Shylock et son destin
|Première partie : Le Shylock de Shakespeare
Un
D’où vient-il ?
Texte intégral
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1La généalogie de Shylock est à la fois longue et brève. Bien que Shakespeare se soit inspiré de traditions anciennes pour créer son personnage, il a aussi emprunté à des sources beaucoup plus proches.
- 1 On trouve une traduction anglaise d’Il Pecorone dans l’édition Arden de The Merchant of Ve (...)
- 2 L’édition des œuvres de Shakespeare en dix volumes (1768) par Edward Capell (1730- 1781) e (...)
2Il semble désormais acquis que l’intrigue du Marchand de Venise provient pour l’essentiel d’un recueil de contes italiens intitulé Il Pecorone [Le simplet]1. La première version anglaise de ce recueil ne fut publiée que bien après la mort de Shakespeare, ce qui laisse supposer qu’il en prit connaissance soit en italien (dans l’hypothèse où il maîtrisait suffisamment cette langue), soit dans une traduction manuscrite : les ressemblances entre Il Pecorone et le Marchand de Venise, déjà notées au xviiie siècle par Edward Capell2, sont bien trop importantes pour relever d’une simple coïncidence. Ainsi, on retrouve dans chacune des deux œuvres les motifs de la livre de chair, de la dame riche et courtisée, et de l’anneau qu’un amant s’engage à chérir éternellement, mais dont il est contraint de se défaire.
3Dans le Marchand Portia habite Belmont, et c’est à Belmonte qu’habite la dame que nous rencontrons dans Il Pecorone ; mais celle-ci n’est pas animée de la noblesse morale qui caractérise l’héroïne de Shakespeare et l’épreuve à laquelle doit se soumettre chacun de ses prétendants n’est guère édifiante : la nuit venue, invité dans le lit de la dame, il doit lui faire l’amour, sans quoi il verra sa fortune confisquée. Or tous ceux qui relèvent le défi échouent, car on leur a servi du vin contenant quelque narcotique. Un jeune Florentin plein d’ardeur, Giannetto, se fait piéger par deux fois ; il ne devra sa réussite qu’à une des suivantes de la dame, qui l’a mis en garde.
4Avec le motif de la livre de chair, Shakespeare se démarque moins de l’original. Les assauts auxquels se livre Giannetto à Belmonte sont financés par son parrain, un riche Vénitien nommé Ansaldo, convaincu qu’il s’agit là d’expéditions commerciales. Contraint d’emprunter de l’argent à un juif pour financer ce qu’il croit être une troisième expédition, Ansaldo met en gage une livre de sa chair. Giannetto, ayant enfin obtenu les faveurs de la dame, est tellement absorbé qu’il ne se souvient du gage qu’au tout dernier moment. Il se précipite à Venise avec les fonds nécessaires, mais il est trop tard : plutôt que de récupérer son argent, le juif préfère voir Ansaldo payer sa dette au prix de sa vie, même quand Giannetto lui offre dix fois la somme originale.
5Pourtant tout n’est pas perdu, car survient la dame de Belmonte, déguisée en avocat, qui conseille au juif d’accepter la proposition de Giannetto. Comme il demeure inflexible, elle lui dit qu’il a effectivement le droit de prélever une livre de chair, mais à la condition de ne pas laisser tomber une seule goutte de sang – ce qui lui coûterait la vie. Prenant peur, le juif déclare qu’il accepte l’offre de Giannetto, voire neuf fois seulement la somme prêtée, ou huit fois, ou même cinq fois, avant de se contenter de la somme originale (« et soyez tous maudits ! »). C’est maintenant au tour de l’avocat d’insister : le juif doit découper la livre de chair, seul paiement auquel il peut prétendre. Fou de rage, le prêteur déchire le contrat, et l’affaire est réglée.
6Présentée dans le conte de façon schématique, cette affaire de la livre de chair ne constitue qu’un quart de l’ensemble, soit environ deux mille mots, ce qui rend d’autant plus remarquable le parti que Shakespeare a su tirer d’un aussi maigre contenu. Ici et là, quelques détails ont pu éveiller son imagination : ainsi, dans la scène du procès, du prêteur avançant sur Ansaldo un rasoir à la main. Pour l’essentiel, le juif du Pecorone demeure un personnage sans relief, auquel l’auteur n’a même pas daigné donner un nom ; et pourtant, nous voyons se dessiner en lui les principaux traits de Shylock.
7Les éléments que Shakespeare a jugé utile de rajouter illustrent bien sa façon de procéder. Dans Il Pecorone, Ansaldo et le prêteur semblaient se rencontrer pour la première fois ; dans le Marchand, Antonio et Shylock se connaissent déjà. Ce sont des raisons personnelles qui poussent Shylock à vouloir la disparition d’Antonio – là où le prêteur du Pecorone justifiait son acharnement au nom d’un principe général (certes non moins sinistre) : « Il voulait pouvoir dire qu’il avait mis à mort le plus grand des marchands chrétiens. » Shakespeare renforce le caractère personnel de la vengeance de Shylock en créant toute l’intrigue secondaire entre Jessica et Lorenzo. Enfin, Shylock est jugé coupable, il est puni et se voit contraint de se convertir au christianisme. Le prêteur anonyme du Pecorone se contentait de déchirer son contrat avant de disparaître à jamais du conte.
