• Contenu principal
  • Menu
OpenEdition Books
  • Accueil
  • Catalogue de 15524 livres
  • Éditeurs
  • Auteurs
  • Facebook
  • X
  • Partager
    • Facebook

    • X

    • Accueil
    • Catalogue de 15524 livres
    • Éditeurs
    • Auteurs
  • Ressources numériques en sciences humaines et sociales

    • OpenEdition
  • Nos plateformes

    • OpenEdition Books
    • OpenEdition Journals
    • Hypothèses
    • Calenda
  • Bibliothèques

    • OpenEdition Freemium
  • Suivez-nous

  • Lettre d’information
OpenEdition Search

Redirection vers OpenEdition Search.

À quel endroit ?
  • Éditions de la Maison des sciences de l’...
  • ›
  • Amérique(s)
  • ›
  • Archéologie de l'Amazonie
  • ›
  • Camellones : l’agriculture monumentale s...
  • Éditions de la Maison des sciences de l’...
  • Éditions de la Maison des sciences de l’homme
    Éditions de la Maison des sciences de l’homme
    Informations sur la couverture
    Table des matières
    Liens vers le livre
    Informations sur la couverture
    Table des matières
    Formats de lecture

    Plan

    Plan détaillé Texte intégral Les Llanos de Venezuela Les Llanos de Bolivie Les savanes inondables des Guyanes Dater des tas de terre Grains sur buttes Organisation territoriale Entre nature et culture Aujourd’hui Auteur

    Archéologie de l'Amazonie

    Ce livre est recensé par

    Précédent Suivant
    Table des matières

    Camellones : l’agriculture monumentale sur champs surélevés

    Stéphen Rostain

    p. 147-168

    Texte intégral Les Llanos de Venezuela Les Llanos de Bolivie Les savanes inondables des Guyanes Dater des tas de terre Grains sur buttes Organisation territoriale Entre nature et culture Aujourd’hui Auteur

    Texte intégral

    1Camellón est la forme moderne du mot ancien caballón – abandonné au xviie siècle – qui apparaît dans le Diccionario de la Real Academia Española (Dictionnaire de l’Académie royale espagnole) pour désigner des élévations linéaires construites par des humains, et plus spécifiquement à fonction agricole. Ils sont signalés dès les débuts du contact avec les Européens en différents endroits d’Amérique du Sud, comme par Juan de Castellanos (1955, vol. 1 : 539), qui remarque des : « labranzas viejos camellones » (« labours sur d’anciens camellones » ) dans les Llanos du Venezuela en 1589 (Castellanos 1955, vol. 1 : 539).

    2Partout sur le continent sud-américain, et notamment en Amazonie, les populations précolombiennes ont creusé et édifié. Le plus souvent, ces terrassements étaient destinés à la mise en culture de terres peu propices à l’agriculture directe sans aménagements. Parfois, il fallait irriguer, car l’eau manquait, mais, dans la majorité des cas, le but était, au contraire, de contrôler un excès d’eau en drainant. La forme allongée était la plus populaire parmi les buttes, mais les morphologies sont en réalité souvent diverses et l’organisation interne des complexes montre de nombreuses variations. La grande distinction entre ces différents systèmes repose sur leur association avec un cours d’eau ou avec de l’eau stagnante, comme un lac ou un espace périodiquement inondé.

    3Longtemps camouflés par le couvert forestier, ces tertres et ces creusements échappèrent au regard. Il a fallu prendre de l’altitude pour repérer ces variations de la surface du sol, c’est pourquoi les terrassements ont souvent été révélés par l’archéologie aérienne (fig. 1). Les champs surélevés d’Amérique du Sud commencent à être étudiés dans les années 1960, lorsque William Denevan (1966) rédige son doctorat en géographie sur les Llanos de Mojos, en Bolivie. Peu après, James Parsons et Denevan (1967) signalent des structures comparables dans le nord de la Colombie. À partir de ce moment, des complexes de champs surélevés sont reconnus dans différentes régions des terres basses, mais aussi des terres hautes, d’Amérique latine. Ils sont trouvés dans le bassin littoral du Guayas et les vallées andines en Équateur, autour du lac Titicaca au Pérou et en Bolivie, dans le territoire maya au Mexique, dans les Llanos du Venezuela et au Suriname.

    Figure 1.

    Le même site de champs surélevés sur la côte ouest de la Guyane française vu du ciel (en haut) et du sol (en bas).

    Photos S. Rostain

    4À l’époque, les débats et polémiques sur les limitations environnementales des terres basses, soulevés par la publication de l’ouvrage de Betty Meggers (1971), activent les recherches sur le potentiel agricole de l’environnement équatorial amazonien. En Guyane française, l’auteur découvre à la fin des années 1980 des milliers de champs surélevés dans les savanes inondables côtières grâce à des survols en ultra léger motorisé (ULM), puis par l’interprétation stéréoscopique de photographies aériennes (Rostain 1991). Aujourd’hui, le développement de l’écologie historique et de l’archéologie des paysages, ainsi que le perfectionnement des méthodes d’analyse, notamment en archéobotanique, géomorphologie, pédologie et télédétection, expliquent le retour à l’étude de ces structures (Rostain 2010c). L’intérêt récent pour le développement durable justifie également une observation accrue sur des techniques agricoles alternatives, héritées d’une expérience multimillénaire des communautés autochtones.

    5Les buttes agricoles retiennent particulièrement l’attention, car elles occupent d’immenses superficies non forestières. Ces champs surélevés, aux dimensions et aux formes très variées, ont permis de cultiver du maïs et d’autres plantes, dans des aires inondables. En Amazonie, ces anciennes étendues agricoles apparaissent au Venezuela, en Bolivie et dans les Guyanes (fig. 2). Elles correspondent à des sociétés de terrassiers connaissant parfaitement les subtilités environnementales de leur territoire.

