Chronologie des oppida de la Gaule non méditerranéenne
|Chapitre 2. Le cadre chronologique de la fin de l’âge du Fer
2 Die zeitliche Einteilung der späten Eisenzeit
2 The chronological framework of the Late Iron Age
Résumé
Dans un premier temps sont présentés les grands systèmes chronologiques utilisés pour la fin de l’âge du Fer, qui dérivent des travaux de J. Déchelette en France et de P. Reinecke en Allemagne. On évoque et discute ensuite les datations absolues dont on dispose pour les deux ou trois derniers siècles avant notre ère et qui proviennent de différentes sources : les événements historiques relatés dans les textes antiques, les monnaies romaines présentes dans les contextes archéologiques, les datations dendrochronologiques. L’exploitation n’est pas simple : l’impact direct d’un événement historique donné sur l’occupation d’un habitat n’est jamais démontrable de manière certaine ; les monnaies romaines ne donnent qu’un terminus post quem et peuvent avoir circulé longtemps ; les datations dendrochronologiques, dont le nombre s’est heureusement accru ces dernières années, ne sont pas toujours d’un grand intérêt faute de mobilier associé, ou sont parfois difficiles à interpréter. Les datations données dans les publications sont donc presque toujours le résultat d’interpolations qui replacent les phases de la chronologie relative, pour lesquelles une durée de vingt à trente ans est postulée selon les auteurs, dans un cadre chronologique calibré par quelques rares références absolues. On examine ensuite les mobiliers les plus significatifs pour la chronologie, c’est‑à‑dire les importations, les parures, la céramique et les monnaies.
La chronologie des céramiques d’importation s’appuie sur du mobilier provenant d’épaves, ou de gisements terrestres datés par rapport à des événements historiques. Elles sont d’origine italique, plus rarement espagnole, sud‑gauloise ou grecque, et sont principalement représentées jusqu’au dernier tiers du ier s. av. J.‑C. par les amphores Dressel 1 et la céramique campanienne A et B. Leurs différentes variantes sont largement contemporaines, mais leurs proportions respectives évoluent dans le temps.
La chronologie des fibules repose sur les datations fournies par les nécropoles (allemandes et suisses, plus rarement françaises), par les stratigraphies d’habitat méditerranéennes, et par les camps du Rhin. Quelques types disposent d’un terminus ante quem ou postquem (datations dendrochronologiques, présence dans les fossés d’Alésia) ; le type de Nauheim est l’un de ceux dont la datation appuyée sur de nouvelles données est la plus lourde de conséquences sur la chronologie de la fin de l’âge du Fer.
La céramique gauloise tend à une certaine uniformisation avec les développements technologiques comme l’usage généralisé du tour ou la mise au point de nouveaux modes de cuisson, ainsi que par l’évolution typologique qui se produit sous l’influence des céramiques d’importation. Elle reste toutefois sensible aux variations régionales : d’importantes variations locales brouillent l’interprétation des pourcentages établis sur la qualité de la pâte, le type de montage, le mode de cuisson. Cependant certaines tendances de l’évolution des formes et des décors dépassent le cadre local ou régional et permettent de proposer un classement chronologique par la typologie.
La numismatique gauloise a considérablement progressé depuis les travaux de J.‑B. Colbert de Beaulieu mais l’utilisation des monnaies gauloises comme instrument de datation reste encore incertaine. Si la succession chronologique des alliages et d’une partie des séries monétaires est acquise dans ses grandes lignes, la chronologie absolue en est encore débattue, en particulier pour la dernière phase de La Tène qui se caractérise par l’abondance et la variété des monnaies. Un des acquis récents est l’évidence de la production de monnaies de faible valeur (potins) bien avant la Guerre des Gaules, longtemps refusée par les numismates car elle implique la déconnexion entre la chronologie relative des alliages monétaires et la chronologie de la Guerre des Gaules (qui est un des principes fondateurs du système de J.‑B. Colbert de Beaulieu), ainsi que la nécessité d’un système économique suffisamment complexe pour intégrer l’usage de la monnaie dans les transactions commerciales.
Texte intégral
2.1 Chronologie relative
1Les systèmes chronologiques de la fin de l’âge du Fer utilisés en France dérivent d’une part du système français conçu par Joseph Déchelette, et d’autre part du système allemand créé par P. Reinecke (tabl. ii).
- 1 Le système est utilisé par exemple à Étival‑Clairefontaine (Vosges) par A. Deyber (1984).
2La chronologie de P. Reinecke (1909), fondée sur des sites essentiellement funéraires d’Allemagne du Sud, admet à l’origine quatre phases dans la période de La Tène (A, B, C, D), de longueur inégale. Elle a été très tôt largement utilisée par les archéologues suisses et d’Europe centrale ainsi que par certains chercheurs de l’est de la France, où la culture matérielle présente des affinités évidentes avec celle d’outre‑Rhin1. Des subdivisions et des corrections de détail ont été introduites par P. Reinecke lui‑même, ou par ses successeurs, en particulier W. Dehn et O.–H. Frey pour les phases anciennes, et W. Krämer (1962) et H. Polenz (1982) pour les phases récentes. On n’a pas cessé en réalité d’affiner ce système, dont les ajustements les plus féconds ont été effectués à la suite d’études régionales. La richesse en ensembles funéraires de la région de Trèves a permis en effet à A. Haffner de proposer un système chronologique régional s’inscrivant dans l’évolution de la culture Hunsrück‑Eifel pour la fin de l’âge du Fer (Haffner 1969 ; 1974), et corrélé avec le système de Reinecke ; deux horizons (3 et 4) sont mis en correspondance avec la phase de La Tène D1, tandis que l’horizon 5 (détaché ultérieurement de l’horizon 4) est assimilé à La Tène D2, et précède un horizon gallo‑romain précoce incarne par les tombes A et B de Goeblingen‑Nospelt. A. Miron a développé ces résultats, en particulier à partir de l’étude de la nécropole de Horath (1986), et introduit la notion d’une phase « pré‑Nauheim », appelé La Tène D1a, qui précède la diffusion massive des fibules de Nauheim (La Tène D1b). Le même chercheur a également subdivisé la phase de La Tène D2 en distinguant, à partir de la nécropole de Wederath, un horizon ancien (La Tène D2a) défini par la présence de fibules à coquille et de geschweiftefibeln précoces, et un horizon récent (La Tène D2b) avec des Kragenfibeln et des variantes tardives de fibules à coquille (Miron 1989). Cette subdivision a aussi été discutée et adoptée par s. Rieckoff (1992) pour la Bavière méridionale.
- 2 Fibule de schéma La Tène 2 à long ressort et fibule de Nauheim.
3J. Déchelette a conservé le principe de la division tripartite du deuxième âge du Fer, ou période de La Tène, qui avait été fondée par O. Tischler à partir de l’évolution typologique des fibules (Tischler 1885 ; Déchelette 1914 : 912, 928). La correspondance entre les phases issues du système de Tischler (La Tène ancienne, moyenne, finale) et celles issues du système de Déchelette (La Tène 1, La Tène 2, La Tène 3) est totale pour la fin de La Tène moyenne et pour La Tène finale (Duval 1990 : 334). Les trois phases du système de Déchelette, de longueur inégale, ne sont pas définies sur les mêmes bases : alors que les deux premières reposent presque uniquement sur le mobilier des nécropoles, la troisième se fonde surtout sur les découvertes faites dans les oppida. Les deux planches illustrant la période de La Tène 3 dans le Manuel de J. Déchelette (1914, IV, pl. xii et xiii) en témoignent, qui montrent des objets issus pour près des deux tiers de fouilles d’oppida. Des modifications substantielles ont été introduites ensuite par D. Viollier (1916) pour la première phase, et par F.R. Hodson (1968) pour la phase moyenne, à partir des nécropoles suisses. Des aménagements ont été proposés pour les nécropoles champenoises (Hatt, Roualet 1977) ; la période de La Tène finale y est divisée en deux phases caractérisées chacune par un type particulier de fibule2. Les travaux récents de M. Vaginay et V. Guichard (1988) construisent un cadre chronologique pour la dernière phase de La Tène en Forez, qui s’appuie sur les sites de Roanne et surtout de Feurs. Quatre étapes de l’occupation de Feurs, mises en évidence par l’analyse statistique de la céramique, correspondent à trois phases de La Tène finale ; celles‑ci sont plus ou moins assimilées, par l’intermédiaire des fibules, aux phases de La Tène C2, D1 et D2 dans le système de Reinecke. L’apport essentiel de ce travail est la caractérisation, sur un site d’habitat, d’une phase chronologique de La Tène finale (La Tène finale 1), antérieure à celle caractérisée par la fibule de Nauheim (La Tène finale 2, ou La Tène D1).
- 3 Krämer 1962 ; Polenz 1971 ; Haffner 1974. « La fibule de Nauheim [...] est le fossile directeur par (...)
4Les deux systèmes ont des points communs. Ils reposent surtout, pour les phases anciennes, sur des nécropoles (allemandes et suisses pour la plupart), alors que la phase la plus récente s’appuie davantage sur le mobilier d’habitat (cette disparité est cependant moins prononcée dans le système allemand). La responsabilité en revient au petit nombre de nécropoles connues et surtout bien étudiées pour la fin de La Tène (Collis 1984 : 49 ; Pion, Guichard 1993) qui contraste avec le nombre important des sites d’habitat connus et explorés pour la même période. Dans tous les systèmes proposés, le mobilier métallique est le facteur chronologique, sinon le plus discriminant, du moins le plus décisif : les parures et surtout les fibules déterminent la succession des horizons à Manching (Krämer 1962, abb. 1) comme dans les nécropoles de Suisse, de la région Rhin‑Main (Polenz 1971, abb. 59) ou de Champagne. Quelques‑unes sont considérées comme des marqueurs privilégiés –des fossiles directeurs– de certaines phases, comme la fibule de Nauheim, donnée comme caractéristique de la phase de La Tène D13. L’absence de mobilier métallique dans un ensemble archéologique rend donc plus aléatoire son attribution à une phase précise de la chronologie relative : on connaît le cas d’Yverdon‑les‑Bains (Suisse) où il n’a été recueilli ni parures, ni armes, et où les chercheurs se sont trouvés dans la situation pour le moins paradoxale de disposer d’un mobilier daté en chronologie absolue, mais impossible à replacer en chronologie relative (Curdy, Klausener 1985 ; Kaenel, Curdy 1985 ; cf. infra 2.2). Et c’est en grande partie la rareté des fibules de Mötschwil (fossile directeur de La Tène C2), à l’ouest de l’Europe, qui rend difficile la mise en correspondance des systèmes chronologiques français et allemands pour la fin de La Tène moyenne et le début de La Tène finale (Vaginay, Guichard 1988 : 154‑155).
2.2 Chronologie absolue
2.2.1 Les événements attestés par les sources écrites
5La confrontation des données archéologiques aux données historiques a constitué la première méthode de datation des sites gaulois mis au jour par l’archéologie. Une série d’événements est particulièrement concernée : celle qui marque la conquête de la Gaule Chevelue entre 58 et 51 av. J.‑C., mais ce n’est pas la seule ; la conquête de la Gaule Narbonnaise entre 125 et 121 av. J.‑C et les campagnes militaires romaines sur le limes rhénan à partir du règne d’Auguste sont également impliquées, car elles influent indirectement, par l’intermédiaire des importations, sur la chronologie des habitats de Gaule interne. Les péripéties de la conquête de la Gaule Narbonnaise ont été invoquées pour dater l’abandon de certains sites de Gaule méridionale, comme Entremont, identifiée par F. Benoit comme la capitale des Salyens tombée en 123 av. J.‑C. devant C. Sextius Calvinus (Benoit 1968), ou encore Saint‑Blaise, dont on rattache la destruction aux mêmes troubles (Cayot 1984). La création des camps du limes rhénan est, quant à elle, reliée aux campagnes de Drusus et de Tibère contre les Germains à partir de 15 av. J.‑C ; l’argumentation historique conjuguée avec l’évolution du mobilier –essentiellement la céramique sigillée et les monnaies– détermine leur chronologie relative. Ces deux exemples illustrent bien les formes que prend l’utilisation des événements historiques à des fins chronologiques : on mettra l’installation ou l’abandon du site en relation avec les faits qui s’y sont déroulés (Entremont ou les camps du Rhin), ou bien on le rattachera à la chronologie absolue après l’avoir préalablement daté en chronologie relative –comme Saint‑Blaise, dont la datation absolue n’est pas donnée au départ de l’étude comme un terminus, mais est induite par l’examen du mobilier et le recours a posteriori à une interprétation historique.
6Quelle que soit l’attitude adoptée, l’argumentation n’échappe pas à certaines ambiguïtés difficilement évitables. Dans le premier cas, le risque est grand de méconnaître l’importance d’une occupation antérieure ou postérieure aux événements considérés : l’occupation d’Entremont, par exemple, se prolongerait en fait d’une vingtaine d’années au‑delà de la défaite des Salyens (Arcelin et al. 1990 : 101). Dans le second cas, le mobilier conduit à proposer la datation absolue la plus vraisemblable compte tenu de la fourchette chronologique qu’il définit ; mais cette date tient lieu, par la suite, de terminus chronologique pour le mobilier qui est ainsi amené à se dater lui‑même. Les tentatives de datation absolue des sites de la Gaule Chevelue à partir du texte de César présentent d’ailleurs les mêmes ambiguïtés. La chronologie des deux sites suisses de Bâle et de Berne, pour lesquels on a postulé un déplacement de l’habitat autour du milieu du siècle (en relation avec le départ puis le retour des Helvètes en 58‑57 av. J.‑C.) est en réalité induite, comme pour Saint‑Blaise, par l’analyse du mobilier (Müller‑Beck, Ettlinger 1962 ; Furger‑Gunti 1979). C’est aussi le cas du Petit‑Celland dont l’abandon brutal, concrétisé par l’incendie de la porte sud‑est du rempart, est rapproché par M. Wheeler des campagnes de Sabinus en 56 av. n.è., car les monnaies coriosolites recueillies dans cette couche d’incendie indiquent, d’après J.‑B. Colbert de Beaulieu, la première moitié du ier s. av. J.‑C. (Wheeler, Richardson 1957).
7On ne peut manquer de souligner le rôle extraordinairement important joué, pour la chronologie de la fin de l’âge du Fer en Gaule, par les découvertes faites dans les fossés d’Alésia : toute la chronologie absolue des monnaies gauloises, et dans une moindre mesure des fibules, se raccroche d’une manière ou d’une autre au terminus constitué par le siège de l’oppidum en 52 av. J.‑C. (cf. infra, chap. 3). La provenance des objets est pourtant loin d’être parfaitement claire : on s’aperçoit en effet, en comparant la nomenclature faite par Napoléon III des objets recueillis dans les fossés et les planches des objets de l’oppidum publiées par V. Permet (1906), qu’il y a eu confusion entre les trouvailles des fossés et celles du plateau où se situe l’oppidum. Une partie du mobilier néanmoins provient bien des fossés, notamment la majorité des monnaies (Colbert de Beaulieu 1955b ; Scheers 1987) et quelques armes et fibules (Verchère de Reffye 1864 ; Lerat 1979).
- 4 La question de l’emplacement d’Alésia doit être une fois pour toutes évacuée ; elle a été définitiv (...)
- 5 La prudence de S. Sievers, qui a réexaminé les anciennes découvertes d’armes, est significative : e (...)
8Un autre problème est de savoir si le contenu des fossés est bien en relation avec le siège de 52 av. J.‑C.4 : leur comblement pourrait, par exemple, s’être étalé dans le temps. Les fouilles récentes ont mis en évidence, pour les fossés de la contrevallation, des remplissages naturels sans doute relativement longs (Reddé 1994). Le réexamen du mobilier déposé au musée des Antiquités nationales tend toutefois à prouver que les objets découverts au xixe s., lorsqu’ils sont localisés précisément, proviennent presque tous du fond des fossés ; c’est en tout cas vrai pour les armes (Sievers 1994). La contemporanéité des anciennes trouvailles avec le siège de 52 semble donc assez largement assurée, encore que les abondantes découvertes du Mont‑Réa, qui mêlent armes, monnaies, fibules, ossements humains et animaux, posent certains problèmes d’interprétation et de chronologie. Comme le fait remarquer J.‑L. Brunaux (1990 : 176), la présence simultanée de ces types d’objets est habituelle dans les sanctuaires, et n’est pas exclusivement significative des vestiges d’un combat. Une partie des découvertes faites par Napoléon III dans les fossés du Mont‑Réa pourrait donc avoir été déposée en offrande, dans des conditions qui restent tout à fait obscures : y avait‑il un ancien sanctuaire indigène à cet endroit ? Ou bien ces objets auraient‑ils été déposés rituellement après la bataille ? Les archives de fouilles montrent que la plupart des trouvailles sont relativement dispersées, à l’exception d’un lot découvert en mars 1863 qu’on peut qualifier de dépôt. Les traces de traitement rituel des armes existent (umbos cloués, épées liées, épée coudée, traces de feu –encore que dans ce dernier cas, l’argumentation soit plus faible), mais sont rares (Sievers 1994). Les monnaies romaines du Mont‑Réa, peu usées, pourraient appartenir à un trésor (Popovitch 1994). S’il y a eu dépôt d’offrandes, c’est en tout cas selon des modalités qui ne sont pas celles attestées dans les sanctuaires les mieux connus (qui, il est vrai, appartiennent au domaine belge). Du point de vue chronologique, la question est évidemment importante ; elle n’est pas résolue pour l’instant5. Il existe en tout cas au moins un argument difficilement contestable qui tend à prouver qu’une grande partie du mobilier a bien été déposé en 52 av. J.‑C. : sur les 134 monnaies romaines recueillies, aucune n’est postérieure à 54 av. J.‑C.
9Quelques datations historiques méditerranéennes ont une importance indirecte pour la chronologie de La Tène finale, par l’intermédiaire des importations (cf. infra 2.3.1). L’une d’entre elles toutefois intéresse plus directement cette période : la destruction du sanctuaire de Talamone (Étrurie) en 82 av. J.‑C. constitue en effet un terminus ante quem pour La Tène D1 dans la mesure où l’un de ses principaux fossiles directeurs, la fibule de Nauheim, est attesté dans les niveaux antérieurs à cette destruction (Von Vacano 1980).
10Hormis quelques cas rares, l’exploitation des données historiques reste néanmoins peu opératoire. L’exécution sommaire des fouilles anciennes a sa part de responsabilité, mais le problème essentiel est inhérent à la nature même de la source archéologique : quelle que soit la qualité de la fouille et de son enregistrement, il est presque impossible d’attribuer avec certitude une séquence stratigraphique à un événement précis, d’une part parce qu’apprécier la durée pendant laquelle s’est constituée cette séquence est difficile, et d’autre part parce que le rapport de cause à effet entre un fait historique donné et un fait archéologique est rarement démontrable avec une certitude absolue. Nul ne pourra jamais prouver, par exemple, que les couches d’incendies repérées ici et là, à Berne, au Petit‑Celland ou ailleurs, sont attribuables sans l’ombre d’un doute à un événement précis de la conquête.
2.2.2 L’association de mobiliers avec un objet lui‑même daté en chronologie absolue
11L’objet daté donne un terminus, généralement post quem (plus rarement ante quem), au dépôt du mobilier qui lui est associé : ce dépôt ne peut s’être produit qu’après la création de l’objet en question. Dans les contextes de la fin de l’âge du Fer, ce sont surtout les monnaies romaines, datées par leur type et leur légende, qui jouent ce rôle. La chronologie absolue de la fin de La Tène s’appuie cependant assez peu sur cette méthode de datation, car si l’objet fixe la limite au‑delà de laquelle on ne peut pas remonter (date de fabrication), il n’en fixe en revanche aucune vers le bas (durée d’utilisation, ou de circulation pour une monnaie, qui peut être très variable et surtout très longue). La fiabilité d’une telle datation sera en fait d’autant plus grande qu’elle reposera sur l’association de plusieurs objets datés dans un même ensemble archéologique –une série de monnaies romaines par exemple–, condition qui n’est pas souvent remplie dans les contextes de l’âge du Fer.
- 6 Allen 1971 : 354 sq. Par ailleurs, H. Polenz (1982 : 154) fait remarquer que le poids plutôt faible (...)
- 7 Krämer 1971 : 117 sq. Contra, Feugère 1985.
12Le trésor de Lauterach, étudié par W. Krämer (1971) et plus récemment par H. Polenz (1982), comprend vingt‑quatre deniers romains, trois monnaies celtiques (un denier de KALETEDV et deux monnaies d’Allemagne du Sud du type Schönaich), ainsi qu’un bracelet filiforme à double attache en spirale, deux anneaux et une paire de fibules reliées par une chaînette, le tout en argent. Le denier romain le plus récent, très peu usé, a été frappé vers 110/106 av. n.è., date qui représente le terminus post quem du dépôt du trésor (Polenz 1982 : 153‑154, note 284). Le modèle de la monnaie à la légende KALETEDV est un denier romain frappé entre 208 et 150 ou 145 et 138 av. n.è. La frappe de cette monnaie gauloise ne pourrait guère remonter, d’après certains numismates français, au‑delà de 80 av. n.è. (Colbert de Beaulieu 1965), mais cette opinion n’est pas partagée par les numismates anglais, suisses, et allemands, qui soulignent à juste titre la fragilité des arguments historiques présentés par leurs homologues français6. Le dépôt aurait donc pu se faire selon eux peu de temps après la frappe du dernier denier romain. Or, les fibules recueillies sont proches du type de Nauheim, dont on a vu qu’il était caractéristique de La Tène D, ou elles pourraient le précéder typologiquement7. La datation de ce trésor constitue donc un terminus post quem –ou, du moins, un ancrage chronologique– pour cette phase.
13De nombreux trésors monétaires sont connus pour cette période, mais aucun n’apporte d’éléments aussi directement applicables à la chronologie absolue des phases finales de La Tène. On a également tenté de dater la dernière séquence de La Tène D (La Tène D2) à partir du monnayage d’or suession à la légende CRICIRU, sur lequel figure le profil d’une fibule à porte‑ardillon ajouré. Le type, difficilement identifiable (il s’agit peut‑être d’une Kragenfibel), appartient en tout cas à La Tène D2. Selon D.F. Allen, les débuts de l’émission ne sеrаіеnt pas antérieurs à 60/50 av. n.è. (Allen 1972). S. Rieckoff (1972), suivie par H. Polenz (1982 : 132), en a déduit que cette date constituait un terminus post quem pour la phase de La Tène D2. Mais là encore, ce sont des arguments historiques qui fondent le raisonnement (la monnaie est datée en référence à la guerre des Gaules), avec toutes les ambiguïtés qui ont été antérieurement évoquées.
2.2.3 Les datations dendrochonologiques
14On dispose actuellement d’une série assez importante de datations dendrochronologiques pour La Tène C et D, et qui ne se limitent plus exclusivement aux domaines suisse et allemand. L’intérêt de repères chronologiques aussi précis, évidemment indiscutable, ne doit pas faire oublier toutefois que ces repères ne sont que des termini post quem pour le dépôt des objets recueillis dans le même contexte.
15A. Haffner a commenté les résultats qui intéressent La Tène C (Haffner 1979). Un umbo de bouclier caractéristique de La Tène C1, provenant du site de La Tène, a été fixé sur un plateau fabriqué avec un bois abattu en 229 av. J.‑C. La tombe de Wederath, qui a livré du mobilier de la même période, contenait aussi du bois (utilisé pour le bûcher) abattu en 208 av. J.‑C. On a déjà évoqué le problème d’Yverdon‑les‑Bains, dont les palissades ont été datées en chronologie absolue, alors que le mobilier associé pose quelques problèmes d’attribution à une phase précise de la chronologie relative. Ce mobilier (qui comprend notamment des vases‑tonnelets peints) provient de couches déposées antérieurement à la construction de deux palissades en bois, datées par dendrochronologie de 173/171 et 161/160 av. n.è., pour l’une, et 159/158 av. n.è. pour l’autre (Curdy, Klausener 1985 ; Kaenel, Curdy 1985). Les chercheurs ont proposé de l’attribuer à La Tène C2 (Kaenel, Curdy 1985).
16Plusieurs datations peuvent être mises en relation avec du mobilier attribué à La Tène D1. En Suisse, le pont de Cornaux‑les‑Sauges a livré plusieurs dates d’abattage entre 120 et 116 av. J.‑C. (Kaenel, Muller 1986) ; le mobilier recueilli dans le lit de la rivière appartient principalement à La Tène D1, mais il ne s’agit évidemment pas d’un contexte archéologique parfaitement cerné. Les fouilles récentes du port de Genève ont mis au jour trois niveaux stratifiés de La Tène finale, séparés par deux phases de construction des structures portuaires datées par dendrochronologie (Bonnet et al. 1989). Les bois de la première phase de construction –un ponton, des quais et des aménagements de berge– ont été abattus entre 123 et 105 av. J.‑C., ceux de la deuxième phase entre 112 et 95 av. J.‑C. Le matériel archéologique est peu abondant et consiste essentiellement en céramique et en importations ; comme à Yverdon, l’absence de mobilier métallique interdit de rattacher formellement ce matériel à une phase précise de la chronologie relative, même si les comparaisons typologiques semblent placer les deux premiers niveaux archéologiques dans La Tène D1.
- 8 Trois fibules de ce type proviennent d’une couche de comblement d’une fosse qui a par ailleurs livr (...)
17Le cuvelage du puits de la Viereckschanze de Fellbach‑Smiden (Allemagne) est construit avec du bois abattu en 123 av. J.‑C. ; l’un des fossés de cette enceinte (et non le puits lui‑même, contrairement à ce qui a été souvent écrit) a livré une fibule de Nauheim, et le mobilier céramique est, d’une manière générale, attribuable à La Tène D1 (Planck 1982). Des niveaux d’habitat mis au jour lors de la fouille du Parking de la mairie à Besançon ont pu être datés par dendrochronologie (Guilhot, Goy 1992), mais ces dendrodatations ne sont pas toujours faciles à utiliser (cf. infra, notice de Besançon). Un terminus post quem vers 109 av. J.‑C. a été proposé pour l’apparition de la fibule de Nauheim à partir de l’une d’entre elles, mais il doit être considéré avec un minimum de prudence8. Enfin, on mentionnera pour mémoire les datations des remparts de Metz, auxquels ne peut être associé qu’un petit nombre d’objets (Faye et al. 1990).
18Le dernier tiers du ier s. av. n.è. possède aussi deux séries importantes de datations dendrochronologiques : le camp d’Oberaden dont les dates d’occupation (11‑9 av. J.‑C.), jusqu’alors établies sur les seules bases historiques, ont été largement confirmées (Schnurbein 1981), et le Pétrisberg de Trêves (30 av. J.‑C.) qui est probablement aussi un camp romain (Hollstein 1980). Ces deux sites intéressent surtout la chronologie des importations –céramique sigillée, amphore, céramique à paroi fine.
2.2.4 Conclusion
19Le bilan relatif aux fondements de la chronologie absolue de la fin de l’âge du Fer est donc, en définitive, assez maigre. Le passage de La Tène D1 à La Tène D2 vers le milieu du ier s. av. J.‑C. est d’abord axé sur l’exploitation des événements historiques de la conquête. Pour le début de La Tène D1 (dans l’acceptation classique, c’est‑à‑dire définie par la présence de fibules de Nauheim), une convergence des datations dendrochronologiques semble désigner le dernier quart du iie s. ; on ne doit pas oublier toutefois que ce sont des termini post quem, et que dans plusieurs cas ils ne sont pas en relation directe avec le mobilier concerné. Aucune datation absolue n’est établie avec certitude pour La Tène C2.
20Cette relative rareté des dates absolues fiables est généralement contournée par le recours à des interpolations arbitraires, ou à des estimations sur la durée approximative des phases et de leurs subdivisions. C’est ainsi que les débuts de La Tène C2 sont placés à mi‑chemin entre les débuts de La Tène Cl (vers 250 av. J.‑C. : Haffner 1979) et ceux de La Tène D1, soit pour H. Polenz vers 170 av. J.‑C. (1982 : 124‑125) et pour Miron vers 190 av. J.‑C. (1986 : 159). A. Miron place les débuts de La Tène D2 avant le milieu du ier s. av. J.‑C., de façon à lui conserver une consistance en accord avec sa présence affirmée dans les nécropoles trévires (1986 : 159). Sa subdivision en deux sous‑phases ne fait que rendre plus nécessaire encore ce réajustement (Miron 1989), qui entraîne lui‑même un redéploiement des phases antérieures. Le problème, dans ce cas, est d’estimer la durée des phases et de leurs divisions (une génération ? de vingt, vingt‑cinq, ou trente ans ?). À Feurs, M. Vaginay et V. Guichard postulent une durée d’environ vingt ans pour leurs phases 1 et 2, ce qui les amène à placer le début de La Tène finale 1 vers 160/140 av. J.‑C, A. Miron a suggéré une solution radicale à ce problème en divisant les 225 années qui s’écoulent entre le début de La Tène C (250 av. J.‑C.) et la fin de La Tène D (25 av. J.‑C.) en six périodes d’égale durée (très exactement 37,5 ans), correspondant aux six phases ou sous‑phases de la chronologie relative, ce qui placerait le début de La Tène D1 vers 175 et ceux de La Tène D2 vers 100 (Miron 1992 : 168). Il a aussitôt tempéré dans le même texte cette proposition abstraite qui raccourcissait exagérément la durée de La Tène C1, et sa conclusion finale place le début de La Tène D1a vers 150 av. J.‑C., et par le jeu des datations en cascade, celui de La Tène D2a vers 85 av. J.‑C. (tabl. ii). Son discours, provocateur à dessein, démontre s’il en était besoin le flou qui entoure encore la chronologie absolue de la fin de l’âge du Fer.
2.3 Chronologie du mobilier
2.3.1 Les importations
21On ne traitera que des céramiques d’importation, en provenance d’Italie et de la zone méditerranéenne en général ; le mobilier métallique (la vaisselle par exemple) est en effet assez peu répandu, ou plus vraisemblablement mal identifié dans la quincaillerie des sites d’habitat.
- 9 La Cavalière : quatre monnaies datables donnent une fourchette chronologique d’une cinquantaine d’a (...)
- 10 Sur l’argumentation historique : Schnurbein 1981 ; Schonberger 1985.
22La chronologie des importations repose d’une part sur les épaves, et d’autre part sur des sites terrestres datés par des faits historiques et/ou stratifiés. L’apport des épaves à la chronologie du mobilier des deux derniers siècles avant notre ère a été reconsidéré par A. Tchernia (1990), auquel nous renvoyons pour la bibliographie ancienne. Moins d’une demi‑douzaine d’entre elles ont livré des monnaies ou des inscriptions qui donnent un terminus en chronologie absolue pour les deux derniers siècles avant notre ère9. Les gisements terrestres dont la date de création –ou mieux encore, d’abandon ou de destruction– est connue par les sources écrites sont peu nombreux pour le iie s. av. J.‑C. : Carthage punique (détruite en 146 av. J.‑C.), le camp de Scipion à Numance (abandonné en 133 av. J.‑C.), Frégelles (détruite en 125 av. J.‑C.) (Morel 1981 ; 1990). Pour le ier s., les seuls gisements utilisables appartiennent aux dernières décennies du siècle : ce sont essentiellement des camps militaires dont la création est liée à la mise en place du limes rhénan, ainsi qu’aux campagnes de Drusus, puis de Tibère, contre les Germains à partir de 15 av. J.‑C.10 La chronologie relative de ces camps résulte de la combinaison des arguments historiques (progression des troupes romaines sur la Lippe ou l’Inn) avec la comparaison des faciès mobiliers, définis en l’occurrence par les monnaies et l’évolution typologique de la céramique sigillée. La fiabilité du système est garantie par de nombreux ensembles dont l’existence est brève, et qui se succèdent de façon assez serrée dans le temps. Les principaux d’entre eux sont Dangstetten : 15‑9 av. J.‑C. (Fingerlin 1972 ; 1986 ; Schonberger 1985 : 435) ; Oberaden : 11‑9/8 av. J.‑C. (Schurbein 1981 : 19‑20 ; datation confirmée par dendrochronologie) ; Rödgen : 10‑8/7 av. J.‑C. (Schonberger 1985 : 432) ; Haltern : 8/7 av. J.‑C. ‒9 ap. J.‑C. (Schnurbein 1981 : 42). D’autres gisements encore sont fondés aux alentours de 15 av. J.‑C. (Vindonissa, Nimègue...), date qui marque les débuts de ce qu’il est convenu d’appeler « l’horizon des camps » ; les contextes bien datés antérieurs à 15 av. J.‑C. sont en revanche moins nombreux (Desbat 1990). On comptera parmi ces derniers le site du Pétrisberg à Trêves, daté par la dendrochronologie de 30 av. J.‑C. (Hollstein 1980), mais dont le mobilier publié est très restreint (Loeschke 1909 ; Goethert‑Polascheck 1984). E. Ettlinger place les débuts de l’occupation de Neuss vers 19 av. J.‑C. (en tout cas antérieurement à 15 av. J.‑C. : Ettlinger 1983 : 106‑107) ; celle de Zürich‑Lindenhof commencerait aux environs de 20‑15 av. J.‑C. (Vogt 1948). Dans ces deux derniers gisements cependant, la datation repose essentiellement sur la comparaison avec les camps précédemment cités, et l’absence de contextes stratifiés laisse planer quelques doutes (Schonberger 1985 : 342). Enfin, le niveau 3 supérieur des fouilles de la cathédrale à Bâle‑Münsterhügel, bien distinct des niveaux précédents par sa situation stratigraphique comme par son faciès mobilier, serait de peu antérieur à l’horizon Dangstetten‑Rödgen‑Oberaden (Furger‑Gunti 1979 ; Roth‑Rubi 1986 : 168 – av. 15 av. J.‑C. – vers 11 av. J.‑C.).
- 11 Trois grandes étapes de la vie du site ont été mises en évidence, du début du iiie s. av. J.‑C. au (...)
23La chronologie du mobilier (d’importation ou non) s’appuie aussi sur les découvertes faites dans des tombes ou des gisements stratifiés. Les sites terrestres de Gaule méridionale ont été réexaminés sous l’angle de la chronologie par M. Py pour les habitats (1990a) et M. Bats pour les sépultures (1990). Les données stratigraphiques des habitats d’Ambrussum et Lattes (Hérault), de Nages et du Marduel (Gard), de La Lagaste (Aude), parfois associées à des comptages de mobilier, ont permis d’établir des chronologies relatives fiables pour chacun d’entre eux. La chronologie absolue des trois étapes du site de Nages s’appuie sur la céramique campanienne (Py 1978a : 20‑23), à l’exception des deux dernières (Nages III moyen et récent) qui sont datées surtout par des monnaies romaines11. Les autres gisements cités par M. Py sont d’un intérêt inégal dans l’état actuel des recherches (dont certaines sont inédites). Les nécropoles de Narbonnaise, beaucoup moins nombreuses que les habitats, sont pour la plupart publiées. Les tombes directement datées par des monnaies sont rares et tardives (Bats 1990 : 288, note 28) ; les datations s’appuient donc principalement sur le mobilier céramique, essentiellement la campanienne.
- 12 À Saint‑Romain‑en‑Gal, le premier contexte a livré deux monnaies d’Octave frappées postérieurement (...)
24Hors de Gaule Narbonnaise, nous disposons aussi de quelques sépultures et contextes stratifiés qui, pour la plupart, concernent la deuxième moitié du ier s. av. J.‑C. Les fouilles pratiquées à Lyon et à Saint‑Romain‑en‑Gal depuis une vingtaine d’années ont permis de cerner des contextes dont la constitution s’échelonne à partir du dernier tiers du ier s. av. J.‑C. À Saint‑Romain‑en‑Gal, le terminus post quem du contexte le plus ancien (SRG 1) est donné par les monnaies (postérieurement à 40 av. J.‑C.), mais c’est l’étude des céramiques d’importation qui fixe en définitive le terminus ante quem vers 20/15 av. J.‑C., avant l’horizon des camps. À Lyon, rue des Farges (FAR 1), c’est surtout la sigillée qui contribue à placer le terminus post quem vers 20 av. J.‑C. (Desbat et al. 1989 : 107 ; 1990), de même que pour les premières occupations du Verbe Incarné (VI 1), antérieurement à 20/15 av. J.‑C. (fourchette proposée : entre 40 et 20 av. J.‑C., malgré la présence de deux monnaies, frappées l’une en 30 av. J.‑C., l’autre en 28‑27/9 av. J.‑C. ; Desbat et al. 1989 : 105), et pour le dépôt de Loyasse 3 (L 3), daté de 30‑20 av. J.‑C. (Genin 1994)12. Comme pour les camps du Rhin, c’est donc la succession rapide de plusieurs contextes associée à l’évolution typologique de la campanienne et de la sigillée qui fondent en définitive la chronologie absolue de ces sites.
- 13 La tombe B est plus récente que la tombe A et doit se situer aux alentours de 20 av. J.‑C. (Metzler (...)
25C’est au fond le même principe qui est appliqué pour la datation des sépultures aristocratiques localisées aux environs de l’oppidum du Titelberg, au Luxembourg, qui ont livré des importations méditerranéennes (Metzler 1991). La succession chronologique de la tombe de Clémency et des quatre tombes de Goeblingen‑Nospelt est validée par l’évolution du mobilier archéologique, assez bien connue grâce notamment à l’existence de nombreuses nécropoles en pays trévire ; la sigillée précoce des tombes A et B de Goeblingen‑Nospelt les place avant l’horizon des camps, entre 30 et 20 av. J.‑C. (Thill 1966 ; 1967 ; Metzler 1984)13 ce qui constitue alors un terminus ante quem en chronologie absolue pour le reste de la série.
- 14 À Bolsena le terminus post quem du premier horizon qui a livré de la sigillée est donné par un deni (...)
26En dehors de la Gaule, Bolsena (Italie) et le Magdalensberg (Autriche) sont les gisements antérieurs à l’horizon des camps les mieux définis, grâce à leur très riche répertoire en vaisselles rouges et noires ; leurs datations absolues sont fondées sur l’étude de celles‑ci et la comparaison avec la céramique des camps, bien plus que sur le reste du mobilier y compris numismatique14.
Céramique campanienne
27La base de la typologie de cette vaisselle est la classification de Nino Lamboglia (1952) : celui‑ci avait défini trois classes de campanienne d’après l’aspect de la pâte et du vernis, et les travaux ultérieurs ont affiné ce premier tri sans le modifier fondamentalement. Le problème des formes a été repris par J.‑P. Morel (1981) selon le principe d’une classification hiérarchisée.
- 15 Voir Dedet 1978, Py 1978b, qui donnent de nombreux exemples de présence massive et tardive de céram (...)
28– La céramique campanienne A se caractérise par une pâte rouge‑marron et un vernis noir à reflets bleuâtres ou grisâtres, parfois rougeâtres. Les premières importations apparaissent en Gaule à la fin du iiie s. av. J.‑C., sur le littoral méditerranéen presque essentiellement (Morel 1978 ; Py 1990b : 565). Leur date d’arrêt a fait l’objet d’un débat qui n’est toujours pas clos. Il semble qu’elle se place autour du milieu du ier s. av. J.‑C. –l’épave de Giens, par exemple, n’en transporte pas. Dans la basse vallée du Rhône et sur le pourtour méditerranéen, la campanienne A se trouve cependant en grand nombre dans des couches datées de 40‑30 av. J.‑C., ou même plus tard15 ; le faciès de cette céramique, très particulier, ne trouve cependant guère d’équivalent en Gaule interne (Morel 1985).
- 16 Py 1978a ; Morel 1981. Campanienne A ancienne : 220/210 à 190/180 (Py 1990a : vers 225 à 175 av. J. (...)
29Dans les deux siècles d’exportation de cette vaisselle, fabriquée dans les environs de Naples, M. Py et J.‑P. Morel ont déterminé trois qualités de céramique qui correspondent à trois étapes chronologiques : A ancienne, A classique ou moyenne, A tardive16. Des jalons chronologiques assez bien datés existent pour les deux premières catégories : l’épave du Grand Congloué, Carthage, Numance. La fin du iie s. et le début du ier s., qui correspondent aux débuts de la A tardive, sont moins bien lotis.
- 17 Mais on en trouve cependant épisodiquement dans des contextes de la première moitié du ier s. av. J (...)
30Les formes sont peu évolutives, et les mêmes formes dans les mêmes contextes présentent parfois des différences de détail importantes, ce qui rend leur datation difficile. Le répertoire de la campanienne A dans les sites de Gaule interne est pour l’essentiel déjà connu à la fin du iie s. : il s’agit surtout des formes Lamboglia 27, 31, 36, 5, 6 (fig. 1). Les possibilités de datation paraissent meilleures pour les décors –notamment pour le iie s. av. J.‑C., bien représenté par des gisements dont la chronologie paraît solide (Morel 1981 ; 1985 ; 1990). Ainsi, l’association de timbres et de guillochures, très fréquente dans l’épave du Grand Congloué 1 et à Carthage, caractérise plutôt la première moitié du iie s. av. J.‑C. Les décors de timbres, dont certains sont déjà très simplifiés à Carthage, vont en se schématisant (épave de Punta Scaletta) et deviennent marginaux avant même la fin du iie s. (Morel 1990 : 67) ; il n’y en a plus sur la campanienne de la phase III moyen de Nages17. Le décor de cercles incisés, pratiquement inexistant à Carthage, abonde dans l’épave de Punta Scaletta ; il apparaît donc vers 150 av. J.‑C., et perdure ensuite jusqu’à la fin de la campanienne A. L’association de sillons concentriques et de timbres évoquerait plutôt le troisième quart du iie s. (Cayot 1984 : 71). Les filets peints sous la lèvre disparaîtraient à la fin du iie siècle.

