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    Plan

    Plan détaillé Texte intégral 10.1 Le site de la Préhistoire à l’Antiquité tardive10.2 Le Moyen Âge : la naissance des faubourgs10.3 De la destruction du faubourg à nos jours Notes de fin Auteur

    Marseille, du Lacydon au faubourg Sainte-Catherine (Ve s. av. J.-C.-XVIIIe s.)

    Ce livre est recensé par

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    Table des matières

    Chapitre 10. Synthèse

    9 Geomorphology, fauna and paleo‑environment

    9 Geomorfología, fauna y paleoambiente

    9 Geomorfologia, fauna e paleoambiente

    Marc Bouiron

    p. 307‑322

    Résumés

    Cette étude contribue à redonner vie à un espace important de la cité, situé au sud de celle‑ci et à proximité immédiate du port. Son évolution est emblématique de la croissance de Marseille, qui suit le rythme de l’activité économique du port.

    The present study brings to life an important area of Marseille, situated to the south of the city in close proximity to the port. Changes in the area echo the growth of Marseille, following the rhythm of economic activity in the port.

    Este estudio contribuye a dar vida a un importante espacio de la ciudad, situado al sur y muy próximo al puerto. Su evolución es emblemática del crecimiento de Marsella que sigue el ritmo de la actividad económica del puerto.

    Questo studio contribuisce a riare vita ad uno spazio importante della città, situato a sud di essa nelle vicinanze immediate del porto. La sua evoluzione è emblematica delia crescita di Marsiglia che segue il ritmo dell’attività economica del porto.

    Texte intégral 10.1 Le site de la Préhistoire à l’Antiquité tardive10.1.1 L’évolution du littoral et la création de la voie longeant le rivage10.1.2 Aménagement du port à l’époque romaine10.1.3 La création du Plan Fourmiguier10.2 Le Moyen Âge : la naissance des faubourgs10.2.1 Les xie et xiie s.10.2.2 L’extension urbaine de la fin du xiie s. à la fin du xiiie s.10.2.3 Les possessions de Saint‑Victor dans la première moitié du xiiie s.10.2.4 L’hôpital du Saint‑Sépulcre10.2.5 Faubourg et activité au xiiie s.10.2.6 Le faubourg Sainte‑CatherineLotissement et occupation du solLes maisons10.3 De la destruction du faubourg à nos jours10.3.1 Du milieu du xive s. à l’agrandissement par Louis XIVLa destruction de l’habitat et l’évolution des anciens îlotsLa fortification du Plan FourmiguierLe Petit Jeu de Mail10.3.2 Après l’agrandissement Notes de fin Auteur

    Texte intégral

    1Au terme de cette étude, il importe de replacer les apports de la fouille dans un cadre géographique et historique plus large. La fouille de la place du Général‑de‑Gaulle, malgré les contraintes techniques (et en particulier la fouille extrêmement rapide de certaines phases), permet de reconsidérer l’histoire de ce fond de calanque‑estuaire qu’est le Lacydon. Sans sous‑estimer les vestiges antiques ni ceux de la période moderne, une attention particulière doit être portée aux phases médiévales. Pour la première fois à Marseille, nous avons la possibilité de comprendre la formation d’un quartier extra muros, autour d’édifices particuliers.

    10.1 Le site de la Préhistoire à l’Antiquité tardive

    2La question du tracé du rivage a souvent été abordée. Les données dans la zone de la Bourse ont été connues très tôt par des travaux d’assainissement et exploitées dès le début du siècle par G. Vasseur (1914) et M. Clerc (1927‑1929). Les restitutions proposées faisaient pénétrer la mer plus profondément à l’intérieur des terres durant l’Antiquité dans la partie orientale du Vieux‑Port (Denizot 1957 : 46). La fouille a permis de montrer que le marécage existant à l’arrivée des Grecs était partiellement comblé par l’homme dès le début du ive s. av. J.‑C. et qu’à partir de cette époque, le rivage était relativement proche du plan d’eau actuel. À l’époque romaine, le rivage est situé à l’ouest de la place du Général‑de‑Gaulle. Au cours du ve s. ap. J.‑C., le comblement progressif du port entraîne la création d’une plage. Le rivage ne changera guère ensuite jusqu’au Moyen Âge.

    10.1.1 L’évolution du littoral et la création de la voie longeant le rivage

    3fig. 269

    4Les niveaux les plus profonds sont homogènes sur la totalité du site. Le substrat géologique, constitué d’une alternance de marnes et de fines couches sableuses, est recouvert d’une grande épaisseur de remblais marins. Le site est, à l’époque préhistorique, sous la mer. L’étude géomorphologique de C. Morhange (cf. supra chap. 9.2.1.1) rend parfaitement compte de cette physionomie.

    5Les données disponibles grâce à la fouille pour la période antérieure à la fondation de la cité sont importantes. Sur le substrat géologique, une couche sableuse (au nord) ou sabloargileuse (au sud) témoigne d’un apport sédimentaire dû certainement à un colluvionnement. C’est à l’époque néolithique que sont déposés les premiers sédiments d’origine marine. Ils apparaissent au nord à la cote de –4,20 m ngf et datent entre 5474 et 4354 av. J.‑C. La remontée de la mer a donc été rapide puisque l’entrée de la grotte Cosquer (à –37 m ngf) a eu lieu vers 7000 av. J.‑C. (Sartoretto et al. 1995). Des datations effectuées sur le premier corps sédimentaire marin de la place Jules‑Verne ont donné une fourchette très proche (4600‑4211 av. J.‑C.) (Morhange et al. 1995 : 75). À la fin du Néolithique, la mise en culture des pentes des collines environnantes accentue l’apport sédimentaire dans le plan d’eau.

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    FIG. 269 ‒ Marseille à l’époque grecque (1re moitié du IVe s. av. J.‑C.)

    DAO M. Bouiron/Ville de Marseille

    6Au début de l’âge du Bronze, des hommes sont venus au fond de la calanque, où ils ont rejeté les coquilles des huîtres qu’ils ont consommées. La couche constituée par ces coquilles est antérieure à 2111‑1221 av. J.‑C. Cette action de l’Homme est sans doute plus ancienne que la constitution de l’amas coquillier de la place Jules‑Verne (entre 1390‑1040 av. J.‑C. à la base et 990‑657 av. J.‑C. au sommet) (Morhange, Weydert 1995 : 55). Ce déplacement est peut‑être dû à la transformation du rivage en une zone marécageuse, créée par l’érosion des sols pédologiques.

    7À l’arrivée des Grecs, le site de la place du Général‑de‑Gaulle est vraisemblablement proche du rivage ; un atterrissement lent, lié sans doute à la présence d’un ruisseau s’écoulant dans l’axe de la Canebière (Rambert 1927 : 148‑149 ; Guéry 1992 : 111)1, a modifié progressivement le tracé du littoral. Un deuxième ruisseau a pu également exister entre la colline de la Garde et la Plaine, à l’emplacement de la vallée Fogaresse. L’hypothèse a d’ailleurs été débattue en imaginant que l’Huveaune ait pu, à l’époque préhistorique, se déverser dans le Vieux‑Port. Même s’il est difficile, dans l’état actuel de nos connaissances, de parler d’un véritable ruisseau, il est certain que l’érosion des pentes a dû entraîner un apport sédimentaire important depuis le sud.

    8À la fin du ve s. av. J.‑C. débute l’aménagement de la partie orientale du Lacydon. La composition archéologique du comblement fouillé sous la place (amphores marseillaises prises dans un comblement de terre) est en tout point identique à celle retrouvée au Jardin des Vestiges2, et de même datation. On peut admettre que les travaux à cette époque ont porté sur une zone beaucoup plus large qu’on ne le croyait. Sur le chantier du Jardin des Vestiges, ils sont à l’origine de la création de la voie d’Italie (Guéry 1992 : 112 ; Tréziny 1996 : 233‑235), de zones funéraires au nord (Bertucchi 1992 : 132 sq.) et d’un quai au sud de la voie (Guéry 1992 : 112). Cet ensemble s’organise au pied de l’enceinte archaïque de la fin du vie s. av. J.‑C.

    9Le site de la place du Général‑de‑Gaulle ne présente aucune trace d’aménagement portuaire dans la partie nord, les trois quarts sud étant remodelés à l’époque romaine, faisant disparaître d’éventuelles structures grecques. On peut penser que ces travaux de remblaiement sont nécessités par la création d’une circulation terrestre vers la rive sud. Cette voie rejoignait certainement la voie d’Italie au nord, avant l’entrée de la ville. Cette hypothèse pourrait expliquer l’absence de nécropole sur la rive sud avant la fin du ve s. puisque la nécropole du Carénage semble n’être utilisée qu’à partir de cette époque (Gantès 1992 : 77) ; de la même manière, la nécropole de l’est est tributaire de la voie d’Italie (Gantès 1992 : 79). Cette voie « de la rive sud » a pu suivre le contour du littoral, un peu à l’intérieur des terres, en longeant l’anse profonde de l’angle S‑E du Vieux‑Port3 avant de tourner à l’ouest vers la rive sud. Peut‑être, dès cette époque, la voie avait‑elle un embranchement vers le sud. La butte retrouvée dans la partie N‑E de la fouille est sans doute très proche de cette voie.

