Version classiqueVersion mobile

L’Europe dans la construction politique et identitaire russe

 | 
Stéphanie Burgaud
, 
Deplhine Placidi-Frot

Première partie. Processus décisionnel et stratégies

De Locarno à Munich

La diplomatie soviétique face aux accords de sécurité en Europe

Frédéric Dessberg

Texte intégral

  • 1 Les commentaires des contemporains ont notamment porté sur l’adhésion de l’URSS à la politique de s (...)
  • 2 Les archives postsoviétiques concernées sont principalement celles du ministère des Affaires étrang (...)
  • 3 Voir notamment à ce sujet : O. Ken, Collective Security or Isolation ? Soviet Foreign Policy and Po (...)

1Le questionnement qui a longtemps porté sur la prééminence du caractère idéologique et révolutionnaire de la politique étrangère soviétique ou de sa finalité impérialiste et conquérante se prête assez mal à la période de l’entre-deux-guerres. En général, les deux aspects se combinent plus qu’ils ne s’opposent, mais il convient surtout de noter qu’en matière de politique étrangère, la Russie a dû s’adapter au contexte international au moins autant qu’elle a pu l’influencer. Puissance déclassée depuis la guerre et la révolution, elle est alors obnubilée (mais tout comme d’autres à la même époque) par sa sécurité et la garantie de ses frontières. Des accords de Locarno de 1925 aux accords de Munich de 1938, la politique extérieure soviétique a dû réagir aux initiatives occidentales d’accords régionaux ou de sécurité collective. Chez les contemporains et les historiens, la stratégie de Moscou a soulevé de nombreuses questions liées au rôle des acteurs (Narkomindel, Politburo, Komintern)1. Ces interrogations portent notamment sur le véritable poids de la diplomatie, dans la mesure où l’action du Komintern et les plans militaires sont souvent en contradiction avec elle. Les archives soviétiques (diplomatiques, politiques et militaires), mises au miroir des archives des interlocuteurs européens2, apportent des éléments de compréhension de la politique soviétique en Europe, pour les trois principales phases qui concernent la période 1925-1938, trois phases de réaction d’abord au développement de la sécurité collective, ensuite à l’émergence du danger allemand, enfin au recul des démocraties occidentales. Ces questions concernent largement l’action de l’URSS dans une zone d’intérêt vitale à ses yeux, l’Europe centrale et orientale3.

Un « contre-système » soviétique face à la SDN : Moscou à la recherche d’accords bilatéraux avec ses voisins occidentaux

  • 4 O. Ken, « Le double aspect de la stratégie soviétique en Europe centrale et orientale, 1925- 1939 » (...)
  • 5 J. Degras, Soviet Documents on Foreign Policy, vol. II, 1925-1932, Oxford, Oxford University Press, (...)
  • 6 Politbiuro Tsk. RKP (b)-VKP (b) i Evropa. Resheniya « ocoboï papki » 1923-1939 [Le Bureau politique (...)
  • 7 AVPRF, Fonds 0136, op. 8, p. 105, d. 94, no 691, f. 91, Tchitcherine au Bureau politique, 25 mai 19 (...)

2Dans les années 1920, Moscou perçoit les démocraties libérales européennes comme une menace que sa stratégie diplomatique a pour fonction de neutraliser. La ligne suivie, décrite par le commissaire du peuple aux Affaires étrangères, Gueorgui Tchitcherine, consiste à « prendre le parti du plus faible4 », c’est-à-dire, à l’échelle du continent, à soutenir principalement l’Allemagne, autre « paria » de l’Europe hostile comme elle aux traités de paix de 1919-1920 et partenaire privilégiée depuis le traité de Rapallo d’avril 1922. L’objectif reste de « diviser les puissances capitalistes » et d’assurer un équilibre propre à déjouer toute coalition antisoviétique. Le discours permanent à Moscou, relayé par les organes de presse communistes en Europe, est celui du danger d’un encerclement soviétique, voire d’une attaque menée par les « États bourgeois5 ». Certes, ce discours a vocation de propagande intérieure et s’inscrit dans le contexte des luttes internes au sein du personnel politique à Moscou, en particulier la rivalité entre Staline et Trotski, mais il s’adresse également au gouvernement français en exprimant la crainte sincère d’un pays mis au ban du concert européen de l’après-Versailles et qui ne peut guère compter sur une coopération sans faille de l’Allemagne. La Société des nations est considérée à Moscou avant tout comme une arme contre-révolutionnaire. Les voisins occidentaux de l’Union soviétique (la Pologne, la Roumanie et les États baltes) sont vus comme les fers de lance d’une prochaine agression. La Pologne et les pays de la Petite Entente, alliés de la France (Roumanie, Tchécoslovaquie et Yougoslavie), passent pour être les outils de cet encerclement. Or, si le lien germano-soviétique, privilégié par Tchitcherine, reste au centre de la politique européenne de Moscou, la perception du danger polonais nécessite la recherche d’un accord avec Varsovie. Au sein du Narkomindel, la tendance menée par Maxime Livinov, alors commissaire-adjoint, visant à se rapprocher de la Pologne pour neutraliser ce danger, l’emporte. L’objectif, à terme, est de rassembler les minorités nationales sorties de l’aire russe et annexées principalement à la Pologne pour mieux garantir la sécurité de la Russie : souhaitant le rétablissement de la souveraineté russe en Ukraine, en Biélorussie mais aussi dans les États baltes, Litvinov propose une pression sur ces derniers et une amélioration des relations avec la Pologne6. Pour cela, le rapprochement avec Paris est indispensable car l’ascendant français sur les Polonais, d’ailleurs largement surévalué à Moscou, oblige Tchitcherine à ne pas jouer uniquement la carte allemande. D’où le lancement par Moscou, dès 1924, de ballons d’essai en vue d’ouvrir des négociations pour un pacte de non-agression soviéto-polonais garanti par Paris. Mais pour l’heure, le climat politique français, surtout la crainte de la propagande communiste en France, interdisent ce rapprochement. De plus, l’action de l’Internationale communiste interfère dans le travail du Narkomindel, notamment par une répétition de déclarations hostiles à la guerre du Rif menée alors par la France, ce qui provoque les plaintes de Tchitcherine adressées au Politburo7.

