Introduction générale
p. 1-6
Texte intégral
1En 1512, on fit la découverte à l’emplacement du sanctuaire d’Isis et de Sérapis de Rome d’une statue représentant le dieu du Tibre1. Sur la base de cette statue – désormais située au musée du Louvre – le sculpteur a représenté les bienfaits du Tibre sur les activités économiques de la campagne, du port et de la ville. Ainsi, le Tibre fertilise les terres où les animaux paissent2 ; il permet aux navires d’être halés et déchargés3. Enfin, une ville sise au bord du fleuve abrite des immeubles dont le rez-de-chaussée est occupé par des boutiques qui signalent la prospérité de l’économie urbaine (fig. 1)4. Pourtant, au cœur de la ville une boutique est close. Dans les sources littéraires, la fermeture des boutiques correspond à différents topoi. Elle peut exprimer la cessation des activités économiques en temps de crise5. Elle peut aussi présenter les boutiques comme des lieux de pauvreté et de sédition6. Toute l’ambiguïté de la place occupée par les boutiques dans l’économie et la société romaine est là. Il s’agit d’un phénomène central de l’économie, au point que les boutiques sont employées, par métonymie, pour désigner l’économie urbaine en général. Inversement, les boutiques sont décrites comme des lieux occupés par les couches inférieures de la population qui y travaillent et parfois y vivent et pour lesquelles les auteurs latins ne cessent d’exprimer leur mépris. Ce relief condense donc à lui seul les interrogations suscitées par la place occupée par les boutiques dans la ville.
2La définition de la boutique est à la fois architecturale et fonctionnelle. Selon J.-M. Pérouse de Montclos, il s’agit d’« un local au rez-de-chaussée, ouvert sur la voie publique destiné à une activité commerciale7 ». B. Gauthiez la définit comme « une partie d’un édifice abritant un commerce, accessible au rez-de-chaussée, placée à l’alignement et comportant généralement une devanture8 ». En histoire moderne et contemporaine, la constitution de la boutique en objet historique est traditionnellement associée aux travaux menés à la fin des années 1970 par A. Faure sur les épiceries parisiennes9. Il décrit alors la boutique comme un « continent vierge » de l’histoire. Au même moment, F. Braudel aborde les boutiques dans le deuxième tome de son ouvrage Civilisation matérielle, économie et capitalisme10. Il s’interroge alors sur la place occupée par les boutiques parmi les « rouages » de l’échange. Ainsi, F. Braudel indique que ce n’est qu’entre le XIe et le XIIIe s. que les boutiques – qui étaient alors des lieux de production – sont également devenues des espaces de vente concurrençant les marchés11. Suite à une croissance numérique et à une spécialisation accrue, les boutiques ont fini par occuper une place importante dans l’économie urbaine du XVIIIe s.12. Ces espaces commerciaux auraient donc joué un rôle actif dans l’émergence du capitalisme européen.
3L’exploration de ce « continent vierge » a connu en France un tournant à partir des années 2000 grâce à un colloque, « La Boutique et la ville. Commerces, commerçants, espaces et clientèles, XVIe-XXe siècle », organisé par N. Coquery, au Centre d’histoire de la ville moderne et contemporaine (CEHVI) à l’université François Rabelais de Tours13. Les contributions rassemblées tendent à démontrer que les boutiques permettent l’étude de thèmes bien plus variés que la seule économie. Ces espaces terminaux de l’échange jouent un rôle socioéconomique nodal qui permet d’étudier l’articulation entre différents phénomènes ou groupes d’individus. Les communications de ce colloque ont été consacrées à la concurrence, aux fraudes, à l’exposition des marchandises en vitrine et au lien social. L’attention s’est donc portée sur les relations qu’entretiennent les boutiquiers avec les autorités, les clients, les propriétaires, les investisseurs, mais également sur les relations qu’ils entretiennent entre eux. En conclusion de ce colloque, G. Crossick s’est attaché à souligner l’intérêt historique des boutiques. Il définit la boutique comme lieu de vente, d’achat, de crédit, de fabrication, de sociabilité, de confusion entre public et privé, de conflits, de construction de la culture de consommation, de tourisme et de loisirs14.
