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    Publications de l’École française de Rome
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    Plan

    Plan détaillé Texte intégral Habiter la Ville : une histoire récente et une apparition timide dans le colloque de 1985 Du corpus aux problèmes : une mise à jour remarquable mais un maigre renouvellement documentaire De la Ville au logement Perspectives : du logement à la Ville et au monde Bibliographie Notes de bas de page Auteurs

    Rome, archéologie et histoire urbaine : trente ans après l’Urbs (1987)

    Ce livre est recensé par

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    Table des matières

    Habiter Rome (IIe s. av. J.-C.-IIe s. ap. J.-C.)

    Cyril Courrier et Jean-Pierre Guilhembet

    p. 361-376

    Résumés

    Après avoir rappelé la place réduite dévolue aux questions liées à l’habitat lors du colloque de 1985 et le contexte historiographique dans lequel s’inscrivait ce dernier, pour les résidences aristocratiques comme pour l’habitat populaire, il est proposé un inventaire synthétique des chantiers, documents ou corpus nouveaux des trois dernières décennies. L’accent est surtout mis sur les relectures et le renouvellement des interprétations : nouvelles approches des Régionnaires, critiques de la vision dystopique, insertion du logement dans son contexte urbain (topographique, sociologique), analyse de l’espace vécu. Sont enfin esquissées des perspectives de recherches multiscalaires, du logement au monde en passant par le quartier et la Ville, fondées sur le concept d’habiter tel qu’il a été développé en géographie urbaine.

    After recalling the minor importance given to housing issues at the 1985 colloquium and the historiographical context this scientific meeting was embedded in about aristocratic residences as well as popular housing, a synthetic inventory of new excavations documents or corpora over the past three decades is put forward. Rereading and renewal of interpretations are highlighted: new approaches about Regionaries, criticism of the dystopic vision, insertion of housing in its urban context (topographical, sociological), analysis of the lived space. Based on the concept of « dwelling » as developed in urban geography, multiscalar research perspectives are finally outlined, from the house to the world, through the neighbourhood and the City.

    Entrées d’index

    Mots-clés : Rome, domus, insulae, logement, quartiers

    Keywords : Rome, domus, insulae, housing, neighborhoods

    Note de l’auteur

    En raison des contraintes éditoriales, ne seront évoquées ici que les références bibliographiques les plus importantes et, pour un même auteur, l’étude la plus significative et/ou la plus récente, à charge pour le lecteur de retrouver, à partir de ce point, les travaux antérieurs. Seules les publications mentionnées dans l’article sont reportées en bibliographie finale.

    Texte intégral Bibliographie Notes de bas de page Auteurs

    Texte intégral

    E questa città è il teatro della vita effimera e mediocre che vivono gli uomini di quella umana condizione che sono gli epigrammi di Marziale, e ne diviene una cornice quasi indispensabile. E cosi anche noi siamo introdotti nell’immensa città (la sua vastità rende faticosa la vita : maxima Roma terit), per i teatri, le terme, i portici, i macelli, i conclavia, sui ponti e nei clivi dove siedono in attesa i mendicanti, fino nelle abitazioni, nella casa del ricco e nella cella pauperis. Le case dei ricchi hanno fin cento colonne, e bagni splendidi dei marmi più rari, e gli atri sono decorati in tarsie marmoree; alcune anzi sono vere e proprie ville in città (rus in urbe). Ma per i poveri a Roma non si può vivere : l’insula, la casa d’affitto ad abitazione intensiva, costruita in molti piani, nelle strade strette (si potrebbe quasi darsi la mano attraverso le finestre), non protegge dai rumori della città (nec quiescendi in urbe locus est pauperi1).

    1Ainsi commençait l’article que F. Castagnoli avait consacré en 1950 à la Rome de Martial. Le savant italien, connaisseur unique des sources littéraires relatives à la « topographie de la Ville », passé maître dans l’art de leur exploitation et de leur mise en perspective avec les autres champs de cette discipline qu’il contribua tant à développer, avait senti, longtemps avant les travaux systématiques d’E. Rodríguez Almeida2, le potentiel heuristique de l’épigrammatiste flavien. L’œuvre de Martial fourmille en effet de notations uniques, non seulement sur les lieux de Rome, mais aussi sur la vie quotidienne qui les animait. La vie dans la maison, l’univers familial, le cadre de travail ou les relations de voisinage y sont « croqués », non sans l’application de filtres poétiques ou satiriques trop souvent négligés par l’historiographie actuelle. Sous cet angle, comment ne pas rappeler la sincère admiration que C. Nicolet, figure inspiratrice du colloque de 1985, portait alors aux travaux des spécialistes de la topographie romaine ? Cette admiration transparaît, par exemple, avec force dans la préface qu’il donna au petit ouvrage d’E. Rodríguez Almeida consacré notamment à Martial, publié en 2001. Il y loue en effet la méthode et ses bénéfices : « Seuls les résultats cumulatifs de cette patiente exploration, au ras du sol, des pavements des rues, des escaliers qui assiégeaient les sept collines, des boutiques ou des palais nous permettent d’entrevoir cette restitution intégrale d’un monde antique à la fois très proche et très dépaysant, et que nous risquions d’avoir perdu à jamais3. » Cette science du décodage, appuyée sur une érudition achevée, rappelle que l’on ne saurait reprendre sans précaution la bipartition quelque peu manichéenne de Martial entre maison du riche et maison du pauvre. Précisément, ce sera l’objectif de ce chapitre : au-delà d’un panorama historiographique, essentiellement depuis le milieu des années 1980, qui insistera sur les avancées majeures ou les zones d’incertitude des modes d’habiter la Ville, entre les lendemains de la deuxième guerre punique et l’époque sévérienne (en laissant de côté l’architecture palatiale à proprement parler, architecture du pouvoir s’il en fût), il cherchera à sortir du sacrosaint binôme canonique domus/insula dont la remise en cause et la réinterprétation – sans faire l’unanimité à ce jour4 – ont animé une partie des recherches récentes.

    Habiter la Ville : une histoire récente et une apparition timide dans le colloque de 1985

    2L’histoire de ce que l’on appelle aujourd’hui les modes d’habiter ou, pour le dire autrement, la façon dont les individus et les sociétés pensent, définissent et utilisent les espaces domestiques, procède d’un champ récent de nos études. Apparu au début des années 1990 chez les géographes et les historiens de l’urbain pour associer l’analyse du « genre de vie », c’est-à-dire l’environnement matériel des sociétés, et celle du « mode de vie », i.e. les comportements domestiques et les représentations individuelles et collectives qui les sous-tendent, le concept constitue, depuis, une voie essentielle, régulièrement enrichie, pour qui veut comprendre les relations des sociétés à leurs lieux de vie, en dépassant « les notions de résidence, logement, habitat, voire d’habiter, qui réduisent à une seule dimension – si importante soit-elle – le rapport sensible de chacun à tous les lieux marqués par la présence physique5 ».