    10La période hellénistique est représentée par quelques fragments de céramique et par une monnaie. La datation proposée pour ces objets pourrait témoigner d’une occupation vers la fin du iiie s. On ne peut exclure un aménagement du fond du port dès cette époque, même s’il est plus vraisemblable de dater le canal et l’empierrement de l’époque romaine (sans doute au même moment que l’aménagement de la darse du Jardin des Vestiges). Les vestiges ont dû alors disparaître.

    10.1.2 Aménagement du port à l’époque romaine

    11fig. 270

    12Les aménagements d’époque romaine ont détruit une grande partie des niveaux grecs, excepté dans la zone nord où ceux‑ci sont directement recouverts par une structure de la fin de l’Antiquité. L’installation de la vaste calade, drainée à l’est par un caniveau et limitée au nord par un canal aux bords parementés à l’aide de pieux, est précédée d’un aménagement du site en vue d’obtenir une planéité parfaite. Sa surface devait être voisine du niveau de la mer. Bien que son usage reste inconnu, elle a sans doute servi de zone de déchargement4, le canal qui la longe permettant aux petits bateaux d’y accoster. L’aire de déchargement devait être accessible sur trois côtés. À l’ouest, elle longe probablement le plan d’eau. C’est là que les bateaux les plus gros peuvent aborder pour décharger leur cargaison. Au nord, un canal bordé par un quai permet aux bateaux de faible tonnage d’accoster. Une zone de circulation sépare ce quai de l’aire empierrée ; cet espace recouvre un caniveau qui évacue les eaux de pluie vers la mer, à l’ouest. La calade elle‑même est coupée en deux par un second caniveau, plus petit, qui se jette dans le collecteur E‑O. Le dernier accès, à l’est, est terrestre : il s’agit de la voie N‑S qui relie la ville à la rive sud et qui devait longer l’empierrement. Il est d’ailleurs probable que cet axe a connu un réalignement lors de la construction de l’ensemble portuaire au ier s. ap. J.‑C., en passant derrière les docks de la Bourse. Cette voie serait située à environ 42 m du petit caniveau. Si l’on doit supposer que celui‑ci est central, le rivage antique devait se trouver à environ une vingtaine de mètres à l’ouest de la place du Général‑de‑Gaulle. L’esplanade aurait ainsi une surface d’environ 4 000 m2. Il n’existe pas de continuité dans les aménagements portuaires puisqu’au nord du canal, aucun vestige n’a été retrouvé. La présence probable du ruisseau de la Canebière en est sans doute l’explication.

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    FIG. 270 ‒ Marseille à l’époque romaine

    DAO M. Bouiron/Ville de Marseille

    13La découverte récente, durant l’été 1998, d’un aménagement similaire à Antibes5, et plus anciennement à Toulon (Pasqualini 1987 : 114 sq.), indique que ce type d’aménagement est fréquent en limite des zones portuaires. À Toulon, cet empierrement est situé entre le quai et des entrepôts ; il est identifié comme une voie.

    14Bien que la fouille n’ait pas livré de vestiges de type funéraire, ceux retrouvés à proximité précisent le paysage suburbain. Ils peuvent être regroupés en trois ensembles. Le premier est situé au nord, à la sortie de la ville (fouille du Jardin des Vestiges), où des tombes ont été retrouvées dès 1914 (Aubert 1980 no 116 ; Vasseur 1914 : 210 ; Benoit 1936 : 33), de même que des inscriptions (Aubert 1980 no 46 ; Rougemont 1971). On peut rattacher à ce site une découverte ancienne connue par Peiresc : il s’agit d’une plaque de bronze avec inscription (Aubert 1980, no 12 ; Benoit 1936 : 24 no 55), à laquelle étaient associées des urnes, retrouvée rue Maucouinat près du Grand Puits, et peut‑être la belle inscription retrouvée au xvie s. dans les fondations de la tour Gaubert située au début de l’actuelle rue des Templiers (Aubert 1980 no 39 ; CIL XII : 408). Toujours dans le même secteur a été découvert en 1895, lors de travaux d’assainissement, un cippe funéraire de Julia Serena en face du no 1 de la rue des Quatre‑Pâtissiers (Aubert 1980 no 55 ; Benoit 1936 : 24 no 54). Plus au sud, un fragment d’inscription (funéraire ?) a été trouvé lors de la construction de la chambre de Commerce (Aubert 1980 no 56 ; : XII 445). La deuxième zone se situe à l’est6. Gérin‑Ricard mentionne la découverte d’une tombe à l’angle de la rue Saint‑Ferréol et de la rue Pavillon (Gérin‑Ricard 1915), approximativement à l’altitude du niveau de la mer. Une autre inscription a été trouvée au xixe s. rue de Rome, sans que l’on puisse préciser le lieu de découverte. Il s’agit de l’épitaphe en langue grecque d’un affranchi, Corinthos (Aubert 1980 no 7 ; Benoit 1936 : 24, no 45). Enfin, au SO, des inscriptions auraient été trouvées à la fin du xviie s., lors du creusement de la darse de l’arsenal, mais ces découvertes posent problème7.

    15L’ensemble est parfaitement en accord avec le schéma connu pour l’Antiquité et qui se révèle exact pour Marseille : les nécropoles se développent le long des voies qui sortent de la ville. Cela vient renforcer l’hypothèse d’axes se dirigeant vers le sud dans l’Antiquité. La zone funéraire se développait à l’est de la voie longée par la calade. Un autre axe (l’ancienne voie d’Italie) existait plus à l’est. Elle correspond à l’actuelle rue de Rome.

    16Il est important de noter la période probable d’abandon de la calade (dans la seconde moitié du ive s.?), qui intervient plus d’un siècle après la destruction des docks fouillés sur le chantier de la Bourse, de l’envasement du bassin d’eau douce et du comblement de la corne du port (Bonifay, Guéry 1983 : 111 ; Carre et al. 1998 : 57 fig. 39‑40). Les quatre balles de fronde découvertes sur la calade ou dans des niveaux similaires peuvent être la trace d’un siège que Marseille subit au ive s.8 Retrouvées à l’aide d’un détecteur à métaux, elles ne constituent sans doute qu’une partie de celles qui se trouvaient sur la calade et qui ont dû être ramassées pour en fondre le plomb.

    10.1.3 La création du Plan Fourmiguier

    17fig. 271

    18Les aménagements portuaires cessent d’être utilisés à la fin de l’Antiquité. L’hypothèse d’un ruisseau venant de l’est à cette époque a été envisagée pour expliquer la différence de formation des couches archéologiques entre les parties nord et sud de la fouille. La topographie ne le permet pas, mais on peut penser que ces dépôts sont dus à des modes d’érosion différents et à des apports distincts entre le nord (débouché de la Canebière) et le S‑E (vallée Fogaresse). Une plage dans la seconde moitié du ve s. vient recouvrir l’ensemble.

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    FIG. 271 ‒ Marseille à la fin de l’Antiquité (Ve‑VIe s.)

    DAO M. Bouiron/Ville de Marseille

    19Une structure à base empierrée semble indiquer la présence, au N‑E du site, de constructions avec murs en terre dans la partie proche de la ville. Rappelons la découverte, à environ 150 m au nord, des vestiges de l’habitat tardif établi sur le comblement de la corne du port. Les limites de l’empierrement sont orientées selon le système romain, en cela comparable à celui des habitats tardifs du Jardin des Vestiges (Bonifay, Guéry 1983 : 113). Le quartier qui se développe à l’entrée de la ville au vie s. est établi le long de la voie d’Italie, en limite d’un système d’adduction d’eau avec noria installé sur l’ancien bassin d’eau douce. L’ancienne voie principale se transforme en rue étroite ; elle rejoint une nouvelle rue N‑S qui longe le rempart (Bonifay, Guéry 1983 : 112). Au sud, sur le comblement de la corne du port, s’installe un habitat fouillé par M. Bonifay (Bonifay 1984). La série de sarcophages en pierre calcaire de La Couronne retrouvés à la fin des années 1950 sur le cours Belsunce (Benoit 1960 : 288‑290 ; Guyon à paraître)9 est certainement à mettre en relation avec un édifice religieux qui a disparu. Il a pu être intégré dans la structuration même de ce quartier10. La présence d’un lieu de culte serait tout à fait pertinente dans un faubourg que l’on pressent très vaste11.

    20Le nombre assez important de balles de fronde découvertes dans l’interstice de la calade du petit bâtiment (neuf sur une surface d’environ 5 m2) témoigne là, avec plus de certitude que pour le ive s., de combats menés à proximité de la ville, sans doute lors d’un siège. La date probable d’abandon de ce bâtiment est malheureusement mal assurée. Si l’on devait rattacher ces balles de fronde à un événement historique, on pencherait plutôt pour le siège de 413 (Busquet 1945 : 52).