    Figure 2.

    Carte des régions amazoniennes avec des champs surélevés.

    Dessin S. Rostain

    6Aujourd’hui, les archéologues et les spécialistes des sciences de la Terre acceptent pleinement ces structures comme des réalisations humaines anciennes, et non comme des formations naturelles, même si l’on ne peut nier la présence de ces dernières dans plusieurs cas. L’organisation et l’architecture de ces constructions laissent penser à un possible travail communautaire. En divers points des basses terres sud-américaines, l’archéologie révèle depuis quelques années les indices de sociétés anciennes denses. Leur apparition est généralement datée des environs de 500-600 de notre ère et elles auraient culminé aux alentours de l’an 1000 pour entamer leur déclin vers 1200 de notre ère et disparaître aux alentours de la conquête européenne. En Amazonie, des champs surélevés ont été trouvés dans trois régions du Venezuela, de Bolivie et des Guyanes.

    Les Llanos de Venezuela

    7À la fin des années 1960, des champs surélevés furent signalés dans les Llanos d’Apure, au Venezuela et, peu après, le complexe archéologique de Caño Ventosidad fut étudié (Zucchi et Denevan 1979). Dans ce complexe, des billons sont répartis par paires divisées par un canal, perpendiculairement à la rivière, sur une superficie d’environ 1 550 ha (fig. 3). Les 500-525 structures dépassent presque toutes 1 000 m de longueur, certaines atteignant même 2 000 m. Leur largeur moyenne est de 15,5 m et celle du canal intermédiaire est de 4,4 m, tandis que l’espace moyen entre les paires est de 48,8 m. La hauteur des billons est de 25 à 50 cm au-dessus du canal, mais ce dernier s’est probablement colluvionné depuis son abandon et devait être au moins un mètre plus profond à l’origine (Zucchi et Denevan 1979).

    Figure 3.

    Camellones anciens du site de Caño Ventosidad, Llanos d’Apure, Venezuela.

    Photo Google Earth et dessin S. Rostain d’après Zucchi et Denevan 1979 : 133

    8Les prospections sommaires réalisées à l’époque n’ont pas permis la découverte de site d’habitat associé, mais, comme il a été observé plus récemment en Guyane française, les implantations précolombiennes peuvent être enterrées et indiscernables en surface. Le site le plus proche était localisé dans un îlot forestier à une dizaine de kilomètres de là. Il a été attribué à la culture El Choque, datée de 1200-1400 de notre ère et affiliée à la tradition Arauquinoïde. D’autres complexes de champs surélevés ont été repérés dans cette région, mais la forte sédimentation de ces savanes en a vraisemblablement occulté beaucoup (Denevan 2001). À plus d’une centaine de kilomètres à l’ouest de Caño Ventositad, le complexe de Hato La Calzada est plus modeste avec une superficie de 10,3 ha couverte de billons (Garson 1980). Dans le site de La Tigra, un réseau de canaux, d’une longueur totale de 3 800 m, organise un système de 35 ha de champs drainés (Spencer et al. 1994).

    9Bien que diverses cultures locales aient été définies pour décrire les ensembles culturels liés à ces différents complexes, les évidences céramiques montrent qu’elles appartiennent apparemment toutes à la mouvance dite de tradition culturelle Arauquinoïde (500-1500 de notre ère).

    Les Llanos de Bolivie

    10Depuis les premières observations d’Erland Nordenskiöld (2009) au début du xxe siècle, les champs surélevés des Llanos de Mojos en Bolivie ont attiré beaucoup de chercheurs (fig. 4). Les structures se trouvent dans une immense savane marécageuse de près de 90 000 km2. L’estimation de la superficie de ces ensembles a beaucoup varié d’un auteur à l’autre, selon qu’il comptait ou non la superficie des champs seuls, des complexes entiers ou des aires comprenant des complexes. Après avoir observé sur photographies aériennes près de 35 000 structures et une douzaine de grands complexes de petites buttes, Denevan (2001) calcule que la totalité occupe une superficie minimale de 6 000 ha, parmi lesquels il retient 2 600 ha de surface cultivable. En prenant une densité de 22 personnes par hectare cultivé, estimée d’après des expérimentations menées au Mexique, en Équateur et en Bolivie, le même auteur évalue une population de 57 200 habitants, à la condition, toutefois, que les 2 600 ha de champs fussent cultivés en même temps, ce qui est loin d’être démontré et plutôt improbable. John Walker (2004), lui, se fonde sur la main-d’œuvre nécessaire à la construction et l’entretien des champs surélevés comparés à leur capacité de charge et conclut que, dans la plupart des cas, une unité sociale de 20 à 100 personnes a pu construire en peu de temps un complexe de champs surélevés pour subvenir à ses besoins.

    Figure 4.

    Champs surélevés des Llanos de Mojos, Bolivie.

    Photo Google Earth

    11Quatre types principaux de structures agricoles précolombiennes sont distingués et localisés dans des aires spécifiques distinctes, les différents types étant rarement associés : les plateformes rectangulaires et basses, les billons étroits, les petites buttes et les champs drainés (Denevan 1966, 2001). Les plateformes mesurent jusqu’à 335 m de long pour 5 à 20 m de large et 15 à 60 cm de haut, et sont isolées ou disposées par groupes de plusieurs centaines (fig. 5). Les billons vont de 6 à 300 m de longueur, 1,5 à 6 m de largeur et 30 à 90 cm de hauteur. Ils accompagnent généralement d’autres constructions précolombiennes, tels les tertres artificiels d’habitat, les chemins surélevés et les deux derniers types de champs. Les petites buttes font 1,2 à 1,5 m de long, 0,6 à 0,9 m de large et 0,3 à 1 m de haut. Enfin, les champs drainés sont des parcelles rectangulaires entourées sur trois ou quatre côtés par des fossés de 60 à 120 m de long.