    3En tant que telle, l’acclimatation de ce concept à l’histoire des pratiques urbaines dans la mégapole romaine fut assez rapide6, notamment parce qu’elle s’inscrivait alors dans un courant d’études (la nature et les fonctions de l’architecture domestique) dont l’apparition doit beaucoup à un article stimulant de F. Coarelli rapprochant architecture privée et architecture sacrée, puis, d’une part, au chapitre pionnier, significativement intitulé Vie privée et architecture domestique. Le cadre de vie des élites africaines, qu’Y. Thébert donna pour le premier tome, dirigé par P. Veyne, de l’Histoire de la vie privée, et, d’autre part, aux travaux, quasi simultanés, d’A. Wallace-Hadrill sur la « structure sociale de la maison romaine7 ». La date de parution de ces trois études explique la relative discrétion de la réflexion sur le rapport aux agencements domestiques (hors complexes palatiaux) dans le colloque Urbs. Dans leurs interventions, T.P. Wiseman et G. Carettoni s’attachèrent certes, dans un premier moment, à dégager les caractéristiques de la « public image » des résidences aristocratiques pour l’un et l’inventaire des domus du Palatin pour l’autre, mais leur centre d’intérêt majeur était bien l’émergence du palais impérial8. De ce fait, H. Broise et V. Jolivet d’un côté, C. Pavolini de l’autre, furent les seuls à véritablement aborder le thème du logement, respectivement sur les jardins de Lucullus pour les uns, sur les fouilles de piazza Celimontana (1984-1988), où trois immeubles d’habitation collective d’époque flavienne, du reste très furtivement mentionnés (ils furent décrits plus en détail ailleurs), commençaient à être mis au jour, pour l’autre9. Mais ces deux contributions, auxquelles on pourrait sans doute adjoindre quelques considérations de P. Zanker sur le Stadtbild10, sont aussi significatives d’un moment où l’approche dominante était fondée sur la matérialité, la structure et les ornements de la maison, et non sur la fonction, la représentation et la circulation à l’intérieur de l’espace domestique. Les publications étaient alors de nature essentiellement archéologique et les efforts tournés vers l’élaboration de typologies.

    4On relèvera encore que les contributions d’Y. Thébert et A. Wallace-Hadrill portent sans ambiguïté sur les « riches demeures urbaines », dans un contexte historiographique (les années 1980-1990) marqué par un retour à la « maison noble » et, plus particulièrement, aux hôtels des notables de la France moderne (on songe, pour Paris au moins, aux travaux de J.-P. Babelon et, surtout, de N. Coquery11). Dans ce cadre, l’histoire de ce que l’on appellera, par jeu d’oppositions commodes, le logement « plébéien » révèle un décalage chronologique important, qui montre aussi le retard accusé par l’histoire ancienne dans ce champ d’études. Si l’on peut faire remonter à la décennie 1970 une meilleure prise en compte, par les fouilleurs (comme J.E. Packer12), des logements dits « atypiques », c’est-à-dire ceux des couches « moyennes » et « populaires13 », l’accumulation de matériaux n’a pas immédiatement donné lieu à une vision plus nuancée de la place du domicile dans la vie plébéienne. En schématisant, on peut dire qu’au moment où paraissaient, pour d’autres périodes, des travaux aussi importants que The Uses of Literacy de R. Hoggart (œuvre d’un sociologue il est vrai), Le peuple de Paris de D. Roche, Bobigny, banlieue rouge d’A. Fourcaut ou Espace urbain et habitat à Rome du Xe à la fin du XIIIe siècle d’É. Hubert14, l’antiquisant se référait encore à des ouvrages « antiquaires » comme celui de J. Carcopino15, où la question de l’espace domestique, saisie au prisme d’une opposition factice (la modernité ou l’archaïsme des logements, selon une problématique déconnectée de toute perspective sociologique, abordée – de manière révélatrice – dans un autre chapitre sur la famille), était en réalité largement absente, ou à un article d’A. Scobie qui, dans le prolongement d’une première étude de Z. Yavetz parue en 1958, avait réduit l’analyse à une description essentialiste ou misérabiliste des modes et des conditions de vie16. Le renouvellement de ce secteur de l’histoire romaine est plus tardif et s’inscrit notamment dans le sillage de deux programmes chers à C. Nicolet, à l’issue de son « tournant spatial17 », La mémoire perdue (1990-1993, pour s’en tenir à sa direction18), et, surtout, Mégapoles méditerranéennes (1992-199619), qui permirent de mieux prendre en compte la question des structures de la ville et de relire un corpus de sources qui, en la matière, n’a guère augmenté depuis trente ans.

    Du corpus aux problèmes : une mise à jour remarquable mais un maigre renouvellement documentaire

    5En ce domaine, la grande affaire a été constituée par la mise en œuvre puis la réalisation, en un temps remarquablement réduit, du Lexicon topographicum Urbis Romae. L’impact dans le domaine qui nous intéresse est évidemment et, pourrait-on dire, inévitablement asymétrique : l’entreprise de systématisation des connaissances a été assurément moins favorable aux « insulae » qu’aux domus. Pour ces dernières, la publication du LTUR II (1995), puis les compléments apportés par les addenda du tome V, ainsi que par les multiples recensions auxquelles ont donné lieu les différents volumes, ont constitué un enrichissement qui a largement outrepassé l’apport du dictionnaire topographique de Richardson20. La mise à jour du CIL VI comme l’inventaire des fistules de plomb (dont la compréhension a été favorisée par les travaux de C. Bruun21) ont donné une ampleur qui confine à l’exhaustivité de la documentation actuellement disponible et permettent de disposer d’un corpus étoffé, une vraie base de données, sur lequel on peut travailler de manière non subjective22. Au même moment, sur le plan architectural et morphologique, P. Gros faisait le point sur le renouvellement des connaissances en matière d’habitat et, pour les quatre siècles évoqués ici, insérait les exemples romains dans un contexte élargi, italien et impérial23. Ce sont ces avancées majeures qui, permettant de mettre en série la documentation, ont ouvert sur des problématiques liées non plus seulement à l’image publique, au prestige socio-politique, à la domus comme lieu de mémoire, mais aussi aux formes de concurrence, de compétition et de surenchère, aux différentes modalités d’insertion de la maison dans la vie politique et sociale, finalement à son analyse, non pas seulement en tant que cadre spatial mais aussi en tant qu’acteur de la Ville (voir infra).

