Les Boutiques d’Ostie du Ier s. av. J.-C. au Ve ap. J.-C
|Deuxième partie. Dans les rouages de l’économie d’Ostie
Chapitre 10. Les gens des boutiques
Texte intégral
1Les spécificités de l’économie d’Ostie induisaient des configurations sociales particulières dans lesquelles s’inscrivaient les gens des boutiques selon différentes modalités – statut social, phénomène associatif et autoreprésentation – qui peuvent être approchées par le biais des sources écrites, épigraphiques, iconographiques et archéologiques.
- 1 Andreau 1987, p. 25-33.
2Nous aurons recours au concept de « statut de travail », développé par J. Andreau et défini comme : « le rapport au travail au sens le plus large du mot, à la fois au plan des institutions et à celui des représentations. C’est l’organisation matérielle de la vie de travail ; le mode de rémunération et l’influence qu’il exerce sur la mentalité de l’agent, la manière dont est conçu le travail par rapport à l’ensemble de la vie : soit comme activité principale qui conditionne la survie, soit comme activité parmi d’autres, et qui ne cesse pas d’être facultative1 ».
10.1 Y avait-il un « monde des boutiques » ?
- 2 Andreau 2001, p. 19.
- 3 Morel 1983, p. 37 ; Morel 2002, p. 284.
- 4 Andreau 2001, p. 101-106.
- 5 Giardina 1981, p. 124 : « Se infatti il mondo dei grandi negotiatores ci introduce direttamente ai (...)
- 6 Ce travail fut réalisé par Monteix 2010 à Herculanum et par Flohr 2011 à propos des fouleries.
3Au sein des hiérarchies des agents économiques élaborées par les historiens, les gens des boutiques occupent souvent le niveau inférieur. Les agents économiques non agricoles se diviseraient, selon J. Andreau et J.-P. Morel en trois grandes catégories socio-économiques : « d’un côté, l’aristocratie, l’élite sociale et politique, dont les membres, en général, possèdent d’abord un patrimoine foncier ; de l’autre, les hommes des métiers urbains, les artisans, commerçants et banquiers »2. Entre ces deux groupes, J.-P. Morel place une « bourgeoisie industrielle », définie comme une catégorie sociale devant son ascension à son travail dans le domaine artisanal, comme M. Vergilius Eurysaces3. Selon J. Andreau, on y trouve les affairistes, comme Trimalcion tirant leur fortune du grand commerce, mais qui demeure insuffisante pour intégrer les ordres équestres ou sénatoriaux4. Les gens des boutiques occupent le niveau le plus bas de cette hiérarchie. Pour A. Giardina, le « monde des tabernarii » et celui des negotiatores sont distincts5. La question du statut social des agents économiques n’a que rarement fait l’objet d’une étude ayant pour but de mettre en rapport les acteurs avec leur lieu de travail6. La pratique professionnelle – de métiers variés – dans un type d’espace donné – ici la boutique – correspond-elle à une réalité sociale homogène ?
10.1.1 Une homogénéité socio-économique
- 7 Purcell 1994, p. 663-687 ; voir aussi Morel 1997, p. 158 et Tran 2006, p. 391.
4De manière générale, les gens des boutiques sont traditionnellement présentés comme une population homogène sur le plan socioéconomique. Selon certains historiens, il y avait un véritable « monde des boutiques ». Ce dernier, selon N. Purcell s’est développé à Rome suite à la seconde guerre punique et a fini par coïncider avec une grande partie de la population urbaine durant la période tardo-républicaine7. Quelle homogénéité sociologique les sources écrites traduisent-elles ? Les gens des boutiques formaient-ils un corps social uniforme ?
- 8 Voir supra (Ch. IX).
- 9 De Robertis 1963, p. 21-24.
- 10 Nicolet 1988, p. 178 ; Traina 2000, p. 115 et P. Veyne 1999, p. 119-120.
- 11 Cic. Att. XIV, 9. 1.
- 12 Tran 2011, p. 132-133.
5Cette homogénéité semble ressortir pour une grande part des sources émanant des élites de la société romaine, véhiculant une vision plutôt dépréciative du monde des boutiques. Le topos du petit commerce et de l’artisanat comme activité méprisable est répandu dans les sources littéraires8. F.M. De Robertis oppose cette vision – qualifiée d’« aulique » – dépréciative et véhiculée par les élites à une vision – « volgare » – plus positive, propre aux strates inférieures9. Ceci résulterait selon Cl. Nicolet et G. Traina d’un héritage de la philosophie stoïcienne, tandis que P. Veyne y voit un mépris de classe10. Toutefois, Cicéron lui-même possédait des boutiques dont il tirait un revenu11. Selon N. Tran, les accusations des élites envers ces agents économiques portent plus sur les « transgressions individuelles des codes propres à chaque groupe social » que sur l’activité qui était pratiquée12.
- 13 Cic. Des devoirs, 1, 150.
- 14 Giardina 2002, p. 327. Voir Tchernia 2011, p. 34-37.
- 15 Giardina 2002, p. 329.
6Dans un passage de Des devoirs, Cicéron oppose le grand commerce au petit commerce et à l’artisanat sur le plan moral13. Selon A. Giardina, cette opposition se fonde sur trois éléments. D’une part, le grand commerce trouve une justification sociale importante dans les grandes quantités de marchandises importées, permettant l’approvisionnement de la population. D’autre part, le grand et le petit commerce se distinguent par leur rapport au temps. Les longs voyages qu’impose le grand commerce justifient le profit, tandis que le petit commerçant achète pour revendre aussitôt14. Enfin, d’autres textes indiquent que le petit commerçant était également méprisé en raison de son statut d’intermédiaire entre le producteur et le consommateur15.
- 16 Cic., Cat., 4, 8.
- 17 Legum Novellarum Divi Valentiniani V.
7Cependant, deux textes prêtent aux boutiquiers une véritable utilité sociale. En dépit de son aversion pour cette population, Cicéron affirme que l’activité des boutiquiers et artisans est nécessaire au maintien d’une large population16. Cette remarque se retrouve dans l’édit du 3 mars 440 de Valentinien III qui stipule que les commerçants au détail, lorsqu’ils ne demandent pas des prix irréguliers pour leurs marchandises permettent le maintien, voire la croissance de la population de la capitale17.
- 18 Voir l’analyse de Flambard 1977, p. 123-125 ; Cels Saint-Hilaire 2005, et Tran 2006, p. 18.
- 19 Cic. Cat. 4, 8.
- 20 Hor. Odes, 1, 4, 13-14 : « pallida Mors aequo pulsat pede pauperum tabernas / regum que turris ».
- 21 Whittaker 2002 ; Veyne 2000, p. 1170.
- 22 Freu 2007, p. 325 et 510.
8Cicéron décrit les bandes de Clodius formées d’artisans et de boutiquiers comme une foule d’indigents (egentes)18. Il indique qu’un agent de Lentulus parcourt en vain les boutiques dans l’espoir d’y recruter des indigents qui sont trop attachés à leur boutique et à leurs habitudes pour être tentés19. Il est évident qu’il s’agit d’un moyen pour Cicéron de tourner en dérision le gros de la clientèle politique de Clodius. Un vers d’Horace oppose la tour des seigneurs à la boutique des pauperes20. Les pauperes correspondent, selon les sources écrites, à l’ensemble de la population qui n’était pas positivement riche21. Il s’agit donc d’une pauvreté relative, tandis que l’egestas désigne un état de pauvreté absolue, apparentée à une position en marge de la société22. Les indications fournies par ces documents font partie intégrante d’un discours politique ou d’une figure de style. Il est difficile d’en déduire la réelle pauvreté des gens des boutiques. Ces passages vont toutefois dans le sens d’une unité socio-économique des boutiquiers.
- 23 Andreau 2004a, p. 120-121 et Veyne 1991, p. 756.
- 24 Voir ch. II.
9Selon J. Andreau, la multiplicité des noms de métiers de l’artisanat ou du petit commerce traduit une importante division des métiers. Pour Paul Veyne, il s’agit d’appellations publicitaires23. Cette grande diversité traduit probablement avant tout des pratiques professionnelles, ainsi que des réalités socio-économiques variées. Les sources écrites indiquent l’extrême variété des métiers pouvant s’exercer en taberna. On y trouve des artisans, des commerçants, des prestataires de services. Il est difficile de déceler une forte unité dans des métiers aussi variés que ceux de foulon, tenancier de commerce alimentaire, cordonnier, barbier, libraire, ou encore médecin24. La spécialisation des boutiquiers rend difficile le développement de sociabilités primaires fondées sur la pratique d’un même métier. En revanche, les sources littéraires, juridiques et épigraphiques nous livrent l’image d’une relative unité.
- 25 CIL, V, 7907.
- 26 CIL, VI, 9920.
- 27 Ruggini 1995, p. 121, n. 319.
10Cette cohésion sociale, même si elle n’est que rarement attestée, apparaît sous deux formes principales. D’une part, les gens des boutiques sont parfois présentés comme formant un corps social à part entière à l’échelle de la cité, sous le Haut-Empire et durant l’Antiquité tardive. Une inscription datant de l’époque de Commode retrouvée à Castellane en Narbonnaise indique que les tabernarii de la ville de Salinae ont dédié un monument en l’honneur de leur patron25. L’édit du préteur de la ville Postumius Lampadius daté de 403-407 inclut la liste des membres d’un corpus tabernariorum26. Selon L. Ruggini, tabernarius ne désignerait pas ici le tavernier, conformément au glissement sémantique opéré au IVe siècle, mais bien le boutiquier27.
- 28 Cicéron, de domo, 89-10.
- 29 Cic. Dom. 13.
- 30 Voir Giardina 1981 : Legum Novellarum Divi Valentiniani V.
- 31 Dubouloz 2011, p. 178-197.