4Suite à ce colloque, certains historiens ont porté leur attention sur l’inscription des boutiques dans l’espace urbain. Par exemple, J.-F. Chauvard a étudié le comportement immobilier des commerçants dans le tissu urbain de Venise au XVIIe siècle, tandis que S. Descat a consacré un article à la place occupée par les boutiques dans les programmes d’embellissement de Paris et de Londres au XVIIe siècle15. De même, Cl. Walsh s’est attachée à analyser les liens entre propriétaires et marchands dans les galeries de Londres entre la fin du XVIIe et le début du XVIIIe siècle.16 Ces travaux ont pour but de définir le rôle joué par les boutiques et les boutiquiers dans la formation de territorialités urbaines.
5Plus récemment, N. Coquery a consacré un ouvrage aux boutiques de luxe de Paris au XVIIIe s. Elle y souligne la dimension sociale et culturelle de la boutique : « La boutique ne peut se réduire à l’échange économique. Son rôle dans la structuration de l’espace urbain, les sociabilités […], ou encore l’élaboration d’une image nouvelle de la ville […] est essentiel17 ». Elle met en évidence le rôle joué par les boutiques dans l’émergence du « shopping », dans le développement du tourisme, mais également dans la culture de consommation.
6À travers l’étude des relations qu’entretiennent les boutiques avec la ville et les différents groupes sociaux qui la composent, ces travaux mettent en évidence l’importance du rôle joué par les boutiques dans les évolutions des cultures et territoires urbains.
7Les boutiques jouent un rôle important dans le fonctionnement économique quotidien de la ville et correspondent à une réalité sociale importante des villes antiques. Toutefois, il s’agit d’un objet historique souvent négligé du fait de la place réduite qui lui est accordée dans les sources écrites, ainsi que de la rareté des études archéologiques qui lui ont été consacrées18. Le présent travail a pour objectif l’étude des boutiques à travers les sources archéologiques et archivistiques d’Ostie. L’ampleur de la surface mise au jour fait de ce site un observatoire privilégié de l’économie urbaine. Son histoire a été rythmée par les évolutions de ses fonctions portuaires, ainsi que par les relations qu’elle a entretenues avec la capitale. C’est pour toutes ces raisons qu’il faut s’interroger sur la place occupée par les boutiques dans cette ville.
8Occupant une part importante des paysages urbains mis au jour, les boutiques des villes antiques ont piqué la curiosité des archéologues dès la fin du XIXe siècle. Les études consacrées aux boutiques d’Ostie émergent durant les années 1910. L. Paschetto a consacré un chapitre aux « edifici di lavoro » dans sa synthèse sur Ostie en 1911 ; au sein des rapports de fouilles publiés dans les Notizie degli Scavi, G. Calza a proposé des conclusions de portée générale sur les boutiques mises au jour19. Puis, elles ont été étudiées comme une catégorie architecturale à part entière. Après les multiples travaux de G. Calza dédiés aux insulae et la monographie de G. Becatti consacrée aux domus, G. Girri s’intéresse aux boutiques d’Ostie20. Son travail consiste en un catalogue des boutiques d’Ostie débouchant sur une classification typomorphologique que l’archéologue utilise pour proposer une estimation de la population d’Ostie.
9Le travail de G. Girri a été par la suite utilisé pour intégrer les boutiques à des réflexions plus vastes concernant Ostie. En 1957, T. Kleberg publie un livre portant sur les restaurants et hôtels dans lequel il dresse une liste des commerces alimentaires de Pompéi et d’Ostie21. Cet inventaire est repris et complété par G. Hermansen qui s’est interrogé sur les particularités de ces commerces à Ostie, avant d’en étudier la localisation dans le tissu urbain22. En 1986, C. Pavolini traite des boutiques dans un article portant sur les transformations urbaines d’Ostie qui se sont amorcées à partir du IIIe siècle23. Une analyse des lieux de culte localisés dans les espaces de vie et de travail a été publiée en 1994 par J.T. Bakker24. Enfin, la dernière étude en date largement consacrée aux boutiques a été menée par J. DeLaine qui s’est interrogée sur le paysage commercial d’Ostie25.
10L’approche typomorphologique adoptée par G. Girri a été employée pour étudier d’autres sites. Trois années après sa publication, une approche analogue est adoptée par R.A. Staccioli au sujet des boutiques représentées sur la FormaUrbis26. Cette démarche est reprise, en 1986, par V. Gassner qui propose une typologie bien plus complexe des boutiques de Pompéi27. Cette méthode se trouve donc aux fondements des monographies consacrées aux boutiques des villes d’Italie. En revanche, l’ensemble des études ne portent que sur l’architecture et non sur le fonctionnement et les activités des boutiques. Ce cloisonnement ne tend à être dépassé que dans les plus récents travaux.