    6En revanche, aucun document n’est vraiment venu bouleverser nos connaissances. Si le sénatus-consulte sur Pison père (AE, 1996, 885) contient quelques lignes captivantes sur le sort des constructions que ce dernier avait établies entre plusieurs de ses domus à proximité ou au-dessus de la porta Fontinalis, c’est surtout le « quartier cicéronien » du Palatin qui a retenu l’attention, à partir du chantier d’A. Carandini et de son équipe au milieu des années 1980. La réinterprétation des vestiges du bas du « cliuus Palatinus » et leur attribution à la maison d’Aemilius Scaurus ont relancé l’intérêt pour la relecture du corpus cicéronien et suscité, sur un quart de siècle, une abondante bibliographie dans laquelle il est totalement impossible d’entrer par le menu24. Le second chantier qui a le plus retenu l’attention est celui de la zone de la Meta sudans et des Curiae Veteres, lieu de naissance du futur Auguste25, auquel on peut ajouter, pour mémoire, d’une part, les vestiges domestiques de l’Aventin26 et, d’autre part, les phases antérieures au forum de César, avec le palimpseste qu’il représente, auquel D. Palombi s’est récemment attaché à restituer une intelligibilité et un sens historique, dans l’hypercentre de la Ville27. En matière de nouveautés, le bilan documentaire reste donc modeste, comme l’est, de même, celui des immeubles d’habitation collective.

    7En ce dernier domaine, le corpus demeure toujours marqué par une dissymétrie chronique entre le nombre de logements qui furent proposés à la location dans une agglomération qui compta peut-être 400 000 habitants dès la fin du IIe s. av. J.-C., entre 600 000 et 700 000 au milieu du Ier s. av. J.‑C., autour du million sous le Haut-Empire, et l’éventail de ce que la recherche moderne appelle, non sans abus28, les « insulae » positivement connues par les sources. Le recueil des textes, utilement rassemblé par S. Priester en 2002 (132 documents dont la chronologie s’étend de Varron à Zosime29) n’a fait l’objet d’aucune adjonction récente significative, même après la (re)découverte du De Indolentia de Galien en 2005. En revanche, les deux dernières décennies ont été clairement marquées par la volonté de mieux prendre en compte le genre même de ces textes et les biais induits par leur mode d’écriture. À rebours de compilations qui ont parfois confiné à l’absurde30, les travaux les plus intéressants de R. Laurence et, surtout, de l’école italienne d’E. Lo Cascio31, ont montré combien ces textes, majoritairement issus d’œuvres polémiques (Cicéron) ou philosophiques (Sénèque), ou bien à dimension satirique (Horace, Pétrone, Martial, Juvénal), ressortissaient au cliché ou au lieu commun. La mégapole romaine, monstre démographique, symbolise les excès de la civilisation. Elle exacerbe les représentations aristocratiques, méprisantes et stéréotypées à l’égard du peuple et de ses dangers. Ce courant d’études a prouvé combien ces descriptions relèvent de l’imaginaire de la ville périlleuse, comment elles privilégient l’exceptionnel au quotidien, le notable au banal, le topos à l’observation du réel.

    8En matière d’habitat « populaire », la difficulté est en outre exacerbée par l’inaccessible contrepoids archéologique, sans être compensée par l’apport de l’épigraphie32. L’occupation continue du site a en effet permis de ne repérer que quelques immeubles – la liste suivante est pratiquement exhaustive : celui découvert lors de la construction du Palazzo delle Assicurazioni Generali, d’époque flavienne, les trois édifices également d’époque flavienne fouillés le long du uicus Capitis Africae sur le Caelius, les structures résidentielles du quartier de la Crypta Balbi construites après l’incendie de 80, la Casa di via Giulio Romano d’époque trajane au pied du Capitole, le complexe mis au jour sous l’actuelle piazza dei Cinquecento et dont les premières constructions remontent au début du IIe s. ap. J.-C., les trois îlots dégagés, dans leur état d’époque hadrienne, le long de l’antique uia Lata/Flaminia au nord du Champ de Mars, les vestiges localisés sous l’église San Paolo alla Regola, dont on a conservé des traces d’époque domitienne, sévérienne et constantinienne ou sous la basilique SS. Giovanni e Paolo al Celio, d’époque sévérienne, les immeubles repérés sous les églises de San Lorenzo in Lucina, Santa Rufina, San Clemente et Santa Cecilia, ceux de la via in Arcione et de la via S. Vincenzo, à proximité de la Fontaine de Trevi33. À l’échelle d’une agglomération millionnaire, l’échantillon n’est guère représentatif et doit inévitablement être mis en perspective avec Ostie (une constante historiographique parfois considérée comme problématique), dont le site, progressivement abandonné, jamais réoccupé, conserve de nombreuses constructions dans un état remarquable, qui ne confirme guère la vision apocalyptique des sources littéraires (voir infra).

    9On comprend dès lors pour quelles raisons la Forma Vrbis constitue encore et toujours une source essentielle sur les modes d’habiter, même si, cette fois, ce sont essentiellement les habitations plébéiennes qui sont ainsi éclairées dans leur structure et dans les possibles usages de leur espace intérieur. Le plan de marbre sévérien apporte des informations régulièrement enrichies. Ainsi, la trentaine de fragments découverts en 1999 lors des fouilles du templum Pacis semble particulièrement riche d’habitations collectives (fn 27, 35, 37, 38, 40, 4334), tout comme celui découvert en 2000 via della Pigna, où l’on a repéré une, si ce n’est deux, structures possiblement assimilables à des immeubles dans une zone située à proximité du circus Flaminius et du théâtre de Marcellus35. En outre, l’analyse des fragments peut s’appuyer sur une tradition d’études ancienne et solidement établie. Dès 1941, P. Ziçans avait ouvert la voie à un examen de l’architecture domestique appuyé sur une typologie fine des constructions résidentielles. En 1960, l’étude avait été complétée dans l’editio princeps de la « Pianta » par R.A. Staccioli, dont l’« Indice tipologico » (p. 255-256) recense domus, péristyles, portiques et tabernae, et par G. Cressedi qui, dans une courte section consacrée aux édifices (p. 204-206), avait répertorié tabernae, maisons « pompéiennes », portiques « résidentiels » à pilastres et établissements thermaux privés36. Comme F. Battistin l’a, à fort juste titre, récemment relevé, les deux listes ne sont pas convergentes et justifiaient pleinement sa nouvelle typologie qui jette les bases de futurs travaux sur les circulations à l’intérieur de l’espace domestique plébéien37. Toutefois, à sept décennies d’intervalle, on remarque que le postulat demeure le même : la validité de la comparaison ostienne, à partir de fouilles parfois anciennes (ici le seul ouvrage de J.E. Packer38), pour repérer et analyser les immeubles sur le plan, ce qui conduit souvent à des difficultés d’interprétation. La prise en compte de travaux plus récents et de critères d’identification supplémentaires comme la taille des structures considérées (et donc l’échelle du plan) ou les modalités de circulation interne qui rendent à la FVM, et, avec elle, à la configuration urbanistique romaine, une forme de spécificité, mène à d’autres conclusions et incite à la modestie39. De la prétendue insula à la domus, les réalités typologiques étaient sans doute plus fluides et les analyses devraient tendre vers la prise en compte de modèles plus différenciés, de la pièce unique à l’appartement « nobile40 ». Sous cet angle, les études les plus novatrices ont plutôt porté sur la « troisième dimension » du plan de marbre. À la suite de L. Pedroni, S. Madeleine a suggéré que le symbole en forme de V indiquait moins la présence physique d’un escalier que le nombre d’étages qui serait restituable, non pas d’après le nombre de barrettes, mais d’après celui des espaces entre les barrettes41. Même si l’hypothèse a été récemment rediscutée42, l’attention portée sur la stéréoscopie de la Ville, insérée dans le programme de restitution numérique43, a procuré un regard inédit sur les paysages urbains (redisons-le, l’élévation est une des caractéristiques essentielles de la mégapole44), les circulations et les densités, selon des conditions d’éclairage et de vitesse variables, à l’échelle de la rue mais aussi de l’espace domestique, aidant à mieux appréhender les réalités antiques.

