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Rome, archéologie et histoire urbaine : trente ans après l’Urbs (1987)

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Cyril Courrier
, 
Jean-Pierre Guilhembet
, 
Nicolas Laubry
, 
et al.

Postface

Pierre Gros

Full text

1Placé sous la double invocation de la commémoration du trentième anniversaire de la publication du colloque L’Urbs en 1987 et de la disparition de Ferdinando Castagnoli (1988), cet ouvrage, riche de 25 contributions, offre à ses auteurs l’occasion d’une réflexion épistémologique approfondie sur l’évolution des méthodes et les potentialités nouvelles offertes par les outils informatiques, sur l’actualisation des objectifs, dans un espace urbain envisagé sur la longue durée et dans une perspective dynamique, et naturellement aussi sur la portée historique et archéologique de quelques-uns des principaux résultats acquis au cours de ces trois dernières décennies dans la recherche sur la Rome antique. Le champ de l’investigation s’est, dans le même temps, singulièrement élargi, puisqu’il va de la protohistoire à la période chrétienne.

2Les auteurs appartiennent aux générations qui s’illustrent en ce moment dans ce domaine et, même en ce qui concerne les plus jeunes, ce sont déjà des spécialistes confirmés qui ont derrière eux des travaux importants. Sous l’égide des organisateurs auxquels on doit de nombreuses études qui ont fait date dans plusieurs domaines, ils viennent, pour certains, de secteurs comme l’étruscologie, ou ont parfois d’abord œuvré dans des contextes différents (Brescia, par exemple), mais ils maîtrisent tous les problématiques complexes de la topographie historique de Rome, avec une conscience aiguë des renouvellements induits par les techniques récentes et les questionnements empruntés à d’autres champs disciplinaires.

3Particulièrement riche de sens nous a paru la mise en œuvre de concepts qui sont de nature à renouveler les problématiques liées à l’espace urbain et plus encore à son appréhension. La notion de périphérie et la réflexion relativement nouvelle sur la perméabilité des marges modifient radicalement la perception de l’espace habité en établissant une hiérarchie différente de celle qui était traditionnellement admise entre les secteurs résidentiels et monumentaux. De même, la notion de programme, souvent invoquée par le passé mais plus rarement examinée dans sa réalité visuelle et ambulatoire, voire processionnelle, est devenue l’un des facteurs essentiels de la compréhension des projets urbanistiques de l’époque impériale, et de leur relation avec les réalités rémanentes d’un passé magnifié ou recomposé pour les besoins de la cause. La généralisation des moyens numériques, auxquels nul n’avait encore accès lors du colloque de 1987 a, il faut le dire, ouvert des voies insoupçonnées pour ce type de lecture où la cartographie urbaine peut être traitée à la fois comme un circuit dynamique et comme un palimpseste : pour la première fois dans l’histoire de la recherche archéologique, une technique de représentation, si l’on excepte les progrès accomplis dans les méthodes de relevé et la mise au point des axonométries ou des « écorchés », accède au statut de moyen d’investigation, ce qui constitue une véritable conversion épistémologique. L’introduction de la dimension temporelle dans l’image de la ville, et plus seulement dans les schémas stratigraphiques, devient dès lors non seulement possible mais indispensable, comme l’a montré de façon magistrale l’étude pionnière de l’îlot de la Crypta Balbi. Certes, la profondeur temporelle et l’évolution des typologies fonctionnelles ou symboliques qu’elle impliquait n’avaient pas été ignorées dans les Actes du premier colloque sur l’Vrbs, mais les avancées en ce domaine demeuraient limitées, comparées à celles auxquelles nous font assister plusieurs contributions du présent ouvrage.

4On rendra d’emblée hommage aux organisateurs de cette rencontre : les quatre éditeurs scientifiques, qui sont tous des acteurs de premier plan de ce fécond renouvellement, ont su, avec la fermeté et l’intelligence qu’ils ont tous déployées depuis longtemps dans leurs publications respectives, retenir et regrouper dans des cadres thématiques aussi pertinents qu’efficaces les représentants les plus autorisés des tendances les plus actuelles.