    Figure 5.

    Champs surélevés des Llanos de Mojos, Bolivie.

    Photos H. Prümers

    12La distribution spatiale des plateformes a été étudiée par Walker (2000, 2004) et Lombardo (et al. 2013 b) qui ont confirmé que ceux de la région d’Iruyañez sont situés dans les parties les plus élevées qu’offre l’environnement géographique. Le regroupement de ces œuvres pourrait correspondre à des familles ou à des groupes professionnels. La datation indique deux périodes d’utilisation des champs surélevés : les grandes structures du site de San Juan sont datées de 410-665 de notre ère et les plus petites d’El Cerro de 1281-1644 de notre ère (Walker 2004). Bien que Walker propose une continuité d’utilisation de mille ans, Lombardo (2010) estime que la diversité de ces travaux agricoles est si grande dans la zone d’étude qu’elle a certainement des implications chronologiques, fonctionnelles et culturelles.

    13Les plateformes situées au sud-ouest des plaines de Mojos mesurent de 6 à 300 m de long, de 1,5 à 6 m de large et de 30 à 90 cm de haut. Ils sont généralement associés à un grand nombre de remblais dans la pampa, à de grandes plateformes d’habitation et aux deux derniers types de champs. Alors qu’Erickson (2006a) propose que l’utilisation des champs cultivés ait commencé vers 900 avant notre ère et ait été établie et répandue à partir de 400 avant notre ère jusqu’à l’arrivée des Européens, la dernière datation au radiocarbone présentée par Rodrigues (et al. 2015) atteste que les plateformes de Bermeo au nord-est de l’établissement de San Ignacio ont été utilisées de manière intermittente entre 570-770 de notre ère et le xive siècle, lorsqu’elles ont été abandonnées.

    14De 500 à 1400 de notre ère, des sociétés stratifiées locales dirigèrent d’importants terrassements : les tertres résidentiels, les champs et les chemins surélevés, les canaux et les réservoirs artificiels. Les datations obtenues sur les champs surélevés donnaient une fourchette des douze premiers siècles de notre ère (Erickson 1995). Des datations plus récemment réalisées indiquent deux périodes d’utilisation des champs surélevés : les grandes structures de San Juan sont datées de 410-665 de notre ère et celles, plus petites, d’El Cerro de 1281-1644 de notre ère (Walker 2004).

    15Des champs expérimentaux furent récemment construits et cultivés dans cette région, fournissant 25 t de manioc à l’hectare et 2 t de maïs à l’hectare, ce qui est un très bon rendement (Erickson 1995, 2006a). Parmi les différentes tentatives expérimentales, on notera la plantation surprenante de la jacinthe d’eau (Eichornia crassipes, Pontederiaceae) dans un ensemble de champs surélevés (Saavedra Arteaga 2006).

    Les savanes inondables des Guyanes

    16La découverte par l’auteur, en 1989, des champs surélevés de Guyane française a immédiatement donné lieu à un programme de recherche pluridisciplinaire (Rostain 1991) (fig. 6). Quinze ans plus tard, deux nouveaux projets interdisciplinaires furent menés (Rostain 2008, 2015). La première tâche de ces deux projets fut de caractériser et de localiser précisément les structures grâce à des observations faites tant du ciel (interprétation stéréoscopique et survols) que du sol. Différentes méthodes ont été utilisées pour localiser, cartographier, photographier et étudier les terrassements précolombiens de la côte des Guyanes. Parallèlement à des prospections pédestres dans les marais et les savanes côtières du Suriname et de Guyane française, des survols à différentes altitudes ont été effectués avec un cerf-volant et un drone radiocommandé (le Pixy), ainsi qu’en ULM et en avion (McKey et Rostain 2010). L’interprétation stéréoscopique de plus de 2 000 photographies aériennes a permis de dresser une carte détaillée de ces structures et de décrypter au sein du paysage les impacts humains, anciens et récents (Rostain 1991, 2015). Ainsi, l’étude systématique par photo-interprétation de la plaine côtière de Guyane française a été accomplie. Aucun champ surélevé n’a été repéré à l’est de l’île de Cayenne, tous étant localisés à l’ouest. Ils s’étendent sur une superficie de près de 3 000 ha, mais il est probable que beaucoup de structures précolombiennes ont aujourd’hui disparu et ne sont donc pas comptabilisées.

    Figure 6.

    Complexe de Diamant, ouest de Kourou, Guyane française.

    Photo S. Rostain

    17Au Suriname, dans les années 1960, le forestier hollandais Frans Bubberman avait étudié des clichés aériens au 1:30 000e, sur lesquels il avait repéré plusieurs champs surélevés (Boomert 1980) (fig. 7). Il a repris récemment toute sa documentation pour refaire une carte plus précise des champs surélevés du littoral surinamien dans la continuité de celui de Guyane française (Rostain 2012a).

    Figure 7.

    Champs surélevés de l’extrême est de la côte du Suriname.

    Photos S. Rostain

    18Aucun travail systématique n’a été en revanche entrepris au Guyana (fig. 8). Toutefois, les indications éparses pointent la limite occidentale des champs surélevés sur le fleuve Berbice (Plew 2005). Il faut en revanche signaler la recherche archéologique menée par Michael Heckenberger ces dernières années, qui a démontré la grande profondeur chronologique des peuples agricoles dans cette région (Whitehead et al. 2010).

    Figure 8.

    Champs surélevés du bassin du Berbice, Guyana.

    Photos G. Simon

    19Au total, les champs surélevés occupent un territoire de près de 600 km de longueur d’ouest en est et de quelques kilomètres de largeur, entre le Guyana, le Suriname et la Guyane française, sur lequel la technique d’agriculture sur champs surélevés fut intensivement pratiquée à l’époque précolombienne.