    10Dans le domaine des études sur le logement, les progrès sont donc moins liés à un renouvellement documentaire qu’à une nouvelle façon d’appréhender, de manière systématique et systémique, l’ensemble des sources à notre disposition. En concomitance avec l’entreprise du LTUR, dont on a dit l’importance en termes de jalon dans l’histoire des résidences aristocratiques de Rome, on peut sans doute affirmer que, pour ce qui est des immeubles et, dans une moindre mesure, des domus, un autre point de « bascule historiographique » est à insérer dans le cadre de deux programmes qui ont assurément marqué un tournant en la matière : La mémoire perdue et Mégapoles méditerranéennes. Il faut, pour le comprendre, revenir aux objectifs qui avaient été fixés par leur porteur, C. Nicolet, à savoir déceler les traces des dénombrements, recensements et autres listes sur lesquels les pouvoirs romains avaient fondé leur gestion de l’espace urbain. Par exemple, cet environnement fut éminemment favorable à la redécouverte d’un document fondamental, jusqu’alors, sinon négligé, du moins mal compris : les catalogues Régionnaires et le sens à donner à ces listes de monuments du IVe s. et, surtout, de chiffres transmis par la tradition manuscrite. S’agit-il d’un inventaire merveilleux45, sorte de version « quantifiée » d’un panégyrique de la Ville qui aurait servi de matrice aux guides touristiques du Moyen Âge, ou, bien au contraire, faut-il penser que les statistiques très précises de domus et d’insulae, mais aussi de uici, d’aediculae, de uicomagistri, de balnea, de pistrina ou encore de lacus procèdent de détails liés à l’existence de documents officiels comme ceux qui furent élaborés lors de la censure de Vespasien et Titus en 73-74 ? Les travaux d’A. Chastagnol, J.-P. Guilhembet, D.W. Reynolds, F. Coarelli, G.R. Storey, R. Behrwald, J. Dubouloz ou C. Courrier suggèrent que ces catalogues s’inscrivaient dans une longue tradition d’enregistrement, à des fins administratives, des différents éléments qui constituaient la Ville, résumés dans une forme qui, à la manière de la FVM, illustrerait autant la splendeur de Rome que la maîtrise de sa gestion46. Réinsérés dans une longue pratique de type administratif dont la Table d’Héraclée constitue le plus ancien témoin, les renseignements fournis ont impacté la vision que l’on pouvait avoir des structures et du fonctionnement de la mégapole romaine, comme l’ont montré les actes de plusieurs colloques essentiels dont il serait trop long de faire la liste ici47. Elles ont également ouvert à des problématiques plus sociales qui ont, non seulement transformé l’analyse des liens entre habitation et ville, mais aussi orienté les études vers de nouveaux paradigmes domestiques.

    De la Ville au logement

    11Ce type de considérations a en effet ouvert à la voie à de nouveaux questionnements dans plusieurs directions. À rebours du chemin suivi par les tenants du demographic sink (W. Scheidel et son école48) et dans la veine des travaux initiés au début des années 1990 par E. Lo Cascio sur la démographie de l’Italie antique49, les chercheurs se sont par exemple intéressés, au début des années 2000, aux mécanismes compensateurs des inconvénients de la vie dans une mégapole préindustrielle : l’effet des distributions frumentaires, l’accès à une eau potable de qualité, les conditions de l’hygiène urbaine sont venus nuancer la vision « dystopique » traditionnelle (bruit, saleté, mauvaises odeurs, manque d’intimité, dangers, maladies)50. Pour s’en tenir à la seule question du logement, il est vrai prioritairement plébéien, il en résulta une libération à l’égard d’un misérabilisme généralisé ou, mieux encore, d’un paradoxe qui consistait à reconnaître la qualité des constructions conservées sans pouvoir les rattacher à une réalité démographique. Aujourd’hui, le problème n’est plus de savoir si ces immeubles, certes dépourvus de certaines facilités urbaines, étaient de bonne construction (ils l’étaient), mais plutôt de déterminer si leur diffusion était généralisée, donc de restituer avec précision le nombre et l’ampleur des programmes édilitaires comme la lex Iulia de Vrbe augenda, et, surtout, par qui et comment ils étaient habités. L’existence d’une strate privilégiée (150 à 200 000 ayants droit au blé public et leur famille), par ailleurs composée d’individus qui exerçaient une activité professionnelle et avaient de ce fait les ressources économiques pour animer un marché diversifié, donne corps à l’idée d’une structure immobilière qui n’avait rien, pour cette couche sociale du moins, des « taudis bâtis à la diable » décrits par C.R. Whittaker51. S’il exista assurément des « bas-fonds », ces constructions précaires et provisoires n’ont guère laissé de traces dans nos sources matérielles52. Dans ce sillage, les travaux sur le marché de l’immobilier ont récemment fleuri, notamment l’immobilier de prestige, mais aussi les conditions d’accès et le prix des loyers, en dépit de la perte irrémédiable des documents de la pratique (titres de propriétés, baux de location, contrats…53). Par ailleurs, en s’attachant au palimpseste de la trame urbaine sur quelques sites bien documentés (à l’image des vestiges de l’îlot de la gare Termini54), et donc aux mutations probables ou assurées du mode d’habiter la ville à une échelle locale très fine, ont été recensés les cas de substitution (dans les deux sens) entre résidence de type domus et immeuble collectif : F. Guidobaldi en a proposé deux synthèses suggestives (à partir d’analyses antérieures), il est vrai surtout centrées sur les siècles qui suivent la période évoquée ici55. On devine là des opérations immobilières de plus ou moins grande envergure, incitant à réfléchir aussi à la reconversion des espaces.