8Shakespeare s’inspira peut-être d’une autre source, aujourd’hui disparue. On a beaucoup glosé sur une pièce, The Jew, « jouée à l’auberge du Taureau », que Stephen Gosson mentionne dans son pamphlet de 1579, The School of Abuse [L’école de l’immoralité]. Dramaturge dépourvu de succès devenu critique puritain, Gosson avait la dent dure contre le théâtre ; mais il lui arrivait de ménager certaines pièces, et il loua la gravité avec laquelle The Jew mettait à nu « la cupidité de ceux qui convoitent les biens de ce monde et l’âme sanguinaire des usuriers ». Quelques auteurs ont pensé que cette remarque s’appliquait aux deux thèmes principaux que l’on retrouve dans le Marchand : l’usurier sanguinaire serait le prototype de Shylock et « ceux qui convoitent les biens de ce monde » préfigureraient les prétendants rejetés par Portia, c’est-à-dire le prince de Maroc et le prince d’Aragon. D’autres ont opposé de solides arguments à cette thèse. Peut-on vraiment dire que Maroc et Aragon, en dépit de tous leurs défauts, sont de « ceux qui convoitent les biens de ce monde » ? De surcroît, est-il concevable qu’un dramaturge des années 1570, époque où le théâtre anglais n’avait pas encore atteint sa pleine maturité, eût déjà maîtrisé une double intrigue aussi complexe ?
9Il n’importe. Gosson nous confirme en tout cas que Shakespeare n’innovait pas en créant Shylock. L’usurier juif odieux avait déjà fait son entrée sur la scène londonienne quelque vingt ans avant la composition du Marchand de Venise (et presque trois cents ans après qu’Édouard Ier eut expulsé les juifs d’Angleterre).
- 3 Voir Alfred Harbage, Annals of English Drama 975-1700, Methuen, 1964, p. 60-61. (NdT)
- 4 Œuvre perdue, datant sans doute aussi de 1594. Voir Marie-Thérèse Jones-Davies, Un peintre (...)
- 5 La pièce est décrite en détail dans Herman Sinsheimer, Shylock : The History of a Characte (...)
- 6 Dans le Juif de Malte. Voir plus loin dans le texte, p. 15 sq. (NdT)
- 7 « […] dass wohl gesprochene Uhrteil eines weiblichen Studenten ». (NdT)
10Y a-t-il eu d’autres pièces dont Shakespeare aurait pu avoir connaissance ? Mention est faite dans des documents de l’époque d’une « comédie vénitienne3 », dont nous ignorons tout sinon qu’elle fut jouée en 1594, et d’une œuvre par ailleurs inconnue de Thomas Dekker, The Jew of Venice4. Des pièces de même titre furent jouées par les compagnies anglaises qui commencèrent à faire des tournées en Allemagne vers la fin du xvie siècle. Le manuscrit de l’une d’entre elles subsiste sous le titre de Komoedia gennandt Der Jud von Venezien [Comédie intitulée Le Juif de Vénétie]5. Le personnage principal y ressemble moins à Shylock qu’au Barabas de Marlowe6, dont il porte le nom, mais on trouve dans les scènes finales une affaire de gage semblable à celle du Marchand et un procès marqué par « le jugement bien prononcé par une étudiante7 » – pour citer les affiches de l’époque. Point de conversion forcée au christianisme, toutefois. Le Barabas en question est tout simplement fouetté, puis jeté dehors. Qui sait si cette œuvre n’était pas tirée d’une pièce inconnue dont Shakespeare se serait lui aussi inspiré ? Il semblerait cependant plus probable que la Komoedia ait été elle-même modelée sur le Marchand.
- 8 Elle est reprise dans l’édition Arden, 1967, p. 153-166.
11On croit retrouver certains échos du Marchand dans The Ballad of Gernutus8 – à moins que ce ne soit l’inverse ? –, vendue par les colporteurs de l’époque. Gernutus est un usurier juif « de la ville de Venise ». Tout comme Shylock, il imagine, « par jeu et par plaisanterie » (I, iii), de prêter de l’argent à un marchand innocent contre une livre de sa chair. Tout comme Shylock, il aiguise son couteau pendant le procès, avant de voir ses intentions déjouées, comme à l’accoutumée. Il est possible que la ballade ait précédé la pièce et que Shakespeare ait eu connaissance du texte. Cependant, même dans ce cas, elle ne lui aurait rien apporté qu’il n’eût trouvé ailleurs, bien au contraire : il s’agit là d’une composition grossière, et son seul intérêt est de révéler la haine et la répugnance que suscitait un Shylock dans l’imagination populaire. Avant même que ne commence la narration, Gernutus est comparé à un porc, que l’on préfère voir égorgé que vivant, et à un « infect tas de fumier » :
Sa bouche presque pleine de merde,
Béante, en réclame encore.