    20Les champs surélevés des Guyanes peuvent être subdivisés en quatre types par leurs dimensions, formes et organisations :

    • les billons (c’est-à-dire des buttes rectilignes allongées) font 1 à 7 m de large, 5 à 30 m de long et 50 cm à 1,70 m de haut ;
    • les grandes buttes, arrondies ou, plus rarement, ovales, carrées ou rectangulaires, font 2 à 5 m de diamètre et mesurent entre 30 cm et 1 m de haut (fig. 9) ;
    • les buttes moyennes, arrondies, carrées ou rectangulaires, font 1,5 à 3 m de diamètre et mesurent 20 à 30 cm de haut. Elles sont organisées par groupes ;
    • les petites buttes, arrondies ou quadrangulaires, font 30 à 50 cm de diamètre et 20 à 30 cm de haut, on les trouve en bordure de barres prélittorales ou au milieu des savanes inondables.

    Figure 9.

    Champs surélevés du complexe de Diamant, Guyane française.

    Photos S. Rostain

    21On observe de claires variations régionales dans l’organisation, ce qui est symptomatique de différences culturelles, chronologiques ou techniques. Si les formes et l’organisation des champs surélevés varient dans l’espace, elles ont aussi évolué au cours du temps. Les fouilles archéologiques de sites d’habitat associés aux monticules agricoles ont permis de distinguer deux ensembles culturels. Outre les buttes de Dubulay au Guyana, datées de 1800 ans aP (Whitehead et al. 2010), les plus anciens champs surélevés des Guyanes se trouvent dans la partie occidentale, entre le Guyana et le Suriname. Ils sont de forme quadrangulaire, réunis en très petits groupes et d’époque Barrancoïde (300-650 de notre ère). Les buttes de la période Arauquinoïde (650-1400 de notre ère), présentes du Suriname à la Guyane française, revêtent diverses formes : arrondie, ovale, carrée, rectangulaire ou allongée.

    22Les variétés de formes et de dimensions des structures semblent traduire une gestion différentielle des terrains cultivés en fonction du drainage. En Guyane française et au Suriname, les champs surélevés ne sont pas disposés le long d’une rivière, comme ceux du Guyana et du Venezuela, mais sont construits dans les marais côtiers (fig. 10). Ils sont organisés par groupes ou en damiers et localisés entre les marécages et les formations de cheniers sableux. En superposant des cartes archéologiques, pédologiques, géologiques et botaniques, le recours à l’utilisation d’un système d’information géographique (SIG) a permis de définir deux principaux types d’utilisation des terres par les agriculteurs précolombiens, résultant essentiellement d’une gestion différentielle des terrains en fonction de leur drainage. Le premier semble avoir été propice à une utilisation durant la saison des hautes eaux, et le second à un usage en saison des basses eaux. Cette organisation selon les contraintes hydropédologiques sur certains sites (fig. 11) se vérifie par :

    • de grands champs surélevés arrondis construits dans les marais inondés toute l’année ;
    • au pied des barres prélittorales, les billons vont dans le sens de la pente pour en faciliter le drainage ;
    • sur les parties hautes, les plus sèches, les billons sont perpendiculaires à la pente pour, à l’inverse, retenir l’eau.

    23Par ailleurs, les complexes de buttes sont toujours localisés au sud des cordons sableux où étaient implantés des villages précolombiens. Au sein d’un même complexe, les buttes forment parfois des groupes homogènes d’un demi-hectare indépendants et accolés, qui correspondent peut-être à des réalisations familiales.

    Figure 10.

    Champs surélevés d’une zone inondée dans la savane de Maillard, en cours de destruction par l’assèchement et l’aplanissement du terrain avec du sable pour construire un lotissement.

    Photo S. Rostain

    Figure 11.

    Distribution des champs surélevés du complexe K-VIII de l’ouest de Kourou, Guyane française. Bleu = zone inondée. Vert = zone sèche.Points rouges = champs surélevés ronds dans la partie la plus profonde.Bandes orange = champs surélevés allongés dans le sens de la pente. Bandes jaunes = champs surélevés allongés perpendiculaires à la pente. Violet = surface de la zone sèche raclée pour construire les champs surélevés.

    Photo Institut géographique national et interprétation S. Rostain

    Dater des tas de terre

    24L’une des premières questions soulevées par la découverte de ces champs surélevés a été celle de leur âge. La parfaite adéquation entre la carte des structures et celle de la tradition Arauquinoïde dans les Guyanes est déjà un indice fort. Toutefois, cette tradition a une très longue existence (de près d’un millénaire) avec des datations plus anciennes à l’ouest qu’à l’est, suggérant une lente diffusion de cet ensemble culturel le long du littoral. À l’ouest du Suriname, les champs surélevés sont franchement associés à des tertres arauquinoïdes (culture hertenrits), car ils sont disposés autour, aussi leur attribution culturelle ne pose-t-elle pas de problème majeur, de même que leur datation entre 650 et 1250 de notre ère. C’est pourtant en Guyane française que la chronologie est la mieux cernée, notamment dans des sites de culture barbakoeba, grande utilisatrice de cette technique agricole. Ainsi, plusieurs implantations résidentielles et cimetières barbakoeba sont datés entre le xe et le xiiie siècle de notre ère. Par ailleurs, des matières organiques extraites du sommet des paléosols enterrés sous des champs surélevés alentour à l’ouest de Kourou ont été datées au 14C. Les âges obtenus sont de 1000-1030 de notre ère et 1250-1280 de notre ère (McKey et al. 2010). Ces datations correspondent à celles obtenues sur les sites barbakoeba de la côte occidentale de Guyane française et du littoral oriental du Suriname. Il est donc très raisonnable d’attribuer la construction des champs surélevés aux groupes barbakoeba qui vivaient sur les cordons sableux bordant les complexes de buttes.

