Les cardinaux entre Cour et Curie
| ,Les cardinaux dans l’équilibre curial
Le cardinal Roy : un cas de déconcentration de la Curie
Résumé
La mesure la plus innovante de Paul VI, au moment de la réforme de la curie romaine, fut de nommer des cardinaux résidentiels chefs de dicastères. C’est le cas du cardinal Roy qui, tout en demeurant archevêque de Québec, présida la Commission Justice et Paix, le Conseil des laïcs et le comité pour la famille. C’est cet exemple de déconcentration de la curie que nous analysons ici qui conduisit à l’élaboration de nouvelles pratiques et de nouveaux types de fonctionnement.
Texte intégral
- 1 Pour le débat sur le De episcopis à la deuxième période (novembre 1963), voir l’excellente étude d (...)
- 2 Voir AAS, 55, 1963, col. 793-800, version française dans DC, 60, N° 1409, 1963, col. 1262.
- 3 DC, 60, N° 1409, 1963, col. 1263.
- 4 Ibid.
1Après que Paul VI eut ouvertement abordé la délicate question de la réforme de la Curie romaine, question qui couvait depuis les premiers moments du concile, les Pères conciliaires ont affronté le problème, dans un climat fort tendu, lors du débat sur le De episcopis, à la deuxième session1. Paul VI, en effet, dans son allocution à la Curie romaine du 21 septembre 1963, quelques jours avant la reprise des travaux conciliaires, ouvre la voie en évoquant les critiques adressées à la Curie et « les réformes possibles qui devront être adoptées à son sujet2 ». Il met principalement en avant trois mesures : (1) la simplification de son fonctionnement ; (2) la décentralisation du gouvernement de l’Église catholique en confiant aux évêques des pouvoirs qu’ils apparaissent alors mieux en mesure d’exercer localement ; (3) enfin l’extension des domaines couverts par les missions de la Curie. De plus, il recommande que son recrutement se fasse « dans une plus large perspective supranationale », en veillant à lui donner « une préparation œcuménique plus poussée ». Prolongeant sa réflexion, Paul VI ouvre prudemment la voie à une association, « d’une certaine façon et pour certaines questions », de représentants de l’épiscopat « aux travaux et aux responsabilités du gouvernement de l’Église, en conformité avec la doctrine de l’Église et le droit canonique »3. Le pape disait attendre l’expression du concile à ce sujet, bien qu’il devenait alors clair qu’il n’appartenait pas à ce dernier de concevoir et de décider du renouveau envisagé des dicastères romains puisque, avait-il pris soin de souligner, « ces réformes seront formulées et promulguées par la Curie elle-même4. »
- 5 Au cours de la phase préparatoire, la commission sur les évêques et le gouvernement des diocèses p (...)
- 6 Au cours du débat sur la Constitution sur la liturgie, par exemple, l’épiscopat africain avait réc (...)
2Les propos de Paul VI répondent aux souhaits exprimés par les évêques, soit dans les vota de la phase préparatoire, soit dans les schémas préparatoires5, soit encore dans les débats de la première session6.
3Jusque-là, on avait principalement discuté de la décentralisation du gouvernement de l’Église catholique, en proposant de confier de nouvelles compétences aux évêques résidentiels, ou de l’internationalisation de la Curie. Cette dernière proposition en laissait plus d’un sceptique, quoique pour des raisons différentes. Pour certains, la question véritable n’est pas l’internationalisation de la Curie, mais la nécessité de donner une dimension internationale au gouvernement de l’Église. La solution ne consiste donc pas à inviter quelques évêques résidentiels à devenir membres ou consulteurs des congrégations, ni à recruter des chefs de dicastères parmi les évêques du monde entier. La solution réside plutôt dans la constitution d’un organisme vraiment international, sur le modèle de la Commission centrale préparatoire du concile, dans lequel seraient représentés les évêques de tous les pays, de manière à rendre plus visible l’universalité de l’Église catholique.
- 7 La décentralisation du pouvoir consiste à remettre à des organismes locaux (évêques résidentiels) (...)
4Tout au long du concile, l’attention se fixe sur ces trois questions : l’accroissement des compétences des évêques, l’internationalisation de la Curie et la création d’un organisme représentant l’épiscopat du monde entier pour soutenir le pape dans le gouvernement de l’Église. On ne trouve pas dans les débats de proposition soutenant ce que j’appelle une « déconcentration » de la Curie en confiant la direction de certains dicastères à des évêques résidentiels7.
- 8 Par exemple, la Constitution apostolique Regimini Ecclesiae universae (15 août 1967), pourtant for (...)
- 9 Plusieurs documents relatifs à Justice et Paix sont conservés aux Archives de l’Archevêché de Québ (...)
5Cette perspective, qui ne figure dans aucun document programmatique8, se fraie donc un chemin, sans avoir été conceptualisée, ni discutée. On trouve trois cas qui peuvent illustrer cette proposition : la nomination du cardinal König à la tête du Secrétariat pour les non croyants (1965-1980) établi par le pape Paul VI le 9 avril 1965, celle du cardinal Roy à la tête de la Commission Justice et Paix (1967-1976), du Conseil pour les laïcs (1967-1976) et du Comité pour la famille (1973- 1976), et celle du cardinal Willebrands, à la fois président du Secrétariat pour l’Unité des chrétiens et archevêque d’Utrecht (1975-1983). Tous ces cas de cardinaux, placés à la tête d’organismes de la Curie romaine tout en résidant dans leurs diocèses, concernent de nouveaux organismes curiaux. Ces expériences de déconcentration de la Curie ont également pour point commun de se développer sous Paul VI et de prendre fin au début du pontificat de Jean-Paul II. Dans la présente étude, nous examinons le cas du cardinal Maurice Roy, archevêque de Québec, dont les archives conservées à Québec permettent d’appréhender cette tentative de déconcentration de la Curie9.