    21Enfin, nous ne pouvons éluder une question qui a fait couler beaucoup d’encre chez les historiens de Marseille : quelle est l’origine du Plan Fourmiguier ? Sa mention, dès 904, laisse supposer une origine ancienne. Il est tentant de faire le lien entre le Portus pedeon de l’époque romaine, connu par une scholie de Lucain (Euzennat et al. 1971), et le Podium Formigarium du haut Moyen Âge. La « plaine du port », à l’époque romaine, est sans nul doute cette zone proche de l’eau, au débouché des vallées Fogaresse au sud, Longchamp et Saint‑Charles à l’est et du vallon Saint‑Martin au nord. À la fin de l’Antiquité, on l’a vu avec la création de la plage, cette zone s’est agrandie au détriment du plan d’eau. À partir de la fin du vie s., la création des salines bouleverse le fonctionnement naturel de cet espace côtier (fig. 272). Les tables salantes devaient être séparées de la mer par une zone un peu surélevée formant une digue. Cette faible hauteur ne suffit pas à expliquer le terme de podium du Moyen Âge. Le terme de Portus pedeon a peut‑être dans un premier temps servi à désigner l’espace situé à l’est du fond du Lacydon, avant d’être exclu de la zone des salines, dont la dénomination fonctionnelle suffisait à assurer la localisation12. Dans une petite note de ses chroniques gallo‑romaines, C. Jullian avait formulé l’hypothèse que le nom de Fourmiguier pouvait dériver du latin forma, dans le sens de forme pour la construction navale (Jullian 1924). Il est possible que cette activité ait été dévolue à la plage située à l’ouest des salines aux vie et viie s. de notre ère.

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    FIG. 272 ‒ Marseille durant le haut Moyen Âge (VIIe‑VIIIe s.)

    DAO M. Bouiron/Ville de Marseille

    22Il est très difficile de restituer des limites dans le paysage de cette époque. On peut cependant remarquer que la limite méridionale du sol compact qui matérialise l’emprise des salines reprend, en débordant très peu, le tracé de l’ancienne bordure de la calade romaine. De plus, la présence d’un fossé antérieur aux salines, et d’un autre immédiatement postérieur presque au même endroit, rend plausible une limite méridionale que la fouille n’a pas permis de retrouver. Cette table salante pouvait être séparée des autres par une levée de terre ou par divers aménagements qui ont été arasés par la suite.

    10.2 Le Moyen Âge : la naissance des faubourgs

    23L’apport des fouilles de la place du Général‑de‑Gaulle est particulièrement important pour la connaissance des espaces suburbains de la Marseille médiévale que l’on connaît peu en dehors des textes. La découverte de la voie et de la fortification a été le catalyseur d’une étude d’archives réinterprétant des textes bien connus des historiens marseillais.

    10.2.1 Les xie et xiie s.

    24L’étude d’archives a bien établi la transformation que subit cette zone du port à partir des années 1040. Lors de l’extension de l’enceinte, la création de la porte de Paradis met directement en relation la rive sud avec la ville (fig. 273). Les intérêts victorins sont loin d’être négligeables dans ce contexte, et les donations des vicomtes lors de la fondation de l’église Saint‑Pierre‑de‑Paradis, ainsi que leur confirmation par le comte avec le rappel de toutes leurs possessions antérieures, participent d’une même dynamique. C’est également autour du milieu du xie s. que Saint‑Victor met en valeur des terres entre la montagne de la Garde et l’Huveaune.

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    FIG. 273 ‒ Marseille vers 1050

    DAO M. Bouiron/Ville de Marseille

    25L’hypothèse de salines à l’est du Plan Fourmiguier n’avait jamais été évoquée jusqu’à la découverte, sur la fouille, d’un vaste niveau damé. La datation (fin du vie s.‑viie s.) ne nous donne pas d’indication sur sa durée d’utilisation. Les salines ont dû cependant être en fonction pendant plusieurs siècles, avant d’être partiellement abandonnées. En effet, cette zone de saline est recouverte d’une fine couche de sable13 qui indique un abandon avant les travaux de la fin du xiie s. Sachant que les textes gardent la trace de salines du xe au xiie s., on peut imaginer que cette partie un peu éloignée, peut‑être difficile à entretenir, ait été abandonnée au profit de la rive sud. La limite nord de ces salines se fait au contact d’un ou plusieurs bâtiments dont on ne sait rien. La présence d’une ouverture semble toutefois impliquer une relation fonctionnelle avec les salines.

    26Les salines n’existent peut‑être plus au xie s. à cet emplacement, si l’on en croit le texte de 1031 (cf. supra § 8.4.1.2) qui mentionne un pré à proximité de la mer au débouché de la voie de la vallée Fogaresse.

    27Au xie s., le cellérier de Saint‑Victor possède deux ensembles fonciers dans cette zone. Le premier regroupe des plantations de vignes entre la voie de la Garde et la voie du Lauret, à l’emplacement du futur terrain d’Hugues Fer. Il semble correspondre à la zone qui sera dite, au xiiie s., sous la seigneurie de Saint‑Victor (sans précision d’office particulier) ; il s’agit peut‑être des terrains situés entre la rue Sainte‑Catherine et le couvent des Prêcheurs. Cependant, une partie des vignes qui sont dépendantes de Saint‑Victor au xie s. semblent être passées sous la seigneurie d’Hugues Fer un siècle et demi plus tard. Comment a pu se faire ce transfert ? Dans la seconde moitié du xiie s., le monastère de Saint‑Victor est sur le déclin. Son endettement est tel que le pape doit demander l’aide financière de grands personnages marseillais14, dont Guillaume Anselme, le frère d’Hugues Fer. Cela n’est pas suffisant et, en 1185, la chronique de Saint‑Victor mentionne l’intervention de l’évêque d’Antibes pour racheter aux juifs leurs créances sur le monastère. Ceux‑ci possédaient en effet le « Val marseillais ». On peut penser que Saint‑Victor a choisi de garder de préférence les terres correspondant aux limites de sa juridiction, c’est‑à‑dire à l’ouest de la voie de la Garde.

    28Le deuxième groupe mentionné au xie s. est situé au sud, à l’ouest de la voie menant à Saint‑Victor. Il correspond exactement à un grand îlot du xiiie s. dans lequel sont construits l’église Sainte‑Marie‑de‑Paradis et sans doute le bourg de la Calade, comme nous le verrons plus loin. Notons toutefois que ce terrain est nommé au xie s. « les Tuileries », ce qui semble indiquer une activité de production potière.

    10.2.2 L’extension urbaine de la fin du xiie s. à la fin du xiiie s.

    29La nouvelle extension urbaine à la fin du xiie s. s’accompagne de profonds réaménagements des abords de la ville dont la fouille a retrouvé les vestiges (fig. 274‑276). Le percement de la porte de la Calade est pratiqué à très peu de distance du port. Avec le développement du commerce marseillais, et surtout son rôle actif dans les Croisades15, le port a pris une nouvelle place dans la cité. Il n’est dès lors pas étonnant que l’extension de l’enceinte englobe une partie proche du port, ni que la porte se rapproche du rivage. De fait, la porte de la Calade est située beaucoup plus à l’ouest que la porte de Paradis. Afin de garder le lien nécessaire avec la rive sud et les zones méridionales (vers l’Huveaune en particulier), un nouveau tronçon rectiligne est créé entre la porte et l’ancienne voie, la jonction s’établissant peut‑être vers l’actuelle rue Vacon. La voie ainsi créée traversant les salines de Saint‑Victor, il est probable qu’un dédommagement financier ait accompagné ce percement. Rappelons qu’à cette époque, le monastère de Saint‑Victor est fortement endetté.

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    FIG. 274 ‒ Marseille vers 1200

    DAO M. Bouiron/Ville de Marseille

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    FIG. 275 ‒ Marseille vers 1220

    DAO M. Bouiron/Ville de Marseille

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    FIG. 276 ‒ Marseille vers 1235

    DAO M. Bouiron/Ville de Marseille

    30La fouille l’a montré, il s’agit d’un acte d’urbanisme fort : la voie large d’environ 6,50 m est drainée par des fossés. Elle est accompagnée dans son tracé septentrional par le ruisseau des Cuiratiers, qui sert à la fois d’évacuation des eaux pour les industries polluantes reléguées à l’extérieur de l’enceinte, et de canalisation pour les eaux de pluie. Le contournement du Plan Fourmiguier montre bien l’importance que l’on attache à la partie N‑E du port, et le besoin d’éviter tout envasement. Nous ne savons pas où commençait ce ruisseau, mais le rappel dans les statuts de Marseille (Pernoud 1949 : 67‑69), en 1252, de la nécessité de canaliser les eaux du Jarret pourrait indiquer une jonction par la vallée de Saint‑Bauzille (vallon Longchamp). La voie a eu, dès son origine ou peu de temps après, un revêtement dallé, qui la distinguait des autres voies. S’agit‑il d’une marque ostentatoire d’un pouvoir municipal qui s’affirme ou d’une réalisation du comte ou des vicomtes ? Nous ne le savons pas ; néanmoins le fait est suffisamment marquant pour que la voie, la porte de ville et un faubourg prennent ce nom. Les deux tours qui encadrent la porte de la Calade devaient également renforcer cet aspect imposant, reprenant en cela le principe de la fortification hellénistique peut‑être encore présente dans le paysage urbain grâce au Tholonée, le palais des vicomtes. La création de la voie introduit un changement important dans les orientations de cette zone extramuros. Les axes antiques, strictement N‑S à l’est de la corne du port, entrent alors en concurrence avec ce nouvel axe N‑O/S‑E. Le ruisseau des Cuiratiers, en particulier, suit dans la partie septentrionale de la fouille le nouveau tracé, et reprend l’axe antique dès que la voie s’éloigne du Plan Fourmiguier. Ce double système explique toutes les déformations que l’on observe dans les parcelles jusqu’au réalignement de la rue Paradis vers 1765.