De surcroît, il a une femme qui, elle aussi, pratique quelque peu l’usure.
12Les détectives littéraires sont plus sûrs de leur fait quant aux autres sources. Les arguments de Shylock dans la scène du procès (IV, i) semblent inspirés en partie d’un discours tenu sur un thème semblable dans L’Orateur, une pièce d’Alexandre Sylvain qui fut traduite en anglais en 1596. La livre de chair était un élément de l’intrigue dans Zelauto, roman d’Anthony Munday (1580), même si le prêteur n’y était pas juif. La fille de l’usurier et son prétendant, ami du héros, y font une brève apparition, préfigurant Jessica et Lorenzo (dont la liaison amoureuse serait toutefois antérieure à ce roman, puisque Shakespeare a pu la trouver dans une œuvre de Masuccio, conteur italien du xve siècle).
13Autant de questions qui intéressent l’universitaire plus que le lecteur non spécialiste. Parmi toutes les œuvres qui ont influencé Shakespeare, une seule peut prétendre au statut d’œuvre littéraire au même titre que le Marchand : il s’agit bien évidemment du Juif de Malte.
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14Christopher Marlowe naquit la même année que Shakespeare, mais il fut bien plus précoce. Il n’avait que 23 ans lorsqu’il éblouit ses contemporains avec Tamerlan, un drame en deux parties qui fut joué vers 1587, époque à laquelle Shakespeare était encore totalement inconnu. Le Juif de Malte, probablement écrit en 1589, fut salué avec presque autant d’enthousiasme et connut un succès durable qui incita peut-être Shakespeare à tenter à son tour une pièce à thématique juive. Le Juif de Malte fut repris en 1594, l’année qui suivit la mort de Marlowe, puis en 1596 ; les spécialistes s’accordent à situer la création du Marchand entre 1596 et 1598.
- 9 L’expression était proverbiale, et se trouve attestée dès 1575. (NdT)
15Ce qui est sûr, c’est que Shakespeare connaissait bien la pièce de Marlowe et qu’il en tira des leçons. Outre leur scélératesse, ce qui rapproche d’abord Barabas et Shylock est qu’ils ont chacun une fille. Un cri unit les deux hommes : celui de Shylock à la disparition de Jessica – « Ma fille ! ô mes ducats ! ô ma fille ! » (II, viii) – et celui de Barabas au moment où Abigail lui remet les sacs d’argent et de pierreries qu’elle a récupérés pour lui – « Ô ma fille ! or ! beauté ! ô mon bonheur ! » (II, i). Les deux pièces se font écho plusieurs fois. Barabas anticipe sur Shylock lorsqu’il parle de la multiplication de l’argent et lorsqu’il invoque la prospérité des patriarches de l’Ancien Testament. Et c’est un mot de Barabas qui inspire à Shakespeare l’une de ses formules les plus célèbres, qu’il met dans la bouche d’un chrétien. Lorsque les chevaliers de Malte invoquent la Bible pour justifier la confiscation de sa fortune, Barabas rétorque : « Quoi ! Vous citez l’Écriture à l’appui de vos crimes ? » (I, ii). Dans le Marchand de Venise, cette idée, reprise par Antonio, est retournée contre Shylock : « Le diable peut citer l’Écriture à ses fins9 » (I, iii).
- 10 Critique américain, connu surtout pour ses ouvrages sur Matthew Arnold (1939) ou E. M. For (...)
16Mais il ne suffit pas de se pencher sur tel ou tel détail. Comme le rappelle Lionel Trilling10, l’idée d’« influence » trouve son origine dans la magie. Une influence artistique qui transcende la simple imitation ne saurait être décomposée en une liste d’éléments séparés. Cette influence peut aussi être pour partie négative, et les leçons qu’un artiste rejette sont aussi importantes que celles qu’il met à profit.
17Si nous devions juger le Juif de Malte d’après sa seule intrigue, nous nous demanderions ce qu’une telle pièce peut apporter à un dramaturge sérieux. Le parcours de Barabas révèle une infamie sans bornes. Il triche, il vole, il trahit, il tue ; il empoisonne tout un couvent. C’est un monstre, qui connaîtra la fin d’un monstre en tombant dans un chaudron d’huile bouillante. Or, Marlowe a su placer au centre de son tableau mélodramatique ce personnage puissant, qui, par moments, pourrait presque susciter la sympathie.
18Ce résultat tient non seulement à l’énergie et à la ruse de Barabas lui-même, mais aussi à la tension sous-jacente à la pièce tout entière, au regard sans concession qu’on y porte sur la condition humaine. La plupart des chrétiens mis en scène par Marlowe se révèlent tout aussi dénués de scrupules que Barabas et, de surcroît, hypocrites. Nous sommes plongés dans un monde cruel, égoïste et fourbe, et dans cette jungle, Barabas a au moins le mérite d’être plus clairvoyant et plus habile que ses ennemis. À plusieurs reprises, il met le doigt sur leur faux-semblant de vertu ; et lorsqu’il se voit dépouillé de ses biens, il a évidemment une excellente raison de les détester.