    25D’autres éléments matériels permettent aussi de rapprocher les implantations arauquinoïdes et les structures de terre. Par exemple, une pelle en ébène verte, de 72 cm de long, a été découverte près d’un site de culture hertenrits dans les marécages occidentaux du Suriname (fig. 12). Elle est datée de 1240-1280 de notre ère (Versteeg 2003), c’est-à-dire contemporaine de l’occupation arauquinoïde. Cet outil, parfaitement adapté au travail de l’argile pour édifier des monticules, fut sans doute abandonné par l’un des terrassiers à l’époque. Une interprétation conforme au témoignage du père Jean Gumilla (1963) qui décrivait, en 1745, des autochtones construisant des champs surélevés avec des pelles en bois dans les Llanos vénézuéliens. En outre, des pelles similaires étaient encore utilisées au xixe siècle par quelques groupes autochtones comme les Ashluslay du Paraguay (Nordenskiöld 1929) (fig. 12).

    Figure 12.

    Pelles en bois d’Amazonie. À gauche, une pelle datée au 14C du xiiie siècle de notre ère, trouvée dans un marécage près du site de Prins Bernhard Polder, au Suriname. À droite, une pelle provenant des Amérindiens Ashuslay du Paraguay, au début du xxe siècle. E. Nordenskiöld 1929.

    Photos S. Rostain

    26En somme, les premiers champs surélevés des Guyanes furent construits dans cette région en même temps que ces grands monticules d’habitats, dès 300-650 de notre ère, par des populations barrancoïdes. Toutefois, c’est durant la période suivante, de 650 jusqu’à la veille de la conquête européenne vers 1400, que la pratique des terrassements agricoles explose. Ces communautés arauquinoïdes sont liées à un foyer culturel localisé sur le moyen Orénoque, à quelques centaines de kilomètres plus à l’ouest. Elles occupent progressivement un territoire de près de 600 km le long de l’étroite plaine côtière du Guyana, du Suriname et de la Guyane française.

    Grains sur buttes

    27Reste la question des plantes cultivées sur les champs surélevés. En se fondant sur l’alimentation actuelle des groupes amazoniens, on a souvent considéré que le régime alimentaire des populations précolombiennes devait, lui aussi, reposer sur le manioc. Les récentes recherches réalisées en Amazonie démontrent pourtant que cette « civilisation du manioc » était en fait peut-être autrefois moins prépondérante qu’aujourd’hui. En tout cas, les prélèvements de sédiments et l’analyse de phytolithes et pollens dans les champs surélevés de Guyane française ont montré la prédominance du maïs (McKey et al. 2010). La présence systématique du maïs (Zea mays) a, de cette manière, été mise en évidence, tant dans les aires agricoles que sur la poterie.

    28Par ailleurs, un parallèle convaincant a pu être tracé entre les plantes cultivées sur les champs surélevés et celles consommées dans les villages grâce à l’analyse couplée des phytolithes venant des buttes et des grains d’amidon extraits des anfractuosités d’ustensiles en céramique – des plaques destinées à cuire la nourriture – découverts lors des fouilles de sites d’habitat proches (Iriarte et al. 2010). Il y a donc une concordance entre les plantes cultivées sur les champs surélevés et celles consommées dans les villages d’agriculteurs. Finalement, la culture de la courge (Cucurbita) a été repérée et éventuellement celle de l’igname (Dioscorea), de la patate douce (Ipomoea batata) et de chou caraïbe (Xanthosoma sagittifolium), tandis qu’a été démontrée la consommation du manioc (Manihot esculenta) et du piment (Capsicum sp.) (Chacornac et Rostain 2015).

    29Les résultats archéobotaniques obtenus en Guyane française concordent avec ceux provenant de sites arauquinoïdes du moyen Orénoque où l’augmentation démographique des environs de 800 de notre ère correspondrait au remplacement du manioc par le maïs (Roosevelt 1980). Diverses études tendent à montrer que le maïs et le manioc furent les cultigènes principaux des champs surélevés d’Amérique du Sud (Zucchi et Denevan 1979 ; Darch 1983 ; Denevan et al. 1987 ; Spencer et al. 1994 ; McKey et al. 2010). Si le maïs est plus rarement cultivé aujourd’hui par les autochtones de Guyane, il faisait encore partie de leur diète à l’époque coloniale : « Leurs femmes vaquent à la culture des champs, sèment leur maïs, et plantent des patates douces et du manioc » (Coréal 1722 : n. p.). Pourtant, le texte du père Juan Gumilla (1963) mentionne en premier lieu le manioc amer et le maïs, associés à d’autres plantes de moindre importance. Cette diversité d’espèces cultivées en un même lieu rappelle la multiplicité de plantes différentes des abattis autochtones actuels de Guyane française (Grenand 1981 ; Gely 1984). En haute Amazonie, les Achuar d’Équateur plantent jusqu’à 100 espèces différentes dans leurs champs, dont plus de la moitié est cultivée dans la plupart d’entre eux (Descola 1986). Une chose est sûre, c’est que la diète amazonienne traditionnelle, quelle que soit l’ampleur de la technique agricole adoptée, intègre une variété de plantes.