11D’autre part, les sources littéraires et épigraphiques rendent compte d’épisodes durant lesquels les boutiquiers font cause commune, formant ainsi un groupe politique ou d’intérêts communs. À la fin de la période républicaine, Cicéron décrit les boutiquiers comme composante majeure des bandes de Clodius. Ce dernier, dit-il, ne pouvait trouver ses partisans qu’une fois les boutiques closes28. Il décrit également L. Sergius comme un concitator tabernariorum29. Les boutiquiers forment ici un groupe social homogène, soutenant un même homme politique. À Rome en 440, un conflit oppose les tabernarii, aux commerçants grecs, les pantapolae30. Un édit rend à ces derniers le droit de rentrer dans la ville de Rome dont ils furent chassés par les boutiquiers. Il apparaît donc que les boutiquiers peuvent former un groupe homogène éventuellement organisé en association dont l’unité se fonde par-delà les différentes activités exercées. Leur point commun est la boutique, caractérisée par un ancrage topographique fort et une fonction de distribution. Il demeure toutefois que cette homogénéité repose sur l’interprétation du mot taberna. Si, comme l’entend J. Dubouloz pour les sources juridiques, ce terme ne désigne pas un lieu mais un mode de gestion, cette homogénéité doit être reconsidérée31. Dans cette optique, l’unité de ces professionnels reposerait donc sur le type de leur contrat, fondement d’un statut de travail commun.
10.1.2 La prédominance de la préposition
- 32 Treggiari 1980, p. 52-53.
12Les sources juridiques livrent un certain nombre d’informations relatives au statut des gens des boutiques. Selon S.M. Treggiari, quatre cas de figures peuvent être envisagés. Le boutiquier peut exercer son métier en étant son propre patron. Il peut travailler, en tant qu’institor pour un propriétaire exerçant la même activité ou ne travaillant pas en boutique. Enfin, il peut y travailler en tant qu’assistant32.
- 33 Paul 14. 3. 18 ; Ulp. 14. 3 ; Gaius, Institutes, 4, 71.
- 34 Dubouloz 2011, p. 119-120 et p. 122.
- 35 Ligios 2001, p. 35-37 ; Andreau 2004a, p. 122. Voir également Wallace-Hadrill 1994, p. 133 et Tche (...)
- 36 Aubert 1994, p. 5-6, voir aussi Dubouloz 2011, p. 180.
- 37 Andreau 2004a, p. 120-123.
- 38 Andreau et Descat 2006, p. 138.
13Les sources juridiques traduisent une étroite association entre le statut d’institor et la taberna. Les juristes Paul, Ulpien et Gaius incluent la taberna dans la définition qu’il propose de l’institor33. Pour J. Dubouloz, taberna a fini par désigner, par métonymie, « l’activité commerciale auquel un dépendant a été préposé34 ». J. Andreau et M.A. Ligios y voient le signe d’une situation assez répandue35. J.-J. Aubert attribue la création de l’actio institoria à la fin du IIe siècle av., tandis qu’elle est encore attestée au IVe siècle36. Dans ce cas de figure, le maître conserve la responsabilité, la propriété du commerce et en perçoit les revenus car les biens vendus ont le statut de merx dominica. Selon J. Andreau, les préposés travaillant sans rémunération devaient être motivés par la promesse d’un affranchissement ou d’autres sortes de compensations37. La préposition pose la question du degré de contrôle que le patron pouvait exercer sur l’esclave, car il pouvait travailler seul, avec d’autres préposés ou sous la supervision directe de son maître38.
- 39 Andreau et Descat 2006, p. 131-132.
- 40 Andreau 2004a, p. 115.
- 41 Andreau 2004a, p. 118.
- 42 Andreau 2006, p. 133.
14Le cas du travail servile est également à envisager. Selon J. Andreau, les modalités de travail de l’esclave étaient triples : contrôle direct, préposition ou pécule. Ces trois formes n’étaient pas exclusives, il était possible qu’un esclave combine ces différents types39. Le pécule est, selon J. Andreau, « ce que l’esclave a entre les mains avec la permission de son maître et qui a été mis à part du patrimoine du maître »40. Ce dernier pouvait reprendre le pécule, le réclamer à la libération de l’esclave, ou à la mort de l’affranchi. J. Andreau indique que l’usage ne suivait pas le droit à la lettre : il était rare que le maître reprenne le pécule de l’esclave, car cette quasi-propriété avait une fonction sociale : il lui laissait l’espoir de pouvoir un jour acheter sa liberté41. Cependant, il n’était pas rare que le maître effectue des prélèvements ponctuels sur le pécule42.
- 43 Voir Treggiari 1980, p. 50-52.
- 44 Thomas 2004, p. 209 et Thomas 2002, p. 226.
- 45 Veyne 2000, p. 1171.
15Les sources juridiques suggèrent donc que la majorité des gens des boutiques se trouvaient dans une situation de dépendance face au propriétaire. Cependant, elles ne suffisent pas à généraliser cette configuration dans le temps et dans l’espace. Il s’agit toutefois d’une situation plus stable que celle des salariés. Les mercennarii louent leur force de travail dans le cadre de la locatio operarum43. Ils se trouvent donc dans une situation de subordination face au locator sous la potestas duquel ils étaient placés44. Enfin, certains contrats étaient négociés quotidiennement, rendant difficile pour le salarié toute projection. C’est la raison pour laquelle P. Veyne les voit comme faisant partie de la plebs sordida45.
- 46 Veyne 2000, p. 1184.
16À travers l’ensemble de cette documentation, se dessine le profil des boutiquiers. Il ne s’agit pas d’un corps de métier unifié, tant les activités professionnelles sont variées. Toutefois, une identité semble s’affirmer par-delà les spécialisations. Les gens des boutiques ont en commun une position sociale qui semble plutôt inférieure dans la hiérarchie des métiers, la préposition y prédomine, tandis que la richesse se fait plutôt rare. Selon P. Veyne, une rupture s’opère entre les locataires et les propriétaires de boutique, faisant partie de la plèbe moyenne46. Leurs autres traits communs résultent probablement de leur lieu de métier. Qu’il s’agisse d’artisanat ou de commerce, leur activité est systématiquement accompagnée d’une transaction financière, tandis que les boutiques leur assurent un ancrage topographique fort dans la ville à l’échelle de la rue, du carrefour et du quartier.
10.2 En marge du phénomène associatif
- 47 Chevallier 1986, p. 153-159.
- 48 Tran 2006, p. 37.
- 49 Tran 2006, p. 526.
17Les associations professionnelles occupaient une place importante dans les activités économiques d’Ostie. Sur les 87 mentions épigraphiques de métiers que R. Chevallier a recensés, 56 (soit 64 %) se réfèrent à une association professionnelle47. Les collèges jouent donc un rôle très important dans la représentation des métiers. Selon N. Tran, Ostie, en tant que grand centre commercial se démarque par une grande concentration de collèges professionnels48. Les activités de ceux-ci semblent également plus variées que dans d’autres villes d’Italie où les fabri, centonarii et les dendrophori prédominent49.
- 50 Tran 2007, p. 121.
- 51 Tran 2007, p. 136.
- 52 Tran 2008, p. 295.
- 53 Tran 2006, p. 14.
- 54 Tran 2006, p. 160.
- 55 Un esclave pouvait rejoindre un collège avec l’accord de son maître : Dig. 47, 22, 3, 2.
18Le collège est défini par N. Tran comme « un espace collectif de fréquentation sociale, où des individus pouvaient accumuler un capital personnel de respectabilité »50. Les collèges agissaient donc comme un moyen d’ascension permettant « de s’abstraire des réalités matérielles de l’activité économique51 ». N. Tran indique en effet que « les activités professionnelles et collégiales semblent procéder de deux champs distincts de la vie sociale52 ». Ces associations étaient le cadre de vie communautaire, où la commensalité pouvait jouer un rôle important par le biais de banquets funéraires ou de la célébration de différentes fêtes53. Il était possible pour les membres de constituer des réseaux de relations, mais une hiérarchie était établie au sein de ces collèges. Les titres qui étaient attribués à certains collegiati faisaient référence à la titulature municipale car il y avait des patrons d’association, mais aussi un ordo, avec des quinquennales ou même des décurions54. Les collèges permettaient ainsi l’acquisition d’un certain prestige pour des personnes ne pouvant atteindre le rang de notable municipal55.
10.2.1 Le domaine des métiers du port et de la construction
- 56 CIL, XIV, 4573.
- 57 Vaglieri, BC 1910, p. 79.
- 58 Estimation de Pavolini 2005b, p. 131.
- 59 Colonne de gauche, ligne 20 et colonne de droite, ligne 3. Tran 2006, p. 117 et 288.
19Parmi les mentions épigraphiques de métiers d’Ostie, seules trois activités organisées en association peuvent être rattachées aux boutiques. Un album collégial du corpus fontanorum daté de 232 indique qu’au moins une partie des foulons d’Ostie était organisée en association professionnelle56. L’album est hiérarchisé : les patrons figurent au début de la liste, puis selon D. Vaglieri, viennent les quinquennales, enfin à partir de la ligne 8, la plebs du collège57. Cette liste lacunaire devait comporter au total une cinquantaine de noms58, parmi les 37 restants, N. Tran a dénombré 13 cognomina grecs et 4 cognomina latins fréquents dans le monde servile, il est aussi probable que le cognomen de deux personnages : […]ulius Saturus et G. Iulius Saturus soit originaire d’Afrique59.
- 60 CIL, XIV, 374 ; CIL, XIV, 4234.
20Les boulangers avaient aussi leur association. Une inscription indique que M. Licinius Privatus était questeur et quinquennalis du collège des boulangers d’Ostie et de Portus au tournant du IIe et du IIIe siècle et M. Caerellius Iazemis en a été le quinquennalis à une date inconnue60.
- 61 CIL, XIV, 10 et CIL, XIV, 4549, 2.
21Deux inscriptions attestent l’existence de pelliones rassemblés en collège. L’une d’entre elles mentionne le corpus d’Ostie, tandis que la seconde désigne le corpus pellionum ostiensium et portuensium61.
22Il semblerait donc que le petit commerce et l’artisanat aient pu être impliqués dans le phénomène associatif. Toutefois, le lien entre chacune de ces inscriptions et les activités des boutiques ne peut être établi avec certitude. Ainsi, il n’est pas certain que les foulons dont il est question dans l’album aient travaillé en boutique ou dans de grands ateliers. Il en va de même pour les boulangers : les membres du collège étaient-ils les artisans impliqués dans la fabrique du pain, qui vraisemblablement, se déroulait à Ostie dans les grands ateliers et non en boutique ? Enfin, les pelliones correspondent-ils aux fourreurs travaillant en boutique ou aux marchands de fourrures naviguant sur mer ?