  • 8 Dokumenty vneshneï politiki SSSR [Documents de politique extérieure de l’URSS], t. VIII, Moskva, 19 (...)

3Pour Moscou, la doctrine de la guerre inévitable, en référence surtout à une guerre à venir contre la Pologne, est de rigueur. Les plans de l’Armée rouge envisagent le conflit sous la forme d’une agression menée depuis la Pologne et la Roumanie. Mais le Narkomindel s’engage dans la voie de l’amélioration des relations avec Varsovie. C’est ce qui ressort des rapports de Tchitcherine, en visite à Varsovie à la fin de septembre 19258, puis à Berlin où il rencontre Gustav Stresemann, à la veille des accords de Locarno. Pour le chef de la diplomatie soviétique, il ne s’agit plus d’essayer d’empêcher l’Allemagne de signer le pacte rhénan, principal objet des accords signés le 16 octobre. Il ne s’agit pas non plus de faire obstacle à l’adhésion de l’Allemagne à la SDN, qui paraît inéluctable, mais de prendre les garanties nécessaires pour qu’elle ne s’intègre pas à un bloc occidental. D’ailleurs, le droit de veto dont disposerait Berlin au Conseil de la SDN pourrait s’avérer utile à Moscou. Le plus important est d’éviter une acceptation allemande de l’article 16 du pacte de la SDN, qui prévoit des sanctions contre tout État agresseur et pourrait ainsi permettre le passage de troupes à travers le territoire allemand. L’Allemagne en sera finalement dispensée.

  • 9 Ministère des Affaires étrangères français (MAE), Série 1918-1940, URSS, vol. 358, Aristide Briand (...)
  • 10 L’Humanité des 19 octobre et 2 décembre 1925.
  • 11 L’Europe nouvelle no 402 du 31 octobre 1925, reprenant les Izvestia du 18 octobre.
  • 12 J. Jacobson, When the Soviet Union Entered World Politics, op. cit., p. 174.

4Depuis le printemps 1925, le discours soviétique contre la perspective de la signature du pacte rhénan est virulent. Tchitchérine parle de « Sainte-Alliance contre le bolchevisme9 ». Au lendemain des accords de Locarno, la presse communiste française condamne une « grande conspiration antisoviétique10 » tandis que la presse soviétique dénonce une « victoire anglaise » tournée contre l’URSS qui éloigne Paris de ses alliés d’Europe orientale11. Les accords assurent en effet la paix dans l’ouest européen entre la France, la Belgique et l’Allemagne, paix garantie par la Grande-Bretagne et l’Italie, sous l’égide de la SDN, pendant que Berlin se refuse toujours à reconnaître sa frontière avec la Pologne et la Tchécoslovaquie. Au classique concert des puissances se superpose donc la « nouvelle diplomatie » genevoise qui intègre l’Allemagne dans le système régional de sécurité collective. À Moscou, la tendance générale, notamment exprimée par Joseph Staline, est de considérer Locarno comme un moyen d’encercler l’Union soviétique mais à côté de ce discours destiné, selon Jon Jacobson, à regrouper les partis communistes étrangers dans la défense de l’URSS12, le Narkomindel est sur le point d’élaborer une parade : un « contre-système » basé sur un réseau de traités bilatéraux.

  • 13 AVPRF, F. 0136, op. 8, p. 105, Journal de Rakovski, f. 313-309 (pagination inversée), 28 octobre 19 (...)
  • 14 DVP SSSR, t. VIII, no 418, 17 décembre 1925, p. 739-740.

5Aristide Briand, le ministre des Affaires étrangères français auréolé de la gloire récoltée à Locarno, est cependant conscient du fait que Locarno assure la stabilité du continent à l’ouest mais pas à l’est. Dans la perspective de l’adhésion de l’Allemagne à la Société des nations, son objectif suivant est d’œuvrer à une intégration de l’URSS dans la sécurité européenne afin d’étendre le système à l’ensemble du continent. Cela suppose une adhésion soviétique à la SDN, qu’il propose au nouvel ambassadeur soviétique à Paris, Christian Rakovski, dès la fin d’octobre 192513, puis à Tchitcherine lui-même, en visite en France en novembre et décembre. C’est ce moment que choisit le chef de la diplomatie soviétique pour poser la première pierre du « contre-système » orienté contre la SDN qu’il entend élaborer. Le 17 décembre est signé en toute discrétion un traité soviéto-turc de neutralité et de non-agression qui interdit la participation à toute alliance ou tout accord dirigé contre l’un des deux États14 et devient la référence de traités bilatéraux à venir. Le plus connu de ces accords bilatéraux est le traité de Berlin du 24 avril 1926 qui confirme le traité de 1922. Cette stratégie reste valide pour l’ensemble de la décennie et marque une évolution dans la politique étrangère soviétique depuis Rapallo. Ce dernier traité avait rompu le « cordon sanitaire » installé par les puissances occidentales, lesquelles (Grande-Bretagne, Italie, France) avaient d’ailleurs reconnu de jure le gouvernement soviétique en 1924. Désormais, le traité avec la Turquie, autre vaincu de 1918, installait l’hostilité de Moscou aux traités de 1919-1920 dans une stratégie d’opposition frontale à la SDN.

  • 15 Ibid., t. IX, no 271, 28 septembre 1926.