    Organisation territoriale

    30L’étape suivante consiste à essayer de comprendre la structure sociale des populations précolombiennes vivant des champs surélevés. Pour cela, il faut intégrer l’ensemble dans la réflexion des œuvres de terre qu’ils réalisèrent. Infatigables terrassiers, ces agriculteurs précolombiens ne se contentèrent pas d’édifier ces magnifiques échiquiers agricoles. Si les champs surélevés constituent l’essentiel des aménagements conçus par les autochtones, d’autres travaux de transformation du milieu ont été menés par ces façonneurs de paysage. Ils appliquèrent également leurs compétences pour construire une multitude de monuments de terre aux fonctions diverses. Ce furent par exemple d’énormes tertres pour y implanter leurs villages, organiser leurs cérémonies et enterrer leurs défunts (voir chapitre 4 d’Heiko Prümers). Ils élevèrent aussi de longs chemins et des digues, ces dernières servant parfois de barrages pour piéger des poissons. Ailleurs, ils creusèrent des bassins, des réservoirs, des fossés périphériques, des chemins, des canaux et détournèrent des cours d’eau à l’aide de dérivations excavées. Tout un système hydraulique venait donc en complément d’un ensemble de terrassements surélevés au-dessus des eaux (fig. 13).

    Figure 13.

    Réseau de canaux irréguliers à côté du tertre de Wageningen, Suriname.

    Dessin S. Elies

    31Par exemple, pour revenir à l’exemple des Guyanes, les cheniers étant absents sur la côte occidentale du Suriname, les autochtones ont été obligés au préalable de construire des tertres artificiels pour y habiter. Le plus grand d’entre eux – nommé Hertenrits (le « chenier du cerf » en hollandais) – est de forme arrondie, d’un diamètre allant de 200 à 320 m, pour une hauteur maximale de 2,5 m. Il est entouré par un fossé de 20 à 100 m de largeur, d’où ont été extraites les briques d’argile crue qui ont servi à construire le tertre. Des fossés peu profonds régulièrement inondés, utilisés comme chemins ou canaux, rayonnent depuis l’élévation vers des ensembles de champs surélevés (fig. 14).

    Figure 14.

    Terrassements en territoire arauquinoïde autour du site d’Hertenrits. En haut : rouge = monticules ; bleu = rivières et canaux ; vert = zones de champs surélevés ; beige = chemins creusés utilisés comme canaux de navigation en période d’inondation. En bas : reconstitution artistique du territoire d’Hertenrits.

    Dessin et aquarelle S. Rostain

    32Sur le reste du littoral guyanais, les villages arauquinoïdes qui s’échelonnaient sur les cheniers (barres sableuses non inondées parallèles au rivage) se composaient de maisons familiales séparées par des places. Les champs surélevés étaient le plus souvent localisés au sud du chenier au sein des marais situés à proximité immédiate de ce point haut. Tout le territoire était soigneusement organisé.

    Entre nature et culture

    33À ce jour, l’origine des champs surélevés précolombiens d’Amérique latine est évidente pour tous. Pourtant, cela n’a pas toujours été le cas, car la reconnaissance de ces terrassements a connu quelques épisodes de polémiques houleuses. En effet, les partisans environnementalistes et déterministes, doutant de la nature anthropique des structures, se sont vite confrontés aux géographes et archéologues qui, eux, défendaient l’origine humaine et la fonction agricole des buttes. Les premiers niaient la capacité aux autochtones de mener de grands travaux d’ingénierie et des terrassements. Ils considéraient les champs surélevés comme le résultat de l’action de rongeurs ou de termites, de processus liés à la croissance des herbacées ou encore de mécanismes physiques de gonflement et de rétraction du sol comme les gilgaïs (Meggers 2003). À l’inverse, d’autres reconnaissaient dans ces buttes l’habileté indigène et la diversité des réponses agricoles précolombiennes à un milieu contraignant. Par exemple, plusieurs chercheurs des sciences de la Terre refusèrent catégoriquement de voir une œuvre humaine dans les champs surélevés de Guyane française lorsque je les découvris (Rostain 1991, 2021).

    34Ces débats passionnés, tout comme ceux initiés auparavant par les anthropologues et les botanistes sur l’anthropisation de la végétation amazonienne, contribuèrent à la définition et l’adoption de l’écologie historique en Amazonie (Balée 1987, 1989 ; Balée et Erickson 2006). La controverse se poursuit aujourd’hui, mais elle s’est réorientée sur d’autres thématiques, notamment la production agricole ou la densité démographique.

    35Toutefois, la question de l’origine naturelle ou anthropique de certains paysages tropicaux sud-américains n’est pas totalement résolue ou, du moins, est-elle devenue plus pointue. Il existe en effet de par le monde des formations strictement naturelles de physionomie ou d’agencement proches de ceux des champs surélevés. En revanche, ces derniers présentent des patrons spatiaux géométriques, sous forme de maille carrée, jamais observés pour des systèmes naturels (Renard et al. 2012).

    36De toutes les façons, la distinction entre structures naturelles ou anthropiques ne peut pas toujours être tranchée, car certaines buttes ont une origine mixte (Mayle et al. 2007). Si la nature anthropique des champs surélevés ne peut être mise en doute dans bien des cas, il ne faut pas non plus nier l’existence de paysages symétriques très particuliers formés par la nature, sans l’intervention de l’humain (Rietkerk et al. 2004 ; Rietkerk et Koppel 2008). Dans les champs surélevés, des processus naturels, conduits par des organismes « ingénieurs » tels que fourmis, termites, vers de terre et plantes, peuvent s’opposer aux incidences des phénomènes érosifs naturels (McKey et al. 2010 ; Renard et al. 2012 ; Mazz, Rostain et Mckey 2016). En effet, ces communautés colonisent préférentiellement les anciennes buttes, chacune abritant au moins un nid de fourmis, et concentrent leurs activités sur ces structures, seuls sites où les sols demeurent exondés en saison de pluies, les insectes pouvant alors se réfugier dans les chambres supérieures pour échapper à l’eau. Ils doivent donc remonter régulièrement des matériaux au sommet afin de maintenir leur habitat au-dessus du niveau d’inondation. En Guyane française, les fourmis champignonnistes Acromyrmex sont une composante bien visible de cette communauté d’organismes qui maintiennent les buttes. En transportant de la matière sur les buttes et en réduisant l’érosion, ces communautés – que l’on est en droit de désigner comme des « ingénieurs d’écosystème » – maintiennent la concentration des ressources (et d’organismes) sur les buttes, et leur déplétion dans la matrice. Ces paysages partiellement d’origine humaine semblent donc se comporter comme des écosystèmes autoorganisés naturels (McKey et al. 2014).