    12Dès lors, la famille, l’appartement et la maison (avec, redisons-le, une infinité de possibilités entre et de passages de l’un à l’autre), ont pu être replacés dans leur cadre urbain, afin de mieux cerner les modalités d’interactions et de vie communautaire qui se déroulaient dans ces types d’habitat, c’est-à-dire les potentialités relationnelles des formes urbaines (pour reprendre un vocabulaire cher à l'anthropologue M. Agier). Parce que l’histoire de la vie privée est histoire de la ville, les espaces domestiques (et les comportements qui en sous-tendent la structure) ont été réinterprétés à l’aune de leur insertion dans l’espace urbain, à l’échelle de l’immeuble, de la rue, du quartier et de la ville. Les relations sociales verticales ou horizontales ont ainsi été longuement analysées par M. Tarpin, J.B. Lott pour le moment augustéen, et lors du colloque de Paris, des Vici aux Rioni56. L’attention a notamment été prêtée à l’empreinte que la domus de l’aristocratie sénatoriale imprime sur le profil, l’identité et la vie sociale des fragments de territoires urbains qui l’entourent, par exemple à travers certains toponymes, ou, plus concrètement, par l’intermédiaire de l’enracinement immobilier et de stratégies familiales déployées dans ce domaine, par le regroupement de dépendants ou l’association des résidences de prestige à d’autres bâtiments (commerciaux, religieux, publics). De même, l’organisation des immeubles autour de cours internes sur lesquelles ouvraient généralement des boutiques, la disposition collective de fontaines, de latrines, de bains de proximité, de popinae, de locaux associatifs ou de sacella, impliquaient, entretenaient et favorisaient des relations de voisinage et des solidarités de quartier, autrement dit « un mode d’habiter communautaire57 », parfois repérable sur plusieurs générations. L’intrication du logement et de la rue, de l’espace domestique et de l’espace professionnel, est un des acquis les plus solides de l’historiographie récente58, qui a aussi insisté sur le rôle joué par ces sociabilités du quotidien dans la politisation des milieux plébéiens59. Dans tous les cas, il n’est plus possible d’envisager le logement, quels qu’en soient la forme et le niveau social, comme un isolat ; de la stricte topographie urbaine, on peut s’engager dans une histoire urbaine de l’habitat.

    Perspectives : du logement à la Ville et au monde

    13Si, pour finir, l’on doit tracer quelques perspectives, en laissant de côté les grandes espérances archéologiques, jamais à écarter (même si le chantier du métro C, par exemple, n’a guère accru nos informations), en considérant que l’exploitation strictement topographique des fragments conservés de la FVM est achevée, si l’on en croit les algorithmes, et que les découvertes ou redécouvertes d’inscriptions demeurent marginales par rapport aux inventaires dont nous disposons désormais pour les différentes formes d’habitat aristocratique, moyen ou populaire, que suggérer ? Le prolongement et l’enrichissement du questionnaire pourraient peut-être venir d’un dialogue avec les autres sciences sociales, et notamment avec la géographie urbaine, qui, en France tout du moins, autour d’O. Lazzarotti et de son équipe60, s’est efforcée de réfléchir au concept même d’habiter et de lui donner, bien au-delà de la notion désormais classique du mode d’habiter déjà évoquée, toute son ampleur, construite de manière fondamentalement multiscalaire : le logement, le quartier, la ville, le monde. Les études sur l’habitat urbain de la Rome antique ont seulement commencé à effleurer ou aborder ce champ de problématique.

    14Au premier niveau, habiter le logement lui-même, avec des réflexions, souvent développées à propos des sites étrusques, campaniens ou d’Ostie plus qu’au sujet de l’Vrbs elle-même, dans les mots comme dans les choses61. Pour commencer, on n’aurait garde d’oublier l’absence ou la précarité du logement – Martial, on l’a dit, en est témoin et notre appellation de « sans domicile fixe » nous le rappelle : l’enquête menée par M.‑A. Le Guennec sur l’habitat non permanent en est un jalon significatif et permettra d’intégrer un pan entier des modes d’habiter62. Si l’attention portée au vocabulaire antique, à ses usages philologiques, mais aussi et, peut-être surtout, à leurs spécificités dans le langage des juristes, à sa pertinence contextuelle en termes de temps et d’espace, a incité à plus de prudence et à plus de rigueur terminologique, elle permet désormais d’espérer appréhender plus finement l’espace domestique, en tant que lieu d’interactions, de cohabitation, entre genres, entre générations, en fonction des liens familiaux, de servitude, ou de dépendance. Une telle entreprise incite, pour ne pas dire oblige, à réinterroger, sur nouveaux frais, dans l’analyse du cadre domestique, les notions évoquées en commençant : espace privé, vie privée, vie publique. Elles doivent en effet continuer à retenir l’attention, parfois de manière critique, à propos de tous les types d’habitat. Pour la domus, on songe aux programmes de recherche, aux thèses et au blog de nos collègues finlandais63 et au volume dirigé par K. Tuori et L. Nissin, publié en 2015, ainsi qu’à l’atelier mené dans le cadre de TRAC 201664. Pour sortir du dilemme privé/public, cette équipe se propose ainsi de valoriser plutôt les critères de visibilité ou d’accessibilité – par exemple pour analyser la salutatio – mais aussi les gestes, les comportements corporels. Dans la même veine, d’autres enquêtes sont en cours sur la « sensory experience » de l’espace domestique, notamment sur la structure olfactive de l’espace domestique65. Inversement, si les identifications anachroniques fondées sur les assignations fonctionnelles du cadre bourgeois du XIXe s. sont à oublier entièrement, si les analyses résultant d’une présumée dichotomie partie privée/partie publique ne paraissent plus tenables, le caractère multifonctionnel et polyvalent des pièces, mis en exergue surtout à partir du contexte spécifique des derniers jours de Pompéi, doit sans doute être réinterrogé et ne pas s’imposer comme une nouvelle vulgate qui contribue à brouiller l’interprétation des espaces internes (ex. : le cubiculum / la chambre à coucher). Il faut encore et toujours rappeler que la coupure privé/public, si on lui accorde quelque valeur opératoire, ne peut s’envisager simplement du point de vue spatial, sans prendre en compte le facteur-temps, à différentes échelles, journée, année… : l’espace domestique se reconfigure au fil du temps. De manière plus générale, l’intérêt pour l’habitat urbain doit continuer à se déplacer vers les actions des « habitants », vers les formes collectives, les interactions : la maison noble ou l’immeuble collectif « à la romaine » ne peuvent plus se concevoir comme les monographies pompéiennes d’antan, hors de leur environnement urbain. La compréhension historique de l’habitat, quelle qu’en soit la morphologie, doit désormais être sous-tendue, non pas seulement par l’approche individuelle (le positionnement du dominus, du possessor, de l’inquilinus, de l’habitator) ou même familiale, mais aussi par l’étude des interrelations, des interactions, pour observer ensuite, par exemple, les écarts dans l’expression des liens ou des hiérarchies qui viennent d’être évoqués, entre cadre domestique et espace public, afin de proposer une lecture des rapports sociaux dans toute leur polysémie66.