    31La probable extension de cette enceinte vers 1250 (fig. 277) ne s’accompagne pas sur le site de transformations topographiques particulières ; le ruisseau des Cuiratiers reste inchangé. En revanche, la voie reçoit un nouveau dallage (S 188) qui remplace certainement celui mis en place à l’origine, qui devait être détérioré. La voie conduit à la nouvelle porte de la Calade, mentionnée dans les statuts en 1252 comme le « Portail Majeur » (Pernoud 1949 : 183), ce qui témoigne de l’importance de cette zone. À la fin du xiiie s. (vers 1290 ?), une dernière extension enclôt le Plan Fourmiguier. Seule la fouille archéologique permet de la dater, car les textes ne signalent cette enceinte qu’à partir de 1374. Nous ne savons pas si cette enceinte est en rapport avec la possession provisoire du Plan Fourmiguier par Charles II d’Anjou à partir de 1296 : l’a‑t‑il accepté parce qu’il était enclos et qu’il pouvait y construire des galères en toute sécurité, ou l’a‑t‑il fait fortifier ? Le fossé qui borde l’enceinte reprend strictement le tracé du ruisseau des Cuiratiers. Il semble difficile d’imaginer que ce ruisseau ait pu fonctionner le long du Plan Fourmiguier alors qu’un fossé longeait l’enceinte urbaine. Nous pensons que la fortification méridionale de Marseille n’a été pourvue d’un fossé avec mur de contrescarpe qu’à l’occasion de la construction de l’enceinte du Plan Fourmiguier.

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    FIG. 277 ‒ Marseille vers 1250

    DAO M. Bouiron/Ville de Marseille

    10.2.3 Les possessions de Saint‑Victor dans la première moitié du xiiie s.

    32La fouille permet de mieux comprendre les descriptions des années 1228 à 1230 que contient le cartulaire de Saint‑Victor (Guérard 1857). Reprenons rapidement les différents éléments qui les composent. En 1228, il s’agit de définir la limite de la juridiction de Saint‑Victor. Celle‑ci va, à l’est, de la colonne de Roncelin à Notre‑Dame‑de‑Beaulieu, en passant par le Pontellar, le bourguet de Pierre Licca sans doute identique au bourg de la Calade, et en englobant les salines. La colonne de Roncelin est située sur la voie, entre le mur et le ruisseau des Cuiratiers. Nous pensons qu’elle était située approximativement à l’endroit où le ruisseau et la voie divergent puisque le Plan Fourmiguier ne dépendant pas de Saint‑Victor, aucun espace ne pourrait être sous la juridiction victorine plus au nord. Lors de l’enquête de 1228, un témoin (Marie Castellane) précise que cette colonne a été érigée en 1193 lorsque Roncelin était moine de Saint‑Victor16. Il est possible que la fosse 3‑126, située dans la rue contre le ruisseau, soit l’empreinte de cette colonne (tout au moins de sa récupération, cf. supra § 2.2.2). Plus au sud, le toponyme de Pontellar est peut‑être lié à un autre fossé drainant les eaux vers le vallat des salines. Enfin le bourg de la Calade pourrait se situer à l’emplacement de l’actuel opéra.

    33À cette époque, les salines sont sans doute encore présentes le long de la voie Calata, au nord du bourg de la Calade. Ce qui expliquerait qu’en 1230, on signale que les Marseillais ont détruit une partie des salines et les ont asséchées. Dans cette hypothèse, le vallat des salines, de direction E‑O, délimiterait au nord cette extension des salines, tandis qu’au sud celles‑ci confronteraient le bourg de la Calade et l’église Sainte‑Marie‑de‑Paradis (fig. 278). À l’appui de cette hypothèse, rappelons la mention de cette chapelle sous le nom de Notre‑Dame‑des‑Salines en 1218 ; souvenir que pourrait également rappeler la rue des Salines située sur cet emplacement au xive s. Enfin, l’argument sans doute décisif est la possession, au début du xive s., par le camérier de Saint‑Victor, de tous les terrains entre Sainte‑Marie‑de‑Paradis et le Plan Fourmiguier, en plus des salines de la rive sud, alors qu’un siècle plus tôt, le camérier tire ses revenus uniquement des salines. Progressivement, la surface des salines s’est réduite pour arriver, après 1230, à l’étendue qu’elles auront jusqu’à leur disparition au début du xvie s.

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    FIG. 278 ‒ Marseille vers 1280

    DAO M. Bouiron/Ville de Marseille

    10.2.4 L’hôpital du Saint‑Sépulcre

    34Si ce schéma est exact, on peut situer également le pré donné en acapte en 1204 à l’hôpital du Saint‑Sépulcre. Il s’inscrit dans la parcelle triangulaire délimitée à l’ouest par le Plan Fourmiguier (ou mieux par le ruisseau des Cuiratiers), au sud par le vallat des salines, et à l’est par la voie Calata. C’est la parcelle correspondant à l’îlot sud de la fouille, dont la limite méridionale se trouve hors de l’emprise du chantier17. Ce terrain sert, dès le premier quart du xiiie s., à la construction d’un vaste bâtiment, dont les dimensions comme le plan indiquent une fonction collective. Il s’agit très certainement du bâtiment principal de cet hôpital.

    35Plusieurs points sont à souligner. Tout d’abord, ce terrain correspond à l’ancienne emprise des salines. Il est situé à l’ouest de la voie Calata, dans la zone restant à Saint‑Victor, ce qui explique que l’acte de 1204 se trouve dans le cartulaire de Saint‑Victor. Le terrain sur lequel est construit l’hôpital est en possession de Saint‑Victor, mais pas celui sur lequel est élevée l’église du Saint‑Sépulcre. L’en‑tête de la charte spécifie : « au sujet de l’hôpital qui est devant le Sépulcre ». L’église est certainement de l’autre côté de la voie, c’est‑à‑dire dans un terrain n’appartenant plus à Saint‑Victor et situé entre ce qui subsiste de l’ancien chemin de la Garde et la voie Calata. Hugues Fer possède‑t‑il déjà ces terrains lorsque la voie est percée ou bien les a‑t‑il acquis après la construction de l’église du Saint‑Sépulcre ? Ou bien, si cette église est construite par Anselme, son frère, y a‑t‑il eu un partage et donc héritage...? Le transfert de propriété à Maguelone est effectif avant le 12 juillet 1228. Postérieurement à cette date, aucun acte de possession de Saint‑Victor ne concerne l’îlot sud de la fouille, c’est‑à‑dire le terrain sur lequel est bâti l’hôpital.

    36Si l’on reprend l’histoire de l’hôpital du Saint‑Sépulcre, on s’aperçoit qu’elle correspond aux évolutions retrouvées lors de la fouille. La construction du premier bâtiment a lieu dans le premier quart du xiiie s. (phase 4B2), donc peut‑être aux alentours de 1210. Quelques bâtiments sont construits durant le second quart du siècle, en même temps que survient le creusement des tombes ; ces événements dateraient du transfert de possession à Maguelone. Vers le milieu et le troisième quart du xiiie s. (phase 4B4), l’hôpital connaît son extension maximale : au nord un groupe de pièces, sans doute réservé à l’habitation du prieur, ouvre largement sur la cour. Peut‑être faut‑il un peu vieillir la datation archéologique car les textes semblent indiquer un acmé de ce prieuré vers 1240‑1250. L’absence, en 1260, de tout legs explicite à cet hôpital par Benoît d’Alignan, pourtant languedocien d’origine, laisse penser que celui‑ci est sur le déclin. Enfin, la dernière phase où ce groupe de bâtiments est présent (4B5) le montre déjà plus réduit : la partie nord a peut‑être été vendue tandis que la partie d’habitation est reconstruite en empiétant sur la cour. Nous atteignons alors les années 1280.