FIG. 1 ‒ Les principales formes de céramique campanienne A recueillies dans les sites d’habitat de Gaule interne : 1 Lamb. 27B ; 2 Lamb. 31 ; 3 Lamb. 33b ; 4 Lamb. 6 ; 5 Lamb. 36 ; 6 Lamb. 5.
- 18 Des productions régionales ont été mises en évidence par exemple en Provence (Arcelin 1978).
31– La céramique campanienne B –ou plutôt du « cercle de la B » ou « B‑oïde » (Morel 1978 ; 1981)– exportée en Gaule interne est originaire de Campanie, mais très imitée dans les régions importatrices18. Ces productions se caractérisent par une pâte de couleur claire (chamois à beige rosé, jaune paille), un vernis noir mat ou satiné, avec parfois des reflets bleuâtres ou grisâtres d’aspect métallescent. Elles apparaissent à Numance, peut‑être même déjà à Carthage, et sont exportées vers la Gaule méridionale dans le courant de la deuxième moitié du iie s. (Py 1978b ; Cayot 1984), jusqu’à une époque assez incertaine : la dernière épave connue assez bien datée transportant de la campanienne B est celle de Plane 1 (vers 40‑30 av. J.‑C.).
32Les formes le plus souvent rencontrées en Gaule interne sont déjà connues dès les premières productions de « B‑oïdes » : ce sont les formes Lamboglia 1, 2, 3, 5, 6 ; apparaissent ensuite à une époque imprécise, les formes Lamb. 1/8 et 8, puis 5/7 (fig. 2). Les décors apportent peu d’informations chronologiques dans l’état actuel des connaissances.