    15Ces quelques remarques fournissent déjà une articulation avec une deuxième échelle d’étude : habiter le quartier, car il ne saurait être question, pour les raisons déjà évoquées, d’exagérer les solutions de continuité entre la résidence et l’espace urbain de proximité. Certes, la notion de quartier est à discuter, et non à postuler, car elle est ambiguë : le uicus antique ne lui correspond pas nécessairement en termes de taille, sous l’angle de la sociabilité et de l’identité. Les relations de voisinage, uicinitas, en termes de solidarité, d’autodéfense, ou de concurrence, ou comme facteurs de conditionnement de la « ville ordinaire » sont à prendre en compte, mais tout aussi bien les aires de chalandise. Il est réconfortant de voir que les études topographiques sur les collines ou d’autres découpages historiques intègrent désormais systématiquement les traces d’habitat, aristocratique ou non67. Pour reprendre l’introduction de M. Royo, les habitations sont désormais intégrées au texte urbain, à la lecture du paysage de la Ville.

    16En troisième lieu, habiter la Ville : l’exploitation des Régionnaires, comme cela a déjà été évoqué, attend encore une édition révisée et complète, mise en œuvre par C. Courrier, afin de tirer tout le parti de ce gisement de données, dès lors qu’on lui concède une origine fiable. Les modes d’habiter les jardins adjacents à la Ville ont longtemps été négligés : la publication de la thèse soutenue par I. Hilbold apportera de nouveaux éclairages sur la thématique68. Toutefois, il reste encore des questions à approfondir, comme les mouvements intra-urbains ou les multi-résidences. Seuls quelques imperatores ou sénateurs de la fin de la République (Pompée, César, Cicéron…), les Princes ensuite, éventuellement quelques gentes documentées de manière privilégiée, peuvent être suivis, au fil du temps, dans l’usage de leurs résidences respectives, donc dans leurs trajectoires au sein de la Ville. Mais l’on doit songer aussi à l’afflux de populations à certains moments privilégiés (élections, festivités), aux mobilités à différentes échelles temporelles. Vient aussitôt à l’esprit le cas des travailleurs évoqués par Cicéron à l’été 44 sur le chantier de sa villa de Tusculum, ouvriers qui doivent retourner à Rome pour percevoir leur ration de blé en tant que membres de la plèbe frumentaire69. Quels mouvements au sein du « suburbium », entre Rome et Ostie ? Sur une plus longue durée, le desserrement des activités artisanales et financières vers la « périphérie du centre » modifie profondément le rapport à la Ville d’une strate sociale. En ce sens, on pourrait dire, sans forcer le paradoxe, que les chapitres de J.-P. Morel ou de J. Andreau dans le colloque de 1985, sur la topographie artisanale et financière, apportaient aussi leur pierre à la compréhension de l’habiter70.

    17Habiter le monde enfin : sans reprendre à son compte les formules des poètes ou les sentences exaltées d’un Pline l’Ancien, il n’est guère abusif d’affirmer qu’habiter la Ville, c’est habiter le monde. On peut songer ici aux articles consacrés par W. Eck à la présence des sénateurs provinciaux dans la Ville71, au rapport entre les domus des sénateurs avec l’empire, notamment à travers la présence des témoignages qui, dans l’espace domestique, attestent les relations avec le reste du monde italique ou de l’empire (tables de patronat, statues et inscriptions honorifiques…), sans oublier les « maisons publiques » destinées à accueillir les souverains ou les otages étrangers, dont les séjours dans la Ville sont plus ou moins bien documentés. Dans une perspective sociologique plus large, la toponymie exogène, constitutive elle aussi, en tant qu’élément d’adresse, de l’identité des habitants de Rome, peut dire et incarner ce rapport au monde : habiter le Caput Africae n’est certainement pas anodin et ressortit pleinement aux processus identitaires et sociaux.

    18Désenclaver la question de l’habiter, la tourner vers l’espace vécu, combiner ces différentes approches polytopiques comme disent les géographes, les mettre en perspective de manière organique, diachronique et hiérarchisée, tel est peut-être le défi à affronter pour espérer comprendre le cadre de vie des habitants, leurs cohabitations, l’habiter la Ville durant les quatre siècles centraux et majeurs de la mégapole romaine.

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    Notes de bas de page

    1 Castagnoli 1950, p. 67-68.

    2 En dernier lieu, Rodríguez-Almeida 2014.

    3 C. Nicolet dans Rodríguez-Almeida 2001, p. XII.

    4 Sur la constitution de cet antagonisme dès l’Antiquité, DeLaine 2018.

    5 Mathieu 2010, p. 2-3.

    6 Guilhembet 1995.

    7 Coarelli 1983 ; Thébert 1985 ; Wallace-Hadrill 1988.

    8 Wiseman 1987 (cf. Wiseman 2019, dont on ne peut retenir toutes les conclusions, De Souza – Devillers 2019 et Gros 2020) ; Carettoni 1987.

    9 Broise – Jolivet 1987 ; Pavolini 1987 et 1993.

    10 Zanker 1987. Ajoutons, pour être tout à fait complets, qu’E. Frézouls consacre également quelques pages à la tension entre monumentalité et besoins en logements (Frézouls 1987, p. 386-392).

    11 Parmi tant d’autres, Babelon 1991 et Coquery 1995.

    12 Packer 1968-1969. On mettra à part le cas de la FVM (voir infra).

    13 Hanoune 1984.

    14 Hoggart 1957 (traduit en français en 1970) ; Roche 1981 ; Fourcaut 1986 et Hubert 1990.

    15 Carcopino 1939. Dans la même veine, il serait assurément possible de mentionner le manuel de Paoli 1940.

    16 Yavetz 1958 ; Scobie 1986.

    17 Sur le “spatial turn” de C. Nicolet, voir Courrier – Guilhembet 2019.

    18 Moatti 2011, p. 124.

    19 Virlouvet 2011, p. 136.

    20 Richardson 1992.

    21 En dernier lieu, Bruun 2015, p. 477-478 ainsi que les articles de Bruun et G.L. Gregori et S. Orlandi dans ce volume.

    22 Guilhembet 2011a. Cf. aussi la contribution de G.L. Gregori et S. Orlandi dans ce volume.

    23 Gros 2001.

    24 Guilhembet 2001, p. 217-218 et 223 et Medri 2016. Pour une rapide synthèse récente, voir Platts 2018. Sous l’angle de l’opposition luxe privé/faste public, le dossier a été récemment repris par Dubois-Pelerin 2016.