5Après une ample introduction de Manuel Royo, qui constitue la prolongation de celle qu’il avait écrite pour la réédition du volume de 1987 dans les Classiques de l’École française de Rome, et définit clairement les enjeux de cette nouvelle entreprise, suivi d’ un hommage à F. Castagnoli, rédigé par M.P. Muzzioli, qui nous fait littéralement suivre la démarche de ce savant, la première partie du livre examine le renouvellement de la lecture des sources, thématique d’actualité s’il en est, car le questionnement sur les éléments textuels dont dispose l’archéologue est aujourd’hui au centre de nombreux débats.

6Cette section est magistralement ouverte par D. Palombi, qui insiste avec raison sur la contextualisation des citations littéraires : dans la mesure où elles n’ont jamais un lien direct avec les vestiges auxquels nous sommes confrontés, elles doivent être replacées dans le cadre d’où elles sont souvent arbitrairement tirées pour garder un minimum de pertinence. De ce point de vue, la réalisation du Lexicon topographicum Urbis Romae sous la direction de E.M. Steinby, avec la multiplication exponentielle des entrées et l’analyse critique des références innombrables qu’elles contiennent, les ouvrages de F. Coarelli qui partent toujours d’un recensement systématique et raisonné de toutes les données littéraires exploitables, et débouchent souvent sur une « déconstruction » de la doxa jusqu’ici admise, l’attention portée par P. Wiseman et A. Ziółkowsky à la forme et à la signification de l’espace urbain constituent autant d’opérations qui ont radicalement modifié notre rapport aux textes antiques en dégageant des impératifs méthodologiques désormais incontournables. Le volet des inscriptions est ensuite présenté par G.L. Gregori et S. Orlandi, qui, à partir de quelques exemples de découvertes ou de recensements épigraphiques récents (Meta sudans, mausolée d’Auguste, entre autres) montrent comment les informations qui se peuvent tirer du texte sont inséparables de celles qui proviennent des conditions de leur trouvaille et plus encore des caractéristiques de leur support. L’attention portée aux séquences chronologiques et à la répartition topographique de séries comme celle des diplômes militaires a permis de surcroît, à la suite des travaux de F. Coarelli encore, et de A. Pangerl et de W. Eck, d’élever ces pièces répétitives et nominatives au statut de document de topographie urbaine. Pour les domus, les quelque 545 entrées du LTUR II et V ont extraordinairement enrichi la liste des propriétaires de domaines privés dans l’Vrbs, et permettent dans le meilleur des cas de préciser l’ordonnance et la densité de certains quartiers résidentiels entiers comme le Celius. Il en va de même pour les lieux de l’artisanat et du commerce, qui avaient fait l’objet d’observations précieuses dans le volume de 1987 : leur nombre, leur localisation et leur organisation apparaissent maintenant avec plus de clarté.

7À partir de ces deux études fondamentales, les contributions de cette première partie se recommandent par leur efficacité et leur complémentarité : A. D’Alessio retrace à grands traits les principales étapes de la recherche de ces trente dernières années, insistant avec raison sur ce que nous avons appelé la « révolution coarellienne », et dégageant l’apport des artisans principaux du progrès non seulement de la connaissance, mais aussi des méthodes de prise en compte de l’espace urbain. C’est toute la sémiotique de l’archéologie stratigraphique qui est valorisée ici, avec une pondération nouvelle entre la connaissance archéologique et la connaissance historique, dont on commence seulement à évaluer l’intérêt. A. De Cristofaro évoque ensuite l’énorme impact des fouilles préventives avec la multiplication exponentielle des découvertes, et l’approche novatrice qui en a résulté, avec le soutien d’analyses stratigraphiques toujours plus exigeantes, qu’il définit comme la décodification iconologique des programmes urbanistiques en prenant quelques exemples significatifs. La réflexion sur la « contemporéanité du non contemporain », centrée sur la rémanence et l’exploitation politique ou religieuse des primordia Vrbis, constitue de notre point de vue l’un des axes majeurs de la recherche la plus actuelle sur la Ville. F. de Caprariis établit de son côté le bilan des travaux sur la Forma Vrbis depuis l’editio princeps de 1960, en rendant à E. Rodríguez Almeida la place prépondérante qu’il occupe en ce domaine. Il montre, à propos des Saepta entre autres, comment une revisitation critique de ce document si ambigu peut faire avancer la recherche. La contribution de P. Liverani, très originale, ouvre le débat sur les sources graphiques, particulièrement celles de la Renaissance, soulignant l’importance des compétences historico-artistiques nécessaires à l’archéologue de la Rome antique, et démontrant l’intérêt de la démarche à propos de la curie et du « temple du Soleil ». La section se clôt sur une présentation des ressources de la restitution virtuelle centrée sur le plan de Rome de Bigot conservé à Caen (P. Fleury, S. Madeleine).

