le recensement de Rosenplüt, pouvaient se prévaloir d’être des villes saintes à cause de la mort en martyr des soldats de la légion thébaine. « Die vierd heist Colln an dem Rein. / Solt die nicht billich heilig sein / Von den reinen, keuschen eilftausent jungkfrawen / Die da ermordt wurden und zuhawen, / Der wenig mit sunden ie was vermeiligt / Ir keusches plut die stat hat geheiligt » : H. Rosenplüt, Reimpaarsprüche und Lieder, éd. J. Reicher, Tübingen, 1990 (Altdeutsche Textbibliothek, 105), p. 231. Nuremberg occupe la cinquième place.

13 « Zu dem anderen Maile want unse Stat von Coelne eyne von den heiligsten Steiden der Cristenheit genant und an maenchen Enden mit groissem kostlichen Hilgetum der lieben Heilgen, die da rastent und ir Bloit umb des Cristengelouben willen vergoßen haben, loebelichen getziert ist, daz die Juetscheit mit yren uncristlichen Voessen die heilige Erde daenbynnen billich nit me treiden ensuelden » ; A.-D. Von Den Brincken, Das Rechtfertigungsschreiben der Stadt Köln wegen Ausweisung der Juden im Jahre 1424. Zur Motivierung spätmittelalterlicher Judenvertreibungen in West- und Mitteleuropa, dans H. Stehkämper (éd.), Köln, das Reich und Europa. Abhandlungen über weiträumige Verflechtungen der Stadt Köln in Politik, Recht und Wirtschaft im Mittelalter, Cologne, 1971 (Mitteilungen aus dem Stadtarchiv von Köln), p. 305-339, p. 316. M. Schmandt, en parallèle à von den Brincken, s’est également confronté avec le texte. M. Schmandt, Judei, cives et incole. Studien zur jüdischen Geschichte Kölns im Mittelalter, Hanovre, 2002 (Forschungen zur Geschichte der Juden, A 11), p. 199 et suiv.

14 Voir l’analyse de Von Den Brincken, Rechtfertigungsschreiben… cit., p. 316.

15 omnibus ipsorum Iudeorum tam necessitatibus quam voluptatibus satisfiat nec solum usuras exigunt ymmo usuras ipsarum etiam usurarum pignora pro levi summa obligata vendunt et precium suis impiis lucris usurpant, qua de re plures ex civibus et incolis predicte civitatis ad extremam devenerunt paupertatem, … quos cives et incole antedicti ibidem pro nimia usurarum mole tamquam desperata huiusmodi pignora redimere dereliquerunt, sic quod omnibus suis facultatibus destituuntur dum talis abissus abiussum invocat, hinc insuper furta et latrocinia oriuntur virginumque et feminarum plerumque iactura pudoris, dum intollerabilis ; F. Ritter, Erzbischof Dietrich von Moers und die Stadt Köln in den Jahren 1414 bis 1424, in Annalen des Historischen Vereins für den Niederrhein, 56, 1893, p. 1-90, p. 72 et suiv., citation p. 73, lettre du Conseil de Cologne au pape inséré dans une fixation de date du commissaire papal Antonius, Rome, 29 août 1424. Voir à ce propos M. Schmandt, Judei, cives et incole… cit. n. 13, p. 199 et suiv. Sur l’interdiction de l’usure qui – contrairement à une idée reçue répandue – était aussi valable pour les juifs (et les « Lombards ») en général : H.-J. Gilomen, Wucher und Wirtschaft im Mittelalter, in Historische Zeitschrift, 250, 1990, p. 265-301, p. 272 et suiv. Sur l’importance économique (décroissante) des juifs comme bailleur de fonds au XVe siècle, voir M.J. Wenninger, Man bedarf keiner Juden mehr. Ursachen und Hintergründe ihrer Vertreibung aus den deutschen Reichsstädten im 15. Jahrhundert, Vienne, 1981 (Archiv für Kulturgeschichte, Beiheft, 14), et H.-J. Gilomen, Die Substitution jüdischer Kredite im Spätmittelalter. Das Beispiel Zürich, dans L. Clemens, S. Hirbodian (dir.), Christliches und jüdisches Europa im Mittelalter, Trier, 2011, p. 207-233, p. 207 et suiv. (avec une littérature augmentée). À vrai dire, il faut donner raison à Gilomen sur le fait que la perte d’importance des juifs comme prêteurs ne peut être vue comme une des raisons de leur expulsion hors des villes allemandes, qui devint récurrente à partir de cette époque.

16 M. Schmandt, Judei, cives et incole… cit. n. 13, p. 199 et suiv.

17 Ibid.

18 Ibid. (avec la littérature).

19 F.-J. Ziwes, Territoriale Judenvertreibungen im Südwesten und Süden Deutschlands im 14. und 15. Jahrhundert, dans F. Burgard et al. (éd.), Judenvertreibungen in Mittelalter und früher Neuzeit, Trier, 1999 (Trierer historische Forschungen, A 9), p. 165-187, p. 183 et suiv.