19Le Juif de Malte fournissait donc à Shakespeare un précédent : un juif éloquent, qui domine la scène, un juif qui a des griefs, qui défend ses opinions. Après un tel exemple, il lui était difficile de revenir en arrière et de se contenter d’un scélérat juif se bornant à être une caricature offensante, à l’image du Gernutus de la ballade.
20Il existe néanmoins des différences profondes entre l’île de Malte de Marlowe et la Venise de Shakespeare. Celui-ci a offert à ses personnages chrétiens un rôle plus ample et généralement plus positif ; en revanche, il a ramené son personnage juif à une stature plus quotidienne. Là où Barabas se mêle de haute politique, Shylock poursuit une vengeance personnelle. L’usurier vénitien n’est pas dévoré par cette ambition insatiable qui fait de Barabas, en dépit de son côté grotesque, un surhomme de la stature de Tamerlan et de Faust. Et, à la différence de Barabas, qui nous est présenté dans le prologue de la pièce par « Machiavel » lui-même, Shylock ne s’enferme pas dans une logique machiavélique. Cet aspect du théâtre de Marlowe n’échappait pas à Shakespeare, qui l’avait exploité davantage au moment de créer Richard III (vers 1592-1593), quelques années avant Shylock.
21Selon un indicateur du gouvernement, Richard Baines, Marlowe divertissait ses amis en avançant, entre autres blasphèmes, que « le Christ méritait de mourir plus que Barabas, et que les juifs avaient fait le bon choix, même si Barabas était un voleur et un assassin ». Comment ne pas songer au Juif de Malte et comment ne pas sentir que Marlowe a projeté beaucoup de lui-même en Barabas – ses rêves extravagants de pouvoir, son énergie, son mépris des idées reçues. Hélas, la pièce s’enfonce progressivement dans la monstruosité, jusqu’à nous laisser en présence d’un ogre de bande dessinée, d’un Goldfinger ou d’un docteur No élisabéthain. Et pourtant, dans les premières scènes, nous avons affaire à un Barabas qui demande à être pris au sérieux, un Barabas qui, au-delà d’une mégalomanie indéniable, se grandit lui-même, pour coïncider avec ce grand moment historique où, pour la première fois, le capitalisme semble déployer toute sa puissance.
22La richesse éveille en Barabas de la volupté, mais aussi une rigueur d’homme d’affaires. Tout en frémissant à la pensée de saphirs, d’améthystes, d’« opales flamboyantes », d’« émeraudes vert prairie » (I, i), il garde la tête froide et domine parfaitement l’univers comptable des écritures et des créances. Avant tout, il sait faire travailler son argent à distance. Il commerce avec l’Égypte, l’Espagne, la Grèce ; il tisse sa toile et impose sa présence dans les principaux centres commerciaux d’Europe :
À Florence, Venise, Anvers, Londres, Séville,
À Francfort, Lübeck, Moscou, je ne sais où encore,
On me doit de l’argent ; dans presque toutes ces villes,
De grosses sommes s’amassent dans les banques. (IV, i)
Vision hardie, qui présuppose une économie européenne aux visées toujours plus vastes et aux liens toujours plus étroits. En outre, Barabas s’enorgueillit d’appartenir à un groupe restreint de ploutocrates internationaux, dont tous sont ses coreligionnaires :
On dit que nous sommes une nation dispersée –
Je ne sais ; mais nous avons engrangé
Bien plus de richesses que ceux qui tirent gloire de leur foi.
Il y a Kirriah Jaïrim, le grand juif de Grèce,
Moi-même à Malte, d’autres en Italie,
Plusieurs en France, et tous sommes très riches,
Oui, plus riches qu’aucun chrétien. (I, i)
- 11 Werner Sombart, Die Juden und das Wirtschaftsleben, Leipzig, Duncker & Humblot, 1911. [Il (...)
Voici déjà dans toute son ampleur le mythe que l’historien économique allemand Werner Sombart reprendra trois cents ans plus tard dans un livre qui fut un temps célèbre11 et qui présentait comme une réalité historique ce qui n’en demeure pas moins un mythe : le juif comme moteur du capitalisme moderne.
23La pièce de Shakespeare présente elle aussi un monde où le commerce ouvre des horizons nouveaux, mais avec une différence notable. Quand Barabas parlait, au sujet de l’un de ses vaisseaux, de l’« argosy » [caraque], il utilisait un néologisme évocateur et encore tout récent à l’époque, dérivé du nom de la ville de Raguse, l’actuelle Dubrovnik, dans l’Adriatique (l’exemple le plus ancien cité par l’Oxford English Dictionary remonte à 1587, même si l’on trouve avant cette date la forme ragusye). Dans le Marchand de Venise, en revanche, ce sont les caraques d’Antonio, et non de Shylock, qui voguent vers des contrées aussi éloignées que le Mexique et le Liban. Shylock, pour sa part, reste collé à la terre ferme et apparaît comme un être extrêmement circonspect. Rien ne suggère non plus que ses transactions financières soient à la mesure de celles de Barabas : nulle créance, nul dépôt, apparemment, à Lübeck, Anvers ou Moscou.