    25 Panella et al. 2006, part. p. 15-35 et 278-288 et Panella 2013, p. 21, 47, 53, 135-138. Sur le complexe augustéen du Palatin, en dernier lieu, Wiseman 2019.

    26 Voir la contribution de A. Capodiferro et P. Quaranta dans ce volume.

    27 Palombi 2016.

    28 Dubouloz 2011, p. 178-191 ; DeLaine 2018. Voir aussi l'article de C. Davoine dans ce volume.

    29 Priester 2002. Voir aussi Dubouloz 2011, p. 609-619.

    30 Scobie 1986, souvent repris sans nuance et à la base des thèses, même les plus récentes, de W. Scheidel.

    31 Laurence 1997 ; Lo Cascio 2000 (parmi d’autres), sans revenir sur les contributions d’E. Rodríguez-Almeida (voir supra).

    32 Dubouloz 2011, p. 605-609.

    33 Pour chacun de ces immeubles, la bibliographie est donnée par Courrier 2014, p. 148-149 et DeLaine 2018, p. 319-320.

    34 Contre Battistin 2015, nous exclurions fn 23, 24, 32, 34 et 44, soit parce que le fragment est trop abîmé, soit parce que les structures représentées sont bien plus vraisemblablement assimilables à des entrepôts (Courrier 2015).

    35 Filippi – Liverani 2014-2015.

    36 Carettoni 1960. Voir aussi Staccioli 1959.

    37 Battistin 2015.

    38 Packer 1971.

    39 Courrier 2015 ; Schoevaert 2018.

    40 DeLaine 1999.

    41 Pedroni 1992 ; Madeleine 2008.

    42 Selon Battistin 2018, le symbole en V fonctionnerait comme une unité de mesure qui aurait permis aux autorités de contrôler la hauteur des immeubles plutôt que le nombre d’étages. Quoique présentant clairement les problèmes posés par ces signes et proposant, pour la première fois, un tableau exhaustif, l’article ne permet guère d’avancer dans la résolution de l’anomalie principale : la sous-représentation générale de cette convention cartographique sur les fragments conservés. Sur la base d’une nouvelle typologie, appuyée sur une étude de leur répartition dans l’espace urbain, Davoine 2019, p. 25-45, avance que, si le symbole en V signale effectivement la présence d’escaliers, sa figuration et la variété de ses formes de représentation ne semblent pas réductibles à une interprétation unique (conventions distinctes des plans utilisés comme sources de la FVM, recours à des solutions ad hoc pour des structures non conventionnelles ou des escaliers extérieurs, ou encore différences de styles entre graveurs), qui, dans tous les cas, ne saurait se rapporter au nombre d’étages ou à la hauteur des immeubles.

    43 Voir la contribution de P. Fleury et S. Madeleine.

    44 Malgré Storey 2003, 2013.

    45 Hermansen 1978 ; Arce 1997.

    46 Chastagnol 1996 ; Guilhembet 1996 ; Reynolds 1996 ; Coarelli 1997 ; Storey 2001 et 2002 ; Behrwald 2006 ; Dubouloz 2011, p. 538-570 ; Courrier 2014, p. 85-96 et 135-141.

    47 Qu’il nous soit permis de n’indiquer que le plus important d’entre eux : Nicolet – Ilbert – Depaule 2000.

    48 Parmi tant d’autres, Scheidel 2003.

    49 En dernier lieu, Lo Cascio 2016 et 2018.

    50 Bruun 1997 ; Dupré Raventós – Anton Remolà (dir.) 2000 ; Ballet – Cordier – Dieudonné-Glad (dir.) 2003.

    51 Whittaker 1989.

    52 Courrier – Guilhembet 2017.

    53 Craver 2010 ; Guilhembet 2011b ; Rosillo-López 2022.

    54 Barbera – Paris 1996.

    55 Guidobaldi 2000a et b. En dernier lieu, voir Guidobaldi – Miele – Quaranta 2018.

    56 Tarpin 2002 ; Lott 2004 et les contributions de Tarpin, Lo Cascio et Guilhembet – Royo dans Royo – Hubert – Bérenger 2008.

    57 Sur les domus : Guilhembet 2016 ; sur les immeubles : Courrier 2014, p. 127-191 et hors de Rome : Dardenay – Laubry 2020.

    58 Holleran 2012 ; Tran 2013.

    59 Courrier 2017.

    60 Voir par exemple Lazzarotti 2006.

    61 Jolivet 2011 ; Carrive 2016 ; Citroni – Labate – Rosati 2019 ; Wallace-Hadrill – Berry 2020 ; Dardenay – Laubry 2020.

    62 Le Guennec 2019.

    63 https://blogs.helsinki.fi/romanhouse/.

    64 Tuori – Nissin 2015 ; Cascino et al. 2017.

    65 Platts 2016 et 2020.

    66 Badel 2007 ; Goldbeck 2010.

    67 Palombi 1997 ; Coarelli 2012 et 2014.

    68 Hilbold 2015.

    69 Cic., Att., 14, 3, 1.

    70 Morel 1987 ; Andreau 1987.

    71 Eck 1997 et 2016.

    Auteurs

    • Cyril Courrier

      Aix Marseille Université, CNRS, Centre Camille Jullian, Aix-en-Provence, France - Institut universitaire de France - cyril.courrier@univ-amu.fr

    • Jean-Pierre Guilhembet

      Université Paris Diderot-Université de Paris, ANHIMA (UMR 8210) - Jean-Pierre.Guilhembet@wanadoo.fr

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    1 Castagnoli 1950, p. 67-68.

    2 En dernier lieu, Rodríguez-Almeida 2014.

    3 C. Nicolet dans Rodríguez-Almeida 2001, p. XII.

    4 Sur la constitution de cet antagonisme dès l’Antiquité, DeLaine 2018.

    5 Mathieu 2010, p. 2-3.

    6 Guilhembet 1995.

    7 Coarelli 1983 ; Thébert 1985 ; Wallace-Hadrill 1988.

    8 Wiseman 1987 (cf. Wiseman 2019, dont on ne peut retenir toutes les conclusions, De Souza – Devillers 2019 et Gros 2020) ; Carettoni 1987.

