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Mots de l'étranger

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Theodor W. Adorno

En mémoire d’Eichendorff

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Extrait du texte

Je devine à travers un murmure. Le contour subtil des voix anciennes Et dans les lueurs musiciennes, Amour pâle, une aurore future !
Verlaine

Dans une culture faussement ressuscitée, la relation au passé spirituel est empoisonnée. L’amour du passé s’accompagne à maints égards de rancune envers le présent, de la croyance en une possession, que pourtant l’on perd aussitôt qu’on s’imagine ne la perdre jamais, du sentiment de bien-être que procure la familiarité avec la tradition, sous l’égide de laquelle s’abritent volontiers de l’épouvante ceux dont la connivence a contribué à la préparer. Le choix contraire à tout cela semble tranché : c’est le geste du « Ça ne va plus ». L’allergie au faux bonheur d’une vie préservée s’empare également avec virulence du rêve d’un vrai bonheur, et la réaction exacerbée à la sentimentalité se condense en ce point abstrait du pur maintenant, au regard duquel le temps jadis a autant de valeur que s’il n’avait jamais existé. L’expérience serait l’unité de ...

© Éditions de la Maison des sciences de l’homme, 2022

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