24Si par certains aspects Barabas nous semble plus moderne que Shylock, il reste par ailleurs un être encore médiéval, survivant des mystères et des miracles. Aussi sûrement que s’il s’était appelé Judas, son nom indiquait à chaque instant au public élisabéthain la corruption originelle de Barabas, rappelant qu’il était avant tout l’incarnation de ce principe du mal qui avait jadis fait préférer un voleur et un assassin au Christ, et la chair corrompue à l’esprit.
- 12 In G.K. Hunter, Dramatic Identities and Cultural Traditions : Studies in Shakespeare and H (...)
25La composante religieuse du Juif de Malte imprègne le texte tout entier. Trop souvent sous-estimée par la plupart des commentateurs, elle a été analysée dans un article important de G.K. Hunter, « The Theology of Marlowe’s The Jew of Malta »12. Même le vers célèbre où Barabas se réjouit de ses biens, « des richesses infinies dans un infime espace » (I, i), est la parodie d’une image chrétienne traditionnelle, reprise par d’innombrables auteurs, image qui oppose l’infinitude du Christ et de sa toute-puissance à l’« infime espace » de l’utérus de la Vierge. Le chaudron dans lequel tombe Barabas appartient lui aussi à un folklore ancien : on le retrouve constamment dans l’iconographie de l’enfer, destination tout indiquée pour un homme qui à maints égards rappelle l’Antéchrist.
26Jusqu’où Marlowe souscrivait-il à ces références théologiques, nul ne peut le dire. Nous pouvons supposer qu’il se sentait partagé entre blasphème et respect, mais que cette dimension théologique ne le laissait pas indifférent. Elle est essentielle à la structure de la pièce, alors que chez Shakespeare les éléments religieux sont plus diffus. Un article intitulé « La théologie du Marchand de Venise » paraîtrait trop schématique et réducteur.
- 13 T.S. Eliot, « Christopher Marlowe », in Id., Selected Essays, Faber & Faber, 3e éd. 1951, (...)
27Marlowe diffère de Shakespeare sur un autre point essentiel. Dans son essai sur Marlowe, T. S. Eliot salue « l’humour terriblement grave, voire féroce13 » du Juif de Malte. « Caricature extraordinaire », Barabas représente de ce fait « quelque chose que Shakespeare ne pouvait ni ne voulait faire ». Une simple juxtaposition des passages où Marlowe et Shakespeare semblent à première vue les plus proches vient confirmer la justesse de cette observation. « Nous les juifs, nous savons flatter comme des épagneuls », dit Barabas :
J’ai appris à Florence à me baiser la main,
À faire le dos rond quand on me traite de chien,
À m’incliner aussi bas qu’un moine déchaussé. (II, iii)
Comparons avec Shylock, lorsqu’il ressasse devant Antonio toutes les insultes qu’il lui faut endurer :
Je l’ai toujours supporté d’un patient haussement d’épaules (Car souffrir est l’insigne de toute ma tribu),
Vous me traitez de mécréant, de chien d’égorgeur
[…] (I, iii)
Le contraste est net. Chez Marlowe, les gestes sont dramatiques et forcés : Barabas singe sa situation, se dédouble pour s’observer. Shylock est pure passion, chacune de ses paroles est chargée d’émotion. Sans doute l’humour de Marlowe mérite-t-il d’être qualifié de « terriblement grave » si on le compare à celui de la plupart des auteurs ; mais si on compare à Shakespeare, cette gravité perd de son évidence.
28Un dernier mot sur l’art de la caricature, art dans lequel Marlowe était sans conteste passé maître. Eliot cite aussi les premiers vers de ce discours extraordinaire où Barabas dresse pour le plus grand régal de son serviteur Ithamore un inventaire de ses activités criminelles :
Quant à moi, j’erre dans les rues la nuit,
J’égorge les malades qui gémissent, roulés au pied des murs,
Parfois je m’en vais empoisonner les puits […] (II, iii)
Ce détail inattendu des « malades qui gémissent, roulés au pied des murs », l’assonance walls / wells [murs / puits], donnent à ces vers une puissance singulière. Le discours tout entier est un chef-d’œuvre de virtuosité. L’inventaire n’est d’ailleurs pas censé être pris au pied de la lettre : Barabas sonde Ithamore, il cherche à savoir s’il fera un bon acolyte, et il ne résiste pas au plaisir d’en rajouter.