8La deuxième partie, consacrée aux découvertes, est un peu frustrante pour le lecteur, dans la mesure où, les organisateurs l’expliquent bien, il était impossible de dresser un bilan complet de l’action accomplie sur le terrain au cours de ces trente dernières années. L’approche dite synthétique, par zone et par période, qui a été retenue, entraîne forcément des choix et des exclusions. C’est ainsi, par exemple, qu’aucune allusion n’est faite, pour ne citer qu’un cas, à l’une des découvertes les plus étonnantes de ces décennies, celle de la cenatio rotunda du palais de Néron, et des débats, pourtant fort instructifs du point de vue méthodologique justement, qu’elle a suscités. Plus généralement, il est remarquable qu’aucun des acteurs majeurs de ces décennies si fécondes (directeurs des fouilles des forums impériaux, par exemple), n’apparaisse parmi les auteurs de ce volume. Mais ce parti s’explique sans doute par la volonté de prendre des distances et de mieux juger la portée épistémologique et les contenus historiques des découvertes en question.

9Saluons d’abord le bel article liminaire de N. Purcell sur les relations topographiques et fonctionnelles entre Forum et Capitole au cours de la période médio-républicaine, où l’on mesure l’impact du modèle hellénique sur le paysage civique et religieux. La longue étude de J. Pflug sur les palais impériaux du Palatin est ambitieuse, en ce qu’elle tente de rendre à la phase flavienne son importance fondamentale, et à montrer la continuité qu’elle entretient, quoi qu’on en ait pu dire, avec la domus Aurea. Les restitutions partielles en 3D sont ici particulièrement suggestives, et permettent de mettre en lumière la continuité du projet global, en dépit de la diversité apparente des programmes dynastiques. La synthèse sur l’Aventin, due à P. Quaranta et à A. Capodiferro est digne de considération, en dépit de sa brièveté, en ce qu’elle montre comment la recherche stratigraphique permet de corriger partiellement le contraste entre les données textuelles qui placent sur cette colline « plébéienne » un grand nombre d’édifices cultuels, et la réalité archéologique, qui n’y a relevé jusqu’ici que des secteurs résidentiels. Particulièrement remarquable, par la prise en compte de l’intégralité des données exploitables, depuis les relevés de Giovanni Battista da Sangallo jusqu’aux investigations les plus récentes de F. Filippi, entre autres, est l’étude d'A. Ten, qui débouche sur l’identification d’un grand édifice à l’est du Panthéon, de nature à conforter, nous semble-t-il, notre hypothèse d’un « forum » impérial hadrianéen dans ce secteur. C’est en fait une reprise fondamentale de l’analyse en son temps fondatrice de G. Gatti, qui doit être ici envisagée. L’article de C. Chillet sur l’espace collinaire, conçu à la fois, paradoxalement, comme définitoire de l’espace urbain et comme faiblement concerné, jusqu’à une date relativement tardive, par l’urbanisation proprement dite, jette un jour nouveau, par la profondeur de sa visée à la fois orographique et historique, sur un phénomène spécifique à l’Vrbs, abordé par le livre de Coarelli mais non encore évalué dans toute son ampleur. A. De Santis établit de son côté l’importance d’une approche « contextualisée » des données protohistoriques. Dépassant les querelles d’attribution ponctuelle de ces vestiges nées de la tradition textuelle, varronienne essentiellement, elle montre, à partir des découvertes anciennes de G. Boni, et des observations les plus récentes, l’incidence, sur les premiers établissements, de la discontinuité morphologique du site et de ses relations étroites avec le Latium. La section se termine par une réévaluation de la Rome chrétienne et tardo-antique due à deux articles, respectivement de L. Spera et de R. Santangeli Valenzani : après les travaux de Krautheimer, la première met en lumière les apports de la vision globale et dynamique de l’évolution urbaine pour l’appréciation du rôle et de l’évolution des monuments liés à la christianisation de l’espace. Le second, à qui l’on doit le beau volume sur la Ville du haut Moyen Âge en collaboration avec R. Meneghini, montre comment la vision du paysage urbain et de la démographie de la Rome tardo-antique, par ailleurs ignorée par le volume de 1987, s’est amplifiée et modifiée dans ses grandes lignes grâce à la multiplicité des recherches de terrain de ces dernières décennies. 