6La stratégie soviétique d’accords bilatéraux vise également les voisins occidentaux limitrophes. Pour l’appareil diplomatique comme pour l’appareil militaire, un bloc baltique dirigé par la Pologne et auquel s’adjoindrait la Roumanie constitue la principale menace. Face à la Pologne, la doctrine du Narkomindel de « support au faible » est visible dans le soutien apporté aux mouvements nationalistes ukrainiens et biélorusses de Pologne, ainsi qu’à la Lituanie dans la crise qui l’oppose à Varsovie en 1926-1927. Un pacte bilatéral est signé en septembre 1926 entre l’URSS et la Lituanie, dans lequel les Soviétiques reconnaissent implicitement à la Lituanie la possession de Wilno (Vilnius), annexée par la Pologne15. Mais l’option du rapprochement avec Varsovie n’est pas abandonnée pour autant. La période est également marquée par la reprise des négociations soviéto-polonaises en vue de la signature d’un pacte de non-agression, en août 1926, à l’initiative de Moscou. Les négociations sont interminables et ne voient d’aboutissement qu’en 1932 car la sempiternelle pomme de discorde tient à la forme du pacte, bilatéral ou multilatéral. À la volonté polonaise de réaliser un pacte déposé à Genève, associant, outre la Pologne et l’URSS, la Lettonie, l’Estonie et la Roumanie, les Soviétiques demandent une série de pactes bilatéraux.

  • 16 Au cours de l’été 1927, une partie de la presse française avait lancé une campagne visant l’ambassa (...)
  • 17 Voir à ce sujet O. Ken, Mobilizatsionnoie planirovanie i polititcheskie resheniï a koniets 1920-ser (...)

7La logique du contre-système soviétique est en partie dictée par la hantise d’un bloc baltique sous la direction d’une Pologne devenue véritable puissance régionale et par la menace que cette alliance pourrait constituer aux frontières de la Russie. Elle s’explique également par des tensions paroxystiques entre l’Union soviétique et les États européens dont l’année 1927 voit l’apogée. Les épisodes les plus marquants sont la rupture des relations diplomatiques entre Londres et Moscou, la campagne antisoviétique menée en France au sujet de l’« affaire Rakovski16 » et l’assassinat du ministre soviétique en Pologne, Piotr Voïkov, sur un quai de la gare de Varsovie. En Union soviétique, dans ce contexte et sur fond de lutte entre Staline et Trotski, la presse officielle entretient la psychose de la guerre inévitable et de la coalition des pays capitalistes. Dans ces questions politiques, à caractère pleinement idéologique et pendant que les chefs de l’Armée rouge se préparent à une guerre « totale17 », les considérations de politique étrangère parviennent à atténuer les tensions.

  • 18 Politbiuro Tsk. RKP (b)-VKP (b) i Evropa..., op. cit., p. 175-177, no 100, protocole no 39 de la ré (...)
  • 19 Ibid., p. 132-33, no 14, 7 février 1929.
  • 20 M.-P. Rey, Le Dilemme russe. La Russie et l’Europe occidentale d’Ivan le Terrible à Boris Eltsine, (...)
  • 21 M. Garder, « La politique étrangère de l’URSS », Politique étrangère, vol. 34, no 2, 1969, p. 133-1 (...)

8Pour éviter l’isolement, la diplomatie soviétique doit se résoudre à quelques entorses à ses principes de politique étrangère car les négociations bilatérales ont globalement échoué. Au moment de l’adhésion de l’URSS au Pacte Briand-Kellogg de renonciation à la guerre, le 27 septembre 1928, le contre-système a vécu. Tchitcherine était hostile au pacte qu’il estimait contraires aux principes de la politique extérieure soviétique. Maxime Litvinov, son adjoint et bientôt successeur, emporte la décision18. La situation est similaire au moment de la signature du Protocole de Moscou, dit Protocole Litvinov du 9 février 1929 entre l’URSS et ses voisins occidentaux. Jusqu’au dernier moment, Litvinov aura bien tenté d’éviter une signature simultanée de la Lettonie et de l’Estonie19. Toutefois, l’URSS peut trouver une occasion d’accroître son prestige auprès de l’opinion internationale en montrant ses intentions pacifiques et réussit à pousser la Pologne à un « engagement » moral. Quant à la Pologne, elle peut exprimer sa satisfaction d’avoir empêché les Soviétiques de la conduire à l’isolement, en obtenant une signature simultanée du Protocole Litvinov par la Roumanie, la Lettonie et l’Estonie, en même temps que l’URSS et elle-même. Cette politique « pacifiste » du Narkomindel s’accompagne de la signature d’accords commerciaux avec la Grande-Bretagne, ce qui met fin à la brouille de 1927 et avec l’Allemagne, dans la ligne des relations privilégiées entretenues depuis Rapallo et le traité de Berlin de 192620. En revanche, les relations avec la France s’enveniment au cours d’une stérile « guerre commerciale ». Au cours de cette évolution de la politique soviétique, les différentes instances ont des vues parfois éloignées. Comme l’écrivait Michel Garder, « diplomatie, actions psychopolitiques ou économiques et facteur militaire se complètent et se fondent21 » mais on peut considérer que la diplomatie d’ouverture, même en contradiction avec le personnel politique et militaire, est laissée relativement libre d’agir.

Face à la menace allemande : vers une adhésion à la politique de sécurité collective

  • 22 DVP SSSR, t. XIII, no 208, circulaire du 7 juin 1930 de Litvinov aux postes diplomatiques soviétiqu (...)
  • 23 O. Ken, « Le double aspect de la stratégie soviétique... », op. cit., p. 53.

9Au début des années 1930, Moscou entend continuer sa politique de division des États capitalistes et continue d’entretenir de bonnes relations avec l’Allemagne. On peut ainsi noter que l’Union soviétique soutient Berlin dans son opposition au projet d’union européenne d’Aristide Briand, y voyant une tentative d’hégémonie française en Europe tournée contre l’Union soviétique22. L’année 1931 voit également la prolongation du traité de Berlin. Mais avec la montée en puissance simultanée du nationalisme allemand et de l’expansionnisme japonais, le pouvoir soviétique et le Narkomindel sont en proie à des dissensions au sujet de l’attitude à adopter vis-à-vis des puissances européennes. La tendance isolationniste est contenue et dès 1931-1932, la politique extérieure s’oriente progressivement vers la sécurité collective en revenant au rapprochement avec la France ainsi qu’avec la Pologne, le premier étant conditionné par le second. Or, il convient de noter qu’au moment où le Narkomindel s’engage dans la négociation de pactes de non-agression avec les voisins occidentaux de l’URSS, l’Armée rouge conserve comme hypothèse principale une agression venue de Pologne et des États baltes. Les chefs militaires, à commencer par Toukhatchevski, préconisent des plans offensifs contre les États limitrophes. Il est curieux de constater, comme l’a fait l’historien russe Oleg Ken, que le Politburo a validé ces deux orientations divergentes23. Si, dans les années 1920, les vues des diplomates et des militaires pouvaient se compléter dans une même stratégie, elles deviennent contradictoires au début de la décennie suivante. Le rôle des premiers est d’éviter ou de retarder un conflit, celui des seconds de s’y préparer et entre ces deux groupes qui ont tendance à s’ignorer, le lien se fait « par le haut » avec Staline et le Politburo.

