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Deuxième partie. L’infamie : Une construction juridique ?

p. 269

Texte intégral

1La Table d’Héraclée fut souvent utilisée par les historiens pour éclairer la lectio senatus accomplie à Rome par les censeurs. Il existe pourtant une différence fondamentale : les magistrats municipaux écartaient de la curie municipale en appliquant la loi contenue dans ce texte épigraphique, tandis que les censeurs actualisaient arbitrairement une infamie au cas par cas en se fondant sur le mos et leur propre appréciation de la valeur du citoyen. À la différence de la procédure censoriale, la Table d’Héraclée contenait une définition précise de l’infamie et des infâmes. Nous avons conservé d’autres textes, épigraphiques ou non, établissant différentes incapacités à l’encontre de certains citoyens. Ces dispositions relèvent de ce que nous pouvons qualifier d’infamie normative. Cette forme d’infamie, fondée sur des textes normatifs, affectait des catégories de citoyens (souvent les mêmes) énumérées dans des listes, et consistait principalement en une restriction des droits et des capacités civiques et judiciaires. Le silence des sources sur l’existence d’une infamie normative avant la fin du IIe siècle av. J.–C. et, au contraire, la multiplication des témoignages sur celle–ci à partir de cette période suggèrent une évolution dans la nature des procédures infamantes. Que l’infamie normative apparût ou non à la fin du IIe siècle, elle connut vraisemblablement un essor au détriment des anciennes procédures. Ce phénomène de juridicisation de l’infamie désigne un recours accru à la fois au droit écrit pour établir des catégories d’infâmes et aux tribunaux pour prononcer l’infamie (la judiciarisation).

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