FIG. 2 ‒ Les principales formes de céramique campanienne B recueillies dans les sites d’habitat de Gaule interne : 1 Lamb. 5 ; 2 Lamb. 1 ; 3 Lamb. 2 ; 4, 5 Lamb. 3 ; 6 Lamb. 6.
33– La campanienne C possède une pâte de couleur variable, généralement grise, recouverte d’un vernis très noir qui ne couvre à l’extérieur que le haut des vases (Morel 1981). Cette céramique produite probablement dans la région de Syracuse, mais qui a été à l’origine, comme la B, de productions apparentées –dont certaines très vraisemblablement en Gaule méridionale– est assez peu répandue en Gaule. L’exiguïté et la pérennité de son répertoire (formes et décors) ne permettent pas de l’utiliser comme moyen de datation –sauf peut‑être pour différencier les sites du iie s. et ceux du ier s., les importations de campanienne C arrivant en Gaule méridionale au début de ce dernier.
34Les deux principales familles de campanienne coexistent à partir de la deuxième moitié du iie s., et on s’attend donc à les trouver ensemble sur les sites gaulois où la campanienne est importée à cette époque. C’est le cas, mais avec des nuances : on observe en Méditerranée occidentale une augmentation progressive de la campanienne B aux dépens de la A à partir de la fin du iie, mais surtout au ier s. av. J.‑C. (Morel 1978 : 167). Le même phénomène est visible dans les stratigraphies de Nages et de la Gaule méditerranéenne en général, où la campanienne B reste, il est vrai, très minoritaire (Py 1978a ; 1990b : 569‑576), et, en Gaule interne, dans la stratigraphie de Roanne (Bessou 1976).
Imitations de campanienne à vernis rouge, pré‑sigillée, imitations de sigillée, sigillée...
35fig. 3, 4
36Les premières productions à vernis rouge rassemblent des céramiques à pâte généralement claire et dont le vernis imparfaitement grésé peut varier du brun‑rouge à l’orangé ; les formes s’apparentent plus ou moins fidèlement à celles de la céramique campanienne, ou à celles du répertoire précoce de la sigillée italique. Cette particularité explique l’imprécision qui règne dans la terminologie ; comme le dit M. Genin (1994 : 331), le choix de tel ou tel terme (imitation de campanienne, pré‑sigillée...) n’est de toute façon pas adéquat dans la mesure où il existe des filiations entre la campanienne et la sigillée. À Bolsena, C. Goudineau avait en effet bien montré les rapports typologiques qui unissent les modèles campaniens et la céramique « pré‑arétine » (1968 : 324 sq.). Inversement, certains vases en campanienne A tardive ont un vernis marron rougeâtre à violacé (Py 1978a : 231 ; Arcelin 1978 : 107). Des vases à pâte claire et vernis brun‑rouge, probablement de provenance régionale, sont très nombreux dans les couches de Nages III moyen et final, mais semblent surtout caractéristiques de la deuxième moitié et surtout du dernier tiers du ier s. av. J.‑C. (Py 1990b : 576‑577). À Saint‑Romain‑en‑Gal et Lyon, des imitations de sigillée, qui comprennent des vases à vernis rouge ou noir, issues d’ateliers locaux (Loyasse et Saint‑Romain‑en‑Gal) sont présentes dans les contextes les plus anciens (SRG 1, VI 1, L 3 : Desbat et al. 1989 ; Genin 1994).
37À Bolsena, les premières productions de sigillée proprement dite apparaîtraient dès le troisième quart du ier s. av. J.‑C., datation confirmée par la présence d’une assiette de forme Goudineau 1 dans l’épave de Planier III (Tchernia 1968‑1970). Toutefois, les formes précoces de ce répertoire –qui se caractérisent en particulier par des bords obliques ou ronds apparentés à ceux de la campanienne (fig. 3)– ne sont guère exportées hors d’Italie ; elles se limitent presque exclusivement, en Gaule, aux établissements militaires (Le Petrisberg, Neuss, Bâle...) ou aux contextes en relation avec cette occupation militaire (les tombes de Goeblingen‑Nospelt). Par ailleurs, la diversité des ateliers (Pise, Pouzzoles...) fait que les céramiques rencontrées dans les régions rhénanes ou ailleurs en Gaule n’ont pas toujours leur équivalent à Bolsena, et que les estimations chronologiques faites sur ce site ne sont sans doute pas directement transportables (Bémont 1990 : 78). Certaines convergences chronologiques sont toutefois notables. L’installation du Pétrisberg se placerait vers 30 av. J.‑C. (datation dendrochronologique) ; M. Py date l’apparition de formes précoces dans la région nîmoise des années 40/30 av. J.‑C. ; elles sont présentes dans les premiers ensembles du Verbe Incarné (VI 1), dont le dépôt définitif est postérieur à 30 av. J.‑C. (mais la fourchette proposée par A. Desbat remonte le terminus post quem jusque vers 40 av. J.‑C.). Il n’y a plus de formes archaïques à Dangstetten.

FIG. 3 ‒ Quelques formes précoces de céramique sigillée italique recueillies dans les sites d’habitat de Gaule interne : 1 plat découvert au Pétrisberg ; 2, 3, 5 Consp. 1.1, 7, 13.1 (G. 1, 2, 7) ; 4 Consp. 10.1 ; 6 Consp. 5.2 (G. 12b, service Ib de HaItern) ; 7‑10 Consp. 12.5, 12.4, 14.2, 12.3 (G. 23/Ha. 1, G. 24/Ha. 7, G. 17/Ha 1, service Ic de Haltern).
38Beaucoup plus répandues sont les formes du répertoire classique de la céramique arétine. L’histoire des études sur ce mobilier a été retracée plusieurs fois (par exemple Goudineau 1968). Le point de départ de la typologie est la publication du mobilier du camp de Haltern par S. Loeschke (1909), qui mit en évidence une vingtaine de types regroupés en quatre services différents selon la forme du bord. Les travaux de E. Vogt (1948) et de R. Fellman (1955) ont précisé les détails du service I –le plus ancien– et C. Goudineau (1968) a retracé les grandes étapes de l’évolution des services en confrontant les données de Bolsena avec celles des camps du Rhin. On résumera ici ses conclusions, et celles, plus récentes de E. Ettlinger (1983 : fig. 48).
39Le service I rassemble les formes dont le bord est muni d’une lèvre pendante. Les premières formes présentent une gorge sur le sommet de la lèvre arrondie, très séparée de la paroi (fig. 3) ; elle aboutit dans le type Ib à une simple rainure en même temps que la paroi intérieure se divise en deux par un léger ressaut. Le type Ic représente le stade ultérieur de l’évolution avec l’apparition d’une gorge intérieure sur le bord, qui forme une division tripartite de la paroi. Des formes de transition vers le service la existent à Zurich, Neuss. Le service Ia proprement dit est présent dans les mêmes sites et à Dangstetten, et absent à Oberaden et Haltern. C. Goudineau propose, d’après les données de Bolsena, les dates de 25‑20 av. J.‑C. pour l’apparition de ces formes. Le service Ib naîtrait entre 20 et 15 av. J.‑C., le service Ic entre 15 et 11 av. J.‑C.
40Le service II rassemble des bords qui ont en commun une division tripartite extérieure, généralement une bande concave encadrée par deux ressauts parfois décorés à la molette (fig. 4). C’est le service classique de Haltern. Rare à Dangstetten, minoritaire à Oberaden, il apparaît peu avant 11 av. J.‑C.

FIG. 4 ‒ Quelques formes de céramique sigillée italique recueillies dans les sites d’habitat de Gaule interne : 1 Consp. 18.2 (Ha. 2, service II de Haltern) ; 2 Consp. 19.2 (G. 28/Ha. 3b, service II) ; 3 Consp. 22.1 (G. 27/Ha. 8, service III) ; 4 Consp. 15 (Ha. 10, service III) ; 5 Consp. 31.1 (Ha. 11, service III) ; 6 Consp. 4.4 (G, 19/Ha. 4a) ; 7 G. 19b ; 8 Consp. 20.1 (G. 36b/Ha. 5, service IV) ; 9 Consp. 26.1 (G. 20/Ha.15, service IV).
41Le service III rassemble des formes indépendantes (Haltern 4b, Oberaden 2c et 3), et des formes dérivées du service Ic. C. Goudineau propose de garder la dénomination de service III pour les coupes à bord convexe muni d’une division tripartite et d’une décoration centrale (fig. 4) ; celles‑ci n’apparaissent qu’à Haltern, mais des formes de transition existent déjà à Oberaden. On peut donc placer sa formation dans les années 11‑9 av. J.‑C. Quant aux formes Haltern 4b et Oberaden 2 et 3, elles sont fabriquées dès 20 av. J.‑C.
42Le service IV est l’évolution du service II (fig. 4) ; on ne le trouve pas dans les camps plus anciens que Haltern et il se situe dans les dernières années de celui‑ci, au début du ier s. ap. J.‑C.
- 19 La céramique arétine décorée est peu fréquente en Gaule, où elle ne semble apparaître que dans la d (...)
43Les timbres, sur cette céramique non décorée19, donnent aussi des indications chronologiques. Les timbres radiaux sur les grands plats sont abandonnés vers 15‑10 av. J.‑C. pour les timbres centraux, généralement rectangulaires, qui sont de très loin les plus fréquemment trouvés sur les sites gaulois. La signature in planta pedis caractérise les productions arétines, à partir de 15 ap. J.‑C.
- 20 Schnurbein 1982 : 170, tabl. 4 ; les productions de La Muette représentent les 2/3 des vases des se (...)
- 21 À Bram, Narbonne, Montans, Saint‑Romain‑en‑Gal... (Passelac 1986 ; Desbat, Savay‑Guerraz 1986).
44En Gaule, des officines lyonnaises, succursales d’Arezzo, fournissent en masse les camps du Rhin dans la dernière décennie du ier s.20 Les premiers essais de fabrication de la sigillée gauloise sont perceptibles dès 25‑20 av. J.‑C.21, mais les ateliers concernés ont peu diffusé leur production au‑delà de leur environnement immédiat. La sigillée gauloise du Sud –celle de La Graufesenque– n’existe pas à Haltern ; elle ne paraît pas avoir été commercialisée sur une grande échelle avant le début du ier s. ap. J.‑C. ou même l’extrême fin du règne d’Auguste (Passelac 1986).
Vases à paroi fine
45fig. 5
- 22 À Numance, dans la nécropole de Las Cortes à Ampurias (Mayet 1978), et à Lattes (Py 1990b : 592, n. (...)
- 23 À Nages, ils n’apparaissent pas avant la phase iii finale qui couvre le dernier tiers du siècle (Py (...)
46Les vases à paroi fine constituent un des aspects les plus remarquables de la sélection des produits italiens à l’exportation. Leur présence en Méditerranée occidentale est attestée dans la deuxième moitié ou le dernier quart du iie s. av. J.‑C,22, mais reste limitée à cette époque à la frange côtière et aux établissements militaires, c’est‑à‑dire là où sont introduites, avec la présence romaine, de nouvelles habitudes de table (Vegas 1990). En Gaule méridionale, ils semblent être importés surtout dans la deuxième moitié du ier s. À La Lagaste (Aude), ils seraient antérieurs au dernier quart du siècle (Rancoule 1980 : 106), et dans les contextes de la région nîmoise, M. Py en note la présence au plus tôt dans le deuxième quart du ier s., tout en précisant qu’ils sont très peu représentés jusqu’au dernier quart de celui‑ci (Py 1990b)23. Les types rencontrés dans ces régions vers le milieu du ier s. sont des gobelets élancés Marabini I et II, ou ovoïdes Marabini III et IV, ces derniers à rebord concave. Dans la deuxième moitié de ce siècle apparaissent d’autres formes, certaines plus ouvertes, parfois munies d’anses, ainsi que des unguentaria. Le bord concave disparaît aux alentours de 10 av. J.‑C. (Vegas 1990 : 96) ; il est fréquent dans les premiers ensembles de Saint‑Romain‑en‑Gal et Lyon (Desbat et al. 1989).
47Ces vases sont parfois décorés ; le décor clouté est antérieur aux décors cordés ou constitués d’épines, si fréquents dans les camps romains du limes comme à Neuss (Vegas 1975 ; 1990) ; ces derniers sont aussi connus dans les premiers contextes de Lyon, entre 40 et 20 av. J.‑C. (VI 1). Un groupe de vases offre la particularité d’être orné d’un décor moulé, technique qui s’apparente à celle de la sigillée (fig. 5, no 7) ; deux exemplaires figurent dans la tombe A de Goeblingen‑Nospelt datable de la troisième décennie avant notre ère. Ces productions du potier aco sont fabriquées en Italie du Nord, mais aussi en Gaule, à Lyon (ateliers de Loyasse : 40/20 av. J.‑C. et de la Muette : vers 20/15 av. J.‑C.), et à Saint‑Romain‑en‑Gal, à partir de 20 av. J.‑C. (Desbat, Savay‑Guerraz 1986 ; Vertet, Lasfargues 1968 ; Genin 1994). Les ateliers de la région lyonnaise fabriquent également d’autres types de vases à paroi fine (gobelet‑tonneau, gobelet à panse cylindrique, bol hémisphérique... : Vertet, Lasfargues 1968 ; Genin 1994).