    37Cette conjonction d’effets biologiques explique en définitive le maintien des paysages agricoles précolombiens. Ces « espèces ingénieurs » ont pris le relai des autochtones dans le maintien des monticules, les préservant ainsi jusqu’à nos jours. En quelque sorte, les mammifères sociaux agriculteurs que sont les humains ont édifié les buttes qui ont ensuite été entretenues par les insectes sociaux agriculteurs que sont les fourmis – puisque ces animaux rapportent des végétaux dans leurs nids afin de les mastiquer pour les transformer en compost afin de cultiver des champignons pour leur alimentation. Ces paysages ont donc bien été « coconstruits » par les ingénieurs humains et naturels. La forme observée par l’archéologue procède ainsi d’une genèse à la fois culturelle et naturelle.

    Aujourd’hui

    38La technique des champs surélevés disparaît aux alentours de la conquête européenne. Seuls de rares textes la signalent encore à l’époque coloniale dans le bassin de l’Orénoque. De nos jours, quelques paysans noir-marron ou haïtiens surélèvent parfois leurs plantations en construisant de petits champs surélevés (Rostain 1991). Ces structures ne sont cependant pas comparables aux énormes complexes de champs surélevés autochtones en termes de surfaces cultivées. Elles sont en effet édifiées sur de petites surfaces au sommet des barres sableuses non inondables, et jamais au sein de marais. Il semblerait que cette technique soit d’origine africaine, puis introduite dans les Guyanes à l’époque coloniale, voire même, très récemment, en ce qui concerne les agriculteurs haïtiens installés près de Kourou (Rostain 2012a). De toutes les manières, cette stratégie est sans relation directe avec le monde précolombien.

    39Une autre technique, héritée d’adaptations agricoles coloniales, est également bien répandue aujourd’hui, surtout dans les Guyanes. Ce sont des planches agricoles, aux dimensions très variables, mais toujours très basses puisqu’elles dépassent rarement une vingtaine de centimètres de hauteur. Elles sont rectangulaires, avec une dimension maximale de 4 m de long et 1 m de large, mais peuvent parfois s’allonger notablement sur des mètres (Rostain 2012a). Ces planches agricoles sont disposées en damier régulier, dans des aires sableuses non inondables (Rostain 2010a) (fig. 15). Malgré leur faible hauteur, elles se conservent bien, notamment sous couvert forestier, ainsi que le montrent des découvertes faites à l’occasion de défrichements récents.

    Figure 15.

    En haut, cliché infrarouge de planches agricoles modernes (bleu) sous la jungle (rouge) près du site archéologique de Sable Blanc, côte occidentale de Guyane. En bas, champs surélevés précolombiens visibles sous les polders modernes de Mana en Guyane.

    Photos L’Avion Jaune et S. Rostain

    40Le patrimoine précolombien exceptionnel représenté par les champs surélevés précolombiens subit malheureusement des attaques irré-versibles (Rostain et McKey 2015). Il est, dans plusieurs cas, effacé par différents processus naturels, impliquant l’érosion, l’alluvionnement ou le colluvionnement.

    41Mais, ce sont le plus souvent des remaniements anthropiques récents qui provoquent les phénomènes actuels d’immersion totale de certaines structures ou, au contraire, la colonisation de la forêt. Hormis ces conséquences limitées, d’autres causes provoquent des dommages irrémédiables. Depuis l’époque coloniale, mais se poursuivant aujourd’hui, le feu, l’agriculture et l’élevage, les terrassements, et les travaux sur les cordons élevés associés aux zones humides accélèrent la destruction des structures de terre précolombiennes.

    42C’est cette menace d’origine humaine, avec, souvent, une destruction directe par des travaux modernes, qui est plus à craindre. Ainsi, les dangers comprennent des interventions actives, tels des drainages, des labours, des travaux immobiliers ou des conversions en champs de riz (fig. 15). Bien plus, les sites domestiques archéologiques, associés aux champs surélevés, font eux-mêmes face à des dangers redoutables. Dans les Guyanes, la construction de routes, de maisons et de bâtiments divers a oblitéré des dizaines de kilomètres de cordons sableux supportant ces sites, tandis que d’autres ont été réduits à néant par les nombreuses carrières de sable. On peut juste regretter que la gestion des savanes ait été abandonnée aux seules mains de ceux qui font autorité en matière de bulldozer, de tracteur et de Caterpillar.

    43En fait, les Occidentaux ont longtemps considéré l’Amazonie comme un simple gisement de ressources naturelles où l’on pouvait puiser indéfiniment en toute impunité. On sait aujourd’hui qu’une telle exploitation incontrôlée a des conséquences catastrophiques. Il en est de même avec l’héritage patrimonial et culturel laissé par les premiers habitants de la plus grande forêt tropicale du monde. Leurs traces, qu’elles soient discrètes ou monumentales comme les champs surélevés, sont un trésor à préserver, à protéger et à respecter.

    Auteur

    • Stéphen Rostain

      IdRef : 029189837

    Précédent Suivant
    Table des matières

    Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.

    Voir plus de livres
    Harlem

    Harlem

    Une histoire de la gentrification

    Charlotte Recoquillon

    2024

    Le pays des « passions tristes »

    Le pays des « passions tristes »

    Tragédies politiques à la lumière des émotions en Colombie

    Mauricio Garcia Villegas Anne Bardez (trad.)