  • 24 O. Ken, A. I. Rupasov, Politbiuro Tsk. RKP (b) i otnosheniya SSSR s zapadyimi sosednimi gosudarstva (...)
  • 25 Les états-majors soviétique et allemand en conviennent en 1931. Voir Sabine Dullin, Diplomates et d (...)
  • 26 Dès qu’il est informé de projet de Pacte à Quatre, Litvinov critique ce qu’il qualifie de « Directo (...)
  • 27 G. Roberts, The Soviet Union and the Origins of the Second World War. Russo-German Relations and th (...)

10La signature des pactes de non-agression de 1932 avec les voisins occidentaux de l’Union soviétique (sauf la Roumanie à cause du contentieux territorial portant sur la Bessarabie) et la France est un passage obligé vers l’adhésion à la sécurité collective. Ces pactes indiquent clairement que pour Moscou, l’Allemagne n’est plus en situation de faiblesse et constitue une menace pour la paix en Europe, donc pour la sécurité de l’URSS. Il semble que, de manière plus déterminée que Litvinov, dès septembre 1931, Staline et le Bureau politique ont poussé au développement des négociations avec la Pologne qui aboutissent à la conclusion du pacte de juillet 193224. Un autre point révélateur réside dans le fait qu’à partir de 1933, Moscou ne se fait plus l’avocat du désarmement total (ce qui était alors un moyen de pure propagande25 et de soutien à Berlin contre Paris à Genève) mais celui de la sécurité collective pour prévenir les conflits. Il s’agit d’un changement mûri par Litvinov et avalisé par le Politburo, véritable arbitre. À Genève, en février, Litvinov appuie une partie des propositions françaises en matière de désarmement au moment où le Parlement français s’apprête à ratifier le pacte de non-agression. À la suite d’une proposition de Litvinov, est signée en juillet 1933 une Déclaration sur la définition de l’agresseur entre l’URSS et ses voisins occidentaux, dans l’esprit du protocole Litvinov. On peut voir ce texte comme une réponse au Pacte à Quatre réunissant l’Allemagne, la France, la Grande-Bretagne et l’Italie, initiatrice du projet, c’est-à-dire du Directoire des signataires de Locarno et, plus tard, de Munich26. La version initiale du projet prévoyait la possibilité de rectifications de frontières après négociation entre ces quatre États uniquement. Mais il s’agit surtout d’une réponse à de récentes déclarations allemandes sur la nécessité pour l’Allemagne de gagner des territoires à l’Est27. En se portant garante du statu quo territorial en Europe orientale, au prix de revendications (notamment sur la question de la Bessarabie) rendues nécessaires par la double menace allemande et japonaise, l’Union soviétique remporte une victoire diplomatique indéniable.

  • 28 Dans cet article, Karl Radek, chef du Bureau d’information internationale placé directement sous l’ (...)

11Depuis que Hitler a accédé au pouvoir en Allemagne, Moscou est désormais décidée à « revenir » en Europe en ne restant plus en dehors des traités conclus. Le 10 mai 1933, la Pravda annonce, sous la plume de Karl Radek28, que le gouvernement soviétique renonce à demander la révision des traités de 1919-1920 et accepte donc le statu quo territorial. En septembre, enfin, Moscou prend l’initiative de cesser sa collaboration militaire avec Berlin. Cette coopération est restée forte au moins jusqu’en 1932, année où le maréchal Toukhatchevski se rend en Allemagne. Mais c’est aussi à cette époque qu’une esquisse de rapprochement militaire est ébauchée entre Paris et Moscou, sans que la question d’une alliance militaire soit réalisée.

  • 29 Politbiuro Tsk. RKP (b)-VKP (b) i Evropa..., op. cit., no 207, protocole no 151 de la réunion du 19 (...)
  • 30 MAE, vol. 961, H. Alphand (ambassadeur français à Moscou) à MAE, 28 janvier 1934.

12Après le départ de l’Allemagne de la SDN en octobre 1933, le Narkomindel se montre favorable à l’idée formulée par Joseph Paul-Boncour, en décembre, d’un pacte régional d’assistance mutuelle, c’est-à-dire d’un Locarno de l’Est. La condition préalable en est l’adhésion de l’Union soviétique à la Société des nations, ce qui permettrait de coordonner un pacte franco-soviétique sous le contrôle de l’organisation genevoise et, en cas d’agression allemande, de placer l’action soviétique en coordination avec la Pologne, la Tchécoslovaquie et la Roumanie. Au même moment, Staline et le Bureau politique, approuvant la voie préconisée par le Narkomindel, décident en effet de signaler à Paris leur accord pour une adhésion de l’URSS à la SDN, sous certaines conditions et pour conclure un pacte d’assistance mutuelle dirigé contre l’Allemagne29. L’accord soviétique est signifié le 4 janvier 1934. Pour l’URSS, il s’agit de faire valoir son rôle dans la sécurité européenne mais les préoccupations soviétiques restent avant tout nationales. Le rapprochement avec Paris et Varsovie est surtout destiné à contrer la politique antisoviétique de Berlin. Comme le déclare Staline, la politique soviétique est orientée « vers l’URSS et vers l’URSS seule30 ». En tout cas, on assiste à une conversion pragmatique de la politique des pactes bilatéraux en pactes régionaux.