10La troisième section, consacrée aux nouvelles approches de l’histoire urbaine envisagée dans son contexte historique, comporte huit contributions qui comptent assurément parmi les plus novatrices. Elles s’inscrivent, bien que son titre ne l’indique pas clairement, dans une orientation qui tend à définir, du point de vue des usagers en quelque sorte, les caractères saillants de la vie urbaine dans ses aspects les plus concrètement vécus, et illustre pour le cas spécifique, et évidemment unique en son genre, de la Rome impériale, un mode d’approche que certaines réunions internationales ont déjà partiellement exploré, comme par exemple le colloque qui s’est tenu à Munich en 2012, et qui a été publié sous le titre Urbanitas. Urbane Qualitäten, Mayence, 2017. A. Bertrand et S. Estienne, en substituant à la notion classique de topographie sacrée celle de paysage religieux, dégagent efficacement les réseaux qui se tissent à travers l’espace urbain entre les diverses zones cultuelles. Particulièrement riche de potentialités se révèle en ce domaine l’analyse des rites processionnaires. Avec les nouvelles découvertes, la ville ne se conçoit plus seulement comme une grille planimétrique sur laquelle se situent les temples ou les autels, mais comme un tissu polarisé par les lieux de culte. De ce point de vue, le rituel des jeux séculaires de 17 fait l’objet d’une relecture significative. C. Rosillo-López et F. Pina Polo, tous deux spécialistes de la Rome républicaine et de la période triumvirale, prennent en considération les conditions de la participation civique du peuple romain, en rouvrant avec vigueur l’examen du Comitium, à propos duquel ils contestent la restitution des phases et des formes de cet espace que F. Coarelli considère comme un templum, en niant toute relation avec les précédents grecs. Ces positions tranchées ne contribuent pas à clarifier le problème, et donneront sans doute lieu à des contestations, mais elles sont solidement argumentées. Soulignons de surcroît que pour la première fois à notre connaissance, dans la seconde partie de l’article, la ville, avec son réseau de rues, de carrefours, de tavernes et autres lieux de la convergence populaire, est envisagée comme le lieu et le vecteur de la diffusion des informations politiques, rumeurs ou nouvelles avérées (ce que Cicéron définit comme la uarietas sermonum opinionumque). Le phénomène ne se termine pas avec la République, mais se confirme, sous des formes qui peuvent être très différentes, sous le Principat et au fil des dynasties impériales. Le très bel article d'E. Rosso affronte les modalités de la célébration du pouvoir sous le Haut-Empire, en examinant non seulement les programmes monumentaux et décoratifs développés par les empereurs mais aussi et surtout les spécificités propres à chaque espace de représentation, envisagé dans son acception catégorielle ou sectorielle. Les moyens de la communication politique à travers les cortèges, leurs circuits et leur composition, l’exploitation des pôles mémoriels, la variété et le nombre des commanditaires engagés dans ces opérations suscitent autant de questionnements nouveaux, et dégagent les potentialités inédites de nombreux monuments qui ne sont que la pétrification d’actes politiques et religieux très concertés. Les aspects les plus concrets de la vie de l’Vrbs sont analysés par C. Bruun, puisque son papier traite de l’approvisionnement en eau et de l’importation des marchandises par la voie fluviale. Les découvertes récentes effectuées dans les alentours immédiats de la ville et une connaissance plus précise des conditions de navigation depuis Ostie permettent à ce spécialiste reconnu de ces questions une meilleure appréciation de la mise à disposition de toutes ces ressources, et ont aussi des incidences sur l’évaluation de la démographie pendant les premiers siècles de notre ère, grâce à un examen approfondi des zones portuaires et de leurs capacités d’accueil. Le secteur examiné par C. Davoine paraît à première vue moins directement sensible, dans cette approche concrète de la vie urbaine, mais la casuistique des sources juridiques éclaire, pour qui se donne les moyens de l’exploiter, le rôle des interactions du pouvoir et des habitants dans le fonctionnement quotidien du tissu urbain et de son évolution, particulièrement en ce qui concerne les chantiers de construction, le remploi des matériaux ou l’évacuation des déchets. Les deux communications suivantes se donnent pour tâche de suivre le citadin en tant qu’habitant (C. Courrier, J.