    2024

    Black Metropolis

    Black Metropolis

    Une ville dans la ville, Chicago 1914-1945

    St. Clair Drake et Horace R. Cayton Anne Raulin et Danièle Joly (éd.)

    2024

    Archéologie de l'Amazonie

    Archéologie de l'Amazonie

    Stéphen Rostain et Carla Jaimes Betancourt (dir.)

    2025

    Voir plus de livres
    1 / 4
    Harlem

    Harlem

    Une histoire de la gentrification

    Charlotte Recoquillon

    2024

    Le pays des « passions tristes »

    Le pays des « passions tristes »

    Tragédies politiques à la lumière des émotions en Colombie

    Mauricio Garcia Villegas Anne Bardez (trad.)

    2024

    Black Metropolis

    Black Metropolis

    Une ville dans la ville, Chicago 1914-1945

    St. Clair Drake et Horace R. Cayton Anne Raulin et Danièle Joly (éd.)

    2024

    Archéologie de l'Amazonie

    Archéologie de l'Amazonie

    Stéphen Rostain et Carla Jaimes Betancourt (dir.)

    2025

    Voir plus de chapitres

    Préface

    L’Amazonie et la préservation de la diversité culturelle et naturelle

    Stéphen Rostain et Jaimes Betancourt Carla

    Quand nature et culture se rencontrent

    Stéphen Rostain

    Voir plus de chapitres
    1 / 2

    Préface

    L’Amazonie et la préservation de la diversité culturelle et naturelle

    Stéphen Rostain et Jaimes Betancourt Carla

    Quand nature et culture se rencontrent

    Stéphen Rostain

    Accès ouvert

    Accès ouvert freemium

    ePub

    PDF

    PDF du chapitre

    Suggérer l’acquisition à votre bibliothèque

    Acheter

    Édition imprimée

    • amazon.fr
    • decitre.fr
    • mollat.com
    • leslibraires.fr
    • placedeslibraires.fr
    • lcdpu.fr
    ePub / PDF

    Archéologie de l'Amazonie

    X Facebook Email

    Archéologie de l'Amazonie

    Ce livre est diffusé en accès ouvert freemium. L’accès à la lecture en ligne est disponible. L’accès aux versions PDF et ePub est réservé aux bibliothèques l’ayant acquis. Vous pouvez vous connecter à votre bibliothèque à l’adresse suivante : https://freemium.openedition.org/oebooks

    Suggérer l’acquisition à votre bibliothèque Acheter ce livre aux formats PDF et ePub

    Si vous avez des questions, vous pouvez nous écrire à access[at]openedition.org

    Archéologie de l'Amazonie

    Vérifiez si votre bibliothèque a déjà acquis ce livre : authentifiez-vous à OpenEdition Freemium for Books.

    Vous pouvez suggérer à votre bibliothèque d’acquérir un ou plusieurs livres publiés sur OpenEdition Books. N’hésitez pas à lui indiquer nos coordonnées : access[at]openedition.org

    Vous pouvez également nous indiquer, à l’aide du formulaire suivant, les coordonnées de votre bibliothèque afin que nous la contactions pour lui suggérer l’achat de ce livre. Les champs suivis de (*) sont obligatoires.

    Veuillez, s’il vous plaît, remplir tous les champs.

    La syntaxe de l’email est incorrecte.

    Référence numérique du chapitre

    Format

    Rostain, S. (2025). Camellones : l’agriculture monumentale sur champs surélevés. In S. Rostain & C. Jaimes Betancourt (éds.), Archéologie de l’Amazonie (1‑). Éditions de la Maison des sciences de l’homme. https://doi.org/10.4000/13apr
    Rostain, Stéphen. « Camellones : l’agriculture monumentale sur champs surélevés ». In Archéologie de l’Amazonie, édité par Stéphen Rostain et Carla Jaimes Betancourt. Paris: Éditions de la Maison des sciences de l’homme, 2025. https://doi.org/10.4000/13apr.
    Rostain, Stéphen. « Camellones : l’agriculture monumentale sur champs surélevés ». Archéologie de l’Amazonie, édité par Stéphen Rostain et Carla Jaimes Betancourt, Éditions de la Maison des sciences de l’homme, 2025, https://doi.org/10.4000/13apr.

    Référence numérique du livre

    Format

    Rostain, S., & Jaimes Betancourt, C. (éds.). (2025). Archéologie de l’Amazonie (1‑). Éditions de la Maison des sciences de l’homme. https://doi.org/10.4000/13apn
    Rostain, Stéphen, et Carla Jaimes Betancourt, éd. Archéologie de l’Amazonie. Paris: Éditions de la Maison des sciences de l’homme, 2025. https://doi.org/10.4000/13apn.
    Rostain, Stéphen, et Carla Jaimes Betancourt, éditeurs. Archéologie de l’Amazonie. Éditions de la Maison des sciences de l’homme, 2025, https://doi.org/10.4000/13apn.
    Compatible avec Zotero Zotero

    1 / 3

    Éditions de la Maison des sciences de l’homme

    Éditions de la Maison des sciences de l’homme

    • Mentions légales
    • Plan du site
    • Se connecter

    Suivez-nous

    • Flux RSS

    URL : http://www.editions-msh.fr/

    Email : prouleau@msh-paris.fr

    Adresse :

    54 boulevard Raspail

    75006

    Paris

    France

    OpenEdition
    • Candidater à OpenEdition Books
    • Connaître le programme OpenEdition Freemium
    • Commander des livres
    • S’abonner à la lettre d’OpenEdition
    • CGU d’OpenEdition Books
    • Accessibilité : partiellement conforme
    • Données personnelles
    • Gestion des cookies
    • Système de signalement