23À Ostie, la majorité des collèges sont rattachés aux activités portuaires ou au grand commerce d’une part, et au secteur de la construction d’autre part. Ainsi est-il possible d’identifier – entre autres – le collège des navicularii, mercatores frumentarii, mensores frumentarii, fabri navales, lenuncularii, codicarii, scapharii, traecti, urinatores, des dendrophorii, et des fabri tignuarii. En revanche, seuls trois collèges sont susceptibles d’être liés aux boutiques, soit seuls 5 % des collèges professionnels connus à Ostie. À supposer qu’elle soit représentative du phénomène associatif d’Ostie, notre documentation suggère donc que le petit commerce et l’artisanat de boutique devaient occuper une place très minoritaire au sein des associations professionnelles de la ville. La rareté des témoignages combinés aux incertitudes de leur interprétation suggèrent que les gens des boutiques étaient plutôt étrangers aux collèges.
- 62 Sur les fabri tignuarii : CIL, XIV, 256 ; Meiggs 1973, p. 317 et Tran 2006, p. 164. Sur les lenunc (...)
- 63 Meiggs 1973, p. 316.
24En outre, les collèges des secteurs du port, du grand commerce et de la construction se distinguent par leur grande importance. Ainsi, le collège des fabri tignuarii compte au début du IIIe siècle 350 individus, tandis que celui des lenuncularii tabularii rassemble 290 membres en 21362. Ces listes contiennent donc chacune presque six fois plus de membres que l’album des fontani. Quatre des patrons du collège des lenuncularii tabularii sont en outre des sénateurs63.
25Les gens des boutiques apparaissent donc comme minoritaires dans le phénomène associatif d’Ostie du fait de la rareté des collèges, mais également du faible nombre de leurs membres. Cette position semble à la fois procéder de causes générales, mais également locales, propres à Ostie.
26La première raison tient probablement à la nature des boutiques. À la fois très nombreuses et petites, ces unités étaient probablement moins propices au développement de solidarités fondées sur la pratique d’un même métier, pouvant réunir des professionnels travaillant dans des boutiques différentes et se trouvant par là même en concurrence.
- 64 Tran 2006, p. 108-109 : « Aucun collegiatus n’occupe dans aucune profession le plus bas niveau hié (...)
- 65 Tran 2007, p. 121.
- 66 Tran 2006, p. 108.
27La deuxième raison est à chercher dans la question de l’identité des membres des collèges professionnels. Selon N. Tran, les membres des associations professionnelles occupaient les strates supérieures d’un métier64. Il était souvent nécessaire de s’acquitter d’une cotisation pour intégrer le collège par cooptation65. En outre, une partie du travail des membres des collèges était vraisemblablement assurée par des esclaves dont la grande rareté sur les listes collégiales d’Ostie indique leur extériorité aux associations66. De ce fait, cette configuration pourrait correspondre davantage aux situations rencontrées dans les commerces et ateliers de grandes dimensions. Le grand nombre des acteurs – favorisant certainement l’émergence d’une hiérarchie professionnelle importante – ainsi que la possibilité de bénéfices conséquents constituent sans nul doute un terreau favorable à l’ascension sociale d’acteurs à l’échelle de la cité par le biais des associations.
28Enfin, la troisième raison tient sans nul doute aux spécificités du paysage économique d’Ostie qui était indiscutablement dominé par les activités portuaires et le grand commerce, ce qui explique leur prédominance au sein du phénomène associatif, ne laissant qu’une place secondaire aux activités artisanales et commerciales à l’échelle de la cité.
10.2.2 Investir dans la banque, le grand commerce et les boutiques
29Les inscriptions témoignent de l’existence d’individus dont l’activité principale se déroulait probablement en boutique, mais qui étaient impliqués dans d’autres associations professionnelles. Au total, deux manieurs d’argent et deux boulangers se trouvent dans cette situation.
- 67 AE 1974, 123a.
- 68 AE 1988 204.
- 69 Tran 2006, p. 223-229.
30Ainsi, un nummularius anonyme se présente également comme un navicularius lyntrarius67. Il était en outre quinquennalis des fabri tignuarii d’Ostie, ainsi que quinquennalis et biselliarius du collège des négociants du forum vinarium. Sur son épitaphe, Aulus Egrilius Hilarus se dit coactor argentarius, ainsi que quinquennalis du collège des fabri tignuarii d’Ostie68. Tous deux étaient seuiri augustales, ce qui leur confère une importance à l’échelle de la cité69.
- 70 CIL, XIV, 4234.
- 71 Tran 2006, p. 106.
- 72 Valjus 1998, p. 259-264.
31M. Caerellius Iazemis est quinquennalis du collège des boulangers, ainsi que codicarius et mercator frumentarius70. Ces activités complémentaires (négoce, batellerie et boulangerie) indiquent probablement qu’Iazemis était plus qu’un simple boulanger qui se cantonnait à la pratique de son métier. Pour N. Tran, Iazemis devait être un commerçant important le grain et le confiant à des dépendants occupés à produire le pain71. Le cognomen de cet individu n’est ni latin ni grec, il devait être, selon R. Valjus, originaire de Cappadoce, région réputée pour la qualité de son pain72.
- 73 CIL, XIV, 374.
- 74 Tran 2006, p. 105.
32M. Licinius Privatus faisait partie à l’origine du collège des fabri tignuarii, puis a intégré le collège des boulangers en tant que quaestor et quinquennalis73. Cette adhésion tardive concorde, selon N. Tran, avec l’acquisition par M. Licinius Privatus de plusieurs boulangeries74. Cet individu devait être très fortuné car il a fait un don de 50 000 sesterces à la colonie. Hormis sa fortune, M. Licinius Privatus avait acquis une grande dignité puisqu’il a atteint le rang de décurion de la colonie. Il s’agit donc du seul notable susceptible d’avoir été impliqué dans les boutiques.
- 75 Dig. 27.1. 46.
- 76 Tran 2006, p. 97.
33Qu’il s’agisse des manieurs d’argent ou des boulangers, il n’est pas établi que ces individus aient exercé en boutique. Les activités dans lesquelles sont impliquées ces personnes sont pour la plupart connexes. L’investissement multiple révèle donc probablement des formes de concentration verticale. Le rang social de ces individus est élevé. Ils occupent des postes importants au sein des collèges, tandis que M. Licinius Privatus, en tant que décurion fait partie des notables de la ville. Toutefois, ces individus ne travaillent probablement pas dans les boulangeries. L’existence de boulangers n’exerçant pas le métier eux-mêmes est attesté par un passage du juriste Paul qui explique que seuls les membres d’un collège de boulangers exerçant leur métier peuvent être excusés des tutelles75. Il est fort probable que ces deux personnages n’exerçaient pas à plein temps le métier de boulanger, mais qu’ils y étaient impliqués indirectement par le biais de dépendants ou qu’ils se soient détachés de la pratique du métier par l’accumulation d’un capital et d’une certaine honorabilité. Il est par ailleurs improbable que ces hommes aient exercé simultanément plusieurs activités. Ceci indique que les plus hautes strates des membres ne devaient plus exercer de métier, mais plutôt être des hommes d’affaires ou des patrons76.
- 77 Voir Los 2000 et Andreau 2005.
- 78 Meiggs 1973, p. 196-208.
- 79 Mouritsen 2001 ; Tran 2006, p. 68 et 388. Sur les Egrilii : Tran 2006, p. 377-395.
- 80 CIL, . XIV, 409 : « Cn (aeo) Sentio Cn (aei) fil (io) / Cn (aei) n (epoti) Ter (etina) Felici / de (...)
- 81 CIL, XIV, 5374 : « ] qui i[---] / patroni [---] / Cn (aeus) Sentius Felix / L(ucius) Munatius / Ca (...)
- 82 D’Arms 1981, p. 128-129.
- 83 Tran 2006, p. 390-391.
34Ces individus n’occupent toutefois pas les positions collégiales les plus puissantes et prestigieuses. Cette question rejoint celle de l’implication des élites dans le commerce qui a longtemps opposé les primitivistes aux modernistes77. Elle s’est manifestée à Ostie à travers la thèse d’une « social revolution » survenue à Ostie durant l’époque flavienne. Selon R. Meiggs, les élites traditionnelles tirant principalement leurs revenus surtout des terres – comme les Gamalae – ou du commerce – comme les Egrilii – sont alors remplacées par de nouveaux arrivants, enrichis exclusivement grâce au commerce78. Cette thèse a reçu les critiques de H. Mouritsen pour qui elle tient lieu de « mirage », tandis que N. Tran rejette l’implication des Egrilii dans le commerce79. Les élites professionnelles ayant atteint le rang de notables semblent surtout impliquées dans le grand commerce et les activités portuaires et très peu dans le petit commerce et l’artisanat. Ainsi, Cn. Sentius Felix, en plus de faire partie des décurions avait intégré le collège du corpus curatorum nauium marinarum, des naviculares maris Hadriatici, des argentarii, negotiatores uinar-iorum mensores frumentatiorum, le collège des scapharii, des lenuncularii traiectus luculli, des dendrophori, des sacomari, des oleariori, des piscatores propolares80. Il noue même d’étroites relations avec l’aristocratie traditionnelle d’Ostie, en adoptant en 102 un membre de la famille des Gamalae, Cn. Sentius Lucilius Gamala Clodianus81. J.H. D’Arms indique que les augustales d’Ostie occupent des positions importantes dans les collèges de constructeurs, armateurs, mesureurs de grain, marchands sur mer, transbordeurs et transporteurs fluviaux82. À la suite de N. Tran, il faut souligner la faible implication des élites dans le petit commerce et l’artisanat83.
35Au-delà des inscriptions, il est possible d’aborder la question des relations entre boutiques et collèges par le biais des sièges associatifs. Au total, quatre sièges comprenant des boutiques ont été identifiés. Il s’agirait de deux sièges des fabri tignuarii, d’un siège des fabri navales et d’un siège des stuppatores d’Ostie.