FIG. 5 ‒ Les principaux types de vases à paroi fine recueillis sur les sites d’habitat de Gaule interne au Ier s. av. J.‑C. : 1, 2 gobelet fusiforme Marabini 1 et 2 ; 3 gobelet tonneau à lèvre en bourrelet ; 4 gobelet ovoïde à bord concave Marabini 4 ; 5 bol hémisphérique ; 6 gobelet à panse cylindrique et pied mouluré ; 7 gobelet d’aco.
Lampes
48fig. 6
49Comme pour les vases à parois fines, la diffusion en Gaule des lampes en terre cuite se limite d’abord aux rivages méditerranéens. On notera d’abord l’existence de rares lampes en céramique campanienne dans des contextes de La Tène finale : le site de Villeneuve‑Saint‑Germain, et la tombe de Clémency, attribuée à La Tène 2a par J. Metzler (Metzler et al. 1991). La plupart des exemplaires bien datés en Gaule continentale sont toutefois issus de contextes du dernier tiers du ier s. av. J.‑C. : la tombe B de Goeblingen‑Nospelt, les camps du limes. Les types rencontrés ont pourtant parfois connu une longue existence. Le type Dressel 2, ou Warzenlampe, attesté à Haltern, est produit avant le milieu du ier s. av. J.‑C. (Pavolini 1990 : 109). Le type Dressel 3 paraît largement contemporain du précédent ; on le rencontre dans la région nîmoise dans les deux derniers tiers du ier s. (Py 1990b : 595), mais il disparaît probablement rapidement après 10 av. J.‑C. (il est inconnu à Haltern, et rare ou absent dans les contextes lyonnais postérieurs à 20 av. J.‑C.). Le type Dressel 4 ou Vogelkopflampe semble coïncider pour l’essentiel avec le principat d’Auguste, ou lui être légèrement antérieur (Pavolini 1990 : 110) ; il est en tout cas rare ou absent dans les contextes lyonnais postérieurs à 20 av. J.‑C., comme le type Dressel 3 (Genin 1994 : 353). Le règne d’Auguste voit se répandre les premières lampes à volutes dont l’existence se prolonge bien après le changement d’ère.
Céramique à engobe interne rouge pompéien
50Il s’agit d’une céramique à pâte souvent micacée, dont la surface interne et le bord en bourrelet sont recouverts d’un engobe épais et lisse de couleur rouge sombre, destiné à permettre la friture des aliments (Goudineau 1970). Produite en Italie dès le iie s., elle est exportée en Méditerranée occidentale dans le courant du ier s. ; on la rencontre dans la deuxième moitié de ce siècle en Gaule du Sud, mais en petite quantité (Py 1990b : 589), alors que les contextes les plus anciens de Gaule continentale pour lesquels nous disposons de bonnes datations sont ceux de Lyon (VI 1) et des camps du Rhin (Haltern, Oberaden, Neuss). Les formes sont plates, parfois dotées d’un couvercle, et souvent de grandes dimensions (fig. 6). Elle perdurent sans grand changement au ier s. ap. J.‑C. et sont abondamment imitées.

FIG. 6 ‒ Autres importations méditerranéennes : 1‑4 lampes (1 : Dressel 2 ; 2 : Dressel 3 ; 3 : Dressel 4 ; 4 : lampe à volutes) ; 5, 6 plat à engobe interne rouge pompéien ; 7 pichet ampuritain ; 8‑12 céramique commune claire (8 : cruche à lèvre en bourrelet ; 12 : cruche à lèvre striée ; 9‑11 : mortiers).
Céramique grise ampuritaine
51Cette production très commune en Catalogne aux vie et iiie s. av. J.‑C. possède une pâte grise, dure et fine. Les vases rencontrés dans les contextes de Gaule interne appartiennent presque tous à la même forme : il s’agit d’une œnochoé à une anse, de forme plus ou moins bitronco nique, dont le col est parfois orné de listels (fig. 6), le « pichet catalan » (Aranegui Gasco 1987). Les premières exportations en Gaule méditerranéenne sont datables de la deuxième moitié du iiie s. av. J.‑G., culminent à la fin du iie s. av. J.‑C., avant de régresser fortement au ier s. et de disparaître à la fin de celui‑ci ; les cols ornés de listels sont, dans la région nîmoise, surtout caractéristiques du iie s., ceux dont le col est lisse dominent au ier s. (Py 1990b : 599).
Céramique commune claire
- 24 M. Py cite d’ailleurs pour la région nîmoise un exemple de site de production en Vaunage daté de ce (...)
52D’origine italique, elle a été abondamment imitée en Gaule méditerranéenne, où elle apparaît peu avant le milieu du iie s. (dans la région nîmoise, Py 1990b : 585). Les formes rencontrées en Gaule continentale sont très majoritairement des cruches à pâte claire, col cylindrique haut et large, et panse sphérique (fig. 6). Les lèvres en bourrelet sont les plus anciennes (on les rencontre dès la phase II récent de Nages, datée de la deuxième moitié du iie s. av. J.‑C.) ; les lèvres en gouttière sont caractéristiques en Provence du ier s. av. n.è., et surtout de sa deuxième moitié (Dumoulin 1965 ; Py 1978a ; 1981) ; elles apparaissent probablement dans le deuxième quart du ier s. dans la région nîmoise (Py 1990b : 585). Dans le dernier tiers du ier s., les cruches deviennent si abondantes qu’il faut envisager de nombreuses fabrications locales24. La cruche à lèvre striée fait son apparition à Trèves en céramique sigillée, et dans les camps rhénans en céramique commune (type Haltern 45) ; A. Haffner en fait un fossile directeur de l’horizon gallo‑romain précoce en pays trévire (Haffner 1974).
- 25 D. Paunier note, à propos des mortiers à bandeau vertical de Genève : « Si les premiers exemplaires (...)
53Les mortiers (fig. 6) se recueillent dans les mêmes contextes que les cruches. Dans la région nîmoise, les plus anciens (en usage jusqu’au deuxième quart du ier s. av. J.‑C.) sont fabriqués dans une pâte très proche de celles des amphores de Campanie (dégraissant de sable volcanique) et possèdent un bord triangulaire (Py 1990b : 590) ; un fragment de bord appartenant à ce type a été découvert dans la fosse de Goincet, ce qui tendrait à prouver que ces productions sont importées en Gaule interne relativement peu de temps après leur apparition sur le pourtour méditerranéen (Vaginay, Guichard 1984). Les mortiers à lèvre à bandeau vertical sont, quant à eux, largement diffusés dans les camps du Rhin, mais sont présents aussi dans les premiers contextes lyonnais (VI 1 et L 3). Ces formes sont si fréquentes qu’il faut envisager, là aussi, des fabrications locales25.
Amphores
54fig. 8
55Les amphores sont peut‑être la catégorie de mobilier d’importation dont l’exploitation chronologique est la plus délicate, particulièrement en contexte d’habitat. Les difficultés qui se présentent sont d’abord de nature typologique : l’évolution de ce mobilier est encore mal connue, et difficile à interpréter du point de vue de la chronologie, Ensuite, se pose le problème de la provenance qui a des implications chronologiques pour certaines amphores. Enfin, il n’est pas simple d’identifier un type d’amphore à partir des fragments récoltés dans les sites d’habitat, où les vases complets sont toujours l’exception.
56L’ordre d’apparition des différents types d’amphores au cours des deux derniers siècles avant J.‑C. est toutefois assez bien connu. Les amphores gréco‑italiques, présentes en Méditerranée depuis le ive s. av. J.‑C., semblent disparaître au cours du dernier quart du iie s. : aucun site terrestre ou épave du ier s. av. J.‑C. n’en a livré jusqu’à présent, et si on les trouve à Numance, l’épave de la Cavalière n’en transporte pas. Leur morphologie évolue lentement : allongement progressif du col et de la panse, allongement et abaissement de la lèvre qui passe de l’horizontale à l’oblique au iie s. av. J.‑C. (fig. 8, no 1), pour aboutir sans rupture typologique au type suivant (Will 1982 ; Empereur, Hesnard 1987 ; Hesnard 1990 ; Tchernia 1986). Celui‑ci réunit sous le terme générique d’amphores italiques Dressel 1 des amphores vinaires, comme les précédentes, dont la morphologie varie assez considérablement.

FIG. 8 ‒ Les principaux types d’amphores importées en Gaule interne aux IIe et Ier s. av. J.‑C. : 1 gréco‑italique ; 2 Dressel 1A ; 3 Dressel 1B ; 4 Pascual 1 ; 5 Haltern 70 ; 6 amphore de Rhodes ; 7 Dressel 2/4 ; 8 Dressel 7/11 ; 9 Dressel 20 ; 10 Gauloise 2 ; 11 Gauloise 4.
57De nombreuses typologies ont été proposées depuis la première classification de H. Dressel. Les plus utilisées sont celles de N. Lamboglia (1955) et de F. Benoit (1957), qui ont adopté un classement en trois groupes, fondés sur la taille du récipient et la forme de la lèvre : l’amphore Dressel 1A (N. Lamboglia) ou Républicaine IIIA (F. Benoit), de petite taille, à lèvre courte et inclinée, à panse cylindrique ou en ogive, à pied en pilon ou en bouton ; la Dressel 1B, plus haute, dont la panse est marquée à l’épaule par un angle vif, le pied massif et cylindrique, la lèvre haute, verticale ou rentrante ; la Dressel 1C qui se distingue de la précédente par une panse plus fuselée, des anses infléchies et un col s’évasant vers la panse.
58En réalité, l’identification de ces différents sous‑types n’est pas aussi simple, et les critères métriques utilisés ne sont pas unanimement acceptés (Laubenheimer 1980 ; Tchernia 1990). L’accord semble se faire toutefois autour de la définition des Dressel 1B et C : ce sont des amphores dont la hauteur totale atteint au moins 1,10 m (Tchernia 1986 ; Hesnard 1990 ; Laubenheimer 1990), avec une panse plus fuselée et une lèvre mesurant plus de 6 cm de hauteur pour le type 1C. Plus généralement, on attribue tacitement une lèvre de Dressel 1 mesurant plus de 5,5 cm de hauteur au type 1B ou 1C (Tchernia 1986 : 313). Les autres Dressel 1 qui n’entrent pas dans cette définition sont appelées Dressel 1A (Tchernia 1990). Celles‑ci, qui succèdent progressivement aux gréco‑italiques, sont les plus anciennes : selon les définitions proposées, elles pourraient exister à Carthage avant 146 (Hesnard 1990) ; elles sont en tout cas présentes peu après le milieu du iie s. av. J.‑C. (Tchernia 1990 : 42). Les Dressel 1B apparaîtraient à la fin du iie s. ; elles sont absentes à Numance, et la plus ancienne date consulaire connue sur ces amphores est celle de 97 av. J.‑C. Pour les Dressel 1C, l’épave de La Cavalière donne le jalon le plus ancien aux alentours de 100 av. J.‑C.
59L’épave de La Plane I est la dernière connue transportant des Dressel 1 ; on les trouve cependant encore dans les camps du limes, comme dans nombre de gisements du dernier tiers du ier s. : à la période III final de Nages, il existe des exemplaires de Dressel 1A. Il n’est pas excessivement rare non plus de les rencontrer dans des contextes du début du ier s. ap. J.‑C. (par exemple à Saint‑Romain‑en‑Gal), mais il s’agit sans doute de tessons résiduels (Desbat 1990 : 252, place la fin des importations de Dressel 1 dans la vallée du Rhône vers 30/20 av. J.‑C.). Les importations ont très certainement cessé avant la fin du ier s. av. n.è.
60Ces dernières décennies voient aussi apparaître d’autres amphores dont la diversité et l’abondance tranchent avec les périodes précédentes.
61On rencontre d’abord, dans la seconde moitié du ier s. av. J.‑C., des amphores vinaires de Tarraconnaisc, Léétanienne 1 (Comas i Sola 1985 : fig. 8, 9), puis Pascual 1 (Pascual Guasch 1977), dont on a recueilli quelques exemplaires dans les niveaux les plus anciens de Lyon (VI 1), Saint‑Romain‑en‑Gal (SRG 1) et dans la tombe B de Goeblingen‑Nospelt ; elles sont connues à Besançon dès le milieu du ier s. av. J.‑C. (Laubenheimer, Humbert 1992 : 188). Les amphores à vin et olives de Bétique –Haltern 70– sont également connues dans les contextes anciens de Lyon (VI 1 et L 3) et Saint‑Romain‑en‑Gal (SRG 1), ainsi que dans les camps du limes (Haltern, Oberaden...) ; un exemplaire a toutefois été recueilli dans l’épave de la Madrague de Giens que A. Tchernia tendrait à dater, selon les indices numismatiques, de la décennie 75‑65 av. J.‑C. À Besançon, cette amphore est attestée dans le comblement d’une cave, compris entre 54 av. J.‑C. (date de la construction de la cave) et 40 av, J.‑C. (terminus ante quem pour l’abandon définitif de cette structure). D’autres amphores vinaires, dotées d’une anse bifide –les Dressel 2/4–, sont de provenances diverses : Italie, Gaule méridionale, Espagne, Méditerranée orientale (amphore de Cos) ; celles de provenance italique ou orientale sont déjà connues en nombre à Saint‑Romain‑en‑Gal (SRG 1) et Lyon (VI 1, L3), qui livrent aussi des amphores vinaires de Rhodes, produites en Méditerranée orientale (Desbat, Martin‑Kilcher 1989). Ces amphores sont connues à Besançon à la phase 3 (‑30/+1).
62Les amphores à saumure de Bétique –Dressel 7/11, Haltern 69– sont recueillies dans les mêmes contextes : camps du limes, contextes anciens de Lyon et Saint‑Romain‑en‑Gal (où elles sont bien représentées), tombe B de Goeblingen‑Nospelt, le Pétrisberg ; leur production est sans doute plus ancienne si l’on en juge par leur présence dans l’épave du Cap Sicié, ainsi que dans l’enclos funéraire de la tombe de Clémency (Metzler et al. 1991 : 78). Les amphores à huile, amphores de Brindes, Dressel 20 de Bétique, sont attestées en petit nombre à Saint‑Romain‑en‑Gal (SRG 1) et à Lyon (L 3), à Besançon à partir de la phase 3 (‒30/+1) ; elles sont en revanche absentes du contexte le plus ancien de Lyon (VI 1). La même remarque s’applique pour les amphores Gauloises 2 à fond plat, fabriquées à Marseille. Les autres formes d’amphores gauloises sont fabriquées après le début du ier s. av. J.‑C. (Laubenheimer 1985).
63Les fig. 7 et 9 ordonnent les différents types de céramiques d’importation et d’amphores d’après leur date d’apparition. On notera que les amphores autres que les gréco‑italiques et les Dressel 1 sont caractéristiques du dernier tiers du ier s. av. J.‑C., mais que certaines sont certainement un peu plus anciennes, ce qui devrait permettre une approche chronologique assez fine des contextes de la deuxième moitié du ier s. av. J.‑C. Inversement, le type Dressel 1, dans son ensemble, connaît à peu près un siècle et demi d’existence, ce qui pose le problème de sa signification chronologique pour les contextes dans lesquels on le recueille. Il est certain que la Dressel 1B n’est pas exportée vers la Gaule, du moins en grande quantité, avant le début du ier s. av. J.‑C. ; on observe alors une augmentation progressive de la Dressel 1B aux dépens de la Dressel 1A, comme le montrent les stratigraphies méditerranéennes de Nages et de La Lagaste (Py 1978a : 249 ; Rancoule 1980 : 99, tabl. 112). Ce phénomène s’observe aussi dans les rares stratigraphies du monde celtique (Roanne, Tournus...). Le calcul des proportions respectives de ces variantes a donc un sens du point de vue de la chronologie, à condition de pouvoir déterminer typologiquement les fragments qui sont le lot habituel des fouilles d’habitat. Ce problème sera discuté dans le chapitre suivant.

FIG. 7 ‒ Chronologie des principales catégories de céramique importée en Gaule aux IIe et Ier s. av. J.‑C. (datations admises pour les contextes gaulois).
2.3.2 Les fibules
64fig. 10‑12
65Elles constituent, comme on l’a vu précédemment, le principal élément qui fonde la chronologie relative de La Tène. Leur évolution en général rapide, les nombreux catalogues qui leur ont été consacrés, la part importante qui leur est faite dans les publications des sites d’habitat et de nécropoles, permettent de dresser un tableau assez précis de leur succession au cours des deux derniers siècles avant notre ère.
Fibules de schéma. La Tène moyenne
66fig. 10, nos 1 à 5
67Elles possèdent un ressort à corde externe, et un arc qui reçoit le retour du pied dans une griffe ou une boule. L’existence de variantes régionales n’empêche pas la convergence de certains caractères morphologiques. Les fibules de La Tène C1 sont dotées d’un pied souvent décoré d’une perle, d’un ressort en général court, dont les spires peuvent être de grand diamètre (no 1). Une fibule de ce type a été déposée dans la tombe 96 de Wederath, qui a donné une datation dendrochronologique vers 208 av. J.‑C. (Haffner 1979), mais on les trouve encore à La Tène C2, par exemple dans le Tessin (Stöckli 1975). Les fibules de La Tène C2 possèdent un pied plus court qu’à la période précédente, sans décor (no 2) ou discrètement décoré. Parmi les fibules à ressort court, la fibule du type de Mötschwil, particulièrement bien représentée dans la région bernoise, se distingue par un pied et un arc décoré de petits reliefs incisés.
68On rencontre aussi à La Tène C2 de petites fibules à ressort en arbalète (no 3) (Suter 1984 : 83) ; certaines variantes marquent la transition entre La Tène C2 et La Tène D1 à Manching (type 22 : Gebhard 1989c) ou plus généralement en Bavière (Polenz 1982 : 78, fig. 12 ; sépulture de Nierstein), mais aussi la transition entre La Tène moyenne et finale en Champagne (Hatt, Roualet 1977 : 17). Selon Miron, elles caractérisent les phases 3 et 4 de Horath (La Tène D1), mais apparaissent dès la fin de la phase précédente (La Tène C2). Dans le Midi, on les trouve encore épisodiquement sur les sites du ier s. av. J.‑C., essentiellement dans les premières décennies pour M. Feugère, dont elles constituent le type 1b1 (Feugère 1985).
69Les fibules en fer de schéma La Tène 2 à corde interne ou externe et ressort court dont le pied, trapézoïdal ou triangulaire, se fixe sur l’arc au moyen d’un étrier formé par aplatissement de son extrémité (no 4) sont datées de La Tène D1 (Polenz 1971 ; Stöckli 1974). À Wederath, la tombe 196 a livré une fibule de ce type accompagnée d’une fibule de Nauhcim (Polenz 1982 : 93). Dans le Midi de la France, elles sont associées à du mobilier du début du ier s. av. J.‑C. (Feugère 1985, type 3a). Ces fibules ne doivent pas être confondues avec les fibules gallo‑romaines pour lesquelles il serait sage de conserver l’appellation exclusive de « pseudo‑La Tène 2 », et qui s’en distinguent par un arc voûté, coudé à la perpendiculaire de la corde généralement interne, et par un pied dont les angles sont plutôt aigus (no 5) ; elles apparaissent au plus tôt dans des contextes tibériens ou légèrement antérieurs (Fauduet 1983 : 258 ; Feugère 1985 : 196, types 3b et 3c).