Un cardinal montinien
6Archevêque de Québec depuis 1947, Maurice Roy n’est intégré au collège cardinalice qu’en février 1965. Au consistoire secret du 29 novembre 1952, le choix de Pie XII se porte, contrairement à une tradition qui remontait au XIXe siècle, sur l’archevêque de Montréal, Paul-Émile Léger, plutôt que sur l’archevêque de Québec, titulaire du plus ancien siège épiscopal en Amérique, au nord des colonies espagnoles. Roy doit se contenter du titre de primat du Canada, qui lui est octroyé en 1956. Lors de la convocation du concile, le Canada est représenté à la Commission centrale préparatoire du concile par deux cardinaux (Léger et McGuigan) et le président de la conférence épiscopale, Mgr Paul Bernier. Pour sa part, l’archevêque de Québec n’est nommé dans aucune commission. Il lui faut attendre mars 1961 pour être nommé membre de la Commission théologique préparatoire, le cardinal Ottaviani lui proposant d’être membre de la sous-commission De ordine sociali.
- 10 Cf. la Relatio sur les travaux de la Commissio de Doctrina Fidei et Morum de S. Tromp, secrétaire (...)
- 11 Ainsi, il souscrit aux interventions de ses confrères canadiens De Roo (7 octobre 1964, 96e congré (...)
7Sa participation au concile est significative, même s’il ne figure pas parmi ses coryphées. Homme effacé, préférant les relations personnelles aux déclarations publiques, il est élu membre de la Commission doctrinale dès le mois d’octobre 1962. Les procès-verbaux des réunions de la commission doctrinale témoignent de sa grande discrétion10. De même, il intervient peu dans l’aula conciliaire : une première fois sur le De Ecclesia in mundo huius temporis (3e session), schéma sur lequel il s’engage vraiment, et ensuite sur le De Ministerio et vita presbyterorum (4e session), intervention au contenu riche et fort significatif. Suivant son tempérament, il préfère un mode plus discret d’intervention, soumettant des animadversiones scriptae sur les schémas De Sacra liturgia et De Fontibus revelationis au cours de la première session, sur le De Oecumenismo à la deuxième session et sur le De Apostolatu laicorum à la troisième session, ou souscrivant aux interventions de ses confrères11.
- 12 Voir G. Routhier, Famille, mariage et procréation : le combat de deux cardinaux canadiens, dans Cr (...)
8Son autre mode d’intervention au concile consista à faire circuler les études réalisées par ses théologiens, Charles de Koninck, Maurice Dionne et Bernard Lambert, en particulier sur la légitimité des moyens qui permettent l’infécondité temporaire chez les femmes. Lui-même ne mène pas la bataille, mais il permet à ses théologiens de le faire et favorise la diffusion parmi les pères de leurs textes sur la question12. On retient surtout les relationes qu’il fait au nom de la commission théologique sur le délicat chapitre VIII de Lumen gentium sur la Vierge Marie et son ambassade chez Paul VI, avec un groupe de laïcs, au moment de la crise qui survient lors de la discussion sur le texte sur la famille.
9Maurice Roy connait de longue date Giovanni Battista Montini qu’il avait accueilli à Québec, les 20 et 21 août 1951, alors que ce dernier était encore substitut à la Secrétairerie d’État. Les deux hommes se retrouvent au concile, mais les contacts ne sont pas alors très étroits, hormis les audiences données par le pape aux évêques de la conférence épiscopale du Canada. Les deux hommes ont pourtant plusieurs traits communs, dont la préférence pour la diplomatie et le travail en coulisse, pour la médiation entre les parties plutôt que les actions d’éclats en public, les déclarations fracassantes et le style flamboyant. Réservé, Roy écoute et tempère. Renseigné, averti et calme, il prend le temps d’apprécier les situations et de discerner sereinement. Il observe, écoute, consulte, soupèse, laisse les autres prendre des initiatives et tranche, le moment venu. Ne se laissant pas dominer par la peur, il laisse le temps faire son œuvre. Il écrit peu, décrète encore moins et ne lance pas de grands débats théoriques sur les principes. Mystérieux et insaisissable, il représente une force tranquille et son action s’inscrit dans la durée. Plus arbitre qu’innovateur, davantage médiateur que leader, il fait confiance à ses collaborateurs et sait rallier.
- 13 Sur les rapports entre Léger et Montini, voir G. Routhier, Léger et Suenens : les relations diffic (...)
10Après la fin du concile, les contacts entre Montini et Roy ne sont guère plus étroits. Cependant, le style flamboyant et imprévisible de Léger s’accorde alors mal à la personnalité du diplomate discret qu’était Montini13. Paul VI doit s’appuyer sur un autre leader dans l’épiscopat canadien : la personnalité effacée de Roy devait lui convenir davantage.
Un choix étonnant
- 14 Cf. G. Routhier, De nouvelles initiatives pour la justice et la paix, dans G. Routhier (dir.), Pau (...)
- 15 Le troisième alinéa du paragraphe 90 se lit ainsi : « Considérant l’immense misère qui accable, au (...)
11L’itinéraire qui conduit à la création de la Commission Justice et Paix est long et complexe14. Au lendemain du concile, tout l’enjeu est de savoir s’il faut créer un nouvel organisme autonome chargé de promouvoir le développement et la paix ou l’insérer à l’intérieur d’un corps déjà existant, le futur Conseil pour les laïcs qu’on s’apprêtait à créer, ou encore la Caritas internationalis, voire la Secrétairerie d’État. Les tensions sont grandes entre les différentes parties intéressées à la réalisation du vœu formulé au paragraphe 90 de Gaudium et spes15.