36Il apparaît que ces collèges sont reliés soit au grand commerce, aux activités portuaires ou au secteur de la construction. Aucune de ces activités ne semble appartenir à la sphère d’activité des boutiques. Par conséquent, il importe de se questionner sur ces locaux attachés aux collèges. S’agissait-il de bureaux appartenant au collège, ouverts à la clientèle pour passer des contrats, ou de boutiques où d’autres activités avaient lieu, mais appartenant à l’association ? Aucune de ces boutiques n’est pourvue d’équipements permettant d’identifier les activités qui y avaient lieu. Par conséquent, aucune de ces hypothèses ne peut être réfutée, ni validée.
37Les boutiques occupent, selon notre documentation, une place marginale dans le phénomène associatif qui semble dominé par les activités portuaires, maritimes et par les métiers de la construction. Les associations susceptibles d’être liées aux boutiques se distinguent par leur rareté, ainsi que par leur faible importance en termes de prestige et d’honorabilité. Cependant, des liens indirects se sont tissés entre les boutiques et certaines autres associations et activités, résultant probablement d’investissements multiples. Quoique la nature de ces relations demeure difficile à établir, quelques investisseurs sont impliqués dans le petit commerce et l’artisanat, ainsi que dans les activités portuaires ou de construction d’Ostie. Il apparaît clairement qu’investisseurs et boutiquiers représentent deux populations distinctes et que les seconds sont dépendants des premiers. L’extériorité des gens des boutiques d’Ostie au phénomène associatif ne va pas dans le sens de l’homogénéité et de l’unité qui se dégage des sources écrites.
10.3 – L’orgueil des maîtres des boutiques
- 84 Bloch 1944, p. 215 ; Meiggs 1997, p. 455 et Baldassarre 1996, p. 24.
- 85 Pavolini 2005, p. 248.
- 86 Voir D’Ambra 2006, p. 74.
38L’étude des mentions épigraphiques ou iconographiques de métiers des boutiques en contexte funéraire permet d’associer une activité à un type de tombe. Les vestiges matériels et les inscriptions livrent alors des informations précieuses relatives au niveau socio-économique de certains boutiquiers. Les inscriptions et représentations de métiers en milieu funéraire ne sont attestées que dans la nécropole de l’Isola Sacra. Celle-ci est traditionnellement considérée comme le cimetière d’une population homogène d’artisans et aux commerçants, d’une véritable « working class »84. Cette affirmation repose en partie sur l’absence d’inscription mentionnant des notables. Cette nécropole serait celle de Portus, plus que celle d’Ostie85. Or, la typologie des tombes, ainsi que la présence ou l’absence d’inscriptions et de reliefs indiquent qu’il ne s’agissait probablement pas d’une population homogène86.
10.3.1 Le silence des pauvres
- 87 Cette datation a été confirmée par la trouvaille de monnaies datant du règne de Galba, voir Baldas (...)
- 88 Baldassarre 2001, p. 385-386.
39La nécropole de l’Isola Sacra s’étend le long d’une voie construite au Ier siècle ap. J.-C. pour relier Ostie au nouveau port de Claude87. Trois étapes majeures d’occupation sont à distinguer. Au Ier siècle ap. J.-C., une première rangée de tombes fut construite le long de la route. Dès le IIe siècle, de nouvelles tombes ont été édifiées, formant une seconde rangée située derrière la première. Enfin, au IIIe siècle, la première rangée étant ensablée, de nouvelles tombes furent construites en bordure de route suite à un rehaussement du pavement. Les étapes successives d’occupation de cette nécropole indiquent que la majorité des tombes bordant la voie datent du IIIe ou du IVe siècle, tandis que la deuxième rangée de tombes remonte au IIe siècle88.
- 89 Calza 1940.
40Cette nécropole a été mise au jour par G. Calza dans les années 1930. Un total de 120 tombes monumentales a été alors dégagé89. Puis des fouilles ponctuelles dans la partie occidentale du cimetière furent entreprises de 1976 à 1979 et de 1988 à 1989 sous la direction d’I. Baldassarre, mettant au jour un grand nombre de tombes non monumentales.
- 90 Baldassarre 1996, p. 19-21.
41Différents types de tombes sont à distinguer. Les tombes à cella sont, dans la nécropole de l’Isola Sacra, les seules représentantes du type « monumental ». Il s’agit d’édifices formés d’une ou de plusieurs pièces accueillant généralement plusieurs sépultures à inhumation ou crémation. Certaines d’entre elles disposent d’un étage90. Elles sont au nombre de 120 sur l’ensemble de la nécropole, parmi lesquelles 75 ont été mises au jour dans la partie occidentale.
- 91 Baldassarre 1990a, p. 167.
- 92 Calza 1940, p. 78.
- 93 Baldassarre 1990b, p. 77-78.
- 94 Baldassarre 1990b, p. 76.
42Les tombes non monumentales sont de quatre types à Ostie. Il s’agit en premier lieu des tombes « a cassone », datées pour l’essentiel de l’époque de Trajan et des Antonins91. Ces tombes sont caractérisées par une couverture semi – cylindrique et sont parfois équipées d’un col d’amphore pour les libations92. Il semblerait que ces sépultures n’aient abrité, dans leur majorité, qu’un seul individu ; cependant quatre d’entre elles (les tombes 73, 82, 53, 60b) portent l’inscription « sibi et suis posterisque eorum », tandis que la tombe 6a comportait les restes d’un second individu dans une urne, alors que son inscription indique qu’elle n’abritait qu’une seule personne93. Elles sont au nombre de 47 sur le côté ouest de l’Isola Sacra94.
- 95 Calza 1940, p. 80, I. Baldassarre 1990b, p. 83.
- 96 Baldassarre 1990b, p. 84.
- 97 Calza 1940, p. 80.
- 98 Baldassarre 1990b, p. 83.
- 99 Baldassarre 1990b, p. 85.
43Il y a ensuite un ensemble de 627 tombes non monumentales – dans la seule partie occidentale – se divisant en trois types dont les effectifs n’ont pas été dénombrés. Les tombes sous tuiles disposées en bâtière, ou « alla cappuccina » disposent d’un lit de tuiles, de briques ou de sable sur lequel le défunt est déposé. La dépouille est protégée par deux rangées de tuiles affrontées pour former un toit à double pente95. Les cas de remploi ne sont que très rarement attestés96. Les tombes à amphores sont composées de fragments d’amphores mis bout à bout, parfois complétées par des fragments de tuiles ou de briques97. Les tombes non monumentales à incinération sont généralement composées de simples tuiles disposées à l’endroit de la crémation du corps98. Enfin, des sarcophages en terre cuite sont attestés à l’Isola Sacra durant la période médio et tardo-impériale99.
44Dans la portion ouest de l’Isola Sacra, 90 % des tombes appartiennent à la catégorie non monumentale (« a cassone », édicules, en bâtière, amphores, ou sarcophage), tandis que 10 % sont des tombes à cella. La population ne devait pas être répartie selon les mêmes proportions, car les tombes à cella sont collectives, pouvant accueillir jusqu’à plusieurs dizaines de corps, tandis que les tombes mineures étaient, pour la plupart, individuelles. Il est impossible de connaître le nombre exact d’individus qu’abritaient les tombes à cella car les urnes sont souvent manquantes. Le nombre de niches ne peut être retenu car elles contenaient un nombre variable d’urnes.
45Au total, seules cinq tombes de l’Isola Sacra sont pourvues d’inscriptions ou de représentations iconographiques de métiers susceptibles de se dérouler en boutique. Il ne s’agit que de tombes à cella (fig. 63).
- 100 Baldassarre 1996, p. 142.
- 101 IPO A273 « DM/ Veria Zosime fecit sibi et/ Verrio Eucharisto marito/ suo bene merenti libertis/ li (...)
- 102 IPO A 275 : « DM/ Berria Zosime/ fecit sibi et / Berrio Euhelpisto/ coiugi suo ».
- 103 D’Ambra 1988, p. 87 et Pavolini 2005, p. 268 ; Helttula 2007, p. 46.
46La tombe 29 est formée de deux pièces. La première est datée des années 160, tandis que la seconde a été construite durant les années 180100. Elle est pourvue de trois reliefs (reliefs 12-14) représentant l’activité d’un forgeron et d’un outilleur. Une inscription indique que la tombe fut édifiée à la demande de Verria Zosime et de son époux Verrius Euhelpistus pour les accueillir, ainsi que leurs affranchis101. Une seconde inscription indique que Verria s’est remariée avec Verrius Euhelpisto102. Les cognomina grecs de ces personnes indiquent qu’ils étaient peut-être d’origine servile, il s’agirait probablement de coliberti103.
- 104 I. Baldassarre 1996, p. 144, voir Helttula 2007, p. 50-52.
- 105 Calza 1940, p. 168.
47La tombe 30 est formée d’une pièce unique précédée de deux banquettes inclinées. Elle est datée de 160-170104. La tombe est dotée de deux reliefs (reliefs 1 et 2) représentant des commerces alimentaires. L’un d’eux comporte l’inscription « Lucifer Aquatarius », tandis qu’une mosaïque de pavement située entre les deux banquettes inclinées comporte l’inscription « DM / Antonie/ Achaice »105.
- 106 Helttula 2007, p. 108-110.
- 107 IPO A 61 : « DM/ Ti Claudius Eutychus/ Claudiae memnonidi/ coniugi bene merenti et sibi/ liberisqu (...)
- 108 Calza 1940, p. 337.
48La tombe 78 est datée de 100-115 de notre ère106. Il s’agit d’une pièce unique dont l’entrée est flanquée de deux banquettes inclinées. Sur la façade, un relief (relief 20) représente un boulanger et un âne travaillant à la meule à grain, tandis que le second représente des rameurs sur un navire. Une inscription indique que la tombe a été construite par Tiberius Claudius Eutychus pour sa femme Claudia Memnonis, lui-même, leur descendance et leurs affranchis107. À l’intérieur, deux fresques représentent Hercule et Neptune108.
- 109 Baldassarre 1996, p. 62 et p. 66.
- 110 IPO A 122 : « DM/ P Gabini Anniani/ P Gabinius Longinus/ et Annia Epictesis/ fecerunt filio piissi (...)