FIG. 10 ‒ Les types de fibules rencontrés dans les sites d’habitat de Gaule interne aux IIe et Ier s. av. J.‑C. Fibules à ressort nu : 1, 2 fibule de schéma La Tène 2 ; 3 fibule de schéma La Tène 2 à ressort multispires (Feugère 1 b1) ; 4 fibule de schéma La Tène 2 à corde interne (Feugère 3a) ; 5 fibule pseudo‑La Tène 2 (Feugère 3b) ; 6 fibule de Nauheim (Feugère 5a) ; 7 fibule à tête couvrante (Feugère 7a) ; 8 fibule à coquille (Feugère 7c) ; 9, 10 fibules filiformes (10 : Feugère 5b) ; 11‑13 fibules à arc mouluré (11 et 12 : Feugère 8a et b).
Fibule de Nauheim
70Le type « classique » (Fougère 1985, type 5a) est à quatre spires et corde interne. L’arc, de forme triangulaire, est presque rectiligne jusqu’au porte‑ardillon trapézoïdal ; il porte souvent des décors incisés ou estampés (fig. 10, no 6). La datation de cette fibule n’a cessé d’être débattue depuis les conclusions de O. Almgren qui, se fondant sur son absence dans les fossés d’Alésia, plaçait la création du type dans la deuxième moitié du ier s. av. J.‑C. (Almgren 1913). Quelques décennies plus tard, J. Werner expliqua cette absence par le fait qu’il s’agissait d’une parure féminine peu susceptible d’être découverte dans un contexte militaire (Werner 1955). Mais ce sont les observations de J. Gourvest sur le mobilier de Constantine (Bouches‑du‑Rhône) et sur celui de Bâle, publié par Major en 1940 (Gourvest 1956), qui relancèrent vraiment le débat : J. Gourvest proposa alors une datation dans la première moitié du ier s., à laquelle se rangea J. Chapotat quelques années plus tard (Chapotat 1970).
- 26 À Nages, une fibule provenant d’un dépotoir est associée à de la campanienne A (dont trois fonds dé (...)
71La fibule de Nauheim est considérée comme le fossile directeur par excellence de La Tène D1, et à ce titre, on a déjà discuté les repères en chronologie absolue fournis par certains contextes (la Viereckschanze de Fellbach‑Smiden, le dépôt de Lauterach, les fouilles du parking de la Mairie à Besançon... : cf. supra 2.2), dont les plus anciens se placent dans le dernier quart du iie s. av. n.è. M. Feugère a également recensé des contextes méditerranéens datés de la fin du iie s., ou à la rigueur du tout début du ier s. av. J.‑C., dans lesquels ont été recueillies des fibules de Nauheim (Feugère 19 8 5)26 ; selon le même chercheur, sa grande période d’utilisation semble couvrir surtout les deuxième et troisième quarts du ier s. av. J.‑C., qui voit aussi l’apparition et le développement de variantes de la fibule de Nauheim (Feugère 1985, type 5c), Très récemment, K. Striewe a mené une étude approfondie sur ces fibules et leurs variantes (Striewe 1996). Celle‑ci, globalement, n’apporte pas d’élément véritablement nouveau sur le plan de la chronologie absolue ; elle confirme leur circulation dans le dernier quart du iie s. et la première moitié du ier s. av. n.è. En revanche, elle définit des groupes « anciens » et « récents » de fibules, qui devraient permettre d’affiner les datations dans les contextes de La Tène D1. Par ailleurs, elle semble bien avoir démontré, en étudiant la répartition de ces groupes, que le berceau d’origine de la fibule de Nauheim est à chercher, non dans le Midi de la France comme on le pensait (cf. en dernier lieu Feugère 1985), mais dans la haute vallée du Rhin (Striewe 1996 : 167‑169).
Fibules à tète couvrante et à coquille
72fig. 10, nos 7 et 8
73Ce type caractérisé par un arc qui s’évase vers la tête pour couvrir le ressort regroupe, en fait, deux « familles » distinctes : les fibules à tête couvrante, en bronze ou en fer, à corde externe (Feugère 1985 : 234, type 7a) et les fibules à coquille proprement dites (Feugère 1985, type 7b à d). Les premières sont datées, en Gaule méridionale, de la fin, voire même de la deuxième moitié du iie s. av. J.‑C., mais elles ne sont pas rares dans les gisements du ier s. Les secondes sont caractéristiques en Europe continentale de La Tène D2. A. Haffner en a fait un fossile directeur de son horizon 5 dans la région de Trèves (1974), A. Miron un fossile directeur de La Tène D2a (1989). On les trouve dans les tombes C et D de Goeblingen‑Nospelt mais elles sont absentes des tombes A et B plus tardives (Metzler 1984b).
Fibules filiformes de schéma La Tène finale
74fig. 10, nos 9 et 10
- 27 Polenz 1982 : 87‑88 et fig. 15, no 2 ; la fibule est brisée.
75De nombreuses variantes ont été définies (corde interne ou externe, en bronze ou en fer, section de l’arc, toujours filiforme, ronde, losangique, carrée...), dont la chronologie n’est pas toujours établie. Les premières fibules filiformes apparaissent à La Tène D1 pour H. Polenz (1971), et dans l’horizon 3 de A. Haffner (1969). Les contextes méridionaux relativement bien datés donnent tous la fourchette des deuxième et troisième quarts du ier s. av. J.‑C. (Feugère 1985, types 2, 4, 5b, 6b). Le type Feugère 5b (no 10), dont l’allure rappelle la fibule de Nauheim, est plus ancien ; on le trouve dans l’horizon 3 de Haffner, c’est peut‑être lui qui se trouve associé dans la tombe de Uffhofen (Allemagne du Sud) avec cinq fibules de Nauheim27. Pour R. Gebhard, il doit même appartenir à une phase ancienne de La Tène D1 (Gebhard 1991 : 94).
Fibules à arc mouluré
76fig. 10, nos 11 à 13
77Sous ce terme sont rassemblés plusieurs types de fibules de schéma La Tène finale qui ont en commun un arc décoré de moulures : la fibule Almgren 65 (Ettlinger 1973, type 8 ; Feugère 1985, type 8b), qui possède un ressort à six spires et corde externe ainsi qu’un arc coudé au‑dessus du ressort formant une sorte de cône (no 11) ; des fibules à corde interne et ressort à quatre spires (Feugère 1985, type 8a), dénommés aussi Knotenfibeln (no 12) ; la Geschweifte Fibel, avec un arc à la courbure prononcée (no 13) ; rare en France, cette dernière est caractéristique de La Tène D2 pour W. Krämer (1962 : 308), de l’horizon 5 de A. Haffner (1974), et de La Tène D2a pour A. Miron (1989). À Manching, R. Gebhard (1991) place leur fabrication dans une phase récente de La Tène D1 et au début de La Tène D2 (types 11‑12, 30‑34).
78Ces fibules à arc mouluré sont en effet des types antérieurs à l’époque augustéenne, même si on les trouve parfois épisodiquement dans des contextes plus tardifs. Elles sont absentes dans les camps du limes et à Goeblingen‑Nospelt. Les contextes méditerranéens, dans leur ensemble, donnent une fourchette qui couvre la deuxième moitié du ier s. et surtout son troisième quart (Feugère 1985).
Fibules à collerette
79fig. 11, no 1
80Dénommées Kragenfibeln par les auteurs allemands et suisses, ces fibules ont pour principale caractéristique un arc plat et court de forme triangulaire, losangique ou « foliacé », interrompu par un disque ovalaire ou semi‑ovalaire coulé avec l’arc ou rapporté. Toutes les constructions du ressort sont possibles : à corde externe avec ou sans griffe et ressort long (six spires ou plus), à corde interne et ressort court (quatre spires), à couvre‑ressort, et à charnière. Dans ce dernier cas, elle est alors postérieure à la période qui nous intéresse (Feugère 1985, type 10c).
81Les Kragenfibeln ont été datées, dans les premières analyses qui leur avaient été consacrées, du dernier quart du ier s. av. J.‑C. (Ettlinger 1973, type 19). L’étude de D. Allen (1972) sur le monnayage d’or de CRICIRU, recueilli en abondance sur l’oppidum de Pommiers, a relancé cette question ; le revers montre en effet le profil d’une fibule à pied ajouré et à arc interrompu par un disque. Or, D. Allen conclut à la frappe de ces monnaies vers 60 av. J.‑C., ou guère après ; si le type figuré est bien celui d’une fibule à collerette, sa création serait datable de la fin de la première moitié du ier s. av. J.‑C. au plus tard. Toutefois, les arguments numismatiques invoqués n’emportent pas la décision (cf. infra 2.3.5), et il n’est pas non plus certain qu’il s’agisse d’une Kragenfibel.
82Les nombreux exemplaires méridionaux définissent une fourchette chronologique qui couvre la deuxième moitié du ier s. ; en pays trévire, A. Haffner place ce type dans son horizon 5 (Haffner 1974). Les types à ressort nu sont caractéristiques de La Tène D2b pour A. Miron (1989). La création du type remonte à coup sûr, en effet, avant l’époque augustéenne : un exemplaire associé à une fibule à coquille se trouve dans la tombe D de Goeblingen‑Nospelt alors que les tombes A et B, datées du dernier quart du siècle, n’en contiennent pas, mais ont livré des fibules plus évoluées, à protège‑ressort, qui se rapprochent du type « queue‑de‑paon » (cf. infra fibules à disque médian).

FIG. 11 ‒ Les types de fibules rencontrés dans les sites d’habitat de Gaule interne aux IIe et Ier s. av. J.‑C. Fibules à griffe, à ressort protégé et à charnière : 1 Kragenfibel (Feugère 10a) ; 2, 3 fibule à ailettes (Feugère 13) ; 4 fibule à disque médian (Feugère 15a) ; 5 fibule Almgren 241 (Feugère 14a) ; 6 fibule Feugère 9a ; 7, 8 fibules à ressort protégé (7 : type de Langton Down, Feugère 14b1b ; 8 : queue‑de‑paon, Feugère 16) ; 9, 10 fibules à charnière (9 : fibule d’Alésia, Feugère 21 ; 10 : fibule d’Audssa, Feugère 22a).
Fibules à ailettes
83fig. 11, nos 2 et 3
84Leur construction possède des points communs avec celle des fibules précédentes : ressort long et corde externe maintenue par une griffe, arc interrompu par un disque rapporté ou coulé. Leur originalité consiste en la présence de deux ou plusieurs cornes, parfois accompagnées de moulurations, de part et d’autre du disque (Feugère 1985, type 13). Le type d’origine –la Flügelfibel des archéologues suisses et allemands– est daté de 10 av. J.‑C. à 30 ap. J.‑C. (Ettlinger type 10 = Feugère type 13b). La datation de la variante à arc plus étroit (Feugère 1985, type 13a), quasiment absente des sites méridionaux, ne repose en Gaule interne que sur quelques contextes, pour lesquels on donne les mêmes bornes chronologiques. L’hypothèse formulée par M. Feugère quant à une légère antériorité de cette variante s’appuie davantage sur une intuition –sans doute juste– que sur des contextes bien datés. Cependant, l’apparition en définitive assez mal établie de ce type ne remonte probablement pas très au‑delà du règne d’Auguste.
Fibules à disque médian
85fig. 11, no 4
86Elles possèdent un arc plat de courbure prononcée interrompue par un disque rapporté, plat également ; le ressort à corde externe maintenu par une griffe est protégé par des plaquettes qui émanent de la tête de l’arc (Feugère 1985, type 15a). L’ensemble peut être décoré, généralement par une légère ligne ondulée. Ces fibules sont fréquentes dans le dernier quart du ier s. av. J.‑C. mais leur date d’apparition est incertaine. Comme les fibules à collerette, elles peuvent prétendre avoir servi de modèle à la fibule de la monnaie de CRICIRU. La présence, dans la tombe A de Goeblingen‑Nospelt, d’une fibule (no 35a) dont l’aspect général rappelle celui d’une fibule à disque médian, mais qui possède un ressort protégé plutôt caractéristique des fibules plus évoluées du type « queue‑de‑paon », plaide pour l’apparition du type simple (à griffe) avant 30/20 av. J.‑C. (Metzler 1984b).
Fibules Almgren 241
87fig. 11, nos 5 et 6
88Elles possèdent un arc rectiligne coudé à la tête, de forme triangulaire ou rectangulaire, un ressort à 6 ou 8 spires à corde externe maintenu par une griffe et protégé par des plaquettes qui émanent de la tête de l’arc, un porte‑ardillon à ajourations multiples (Ettlinger 1973, type 9 ; Feugère 1985, type 14a). Elles se rencontrent dans les contextes augustéens (Dangstetten, Haltern, la tombe A de Goeblingen‑Nospelt : Metzler 1984b, fig. 2, no 32, 35 b‑d), mais la technologie du ressort à griffe, qui est connue antérieurement, n’interdit pas une origine plus ancienne. Une fibule à arc de section polyédrique, ressort à 4 spires et corde interne (no 6), est contemporaine de la précédente (Feugère 1985, type 9a). Un exemplaire recueilli dans les fossés d’Alésia serait le seul argument susceptible de faire remonter l’origine de ce type vers le milieu du ier s. au moins.
Fibules à ressort protégé
89fig. 11, nos 7 et 8
- 28 Celle de la tombe A de Goeblingen‑Nospelt, très simple, rappelle encore la fibule à disque médian, (...)
90Le ressort est protégé par un couvre‑ressort de forme cylindrique ou rectangulaire qui l’entoure sur ses faces principales. Les principales fibules que l’on rencontre avec ce type de construction sont :
– les fibules à arc non interrompu, de forme rectangulaire, décorées de cannelures longitudinales, appelées aussi type de Langton Down (no 7) (Ettlinger 1973, type 23 ; Feugère 1985, type 14b 1b) ; l’exemplaire ancien le mieux daté est celui de Dangstetten ; c’est un type de création augustéenne qui se rencontre fréquemment au ier s. ap. J.‑C. et épisodiquement dans les siècles suivants ;
– les fibules à queue‑de‑paon (no 8) : elles se définissent par la présence d’un arc épais, semi‑circulaire, interrompu par un disque de forme circulaire, ovale ou rhomboïdal, qui porte un décor concentrique ; l’arc et le pied sont aussi décorés, généralement par une ligne médiane en relief (Ettlinger 1973, type 24 ; Feugère 1985, type 16). Les plus anciennement datées sont celles de la tombe B de Goeblingen‑Nospelt et de Dangstetten28. Les grandes fibules à décor zoomorphe ou géométrique (Feugère 1985, type 19) sont plus tardives ; le contexte ancien le mieux daté est celui de Haltern, mais elles sont fréquentes surtout au ier s. ap. J.‑C.
Fibules à charnière
91fig. 11, nos 9 et 10
92Deux types de fibules sont principalement concernées ici : les fibules d’Alésia et les fibules d’Aucissa.
- 29 M. Feugère fait remarquer que le réflexe qui conduit à dater un contexte de l’époque augustéenne à (...)
93La fibule d’Alésia (Ettlinger 1973, type 28 ; Feugère 1985, type 21) est caractérisée par un arc triangulaire, parfois ogival, qui se retourne vers l’intérieur pour former la charnière (type d de Feugère). Le pied redressé, toujours plein, est percé pour permettre la fixation d’éléments décoratifs (no 9). Un exemplaire au moins a été recueilli dans les fossés d’Alésia (camp D), ce qui ferait remonter son apparition au milieu du ier s. au plus tard (Duval 1975 ; Lerat 1979). Cependant, aucun contexte aussi ancien n’a livré jusqu’à présent de ces fibules, que l’on trouve par contre abondamment dans les dernières décennies de ce siècle29. Un terminus post quem en chronologie absolue a pu être proposé à partir de l’analyse du décor (Feugère 1985) : certaines fibules portent en effet un décor moulé qui évoque une victoire militaire, probablement navale, peut‑être celle d’Actium (31 av. J.‑C.), ou celle de Nauloque (36 av. J.‑C.), mais ce raisonnement pose les mêmes problèmes que lorsque l’on cherche à dater un site par rapport à un événement historique : la relation entre l’événement et l’objet ne peut être garantie.
94La fibule d’Aucissa est une forme évoluée du type précédent. Le pied n’est plus relevé, il est décoré d’un bouton de bronze rapporté, l’arc semi‑circulaire se ferme complètement à la tête pour former un cylindre dans lequel passe la goupille qui maintient l’ardillon. Le décor de l’arc connaît de nombreuses variantes (cannelures, perles, rivets, protubérances). La plus ancienne est celle dont le pied prolonge l’arc sans former d’angle (no 10) (Feugère 1985, type 22a). On la trouve à Dangstetten, en compagnie d’une fibule d’Alésia, mais aussi de fibules d’Aucissa plus évoluées (Fingerlin 1972, fig. 8). Ces dernières (Feugère 1985, type 22b) forment la majorité des fibules découvertes à Oberaden et Haltern ; elles se trouvent dans les camps occupés vers 10 av. J.‑C. et jusqu’au règne de Claude.
95Dans le Midi méditerranéen, des contextes bien datés des deux dernières décennies du ier s. av. J.‑C. ont livré des fibules anciennes (Feugère 1985, type 22a) ; à Dangstetten, entre 15 et 9 av. J.‑C., des exemplaires anciens côtoient des exemplaires plus récents. Le type se serait donc déjà formé vers 20 av. J.‑C. C’est peut‑être là un argument supplémentaire pour remonter la création du type d’Alésia, dont elles sont issues, avant l’époque augustéenne.
96Dans la figure 12 les différents types de fibules sont ordonnés selon leur ordre chronologique d’apparition. On constate que la plupart d’entre eux ont des durées de circulation qui se recouvrent au moins partiellement ; leur chronologie relative, dans l’ensemble bien cernée, autorise des datations assez précises, au moins pour la deuxième moitié du ier s. av. J.‑C. Mais, comme pour les autres mobiliers, la présence ou l’absence d’une fibule dans un contexte est moins significative que les proportions respectives des différents types recueillis. Ainsi, une fibule de Nauheim seule dans un contexte n’a en soi pas grand intérêt, le type ayant une longue durée de vie. Plusieurs fibules du même type apportent une information plus précise : la période concernée est celle de la grande vogue de cette fibule, avant l’apparition des types de La Tène D2. Associées avec des fibules filiformes ou des fibules de schéma La Tène 2 à long ressort, elles évoqueront La Tène D1, plus ou moins précocement suivant les proportions respectives de chaque type. Ce raisonnement peut se tenir tout au long de la chaîne typologique, et permet ainsi de cerner assez précisément la chronologie d’un niveau ou d’un site archéologique.
2.3.3 Les autres parures
Les parures en lignite et en verre
97fig. 13
- 30 On comprend avec le lignite les formations sédimentaires (schiste, sapropélite, jais etc.).
- 31 En France, par exemple, à Chalucet (Haute‑Vienne) pour le premier âge du Fer (Chevillot 1976), et d (...)
- 32 Un bracelet en lignite a été recueilli à La Lagaste en compagnie de plusieurs fibules de Nauheim (R (...)
98Des ateliers de fabrication de parures en lignite30 fonctionnent dès le début du premier âge du Fer : des bracelets sont recueillis dans les nécropoles et les sites d’habitat du Hallstatt final et de La Tène ancienne31. Ils sont fréquents dans les gisements de La Tène moyenne mais on les retrouve aussi à La Tène finale32. Plusieurs chercheurs ont depuis longtemps émis l’hypothèse selon laquelle l’emploi de ces matériaux se modifie avec le temps, et qu’à l’utilisation préférentielle du lignite pour la fabrication des bracelets au premier âge du Fer et au début du second, succède l’utilisation du verre (Rochna 1961 ; Peddemors 1975). À Manching, W. Stöckli a montré, par l’analyse spatiale des fibules et des bracelets en lignite, que ces derniers obéissent à la même répartition que les fibules de La Tène C1, et qu’ils ne se trouvent pas dans les zones où n’apparaissent que les fibules de La Tène C2 ou D (Stöckli 1974). Il en a conclu que la fabrication des bracelets en lignite a cessé à la fin de La Tène C1. En Bohême, les études menées par N. Venclova démontrent que la production locale de parures en verre ne débute qu’à La Tène C2 alors que celle des parures en lignite fonctionne à grande échelle depuis La Tène B2, et que les premières remplacent les secondes en empruntant les mêmes réseaux de distribution (Venclova 1992a ; 1992b). Si la production des parures en verre commence dans le monde celtique dès la fin de l’époque du Hallstatt, elle n’est en pleine activité, en effet, qu’à La Tène moyenne et finale. Des rejets de fabrication ont été découverts dans les oppida d’Europe centrale dont l’occupation commence à La Tène C2 : Stare Hradisko, Stradonice, Manching (Collis 1984 : 74, 100 ; Venclova 1990) ; bracelets et perles sont fréquents dans les nécropoles de cette période. La quantité des parures en verre varierait donc en proportion inverse de celle des parures en lignite au cours du temps. En conséquence, sur l’ensemble des deux mobiliers d’un site, plus la proportion de parures en lignite est forte, et plus ce site pourrait être daté haut dans La Tène moyenne ; au contraire leur absence ou quasi‑absence orienterait plutôt vers la fin de La Tène moyenne ou La Tène finale.
- 33 La couleur pourrait apparaître dès la fin de La Tène C2 selon R. Gebhard (1989b : 102).
99L’ouvrage de référence pour la typologie et la chronologie des parures de verre reste le travail de T.H. Haevernick, qui recense quatre mille objets recueillis principalement en Europe centrale (oppida et nécropoles), et dont un bon nombre est issu de fouilles anciennes (Haevernick 1960). Cette typologie est fondée sur la section, sur le décor, et accessoirement sur la couleur. Les travaux plus récents de R. Gebhard à Manching lui ont apporté des modifications substantielles, avec en particulier les analyses physico‑chimiques des colorants qui donnent des informations chronologiques assez précises (Gebhard 1989a ; 1989b) :
– à La Tène C2, les bracelets sont larges, avec de nombreuses côtes (groupes 7, 8 de Haevernick principalement) (nos 1 à 5) ; ils sont de couleur bleu cobalt, ou incolore sur fond jaune ;
– les bracelets lisses des types 2, 3a, 3b (nos 6 et 7) et les perles de types 22, 23, 24, 25 (nos 8 à 11) ainsi que les couleurs foncées : pourpre33, brun, violet, vert foncé appartiennent à La Tène D ; les perles des types 22 et suivants, très minoritaires à Manching, sont considérées comme les productions les plus récentes du site ;
– il existe également des perles côtelées (no 12), non répertoriées par T.H. Haevernick et R. Gebhard, qui sont tardives ; elles figurent à Wederath, dans les tombes 354 et 882, accompagnées de fibules à griffes et à charnière, et de céramique gallo‑belge (Haffner 1979).

