Introduction
p. 11-12
Texte intégral
1Publier une collection numismatique est toujours un événement car rares sont les institutions publiques ou privées qui osent ouvrir leurs portes aux numismates. La Bibliothèque nationale de France, avec, entre autres, sa participation au Sylloge nummorum graecum et les publications liées aux collections des monnaies romaines, est la grande exception à cette règle qui semble régir l’étude numismatique française.
2Le musée de Charleville-Mézières et son directeur que je remercie vivement n’ont pas hésité à me permettre d’étudier la collection de monnaies lorraines et à soutenir le projet d’édition afin de mettre à la disposition de la communauté scientifique et d’un large public cette riche documentation inédite. Il faut rappeler que le musée avait déjà fait publier une partie de ses collections, avec des études sous forme de catalogue signées Jean-Marc Doyen ; les collections étudiées concernaient les monnaies antiques romaines (1985, 1986 et 1989), antiques grecques et celtiques (1987) et barbares/mérovingiennes/carolingiennes (1991).
3Composée de 186 monnaies et d’un jeton, cet ensemble présente un état de conservation remarquable, parfois exceptionnel, et comporte quelques pièces non connues des ouvrages de référence. Si on excepte une monnaie royale de Louis IV d’Outre-Mer, l’ensemble des monnaies féodales lorraines couvre la période allant du début du xe siècle jusqu’au règne duc de Lorraine François III, au début du xviiie siècle.
4Le duché de Lorraine avec 110 pièces (58,82 %) est le mieux représenté loin devant la cité messine avec 32 monnaies (17,11 %), l’évêché de Metz avec 15 monnaies et 1 jeton (8,56 %), le comté puis duché de Bar avec 10 monnaies (5,35 %), la petite principauté de Phalsbourg-Lixheim avec 6 monnaies (3,21 %), l’évêché de Toul avec 4 monnaies (2,14 %), l’évêché de Verdun avec 3 monnaies (1,60 %), la seigneurie de Neufchâteau avec une unique monnaie (0,53 %) et 5 monnaies d’origines diverses (2,67 %). Cette collection « lorraine » comprend des monnaies d’argent, de billon (alliage d’argent et de cuivre où la proportion d’argent est inférieure ou égale à 50 %) et de bronze mais, malheureusement, aucune monnaie d’or.
5Leur étude s’appuie sur les travaux de savants numismates tels Félicien de Saulcy, Léon Maxe-Werly, Charles Robert (cf. bibliographie) et, plus récemment, Dominique Flon dont les ouvrages restent des références incontournables. Que les puristes excusent le fait que les références données, dans la description des monnaies, s’appuient quasi exclusivement sur les travaux de celui-ci. Il faut néanmoins reconnaître que l’ouvrage de Dominique Flon, publié en ce début de siècle (cf. bibliographie), est de loin le plus complet et qu’il reprend mais aussi corrige les travaux de ces illustres prédécesseurs.
6 À la différence des publications citées ci-dessus, nous avons choisi de publier non des dessins mais des photographies, réalisées par Gérard Crépin, car la qualité des clichés permet de mieux apprécier l’esthétique du monnayage, la richesse et la variante des détails. Expression du pouvoir des princes ou des villes d’Empire imbus de leur autorité et aspirant à l’indépendance, les monnaies affichent des symboles. Le duché affectionne les images guerrières (épées en pal, cavalier armé, duc en pied et en armure), tandis que l’évêché puis la cité messine adopte des images religieuses (croix pattée, crosse épiscopale, buste ou silhouette de saint Etienne en pied ou à genoux). Les plus belles réussites techniques débutent avec les monnaies de René II et l’introduction du monnayage or et les portraits ducaux sur les testons.
7Les monnaies offrent aussi un reflet saisissant des vicissitudes politiques et économiques que traversa la Lorraine avec l’association puis l’unification des duchés au xve siècle, les dévaluations liées à la guerre de Cent Ans puis à la guerre de Trente Ans qui offrent un vif contraste avec les très belles frappes de Charles III.
8Nous devons à Gérard Crépin d’avoir minutieusement diamétré et pesé toutes les monnaies et de nous avoir ainsi fourni des données chiffrées précises qui permettront de faire des comparaisons avec d’autres collections.
9Bref, cet ouvrage, qui en appelle d’autres, a l’ambition de montrer que la numismatique constitue un remarquable fil d’Ariane pour remonter le passé et aller à la découverte des sociétés d’autrefois.
Auteur
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