- 111 IPO A 123 : « DM/ P Gabini/ Anniani/ Annia/ Ionice/ fratri/ karissimo ».
- 112 IPO A 104 : « Dis Man/ T Flavi Aug lib/ Felicis claudia/ Daphine coniugi/ bene merenti/ et T flav (...)
- 113 IPO A47 : « L Caecilius Victor donatum sibi pavi/ mentum/ purum virgin monumenti huius a pere/ lia (...)
- 114 Baldassarre 1996, p. 65.
49La tombe 90 témoigne d’une histoire complexe. Elle fut édifiée entre 125 et 130 et occupée jusqu’au IIIe siècle109. Un sarcophage de marbre est décoré d’une scène de commerce alimentaire (relief 8). La tombe a été construite par Publius Gabinius Longinus et Annia Epictesis pour leur fils Publius Ganibius Annianus décédé à l’âge de 16 ans110. Une autre épitaphe est adressée au défunt par sa sœur, Annia Ionice111. Une épitaphe est adressée à Titus Flavius, affranchi de l’empereur, par sa femme, Claudia Daphne et son fils, Titus Flavius Severus112. Enfin, une dernière inscription indique que Lucius Caecilius Victor a érigé un sarcophage dans cette tombe qui lui a été léguée par Perelia Hieronis, Annia Vitalis et Annia Decia113. Cette inscription correspondrait à la seconde phase de la tombe, datée des années 160-170114.
- 115 Baldassarre 1996, p. 44 ; voir Helttula 2007, p. 154- 156.
- 116 IPO A222 : « HMDMA/ DM/ Scribonia Attice/ fecit sibi et M Ulpio Amerimno/ coniugi et Scriboniae Ca (...)
- 117 Kampen 1981, p. 76.
50La tombe 100 est datée des années 140115. Elle est ornée de deux reliefs (18 et 19) évoquant l’activité d’un chirurgien et d’une sage-femme. La tombe a été édifiée par Scribonia Attice pour elle, son mari Marcus Ulpius Amerimnus, sa mère Scribonia Callityche, pour un certain Diocles et leurs affranchis116. Le cognomen de Scribonia Attice suggère qu’elle était d’origine servile117.
- 118 Calza 1940, p. 44.
- 119 Toutefois Mouritsen 2004, p. 284 affirme que cette relation ne se vérifie pas systématiquement.
51Au total, cette étude livre plusieurs informations sur ces individus susceptibles d’avoir exercé une activité en boutique. Les tombes concernées sont toutes de type monumental et comptent donc parmi les plus importantes. En outre, les tombes de ce corpus sont extrêmement rares : elles ne représentent que 0,6 % de toutes les tombes de la nécropole, et 4 % des tombes monumentales. Dans ces conditions, il faut nuancer l’idée selon laquelle il s’agit de la nécropole de la « working class » d’Ostie et de Portus. La rareté de ces tombes combinée à leurs dimensions importantes suggère que les individus dont il est question font partie des couches les plus aisées possédant une sépulture dans cette nécropole. Ces tombes contrastent avec la multitude de tombes individuelles non monumentales mises au jour, que G. Calza qualifiait de « campo dei poveri »118. Il faut remarquer en outre que la majorité de ces tombes collectives sont destinées au propriétaire, à sa famille et à ses affranchis. Ces derniers étaient très certainement impliqués dans les activités artisanales ou commerciales du maître. Il apparaît clairement, dans notre documentation, que les commanditaires des tombes étaient impliqués dans les activités des boutiques. Une partie importante de ces inscriptions mentionne des cognomina d’origine non latine, suggérant l’origine servile des propriétaires119. Ces inscriptions indiquent également que ces individus possédaient des esclaves et affranchis qui étaient probablement occupés aux mêmes activités. Les personnes dont il est question sont donc très probablement aisées. Leur rareté contraste avec le silence d’une majorité des tombes concernant l’activité exercée par les défunts. L’évocation du travail ne devait être le fait que de personnes occupant une position dominante socialement ou professionnellement au sein d’un corps de métier ou d’une entreprise. Ce dossier indique donc que ces personnes, ne représentant probablement qu’une infime partie des individus travaillant en boutique, pouvaient accumuler une richesse d’une relative importance. Il s’agit donc de représentants des élites des gens des boutiques.

Fig. 63 – Répartition spatiale des tombes avec évocation de métiers liés au petit commerce ou à l’artisanat dans la nécropole de l’Isola Sacra.
- 120 À propos de ce monument, voir Petersen 2003 ; au sujet de ses reliefs ; Zimmer 1982, p. 107-109.
- 121 Andreau 1992, p. 32.
- 122 Andreau 1987, p. 371 ; voir aussi Tchernia 2011, p. 59-62.
52Cette importance ne semble pourtant pas dépasser un certain seuil. En premier lieu, les tombes dont il est question sont très modestes face à la tombe du riche boulanger Marcus Vergilius Eurysaces à Rome120. Par ailleurs, ces tombes ne sont pas comparables au monument funéraire de Cartilius Poplicola à Ostie. Nulle trace ne subsiste à Ostie d’individus vivant du petit commerce ou de l’artisanat faisant partie des notables de la ville. La documentation d’Ostie corrobore donc l’idée de J. Andreau selon laquelle « les métiers urbains de la plèbe » ne correspondent qu’à un stade préalable des ascensions sociales des agents économiques du monde romain121. Selon J. Andreau, il existe deux seuils de richesses délimitant trois échelons qui devaient faire sens aux yeux des anciens. Le premier seuil correspond à « l’abandon du monde des métiers et de la boutique » grâce à un patrimoine suffisant pour que le fils échappe à l’exercice d’un métier, le second sépare le patrimoine municipal de celui d’un chevalier ou d’un sénateur122. Une étape majeure de cette ascension est l’abandon de l’exercice d’un métier par l’accumulation d’un patrimoine permettant de ne plus travailler et d’acquérir un prestige social.
- 123 McMullen 1982.
- 124 Mouritsen 2001, p. 30.
- 125 Joshel 1992, p. 115.
- 126 Carrié 1995, p. 1107-1110.
- 127 Tran 2007, p. 129.
- 128 Tran 2007, p. 124.
- 129 Tran 2007, p. 125.
53La position sociale qu’occupaient les propriétaires de ces tombes corrobore la thèse selon laquelle la pratique épigraphique n’était pas répandue à l’ensemble de la population et ne saurait être considérée comme représentative du paysage socio-économique urbain. De manière générale, R. Mc Mullen indique que la pratique épigraphique variait selon les milieux sociaux et d’une région à l’autre123. Selon H. Mouritsen, seules les strates supérieures de la société produisaient les inscriptions124. Concernant les mentions épigraphiques de métiers, cette pratique donne lieu à des positions variées. Ainsi S.R. Joshel indique que seuls les hommes de métier ayant connu une ascension socio-économique se trouvent à l’origine de mentions épigraphiques professionnelles125. Cette position a reçu de vives critiques de la part de J.-M. Carrié pour qui les commanditaires des épitaphes n’étaient pas systématiquement les personnes commémorées126. La thèse de S.R. Joshel ne serait donc opérante que dans le cadre d’autoreprésentations. Plus récemment, N. Tran a proposé une thèse plus nuancée. En premier lieu, la pratique professionnelle d’un métier ne serait mentionnée que si elle est valorisante pour le défunt127. En second lieu, les titulatures professionnelles ne semblent réservées qu’à une fraction de la population active. Ainsi, sur de nombreuses inscriptions provenant d’Italie, le métier du patron est mentionné, tandis que celui de sa femme, de ses affranchis ou de ses esclaves n’est pas évoqué. Par conséquent, les titulatures professionnelles ne devaient être réservées qu’au pater familias ou au dominus, correspondant aux employeurs128. En milieu urbain, les titulatures professionnelles sont essentiellement réservées aux membres des collèges professionnels129. Les mentions épigraphiques de métiers sont donc le produit d’agents économiques occupant les couches sociales supérieures.
- 130 Joshel 1992, p. 174-175. Nous sommes contraints de reprendre sa classification, sans quoi il serai (...)
- 131 DeLaine 2003, p. 730-731.
54La nature des activités mentionnées épigraphiquement révèle une autre tendance. L’artisanat et le petit commerce apparaissent comme extrêmement minoritaires au sein des mentions épigraphiques des métiers d’Ostie. Ce déséquilibre est d’autant plus frappant lorsque l’on compare le corpus d’Ostie à celui de Rome. Ce dernier a été étudié par S. Joshel dont la typologie sera ici reprise. Elle distingue plusieurs secteurs : construction, manufacture, vente, banque, service éduqué, service spécialisé, service domestique et administration130. La comparaison des 1415 inscriptions de métier de Rome aux 82 d’Ostie ne livre pas un reflet exact des activités qui s’y déroulaient. Elle révèle toutefois un certain nombre de différences significatives. À Ostie, les activités portuaires et fluviales (39 %), ainsi que la construction (30 %) sont les plus présentes. L’artisanat (13 %), l’administration (10 %) et la vente au détail (5 %) viennent ensuite. Enfin, les professions intellectuelles (2 %), la banque (2 %), les services spécialisés (1 %) et domestiques (1 %) sont très minoritaires. À Rome, l’artisanat (22 %), les services domestiques (22 %) et l’administration (21 %) prédominent. La construction (8 %), les services spécialisés (8 %) et la vente au détail (7 %) occupent une place plus réduite, tandis que les professions intellectuelles, les activités de transport (4 %) et la banque (3 %) sont les plus discrets. À Ostie, les seules activités portuaires, fluviales et de construction représentent près des trois quarts des inscriptions. La surreprésentation des activités du port et du fleuve tient évidemment au rôle d’avant-port d’Ostie. Selon J. DeLaine, la prospérité et l’importance des constructeurs découlent d’une très grande demande de main-d’œuvre et de savoir-faire provoquée par la reconstruction presque intégrale d’Ostie au cours du IIe siècle, ainsi que par la construction de grands projets unitaires131. Les activités susceptibles de se dérouler en boutique correspondent approximativement à l’artisanat et au commerce de détail. Ces catégories sont moins importantes à Ostie (où elles représentent 18 % du corpus) qu’à Rome (29 %). Il apparaît donc que la pratique de mention épigraphique de métier est bien plus répandue dans les secteurs les plus prospères. À Ostie, les gens des boutiques sont largement sous-représentés, alors que les activités du grand commerce, du port et de la construction sont très présentes.