11L’archéologie de l’artisanat a pour but d’étudier une activité économique précise, sans que soit pris en considération l’espace où elle avait lieu. Les boutiques ne tiennent donc que rarement lieu d’objet d’étude à part entière. Ainsi les études sur les ateliers textiles d’Ostie ou de Pompéi ne sont pas le lieu d’une réflexion sur les boutiques mêmes28.
12La recherche des logiques de distribution spatiale des activités dans le tissu urbain est un axe de réflexion hérité des travaux de l’École de Chicago. L’idée selon laquelle la distribution spatiale des fonctions urbaines traduit une organisation sociale particulière fut appliquée aux villes romaines antiques par H. Eschebach et de R.A. Raper autour de la question du « land use29 ». Plus tard, R. Laurence et A. Wallace-Hadrill se sont interrogés sur les liens pouvant être établis entre la localisation de certaines activités dans la ville et l’existence d’un « social zoning » et d’un « moral zoning30 ». Depuis lors, ces démarches ont été délaissées au profit d’interrogations portant sur les facteurs présidant à la distribution des activités dans la ville31.
13Les boutiques occupent une place non négligeable dans les études consacrées à la question de l’investissement des élites urbaines dans le commerce. L’étude des relations topologiques qu’entretiennent ces locaux avec les maisons des villes romaines a constitué un axe de réflexion privilégié. Cette démarche a été surtout adoptée par l’école anglo-saxonne : les études d’A. Wallace-Hadrill, H. Parkins, F. Pirson, D.M. Robinson, figurent parmi les plus importantes32. Dans le cadre de réflexions portant sur l’habitat ou sur l’organisation et la gestion des biens immobiliers, ces archéologues et historiens se sont interrogés sur les moyens permettant d’identifier archéologiquement un lien de propriété. Ce dernier a été abordé par le biais des sources écrites – et surtout juridiques – par S.M. Treggiari dans le but de préciser le statut des tabernarii et par M.A. Ligios, N. Tran ou J. Dubouloz qui se sont interrogés sur les modalités concrètes de gestion des boutiques33.
14Un véritable décloisonnement se manifeste dans certains ouvrages depuis le milieu des années 2000. Ainsi, M. Flohr dans le cadre de son travail consacré au métier des foulons, s’est interrogé sur les techniques, mais aussi sur la place de ces individus dans l’économie et la société urbaines34. Dans sa thèse, N. Monteix a étudié les boutiques d’Herculanum sous des angles variés : aménagements, fonctions, insertion dans le tissu urbain à différentes échelles, dans le cadre d’une réflexion sur l’économie urbaine35. Ces travaux se fondent sur des approches plurielles variant les méthodes et les échelles d’analyse. Enfin, dans un récent livre dédié aux différentes formes de commerce dans la ville de Rome, C. Holleran étudie les types et les fonctions des boutiques à travers les sources écrites principalement36. Lorsqu’elle se réfère aux sources archéologiques, l’historienne tend à privilégier les vestiges de Pompéi pour analyser les réalités de l’Urbs.
15L’apport de l’ouvrage de G. Girri ne saurait être occulté ; il constitue une référence incontournable pour Ostie et plus largement pour les boutiques des villes romaines. Toutefois, cette étude se focalise sur les boutiques en tant que catégorie architecturale, une place très réduite est donc réservée à la question des activités qui y avaient lieu, de leurs évolutions et de leur insertion dans le tissu urbain, que ce soit à l’échelle de l’îlot, du quartier ou du site d’Ostie. Enfin, aucune donnée provenant des archives de fouilles n’a été utilisée dans le cadre de ce travail. Par ailleurs, le récent renouvellement des études consacrées aux boutiques, et plus largement de l’histoire urbaine et de l’artisanat amène de nouveaux questionnements et de nouvelles méthodes. Pour toutes ces raisons, une nouvelle étude générale des boutiques d’Ostie devait être entreprise. L’objectif de cette étude est donc de proposer une relecture plus approfondie des boutiques d’Ostie, en ayant recours à l’ensemble de la documentation à disposition, dont les archives inédites. Il s’agit surtout de mener une réflexion à portée plus vaste en essayant de déterminer la place occupée par les boutiques dans la ville d’Ostie. Celle-ci a été fortement marquée par les évolutions de ses fonctions portuaires. En ce sens, elle se démarque par un grand nombre de spécificités. Toutefois, Ostie est souvent présentée par les archéologues et historiens comme le miroir de Rome durant l’époque impériale37. C’est la raison pour laquelle l’étude des boutiques d’Ostie se doit d’établir un dialogue constant avec les locaux de Pompéi et d’Herculanum afin de mener une réflexion sur les spécificités de cette ville portuaire. L’exemplarité de Pompéi est actuellement remise en question. La ville constitue cependant un point de comparaison incontournable en raison de l’extension des zones mises au jour, ainsi que de la richesse des informations relatives aux boutiques qu’elle recèle.