    37L’ensemble hospitalier est composé à l’origine d’un seul grand bâtiment, subdivisé intérieurement en deux parties : à l’est, donnant sur la rue, un grand espace ; à l’ouest, l’autre moitié est cloisonnée par deux séries de piliers. Il s’agit très certainement du bâtiment principal de l’hôpital, servant à l’accueil des pèlerins et à leur hébergement. Les bâtiments annexes appuyés au nord ont sans doute une vocation utilitaire très forte ; ils sont constitués d’un bassin, d’un bâtiment non identifié (écurie ?) et d’un petit atelier qui ouvre directement sur la rue. Ce groupe de bâtiments s’organise autour d’une cour, tandis qu’au nord de celle‑ci, la présence de tombes doit matérialiser un enclos funéraire dans une zone de jardin. À l’ouest, la présence du ruisseau des Cuiratiers permet, lorsque les tanneurs ne déversent pas leurs déchets, de laver le linge et d’évacuer les immondices. Ce ruisseau a dû déborder à plusieurs reprises lors d’orages violents car on a retrouvé dans la stratigraphie deux niveaux de limon à l’intérieur de la cour et des espaces la bordant. Au milieu du xiiie s., la construction d’un ensemble de quatre pièces (en plan) qui borde la cour au nord entraîne la disparition du petit cimetière. Ce bâti peut être identifié avec l’habitation du prieur (au nord) donnant sur un petit jardin et celui des personnels attachés au service de l’hôpital (au sud) ouvrant largement sur la cour par une baie moulurée et donnant au nord sur un petit jardin. Vers 1270‑1275, la construction d’un nouveau bâtiment restreint la cour. Il est probable que, l’hôpital déclinant, le chapitre de Maguelone ait autorisé la vente du petit jardin pour être loti et ait arrenté (voire vendu) l’ancienne habitation du prieur, obligeant celui‑ci à habiter dans l’espace nouvellement bâti18. Cela ne suffira pas cependant à éviter la disparition de l’hôpital du Saint‑Sépulcre vers 1280. Cet ensemble s’apparente à ceux retrouvés au Thoronet et à Silvacane et fouillés par M. Fixot et J.‑P. Pelletier (Fixot et al. 1989). Il témoigne de la diffusion du modèle hospitalier au xiiie s. à Marseille et en Provence.

    10.2.5 Faubourg et activité au xiiie s.

    38La localisation de l’hôpital du Saint‑Sépulcre entraîne un ancrage topographique. Nous l’avons vu, le bourg de la Calade est situé plus au sud. À l’époque de sa création (au début du xiiie s.), il représente certainement pour Saint‑Victor une source de profit à venir. Mais cette création victorine ne va jamais réussir à se développer. En 1230, les Marseillais commettent des violences dans le bourg ; en 1252, les statuts de Marseille empêchent toute construction entre le chemin qui conduit à Saint‑Victor et la ville, c’est‑à‑dire à l’ouest de la voie Calata, donc sur les terrains de Saint‑Victor. Le bourg de la Calade sera ultérieurement assimilé par le faubourg Sainte‑Catherine, au xive s.

    39Si les éléments structurants du faubourg de Saint‑Sépulcre sont en place dès le début du xiiie s., celui‑ci tarde à se développer. Sur la fouille, on voit timidement apparaître (vers 1230‑1240) deux espaces bâtis au nord, dans la partie la plus proche de la ville. Plus au sud, de l’autre côté d’une ruelle nouvellement créée, un mur de clôture matérialise une vaste propriété, celle des descendants d’Hugues Fer. Au milieu du xiiie s., l’îlot nord est en place. On édifie dans l’enclos un ensemble industriel, peut‑être une tannerie. Celle‑ci dispose d’une grande cour, mais rien n’est encore construit plus au sud dans ce qui reste de l’enclos central. Ce n’est qu’aux alentours de 1280 que se densifie le bâti, avec le lotissement de la tannerie, le percement de la rue Raymond‑Rascas et la construction des premiers espaces en lanière d’habitation au sud. Le faubourg atteint son extension maximale à la fin du xiiie s. ; mais cette histoire est celle du faubourg Sainte‑Catherine, que nous aborderons plus loin.

    40Jusque vers 1280, ce faubourg est certainement l’équivalent d’une zone industrielle. Au sud, l’extraction du sel dépend de Saint‑Victor. À l’ouest, le Plan Fourmiguier sert à décharger les matériaux de construction (fustes de bois, pierres et tuiles en 1265). À l’est, s’étend une zone liée à l’industrie textile et à celle des peaux. Le nom même de ruisseau des Cuiratiers, en 1230, et la probable tannerie retrouvée lors de la fouille et datée du milieu du xiiie s. en sont la trace, ce dont témoigne également l’acte de vente, de 1264, d’une teinturerie dans le faubourg du Saint‑Sépulcre, passée entre un bourgeois de Montpellier et un Génois.

    41Il faut noter encore une fois l’importance de l’aménagement de la fin du xiie s. : la création de la nouvelle voie, la canalisation et l’apport constant d’eau aux industries ont mis en place un schéma qui durera ici jusqu’à l’époque de Louis XIV sans grande modification. La dernière extension urbaine au milieu du xiiie s. ne change rien, et la création de l’enceinte du Plan Fourmiguier s’intégre dans le schéma préexistant puisque le fossé reprend exactement le tracé du ruisseau de la Cuiraterie. Nous ne saurons jamais à qui est due l’origine de ce projet, mais il est certain que cela a énormément valorisé les possessions d’au moins deux grandes familles : les Anselme19 et les Roquefort20. Hugues Fer, en particulier, a légué à ses descendants une source de revenu leur donnant les moyens d’une revendication politique municipale. On comprend mieux également le refus de ses héritiers de laisser à Saint‑Victor les revenus de la terre du Lauret.

    10.2.6 Le faubourg Sainte‑Catherine

    42fig. 279

    43Délaissant peu à peu l’hôpital du Saint‑Sépulcre qui perd sa raison d’être avec la disparition progressive des croisés en Terre Sainte, le chapitre de Maguelone est à l’origine de la construction de la chapelle Sainte‑Catherine. L’hôpital est vendu par celui qui fut certainement son dernier prieur, Bernard Hélie. En 1300, les maisons qui sont bâties sur son terrain appartiennent à un riche marchand marseillais, Jacques Martin, qui les lègue à un de ses fils ; il a peut‑être été lui‑même l’acheteur de l’hôpital. La chapelle Sainte‑Catherine occupe l’emplacement de l’ancienne église du Saint‑Sépulcre ; elle est bâtie certainement dès 1286.

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    FIG. 279 ‒ Marseille vers 1300

    DAO M. Bouiron/Ville de Marseille

    Lotissement et occupation du sol

    44Le faubourg est constitué avant 1301 (fig. 280). À cette date, le legs de Philippe Anselme à la sacristie de Saint‑Victor montre un parcellaire entièrement bâti. Or ce qui est fréquent dans les faubourgs, à savoir le lotissement, nous échappe ici d’un point de vue archéologique. Les recherches archéologiques ont récemment révélé plusieurs cas, ignorés auparavant, de faubourgs lotis, notamment à Avignon pour le xive s.

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    FIG. 280 ‒ Vue du faubourg Sainte‑Catherine dans l’axe de la rue Raymond‑Rascas. À droite, le fossé de l’enceinte urbaine (actuelle Canebière). Maquette musée d’Histoire de Marseille (conception M. Bouiron, réalisation D. Delpalillo)

    Cliché F. Cognard/Afan

    45Il a souvent été question de lotissements ex nihilo pour ces espaces hors les murs (Heers 1990 : 189, 200). La zone fouillée montre une continuité dans l’occupation du faubourg. Le seul lotissement que l’on connaisse est lié au percement de la rue Raymond‑Rascas, dans les années 1290, voire peut‑être dans une rue voisine avant 1281 (cf. supra § 8.4.2.4). Les autres maisons, en particulier le long de la rue Sainte‑Catherine, ont été bâties progressivement. Cependant, il est intéressant de constater que les nouvelles maisons s’inscrivent parfaitement dans les espaces laissés libres. Soit la dimension des espaces correspond à une norme « technique » (par exemple la longueur standard de poutres pour la charpente), soit un découpage préalable des espaces a été réalisé. Cette deuxième hypothèse implique cependant une permanence, peu probable, du lotissement sur presque un siècle. D’autres rues ont pu être percées avant le xive s., comme la rue des Salines : les terrains mentionnés au nord de celle‑ci ont des dimensions vraisemblablement proches de celles de la rue Raymond‑Rascas.

    46L’étude des matériaux utilisés dans les constructions du faubourg a montré une très grande homogénéité, qui contraste avec l’utilisation de blocs hétérogènes sur la fouille de la place Villeneuve‑Bargemon, à l’intérieur de la ville. Chaque bâtiment ou ensemble de bâtiment a dû faire l’objet d’une commande spécifique auprès de tailleurs de pierre.

    Les maisons

    47L’îlot sud de la place du Général‑de‑Gaulle est certainement celui qui permet le mieux d’appréhender le découpage en unités parcellaires. Le testament de Jacques Martin en 1302 précise qu’il possède 8 maisons devant l’église Sainte‑Catherine. Si l’on considère que les espaces C10 et C11 forment une seule entité, on peut avoir, au nord : C10/C11, C12, C6/C8, C7/C9, C15/C16. Les maisons suivantes devaient être plus grandes. Il est vraisemblable que le bâtiment C3, à usage de stockage, ouvre sur la cour C19. Celle‑ci montre un aménagement à la fin du xiiie s. qui semble lié à la construction du mur méridional de C17 ; nous verrions volontiers un ensemble de bâtiments constituant une seule domus : C17, C18, C19 et C3 (avec le bassin C4). Il reste alors deux maisons : C1/C20 et l’espace non fouillé au sud (C2). Jacques Martin possédait vraisemblablement l’ancien hôpital du Saint‑Sépulcre, qu’il a sans doute acheté aux chanoines de Maguelone. On peut supposer dès lors que les chanoines avaient gardé la directe sur l’ensemble de l’îlot, et qu’ils arrentaient les maisons situées contre l’hôpital au nord.