55Il en va de même pour le corpus des représentations de métier d’Ostie au sein duquel les activités portuaires sont également majoritaires. Il y en a au total 37, dont 22 sont localisées dans le Piazzale delle Corporazioni. Leur nature est variée ; il s’agit de reliefs en terre-cuite ou de marbre, de fresques, de mosaïques ou même de statuettes en terre-cuite.
- 132 Sur la définition des gens de métier, voir Andreau 2001, p. 25-27.
56Les évocations de métier, qu’elles soient épigraphiques ou iconographiques, sont surtout le fait à Ostie des métiers du port et de la construction. Les gens des boutiques n’y sont que très peu représentés. En outre, il apparaît que ces pratiques ne concernent que les hommes de métier les plus riches132. L’exemple de l’Isola Sacra révèle la richesse de certains boutiquiers, bien qu’elle ne soit pas comparable à celle des grands hommes d’affaires d’Ostie.
10.3.2 Images de vente, d’artisanat et d’outils
- 133 Bianchi Biandinelli 1967.
57L’étude des modes de représentation iconographique des métiers permet de mettre en évidence certaines intentions des commanditaires participant pleinement à la relation que ces individus entretiennent avec leur métier. Elle permet donc d’aborder la question de l’autoreprésentation. L’étude des représentations de métiers a été grandement influencée par la notion de style plébéien ou arte plebea défini par R. Bianchi Biandinelli par opposition à l’arte aulica133. Il correspond à l’art produit ou commandé par des individus n’appartenant pas aux élites. Il s’agit donc d’une approche du mode de représentation remis dans un contexte social précis. Ce style s’éloigne de l’héritage grec pour adopter des modes de représentation plus directs et comportant moins de références culturelles. Par conséquent, les représentations de travail ont été avant tout approchées sous l’angle de leurs spécificités stylistiques et de leurs relations avec le statut social de leurs producteurs ou commanditaires. Rappelons encore que ces derniers se distinguent par leur rareté et leur probable richesse.
- 134 Clarke 2003, p. 93-94 ; George 2006. Tran 2011.
- 135 Zimmer 1982, p. 219.
- 136 Zimmer 1982, p. 220.
- 137 George 2006, p. 27. L’historienne reprend la thèse d’une résistance à l’ordre social développée pa (...)
- 138 D’Ambra 2006, p. 79.
- 139 Béal 2000, p. 153.
58Il a été souligné à de multiples reprises et par de nombreux historiens que si le travail est méprisé dans les sources écrites produites par les élites, l’autoreprésentation des commerçants et artisans met souvent en valeur le travail comme une source de fierté134. Ceci se traduirait de manière tangible dans le style ou le mode de représentation des activités. Dans le style réaliste, un grand souci est accordé aux détails et aux gestes techniques permettant de mettre en évidence la spécificité du métier ainsi que la spécialisation de l’artisan135. Selon G. Zimmer, les reliefs funéraires réalistes servent à la poursuite des activités du défunt après son trépas136. Selon M. George, ce réalisme serait une forme de « résistance sociale » de la part des hommes de métier contre le mépris du travail exprimé par les couches supérieures137. Il est toutefois difficile de prêter une telle intention aux commanditaires en se fondant sur le seul caractère réaliste des représentations. Ce dernier doit d’ailleurs être nuancé. E. D’Ambra n’y voit pas une volonté narrative, mais bien plus une insistance sur les détails et les gestes techniques propres à l’activité138. En effet, force est de constater qu’il ne s’agit pas de scènes prises sur le vif à la manière de la photographie, mais que ces représentations procèdent de choix et d’omissions volontaires visant à mettre en évidence tel ou tel aspect précis de l’activité artisanale ou commerciale. Il faut donc incliner en faveur de la position de J.-C. Béal qui critique la valeur descriptive et réaliste de ces représentations qui correspondraient davantage à des projections des commanditaires139. Le caractère réaliste de certaines représentations doit donc être interrogé à travers la question du discours dont on ne saurait faire l’économie dans le cadre d’une étude portant sur les métiers.
- 140 Pannoux 1985, p. 293-328 ; Béal 2000, p. 153-156.
- 141 Béal 2000, p. 167.
- 142 Jockey 1998, p. 625-652.
59La typologie établie par S. Pannoux et reprise par J.-C. Béal constitue un point de départ pertinent pour l’étude des modes de représentation des métiers. Les représentations de travail sont divisées en trois grands types. Le premier (AC) concerne les scènes d’artisanat dans lesquelles l’agent est actif. Le deuxième (OS) correspond aux représentations d’outils seuls. Enfin, le troisième type (PO) rassemble les représentations d’artisans de face avec leurs outils140. Cette typologie, élaborée pour l’étude d’un corpus gaulois, n’est pas tout à fait opérante pour notre étude dans la mesure où le troisième type est quasiment absent d’Italie141. La typologie élaborée par Ph. Jockey est fondée sur le nombre d’individus représentés sur un relief. Il y distingue les représentations d’un individu seul, d’un binôme, ou d’un groupe plus conséquent afin d’étudier les expressions visuelles de hiérarchie142. Il est certain que les modes de représentation sociale choisis par les artistes traduisent la volonté de délivrer un message précis. C’est la raison pour laquelle ils doivent être mis en relation avec l’activité représentée.
60Trois types de représentations de commerces alimentaires se distinguent à Ostie.
- 143 Voir Kampen 1981, p. 56-57.
- 144 Kampen 1981, p. 56.
- 145 Kampen 1981, p. 59.
61Les reliefs insistant sur les échanges entre commerçants et clients (CA 1) constituent l’un des types les plus présents. Ce dernier n’est attesté qu’au IIe siècle. Sur les trois reliefs (reliefs 1-3), le(s) vendeur(s) sont assis derrière un comptoir, tandis que les clients sont représentés debout. Ces deux types d’agents occupent des zones distinctes des reliefs. Le comptoir agit donc comme un séparateur visuel permettant de distinguer l’espace réservé aux vendeurs de celui qui est accessible à la clientèle143. En outre, il s’agit d’un repère associé aux transactions commerciales qui sont représentées par la jonction des mains des vendeurs et des clients. Au-dessus du comptoir, les marchandises sont passées de main en main144. Sur ces reliefs, certains clients tiennent en main les marchandises. Le traitement de ces reliefs indique que l’accent est mis sur les échanges marchands entre vendeurs et clients auxquels le comptoir semble étroitement associé. Deux de ces reliefs (reliefs 1 et 2) sont en terre-cuite et proviennent de la nécropole de l’Isola Sacra, tandis que le dernier (relief 3) est en marbre et a été découvert Via della Foce. Ce contexte, ainsi que ces faibles dimensions, pousse à croire que ce relief était probablement une enseigne145.
- 146 Kampen 1981, p. 56.
62Le deuxième type (CA 2) correspond aux trois images (reliefs 4-6) de vendeurs représentés seuls et de face. Le vendeur est situé tantôt devant ou derrière une table à tréteaux qui ne se retrouve que dans ce type de relief. Le marchand touche les marchandises garnissant la table. Selon N. Kampen, il s’agirait d’un geste spécifique aux images de vente146. Un de ces reliefs (relief 6) est daté du début du Ier siècle, tandis que les deux autres sont attribués au IIe siècle. Seul l’un d’entre eux (relief 4) a un contexte de découverte connu ; il s’agit d’une enseigne ornant la façade de l’édifice III, xiv, 4.
63Enfin, le dernier type d’images de commerces alimentaires correspond aux scènes de service (CA 3). Deux reliefs (7 et 8) représentent une serveuse se tenant debout un gobelet à la main. Dans le premier, la serveuse se dirige depuis un comptoir à niche vers deux clients attablés (relief 8). Sur le second (relief 7), la serveuse semble se diriger depuis deux dolia vers deux clients attablés. Le traitement de ces scènes met en évidence le service se déroulant à l’intérieur d’un débit de boissons. Ces deux reliefs se démarquent par une grande cohérence. Il s’agit d’éléments de sarcophages provenant de la nécropole de l’Isola Sacra et tous deux sont datés de la seconde partie du IIIe siècle ap. J.-C.
64Ces trois types de représentation de commerce alimentaire mettent chacun l’accent sur un aspect différent du métier, ainsi que sur des équipements distincts. Le premier met en évidence les transactions commerciales entre clients et marchands auquel le comptoir est étroitement lié. Le deuxième type ne représente pas l’échange, mais uniquement le commerçant de face, derrière une table à tréteaux garnie de denrées alimentaires. Enfin, le denier type représente une scène de service se déroulant en intérieur. Le mobilier récurrent est cette fois-ci la table sur laquelle les clients consomment. Les détails du traitement ancrent chacune de ces scènes dans un lieu reconnaissable. Ces reliefs ont également en commun de représenter une profusion de marchandises disposées sur des tables, comptoirs ou étagères. Le premier et le troisième type ont pour particularité de représenter les interactions entre clients et vendeurs. La distinction entre ces agents s’opère par leur position, par leurs gestes, mais également par leurs vêtements.
- 147 Voir le point historiographique proposé par Béal 2000, p. 154-155.
- 148 Béal 2000, p. 155.