- 14 Voir L. Poliakov, Histoire de l’antisémitisme, vol. 1, p. 124-139. (NdT)
29Un détail toutefois donne à réfléchir, car l’évocation des puits empoisonnés n’est pas une simple exagération que se permet Marlowe ; elle surgit des profondeurs de l’imaginaire populaire. Le juif empoisonneur, souvent le juif médecin-empoisonneur (et Barabas a « étudié la médecine »), était un personnage type de la démonologie médiévale européenne. Lors des épidémies de peste noire, les juifs, accusés d’empoisonner les points d’eau, étaient les victimes de massacres qui coûtaient la vie à d’innombrables innocents : dans de nombreux cas des communautés entières furent exterminées14. Ce mythe s’est perpétué jusqu’au xxe siècle : on le retrouve dans la psychologie et dans l’imagerie de l’antisémitisme le plus extrême. Il crée un lien macabre entre les dernières heures des deux tyrans les plus sanguinaires du siècle. Hitler termina son testament politique, dicté juste avant sa mort, par une injonction à ses successeurs de poursuivre une lutte sans merci contre « l’empoisonneur universel de tous les peuples, la juiverie internationale » ; Staline mourut convaincu (ou se déclarant tel) qu’un groupe de médecins juifs s’apprêtait à empoisonner les principaux dirigeants soviétiques : ces accusations furent abandonnées à sa mort, mais nul ne peut prédire les persécutions terribles qui s’en seraient suivies s’il avait survécu.
30Rien de tout cela ne vise à minimiser le talent et la puissance dramatique déployés dans le Juif de Malte ; mais il s’agit là d’une pièce dont le contenu nous heurte forcément dans notre sensibilité historique. Si souvent célébré comme fin en soi, l’art de la caricature peut parfois faire problème. Les meilleurs caricaturistes ne servent pas toujours les meilleures causes.
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31Dans la scène du procès, Shylock, tourmenté à l’idée que Jessica s’est enfuie avec Lorenzo, s’exclame :
J’aurais voulu qu’elle eût pour mari
Un descendant de la souche de Barabas, plutôt qu’un chrétien. (IV, i)
Shakespeare pensait-il au Juif de Malte en écrivant ces vers ? Peut-être ; mais il les aurait écrits même si Marlowe n’avait jamais existé. Personne dans l’Angleterre élisabéthaine n’ignorait qui était Barabas – le premier Barabas ; nul besoin d’aller au théâtre pour connaître les juifs. Des siècles de prêche chrétien avaient figé leur image et, plus que des sources littéraires précises, ce sont tous les préjugés que charrie cette image qui auront présidé à la naissance de Shylock.
32D’entrée, on suppose que juifs et chrétiens sont ennemis à jamais : « Quel air de publicain flagorneur ! », remarque Shylock lorsque Antonio paraît pour la première fois :
Je le hais parce qu’il est chrétien.
Mais plus encore parce que dans son humble sottise
Il prête de l’argent gratis, et fait baisser
Le taux de l’usure ici chez nous à Venise. (I, iii)
« Je le hais parce qu’il est chrétien » : voilà un vers qui pourrait presque être dit pour la forme, une réponse rapide, conventionnelle, avant que Shylock ne s’étende sur l’antagonisme financier qui oppose les deux hommes. Mais ce serait là en perdre la véritable résonance. Pour tout public anglais, ou européen, de l’époque, de telles paroles venaient rappeler que les juifs étaient, par définition, censés haïr les chrétiens tout comme leurs ancêtres avaient haï le Christ. Dans cette optique, tous les juifs étaient coupables d’avoir rejeté le message du Christ et responsables de la Crucifixion.
33À plusieurs reprises, le Marchand de Venise, parfois par la voix de Shylock lui-même, renvoie le public au Nouveau Testament. L’allusion la plus directe vient en réponse au discours de Portia sur la miséricorde. Sourd à ses arguments selon lesquels sans miséricorde, il n’est point d’espoir de salut, Shylock lance :
Que mes actes retombent sur ma tête ! J’exige la loi
[...] (IV, i)
Selon Matthieu (27, 24), la foule qui assiste au procès de Jésus s’écrie : « Que son sang soit sur nous et sur nos enfants ! » En reprenant leurs paroles en écho, Shylock renouvelle l’imprécation ancestrale.
34En définitive, le degré de malveillance théologique attribué aux juifs n’admettait qu’une seule explication : ils étaient ligués avec le diable ; mieux, ils étaient le diable, sous l’une de ses apparences. Les premières graines de cette croyance furent semées par Jean, le plus polémique des quatre évangélistes, lorsqu’il rapporta les paroles du Christ aux juifs qui le rejettent : « Vous avez, vous, le diable pour père » (8, 44). Les Pères de l’Église et leurs successeurs reprirent ce thème, qui dès le Moyen Âge donna naissance à un corpus impressionnant de croyances superstitieuses, de légendes et de calomnies.
35C’est dans ce contexte qu’il faut comprendre les expressions qui assimilent Shylock au diable, à travers des comparaisons directes (il n’y en a pas moins de neuf dans le Marchand de Venise), mais aussi des allusions indirectes. L’observation de Jessica, « Notre maison est l’enfer » (II, iii), bien que pouvant être perçue comme métaphorique, vient renforcer la vision qu’ont de son père des personnages aussi différents qu’Antonio (« Le diable peut citer l’Écriture… ») ou Lancelot Gobbo, serviteur à la langue bien pendue : « Assurément le juif est le diable incarné » (II, ii).