- 16 Du 26 au 28 janvier 1966, trente représentants de l’Église catholique et du Conseil œcuménique des (...)
12La Caritas internationalis, répondant aux urgences mondiales, occupe déjà le terrain. Le problème de la faim en Afrique et en Inde nécessite l’organisation de secours d’urgence et conduit l’Église catholique et le Conseil œcuménique des Églises à coopérer dans l’organisation de ces secours et la mise au point de programmes de développement16. L’activité débordante de la Caritas laisse peu de place à l’arrivée d’un nouveau joueur et risque de ce fait de mettre les promoteurs de la création d’un nouvel organisme devant un fait accompli.
- 17 Dans le communiqué de la NCWC News Service du 26 février (« Lay Apostolate Commission Ends Rome Di (...)
- 18 Lettre de Dell’Acqua à Rodhain du 21 février 1966 (Fonds Tucci, dossier 23) Ce n’est pas avant le (...)
13De son côté, la commission postconcilaire de l’apostolat des laïcs, prolongement de la commission conciliaire du même nom et qui avait été, avec la Commission doctrinale, responsable de l’élaboration de la Constitution Gaudium et spes, se considère naturellement comme responsable de la mise en œuvre de la Constitution puisqu’aucune commission postconciliaire n’avait été mise sur pied pour donner suite à cette constitution. Ainsi, lors de ses rencontres des 21 au 26 février et de mai 1966, la Commission postconciliaire de l’apostolat des laïcs discute de la mise en œuvre de cette recommandation17. Il est du reste difficile de déterminer si la mise en œuvre de la proposition du paragraphe 90 relève du mandat de la commission des laïcs ou non, Mgr Felici, président de la Commission pontificale pour l’interprétation des décrets du concile, ayant signalé à J. Norris, membre de la commission postconciliaire pour l’apostolat des laïcs, après la rencontre de février, que le paragraphe 90 ne relève de la compétence d’aucune commission postconciliaire, pas même du comité de coordination dont il a la charge et que l’initiative revenait à Mgr Rodhain (de la Caritas) et à Mgr Swanstrom, évêque auxiliaire de New York et président du Catholic Relief Service, qui avaient reçu le mandat de Mgr Dell’Acqua, de la Secrétairerie d’État, de former un groupe de travail à cette fin18.
14Le groupe de travail, dont les membres provenaient du Conseil pour l’apostolat des laïcs, de la Caritas et d’autres organismes de l’Église préoccupés par le développement, parvient difficilement à un compromis après quelques mois de tractations (février à mai 1966). Cependant, en coulisses, les lobbies de la Secrétairerie d’État, de la Caritas ou du groupe anglo-saxon continuent à exercer des pressions en vue de favoriser une solution qui serait à leur avantage.
- 19 Les autres membres du Comité étaient Rosemary Goldie, secrétaire permanente du Comité internationa (...)
- 20 L’article 26 de Apostolicam actuositatem comporte la disposition suivante : « Il faudrait de plus (...)
15Pour aplanir les différences de vues, Paul VI met sur pied, à la surprise de tous, un nouveau groupe de travail. Annoncé dans un bref entrefilet en page 8 de l’Osservatore romano du 8 juillet 1966, ce comité provisoire est présidé par le cardinal Roy, personnalité qui semble à première vue bien extérieure à tout ce débat puisque celui-ci n’a participé à aucune discussion à ce sujet19. Ce Comité provisoire doit mettre en œuvre, non seulement le vœu contenu dans le paragraphe 90 de Gaudium et spes, mais également une proposition émanant de l’article 26 du décret Apostolicam actuositatem20. À la surprise générale, le sort du conseil des laïcs et celui de l’organisme pour la justice et le développement semblent liés.
- 21 Ce groupe est actif depuis la deuxième session du concile. Son noyau est composé de Barbara Ward ( (...)
- 22 Le Groupe de travail se demande ainsi, lors de ses travaux du mois de mai, qui pourrait être le « (...)
16Cette décision alarme les lobbyistes anglo-saxons qui, tout au long du concile et par la suite, ont milité en faveur de la création d’un organisme voué à la promotion du développement, lié à la justice, et la paix21. Touchant presqu’au but, ils voient à nouveau cette affaire leur échapper. La nomination du cardinal Roy, loin d’être une personnalité de premier plan, comparable par exemple à celle du cardinal Bea, responsable du Secrétariat pour l’Unité des chrétiens22, leur semble décevante. Que signifiait le choix de Maurice Roy, chargé de résoudre le délicat problème de la place de ce nouvel organisme en regard du Conseil des laïcs ?
- 23 AS, III/6, p. 36.
- 24 Cf. G. Besutti, Lo schema mariano al concilio Vaticano II, Rome, 1966, R. Laurentin, La Vierge au (...)
- 25 Cf. G. Routhier, Famille, mariage et procréation… cit., p. 412-413.
- 26 Cf. le témoignage de R. Plamondon dans G. Routhier (dir.), L’Église canadienne et Vatican II, Mont (...)
- 27 La grève de l’amiante (1949) est un conflit opposant les mineurs d’amiante du Québec aux compagnie (...)
- 28 R. Burigana, Progetto dogmatico del Vaticano II : la commissione teologica preparatoria (1960-1962 (...)