16Il s’agit donc de mener une réflexion sur le rôle joué par les boutiques dans les transformations sociales, économiques et urbaines d’Ostie entre le Ier s. av. J.-C. et le Ve s. ap. J.-C. Pour répondre à cette interrogation, nous nous fondons principalement sur les sources archéologiques, mais également sur les archives. La consultation de ces dernières s’impose car elles recèlent de nombreuses informations pouvant compléter le travail de terrain, plus particulièrement pour les zones mises au jour avant les grandes fouilles de 1938-1942 qui ne sont que très peu documentées. Le choix des bornes chronologiques de ce sujet a été dicté par les données dont nous disposons au sujet des boutiques du site. Cet arc chronologique permet l’étude des boutiques durant les principales phases de mutation d’Ostie.
17Dès sa fondation, attribuée selon la légende à Ancus Marcius, Ostie a joué un rôle portuaire. La colonie avait alors pour fonctions principales le contrôle de l’embouchure du Tibre et l’exploitation des salines38. La fonction portuaire d’Ostie s’est affirmée lors des deux premières guerres puniques alors que la ville a joué un rôle actif dans le ravitaillement militaire39. La ville est alors intégrée dans un système composé de trois ports : Pouzzoles, Ostie et le port fluvial de Rome, situé près du quartier de l’Aventin40. Toutefois, les insuffisances de ce système face aux besoins croissants de la population de Rome requéraient de nouvelles installations41. C’est la raison pour laquelle Claude entreprit l’édification d’un bassin, quelques kilomètres au nord d’Ostie, sur le site de Portus42. Les problèmes posés par l’ensablement des navires dans ce port ne furent résolus que sous Trajan, avec l’édification d’un autre bassin43. Les évolutions des fonctions portuaires d’Ostie et de Portus eurent d’importantes conséquences urbaines, économiques et sociales sur la ville d’Ostie.
18Ostie est un centre commercial important qui se distingue par une grande variété d’édifices à vocation économique. Les structures portuaires d’Ostie sont encore méconnues ; seul un bassin a été identifié par M. Heinzelmann et A. Martin dans la partie occidentale de la ville44. De nombreux entrepôts sont localisés dans la ville, sans former pour autant de quartier spécialisé, témoignant d’une interpénétration des fonctions urbaines et portuaires dans la ville45. Le nombre et les dimensions de ces entrepôts font d’Ostie une ville à part. Les structures de production et de distribution se distinguent également par des singularités. Il existe à Ostie, plus que dans les autres villes connues d’Italie, de vastes ateliers dont les dimensions sont supérieures à 200 m2. Il s’agit principalement de boulangeries et de fouleries46.