    48Plusieurs espaces fouillés ont livré deux niveaux d’occupation distincts. Or l’étude d’archives a mis en évidence un changement de population entre le premier et le second quart du xive s. : le faubourg s’appauvrit peut‑être, et il se compose d’une population plus laborieuse. La disette et les problèmes rencontrés à Marseille dans les années 1320 ont certainement modifié les données démographiques générales. Néanmoins ce faubourg est toujours densément peuplé jusqu’à sa destruction. On notera d’ailleurs l’aspect quasi urbain de ces espaces hors les murs. Au milieu du xive s., les notaires ne mentionnent plus le terme de faubourg : les noms des rues suffisent, comme pour les actes concernant l’intérieur de la ville.

    10.3 De la destruction du faubourg à nos jours

    49L’étude de cette zone pour la période moderne apporte de nombreux renseignements qui complètent la vision de Marseille que nous donnent les textes d’archives ou les gravures anciennes. L’analyse des macrorestes du fossé en particulier apporte un éclairage inédit sur des problèmes de l’environnement quotidien des Marseillais.

    10.3.1 Du milieu du xive s. à l’agrandissement par Louis XIV

    50Durant cette période, le faubourg disparaît au point de redevenir l’espace agricole qu’il était aux xie et xiie s. Profitant de la renaissance des faubourgs vers le milieu du xviie s., l’agrandissement de la ville décidé par Louis XIV donne une valeur considérable à des terrains situés jusque‑là hors les murs.

    La destruction de l’habitat et l’évolution des anciens îlots

    51Au cours de la période troublée qui marque le milieu du xive s., les autorités communales vont à plusieurs reprises demander la démolition des maisons qui sont proches des remparts. La destruction totale des édifices intervient vers 1360. On l’a vu lors de la fouille, celle‑ci laisse peu de vestiges intacts : les maisons sont vidées de leur contenu, les superstructures sont entièrement démontées, les matériaux sont récupérés et le feu achève de nettoyer les espaces. Tout ceci se place dans un laps de temps sans doute très court. Deux bâtiments seulement semblent échapper à cette destruction : les maisons B5 et B6 présentent une occupation que la céramique date de la seconde moitié du xive s. Il s’agit des derniers occupants d’une zone désertée depuis quelque temps déjà. L’ancienne ruelle est recouverte des tuiles que les démolisseurs ont dû jeter en commençant leur œuvre. À l’inverse de la rue Raymond‑Rascas ou de la rue Pilarum, la ruelle ne survit pas à la démolition du bâti. Par la suite, le mur séparant la rue Sainte‑Catherine de la zone de l’îlot central est reconstruit ; on y insère d’ailleurs trois pièces d’argent frappées entre 1362 et 1370.

    52Ainsi, à la fin du xive s., les deux îlots sont vides de toute construction. Cela correspond à l’image qu’en donnent les textes d’archives. Une étude précise de ce faubourg à la charnière des années 1360 pourrait être tentée pour analyser dans le détail les changements d’affectation des terres et la perte financière que les seigneurs ont subis.

    53L’apparition de deux maisons (au xve s.?) dans l’ancien îlot sud reste un fait isolé. L’ensemble de ces espaces est à ce moment‑là reconverti dans une activité de type agropastorale (aires à battre, sueilles...). On peut noter également la présence d’un niveau de sol du xvie ou xviie s. à l’emplacement de l’ancien îlot nord. Les textes mentionnent en effet une maison aux xve et xvie s.21 Elle est certainement démolie à son tour en 1524 car un acte de 1563 parle d’une « hière » et non plus de maison. On sent, à travers les textes d’archives, une recomposition du faubourg au début du xvie s. Mais le siège de Marseille par les troupes de Charles Quint reproduit les effets des années 1352‑1360. En 1523 et 1524, devant l’approche des troupes, la municipalité fait boucher la porte de la Calade, détruire le couvent des Prêcheurs et la chapelle Sainte‑Catherine et raser tous les édifices proches de l’enceinte. Les récupérations de mur de maisons dans l’îlot sud datent vraisemblablement de cette période. Le bassin de l’hôpital du Saint‑Sépulcre, qui avait subsisté jusque‑là, est comblé.

    54Alors que la fouille n’a pas livré de vestiges d’habitat du xviie s., les textes signalent la mise en place d’une reconstruction de l’îlot méridional. Dans les années 1620‑1630, les terrains situés les plus au sud sont découpés en parcelles et vendus comme « place à bâtir maison ». En 1632, l’achat par la municipalité de la bande méridionale de l’îlot, pour agrandir le chemin qui va à la gardette du Plan Fourmiguier, valorise le terrain qui le borde. Des maisons sont rapidement construites, avec petit jardin à l’arrière. La disposition de cet îlot est connue par le rapport d’estime de 1687. Les puits retrouvés au cours de la fouille sont certainement contemporains de ces constructions de maison.

    La fortification du Plan Fourmiguier

    55La fortification est remise en état lorsque des risques de siège menacent la ville. C’est le cas au milieu du xive s. mais ces travaux portent sur l’enceinte principale, plus ancienne que celle du Plan Fourmiguier. C’est également le cas en 1523‑1524. On peut penser que la tour retrouvée lors de la fouille, à l’emplacement de l’inflexion de l’enceinte, date des travaux effectués par la ville pour mettre en état ses défenses. Parallèlement à cette construction, le fossé est curé jusqu’au fond, ce dont témoigne le grand creusement 3‑504 (cf. supra § 5.2.3.2). Les périodes des guerres de Religion, dans les années 1560, et de la Ligue, en 1590, ont sans doute nécessité d’entretenir une nouvelle fois le fossé. La gravure d’Ercole Nigra (fig. 2) est particulièrement précieuse pour l’étude de la fortification puisque nous pouvons noter qu’en 1591 aucune tour n’est visible. En revanche, le mur de contrescarpe existe encore, même s’il ne semble plus avoir de parapet.

    56Par la suite, le fossé se comble rapidement et sert de dépotoir. C’est de ces niveaux que proviennent les insectes analysés par P. Ponel (cf. supra § 5.5.3.2) et les carcasses de chevaux et d’ânes étudiées par M. Leguilloux (cf. supra § 9.3.2) ; l’aspect de décharge à ciel ouvert y est particulièrement perceptible. C’est sans doute lui que les textes nomment « le bourdigou ».

    57Au milieu du xviie s., le fossé a changé d’aspect. À cette date, un nouveau mur d’enceinte, plus léger que le rempart médiéval, borde un espace sans doute cultivé sous forme de jardin, à l’identique de ce que l’on connaît pour le fossé principal (à l’emplacement de la Canebière) où se trouvent les jardins d’Albertas. Un collecteur est installé au pied de l’enceinte, signe d’une réappropriation de l’ancienne zone du fossé.

    Le Petit Jeu de Mail

    58La partie occidentale du Petit Jeu de Mail (jeu de croquet en vogue au xviie s.) a été retrouvée dans l’emprise du chantier archéologique. Le mur de clôture du terrain, dont la fondation très arasée a été dégagée par la fouille (c’est le mur M 1), ne devait pas être très élevé puisque 17 boules (dont 3 fragments) ont été retrouvées à l’extérieur du Jeu, sans doute frappées un peu trop fort. Quelques‑unes étaient tombées sur le chemin, mais la plupart proviennent du comblement du fossé de l’enceinte du Plan Fourmiguier, milieu humide et vaseux. La présence d’eau a permis de conserver le bois, du buis comme le voulait l’usage. Leur diamètre oscille entre 6,7 et 7,6 cm ; une seule boule a un diamètre supérieur, de 8,4 cm. Leur aspect est en tout point semblable à celles retrouvées dans les fouilles de la Cour carrée au Louvre.

    59Cette découverte illustre, à Marseille, l’engouement que connaît la France au xviie s. pour le jeu de mail. Proche du jeu de croquet, il nécessite des espaces de jeux spécifiques, longs et étroits. Leur surface importante explique qu’ils soient souvent situés à l’extérieur de la ville. Le nom de « mail » est d’ailleurs souvent resté à ces allées réservées à ce jeu. À Marseille, deux terrains ont été affectés à cet usage au sud de la ville : le Petit Jeu de Mail à proximité immédiate de l’enceinte et le Grand Jeu de Mail situé plus au sud.

    10.3.2 Après l’agrandissement

    60L’agrandissement entraîne des modifications considérables de l’environnement. C’est d’abord le Plan Fourmiguier qui disparaît, remplacé par un arsenal majestueux. C’est ensuite le projet de place Royale qui occasionne des gênes nombreuses aux propriétaires des maisons situées sur son emprise et menacées de destruction. C’est enfin la construction de nouvelles rues et de maisons qui prennent rapidement de la valeur.

    61Les vestiges archéologiques les plus explicites de la fin du xviie et du xviiie s. sont les fondations ou les ouvrages enterrés. Un nouveau collecteur est mis en place. Celui qui a été fouillé, en voûte de briques, rejoint un conduit principal situé sous la Canebière. Il reste en usage au moins jusqu’au xixe s., malgré la reconstruction de l’îlot vers 1765 qui l’ampute dans sa partie méridionale. Lorsque l’on construit la fontaine Fossati, en 1778, une canalisation vient se relier à ce collecteur.