-P. Guilhembet) et en tant que travailleur, artisan ou commerçant (N. Tran). La compétence de ces auteurs est un gage éminent de la qualité de leurs articles, et de fait, la première de ces études comble avec bonheur une lacune saillante du livre de 1987, qui ne réservait qu’une place restreinte et assez conventionnelle à l’aspect résidentiel de la Ville : elle affronte en termes nouveaux les problèmes du logement, et particulièrement de celui des éléments « populaires ». Même si les échantillons archéologiquement exploitables, qui certes se sont sensiblement accrus au cours des dernières décennies, restent peu représentatifs, ils autorisent une lecture plus précise des conditions de la vie dans les logements urbains, et de nouveaux questionnements améliorent de ce point de vue l’exploitation de la Forma Vrbis. Les recherches de J.-P. Guilhembet sur la maison dans la ville et celles de C. Courrier sur la plèbe trouvent ici un développement remarquable. La thématique du travail dans la ville, abordée dès 1992 par S.R. Joshel dans un livre qui n’a pas toujours reçu l’audience qu’il méritait, est reprise dans la seconde étude, par celui à qui l’on doit déjà une riche réflexion sur les associations professionnelles et les métiers dans la Rome impériale et à Ostie, avec une attention particulière aux tabernae et aux horrea. Les statistiques sur les métiers du bâtiment, établies pour Rome par J. DeLaine, reprises dans la perspective d’une meilleure visibilité des travailleurs, sont concrètement remises en situation dans un contexte en perpétuelle évolution. Enfin l’introduction de Rome dans une « histoire des sens », par A. Vincent, illustrée récemment par les ouvrages de E. Betts, par exemple, est proposée ici comme une piste à explorer, qui devrait contribuer à rendre l’espace urbain plus vivant dans son « ressenti » quotidien, celui des sons et des odeurs, particulièrement. Le modèle « typochronologique » dont la mise en place est esquissée introduirait dans cette démarche la dimension temporelle, permettant d’éviter une uniformisation abusive des situations. La combinatoire entre les événements sensoriels, les espaces et les moments concernés, rendrait indubitablement à la ville, que nous imaginons trop souvent figée dans son immobilité monumentale, une fluidité vivante, au fil des saisons et des heures.

 

11Il ressort de ce bref survol, dû à un survivant de l’équipe qui avait organisé le colloque initial, que l’ouvrage est dans sa totalité de haute tenue. Malgré la diversité des contributions, qui fait du reste toute sa richesse, aucune rupture de niveau n’y est sensible. Chacun des auteurs a su, en s’adaptant pleinement au projet global, donner le meilleur de son savoir et de son expérience professionnelle, dans des textes qui déroulent sous une forme toujours lisible et généralement agréable un propos complexe et souvent novateur, auquel s’ajoutent des bibliographies très développées, qui rendront les plus grands services. L’ensemble rend d’autant mieux compte du progrès des investigations et de l’élargissement des topiques, ainsi que de l’approfondissement et de la diversification des méthodes d’approche et de lecture des textes comme des vestiges, qu’il est rédigé en grande partie, nous l’avons dit, par des chercheurs dont on voit bien qu’ils vont assurer une relève aussi brillante qu’efficace, tous ayant déjà, d’ailleurs, donné des preuves de leur talent et de leur savoir dans des publications antérieures.

12                                                      Aix-en-Provence, mars 2021

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