19L’organisation sociale d’Ostie a été influencée par sa fonction portuaire. Ainsi, les importantes transformations du début du IIe siècle ap. J.-C. s’expliquent par la conjugaison de deux facteurs principaux. D’une part, la construction des ports de Claude et de Trajan à quelques kilomètres de la ville aurait déclenché un fort mouvement d’immigration47. D’autre part, Ostie a été reconstruite dans sa quasiintégralité suite à un exhaussement entrepris probablement dans le but d’assainir le sol de la ville48. À l’occasion de sa reconstruction et pour faire face à la croissance démographique locale, Ostie connaît, selon R. Meiggs, une véritable « architectural revolution49 ». Des immeubles collectifs sont alors édifiés en grand nombre. Leur forte présence n’est attestée par ailleurs, en Occident et sous le Haut-Empire, qu’à Rome50. Cette spécificité témoigne de configurations socio-économiques particulières. La prépondérance de ce nouveau type d’habitat, ainsi que la venue de nombreux immigrés se seraient conjuguées, selon R. Meiggs, pour provoquer un véritable bouleversement social d’Ostie, qu’il nomme « social revolution51 ». Selon cette thèse, les élites traditionnelles, dont la fortune provenait principalement de l’exploitation des terres, auraient alors été remplacées par ces nouveaux arrivants enrichis par le commerce. Si cette idée a été critiquée, il n’en demeure pas moins que l’importance des changements sociaux d’Ostie à cette époque fait l’objet d’un consensus52. Les affranchis semblent avoir été nombreux à Ostie et avoir occupé une place relativement importante, notamment par le biais des associations53. Ces dernières, comme dans d’autres centres commerciaux importants tels que Lyon, sont attestées en grand nombre : B. Bollmann dénombre une soixantaine de collèges à Ostie et dix-huit sièges associatifs54. Par ailleurs, plusieurs études ont mis en évidence l’importance des individus d’origine africaine et orientale dans la société55. Dans ses travaux consacrés aux différents cultes attestés à Ostie, D. Steuernagel a démontré la dimension cosmopolite de cette ville56.
20Au milieu du IIIe siècle, des mutations urbaines de différentes natures s’engagent. Elles sont traditionnellement interprétées comme des conséquences du transfert de la majorité des fonctions portuaires d’Ostie vers Portus. À partir du milieu de ce siècle, le processus de délabrement d’Ostie s’amorce. Les incendies et les écroulements de bâtiments sont surtout attestés dans les zones septentrionales de la ville, situées le long des quais, traduisant le probable déclin des activités portuaires57. Tandis que les immeubles collectifs cessent d’être édifiés ou tombent en ruines, des domus luxueuses sont construites dans la ville58. Ce changement traduit des transformations sociales importantes à Ostie, ainsi qu’un déclin démographique. Enfin, A. Gering a montré que durant l’Antiquité Tardive, les principaux axes de la ville sont ornés d’une nouvelle parure monumentale59.
21Dans le prologue, nous nous attacherons à mettre en évidence les mécanismes conduisant à l’identification des boutiques parmi les vestiges archéologiques et leur association aux « tabernae » mentionnées dans les sources textuelles. Il s’agit donc de définir les critères d’identification permettant la constitution du corpus des boutiques d’Ostie et d’explorer les possibilités de croisement avec les textes.
22La première partie est consacrée aux boutiques envisagées en elles-mêmes. Il s’agit de s’interroger sur les caractéristiques architecturales des boutiques et sur les processus présidant à leur édification et à leur évolution jusqu’à leur abandon.
23La deuxième partie concerne la place des boutiques dans l’économie d’Ostie. On s’interrogera sur les activités ayant lieu dans les boutiques, les évolutions des relations qu’elles entretiennent avec les autres espaces économiques et la place occupée par les boutiquiers parmi les gens de métier d’Ostie.
24Enfin, la dernière partie a pour objet les rapports qu’entretiennent les boutiques et le territoire urbain. Nous nous attacherons à mettre en évidence le rôle joué par les boutiques dans la constitution et les mutations du territoire urbain, à nous interroger sur les logiques de répartition spatiale des boutiques avant d’étudier les stratégies de séduction déployées par les boutiquiers pour assurer leur emprise territoriale.
Notes de bas de page
1 Le Gall 1944b, p. 38.
2 Le Gall 1944b, p. 52-55.
3 Le Gall 1944b, p. 39-52.
4 Le Gall 1944a, p. 118-137. Le paysage urbain représenté a été identifié à Albe-la-Longue, Rome, Portus ou Ostie (voir Le Gall 1944a et 1944b pour une synthèse sur les différentes hypothèses.).