17Malgré son effacement et sa discrétion, Roy avait pu être remarqué par Paul VI à deux moments de tension et de crise au cours du concile. D’abord, au moment de la relatio sur le De Beata (16 septembre 196423), sujet délicat qui a profondément divisé le concile lors du premier scrutin et suscité bien des polémiques24, que la Commission doctrinale avait confié à Roy, qui présidait une petite commission technique sur le sujet. À cette occasion, Roy était parvenu à apaiser les tensions. L’autre occasion s’était présentée lorsque, en un moment d’intense tension, lors de la discussion des amendements pontificaux au texte du chapitre sur la famille et la procréation par la commission plénière mixte, Roy avait accompagné chez Paul VI un groupe de laïcs qui désiraient porter au pape une pétition25. Là encore Roy avait contribué à l’apaisement. De plus, il était notoire26 que Roy était très proche des auditeurs laïcs au concile. Il avait donc certainement la confiance d’un bon nombre d’entre eux qui constituaient la majorité des membres du Comité provisoire. Par ailleurs, sans se distinguer au plan social, il avait manifesté jusque-là certaines dispositions dans ce domaine, notamment lors du règlement de la grève de l’Amiante27. Selon R. Burigana, c’est en raison de ses compétences dans le domaine de la doctrine sociale qu’il fut invité – bien que tardivement et à la suggestion de la Secrétairerie d’État – à joindre la Commission théologique préparatoire le 3 mars 196128.
- 29 Il reçoit à Québec J. Gremillion et Mgr Swanstrom des Catholic Relief Services (lettre de Gremilli (...)
- 30 Cinq membres du Groupe de travail ont été invités dont Norris, Ward et Rodhain, le chanoine Houtar (...)
- 31 Cf. la lettre de Norris à Swanstrom (21 novembre 1966) et de Lady Jackson à Gremillion (21 novembr (...)
- 32 Texte italien dans OR, 11.01.1967, traduction française dans DC, 1967, T. 64, N° 1487, col. 193-19 (...)
- 33 On verra le plaidoyer (trois documents) en faveur d’un organisme voué spécifiquement à la justice (...)
18C’est donc à ce cardinal effacé, peu bavard qui fuit par-dessus tout la controverse, médiateur remarquable et capable d’élaborer des compromis, qu’est confiée cette mission de trouver un terrain commun entre les divers groupes. Durant l’été, Roy écoute ou rencontre de nombreux partisans de la création d’un organisme indépendant pour la justice et le développement29. Ce n’est toutefois qu’au cours de la première semaine d’octobre que les travaux du Comité provisoire débutent à Rome. Suivant la méthode de Roy, le Comité reçoit à cette occasion plusieurs personnes ou groupes qui veulent faire entendre leur point de vue30. Ces auditions rassurent le groupe de lobbyistes, impressionnés par la qualité d’écoute qu’ils reçoivent de Roy, si bien qu’ils se mettent en campagne afin que Roy lui-même soit désigné comme cardinal président de l’organisme qu’ils désiraient voir créé31. Le 17 octobre 1966, le Comité Roy remet au pape son rapport, dans lequel, en plus de proposer une structure et une méthode de travail appropriées au nouvel organisme, il suggère de mettre sur pied deux organismes distincts ayant entre eux « quelques liens organiques ». Cette solution à la Salomon est acceptée, si bien que le motu proprio Catholicam Christi Ecclesiam (6 janvier 1967) établit deux organismes ayant à leur tête le même président32. La désignation de la Commission pontificale « Justice et Paix » effraye toutefois à nouveau les partisans d’une commission sur la justice et le développement, craignant que le lobby pour la paix puisse ainsi mettre en avant cette dimension aux dépens de l’autre33.
Un cardinal résidentiel à la tête de deux dicastères de la Curie romaine pendant neuf ans
- 34 Cette annonce était contenue dans la publication de la composition du nouvel organisme : OR, 09-10 (...)
19Non seulement Paul VI nomme Maurice Roy à la tête des deux organismes qu’il vient de créer – et bientôt d’un troisième – mais il demeure archevêque résidentiel de Québec34.
- 35 Outre les réunions plénières et les assemblées générales tenues à Rome, la Commission organise des (...)
20Cette situation étonnante, mais qui avait un précédent (la présidence du Secrétariat pour les non-croyants confiée en 1965 au cardinal König, évoquée plus haut), entraîne un nouveau rapport entre la Curie romaine et les Églises locales. Elle suscite également un modus operandi différent des autres dicastères de la Curie et modifie la composition de ce dicastère, sans compter qu’il répartit autrement le leadership. Le fonctionnement du dicastère devient plus décentralisé et les activités prennent une forme nouvelle (congrès, colloques, etc.), se déroulant la plupart du temps loin de Rome35.
- 36 DC, 1967, T. 64, N° 1487, col. 197-198.
21Ces organismes intègrent un grand nombre de laïcs (hommes et femmes) et réalisent véritablement une collaboration entre évêques, prêtres et laïcs. La composition même de la commission Justice et Paix est particulière puisqu’une large place est faite à des experts qui ne sont pas, par leur culture et leur statut, familiers des appareils romains et de la culture cléricale. Ainsi, on trouve parmi les membres de la Commission, à sa création, trois ecclésiastiques et dix laïcs, dont deux femmes36. De plus, les lieux à partir desquels les choses se pensent sont aussi bien Londres, Québec et Chicago que Rome.
22Les activités de la Commission se démarquent par rapport à celles des autres dicastères de la Curie. Pour ne pas empiéter sur les activités de la Caritas internationalis, la Commission oriente ses travaux vers l’étude et l’éducation en vue de l’action. Cela conduit à l’organisation de grands événements : colloques et congrès. Dès le départ, son action est conduite en relation étroite avec des partenaires. D’une part, la Commission veut s’appuyer sur les conférences épiscopales, jouant ainsi à fond la carte de la collégialité et de la subsidiarité comme on l’avait proposé au moment du concile. D’autre part, elle souhaite une collaboration soutenue avec le Conseil œcuménique des Églises. Enfin, elle favorise de nombreuses collaborations. Ces orientations sont publiées au terme de la première assemblée plénière de la Commission Justice et Paix, en avril 1967 :
- 37 Cf. déclaration à la suite de la première réunion plénière de la Commission, dans DC, 1967, T. 64, (...)
