Sur Paul Éluard
p. 245-246
Note de l’auteur
Texte reproduit dans La Gaceta de Cuba, La Havane, nov.-déc. 1992, p. 31, inclus dans JLL, Lezama disperso, éd. Ciro Bianchi Ross, La Havane, Unión, 2009, p. 139-140, avec la précision : « Dans sa présentation de ce texte, Rafael Acosta de Arriba note qu’il appartient aux papiers inédits de JLL déposés dans les fonds de la Bibliothèque Nationale José Martí, il signale qu’il ne comporte pas de date et que l’on ignore les circonstances de sa rédaction. » Comment JLL a-t-il lu Éluard, qu’en a-t-il lu ? Carmen Suárez León, dans Biblioteca francesa de José Lezama Lima (La Havane, Centro de Investigación y Desarrollo de la Cultura Cubana Juan Marinello, 2003, p. 52), ne fait mention pour Paul Éluard que de Première anthologie vivante de la poésie du passé, Paris, Seghers, 1951, 2 t., ce qui bien entendu ne veut rien dire. La capacité intuitive de saisie de l’univers d’Éluard dans cette page est pour le moins fulgurante, depuis son mystère.
Extrait
1La grâce plaisante avec laquelle Éluard convoquait ses mots dans la maison d’un poème, c’était l’agilité d’Adonis se baignant dans un fleuve. C’était les salamandres revenues du feu, le bout de museau du poisson reniflant l’herbe d’un fleuve qui s’éveille. Le poids du sommeil retombé sur la nature, il élaborait alors un sommeil naturalisé, comme une source d’eau dans une grotte marine sous les eaux. Ses mots arrivaient comme l’invitation à un festival silencieux, où toutes les figures se donnaient la main et se séparaient en échangeant la date de la prochaine rencontre. Ses images passaient entre ses deux bras ouverts comme les poissons dans une cascade. Ainsi, chacun de ses rendez-vous et chacun de ses départs, chacune de ses images et chacun de ses souvenirs, vivaient de la permanence d’avoir touché son corps, impulsés par ses yeux, élaborant en chacun de ses pores le glissement d’une syllabe. Sa bouche, comme les poissons d’une cascade, avait place dans chacune des syllabes d
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