FIG. 13 ‒ Types de parures en verre recueillies sur les sites d’habitat de Gaule interne aux IIe et Ier s. av. J.‑C. : 1‑5 bracelets en verre côtelé Haevernick 7 et 8 ; 6 bracelet en verre lisse Haevernick 2 ; 7 bracelet en verre lisse Haevernick 3 ; 8‑11 perles Haevernick 22 à 25 ; 12 perle côtelée.
Les parures et accessoires vestimentaires en métal
100fig. 14
101Les objets les plus simples connaissent une longue existence (bracelets de section ovale ou circulaire, boutons à rivets ou à bélière). Les bracelets tubulaires (no 1) couvrent La Tène moyenne et Finale (voire même La Tène ancienne) : l’exemplaire de la tombe de Langdorf (Polenz 1982 : 73, fig. 10, no 11) appartient à La Tène C2, les exemplaires de Nages (Tendille 1980 : 75, Fig. 11, nos 63 et 64) et de La Lagaste (Rancoule 1980 : 81‑83, Fig. 37, nos 7 à 10) sont du ier s. av. n.è. Les bracelets à double attache en spirale (no 2), très répandus en Europe celtique et sur le pourtour du bassin méditerranéen, couvrent toute La Tène D au moins. Les bagues à intaille sont connues à La Tène C et D : elles se rencontrent par exemple dans la tombe de Horgen, à La Tène C2 (Polenz 1982 : 71, fig. 9, no 3), mais aussi à Stradonice (Píc 1906), ou bien encore à Nages, dans les phases III moyen et récent (Tendille 1980 : 102, fig. 4, nos 24 et 25). Les chaînes‑ceintures (no 3) apparaissent pendant La Tène C (par exemple, Viollier 1916 : 54, pl. 29 ; Hodson 1968, sépultures nos 164, 168, 184...), mais elles sont toujours en usage à La Tène D1 ; dans la région nîmoise, elles sont connues au iie s. av. J.‑C. et pendant la première moitié du suivant (Tendille 1980, fig. 7, nos 54 à 70). Ces chaînes‑ceintures, surtout si elles sont en Fer, sont peu identifiées sur les sites d’habitat ; elles n’en sont toutefois pas absentes.

FIG. 14 ‒ Types de parures métalliques recueillies sur les sites d’habitat de Gaule interne aux IIe et Ier s. av. J.‑C. : 1 bracelet tubulaire à décor gravé ; 2 bracelet à double attache en spirale ; 3 chaîne et agrafe de ceinture ; 4‑8 agrafes de ceinture.
102Quelques objets évoluent plus sensiblement dans le temps, comme les agrafes de ceinture (Brunaux, Lambot 1987 : 128‑129). De Forme allongée, souvent très découpées et ornementées à La Tène moyenne (nos 4 et 5), elles se raccourcissent et se simplifient à La Tène finale (no 6), jusqu’à devenir de simples anneaux ornés d’un bouton proéminent, parfois agrémenté de deux appendices (nos 7 et 8).
2.3.4 La. céramique
103L’archéologue qui étudie la céramique de La Tène Finale (ou la céramique protohistorique en général), dans un site ou dans une région, se trouve confronté à deux types de problèmes : mettre en évidence une évolution typo‑chronologique fine sur un plan local, et corréler celle‑ci avec d’autres schémas construits sur du mobilier provenant de zones différentes. La première étape dépend de la quantité et de la qualité des séries régionales, très variables. La seconde se heurte au poids des traditions artisanales et des habitudes alimentaires, qui rendent la céramique sensible aux particularismes régionaux. Il existe toutefois des tendances qui transcendent ces particularismes, et ce sont celles‑ci que nous voudrions aborder sous l’angle de la chronologie.
104Dans les contextes attribués à La Tène moyenne, les Formes s’inscrivent dans la tradition laténienne –écuelles carénées ou à bord rentrant, vases à cuire, vases à piédestal... Elles sont cuites en mode réducteur‑oxydant (A ou B primitif), tournées en proportions variables –peu ou pas lorsqu’il s’agit de céramique grossière–, comme à Breuil‑le‑Sec (Degenne, Duval 1983), à Gournay‑sur‑Aronde (Brunaux et al. 1985). Les contextes gallo‑romains précoces font au contraire une place importante aux formes d’origine méditerranéenne (assiettes, cruches, mortiers...) et livrent de la céramique entièrement ou presque entièrement tournée, dont une proportion notable est cuite selon les modes réducteur (B) et oxydant (A) –par exemple à Saintes (Santrot 1979), Saint‑Gence (Perrier 1984), Glatigny‑sur‑Mer (Genty, Moireau 1987), etc. Les différences sont donc de nature technologique (montage, cuisson) et typologique (répertoire des formes, et aussi des décors).
Technologie et chronologie : l’usage du tour et la cuisson
- 34 Par exemple à Étival‑Clairefontaine (Deyber et al. 1984), à Roanne (Bessou 1976), ou dans le site d (...)
105L’usage intensif du tour à l’époque gallo‑romaine, quelle que soit la catégorie de céramique concernée (fine, commune), contraste de manière évidente avec la pratique protohistorique, qui privilégie le montage à la main. Cette constatation a conduit plusieurs chercheurs à formuler l’hypothèse selon laquelle le rapport céramique tournée/céramique non tournée peut être significatif du point de vue de la chronologie (Bessou 1976 ; Furger‑Gunti 1979 ; Bouyer, Buchsenschutz 1983) : plus la proportion de céramique tournée est forte, et plus on se rapproche de la situation qui caractérise la période gallo‑romaine ; plus elle est faible, et plus le contexte étudié s’apparente aux contextes protohistoriques, c’est‑à‑dire ceux de La Tène ancienne et moyenne, dans lesquels la céramique non tournée est largement majoritaire. Cette hypothèse a été contestée par certains archéologues qui ont avancé plusieurs contre‑exemples : le contexte suisse d’Yverdon‑les‑Bains, daté par la dendrochronologie du milieu du iie s. av. J.‑C. (Curdy, Klausener 1985 ; Kaenel, Curdy 1985) a livré 80 % de céramique tournée ; à Goincet, en Forez, une fosse datable de La Tène C2 par la présence de quatre fibules de schéma La Tène 2 à long ressort en contenait à peu près le même pourcentage (Vaginay, Guichard 1984). Certes, ces deux exemples ne sont pas dépourvus d’une certaine ambiguïté : à Yverdon‑les‑Bains, la base de comptage est extrêmement faible (150 tessons), et si plusieurs milliers de tessons ont été recueillis à Goincet, ils pourraient avoir fait l’objet d’un tri qui favorise la sur‑représentation de la céramique fine tournée (Vaginay, Guichard 1988 : 79). Mais dans les fouilles du Parking de la mairie à Besançon, la phase 1, datée par dendrochronologie entre 120 et 80 av. J.‑C., compte bien une forte majorité (70 %) de céramique tournée (Guilhot, Goy 1992 : 218). Si la tendance générale est à l’augmentation progressive du pourcentage de céramique tournée –tendance confirmée par le mobilier recueilli dans quelques gisements stratifiés34–, ce pourcentage peut donc être déjà très important dans les contextes de La Tène D1. L’évolution semble concerner surtout la céramique grossière ou demi‑fine non tournée, soit qu’elle aille en décroissant, soit qu’elle bénéficie progressivement du montage au tour.
106On a déjà évoqué le fait qu’à l’époque gallo‑romaine, les modes de cuisson protohistoriques (A et surtout B primitif) sont concurrencés par d’autres modes qui suggèrent une amélioration technique des fours et une meilleure maîtrise des températures de cuisson. La cuisson en mode B de la céramique fine (pâte grise, surface grise à noire) est bien représentée dans les contextes augustéens dont elle était encore considérée, il y a peu, comme une catégorie céramique caractéristique ; elle est toutefois attestée avant l’époque augustéenne : on la rencontre déjà dans la phase 1 de Besançon, entre 120 et 80 av. J.‑C. (Guilhot, Goy 1992 : 219‑227), à Genève avant la fin du iie s. av. J.‑C. (Bonnet et al. 1989).
Le répertoire des formes
107Deux aspects sont à envisager : l’apparition de nouvelles formes, et l’évolution typologique des vases.
108La céramique gallo‑romaine fait une place importante aux assiettes, cruches etc., formes d’origine méditerranéenne (principalement italique), qui sont devenues une des principales composantes de la gamme typologique indigène. Mais avant cette période, il existe un courant d’imitation de ces importations fort ancien, puisqu’on trouve dans la fosse de Goincet quelques rares tessons reproduisant des coupes fabriquées en céramique campanienne A (Vaginay, Guichard 1984).
109Les imitations de campanienne A en céramique fine incluent essentiellement des coupes et des bols reproduisant les formes Lamboglia 36, 27, 31 (fig. 15, nos 1 à 3), c’est‑à‑dire les vases en céramique campanienne A les plus fréquemment importés en Gaule interne (Genin et al. 1992). Les quelques tessons découverts à Goincet plaident pour une apparition de ce type de production sinon pendant La Tène C2, en tout cas au tout début de La Tène D1 au plus tard. On imite aussi des bols ou coupes Lamboglia 1, assiettes à marli Lamboglia 6, assiettes à bord redressé Lamboglia 5 ou 5/7 (fig. 15, nos 4 à 7), c’est‑à‑dire les vases en céramique campanienne « B » (ou fabriqués indifféremment en A ou B) les plus fréquemment importés en Gaule interne. Ils apparaissent dans le courant de La Tène D, selon un ordre qui semble correspondre à celui des modèles, si l’on en croit les associations observées dans les contextes foréziens. On peut penser, en réalité, que ces vases sont imités relativement peu de temps après leur introduction en Gaule interne.
- 35 Par exemple dans la nécropole de Mehun (Gourvest 1971, fig. 3). La fabrication de ces vases est att (...)
110Comme pour la céramique campanienne, les types de vase à paroi fine imités sont ceux qui sont importés en Gaule interne. Il s’agit surtout de gobelets dont la forme s’inspire des gobelets d’aco ; quelques‑uns sont proches du type de pâte et de décor du modèle original. D’autres en sont relativement éloignés : les vases dit du type Beuvray (fig. 15, no 8) sont de taille plus importante, et leur décor de « sapin », leur intérieur peint en rouge ne rappellent guère l’aspect des vases importés, bien que la disposition des différents registres décoratifs soit comparable. Ces gobelets ne sont évidemment pas antérieurs à leur modèle, et ils leur survivent longtemps puisqu’on recueille assez fréquemment des vases de type Beuvray dans des contextes de la première moitié du ier s. ap. J.‑C.35 Un atelier de production de ces vases, daté de cette période, a été découvert à Nevers en 1992 (Joly à paraître).