    62La découverte des séries de pieux, qui servent à fonder l’îlot sud reconstruit après 1765, témoigne d’une construction homogène et d’un seul tenant de toutes les maisons qui le composent. L’étude du mobilier céramique a montré que certains puits, sans doute antérieurs à ces travaux, sont toujours en usage à la fin du xviiie s. (S 49, S 52 et S 84). Mais l’archéologie atteint ses limites pour ces périodes très récentes. Une étude d’archives plus poussée que celle que nous avons pu mener pourrait apporter beaucoup plus d’informations sur cet îlot et ses habitants.

    Notes de fin

    1 – La mention de l’épave retrouvée au xixe s. sous l’immeuble des Nouvelles Galeries (Canebière) reste un des problèmes de l’archéologie marseillaise.

    2 – Voir en dernier lieu Guéry 1992 : 112. Cet aménagement a donné lieu à de nombreuses analyses, en particulier de G. Bertucchi (1992). Nous n’avons pas découvert de restes de poissons à l’intérieur des amphores (Bertucchi et al. 1975). Cf. Salviat 1976 : 30, 34 fig. 8.

    3 – D’après le tracé du rivage à l’époque grecque restitué par L.‑F. Gantés (Bats 1992 : 63).

    4 – Plusieurs activités ont été envisagées : tout d’abord des activités qui nécessitent une certaine profondeur d’eau (pisciculture, ostréiculture, vivier...), mais la calade était au‑dessus de l’eau. Ce plan aurait pu également servir à étaler des filets pour les faire sécher, mais on peut supposer que l’on aurait découvert au moins quelques fragments de pesons, ce qui n’a pas été le cas. Enfin, aucune trace de restes de poissons n’a été trouvée dans les interstices d’une calade constituée de cailloux mal liaisonnés avec une anfractuosité suffisamment importante pour servir de pièges de macrorestes.

    5 – Information due à P. Mellinand (Afan), responsable de la fouille. L’empierrement fonctionne plus tardivement qu’à Marseille puisqu’il n’est abandonné qu’à la fin du vie s. Dégagé sur 400 m2, il est approximativement à la cote de 0 ngf ; il était, dans l’Antiquité, au‑dessus du niveau de la mer.

    6 – On notera également la découverte en 1871 d’une tête d’Auguste en marbre blanc dans la cave de l’immeuble abritant le Crédit Lyonnais dans la rue Saint‑Ferréol (Gérin‑Ricard 1915 ; Espérandieu 1925 n° 6689).

    7 – L’une d’elles (épitaphe de Cassia Fortunata, Aubert 1980 no 28 ; CIL X : 418) y a été trouvée d’après Grosson (qui écrit en 1773). Or elle est signalée par Muratori qui est chargé de mettre en œuvre le nouveau corpus des anciennes inscriptions (paru de 1739 à 1742), d’après un manuscrit de Peiresc ce qui rend ce lieu de découverte impossible (on l’imagine d’autant plus que Ruffi, contemporain de ces travaux, l’aurait indiqué dans son ouvrage). On signale également la découverte de deux autres inscriptions : une épitaphe de Julia Germana (Aubert 1980 n° 52 ; CIL XII : 441) et de T. Pompeius Felicianus (Aubert 1980 n° 64 ; CIL XII : 453), accompagnée d’urnes. Or, là encore, le texte de l’inscription se trouve dans les manuscrits de Peiresc. Grosson comme Michel de Léon (Albanès 1898 : 280) les font provenir du creusement de la darse. Nous ne pouvons pour l’heure trancher sur le lieu de leur découverte. Provient peut‑être également de cette zone un cippe en forme de colonne dédié à L. Lucilius Crispus (Aubert 1980 n° 58 ; CIL XII : 447 ; Benoit 1936 : 23 no 1), et conservé au xvie s. dans le jardin, ou la maison, du baron de Meollon situé sur la rive sud.

    8 – Peut‑être celui de 309 par Constantin ? (Euzennat 1976 : 549).

    9 – Dégagés par J. et Y. Rigoir, ces tombeaux reposaient directement (à 0,80 m ngf) sur une couche contenant des céramiques du ive s. ap. J.‑C., elle‑même surmontant des niveaux limoneux gris assimilés à des comblements de marécage.

    10 – À titre d’hypothèse, on peut se demander si ce n’était pas l’emplacement de la basilica s. Stephani du texte de Grégoire de Tours, traditionnellement placée sous l’emprise actuelle de l’église Notre‑Dame‑du‑Mont, à plus d’un kilomètre de la ville. E. Duprat (1924) avait déjà formulé l’hypothèse d’une localisation à l’angle N‑E du Vieux‑Port, près de la Canebière, car il situe ici une chapelle de Saint‑Étienne au xie s. L’hypothèse est citée par H.G. Beck (1950 : 158‑165), qui ne croit pas non plus à une localisation trop éloignée de la ville (le texte précise en effet « quæ urbe estproxima »). Néanmoins, il préfère l’identifier avec la cathédrale, qu’il situe hors les murs suivant l’avis de M. Clerc. Or, non seulement La Major est à l’intérieur de la ville, mais de plus M. Vieillard‑Troiekouroff a montré que la basilica s. Stephani ne pouvait pas, chez Grégoire de Tours, désigner la cathédrale (Vieillard‑Troiekouroff 1976 : 158‑165).

    11 – Il s’étend au nord jusqu’au N‑E du cours Belsunce.

    12 – On a parfois signalé une inscription byzantine du ixe s. sur marbre, trouvée à proximité du Plan Fourmiguier et mentionnant des lieux humides que l’on imagine à proximité (Lentheric 1878 : 347 n. 1 ; Supplément du journal de Provence du 12 mars 1785 : 287‑293). L’inscription a été mal lue. Elle date de 1764, et a été découverte en démolissant l’ancienne boulangerie de l’arsenal des galères.

    13 – Le sable provient probablement du Plan Fourmiguier, prolongement de la plage de l’Antiquité tardive.

    14 – Guérard : no 867, 30 avril 1182 ou 1183. Cf. Bourrilly 1925 : 12.

    15 – Voir en particulier les privilèges accordés aux Marseillais pour leur action lors de la prise de Saint‑Jean‑d’Acre en 1190 (Bourrilly 1925 no V).

    16 – Roncelin semble être abbé de Saint‑Victor en 1193 (AD 13 1 H 656, fol. 19), il en sort en 1194 à la demande des Marseillais. Il y retourne sous la contrainte en 1211, et Il y reste jusqu’à sa mort en 1216. Les témoins font souvent référence à des faits qui se passaient du temps des vicomtes Guillaume le Gros (1188) et Barral (1192). Il est probable que la colonne a été plantée dans la voie Calata dès sa création.

    17 – La longueur donnée dans l’acte est de 15 cannes (soit 30 m avec une canne de 2 m), or il semble que l’on ait environ 40 m dans la plus grande largeur au sud ; la canne faisait‑elle 2,65 m à cette époque ou bien le tracé du ruisseau des Cuiratiers est‑il moins régulier qu’on ne l’a restitué ?

    18 – Ce découpage entre un tiers nord de l’îlot, qui échappe au Saint‑Sépulcre, et les deux tiers subsistant à l’hôpital au sud est à l’origine de la différence de propriété mise en évidence dans l’étude d’archives (cf. supra § 8.5.2.3).

    19 – Hugues Fer en premier lieu, mais rappelons que son frère Guillaume vient en aide financièrement au monastère de Saint‑Victor en 1182‑1183, et que le troisième frère, Anselme, prendra en gage les droits que possédait Roncelin.

    20 – Le prévôt de Marseille, Pierre Bermond, frère de Raimond de Roquefort, possède des cuirateries près de la porte du Lauret. Cette famille tient les terres situées à l’est de la voie du Lauret, c’est‑à‑dire à l’est des terres d’Hugues Fer. Les deux familles sont liées, peut‑être par la mère d’Hugues Fer, fille d’Aicard de Saint‑Marcel.

    21 – Plusieurs actes la mentionnent dans les pièces du procès d’Albertas (AC DD 27 : 1484, 1497, 1503).

    Auteur

    • Marc Bouiron

      Conservateur du Patrimoine, archéologue municipal, Atelier du Patrimoine, Ville de Marseille

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    Chapitre 8. Les textes d’archives

    Philippe Bernardi et Marc Bouiron

    Chapitre 1. Transformations de la frange littorale de l’âge du Bronze au haut Moyen Âge

    Michel Maurin, Bernard Sillano, Marc Bouiron et al.

    Chapitre 3. Le faubourg Sainte‑Catherine dans la première moitié du xive s

    Michel Maurin, Martine Moerman, Frédéric Moroldo et al.

    Chapitre 2. L’urbanisation progressive

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    1 – La mention de l’épave retrouvée au xixe s. sous l’immeuble des Nouvelles Galeries (Canebière) reste un des problèmes de l’archéologie marseillaise.