    9 Broise – Jolivet 1987 ; Pavolini 1987 et 1993.

    10 Zanker 1987. Ajoutons, pour être tout à fait complets, qu’E. Frézouls consacre également quelques pages à la tension entre monumentalité et besoins en logements (Frézouls 1987, p. 386-392).

    11 Parmi tant d’autres, Babelon 1991 et Coquery 1995.

    12 Packer 1968-1969. On mettra à part le cas de la FVM (voir infra).

    13 Hanoune 1984.

    14 Hoggart 1957 (traduit en français en 1970) ; Roche 1981 ; Fourcaut 1986 et Hubert 1990.

    15 Carcopino 1939. Dans la même veine, il serait assurément possible de mentionner le manuel de Paoli 1940.

    16 Yavetz 1958 ; Scobie 1986.

    17 Sur le “spatial turn” de C. Nicolet, voir Courrier – Guilhembet 2019.

    18 Moatti 2011, p. 124.

    19 Virlouvet 2011, p. 136.

    20 Richardson 1992.

    21 En dernier lieu, Bruun 2015, p. 477-478 ainsi que les articles de Bruun et G.L. Gregori et S. Orlandi dans ce volume.

    22 Guilhembet 2011a. Cf. aussi la contribution de G.L. Gregori et S. Orlandi dans ce volume.

    23 Gros 2001.

    24 Guilhembet 2001, p. 217-218 et 223 et Medri 2016. Pour une rapide synthèse récente, voir Platts 2018. Sous l’angle de l’opposition luxe privé/faste public, le dossier a été récemment repris par Dubois-Pelerin 2016.

    25 Panella et al. 2006, part. p. 15-35 et 278-288 et Panella 2013, p. 21, 47, 53, 135-138. Sur le complexe augustéen du Palatin, en dernier lieu, Wiseman 2019.

    26 Voir la contribution de A. Capodiferro et P. Quaranta dans ce volume.

    27 Palombi 2016.

    28 Dubouloz 2011, p. 178-191 ; DeLaine 2018. Voir aussi l'article de C. Davoine dans ce volume.

    29 Priester 2002. Voir aussi Dubouloz 2011, p. 609-619.

    30 Scobie 1986, souvent repris sans nuance et à la base des thèses, même les plus récentes, de W. Scheidel.

    31 Laurence 1997 ; Lo Cascio 2000 (parmi d’autres), sans revenir sur les contributions d’E. Rodríguez-Almeida (voir supra).

    32 Dubouloz 2011, p. 605-609.

    33 Pour chacun de ces immeubles, la bibliographie est donnée par Courrier 2014, p. 148-149 et DeLaine 2018, p. 319-320.

    34 Contre Battistin 2015, nous exclurions fn 23, 24, 32, 34 et 44, soit parce que le fragment est trop abîmé, soit parce que les structures représentées sont bien plus vraisemblablement assimilables à des entrepôts (Courrier 2015).

    35 Filippi – Liverani 2014-2015.

    36 Carettoni 1960. Voir aussi Staccioli 1959.

    37 Battistin 2015.

    38 Packer 1971.

    39 Courrier 2015 ; Schoevaert 2018.

    40 DeLaine 1999.

    41 Pedroni 1992 ; Madeleine 2008.

    42 Selon Battistin 2018, le symbole en V fonctionnerait comme une unité de mesure qui aurait permis aux autorités de contrôler la hauteur des immeubles plutôt que le nombre d’étages. Quoique présentant clairement les problèmes posés par ces signes et proposant, pour la première fois, un tableau exhaustif, l’article ne permet guère d’avancer dans la résolution de l’anomalie principale : la sous-représentation générale de cette convention cartographique sur les fragments conservés. Sur la base d’une nouvelle typologie, appuyée sur une étude de leur répartition dans l’espace urbain, Davoine 2019, p. 25-45, avance que, si le symbole en V signale effectivement la présence d’escaliers, sa figuration et la variété de ses formes de représentation ne semblent pas réductibles à une interprétation unique (conventions distinctes des plans utilisés comme sources de la FVM, recours à des solutions ad hoc pour des structures non conventionnelles ou des escaliers extérieurs, ou encore différences de styles entre graveurs), qui, dans tous les cas, ne saurait se rapporter au nombre d’étages ou à la hauteur des immeubles.

    43 Voir la contribution de P. Fleury et S. Madeleine.

    44 Malgré Storey 2003, 2013.

    45 Hermansen 1978 ; Arce 1997.

    46 Chastagnol 1996 ; Guilhembet 1996 ; Reynolds 1996 ; Coarelli 1997 ; Storey 2001 et 2002 ; Behrwald 2006 ; Dubouloz 2011, p. 538-570 ; Courrier 2014, p. 85-96 et 135-141.

    47 Qu’il nous soit permis de n’indiquer que le plus important d’entre eux : Nicolet – Ilbert – Depaule 2000.

    48 Parmi tant d’autres, Scheidel 2003.

    49 En dernier lieu, Lo Cascio 2016 et 2018.

    50 Bruun 1997 ; Dupré Raventós – Anton Remolà (dir.) 2000 ; Ballet – Cordier – Dieudonné-Glad (dir.) 2003.

    51 Whittaker 1989.

    52 Courrier – Guilhembet 2017.

    53 Craver 2010 ; Guilhembet 2011b ; Rosillo-López 2022.

    54 Barbera – Paris 1996.

    55 Guidobaldi 2000a et b. En dernier lieu, voir Guidobaldi – Miele – Quaranta 2018.

    56 Tarpin 2002 ; Lott 2004 et les contributions de Tarpin, Lo Cascio et Guilhembet – Royo dans Royo – Hubert – Bérenger 2008.

    57 Sur les domus : Guilhembet 2016 ; sur les immeubles : Courrier 2014, p. 127-191 et hors de Rome : Dardenay – Laubry 2020.

    58 Holleran 2012 ; Tran 2013.

    59 Courrier 2017.

    60 Voir par exemple Lazzarotti 2006.

    61 Jolivet 2011 ; Carrive 2016 ; Citroni – Labate – Rosati 2019 ; Wallace-Hadrill – Berry 2020 ; Dardenay – Laubry 2020.

    62 Le Guennec 2019.

    63 https://blogs.helsinki.fi/romanhouse/.

    64 Tuori – Nissin 2015 ; Cascino et al. 2017.

    65 Platts 2016 et 2020.

    66 Badel 2007 ; Goldbeck 2010.

    67 Palombi 1997 ; Coarelli 2012 et 2014.

    68 Hilbold 2015.

    69 Cic., Att., 14, 3, 1.

    70 Morel 1987 ; Andreau 1987.

    71 Eck 1997 et 2016.

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