  • 31 O. Ken, Collective Security or Isolation ?, p. 262.

13Les diplomates et les militaires soviétiques s’accordent pour considérer, au printemps 1935, que l’Allemagne représente une menace directe de guerre (elle vient alors de rétablir le service militaire obligatoire) et que la Pologne, qui s’est rapprochée de l’Allemagne depuis le début de 1934, est sa complice. La conséquence en est la signature de pactes d’assistance mutuelle avec la France et la Tchécoslovaquie mais dépourvus de clause militaire en raison de la réticence de Paris et de Prague. On peut considérer, en suivant Oleg Ken, que Moscou commet alors l’erreur de s’interdire toute pression sur Berlin en renonçant à l’entretien de relations satisfaisantes avec Varsovie et Bucarest31 mais il semble que la direction soviétique accepte alors de placer sa diplomatie européenne sous l’égide de la politique multilatérale de Genève, sans se couper de relations avec l’Allemagne.

La conférence de Munich et l’isolement de l’Union soviétique

14Pour les États voisins de l’URSS, en particulier les États baltes, il devient en effet douteux que Moscou intervienne directement en cas d’agression allemande ou polonaise. Ces pays sont donc enclins à rechercher des garanties de sécurité ailleurs. Ajoutons que la passivité française et britannique face aux coups de force de Hitler, notamment face à la remilitarisation de la Rhénanie, laissent Moscou sceptique. Le déclenchement de la guerre d’Espagne, la polarisation idéologique qu’elle provoque et le risque de généralisation du conflit qu’elle comporte, au moins aux yeux du Kremlin, sont autant d’éléments qui poussent la politique extérieure soviétique à une attitude attentiste et neutraliste.

  • 32 F. Dessberg, « Frantsia I teni Moskvi vo vremya miunhenckovo krizitsa » [France and the Shadow of M (...)

15Cela pose la question de l’attitude soviétique au moment de la crise des Sudètes et des accords de Munich. À ce moment, il est clair que la politique de Litvinov a fait faillite, puisque l’on revient au concert des quatre grandes puissances occidentales et que l’Union soviétique est exclue des décisions de la conférence de septembre 1938 comme des affaires européennes. La question qui se pose est celle d’une éventuelle intervention soviétique au secours de la Tchécoslovaquie, son alliée. Rappelons qu’en vertu du pacte d’assistance mutuelle signé entre l’Union soviétique et la Tchécoslovaquie en mai 1935, la première s’engageait à assister la seconde en cas d’agression allemande sous réserve d’une intervention préalable de la France, alliée de Prague depuis les accords de 1924 et de 1925. Or, pour intervenir au secours de la Tchécoslovaquie, avec laquelle elle n’avait aucune frontière commune, l’Union soviétique devait obtenir l’autorisation de Varsovie ou de Bucarest pour que l’Armée rouge puisse traverser le territoire polonais ou roumain. Les Polonais sont invariablement restés hostiles à l’idée d’un passage de l’Armée rouge sur leur territoire, à la différence de Bucarest qui avait accepté le survol du leur par les avions soviétiques. Par ailleurs, Litvinov a toujours assuré Prague et Paris de la volonté soviétique d’intervenir militairement si la France respectait d’abord ses engagements mais le Quai d’Orsay, dirigé par Georges Bonnet, a refusé de croire à la sincérité de Moscou, trouvant ainsi un prétexte supplémentaire pour ne pas se porter au secours de l’allié tchécoslovaque32.

  • 33 I. Deutscher, Staline, p. 512.
  • 34 Voir notamment, de S. Z. Slutch, « Sovietskii Soyuz i tshhoslovatskii krisis 1938 g. : nekotorie as (...)
  • 35 G. Roberts, op. cit. ; H. Ragsdale, The Soviets, the Munich Crisis and the Coming of World War II ; (...)
  • 36 I. Lukes, Czechoslovakia between Stalin and Hitler. The Diplomacy of Edward Benes in the 1930’s.

16La question de l’intervention soviétique est l’occasion d’un débat ancien, récemment réapparu parmi les historiens russes et étrangers à l’occasion du 70e anniversaire des accords. Il est loin d’être clos, dans la mesure où aucune archive nouvelle ne prouve catégoriquement que l’Armée rouge serait intervenue ou, à l’inverse, ne serait pas intervenue. Avant même la mort de Staline, Isaac Deutscher se demandait déjà si le dictateur soviétique « était prêt à faire, en 1938, ce qu’il n’était pas prêt à faire en 1939 », avant de conclure qu’en considération de son attitude en 1938, il n’avait « rien à se reprocher »33. Mais l’évolution récente de ce débat est intéressante. Les travaux d’historiens russes (S. Z. Slutch, D. G. Nadjafov34), au début des années 1990, ont indiqué que la politique extérieure soviétique, en dépit de l’action diplomatique, s’est tournée vers l’Allemagne bien avant Munich et que le Politburo était bien décidé à ne pas intervenir au secours de la Tchécoslovaquie. Au mieux, l’Union soviétique avait adopté une attitude isolationniste depuis l’Anschluss survenue en mars 1938 et n’avait aucune confiance dans l’action de la France et de la Grande-Bretagne. Mais une tendance actuelle, en Russie et ailleurs (G. Roberts, H. Ragsdale, M.J. Carley), prend exactement le contrepied de cette analyse pour affirmer la loyauté de Moscou envers ses engagements, loyauté contrariée par le lâchage de la France et de la Grande-Bretagne35. Michael J. Carley appuie son analyse sur la consultation des archives diplomatiques de la Fédération de Russie mais également sur les archives étrangères, notamment roumaines. Il démontre de manière très convaincante que la responsabilité principale de la victoire de Hitler incombe aux puissances occidentales décidées à laisser l’Union soviétique en dehors des questions européennes, suivies en cela par Édouard Beneš lui-même. Face à la thèse d’Igor Lukes selon laquelle Moscou, par son attitude, avait seulement réussi à « faire croire » que l’Union soviétique serait intervenue au secours de la Tchécoslovaquie36, la nouvelle tendance qu’il incarne, à la suite de Hugh Ragsdale, s’appuie notamment sur le fait que l’Armée rouge a effectivement mobilisé des troupes le long des frontières de la Pologne et de la Roumanie. On peut certes considérer qu’une intervention aurait été dirigée prioritairement contre la Pologne, davantage que contre l’Allemagne. En tout cas, l’actualité de ce débat, en dehors qu’elle pose parmi les historiens le problème de l’accessibilité et de l’interprétation des archives, soulève le problème encore actuel de l’acceptation ou du refus de la Russie comme acteur essentiel de la politique européenne.