FIG. 15 ‒ Les formes de la céramique indigène imitées de céramiques d’importation : 1 assiette Lamboglia 36 ; 2 Lamboglia 27 ; 3 bol Lamboglia 31 ; 4 bol Lamboglia 1 ; 5 assiette à marli Lamboglia 6 ; 6, 7 assiettes à bord redressé Lamboglia 5 ou 5/7 ; 8 vase de type Beuvray ; 9 cruche ; 10 marmite tripode.
111On a déjà évoqué la question de la céramique commune claire, cruches et mortiers, abondamment imités à la fin du ier s. au point de ne pouvoir différencier les types importés des productions régionales (cf. supra 2.3.1) ; ces formes étrangères s’intègrent alors définitivement au répertoire indigène.
112Les imitations de sigillée italique constituent une partie de la céramique dite gallo‑belge, à laquelle un paragraphe spécial est consacré à la fin de ce chapitre.
113Ce renouvellement du répertoire indigène par l’introduction de formes non celtiques offre un certain intérêt du point de vue strictement chronologique, mais son exploitation dans ce domaine est délicate. La date d’apparition des modèles, ou des débuts de leur importation en Gaule, n’est qu’un terminus post quem pour l’apparition des imitations. L’histoire du prototype n’est d’aucune utilité pour comprendre l’histoire de ces dernières, qui évoluent selon leurs propres règles : c’est le cas en particulier pour les imitations de campanienne, très souvent métissées avec les formes du répertoire indigène (cf. aussi Desbat 1990 : 250, pour les imitations de sigillée). La distribution de ces formes varie en outre selon les régions : si les cruches, les mortiers, les imitations de sigillée sont à peu près aussi répandus que la sigillée à laquelle ils sont très souvent associés, les coupes et les bols imités de la campanienne se rencontrent logiquement surtout dans les zones les mieux desservies en céramique campanienne, c’est‑à‑dire dans le Forez, la Bourgogne, la vallée du Rhône, ainsi que dans le Toulousain. En réalité, hormis les formes que l’on peut attribuer à l’époque augustéenne et qui sont présentes, avec une plus ou moins grande fréquence, dans l’ensemble des régions de la Gaule, les vases inspirés de prototypes méditerranéens se diffusent dans les mêmes zones et en grande partie pendant la même fourchette chronologique que leur modèle. En résumé, les contextes qui livrent uniquement des formes traditionnelles peuvent être plus anciens que ceux qui livrent également des formes d’origine méditerranéenne, sous réserve qu’ils appartiennent à la même zone géographique : cette règle n’aurait aucun sens dans le cas de deux gisements issus, l’un d’une région riche en importations de campanienne, par exemple, et l’autre d’une région qui en est totalement dépourvue. Il doit donc être possible de classer les contextes par ordre chronologique en s’appuyant sur l’introduction des nouvelles formes, soit par la présence ou l’absence de celles‑ci, soit par leurs variations quantitatives. On peut ainsi imaginer d’utiliser la présence ou l’absence des assiettes, ou cruches ; ou mieux, d’observer leur importance relative dans l’ensemble typologique auquel elles appartiennent.
114L’évolution typologique des formes céramiques traditionnelles est un élément incontournable des chronologies régionales et micro‑régionales, car ces vases constituent de loin la plus grande partie du mobilier recueilli dans les habitats (et aussi dans les sépultures à la fin de La Tène moyenne et à La Tène finale). Les observations que l’on peut faire sur le profil ou les proportions des vases dans un gisement, ou dans un ensemble géographiquement homogène de gisements, ne sont pas aisément transposables à plus grande échelle. On s’en tiendra à des observations qui portent sur les caractéristiques les plus répandues.
115Les plus courantes parmi les formes basses (fig. 16), l’écuelle à bord rentrant (nos 1 et 2) et l’écuelle carénée (nos 3 à 5), se rencontrent encore l’une et l’autre à la fin du ier s. av. J.‑C. et plus tard (Hatt 1949). Quelques détails morphologiques apportent certaines indications chronologiques, notamment la typologie des fonds : les écuelles de La Tène moyenne possèdent un fond plat ou soulevé, fréquemment ombiliqué pour les écuelles carénées ; on ne retrouve pas d’écuelle carénée à fond ombiliqué à la fin du ier s. ap. J.‑C., mais il existe des fonds plats, et surtout des fonds annulaires pour les écuelles carénées comme pour les écuelles à bord rentrant. Les observations qui portent sur le profil ou sur la forme générale ont une portée limitée : on peut ainsi mettre en évidence, en Forez, l’influence des assiettes sur l’évolution des écuelles à bord rentrant (Bessou 1976), mais ce schéma évolutif ne semble pas s’appliquer au mobilier issu des autres régions, moins pourvues en imitations de céramiques méditerranéennes. L’écuelle à bord rentrant connaît un grand succès surtout au sud de la Loire et dans le Centre‑Est de la France, alors que l’écuelle carénée est dominante dans les gisements du Nord et de l’Ouest, c’est‑à‑dire grosso modo en Gaule Belgique et en Armorique (fig. 17). Des écuelles carénées sont bien entendu présentes dans la première zone, mais en faible quantité, et dans les contextes anciens (Goincet). En conséquence, si la proportion d’écuelles carénées n’a pas de signification chronologique dans la zone où elle est la forme basse dominante jusqu’à l’époque gallo‑romaine, en revanche, elle est significative là où l’écuelle à bord rentrant est dominante : plus les écuelles carénées y sont nombreuses et plus le contexte s’apparente à ceux de La Tène moyenne, car une telle anomalie ne peut être que de nature chronologique. C’est également dans ces termes que les auteurs de la fouille de Goincet interprètent le pourcentage relativement élevé d’écuelles carénées observé dans cette fosse (Vaginay, Guichard 1984 : 206).

FIG. 16 ‒ La céramique indigène, principales formes basses : 1, 2 écuelle à bord rentrant ; 3‑5 écuelle carénée ; 6 bol ; 7, 8 bol caréné.

FIG. 17 ‒ Les zones de diffusion privilégiées de l’écuelle carénée et de l’écuelle à bord rentrant. La trame indique approximativement la zone où les écuelles à bord rentrant dominent en nombre les écuelles carénées (en pointillés : limite nord de la province de Gaule Narbonnaise).
116D’autres types de formes basses, absents dans les contextes de La Tène moyenne, sont en revanche recueillis dans les contextes augustéens ; il s’agit de bols ou de coupes d’assez grande dimension, hémisphériques ou pseudo‑hémisphériques, parfois à fond ombiliqué (fig. 16, no 6). L’une des variantes les plus connues est peinte et porte la dénomination de bol de Roanne (cf. infra, 2.3.4.4). L’existence de ces formes avant l’époque augustéenne est certaine, car on les trouve à Goeblingen‑Nospelt non seulement dans la tombe A, avec de la sigillée italique, des cruches et des fibules à griffe et à couvre‑ressort, mais aussi dans les tombes C et D, avec des fibules à coquille et une Kragenfibel (Metzler 1984b). A. Haffner considère qu’ils sont caractéristiques de l’horizon 5 dans la chronologie de l’Hunsrück‑Eiffel Kultur III, c’est‑à‑dire de La Tène D2, mais ils sont aussi présents dans l’horizon immédiatement antérieur (Haffner 1974).
117Il existe aussi des bols ou des coupes avec un profil plus caréné ; le bord est haut, droit ou articulé en S anguleux ; ils sont souvent décorés de baguettes (nos 7 et 8). Comme les formes précédentes, elles sont absentes à La Tène moyenne et recueillies en contexte gallo‑romain précoce –notamment sous la forme de Terra nigra–, mais aussi dans des contextes dépourvus de tout mobilier augustéen (no 7). Ces deux types de vases constituent deux variantes d’une même forme, qui procède probablement des écuelles indigènes et surtout de l’écuelle carénée.
118L’apparition des vases‑tripodes (fig. 15, no 10) est traditionnellement datée du règne d’Auguste (Santrot 1979 : 75), mais on rencontre des formes qui préfigurent ce type de vase dans des contextes dénués de tout mobilier dit augustéen : la publication du site de Feurs en montre un exemplaire dans un contexte que les auteurs attribuent à La Tène D1 (Vaginay, Guichard 1988 : 53 ; fig. 108, no 23).
119Les formes hautes (fig. 18) n’offrent guère de possibilités de datation en dehors des chronologies régionales. Certains types sont très localisés sur le plan géographique, comme les vases‑tonnelets (no 4) qui se rencontrent surtout dans l’est et le centre‑est de la France (Massif central, Loire, Champagne...) ; cette forme bénéficie de surcroît d’une longue existence, puisqu’on lui connaît un terminus vers 160 av. J.‑C. (Yverdon‑les‑Bains : Curdy, Klausener 1985) et qu’elle apparaît encore dans la tombe D de Goeblingen‑Nospelt attribuée à I.a Tène D2 (Metzler 1984b).

FIG. 18 ‒ La céramique indigène. Les formes hautes : 1 vase à profil caréné ; 2 vase à profil mouluré ; 3 vase élancé ; 4 vase tonnelet ; 5 piédestal bagué.
120Les autres types de vases hauts possèdent de nombreuses variantes régionales et sont mal situés en chronologie relative. On évoque généralement le passage des formes hautes carénées de La Tène ancienne puis moyenne (no 1), aux formes articulées en S dont le profil est « ondulé » (no 2) puis aux profils simples de La Tène finale (no 3) (Pingel 1971 ; Duval 1976 ; Hatt, Roualet 1977 ; Furger‑Gunti 1979 ; Collis 1984). Ainsi, alors qu’à Breuil‑le‑Sec les formes hautes sont encore nettement anguleuses (Degenne, Duval 1983), des vases à ondulations (qui ne sont pas de simples décors, mais des ressauts affectant le profil du vase) sont présents à Goincet (Vaginay, Guichard 1984, fig. 9 et 10). Ils sont caractéristiques des horizons 2 et 3 de A. Haffner (1974) ; dans la nécropole d’Épiais‑Rhus, ils sont associés, dans le niveau à incinérations récentes, à des fibules de schéma La Tène 2 à ressort long ou court, porte‑ardillon agrafé en forme de triangle ou de trapèze, ou à des fibules filiformes à corde interne (Lardy et al. 1987). L’ensemble de ces données conduit à situer leur apparition et leur développement au cours de La Tène C2 et D1.
121Les détails de la forme (bord, fond) offrent certains indices chronologiques intéressants. Les vases hauts à pied bagué (no 5), hérités des urnes à piédestal de La Tène ancienne et très répandus à La Tène moyenne, sont encore présents à La Tène C2 (fosse de Goincet) mais ne se trouvent jamais en contexte gallo‑romain précoce. Inversement, comme pour les formes basses, les fonds annulaires se rencontrent exceptionnellement à La Tène moyenne, alors qu’ils sont très fréquents dans le dernier tiers du ier s. Les bords simples et peu différenciés de La Tène moyenne (lèvre éversée ou en bourrelet) sont concurrencés à la fin du ier s. av. J.‑C. par les lèvres à profil complexe ou en gouttière. Ces dernières sont manifestement inspirées de vases méditerranéens tels que les cruches ou les gobelets à paroi fine, qui sont équipés de ce type de bord dans la deuxième moitié du ier s. av. J.‑C.
- 36 Elles peuvent être siliceuses ou calcaires, micacées ou non (Ferdière 1972). Les recherches les plu (...)
122Les formes à lèvre moulurée (fig. 19), purement indigènes, constituent un groupe hétérogène, mais dont les possibilités de datation sont intéressantes. L’une des variantes les plus répandues est connue sous le nom d’« urne de type Besançon » (no 1) ; il s’agit d’une urne à fond plat, non tournée, dont la pâte grossièrement dégraissée contient généralement du mica, apparent surtout sur le col lissé, et qui porte souvent à l’épaule un décor incisé (Ferdière 1972). Mais il existe de nombreuses autres variantes qui se distinguent par la fabrication (tournage ou absence de tournage, composition de la pâte), la morphologie (forme haute ou basse, lèvre éversée ou plate, dégagée ou en bourrelet) et par le type de décor. Elles sont liées à des productions locales comme le prouvent les différentes qualités de pâte36, mais aussi à des différences chronologiques.

FIG. 19 ‒ La céramique indigène. Les formes à lèvre moulurée : 1 vase de type Besançon ; 2 vase haut sans col et lèvre en bourrelet ; 3 écuelle ; 4 vase de stockage.
- 37 Varennes‑les‑Mâcon, Tournus, Roanne, Bâle/Usine à gaz...
123Les formes hautes, non tournées, à lèvre bien dégagée et décor incisé sur l’épaule (no 1) apparaissent de toute évidence avant l’époque gallo‑romaine précoce puisqu’on les recueille dans des contextes dépourvus de tout mobilier caractéristique de cette période37. Leur date de création est néanmoins incertaine. La fosse de Goincet, attribuée à La Tène C2, a livré deux vases à bord mouluré non tournés qui ne sont apparemment pas micacés. Ce ne sont donc pas des urnes de type Besançon stricto sensu, mais la forme du bord s’en rapproche beaucoup et il s’agit là sans doute d’une des apparitions les plus précoces de ce type de lèvre tout à fait inconnu dans les gisements de La Tène moyenne.
124Les formes hautes recueillies dans les contextes datés de la fin du ier s. av. J.‑C. ou du ier s. de n.è. sont différentes. Elles sont tournées, parfois fabriquées en céramique fine et cuites en atmosphère oxydante ; les lèvres sont peu dégagées, plus ou moins en bourrelet, et ne portent qu’une ou deux moulures ; le décor est généralement absent (no 2).
125D’autres types de vases possèdent aussi un bord mouluré : des formes basses (no 3) et des dolia (no 4). Les premières apparaissent avant l’époque gallo‑romaine précoce, mais après les formes hautes non tournées si l’on en croit la stratigraphie des fossés de Tournus (Vaussanvin 1987). On a pu mettre en évidence dans ce même gisement une évolution morphologique du bord qui conduit de la lèvre oblique à la lèvre plate triangulaire, évolution observée aussi dans les couches du rempart de Mâcon (Barthélémy 1973). Il s’agit, pour Tournus en tout cas, de vases dont la pâte n’est pas micacée ; il existe cependant dans ce gisement des exemplaires micacés qui, bien que possédant un bord parfaitement plat, ont été recueillis en connexion avec des vases non micacés, mais à lèvre oblique. Il y a donc à l’évidence des productions variées (à bord oblique ou plat, à pâte micacée ou non) et contemporaines ; cette diversité impose d’être prudent quant aux conclusions chronologiques fondées sur la morphologie des bords, et nécessite surtout de définir les différents ateliers de production, tâche qui est loin d’être remplie jusqu’à présent.
Les décors
126fig. 20
127Si l’on compare, comme on l’a fait pour les formes, les décors figurant sur la céramique de La Tène moyenne avec ceux de la céramique augustéenne, on constate que l’évolution s’est faite dans le sens d’une standardisation et d’une mécanisation accrue des motifs décoratifs : aux décors peignés, digités, impressionnés, lissés, que l’on observe à La Tène moyenne, s’opposent les baguettes, lignes concentriques incisées ou lissées au tour, les décors ondés au peigne ou imprimés à la molette, largement majoritaires dans les sites augustéens. La part de plus en plus importante de ces motifs, d’exécution facile et rapide, dans le répertoire décoratif de la céramique indigène va de pair avec la généralisation du tournage, et d’une manière générale avec la maîtrise accrue de techniques de plus en plus orientées vers la production en série. Une forte proportion de décors que l’on peut qualifier de mécaniques induit plutôt une datation basse ; à l’inverse, une majorité de décors réalisés à la main, issus du répertoire traditionnel, indiquerait plutôt une datation haute. Il reste à donner des repères datés pour les différents types de décors.
- 38 Cf. les observations de J.‑L. Flouest pour les nécropoles de Ménil‑Annelles et Villé‑sur‑Retourne, (...)
128Les décors digités, piquetés, les incisions à la base du col, les panses peignées (nos 1, 2 et 3) sont bien représentés à La Tène moyenne ; ils sont particulièrement rares à la fin du ier s. av. n.è., et d’aspect généralement simplifié par rapport à la complexité observée à La Tène moyenne38.

FIG. 20 ‒ La céramique indigène. Les principaux types de décors : 1, 2 décor incisé ponctuel ; 3 décor incisé linéaire ; 4, 5 décor lissé ; 6 lignes concentriques lissées et décor ondé au peigne ; 7, 8 moulurations ; 9 décor ondé au peigne ; 10, 11 décor estampé ; 12 décor oculé ; 13, 14 décor à la molette.
129Les décors lissés (ondes, lignes droites, obliques, croisillons...) à l’intérieur ou à l’extérieur des vases (nos 4 et 5), bien représentés à Breuil‑le‑Sec, à Goincet et d’une manière générale dans les contextes de La Tène moyenne, sont encore présents à la fin du ier s. av. J.‑C., mais on les rencontre bien plus souvent, à cette époque, sous la forme de lignes concentriques horizontales associées ou non à des décors ondés au peigne et à des baguettes (no 6). Ces lignes horizontales sont cependant connues auparavant, puisqu’on les rencontre dans le Rhin moyen dès la phase 3 de A. Haffner (1969) ; elles sont surtout caractéristiques de la phase 5.
130Les moulurations (nos 7 et 8) sont déjà connues à La Tène ancienne mais elles restent discrètes et limitées à certains emplacements (base des vases à piédestal par exemple). On a vu qu’à La Tène moyenne les formes hautes assez anguleuses évoluaient vers des formes plus souples, dont le profil est pourvu de ressauts, voire de véritables bourrelets, accompagnés ou non de cannelures, et que ces formes semblent caractéristiques de La Tène C2 et D1. Ces bourrelets prennent parfois l’aspect de baguettes disposées en série sur la panse ou le col des vases. Il s’agit alors de véritables décors, qui n’affectent pas le profil même du vase. On pense en trouver l’origine dans les récipients en bois tourné, dont certains exemplaires ont été recueillis dans la station de La Tène (Vouga 1923). C’est d’ailleurs sur cette découverte que se fonde l’attribution traditionnelle des vases à décors de baguette à la période de La Tène moyenne (Hatt 1949 ; Pingel 1971 ; Furger‑Gunti 1979). Mais le site de La Tène est encore occupé à La Tène D1 (de Navarro 1972 ; Allen 1973) et, alors que ces décors sont connus en Forez dans des contextes de La Tène finale (Roanne : Bessou 1976), ils n’apparaissent pas dans la fosse de Goincet. Ils n’existent pas non plus à Breuil‑le‑Sec alors que leur présence est attestée dans cette région dans des contextes plus récents (Villeneuve‑Saint‑Germain). En revanche, ils sont encore fréquents dans les contextes gallo‑romains précoces –notamment sur la Terra nigra–, ce qui laisse supposer que leur existence couvre toute la période de La Tène D.
- 39 Par exemple à Roanne (phase II), à Épiais‑Rhus (Lardy et al. 1987, groupe techno‑morphologique 3), (...)
131Le décor ondé –ligne incisée ou lissée– est déjà connu à La Tène moyenne (par exemple à Breuil‑le‑Sec) mais non les bandes de lignes horizontales ondées avec un peigne, au tour (no 9). On les connaît en revanche à la fin du ier s. av. n.è. et plus tard, par exemple sur de la Terra nigra, ainsi que dans des contextes plus anciens, qui ne livrent aucun mobilier caractéristique de la période augustéenne39. En l’absence de données plus précises, nous admettrons que ces décors apparaissent dans le courant de La Tène D.
132Les décors estampés regroupent des traditions décoratives fort différentes. En Forez, l’association des décors estampés (nos 10 et 11 : palmettes, arcatures, cercles) avec les imitations de céramique campanienne a été soulignée à plusieurs reprises (Bessou 1976 ; Périchon, Chopelin 1977 ; Sanial et al. 1983). La fosse de Goincet et le site de Feurs semblent être les contextes les plus anciens ayant livré ce type de décor ; on peut y noter la présence de palmettes rappelant assez fidèlement celles qui figurent sur la campanienne A, et des associations de motifs relativement complexes (Vaginay, Guichard 1984 ; 1988). En Bretagne, la filiation avec les décors estampés de La Tène ancienne est évidente ; les datations reposent sur les similitudes avec les céramiques estampées de la Celtique orientale (Giot et al. 1979 : 318‑327). Il n’y a donc pas a priori de relation entre ces deux productions, ce qui exclut la possibilité d’établir un schéma chronologique qui tienne compte de l’ensemble du mobilier. Quoi qu’il en soit, les décors estampés ne se rencontrent pas (ou exceptionnellement) dans les contextes augustéens. Il existe un type particulier de décor estampé en forme d’œil (no 12) et dénommé pour cette raison « décor ocellé » ou « décor oculé » selon les auteurs ; il est fréquemment recueilli dans les contextes du début du ier s. de n.è., voire plus tardifs (Devauges, Cazauran 1982). Il peut apparaître cependant dans des gisements pré‑augustéens : dans la nécropole d’Ornavasso (San Bernardo), la sépulture 165 en a livré un exemplaire ornant un vase à paroi fine de type fusiforme (Graue 1974, pl. 40, no 4), associé à une patère en céramique campanienne de forme Lamboglia 5 et à deux monnaies romaines émises entre 137 et 126 av. J.‑C. Cette tombe appartient à la phase 2 du cimetière, caractérisée, entre autres, par des fibules de Nauheim, à coquille, des variantes du type Almgren 65, et par la fibule de schéma La Tène 2 caractéristique du site.
133Le décor à la molette est parmi les décors « mécaniques » celui qui apporte le plus de variété et de sophistication. C’est probablement aussi le plus récent, car ces motifs répétitifs marquent une rupture avec le répertoire décoratif traditionnel : motifs en sapin ou en fougère (dits du type Beuvray) (no 13), petits damiers ou casiers encadrant des décors géométriques (no 14) ; les guillochis à la lame vibrante procèdent de cette même esthétique décorative. Le contexte le plus ancien, ou en tout cas le mieux daté, qui a livré ces types de motif est la tombe B de Goeblingen‑Nospelt, datable vers 20 av. J.‑C. ou peu après ; ils sont en revanche absents dans les tombes plus anciennes du même site (A, C, D) ainsi qu’au Pétrisberg de Trèves. Ils n’apparaissent donc pas avant le dernier quart du ier s. av. n.è., période à partir de laquelle ils prennent une place importante dans le répertoire décoratif (place qu’ils conservent ensuite pendant toute la période gallo‑romaine).
134Il faut cependant noter que dans certains sites de l’est de la France (Étival‑Clairefontaire, Sion...), des contextes dépourvus de tout mobilier caractéristique de l’époque augustéenne ont livré des décors à la molette. Mais ceux‑ci sont très particuliers et rappellent tout à fait les motifs traditionnels incisés ou piquetés (petits carrés, rectangles, losanges...). Ils sont appliqués, de surcroît, sur des vases en céramique grossière, contrairement au cas précédent qui concerne essentiellement la céramique fine tournée. Il faut donc y voir davantage un particularisme local qu’une manifestation précoce de cette technique décorative.
La céramique peinte et les céramiques engobées
135fig. 21
136À l’exception de la bordure nord‑est du Massif central, de la Bourgogne et du Jura, les sites de la fin de l’âge du Fer livrent peu –ou pas– de céramique peinte (diverses contributions dans Céramique peinte celtique..., Guichard 1994). Dans l’état actuel des connaissances, il existe un hiatus entre les productions de la fin du second âge du Fer et celles de La Tène ancienne telles qu’elles sont connues par les découvertes champenoises ; la céramique peinte réapparaîtrait à La Tène C2 d’après les découvertes de Manching (Maier 1970 ; Stöcldi 1974), Yverdon‑les‑Bains (avant 158 av. J, ‑C. : Curdy, Klausener 1985), Goincet et Feurs (Vaginay, Guichard 1984 ; 1988), pour être ensuite fabriquée sans interruption y compris à l’époque gallo‑romaine. Il n’est pas simple de mettre en évidence, dans cette longue existence, une évolution chronologique significative sur l’ensemble des découvertes ; en réalité, les tentatives de comparaison entre différentes régions montrent que les répertoires des formes et des décors sont très variés, et des recherches récentes tendraient à prouver que la diffusion des vases peints ne dépasse guère le plan local (Vaginay, Guichard 1988 ; Barral, Huet à paraître).
- 40 Le bol de Roanne proprement dit n’est pas antérieur à la période augustéenne, et n’apparaît probabl (...)
137La chronologie des formes peut se raccrocher en partie à celle de la céramique fine pour les vases‑tonnelets (no 1) et les bols (no 2), par exemple, dont on peut penser qu’ils sont contemporains de leurs homologues non peints. En ce qui concerne les décors, il est sûr que les motifs zoomorphes (no 3) présents à Goincet et à Yverdon‑les‑Bains avec des motifs géométriques (no 4) disparaissent avant ces derniers, qui sont les seuls à figurer sur la céramique augustéenne et gallo‑romaine : le célèbre « bol de Roanne » (no 5) est bien représentatif, par sa forme et son ornementation, des productions les plus récentes40. Des études plus détaillées sur la céramique forézienne ont permis de définir des styles décoratifs zoomorphes dont la validité a été reconnue pour le nord du Massif central ; le plus ancien est daté par V. Guichard du iie s. av. J.‑C. (Guichard 1987 ; 1994).