5 Tite-Live, Ab urbe cond., 4, 31, 9.
6 Cic. Cat., 4, 8.
7 Pérouse de Monclos 2004, p. 474.
8 Gauthiez 2003, p. 424.
9 Faure 1979.
10 Braudel 1979.
11 Braudel 1979, p. 44-46. Le marché est ici entendu dans le sens de « market place ».
12 Braudel 1979, p. 52-56.
13 Coquery 2000.
14 Crossick 2000, p. 484-485.
15 Chauvard 2001 ; Descat 2002.
16 Walsh 2001.
17 Coquery 2011, p. 27.
18 Monteix 2010.
19 Paschetto 1911.
20 Calza 1915 ; Becatti 1948 ; Girri 1956.
21 Kleberg 1957.
22 Hermansen 1981.
23 Pavolini 1986, puis un article réactualisé : Pavolini 2002.
24 Bakker 1994.
25 DeLaine 2005.
26 A. Staccioli 1959.
27 Gassner 1986.
28 Pietrogrande 1976 ; Moeller 1976 ; Proto 2006 ; Macheboeuf 2008.
29 Eschebach 1970 ; Raper 1988.
30 Laurence 1994, Wallace-Hadrill 1995.
31 Ellis 2004.
32 Wallace-Hadrill 1994 ; Parkins 1997 ; Pirson 1997 ; Robinson 2005.
33 Treggiari 1980 ; Ligios 2001 ; Tran 2009 ; Dubouloz 2011.
34 Voir par exemple Flohr 2007 et 2011.
35 Monteix 2010.
36 Holleran 2012, p. 99-158.
37 Calza 1941, p. 21 ; Meiggs 1973, p. 238 ; Kockel 2001, p. 80-81.
38 Pour une synthèse sur les origines d’Ostie, voir Zevi 2001a et 2001b.
39 Tchernia 2000, p. 52.
40 Zevi 2001b, p. 117-118 ; Zevi 2001a, p. 272-277.
41 Tchernia 2000, p. 52.
42 Zevi 2001b, p. 119 ; Keay 2005.
43 Tchérnia 2000, p. 53 ; Zevi 2001c, p. 120 ; Zevi 2001d, p. 280.
44 Heinzelmann, Martin 2002. De nouvelles fouilles sont prévues dans ce secteur.
45 Rickman 1971 ; 2002 ; Gros 2001, p. 469-472 ; ainsi que les travaux menés sur les Grandi Horrea : Bukowiecki, Rousse 2007 et Bukowiecki, Monteix, Rousse 2008.
46 Les boulangeries d’Ostie ont été étudiées en détail par Bakker 1999, tandis qu’une monographie de Pietrogrande 1976 a été consacrée aux fouleries de la ville. Sur les fouleries, voir également les synthèses de De Ruyt 2001 et 2002.
47 Gering 2001.
48 Mouritsen 2001, p. 30.
49 Meiggs 1973, p. 133-146. Cette idée proposée par Meiggs doit être nuancée, car quelques immeubles étaient attestés auparavant. Toutefois, ils furent construits, dans leur grande majorité, durant la première moitié du IIe siècle. Sur les immeubles d’Ostie, voir Packer 1971 ; DeLaine 1999 ; 2004 ; Pavolini 2002b ; Gros 2001, p. 121- 135 ; Gering 2001.
50 P. Gros 2001, p. 121 ; voir également Packer 1969.
51 Meiggs 1973, p. 196-208.
52 La thèse de Meiggs a été critiquée par Mouritsen 2001 et Tran 2006, p. 68 et 388, mais elle est suivie par d’autres historiens et archéologues, tels que Pavolini 2005, p. 33-36.
53 Meiggs 1973, p. 217-224 ; Mouritsen 2001 et 2004 ; Pavolini 2005, p. 36-46 ; Tran 2006, p. 116-117.
54 Bollmann 1998 et 2001 ; Tran 2006, p. 37 ; Stöger 2009.
55 Sur les Africains d’Ostie, voir les travaux de Cébeillac-Gervasoni 1994 et 1996 ; sur les Orientaux, voir par exemple Floriani Squarciapino 1962 et Mouritsen 2004.
56 Steuernagel 2004, Steuernagel 2009.
57 Selon la thèse traditionnellement admise, une partie importante des activités d’Ostie est alors transférée à Portus : Février 1956, p. 326-328 ; Pavolini 1986 ; Gering 2004, p. 323-324, voir aussi Meiggs 1973, p. 83- 102. Toutefois, de nombreux indices montrent que le port d’Ostie est encore en fonction durant la période tardive. Voir par exemple Pavolini 2002, p. 326-327, mais aussi les travaux en cours de préparation de Bukowiecki concernant les entrepôts d’Ostie.
58 Becatti 1948 ; Pavolini 1986 ; Pavolini 2002 ; Gering 2001 et Gering 2004.
59 Gering 2004.
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