  • 37 S. Dullin, Des hommes d’influences..., p. 298-299.
  • 38 Documents diplomatiques français (D.D.F.), 1932-1939, 2e série, vol. XII, R. Coulondre (ambassadeur (...)

17Le fait demeure qu’au lendemain des accords de Munich, Staline et les diplomates soviétiques, Litvinov en tête, perdent leurs dernières illusions et éprouvent une méfiance irréversible envers la France et la Grande-Bretagne, doublée de l’humiliation d’avoir été écartés des questions européennes37. L’ambassadeur français à Moscou, Robert Coulondre, peut alors s’inquiéter de la future politique de Moscou : l’intention de procéder à un quatrième partage de la Pologne, la perte de confiance soviétique dans la sécurité collective, une intensification de l’action révolutionnaire et une politique d’entente avec le Reich38. Il est clair que la stratégie soviétique après Munich a été double et que la carte allemande a été favorisée, non seulement pour garantir la sécurité de l’URSS mais aussi pour réaliser une soumission des voisins occidentaux.

18Dans la période de l’entre-deux-guerres, plus particulièrement dans le cadre chronologique situé entre Locarno et Munich, la stratégie de l’Union soviétique a consisté en une priorité constamment donnée à un classique équilibre des puissances en vue d’assurer la sécurité de ses frontières. Tout comme l’opposition au système de Locarno et de la SDN, le ralliement de Moscou à la politique de sécurité collective n’a pas empêché la poursuite de relations ténues avec Berlin, d’ailleurs très utiles pour conserver, par le moyen de la pression, la relation avec Londres et Paris. Pour l’Union soviétique, l’acceptation par les puissances de son intégration dans la politique européenne a toujours été ressentie comme une nécessité impérieuse, de même que la division des pays capitalistes. L’objectif supérieur de sécurité s’est traduit par une combinaison d’une politique étrangère finalement assez traditionnelle, accompagnée de la diffusion d’une propagande visant à regrouper les partis communistes derrière Moscou. La mobilisation de l’armée contre une attaque extérieure et l’accélération de la production de l’outil militaire, dans les années 1930, devaient quant à elles contribuer à hisser l’URSS au rang de puissance. Or, cette dernière n’a pu obtenir la reconnaissance de son rang et s’est trouvée confrontée à des projets de sécurité ou des règlements de conflits régionaux dont elle était souvent exclue. On peut considérer que la stratégie soviétique a été principalement réactive et s’est adaptée aux projets et aux accords survenus entre les puissances occidentales (France, Grande-Bretagne et Allemagne). Elle s’est focalisée sur le danger que pouvait représenter pour elle, et c’est cela l’essentiel, l’évolution de l’Europe centrale, considérée en tant que base de départ d’une agression contre elle ou que passerelle vers l’Europe occidentale. Dans cette stratégie, le Narkomindel a joué un rôle d’aiguillon de la politique générale de l’URSS, mais elle n’a pu empêcher la domination allemande sur l’Europe centrale. En 1939, l’Allemagne devient une allié de facto et forcée alors qu’elle était le véritable danger depuis l’accession de Hitler au pouvoir en Allemagne.

Bibliographie

Bibliographie

Broué, Pierre, Rakovsky ou la révolution dans tous les pays, Paris, Fayard, 1996.

Conte, Francis, Un révolutionnaire-diplomate. Christian Rakovski : l’Union soviétique et l’Europe (1922-1941), Paris, La Haye, Mouton Éditions, 1978.

Davis, Kathryn W., The Soviets at Geneva : the USSR and the League of Nations, 1919-1933, Genève, Librairie Kundig, 1934.

Dessberg, Frédéric, Le Triangle impossible. Les relations franco-soviétiques et le facteur polonais dans les questions de sécurité en Europe (1924-1935), Bruxelles, P. I.E. Peter Lang, 2009.

Deutscher, Isaac, Staline, Paris, Gallimard, 1953.

Dullin, Sabine, Des hommes d’influences. Les ambassadeurs de Staline en Europe, 1930-1939, Paris, Payot, 2001.

Fayet, Jean-François, Karl Radek (1885-1839). Biographie politique, Bern, Peter Lang, 2004.

Fisher, Louis, Russia’s Road from Peace to War. Soviet Foreign Relations, 1917-1941, New York, Harper and Row Publishers, 1969.

Haslam, Jonathan, The Soviet Union and the Struggle for Collective Security in Europe, 1933- 1939, Londres, Macmillan, 1984.

Hochman, Jiri, The Soviet Union and the Failure of Collective Security, 1934-1938, Ithaca and London, Cornell University Press, 1984.

Jacobson, Jon, When the Soviet Union Entered World Politics, Berkeley, University of California Press, 1994.

Ken, Oleg, Collective Security or Isolation ? Soviet Foreign Policy and Poland, 1930-1935, Saint-Pétersbourg, Evropeiskiy Dom, 1996.

Lebedeva, N. S. et Wolos, M. (éd.), Miunhenckoïe soglashenie 1938 goda : istoriya I sovremennosti [Munich Agreement of 1938 : History and Modernity], Moscou, Institut bseobshtsheï istorii, 2009.

Lukes, Igor, Czechoslovakia between Stalin and Hitler. The Diplomacy of Edward Benes in the 1930’s, Oxford, Oxford University Press, 1996.