20 Voir M. Schmandt, Judei, cives et incole… cit. n. 13, p. 199 et suiv.

21 videlicet archiepiscopus Iudeos extra civitatem fecit ad iudicium sue camere evocari, et civitas, que Iudaeis protectiouem et concivilitatis literas dederat ad decenuium, in eadem volebat eosdem, ut verbum suum irritum non faceret, conservari. Idcirco eosdem Iudeos tamquam tunc suos concives pro tempore extra civitatem taliter evocari ad iudicium cum in civitate competeus iurisdictio et sufficiens iusticie copia haberetur passi non sunt. F. Ritter, Erzbischof Dietrich von Moers… cit. n. 15, p. 74.

22 Les juifs furent déjà expulsés de Cologne une première fois en 1349, mais ils s’y réinstallèrent dans les années 1370. Il leur fut accordé un permis de séjour certes limité – 10 ans – mais toujours prolongé. K. Bauer, Judenrecht in Köln bis zum Jahre 1424, Köln, 1964 (Veröffentlichungen des Kölnischen Geschichtsvereins, 26), p. 96 et suiv.

23 Une de mes études sur cet aspect est en cours de préparation.

24 W. Stein, Akten 1… cit. n. 6, no 18, p. 69, « Morgensprache vom Wucher », vers 1355.

25 W. Stein, Akten 1… cit. n. 6, no 6, p. 53, Eidbuch, 5 mars 1341, supplément probablement après 1367.

26 W. Stein, Akten 1… cit. n. 6, « Morgensprachen zum Wucher », no 69, p. 223 et suiv., après le 18 mars 1401 ; ibid., no 114, 17 mars 1424, p. 289 et suiv.

27 « Ind soilen die vurs. boissen seess van unsen heren vam rade tzertzijt, die dartzo geschickt werdent, up yre eyde vorderen ind der nyemant laissen… verschoenen » : W. Stein, Akten 1… cit. n. 6, no 114, 17 mars 1424, p. 269-291, à p. 290. Même les « Unterkäufer » (revendeurs) qui avaient une fonction similaire à celle de courtier n’échappèrent pas à la réglementation sur l’usure.

28 L’archevêque la cite en 1439-1440 parmi d’autres institutions municipales pour s’en plaindre ; L. Ennen, Geschichte der Stadt Köln, 5 Bde., Bd. 3, Köln-Neuß, 1869, p. 371 et suiv.

29 W. Stein, Akten 1… cit. n. 6, no 201, p. 398, 22 ou 23 février 1464, « Befugnisse der Wuchermeister » ; ibid., no 282, p. 524, 26 septembre 1482, « Tätigkeit der Wuchermeister » (activité du maître de l’usure).

30 HAStK, Rm 10-2, Ratsmemoriale 1440-1472, fol. 140r, un regeste détaillé dans : Beschlüsse 1… cit. n. 1, 1470, no 217, p. 421, mercredi 8 août 1470.

31 HAStK, Rm 10-2, fol. 173v, regeste : Beschlüsse 1… cit. n. 1, 1471, no 73, p. 454, lundi 17 juin 1471.

32 Arlinghaus, Inklusion/Exklusion, en préparation.

33 Voir la note 24.

34 Holtschmidt, Kölner Ratsverfassung, p. 30, ne voit pas encore – et avec raison – les « maîtres en inhibition » institués plus tard dans les deux conseils municipaux dont il est question dans la Morgensprache de 1409. La première trace de l’activité des « maîtres en inhibition » se retrouve dans les délibérations 1, no 1431/02, p. 141, 19 février 1431.

35 L. Ennen, Geschichte der Stadt Köln, 3… cit. n. 28, p. 470.

36 Les maîtres en inhibition (Inhibitienmeister) sont nommés à côté ; ibid.

37 Beschlüsse des Rates der Stadt Köln 1320-1550, Bd. 2 : 1513-1520, éd. M. Groten, Düsseldorf, 1989 (Publikationen der Gesellschaft für Rheinische Geschichtskunde 65), p. 218, no 1515/17, 15 janvier 1515 ; Beschlüsse des Rates der Stadt Köln 1320-1550, Bd. 4 : 1531-1540, éd. M. Groten, Düsseldorf, 1988 (Publikationen der Gesellschaft für Rheinische Geschichtskunde, 65), p. 192, no 1533/439, 1er septembre 1533, et à plusieurs reprises par la suite.

38 Beschlüsse 1… cit. n. 1, p. 408, no 1470/157, 26 mars 1470 ; voir ibid. p. 385, no 41, 28 février 1470. Cf. Ibid., p. 385, no 41, 28 février 1470.

39 W. Stein, Akten 1… cit. n. 1, p. 425, no 227, Art. 1, § 35, Eidbuch von 1471 (livre de serment de 1471).

40 Beschlüsse 2… cit. n. 37, p. 218, no 1515/17, 16 janvier 1515.

41 HAStK, Rm 10-3, Ratsmemoriale 1473-1501, fol. 62v ; (21 octobre 1476). Regeste dans : B. Kuske (éd.), Quellen zur Geschichte des Kölner Handels und Verkehrs im Mittelalter, Bd. 2 : 1450-1500, 4 Bde., Bonn, 1917 (Publikationen der Gesellschaft für Rheinische Geschichtskunde 23), p. 366, no 709 et Beschlüsse 1… cit., p. 569, no 1476/60.