Moyens d’action
1. Avec les catholiques.
La Commission travaillera à travers les organisations et les programmes qui existent, mais quand il le faudra, elle stimulera et au besoin aidera à créer de nouvelles initiatives qui correspondent à des situations nouvelles. La Commission suggère donc :
a) Que chaque Conférence épiscopale, régionale ou nationale […] étudie la création d’une structure faite de clercs et de laïcs, s’appelant éventuellement « Justice et Paix », qui coopérerait étroitement avec la Commission ;
b) Qu’une étroite collaboration soit établie avec le Secrétariat pour l’Unité des chrétiens, et avec les Secrétariats pour les non-croyants et pour les religions non chrétiennes ;
c) Qu’on cherche à établir des liens étroits et des modalités de travail communes avec le Conseil des laïcs ;
d) Que tous les Instituts religieux, particulièrement les Instituts missionnaires, soient activement associés au travail de la Commission ;
e) Que la Commission s’assure l’aide des Instituts de recherche, des Universités et d’autres Centres d’enseignement ;
f) Qu’un accent tout spécial soit mis sur le rôle des jeunes : et que la Commission s’attache spécialement à stimuler et à inspirer toutes les organisations de jeunesse qui existent au sein de l’Église.
2. Avec nos frères chrétiens.
La Commission s’efforcera de développer le plus possible les étroites relations déjà amorcées entre son Secrétariat et les organes du Conseil œcuménique des Églises, et de promouvoir une action œcuménique avec tous les organismes chrétiens.
3. Avec les religions non chrétiennes.
La Commission s’efforcera d’établir une collaboration très étroite avec les religions non chrétiennes.
4. Avec les organisations séculières.
Sur ce point, la politique de la Commission sera celle de « porte ouverte » à tous les groupes et organismes, gouvernementaux et non gouvernementaux, travaillant dans le domaine du développement : elle accueillera volontiers et diffusera le matériel intéressant qu’elle reçoit, et mettra à la disposition des autres organisations ce que l’Église a à offrir dans ce domaine. Elle s’attachera particulièrement à établir des rapports étroits avec les agences internationales. En tout ceci, elle passera par les voies ordinaires, c’est-à-dire la Secrétairerie d’État, les observateurs du Saint-Siège auprès des Nations Unies et de ses organisations affiliées37.
- 38 J. Gremillion, entrevue avec P. Pelzel.
- 39 Dans son rapport présenté aux présidents des conférences épiscopales à l’occasion de l’Assemblée e (...)
- 40 Il s’agit d’un organisme conjoint, créé par l’Église catholique et le Conseil œcuménique des Églis (...)
- 41 En plus des nombreuses sources imprimées, on trouve un dossier sur la conférence de Beyrouth dans (...)
- 42 Voir, par exemple, la lettre de U Thant du 25 octobre 1967, à la Commission Justice et Paix (DC, 1 (...)
23Ce modus operandi diffère de celui des autres dicastères. On a affaire à une activité multipolaire plutôt qu’à une action centralisée, une action qui se développe dans les périphéries, plutôt que de se limiter au centre romain. J. Gremillion, premier secrétaire de Justice et Paix, décrit son activité au cours de la première année : « Lobbying of various religious orders and national and regional bishops’ conferences to establish a Catholic connection of Justpax-like organizations began even before Justpax was inaugurated and continued full-force for the early years of the organization38 ». La création de nombreuses commissions nationales Justice et Paix, le plus souvent par les conférences épiscopales39 et la mise sur pied de SODEPAX (Comité sur la Société, le développement et la paix40) dès la fin de 1967 sont l’expression de ce travail réalisé en collaboration avec les autres. SODEPAX, qui témoigne d’un esprit œcuménique, organise la conférence œcuménique de Beyrouth sur le développement en mars 1968, au cours de laquelle des spécialistes du développement économique rencontrent des responsables des Églises catholiques, protestantes et orthodoxes41. On trouve donc mises en œuvre les grandes articulations du concile et de l’encyclique Ecclesiam Suam : le dialogue dans l’Église, avec les chrétiens non-catholiques et avec le monde. Plusieurs échanges ont également lieu entre la Commission et le Secrétaire général des Nations Unies42.
24Pour désigner ce travail en réseau et multicentrique, P. Pelzel parle d’une
- 43 Voir la correspondance entre Gremillion, Ward, et Norris, Archives Gremillion, UNDA.
chain of auxiliary justice and peace commissions […] established throughout the various levels of the Catholic Church. These Catholic auxiliary organizations were key parts of Gremillion’s vision of a « Christian circulatory system » for justice and peace education, research, and action throughout the world43.
- 44 Documents in Archives Gremillion, UNDA.
- 45 L’expression est de J. Gremillion, dans sa correspondance avec J. Norris et B. Ward (cf. dossiers (...)
25Comme elle l’observe encore, « The early days of Justpax combined a flurry of activity to get both the Catholic and ecumenical circulatory systems inaugurated44. » Suivant le rapport d’activités donné lors de la deuxième assemblée générale, en octobre 1967, « in less than half a year, Justpax staff had visited over thirty countries and been part of four Holy See delegations to UN agencies while working on establishing many national and regional Justpax organizations. » L’expression qui décrit ce nouveau modus operandi et que l’on trouve dans les documents de la Commission est « circulatory system »45, que l’on appellerait aujourd’hui un fonctionnement en réseau, la Commission n’ayant pas à tout faire elle-même, mais à mettre en mouvement des idées et à mobiliser des forces déjà existantes.
- 46 Voir Le travail de la Commission Pontificale « Justice et Paix ». Communication aux présidents des (...)