Narinski, Mikhail, du Réau, Élisabeth, Soutou Georges-Henri et Tchoubarian Alexandre (dir.), L’URSS et l’Europe dans les années 20, Paris, PUPS, 2000.

Ragsdale, Hugh, The Soviets, the Munich Crisis and the Coming of World War II, Cambridge, University Press, 2004.

Rey, Marie-Pierre, Le Dilemme russe. La Russie et l’Europe occidentale d’Ivan le Terrible à Boris Eltsine, Paris, Flammarion, 2002.

Roberts, Geoffrey, The Soviet Union and the Origins of the Second World War. Russo-German Relations and the Road to War, 1933-1941, New York, MacMillan, 1995.

Ulam, Adam B., Expansion and Coexistence : the History of Soviet Foreign Policy, New York, Praeger, 1974.

Notes

1 Les commentaires des contemporains ont notamment porté sur l’adhésion de l’URSS à la politique de sécurité collective. Voir par exemple R. W. Davis, The Soviets at Geneva : the USSR and the League of Nations, 1919-1933. Parmi les analyses de la politique extérieure soviétique, L. Fisher, Russia’s Road from Peace to War. Soviet Foreign Relations, 1917-1941 ; A. B. Ulam, Expansion and Coexistence : the History of Soviet Foreign Policy ; J. Hochman, The Soviet Union and the Failure of Collective Security, 1934-1938 ; J. Haslam, The Soviet Union and the Struggle for Collective Security in Europe, 1933-1939 ; J. Jacobson, When the Soviet Union Entered World Politics, Berkeley ; S. Dullin, Des hommes d’influences. Les ambassadeurs de Staline en Europe, 1930-1939.

2 Les archives postsoviétiques concernées sont principalement celles du ministère des Affaires étrangères (Arkhiv Vneshneï Politiki Rossiïskoï Federatsii [AVP RF], fonds Secrétariat de Tchitcherine, Secrétariat de Litvinov, relations avec la France, ambassade d’URSS en France), les archives d’histoire politique et sociale (Rossiïskiï gosudarstvennyï arkhiv sotsialno-polititcheskoï istorii [RGASPI], fonds Comité central et internationale communiste) et les archives militaires, plus difficilement consultables (Rossiïskiï gosudarstvennyï voennyï arkhiv [RGVA], fonds état-major). Pour la France, voir principalement la série internationale 1918-1940 du ministère des Affaires étrangères, le centre des archives diplomatiques de Nantes (ambassades à Moscou, Berlin, Londres, Varsovie) et les archives du service historique de la Défense, département de l’Armée de terre. Pour les archives polonaises, celles du ministère des Affaires étrangères (Archiwum Akt Nowych, fonds URSS, attachés militaires, ambassades) et les archives centrales militaires (Centralne Archywum Wojskowe, 2e Bureau de l’état-major, Bureau Orient).

3 Voir notamment à ce sujet : O. Ken, Collective Security or Isolation ? Soviet Foreign Policy and Poland, 1930-1935 ; S. Dullin, op. cit. ; F. Dessberg, Le Triangle impossible. Les relations franco-soviétiques et le facteur polonais dans les questions de sécurité en Europe (1924-1935).

4 O. Ken, « Le double aspect de la stratégie soviétique en Europe centrale et orientale, 1925- 1939 », Communisme, no 74/75, 2003, p. 45-69.

5 J. Degras, Soviet Documents on Foreign Policy, vol. II, 1925-1932, Oxford, Oxford University Press, 1952, p. 12, déclaration d’Alexeï Rykov, 3 mars 1925.

6 Politbiuro Tsk. RKP (b)-VKP (b) i Evropa. Resheniya « ocoboï papki » 1923-1939 [Le Bureau politique du CC du PCUS et l’Europe. Décisions des « dossiers spéciaux », 1923-1939], Moskva, ROSSPEN, 2001, note citée p. 14.

7 AVPRF, Fonds 0136, op. 8, p. 105, d. 94, no 691, f. 91, Tchitcherine au Bureau politique, 25 mai 1925.

8 Dokumenty vneshneï politiki SSSR [Documents de politique extérieure de l’URSS], t. VIII, Moskva, 1964, no 323, lettre de Tchitcherine au Narkomindel, 2 octobre 1925, p. 552-555. La question d’un pacte de non-agression fut abordée.

9 Ministère des Affaires étrangères français (MAE), Série 1918-1940, URSS, vol. 358, Aristide Briand à Jean Herbette (ambassadeur à Moscou), 8 juillet 1925. Voir également Georges-Henri Soutou, « La France, l’URSS et l’ère de Locarno, 1924-1929 », in M. Narinski, É. du Réau, G.-H. Soutou, A. Tchoubarian (dir.), L’URSS et l’Europe dans les années 20, p. 67-90.

10 L’Humanité des 19 octobre et 2 décembre 1925.

11 L’Europe nouvelle no 402 du 31 octobre 1925, reprenant les Izvestia du 18 octobre.

12 J. Jacobson, When the Soviet Union Entered World Politics, op. cit., p. 174.

13 AVPRF, F. 0136, op. 8, p. 105, Journal de Rakovski, f. 313-309 (pagination inversée), 28 octobre 1925.

14 DVP SSSR, t. VIII, no 418, 17 décembre 1925, p. 739-740.

15 Ibid., t. IX, no 271, 28 septembre 1926.

16 Au cours de l’été 1927, une partie de la presse française avait lancé une campagne visant l’ambassadeur d’URSS à Paris, Christian Rakovski, accusé d’ingérence dans les affaires intérieures françaises. Il avait signé à Moscou un « projet de résolution » sur la politique internationale de l’URSS qui appelait les soldats des pays capitalistes à déserter en cas de guerre. La rupture des relations diplomatiques franco-soviétiques fut évitée mais Rakovski fut rappelé à Moscou. Sur Rakovski, lire : F. Conte, Un révolutionnaire-diplomate. Christian Rakovski : l’Union soviétique et l’Europe (1922- 1941) ; P. Broué, Rakovsky ou la révolution dans tous les pays.