65Les reliefs d’artisanat se scindent en deux types. Le premier correspond aux scènes de métier. L’artisan y est représenté en pleine activité. Un souci est accordé aux détails techniques tels que les outils, le mobilier ou encore les vêtements. Ainsi, les forgerons des reliefs provenant de la tombe 29 portent-ils un tablier (reliefs 12 et 13). Les images représentants plusieurs artisans mettent en évidence leurs interactions ou leur hiérarchie. Ainsi, l’un des hommes du relief 15 est jeune, d’une musculature imposante et vêtu d’une tunique, tandis que l’autre est représenté plus bas, chauve, plus gras et vêtu d’un simple pagne. L’échelle distingue également les deux forgerons du relief 12 : l’un est présenté debout, plus grand que le second qui est assis. Deux de ces scènes sont accompagnées d’un registre représentant une série d’outils ni proportionnels ni à l’échelle, mettant en évidence la production ou les instruments servant à leur art. Cette catégorie correspond au type AC de J.-C. Béal, elle est traditionnellement interprétée comme un moyen de glorification du travail du défunt147. J.-C. Béal propose d’y voir les activités dans lesquelles le défunt avait investi148. Ce type de représentations n’impliquerait donc pas nécessairement la pratique d’un métier. L’accent porte sur l’acte de la production artisanale, mettant en évidence l’aspect technique du métier, ainsi que sur la spécialisation des agents. Ces reliefs ne sont attestés qu’en contexte funéraire, du Ier au IIIe s. à Ostie. Ils sont datés du IIe s. dans leur majorité – 5 sur 8.
- 149 Béal 2000, p. 155-156.
66Les images d’outils seuls sont sans nul doute les plus difficiles à interpréter (reliefs 17 ; 23-26). Il s’agit de représentations d’outils, d’instruments ou de marchandises. Les tailles des différents objets sur un même relief sont incohérentes car les échelles sont rarement réalistes. Sur les reliefs d’outils, chaque objet est singulier. L’accent est donc mis sur la technique et la spécialisation des métiers. Ce type de représentation correspond au type OS (outils seuls) défini par J.-C. Béal. À Ostie, ce type concerne avant tout des enseignes de maçons. L’interprétation selon laquelle les reliefs d’outils de maçons ont une connotation symbolique évoquant la fondation peut être ici rejetée149. Cette thèse a été développée au sujet des reliefs de ce type ornant une tombe et non au sujet d’une enseigne urbaine. Toutefois, des reliefs similaires figurent à côté de scènes de métier sur les reliefs provenant de la tombe 30 (reliefs 12 et 13). Ces représentations hybrides (entre AC et OS) constituent des exceptions. Enfin, un relief (17) de lampes pouvant être assimilé au type OS a été découvert sur le Cardo. Les lampes y sont représentées de manière identique et forment ensemble un motif circulaire (relief 17). Il s’agit là encore d’une enseigne. Ces 4 reliefs sont tous des enseignes et sont tous attribués au IIe siècle. Il faut retenir qu’en contexte urbain ces images ne représentent que des outils ou marchandises et sont par conséquent totalement dépersonnalisées et ne se replacent guère dans un lieu donné. S’agissant d’enseignes, ces reliefs servaient précisément à indiquer la localisation d’un commerce ou d’un atelier dans l’espace concret. La référence porte donc sur l’activité ou les biens mis en vente et non sur l’identité de l’agent.
67Les scènes de métiers ou les reliefs d’outils seuls ont en commun de mettre en évidence la dimension technique de l’activité. Les scènes ne montrent qu’une étape de la production artisanale, tandis que de multiples étapes sont évoquées par la diversité des instruments figurant sur les images d’outils seuls.
68L’ensemble de la documentation révèle que les représentations iconographiques des métiers des boutiques semblent réservées à une infime partie des boutiquiers. Ils comptent parmi les plus riches et sont probablement davantage investisseurs, propriétaires d’une ou de plusieurs boutiques, ou maîtres qu’artisans ou tenanciers. Cependant, ces représentations s’inscrivent pleinement dans une volonté d’affirmation identitaire se fondant sur la célébration d’une activité professionnelle. L’accent est mis sur différents aspects des métiers et varie selon la nature de l’activité. Ces reliefs insistent tantôt sur la profusion des marchandises mises en vente, sur les interactions entre négociants et clients, sur la dimension technique d’une activité de production ou de transformation, ou plus rarement sur l’identité de l’acteur économique. Si le savoir-faire et la spécialisation technique sont mis en valeur dans les représentations d’artisanat, ce sont les interactions entre clients et boutiquiers qui occupent une place importante dans celles de commerces alimentaires. L’accentuation de tels aspects, propres à la pratique même d’un métier de la part de probables investisseurs ou propriétaires semble paradoxale. S’il existait des élites professionnelles voulant s’extraire de la pratique d’un métier par le biais des associations et de l’affichage de diverses titulatures, il existait – probablement à un niveau social plus modeste – une élite des gens des boutiques affirmant au contraire l’exercice d’un métier en se référant à leurs aspects les plus techniques.
69Au terme de cet examen, plusieurs conclusions peuvent être tirées au sujet de la place des gens des boutiques dans la société d’Ostie. Les sources littéraires et juridiques livrent l’image d’une population assez homogène sur le plan socio-économique, occupant un rang plutôt subalterne et souvent en situation de dépendance. Les sources d’Ostie, datant pour l’essentiel du Haut-Empire et plus particulièrement du IIe siècle, semblent confirmer cette idée, mais attestent aussi d’une certaine complexité. En premier lieu, il apparaît que les gens des boutiques d’Ostie occupaient une place sociale inférieure. Aucun notable ne semble avoir exercé une telle activité. Les rares tombes des gens des boutiques indiquent que les plus fortunés d’entre eux étaient loin d’égaler les grands hommes d’affaires impliqués dans le grand commerce. Les relations entre les boutiques et les membres de l’élite sont très rares et toujours indirectes. Les gens des boutiques d’Ostie semblent former un milieu relativement homogène, tout en restant plutôt extérieurs au phénomène associatif, mais au sein duquel des différenciations assez importantes peuvent être observées. Ainsi, si les pratiques de représentation sont semblables, les modes de représentation varient d’un type d’activité à l’autre.
Conclusion de la deuxième partie
70La conservation des vestiges et les méthodes de fouilles n’ont laissé que peu d’informations sur les activités des boutiques. Les sources archéologiques, épigraphiques et iconographiques fournissent toutefois un aperçu des commerces et artisanats y ayant lieu et permettent de définir la place des boutiques dans l’écheveau des espaces et des acteurs de l’économie d’Ostie. L’étude des relations qu’entretiennent les boutiques avec les autres espaces révèle une grande complexité. Ces espaces se trouvent en situation de concurrence, coopération, ou d’indépendance. Il en ressort que les boutiques occupaient une place centrale dans l’économie du quotidien, alors qu’elles semblent assez nettement détachées du grand commerce. L’importance de ce dernier a tout de même profité, ne serait-ce qu’indirectement, aux boutiques. Il apparaît qu’à partir du IIIe siècle, des transformations affectent le rôle d’avant-port d’Ostie qui tend à se recomposer autour d’une économie plus locale, au profit des boutiques. Enfin, les gens des boutiques semblent avoir constitué un milieu relativement homogène du point de vue socio-économique en dépit de la grande variété des activités. Les sources suggèrent que les gens des boutiques occupaient, dans la majorité des cas, une position subalterne. Les témoignages de richesse économique ou de prestige social de ces individus sont très rares. Ceci semble tenir à la nature même des boutiques qui semblent en grande partie extérieure au phénomène associatif, beaucoup plus répandu dans les activités maritimes, portuaires et de construction.
Notes
1 Andreau 1987, p. 25-33.
2 Andreau 2001, p. 19.
3 Morel 1983, p. 37 ; Morel 2002, p. 284.
4 Andreau 2001, p. 101-106.
5 Giardina 1981, p. 124 : « Se infatti il mondo dei grandi negotiatores ci introduce direttamente ai livelli più alti dell’economia, quello, più modesto, dei tabernarii, ci pone a contatto con i meccanismi elementari del commercio e dello scambio, che erano tuttavia quelli prevalenti nell’urbanesimo antico ».
6 Ce travail fut réalisé par Monteix 2010 à Herculanum et par Flohr 2011 à propos des fouleries.
7 Purcell 1994, p. 663-687 ; voir aussi Morel 1997, p. 158 et Tran 2006, p. 391.
8 Voir supra (Ch. IX).
9 De Robertis 1963, p. 21-24.
10 Nicolet 1988, p. 178 ; Traina 2000, p. 115 et P. Veyne 1999, p. 119-120.
11 Cic. Att. XIV, 9. 1.
12 Tran 2011, p. 132-133.
13 Cic. Des devoirs, 1, 150.
14 Giardina 2002, p. 327. Voir Tchernia 2011, p. 34-37.
15 Giardina 2002, p. 329.
16 Cic., Cat., 4, 8.
17 Legum Novellarum Divi Valentiniani V.
18 Voir l’analyse de Flambard 1977, p. 123-125 ; Cels Saint-Hilaire 2005, et Tran 2006, p. 18.
19 Cic. Cat. 4, 8.
20 Hor. Odes, 1, 4, 13-14 : « pallida Mors aequo pulsat pede pauperum tabernas / regum que turris ».
21 Whittaker 2002 ; Veyne 2000, p. 1170.
22 Freu 2007, p. 325 et 510.
23 Andreau 2004a, p. 120-121 et Veyne 1991, p. 756.
24 Voir ch. II.
25 CIL, V, 7907.
26 CIL, VI, 9920.
27 Ruggini 1995, p. 121, n. 319.
28 Cicéron, de domo, 89-10.
29 Cic. Dom. 13.
30 Voir Giardina 1981 : Legum Novellarum Divi Valentiniani V.
31 Dubouloz 2011, p. 178-197.
32 Treggiari 1980, p. 52-53.
33 Paul 14. 3. 18 ; Ulp. 14. 3 ; Gaius, Institutes, 4, 71.
34 Dubouloz 2011, p. 119-120 et p. 122.
35 Ligios 2001, p. 35-37 ; Andreau 2004a, p. 122. Voir également Wallace-Hadrill 1994, p. 133 et Tchernia 2011, p. 42-47.