26Ainsi, en 1969, en présence des présidents des conférences épiscopales réunies à Rome pour une assemblée extraordinaire du Synode des évêques, le cardinal Roy dresse un bilan de ces collaborations multilatérales, avec SODEPAX, les commissions nationales, faisant état spécialement des rencontres régionales organisées à Niamey, du 6 au 9 décembre 1969, en Amérique latine, à Tokyo, en Allemagne et à Genève46. La Commission met aussi sur pied des tables-rondes dans différentes régions du monde où se retrouvent les acteurs les plus importants afin d’harmoniser l’aide (financière, matérielle et en personnel) au développement.
- 47 Ibid.
27Enfin, les documents produits par la commission Justice et Paix sont d’un type particulier. Il s’agit d’études, de réflexions, de propositions, de débats entre experts et pasteurs, etc. Dans le rapport de 1969, le cardinal Roy fait état de cinq études en chantier : sur la seconde décennie du développement des Nations Unies ; sur la croissance démographique et le développement ; sur la pauvreté dans le monde et l’usage des biens dans l’Église ; sur la qualité de vie dans une société technologiquement avancée et la dernière sur l’objection de conscience au service militaire47.
28L’étude de la Commission Justice et Paix, au cours de ses premières années d’activité, doit donc être située dans le projet de renouveau de la Curie souhaité par Paul VI, qui ne donna toutefois pas dans tous les domaines un résultat semblable.
- 48 http://w2.vatican.va/content/paul-vi/fr/apost_letters/documents/hf_p-vi_apl_19710514_octogesima-ad (...)
- 49 Barbara Ward, aussi connue sous le nom de Lady Jackson, a été rédactrice du prestigieux hebdomadai (...)
29Malgré l’éloignement de Rome, les liens entre Paul VI et Maurice Roy devinrent très étroits. Chaque fois qu’il était de passage à Rome, Maurice Roy était accueilli par le pape et pas simplement de manière protocolaire. Paul VI devait du reste lui adresser une lettre apostolique, Octogesima adveniens, à l’occasion du 80e anniversaire de l’encyclique Rerum novarum48. Il participa à toutes les assemblées du Synode des évêques et, à titre de président de Justice et Paix, il fit une contribution spéciale à l’Assemblée synodale de 1971 dont l’un des thèmes principaux était la justice et la paix. À ma connaissance, c’est la seule fois, dans l’histoire de l’Église postconciliaire, que le document final de cette partie de la rencontre synodale fut rédigé par une femme, Barbara Ward49.
Notes
1 Pour le débat sur le De episcopis à la deuxième période (novembre 1963), voir l’excellente étude de J. Famerée, Évêques et diocèses (5-15 novembre 1963), dans G. Alberigo (dir.), Histoire du concile Vatican II 1959-1965, III, Le Concile adulte, Paris, p. 133-170.
2 Voir AAS, 55, 1963, col. 793-800, version française dans DC, 60, N° 1409, 1963, col. 1262.
3 DC, 60, N° 1409, 1963, col. 1263.
4 Ibid.
5 Au cours de la phase préparatoire, la commission sur les évêques et le gouvernement des diocèses produit sept schemata destinés à une éventuelle réforme du Codex iuris canonici. Le troisième concerne les relations des évêques avec la Curie romaine. La Commission ne propose que d’étendre les droits, facultés et privilèges des évêques en modifiant quelques canons du CIC. La question De rationibus inter Episcopos et SS. Curiae Romanae n’est traitée que d’un point de vue pratique et juridique. L’ouverture très limitée des propositions fait l’objet d’une sévère critique de la part de la Commission centrale préparatoire, de même que la faiblesse théorique du schéma qui repose sur le principe du pape comme cause prochaine à l’origine de la juridiction épiscopale, ce qui conduit à fonder le pouvoir du Saint-Siège à restreindre ou à élargir les compétences des évêques. Après l’examen de la Commission centrale, le texte est renvoyé à la commission de episcopis ac de diœcesium regimine pour y être révisé avant d’être soumis à l’examen de la sous-commission centrale des matières mixtes. Ces dispositions sur la Curie sont intégrées dans un schéma qui n’a jamais été distribué aux Pères. Il comptait cinquante-deux numéros répartis en six chapitres. Le chapitre I, consacré aux rapports entre les évêques et les congrégations de la Curie romaine, se divisait en deux parties : 1. Les facultés des évêques ; 2. La pratique des sacrées congrégations vis-à-vis des évêques.
6 Au cours du débat sur la Constitution sur la liturgie, par exemple, l’épiscopat africain avait réclamé le droit, non seulement de faire des suggestions, mais de prendre des décisions en matière d’usage de la langue vernaculaire. L’élargissement des compétences des conférences épiscopales en matière d’adaptation de la liturgie aux sensibilités et aux cultures locales, de manière à la rendre plus conforme aux traditions et aux coutumes des divers peuples, est revendiqué par Mgr D’Souza (Nagpur, Inde – AS I/2, p. 318-319) et vivement encouragé par les cardinaux Rugambwa (Tanzanie) et Tatsuo Doi (Tokyo) (cf. AS I/1, p. 333-334 et p. 323).
7 La décentralisation du pouvoir consiste à remettre à des organismes locaux (évêques résidentiels) ou régionaux (conférences épiscopales) des pouvoirs jusque-là exercés par les organes centraux du pouvoir. En revanche, la déconcentration consiste à répartir sur le territoire les organes d’exercice du pouvoir.
8 Par exemple, la Constitution apostolique Regimini Ecclesiae universae (15 août 1967), pourtant fort élaborée, n’en souffle pas mot. AAS, 14, 1967, p. 881-928, DC, 1967, T. 64, N° 1500, col. 1441-1478.