17 Voir à ce sujet O. Ken, Mobilizatsionnoie planirovanie i polititcheskie resheniï a koniets 1920-seredina 1930 [Planification de mobilisation et décisions politiques, fin des années 1920- début des années 1930], Saint Petersbourg, Evropeïskiï Universitet, 2002, 470 p.

18 Politbiuro Tsk. RKP (b)-VKP (b) i Evropa..., op. cit., p. 175-177, no 100, protocole no 39 de la réunion du 25 août 1928.

19 Ibid., p. 132-33, no 14, 7 février 1929.

20 M.-P. Rey, Le Dilemme russe. La Russie et l’Europe occidentale d’Ivan le Terrible à Boris Eltsine, p. 239.

21 M. Garder, « La politique étrangère de l’URSS », Politique étrangère, vol. 34, no 2, 1969, p. 133-159.

22 DVP SSSR, t. XIII, no 208, circulaire du 7 juin 1930 de Litvinov aux postes diplomatiques soviétiques, p. 315-317.

23 O. Ken, « Le double aspect de la stratégie soviétique... », op. cit., p. 53.

24 O. Ken, A. I. Rupasov, Politbiuro Tsk. RKP (b) i otnosheniya SSSR s zapadyimi sosednimi gosudarstvami, t. I, 1928-1934 [Le Bureau politique du CC du PCUS et les relations de l’URSS avec les États voisins occidentaux, partie I, 1928-1934], Saint-Pétersbourg, Evropeïskiï Dom, 2000, réunions du Politburo des 3, 10 et 20 septembre 1931, p. 252-256 et 258-266.

25 Les états-majors soviétique et allemand en conviennent en 1931. Voir Sabine Dullin, Diplomates et diplomatie soviétiques en Europe (1930-1939). Structures et méthodes d’une politique extérieur sous Staline, thèse de doctorat sous la direction du Pr. René Girault, université Paris 1, 1998, p. 146-148.

26 Dès qu’il est informé de projet de Pacte à Quatre, Litvinov critique ce qu’il qualifie de « Directoire européen dont l’URSS serait exclue ». MAE, vol. 960, télégrammes no 66-69 de M. Dejean (ambassadeur français à Moscou) à J. Paul-Boncour (ministre des Affaires étrangères), 11 avril 1933.

27 G. Roberts, The Soviet Union and the Origins of the Second World War. Russo-German Relations and the Road to War, 1933-1941, p. 13.

28 Dans cet article, Karl Radek, chef du Bureau d’information internationale placé directement sous l’autorité de Staline, s’élève contre le révisionnisme allemand. Il se rend ensuite dans sa Pologne natale pour favoriser la coopération polono-soviétique. Voir J.-F. Fayet, Karl Radek (1885-1839). Biographie politique, p. 661-690.

29 Politbiuro Tsk. RKP (b)-VKP (b) i Evropa..., op. cit., no 207, protocole no 151 de la réunion du 19 décembre 1933, p. 305-307.

30 MAE, vol. 961, H. Alphand (ambassadeur français à Moscou) à MAE, 28 janvier 1934.

31 O. Ken, Collective Security or Isolation ?, p. 262.

32 F. Dessberg, « Frantsia I teni Moskvi vo vremya miunhenckovo krizitsa » [France and the Shadow of Moscow during the Munich Crisis], in N. S. Lebedeva, M. Wolos (éd.), Miunhenckoïe soglashenie 1938 goda : istoriya I sovremennosti [Munich Agreement of 1938 : History and Modernity], p. 150-162.

33 I. Deutscher, Staline, p. 512.

34 Voir notamment, de S. Z. Slutch, « Sovietskii Soyuz i tshhoslovatskii krisis 1938 g. : nekotorie aspekti politiki nevmeshatelistva » [The Soviet Union and Czechoslovakian Crisis of 1938 : Some Aspects of Non-Involvement Policy] et D. G. Nadjafov, « Dokument natsionalnovo arhiva USA o faktore SSSR b mejdunarodnom rasbitii b 1930-e rodi » [Document of National Archive of the USA about the Factor of USSR in International Development in 1930’s] in N. S. Lebedeva et M. Wolos, op. cit., p. 114-144 et p. 350-366.

35 G. Roberts, op. cit. ; H. Ragsdale, The Soviets, the Munich Crisis and the Coming of World War II ; Michael J. Carley, « “Only the USSR Has... Clean Hands” : The Soviet Perspective on the Failure of Collective Security and the Collapse of Czechoslovakia, 1934-1938 », Diplomacy and Statecraft, 2010, Part 1, 21 : 3, p. 202-225, Part 2, 21 : 3, p. 368-396.

36 I. Lukes, Czechoslovakia between Stalin and Hitler. The Diplomacy of Edward Benes in the 1930’s.

37 S. Dullin, Des hommes d’influences..., p. 298-299.

38 Documents diplomatiques français (D.D.F.), 1932-1939, 2e série, vol. XII, R. Coulondre (ambassadeur français à Moscou) à G. Bonnet (MAE), no 17, 4 octobre 1938 et no 164, 18 octobre 1938.

Auteur

Maître de conférences en histoire contemporaine (Paris 1), détaché aux écoles de Saint-Cyr Coëtquidan et titulaire de la chaire Jean Monnet « Défense et sécurité européennes ». Ses travaux portent sur la politique de la France en Europe centrale et orientale entre les deux guerres mondiales. Il a notamment publié : Le Triangle impossible. Les relations franco-soviétiques et le facteur polonais dans les questions de sécurité en Europe, 1924-1935 (PIE-Peter Lang, 2009) et Les Horizons lointains de la politique extérieure française, Bruxelles (ibid., 2011).

Le texte et les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont sous Licence OpenEdition Books, sauf mention contraire.

Acheter

Volume papier

lcdpu.frdecitre.fr
Rechercher dans OpenEdition Search

Vous allez être redirigé vers OpenEdition Search