Note de l’éditeur
p. 9-10
Texte intégral
1Le présent ouvrage réunit deux types d’images : celles que Steffen Haug a identifiées comme faisant partie de la « documentation visuelle » que Walter Benjamin pensait joindre à son Livre des passages et qui sont mentionnées dans les « notes et matériaux » accumulés pour ce projet ; et celles que Steffen Haug a choisies, à titre comparatif ou discursif, pour enrichir son propos et son analyse du corpus iconographique exhumé. Nous avons opté pour une numérotation continue, sans les distinguer les unes des autres. Quand une note des Passages fait mention de plusieurs images, celles-ci sont alors regroupées sous un même chiffre, que complète une déclinaison de lettres minuscules (par exemple fig. 110a-m, pour une série de dessins de Victor Hugo).
2La plupart des notes iconographiques de Benjamin sont citées dans le texte de Haug. Nous les avons toutes rassemblées par ailleurs en annexe, où elles sont classées dans l’ordre alphabétique des « liasses », dont les intitulés (par exemple G « Expositions, publicité, Grandville ») et la numérotation (par exemple [G 2a, 7]) sont le fait de Benjamin lui-même. Ce corpus textuel atteste de l’importance des images dans l’économie des Passages et de la nécessité de relier la collecte d’images menée pour ce projet aux éléments de la théorie visuelle que Benjamin a développée ailleurs dans son œuvre. Il nous a semblé intéressant de proposer cette expérience de lecture suivie, qui révèle sans détour la nature foncièrement morcelée et discontinue, parfois énigmatique d’un projet de livre dont nul ne peut dire exactement ce qu’il eût été s’il avait abouti.
3Dans la mesure du possible, nous reproduisons ici les images que Benjamin a probablement eues sous les yeux, qu’il les ait trouvées dans des livres ou découvertes dans les portefeuilles et les recueils factices du Cabinet des estampes de la Bibliothèque nationale, où il a conduit l’essentiel de ses recherches iconographiques lors de la seconde phase de travail à son Livre des passages, entre 1934 et 1939, pendant son exil parisien. En plus des informations habituelles (auteur, titre, date, technique et dimensions), nous indiquons donc en légende la source précise de chaque image (par exemple Nouveaux Tableaux de Paris, Paris, 1928, pl. 63 pour la lithographie L’homme affiche sur la place des Victoires de Jean Henri Marlet, ou dans le recueil « Caricatures intellectuelles (entre 1820 et 1835 environ) », Paris, BnF, Cabinet des estampes, Tf-41-Pet. fol., pl. 19 pour la lithographie Tout ce qui est nouveau est toujours beau d’Auguste Raffet).
4Gravures et dessins de presse, tracts, réclames, caricatures, affiches, photographies : la plupart des images choisies par Benjamin appartiennent au tout-venant de la production visuelle à grand tirage du xixe siècle, où s’inaugure l’avènement de ce qu’on appellerait un jour les « mass media ». À peine publiées, beaucoup étaient vouées à disparaître, emportées dans le flux de la nouveauté, vite remplacées par d’autres. Si elles sont souvent d’une qualité de reproduction médiocre, nous avons tenu néanmoins à les faire voir ici sans fard, telles que Benjamin les a vues.
5Découpées puis collées dans les albums du Cabinet des estampes, une grande partie des gravures qui ont attiré l’attention de Benjamin ne sont pas datées. Quelques planches portent une inscription d’année, rajoutée ultérieurement à la main par les bibliothécaires. Dans de nombreux cas, Steffen Haug a pu en établir toutefois une datation, en s’appuyant sur leur publication dans la Bibliographie de la France (abrégée ici BdF dès la deuxième occurrence), où a paru chaque semaine, de 1811 à 1880, la liste des ouvrages imprimés diffusés en France et soumis au dépôt légal.
6L’indication Fig. XX est suivie, dans la légende d’une « image de Benjamin », par un renvoi à la cote alphanumérique de la note correspondante du Livre des passages, par exemple → [G 3, 6], selon la nomenclature qu’il avait lui-même définie. De l’invitation ainsi faite au lecteur d’aller et venir entre les images et les textes réunis en annexe, nous espérons que puisse surgir ce nécessaire désir d’interprétation qui sera le prolongement naturel du présent ouvrage et de l’invention des images benjaminiennes à laquelle il procède.
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