9 Plusieurs documents relatifs à Justice et Paix sont conservés aux Archives de l’Archevêché de Québec (AAQ 31-21 A, tomes 18-30) et les papiers de son secrétaire général ont été versés aux UNDA (University of Notre-Dame Archives, 41 pieds linéaire – Notre-Dame, IN 46556). On en trouve également dans le Fonds Tucci à la Civiltà Cattolica et en dépôt à la FSCIRE, Bologne.
10 Cf. la Relatio sur les travaux de la Commissio de Doctrina Fidei et Morum de S. Tromp, secrétaire de la Commission doctrinale, dans les archives Philips (Leuven).
11 Ainsi, il souscrit aux interventions de ses confrères canadiens De Roo (7 octobre 1964, 96e congrégation générale) et Coderre (28 octobre, 111e congrégation générale) à la troisième session et, de nouveau, à une intervention de R. de Roo (25 octobre 1965, 152e congrégation générale).
12 Voir G. Routhier, Famille, mariage et procréation : le combat de deux cardinaux canadiens, dans Cristianesimo nella storia, 23, 2002, p. 367-428.
13 Sur les rapports entre Léger et Montini, voir G. Routhier, Léger et Suenens : les relations difficiles de deux princes de l’Église, dans D. Donnelly, J. Famerée, M. Lamberigts et K. Schelkens (dir.), The Belgian Contribution to the Second Vatican Council, Leuven, 2008 (BETL, 216), p. 325-360.
14 Cf. G. Routhier, De nouvelles initiatives pour la justice et la paix, dans G. Routhier (dir.), Paul VI et Maurice Roy : un itinéraire pour la justice et la paix, Rome-Brescia, 2005, p. 11-38.
15 Le troisième alinéa du paragraphe 90 se lit ainsi : « Considérant l’immense misère qui accable, aujourd’hui encore, la majeure partie du genre humain, pour favoriser partout la justice et en même temps pour allumer en tout lieu l’amour du Christ à l’endroit des pauvres, le Concile, pour sa part, estime très souhaitable la création d’un organisme de l’Église universelle, chargé d’inciter la communauté catholique à promouvoir l’essor des régions pauvres et la justice sociale entre les nations. » Les textes conciliaires sont cités à partir de l’édition française Vatican II. Les seize documents conciliaires, Montréal, 1966.
16 Du 26 au 28 janvier 1966, trente représentants de l’Église catholique et du Conseil œcuménique des Églises se rencontrent, sous la présidence conjointe de Mgr Jean Rodhain (de la Caritas) et de l’archevêque anglican Campbell MacInness, pour étudier la possibilité de collaborer plus étroitement dans le domaine des secours d’urgence et du soutien aux programmes de développement. Une collaboration est évoquée dans les domaines de l’échange d’information, de la recherche théologique, de l’élaboration de plans communs, de l’action auprès des organismes gouvernementaux et intergouvernementaux… Le 10 février, l’Église catholique et le COE s’entendent pour coordonner leurs efforts en vue de porter secours aux populations de l’Inde et de l’Afrique. Cf. Coordination des secours du C.O.E. et de l’Église catholique aux victimes de la faim en Inde et en Afrique, dans DC, 1966, T. 63, N° 1467, col. 512-513.
17 Dans le communiqué de la NCWC News Service du 26 février (« Lay Apostolate Commission Ends Rome Discussions »), à l’issue des travaux de la Commission, on lit : « The central commission has also entrusted to the lay apostolate commission the implementation of at least one provision of the Pastoral Constitution on the Church in the Modern World. […] The lay apostolate commission’s task is to set on a secretariat for international justice. » Le document final de la Commission, remis le 3 mai au Secrétariat général de la Commission de coordination, prévoyait, comme une fin du Conseil des laïcs, de « susciter des efforts pour promouvoir la Justice sociale entre les nations, le développement des régions pauvres, et la paix » (J. Gremillion, 7 mai 1966, dans Fonds Tucci, dossier 23, doc. 28).
18 Lettre de Dell’Acqua à Rodhain du 21 février 1966 (Fonds Tucci, dossier 23) Ce n’est pas avant le début d’avril que la rencontre du Groupe de travail fut convoquée.
19 Les autres membres du Comité étaient Rosemary Goldie, secrétaire permanente du Comité international des congrès sur l’apostolat des laïcs depuis 1952, Johannes Schauff, auditeur laïc au concile, Vittorino Veronese, ancien directeur général de l’UNESCO et secrétaire général de COPECIAL et Mgr Silvio Luoni de la Secrétairerie d’État (Fonds Tucci, dossier 23).
20 L’article 26 de Apostolicam actuositatem comporte la disposition suivante : « Il faudrait de plus que soit constitué auprès du Saint-Siège un secrétariat spécial pour le service et la promotion de l’apostolat des laïcs ».
21 Ce groupe est actif depuis la deuxième session du concile. Son noyau est composé de Barbara Ward (Lady Jackson), James Norris, Joseph Gremillion et Mgr E. Swanstrom.
22 Le Groupe de travail se demande ainsi, lors de ses travaux du mois de mai, qui pourrait être le « cardinal Bea » de cet organisme (archives Tucci, dossier 23, doc. 7 « Procès-verbal », p. 7).
23 AS, III/6, p. 36.
24 Cf. G. Besutti, Lo schema mariano al concilio Vaticano II, Rome, 1966, R. Laurentin, La Vierge au concile, Paris, 1965, G. Philips, La Vierge au IIe Concile du Vatican et l’avenir de la mariologie, dans H. du Manoir (dir.) Maria, Études sur la Sainte Vierge, t. VIII, Paris, 1971, p. 41-88 ; E. M. Toniolo, La Beata Vergine nel Concilio Vaticano II : cronistoria del Capitolo VIII della Costituzione Dogmatica « Lumen Gentium » e sinossi di tutte le redazioni, Rome, 2004 ; Id., Il Capitolo VIII della « Lumen gentium » : cronistoria e sinossi, dans Marianum, 1-2, 2004, p. 9-425.
