Présentation de l’ouvrage
p. 11
Texte intégral
1Encore un colloque sur Lascaux ?
2Après tant de littérature, d’opinions, d’images publiées depuis soixante-dix ans, on pourrait croire le sujet épuisé. En fait, c’est une approche entièrement nouvelle que propose le présent ouvrage, issu de la rencontre internationale organisée à Paris par le ministère de la Culture et de la Communication en février 2009. Dans le contexte de crise et de controverses qui entourait la grotte de Lascaux depuis quelque temps, les objectifs du colloque étaient à la fois simples et ambitieux : nous voulions informer, débattre, anticiper.
3D’abord informer. Impliqué dans la conservation de la cavité depuis sa protection parmi les monuments historiques en décembre 1940, le ministère a ouvert ses archives, communiqué les dossiers, les relevés photographiques, les études scientifiques avec leurs protocoles et leurs résultats – sans réserve aucune. Plusieurs interventions publiées ici établissent désormais avec précision les étapes de cette histoire et donnent les sources indispensables pour les comprendre.
4Débattre, ensuite. La décision prise par l’Unesco en 1979 d’inscrire sur la Liste du patrimoine mondial la grotte de Lascaux, avec d’autres cavités de la vallée de la Vézère, a fait de ce coin de France un bien universel. Cette responsabilité écrasante nous a conduits à ouvrir le plus largement possible la confrontation aux experts du monde entier. Tous ont répondu à l’invitation du ministère de la Culture et de la Communication à Paris, qui rassembla une vingtaine de spécialistes venus de dix pays. Pour faire honneur à leur savoir, le programme des journées fut conçu pour laisser exactement le même temps aux débats et aux communications elles-mêmes. Ce parti fut salué par tous les participants, en ce qu’il permit les comparaisons, les critiques, les contestations, et mit face à face les protagonistes, anciens et actuels, de la conservation de la grotte. La transcription soigneuse des débats, dont on recommandera la lecture, restitue la vigueur, parfois polémique, de ces échanges. Elle donne le climat de l’amphithéâtre, où plus de deux cent cinquante auditeurs se pressèrent au cours des deux journées, mêlant défenseurs et détracteurs, dans une grande liberté de parole.
5Enfin anticiper. Il n’y aurait pas de quoi s’en flatter –c’est la règle de l’action publique–, si ce n’était précisément là le cœur des difficultés. S’obliger au bilan des années passées conduit les responsables à la plus grande prudence ; mais comment faire quand s’affrontent des « cultures » opposées, dès lors qu’il s’agit d’évaluer des dommages futurs, d’imaginer des remèdes inconnus ? En voici deux exemples.
6À Lascaux, comme dans d’autres cavités perturbées, il s’agit de concilier l’expérimentation dans un milieu souterrain sensible et complexe sans prendre aucun risque pour la conservation du bien, il s’agit de tester tout procédé nouveau en s’assurant que la substance originelle ne peut être perdue. On découvrira dans les interventions publiées ici des hypothèses innovantes de jeunes chercheurs, voisinant avec des enquêtes de laboratoires confirmés. Le colloque postulait qu’un travail collégial de bonne foi peut aider à surmonter l’incompréhension entre disciplines étrangères : les débats l’ont prouvé, qui ont favorisé les comparaisons entre pays.
7Il faut aussi gérer le télescopage des temps différents, celui de la crise qui déclenche l’urgence en même temps que la polémique, et celui de la recherche, long, tâtonnant, modeste, qui doit préférer les interrogations aux évidences. Le lecteur attentif relèvera dans l’ouvrage plusieurs de ces moments de confrontation, où le président du colloque et après lui des chercheurs familiers de la grotte expriment avec sincérité le sentiment de responsabilité qui pèse sur chacune des décisions qu’ils sont amenés à prendre ou à prescrire.
8Car le vrai défi, c’est bien de ne pas sombrer dans la juxtaposition des expertises, mais de juguler la complexité des données à traiter, pour acquérir une vision globale. Les textes qui suivent, offerts en français et en anglais, témoignent de la volonté des hommes et des femmes responsables de Lascaux, de livrer généreusement la matière de leurs réflexions actuelles, et de partager avec le monde entier cet héritage exceptionnel – pour mieux en assurer l’avenir.
9Isabelle Balsamo,
chef du service de l’Inspection des patrimoines au ministère de la Culture et de la Communication
Première demi-journée du symposium :
vue générale de l’assistance dans l’auditorium Colbert.

© D. Plowy.
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