    2 – Voir en dernier lieu Guéry 1992 : 112. Cet aménagement a donné lieu à de nombreuses analyses, en particulier de G. Bertucchi (1992). Nous n’avons pas découvert de restes de poissons à l’intérieur des amphores (Bertucchi et al. 1975). Cf. Salviat 1976 : 30, 34 fig. 8.

    3 – D’après le tracé du rivage à l’époque grecque restitué par L.‑F. Gantés (Bats 1992 : 63).

    4 – Plusieurs activités ont été envisagées : tout d’abord des activités qui nécessitent une certaine profondeur d’eau (pisciculture, ostréiculture, vivier...), mais la calade était au‑dessus de l’eau. Ce plan aurait pu également servir à étaler des filets pour les faire sécher, mais on peut supposer que l’on aurait découvert au moins quelques fragments de pesons, ce qui n’a pas été le cas. Enfin, aucune trace de restes de poissons n’a été trouvée dans les interstices d’une calade constituée de cailloux mal liaisonnés avec une anfractuosité suffisamment importante pour servir de pièges de macrorestes.

    5 – Information due à P. Mellinand (Afan), responsable de la fouille. L’empierrement fonctionne plus tardivement qu’à Marseille puisqu’il n’est abandonné qu’à la fin du vie s. Dégagé sur 400 m2, il est approximativement à la cote de 0 ngf ; il était, dans l’Antiquité, au‑dessus du niveau de la mer.

    6 – On notera également la découverte en 1871 d’une tête d’Auguste en marbre blanc dans la cave de l’immeuble abritant le Crédit Lyonnais dans la rue Saint‑Ferréol (Gérin‑Ricard 1915 ; Espérandieu 1925 n° 6689).

    7 – L’une d’elles (épitaphe de Cassia Fortunata, Aubert 1980 no 28 ; CIL X : 418) y a été trouvée d’après Grosson (qui écrit en 1773). Or elle est signalée par Muratori qui est chargé de mettre en œuvre le nouveau corpus des anciennes inscriptions (paru de 1739 à 1742), d’après un manuscrit de Peiresc ce qui rend ce lieu de découverte impossible (on l’imagine d’autant plus que Ruffi, contemporain de ces travaux, l’aurait indiqué dans son ouvrage). On signale également la découverte de deux autres inscriptions : une épitaphe de Julia Germana (Aubert 1980 n° 52 ; CIL XII : 441) et de T. Pompeius Felicianus (Aubert 1980 n° 64 ; CIL XII : 453), accompagnée d’urnes. Or, là encore, le texte de l’inscription se trouve dans les manuscrits de Peiresc. Grosson comme Michel de Léon (Albanès 1898 : 280) les font provenir du creusement de la darse. Nous ne pouvons pour l’heure trancher sur le lieu de leur découverte. Provient peut‑être également de cette zone un cippe en forme de colonne dédié à L. Lucilius Crispus (Aubert 1980 n° 58 ; CIL XII : 447 ; Benoit 1936 : 23 no 1), et conservé au xvie s. dans le jardin, ou la maison, du baron de Meollon situé sur la rive sud.

    8 – Peut‑être celui de 309 par Constantin ? (Euzennat 1976 : 549).

    9 – Dégagés par J. et Y. Rigoir, ces tombeaux reposaient directement (à 0,80 m ngf) sur une couche contenant des céramiques du ive s. ap. J.‑C., elle‑même surmontant des niveaux limoneux gris assimilés à des comblements de marécage.

    10 – À titre d’hypothèse, on peut se demander si ce n’était pas l’emplacement de la basilica s. Stephani du texte de Grégoire de Tours, traditionnellement placée sous l’emprise actuelle de l’église Notre‑Dame‑du‑Mont, à plus d’un kilomètre de la ville. E. Duprat (1924) avait déjà formulé l’hypothèse d’une localisation à l’angle N‑E du Vieux‑Port, près de la Canebière, car il situe ici une chapelle de Saint‑Étienne au xie s. L’hypothèse est citée par H.G. Beck (1950 : 158‑165), qui ne croit pas non plus à une localisation trop éloignée de la ville (le texte précise en effet « quæ urbe estproxima »). Néanmoins, il préfère l’identifier avec la cathédrale, qu’il situe hors les murs suivant l’avis de M. Clerc. Or, non seulement La Major est à l’intérieur de la ville, mais de plus M. Vieillard‑Troiekouroff a montré que la basilica s. Stephani ne pouvait pas, chez Grégoire de Tours, désigner la cathédrale (Vieillard‑Troiekouroff 1976 : 158‑165).

    11 – Il s’étend au nord jusqu’au N‑E du cours Belsunce.

    12 – On a parfois signalé une inscription byzantine du ixe s. sur marbre, trouvée à proximité du Plan Fourmiguier et mentionnant des lieux humides que l’on imagine à proximité (Lentheric 1878 : 347 n. 1 ; Supplément du journal de Provence du 12 mars 1785 : 287‑293). L’inscription a été mal lue. Elle date de 1764, et a été découverte en démolissant l’ancienne boulangerie de l’arsenal des galères.

    13 – Le sable provient probablement du Plan Fourmiguier, prolongement de la plage de l’Antiquité tardive.

    14 – Guérard : no 867, 30 avril 1182 ou 1183. Cf. Bourrilly 1925 : 12.

    15 – Voir en particulier les privilèges accordés aux Marseillais pour leur action lors de la prise de Saint‑Jean‑d’Acre en 1190 (Bourrilly 1925 no V).

    16 – Roncelin semble être abbé de Saint‑Victor en 1193 (AD 13 1 H 656, fol. 19), il en sort en 1194 à la demande des Marseillais. Il y retourne sous la contrainte en 1211, et Il y reste jusqu’à sa mort en 1216. Les témoins font souvent référence à des faits qui se passaient du temps des vicomtes Guillaume le Gros (1188) et Barral (1192). Il est probable que la colonne a été plantée dans la voie Calata dès sa création.

    17 – La longueur donnée dans l’acte est de 15 cannes (soit 30 m avec une canne de 2 m), or il semble que l’on ait environ 40 m dans la plus grande largeur au sud ; la canne faisait‑elle 2,65 m à cette époque ou bien le tracé du ruisseau des Cuiratiers est‑il moins régulier qu’on ne l’a restitué ?

    18 – Ce découpage entre un tiers nord de l’îlot, qui échappe au Saint‑Sépulcre, et les deux tiers subsistant à l’hôpital au sud est à l’origine de la différence de propriété mise en évidence dans l’étude d’archives (cf. supra § 8.5.2.3).

    19 – Hugues Fer en premier lieu, mais rappelons que son frère Guillaume vient en aide financièrement au monastère de Saint‑Victor en 1182‑1183, et que le troisième frère, Anselme, prendra en gage les droits que possédait Roncelin.

    20 – Le prévôt de Marseille, Pierre Bermond, frère de Raimond de Roquefort, possède des cuirateries près de la porte du Lauret. Cette famille tient les terres situées à l’est de la voie du Lauret, c’est‑à‑dire à l’est des terres d’Hugues Fer. Les deux familles sont liées, peut‑être par la mère d’Hugues Fer, fille d’Aicard de Saint‑Marcel.

    21 – Plusieurs actes la mentionnent dans les pièces du procès d’Albertas (AC DD 27 : 1484, 1497, 1503).

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    Bouiron, M. (2001). Chapitre 10. Synthèse. In M. Bouiron (éd.), Marseille, du Lacydon au faubourg Sainte-Catherine (Ve s. av. J.-C.-XVIIIe s.) (1‑). Éditions de la Maison des sciences de l’homme. https://doi.org/10.4000/books.editionsmsh.47658
    Bouiron, Marc. « Chapitre 10. Synthèse ». In Marseille, du Lacydon au faubourg Sainte-Catherine (Ve s. av. J.-C.-XVIIIe s.), édité par Marc Bouiron. Paris: Éditions de la Maison des sciences de l’homme, 2001. https://doi.org/10.4000/books.editionsmsh.47658.
    Bouiron, Marc. « Chapitre 10. Synthèse ». Marseille, du Lacydon au faubourg Sainte-Catherine (Ve s. av. J.-C.-XVIIIe s.), édité par Marc Bouiron, Éditions de la Maison des sciences de l’homme, 2001, https://doi.org/10.4000/books.editionsmsh.47658.

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    Bouiron, M. (éd.). (2001). Marseille, du Lacydon au faubourg Sainte-Catherine (Ve s. av. J.-C.-XVIIIe s.) (1‑). Éditions de la Maison des sciences de l’homme. https://doi.org/10.4000/books.editionsmsh.47408
    Bouiron, Marc, éd. Marseille, du Lacydon au faubourg Sainte-Catherine (Ve s. av. J.-C.-XVIIIe s.). Paris: Éditions de la Maison des sciences de l’homme, 2001. https://doi.org/10.4000/books.editionsmsh.47408.
    Bouiron, Marc, éditeur. Marseille, du Lacydon au faubourg Sainte-Catherine (Ve s. av. J.-C.-XVIIIe s.). Éditions de la Maison des sciences de l’homme, 2001, https://doi.org/10.4000/books.editionsmsh.47408.
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