25 Cf. G. Routhier, Famille, mariage et procréation… cit., p. 412-413.
26 Cf. le témoignage de R. Plamondon dans G. Routhier (dir.), L’Église canadienne et Vatican II, Montréal, 1997, p. 219. Roy est l’un des rares évêques à avoir demandé que l’on nomme un laïc (Charles de Koninck) peritus au concile.
27 La grève de l’amiante (1949) est un conflit opposant les mineurs d’amiante du Québec aux compagnies multinationales soutenues par le Gouvernement Duplessis. Cet événement, considéré comme un tournant de l’histoire du Québec et un prodrome de la Révolution tranquille, marque aussi un changement de la position de l’épiscopat en matière d’enseignement social.
28 R. Burigana, Progetto dogmatico del Vaticano II : la commissione teologica preparatoria (1960-1962), dans G. Alberigo et A. Melloni (dir.), Verso il Concilio Vaticano II (1960-1962) : passaggi e problemi della preparazione conciliare, Gênes, 1993, p. 153. Voir aussi l’intervention de Roy au cours de la discussion générale sur le schéma XIII en 1964 où il avait évoqué la faim, la paix et la justice comme signes des temps à intégrer au texte (AS, p. 322-323).
29 Il reçoit à Québec J. Gremillion et Mgr Swanstrom des Catholic Relief Services (lettre de Gremillion à Tucci, dossier 23, doc. 6) et prend également contact avec Eugene Carson Blake, secrétaire général du Conseil œcuménique des Églises qui avait lui-même été en contact avec Ward et Gremillion lors de la Conférence mondiale sur Église et société en juin 1966. Voir P. Pelzel, « Vatican II Lobbying – JUSTPAX Established », pro manuscripto, chapitre II d’une thèse de doctorat inachevée à la Catholic University of America sur la Commission Justice et paix, sur la base des archives de Joseph Gremillion conservées à University of Notre-Dame Archives, p. 42. Je remercie P. Pelzel de m’avoir partagé le matériel qu’elle avait recueilli.
30 Cinq membres du Groupe de travail ont été invités dont Norris, Ward et Rodhain, le chanoine Houtart, Mgr McGrath, etc. Ibid., p. 42-43.
31 Cf. la lettre de Norris à Swanstrom (21 novembre 1966) et de Lady Jackson à Gremillion (21 novembre 1966). Le cardinal Heenan les avait rassurés quant au choix de Roy (lettre de Ward à Gremillion, 11 août 1966, UNDA, Archives Gremillion).
32 Texte italien dans OR, 11.01.1967, traduction française dans DC, 1967, T. 64, N° 1487, col. 193-196.
33 On verra le plaidoyer (trois documents) en faveur d’un organisme voué spécifiquement à la justice et au développement rédigé par A. McCormack, « Organisation for World Justice and Development », Fonds Tucci, dossier 23, doc. 8.
34 Cette annonce était contenue dans la publication de la composition du nouvel organisme : OR, 09-10.01.1967.
35 Outre les réunions plénières et les assemblées générales tenues à Rome, la Commission organise des réunions régionales, à Boston, en janvier 1967, à Porto Rico, en avril 1967, à New York, en novembre 1967, à Bruxelles, en décembre 1967 et à Beyrouth en avril 1968.
36 DC, 1967, T. 64, N° 1487, col. 197-198.
37 Cf. déclaration à la suite de la première réunion plénière de la Commission, dans DC, 1967, T. 64, N° 1495, col. 1011-1016.
38 J. Gremillion, entrevue avec P. Pelzel.
39 Dans son rapport présenté aux présidents des conférences épiscopales à l’occasion de l’Assemblée extraordinaire du Synode des évêques (Rome, 1969), le cardinal Roy fait état de la création d’une quarantaine de commissions nationales. DC, 1969, T. 66, N° 1553, col. 1110-1112.
40 Il s’agit d’un organisme conjoint, créé par l’Église catholique et le Conseil œcuménique des Églises.
41 En plus des nombreuses sources imprimées, on trouve un dossier sur la conférence de Beyrouth dans les archives Roy (AAQ 31-21 A, T. 23-5).
42 Voir, par exemple, la lettre de U Thant du 25 octobre 1967, à la Commission Justice et Paix (DC, 1967, T. 64, N° 1506, col. 2109-2110).
43 Voir la correspondance entre Gremillion, Ward, et Norris, Archives Gremillion, UNDA.
44 Documents in Archives Gremillion, UNDA.
45 L’expression est de J. Gremillion, dans sa correspondance avec J. Norris et B. Ward (cf. dossiers Ward et Norris du Fonds Gremillion, UNDA).
46 Voir Le travail de la Commission Pontificale « Justice et Paix ». Communication aux présidents des Conférences épiscopales présents à Rome pour le Synode extraordinaire des évêques, dans DC, 1969, T. 66, N° 1553, col. 1110-1112.
47 Ibid.
48 http://w2.vatican.va/content/paul-vi/fr/apost_letters/documents/hf_p-vi_apl_19710514_octogesima-adveniens.html.
49 Barbara Ward, aussi connue sous le nom de Lady Jackson, a été rédactrice du prestigieux hebdomadaire londonien The Economist. Conférencière recherchée, elle publie de nombreux articles et ouvrages et influence plusieurs leaders politiques aux États-Unis, en Afrique, en Inde et en Grande-Bretagne. Elle milite pour le partage des richesses entre les pays et, dès le début du concile, elle s’engage en ce sens. Elle est la première femme à s’exprimer lors d’une Assemble du Synode des évêques (1971).
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