36Quelle importance convient-il d’accorder à de tels propos ? Lancelot Gobbo est un bouffon ; les commentaires faits dans la même veine par les autres personnages sont pour la plupart des sarcasmes de routine, dont même les plus cruels ne sont pas censés être pris au sens propre. Nul ne suggère que Shylock puisse être littéralement un diable. Il est strictement humain, du début à la fin, même si, aux yeux de ses ennemis, son humanité sent le soufre ; pour un public élisabéthain, la perruque rousse dont il était vraisemblablement affublé en disait plus sur sa généalogie que le texte lui-même. Le Barabas de Marlowe portait une perruque semblable, tout comme avant lui le Judas et le Satan des mystères médiévaux.
- 15 Voir plus particulièrement Joshua Trachtenberg, The Devil and the Jews, New Haven, Yale UP (...)
37Le juif des mythes médiévaux15 n’était pas simplement un diable au sens figuré ou élargi. Sa nature diabolique pouvait prendre des formes spécifiques. C’était un empoisonneur, comme nous l’avons vu plus haut, et un sorcier ; on l’accusait de procéder à des meurtres rituels, de crucifier les enfants, de profaner l’hostie.
38Aucune de ces accusations n’est explicite dans le Marchand de Venise : elles seraient apparues comme des anachronismes grotesques dans le contexte semi-romanesque, semi-naturaliste de la pièce. Néanmoins, ici encore, l’héritage médiéval affleure. En exigeant que le contrat soit respecté à la lettre, Shylock se propose de commettre un meurtre rituel au second degré.
- 16 Voir l’édition Arden de The Merchant of Venice, 1967, p. xxvii. (NdT)
39L’histoire de la livre de chair a des origines très lointaines, peut-être jusque dans la Perse ou l’Inde anciennes16. En Europe occidentale, l’histoire telle que nous la connaissons apparut au xiie siècle, mais sans qu’il y fût fait mention des juifs. Ce n’est que vers la fin du xiiie siècle que l’auteur anonyme d’un poème en moyen anglais, Cursor Mundi [La voie du monde], y greffa la thématique juive.
40Ce poème, apparemment l’œuvre d’un prêtre de Northumbrie, mélange des paraphrases des Évangiles et la légende de la Sainte Croix. Dans l’un des épisodes, qui se situe à Constantinople, un artisan chrétien travaillant pour la « reine Éline » (sainte Hélène, mère de l’empereur Constantin) emprunte à un juif de l’argent, qu’il se voit dans l’impossibilité de rembourser. Lorsque le juif lui intente un procès pour réclamer sa livre de chair – et c’est la première fois que celle-ci est mentionnée dans un texte anglais –, on lui oppose l’avertissement habituel (« Si tu verses une seule goutte de son sang… »). Il maudit les juges, et la reine ordonne qu’on lui confisque ses biens et qu’on lui coupe la langue ; mais elle reviendra sur sa décision lorsqu’il s’engagera à lui montrer où est enterrée la Sainte Croix – « où gît le crucifix, l’arbre de votre Seigneur ».
41Deux points méritent d’être notés. Tout d’abord, le rapport, ne fût-ce qu’indirect, que le poète établit entre la livre de chair et la Crucifixion. Ensuite, le moment où il écrit : lors de l’expulsion des juifs par Édouard Ier, en 1290 (en célébrant « la reine Éline », il rend sans doute hommage à la mère d’Édouard, Éléonore de Provence, qui était résolument hostile aux juifs). Sans le savoir, Shakespeare reprend dans le Marchand de Venise un fil qui remonte, par-delà trois siècles, aux derniers jours de la communauté juive d’Angleterre.
- 17 Cette pièce est décrite dans H. Sinsheimer, Shylock, op. cit., p. 76-77.
42Au bas Moyen Âge et à la Renaissance, le motif de la livre de chair gagna en popularité, tout comme l’idée que le candidat idéal pour le rôle du prédateur créancier était un juif. On trouve des versions où figurent des scélérats juifs en Italie (Il Pecorone), en France, en Allemagne, et jusqu’en Serbie, et de nouvelles variations voyaient encore le jour à l’époque de Shakespeare. Ainsi, en 1599, une pièce intitulée Moschus17, œuvre d’un auteur connu sous le nom de Jacobus Francus, fut jouée à l’université d’Iéna pour célébrer le mariage d’un avocat et de la fille d’un professeur. Écrite en latin, la pièce met en scène un étudiant nommé Musophilus et un personnage du nom de Rabbin Mosche (ou Moschus) ben Jehuda, qui est le Shylock de l’intrigue. Musophilus tombe entre les mains de Moschus, mais tout s’arrange pour lui lorsqu’il révèle qu’une nuit, ayant trouvé refuge dans une église, il a vu un groupe d’étrangers, dont Moschus, tuer un enfant et recueillir son sang.