36 Aubert 1994, p. 5-6, voir aussi Dubouloz 2011, p. 180.
37 Andreau 2004a, p. 120-123.
38 Andreau et Descat 2006, p. 138.
39 Andreau et Descat 2006, p. 131-132.
40 Andreau 2004a, p. 115.
41 Andreau 2004a, p. 118.
42 Andreau 2006, p. 133.
43 Voir Treggiari 1980, p. 50-52.
44 Thomas 2004, p. 209 et Thomas 2002, p. 226.
45 Veyne 2000, p. 1171.
46 Veyne 2000, p. 1184.
47 Chevallier 1986, p. 153-159.
48 Tran 2006, p. 37.
49 Tran 2006, p. 526.
50 Tran 2007, p. 121.
51 Tran 2007, p. 136.
52 Tran 2008, p. 295.
53 Tran 2006, p. 14.
54 Tran 2006, p. 160.
55 Un esclave pouvait rejoindre un collège avec l’accord de son maître : Dig. 47, 22, 3, 2.
56 CIL, XIV, 4573.
57 Vaglieri, BC 1910, p. 79.
58 Estimation de Pavolini 2005b, p. 131.
59 Colonne de gauche, ligne 20 et colonne de droite, ligne 3. Tran 2006, p. 117 et 288.
60 CIL, XIV, 374 ; CIL, XIV, 4234.
61 CIL, XIV, 10 et CIL, XIV, 4549, 2.
62 Sur les fabri tignuarii : CIL, XIV, 256 ; Meiggs 1973, p. 317 et Tran 2006, p. 164. Sur les lenuncularii tabularii : Bloch, 42 ; Meiggs 1973, p. 317.
63 Meiggs 1973, p. 316.
64 Tran 2006, p. 108-109 : « Aucun collegiatus n’occupe dans aucune profession le plus bas niveau hiérarchique, car celui-ci était réservé à des individus qui n’étaient pas jugés dignes d’appartenir à un collège. En somme, les différents statuts de travail des collegiati ont pour point commun d’être conciliables avec la respectabilité, voire avec le prestige ».
65 Tran 2007, p. 121.
66 Tran 2006, p. 108.
67 AE 1974, 123a.
68 AE 1988 204.
69 Tran 2006, p. 223-229.
70 CIL, XIV, 4234.
71 Tran 2006, p. 106.
72 Valjus 1998, p. 259-264.
73 CIL, XIV, 374.
74 Tran 2006, p. 105.
75 Dig. 27.1. 46.
76 Tran 2006, p. 97.
77 Voir Los 2000 et Andreau 2005.
78 Meiggs 1973, p. 196-208.
79 Mouritsen 2001 ; Tran 2006, p. 68 et 388. Sur les Egrilii : Tran 2006, p. 377-395.
80 CIL, . XIV, 409 : « Cn (aeo) Sentio Cn (aei) fil (io) / Cn (aei) n (epoti) Ter (etina) Felici / dec (urionum) decr (eto) aedilicio adl (ecto) d (ecurionum) d (ecreto) d (ecurioni) adl (ecto) / q (uaestori) a (erarii) Ostiens (ium) IIvir (o) q (uaestori) iuvenum / hic primus omnium quo anno dec (urio) adl (ectus) est et / q (uaestor) a (erarii) fact (us) est et in proxim (um) annum IIvir designat (us) est / quinq (uennali) curatorum navium marinar (um) gratis adlect (o) / inter navicular (ios) maris {H}Adriatici et ad quadrigam / fori vinari (i) patrono decuriae scribar (um) cerarior (um) / et librarior (um) et lictor (um) et viator (um) item praeconum et / {et} argentarior (um) et negotiator (um) vinarior (um) ab urbe / item mensor (um) frumentarior (um) Cereris Aug (ustae) item corpor (is) / scapharior (um) et lenuncularior (um) traiect (us) Luculli et / dendrophorum et togator (um) a foro et de sacomar (io) / et libertor (um) et servor (um) publicor (um) et olearior (um) et iuven (um) / cisianor (um) et veteranor (um) Aug (usti) item beneficiarior (um) proc (uratoris) / Aug (usti) et piscator (um) propolar (um) curatori lusus iuvenalis / Cn (aeus) Sentius Lucilius/ Gamala Clodianus f (ilius) patri indulgentissimo ».
81 CIL, XIV, 5374 : « ] qui i[---] / patroni [---] / Cn (aeus) Sentius Felix / L(ucius) Munatius / Cascellianus / Cn (aeus) Sentiu[s] / Clod[ianus] / quinquen[nalis] / perpetu[us] / L(ucius) Laberius Fav[---] / quinquennalic[ii] / P(ublius) Saenius Pap[---] / L(ucius) Laberius Fav[// C(aius) Sossius B]enedicius / [Pontiano e]t Atilino co (n) s (ulibus) / [quinquen]nales / [P(ublius) Sulpicius] Hera / [L(ucius) Naevius Sa]eclaris [//] Q(uintus) Canini[---]REC / L(ucius) Naevius Saeclaris / C(aius) Crispius Eutychus [//]Q[---] lix / C(aius) Nunnius Victor / T(itus) Manlius Fortunatus / P(ublius) Cincius Floru[s] / T(itus) Arranius Feli[cio] / L(ucius) Naevius Cinc[ianus] / A(ulus) Egrius Hil[ » ; Cébeillac-Gervasoni et Zevi 2000, p. 24.
82 D’Arms 1981, p. 128-129.
83 Tran 2006, p. 390-391.
84 Bloch 1944, p. 215 ; Meiggs 1997, p. 455 et Baldassarre 1996, p. 24.
85 Pavolini 2005, p. 248.
86 Voir D’Ambra 2006, p. 74.
87 Cette datation a été confirmée par la trouvaille de monnaies datant du règne de Galba, voir Baldassarre 2001, p. 386 et Baldassarre 1987, p. 129.
88 Baldassarre 2001, p. 385-386.
89 Calza 1940.
90 Baldassarre 1996, p. 19-21.
91 Baldassarre 1990a, p. 167.
92 Calza 1940, p. 78.
93 Baldassarre 1990b, p. 77-78.
94 Baldassarre 1990b, p. 76.
95 Calza 1940, p. 80, I. Baldassarre 1990b, p. 83.
96 Baldassarre 1990b, p. 84.
97 Calza 1940, p. 80.
98 Baldassarre 1990b, p. 83.
99 Baldassarre 1990b, p. 85.
100 Baldassarre 1996, p. 142.
101 IPO A273 « DM/ Veria Zosime fecit sibi et/ Verrio Eucharisto marito/ suo bene merenti libertis/ libertabusque suis poste/ risque eorum/ H M H exterum N S / LN fronte P X in agro P X. ».
102 IPO A 275 : « DM/ Berria Zosime/ fecit sibi et / Berrio Euhelpisto/ coiugi suo ».
103 D’Ambra 1988, p. 87 et Pavolini 2005, p. 268 ; Helttula 2007, p. 46.
104 I. Baldassarre 1996, p. 144, voir Helttula 2007, p. 50-52.
105 Calza 1940, p. 168.
106 Helttula 2007, p. 108-110.
107 IPO A 61 : « DM/ Ti Claudius Eutychus/ Claudiae memnonidi/ coniugi bene merenti et sibi/ liberisque suis fecit libertis/ libertabusque posterisque/ eorum itu ambitum HMHNS/ in fronte P XV in agro P XV ».
108 Calza 1940, p. 337.
109 Baldassarre 1996, p. 62 et p. 66.
110 IPO A 122 : « DM/ P Gabini Anniani/ P Gabinius Longinus/ et Annia Epictesis/ fecerunt filio piissimo/ uixit annis XVI ».
111 IPO A 123 : « DM/ P Gabini/ Anniani/ Annia/ Ionice/ fratri/ karissimo ».
112 IPO A 104 : « Dis Man/ T Flavi Aug lib/ Felicis claudia/ Daphine coniugi/ bene merenti/ et T flav Severus/ patri fecerunt ».
113 IPO A47 : « L Caecilius Victor donatum sibi pavi/ mentum/ purum virgin monumenti huius a pere/ lia hieronide/ D et anniis vitale et decia in quo sar/cophaga nova sumptibus suis in/ stuxit fecit/ que sibi et caeciliae hygiae coniugi. Suae et libertis libertabusque pos/ terisque eorum ».
114 Baldassarre 1996, p. 65.
115 Baldassarre 1996, p. 44 ; voir Helttula 2007, p. 154- 156.
116 IPO A222 : « HMDMA/ DM/ Scribonia Attice/ fecit sibi et M Ulpio Amerimno/ coniugi et Scriboniae Calli/ Tyche matri et Diocli et suis/ Li libertis libertabusque poste/ risque eorum praeter panara/ tum et Proscdocia HMHENS ».
117 Kampen 1981, p. 76.
118 Calza 1940, p. 44.
119 Toutefois Mouritsen 2004, p. 284 affirme que cette relation ne se vérifie pas systématiquement.
120 À propos de ce monument, voir Petersen 2003 ; au sujet de ses reliefs ; Zimmer 1982, p. 107-109.
121 Andreau 1992, p. 32.
122 Andreau 1987, p. 371 ; voir aussi Tchernia 2011, p. 59-62.
123 McMullen 1982.
124 Mouritsen 2001, p. 30.
125 Joshel 1992, p. 115.
126 Carrié 1995, p. 1107-1110.
127 Tran 2007, p. 129.
128 Tran 2007, p. 124.
129 Tran 2007, p. 125.
130 Joshel 1992, p. 174-175. Nous sommes contraints de reprendre sa classification, sans quoi il serait nécessaire de reprendre l’intégralité du corpus de Rome.
131 DeLaine 2003, p. 730-731.
132 Sur la définition des gens de métier, voir Andreau 2001, p. 25-27.
133 Bianchi Biandinelli 1967.
134 Clarke 2003, p. 93-94 ; George 2006. Tran 2011.
135 Zimmer 1982, p. 219.
136 Zimmer 1982, p. 220.
137 George 2006, p. 27. L’historienne reprend la thèse d’une résistance à l’ordre social développée par Joshel à propos des mentions épigraphiques de métiers dont le caractère mélioratif s’oppose aux idées véhiculées par les sources littéraires.
138 D’Ambra 2006, p. 79.
139 Béal 2000, p. 153.
140 Pannoux 1985, p. 293-328 ; Béal 2000, p. 153-156.
141 Béal 2000, p. 167.
142 Jockey 1998, p. 625-652.
143 Voir Kampen 1981, p. 56-57.
144 Kampen 1981, p. 56.
145 Kampen 1981, p. 59.
146 Kampen 1981, p. 56.
147 Voir le point historiographique proposé par Béal 2000, p. 154-155.
148 Béal 2000, p. 155.
149 Béal 2000, p. 155-156.
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