42 HAStK, Rm 10-3, fol. 103v ; Beschlüsse 1… cit., p. 608, no 1478/65, 13 octobre 1478.

43 « … so haint unse heren verdragen ind den geschickden frunden zogesacht, off sij umb der sachen wille van yemande angelangt off gearchwilliget wurden, dat sij sij da ynne verantwerden ind verdadingen willen » ; W. Stein, Akten 1… cit. n. 6, p. 318, no 151, 14 mars 1446.

44 « Want unse heren vam rade gerne goede zo eren segen, dat man den woicher ind woecherliche sachen bynnen yrre stat straeffde, darumb dat unse heren den wochermeisteren… die sachen ernstlichen uysszodragen bevoylen haint… », ibid., p. 318, no 151, 14 mars 1446, « Einsetzung einer Kommission zur Verhinderung des Wuchers » (création d’une commission contre l’usure).

45 « Up den vurg. gudestach, want die woicherliche snoedicheit manncherleye bynnen Coelne gehandelt sall werden, umb dan sulchs zo verdryven, haint unse heren verdragen ind ordinyert ind yren woicheremeisteren ernstlichen bevoilen ind die macht gegeven, off sij yemant mit sulcher snodicheit befleckt off vermyrckt vonden, dat sij dan, die wairheit dairvan zo haven, dieselven ind ouch getzuyge, die dairvan wisten, besenden ind sij bij yren eyden darup vragen soilen… » ; ibid., no 201, p. 398, 22 ou 23 février (1464).

46 « Ouch so vernement unse heren, dat vaste viell sůnterlicher sachen as mit boelerijen, oeverspiele ind woůcherijen hie bynnen yrre stat bedreven werden, damit got unse here sere groeslich ertzůrt ind gesmeet wirt, darumb dat duckwijle sterffde pestilencie ind duyr tzijt komen sijnt ind noch komen moechten, darumb gebiedent unse heren vam rade ernstligen allen yren burgeren ind ingesessenen… sich sulcher suntlicher sachen zo hůeden…, want wer daemit me bevonden wirt, dat kuntlich were, den willen unse heren also strengelich doin straffen ind richten… » ; W. Stein (éd.), Akten zur Geschichte der Verfassung und Verwaltung der Stadt Köln im 14. und 15. Jahrhundert, 2 Bde., Bd. 2, Bonn, 1895 (Publikationen der Gesellschaft für Rheinische Geschichtskunde, 10), p. 354 et suiv., no 214, § 30 (milieu XVe siècle).

47 K.P. Jankrift, Schwarzer Tod und ‘Großes Sterben’. Seuchen im spätmittelalterlichen Köln, in Geschichte in Köln, 51, 2004, p. 9-21, p. 15 et suiv.

48 An die Pfarrherren wider den Wucher zu predigen (1539/40), dans M. Luther, Werke. Kritische Gesamtausgabe, 51. Band, Weimar, 1914, p. 355. Le débat sur l’usure au XVIe siècle voir J. Burkhardt, Die kommerzielle Welt in der Wissensordnung der Frühen Neuzeit, dans J. Burkhardt, H. Koopmann, H. Krauss (éd.), Wirtschaft in Wissenschaft und Literatur. Drei Perspektiven aus historischer und literaturwissenschaftlicher Sicht, Augsburg, 1993 (Augsburger Universitätsreden, 23), p. 5-28, p. 10 et suiv.

49 B. Moeller, Reichsstadt und Reformation… cit., p. 117. Voir aussi, sous une autre perspective, la discussion générale sur la formation du contrôle social à l’époque moderne, H. Schilling (éd.), Kirchenzucht und Sozialdisziplinierung im frühneuzeitlichen Europa, Berlin, 1994 (ZHF Beiheft, 16). A. Landwehr critique quant à lui le concept : A. Landwehr, Policey vor Ort. Die Implementation von Policeyordnungen in der ländlichen Gesellschaft der Frühen Neuzeit, dans K. Härter (éd.), Policey und frühneuzeitliche Gesellschaft, Frankfurt/M., 2000, p. 47-70, p. 69 et suiv.

50 On peut retrouver facilement sur Internet le tableau de Derick Baegert intitulé La prestation de serment (en allemand : Die Eidesleistung). Cf. M. Damm, Iuste iudicate filii hominum. Die Darstellung von Gerechtigkeit in der Kunst am Beispiel einer Bildergruppe im Kölner Rathaus. Eine Untersuchung zur Ikonographie, zum Bildtypus und Stil der Gemälde, Münster, Hambourg-Londres, 2000 (Kunstgeschichte, 71), p. 64 et suiv.

51 Cf. D. Urbach, Weltgericht und städtische Selbstdarstellung : das Wandgemälde am Triumphbogen des Ulmer Münsters, Freiburg in Brisgau, 2001.

Notes de fin

* Je remercie vivement Maud Harivel, université de Berne, pour la traduction en français.

Auteur

Université de Bielefeld

© Publications de l’École française de Rome, 2019

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