43En d’autres termes, il avait été témoin d’un meurtre rituel. Cette juxtaposition thématique souligne dans Moschus ce que d’autres textes se contentaient de suggérer, à savoir que derrière l’usurier qui exige sa livre de chair se tapit le croquemitaine, le juif qui s’acharne à faire couler du sang chrétien. À l’arrière-plan se profile une analogie avec les souffrances du Christ lui-même. Au niveau le plus populaire, l’accusation de meurtre rituel relevait de l’univers de la magie noire : elle reposait sur la croyance que les juifs, comme les sorcières, étaient prêts à tout pour se procurer du sang humain, qu’ils destinaient à des fins surnaturelles. En revanche, à un niveau plus « spirituel », et malgré l’interdit proclamé par plusieurs papes successifs, le mythe faisait toujours l’amalgame avec la Crucifixion. C’était le plus fréquemment aux alentours de Pâques que se réveillait la rumeur.
44Pour qui connaît l’existence de cette tradition, le contrat de la livre de chair passé par Shylock peut sembler moins dérangeant, du moins à une première lecture. Si Shakespeare avait tout inventé, on pourrait redouter qu’il n’entretînt quelque inquiétante phobie personnelle. En réalité, il emprunta un thème déjà existant, dont il atténua les aspects les plus repoussants.
45Il n’en reste pas moins qu’aux yeux des autres personnages de la pièce, Shylock représente une menace profonde, d’ordre archaïque. Il est animé du désir de couper, d’éviscérer, de mutiler ; il cherche à posséder, à dévorer. Il exprime par moments, et dès son premier souhait de vengeance à l’encontre d’Antonio (« J’assouvirai la vieille rancœur que je lui porte » [I, iii]), des pulsions cannibales qui, même si elles surgissent de l’imagination de Shakespeare, renvoient à tout un fond de préjugés obscurs des plus sinistres. Outre tout ce dont on les accusait, les juifs avaient au Moyen Âge la réputation infâme de se nourrir de chair chrétienne, au sens propre, chaque fois qu’ils en avaient la possibilité. Ce fut l’un des chefs d’accusation portés contre les juifs de Paris et d’Île-de-France lors de leur expulsion en 1182 sur ordre du jeune roi Philippe Auguste.
Tel fut donc le matériau brut qui servit à modeler de nombreux traits de Shylock. C’est bien de là que Shakespeare est parti. Rares seront les lecteurs contemporains qui y verront un point de départ prometteur. Mais Shakespeare n’aurait pas été Shakespeare s’il en était resté là, s’il s’était contenté des stéréotypes dont il avait hérité, s’il ne les avait pas transcendés.
Notes
1 On trouve une traduction anglaise d’Il Pecorone dans l’édition Arden de The Merchant of Venice, 1967, p. 140-153, et dans Geoffrey Bullough (éd.), Narrative and Dramatic Sources of Shakespeare, New York, Columbia UP, 1958, vol. 1, p. 463-476.
2 L’édition des œuvres de Shakespeare en dix volumes (1768) par Edward Capell (1730- 1781) est un jalon important dans l’histoire des études shakespeariennes. (NdT)
3 Voir Alfred Harbage, Annals of English Drama 975-1700, Methuen, 1964, p. 60-61. (NdT)
4 Œuvre perdue, datant sans doute aussi de 1594. Voir Marie-Thérèse Jones-Davies, Un peintre de la vie londonienne : Thomas Dekker, Paris, Didier, 1958, vol. 2, p. 341. (NdT).
5 La pièce est décrite en détail dans Herman Sinsheimer, Shylock : The History of a Character, V. Gollancz, 1947, p. 59-61.
6 Dans le Juif de Malte. Voir plus loin dans le texte, p. 15 sq. (NdT)
7 « […] dass wohl gesprochene Uhrteil eines weiblichen Studenten ». (NdT)
8 Elle est reprise dans l’édition Arden, 1967, p. 153-166.
9 L’expression était proverbiale, et se trouve attestée dès 1575. (NdT)
10 Critique américain, connu surtout pour ses ouvrages sur Matthew Arnold (1939) ou E. M. Forster (1944), et sur l’art romanesque en général. (NdT)
11 Werner Sombart, Die Juden und das Wirtschaftsleben, Leipzig, Duncker & Humblot, 1911. [Il en existe une traduction française de S. Jankélévitch, Les Juifs et la vie économique, Paris, Payot, 1924 (rééd. 2005).]
12 In G.K. Hunter, Dramatic Identities and Cultural Traditions : Studies in Shakespeare and His Contemporaries, Liverpool, Liverpool UP, 1978, p. 60-102.
13 T.S. Eliot, « Christopher Marlowe », in Id., Selected Essays, Faber & Faber, 3e éd. 1951, p. 123. Eliot écrivit ce texte en 1919.
14 Voir L. Poliakov, Histoire de l’antisémitisme, vol. 1, p. 124-139. (NdT)
15 Voir plus particulièrement Joshua Trachtenberg, The Devil and the Jews, New Haven, Yale UP, 1943.
16 Voir l’édition Arden de The Merchant of Venice, 1967, p. xxvii. (NdT)
17 Cette pièce est décrite dans H. Sinsheimer, Shylock, op. cit., p. 76-77.
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