FIG. 21 ‒ La céramique peinte : 1, 4 vases à décor géométrique ; 2 bol caréné ; 3 décor zoomorphe ; 5 bol « de Roanne ».
138À côté de la céramique peinte proprement dite (c’est‑à‑dire dont le décor peint ne se limite pas à un simple engobage des parois), il existe des productions locales particulières : céramique peinte en noir (col ou panse) en Champagne et en Picardie, vases graphités ou peints à l’hématite en Bretagne, céramique micacée. Les premiers sont en Champagne caractéristiques de La Tène finale 2 (Hatt, Roualet 1977) ; les céramiques bretonnes sont datées sans autre précision de la fin du second âge du Fer (Giot et al. 1979) ; la céramique fine enduite au mica doré est une production bien connue à l’époque augustéenne, par exemple pour les vases à bord mouluré.
La céramique gallo‑belge
139fig. 22
140Sous ce terme inexact, mais consacré par l’usage, sont rassemblées des céramiques fabriquées surtout (mais pas uniquement) en Gaule Belgique et en Germanie ainsi qu’en Bretagne à partir du règne d’Auguste, et dont les principales caractéristiques sont un répertoire de formes partiellement inspirées par la céramique sigillée italique, ainsi qu’une technique de production quasi industrielle qui se manifeste par la qualité de la cuisson (pâte dure) et la standardisation des types. Née vers 20 av. n.è., la céramique gallo‑belge connaît un essor foudroyant, puisqu’à Amiens elle représente 42 % de la céramique utilisée dans les trente premières années du ier s. ap. J.‑C. (Benredjeb 1985 : 172).
141La céramique gallo‑belge comprend deux grandes catégories de vases selon la couleur de la surface : la Terra nigra, cuite en atmosphère réductrice, est de couleur grise à noire, avec ou sans mica, la pâte en est extrêmement variée (grise à noire, voire brune à rouge, parfois en sandwich) (Benredjeb 1985) ; la Terra rubra, cuite en atmosphère oxydante, peut être engobée en rouge, orange, brun, ou non engobée (surface beige). Les productions les plus précoces ont été reconnues à Goeblingen‑Nospelt : la tombe A a livré deux coupes en Terra nigra, imitées de formes de céramique campanienne, une écuelle et une assiette en Terra rubra s’inspirant de la sigillée, ainsi que deux gobelets rappelant des formes laténiennes (Metzler 1984, fig. 2, no 46, 19). Les types sont encore peu diversifiés, mais ils montrent bien les trois origines probables de la céramique gallo‑belge : les importations de céramique campanienne, de céramique sigillée (nos 1 et 2), et la céramique indigène. C’est dans cette dernière en effet qu’il faut chercher les modèles des urnes et des gobelets (no 3), des vases‑bobines inspirés des gobelets décorés de baguettes (no 4) et des écuelles carénées (no 5) fabriquées dans cette production. Il semble qu’à l’origine les formes basses soient les plus nombreuses (Benredjeb 1985). Les décors rencontrés sur ces vases sont des décors lissés (lignes verticales, croisillons), des lignes ondées ou concentriques, des baguettes, des motifs effectués à la molette ; donc un répertoire décoratif qui renvoie en grande partie à la tradition récente de la céramique laténienne.

FIG. 22 ‒ La céramique « gallo‑belge » ; 1, 2 assiettes ; 3 urne ; 4 vase‑bobine ou « diabolo » ; 5 bol caréné.
2.3.5 Les monnaies
Datations directes et indirectes
142Les monnaies rencontrées dans les sites d’habitat de la Gaule indépendante sont pour l’essentiel des monnaies gauloises, et en moindre quantité, des monnaies romaines. Seule la présence de celles‑ci, dont on connaît généralement la date d’émission, est susceptible de donner un terminus post quem certain pour le dépôt des objets qui leur sont associés. Malheureusement ces monnaies sont très peu nombreuses et ont circulé fort longtemps, ce qui rend leur potentiel chronologique souvent moins intéressant que celui de mobiliers plus évolutifs, comme les fibules ou la céramique locale.
143En revanche, les monnaies gauloises ne donnent pas de terminus précis en chronologie absolue, à l’exception des créations tardives (que l’on peut déjà qualifier de « gallo‑romaines ») destinées à circuler dans un espace dépassant largement le cadre de la cité, ou même de la province. Il s’agit presque uniquement, pour les sites qui nous intéressent, des as des colonies de Nîmes et de Lyon, et des monnaies de germanus indutilli l (BN 9248). Leurs data tions, fondées sur l’iconographie et/ou sur les légendes monétaires (titulatures impériales), sont dans l’ensemble assez sûres. Ce sont des émissions essentiellement augustéennes ou pré‑augustéennes.
144Le début de l’émission des as du premier type est controversé : soit en 28/27 av. J.‑C., soit en 16 ou 15 av. J.‑C. (résumé récent de la question : Christol, Goudineau 1988). Les types suivants sont émis l’un à partir de 8 av. J.‑C., l’autre à partir de 14‑15 ap. J.‑C. (Giard 1971‑72 : 60). L’émission des as nîmois est précédée par celle de monnaies à légende nem col (obole et petit bronze), vers 40/30 av. J.‑C. (Christol, Goudineau 1988).
145L’émission des as à l’autel de Lyon débute vers 10 av. J.‑C. (série du premier type, caesar pontifex max / rom et aug : Majurel 1965). Elle est précédée par des émissions de monnaies à légende COPIA, dont la première célèbre la fondation de Lyon par L. Munatius Plancus (petit bronze à légende copia felix / munatia, 43 av. J.‑C. ; Rogers 1986).
- 41 Monnaies de Lyon : vers 43 av. J.‑C. (Rogers 1986 : 92) ; monnaies d’Hirtius : vers 49 av. J.‑C. (S (...)
146La frappe des bronzes de germanus indutilli l, peut‑être localisée sur l’oppidum du Titelberg (Weiller 1984), est traditionnellement datée des années postérieures à 10 av. J.‑C., pour des raisons iconographiques ; elle serait imitée du quadrans à l’autel de l’atelier de Lyon émis à partir de 10 av. J.–C. (Scheers 1977 : 180‑181, 809‑821). Toutefois sa présence dans le camp militaire d’Oberaden, abandonné vers 9 av. J.‑C., montre qu’elle aurait été émise, dans ce cas, quasiment en même temps que le prototype. Par ailleurs, le modèle commun aux deux monnaies est un denier romain émis vers 40 av. J.‑C. Or, une étude récente suggère que ce monnayage, associé à d’autres monnaies de bronze comme celles d’Hirtius ou les monnaies de la fondation de Lyon copia felix / munatia, pourrait avoir formé en Gaule Chevelue un système monétaire comparable à celui constitué en Gaule Transalpine par les premières émissions coloniales (Nîmes, Cavaillon...) entre 43 et 23 av. J.‑C. (Rogers 1986 : 91‑93). Les monnaies d’Hirtius et de Lyon sont émises dans les années 4041. Il n’est donc pas impossible que la frappe des monnaies de germanus indutilli l commence avant la dernière décennie avant n.è.
147La grande majorité des autres monnaies gauloises sont mal datées, et donc inutilisables sur le plan chronologique. Certaines d’entre elles, toutefois, peuvent être considérées comme « datantes ». Il s’agit par exemple des imitations de monnaies romaines –la période d’émission du prototype constitue un terminus post quem pour la création de la monnaie gauloise considérée (Scheers 1969)–, ou de monnaies que l’on peut associer à des faits ou à des personnages historiques, comme celles qui portent des noms de chefs cités par César dans son récit de la guerre des Gaules (Colbert de Beaulieu 1962). Il faut mentionner aussi, bien entendu, les monnaies récoltées dans les fossés d’Alésia : leur émission est antérieure à –ou contemporaine de– 52 av. J.‑C., dans la mesure où l’on considère que cette date est bien celle du dépôt des objets. La fourchette de l’émission est appréhendée avec une grande précision lorsqu’on peut conjuguer ces éléments : par exemple, le monnayage de Litaviccos, chef gaulois mentionné par César, imité d’un prototype romain émis en 66 av. J.‑C., a été recueilli dans les fossés d’Alésia : il aurait donc été créé entre 66 et 52 av. J.‑C. (Scheers 1969 : 128‑130, 134‑135).
148Mais il s’agit là de cas très exceptionnels ; on obtient le plus souvent une fourchette chronologique lâche, qui n’est ni un terminus ante quem, ni un terminus post quem. L’existence d’un prototype n’est d’ailleurs pas toujours un atout très utile, car on ignore le délai qui s’écoule entre l’émission du modèle et la création du monnayage qui s’en inspire. La chronologie du prototype lui‑même peut être incertaine, et les relations entre les prototypes et leurs imitations posent parfois des problèmes d’interprétation. C’est le cas, par exemple, du potin rème « au personnage courant » (Scheers 190 ; BN 8124) dont on a rapproché le revers, qui représente un animal, de celui du denier de César émis vers 49/48 av. J.‑C., où figure un éléphant (Scheers 1969 : 73‑ 74, 174‑176) ; mais il est d’autres avis pour voir dans cet animal, à vrai dire bien peu reconnaissable, une image dérivée du taureau des bronzes marseillais (Duval 1987 : 346). La question n’est pas dénuée d’importance, car ce potin est l’un de ceux dont la présence dans certains sites d’habitat pose un problème chronologique aigu (cf. infra p. 60).
L’évolution du monnayage gaulois selon la théorie de J‑B. Colbert de Beaulieu
149Les datations directes de et par les monnaies gauloises sont donc rares et peu satisfaisantes. Mais si la chronologie absolue fait défaut, il est possible d’établir une chronologie relative des monnaies gauloises au sein de leurs ensembles monétaires. C’est l’objet des travaux du docteur J.‑B. Colbert de Beaulieu, qui a créé un cadre théorique et des outils méthodologiques efficaces pour débrouiller une situation au demeurant compliquée. La méthode qu’il a développée dans son Traité de numismatique celtique (1973), et qui constitue le fondement des études de numismatique gauloise, repose sur trois principes ou moyens d’analyse fondamentaux :
– la charactéroscopie (étude des coins) définit des ensembles monétaires qui, cartographiés, peuvent être attribués à un peuple donné ;
– la métrologie (mesure des poids) permet de reconstruire l’évolution d’un monnayage, et par la suite d’en situer les exemplaires dans le temps, étant entendu que cette évolution obéit nécessairement au principe numismatique universel de la diminution du poids et de la dépréciation de l’aloi ;
– la valeur d’un monnayage dépendant de la situation économique du pays où il a cours, les étapes de son évolution peuvent être mises en relation avec des événements qui modifient cette situation économique, et particulièrement avec des événements historiques importants comme les guerres de conquête.
150J.‑B. Colbert de Beaulieu reconnaît donc trois grandes étapes dans l’évolution du monnayage gaulois.
151Des monnaies d’or imitées des statères de Philippe II de Macédoine sont frappées en Gaule dans le courant du iiie s. av. J.‑C. ; les Arvernes en auraient le monopole (excepté en Gaule Belgique, où le prototype est un statère de Tarente).
152Après la conquête de la Narbonnaise qui met fin à l’hégémonie arverne, les frappes de cités se multiplient, l’aloi et le poids des monnaies, dont la circulation reste confinée dans les limites de la cité, se déprécient progressivement ; ce processus de dévaluation aboutit à l’abandon de l’étalon‑or dans une grande partie de la Gaule celtique, qui adopte l’argent selon deux standards différents : la Gaule de l’Ouest conserve le système du statère tandis que celle du Centre‑Est s’aligne sur la métrologie du denier romain, donnant ainsi naissance à ce que Colbert de Beaulieu nomma la zone du denier (Colbert de Beaulieu 1965). Le passage au dernier stade de cette évolution est marqué par la création des premières monnaies de bronze (frappées).
153Ce processus est accéléré par la guerre des Gaules, qui a pour effet, d’une part de provoquer l’émission de monnayages de peu de valeur (les bronzes coulés ou potins) pour pallier l’insuffisance de numéraire, et d’autre part de généraliser la circulation de monnaies de toutes provenances. Les récoltes monétaires des fossés d’Alésia servent de référence pour définir cette circulation monétaire au milieu du ier s. av. J.‑C. Après la guerre, les pouvoirs émetteurs se multiplient et se réduisent à l’échelle des pagi. La fin des émissions de monnaies gauloises se situe dans les dernières décennies du ier s. av. J.‑C., quand le relais est pris par les émissions des colonies de Lyon, Vienne, Nîmes..., mais elles continuent de circuler longtemps après.
Les contradictions entre le modèle de J.‑B. Colbert de Beaulieu et les témoignages archéologiques
154La grande cohésion de ce modèle a permis un développement sans précédent des études de numismatique gauloise ; mais il s’est avéré rapidement que sur bien des points, les témoignages archéologiques et la théorie numismatique ne s’accordent pas.
155Selon le modèle de J.‑B. Colbert de Beaulieu, la présence de potins implique obligatoirement une datation au plus tôt contemporaine de la guerre des Gaules, puisque seulement 53 potins (sur 449 monnaies gauloises) ont été recueillis dans les fossés de Grésigny‑Sainte‑Reine (Colbert de Beaulieu 1955b) ; leur faible représentation est attribuée à leur production tardive, induite par les besoins croissants en numéraire en cette période de crise, et inaugurée peu avant leur perte dans les fossés. Or, dès les années soixante‑dix, les archéologues notent leur présence dans des contextes datés par le mobilier métallique de La Tène D1, voire C2, par exemple en Allemagne et en Suisse, à Breisach/Hochstetten (Stork 1981), Berne/Tiefenau, Bâle/Usine à gaz (Furger‑Gunti, Kaenel 1976) et sur le site même de La Tène (Allen 1973). En France des exemples de cette contradiction sont relevés dans des contextes de Gaule interne comme de Gaule méditerranéenne aussi différents que des fosses d’habitat (Levroux : Buchsenschutz 1981), des stratigraphies d’habitat (Roanne, Nages), des sépultures (tombe 5 de la nécropole des Colombes à Beaucaire : Dedet et al. 1974). Concilier la thèse de J.‑B. Colbert de Beaulieu avec les bornes chronologiques alors admises pour la fin de La Tène D1 (vers 50 av. J.‑C.), revenait à placer l’occupation des sites livrant à la fois du mobilier métallique de cette phase et des potins pendant la guerre des Gaules ou, au mieux, à en repousser la fin de l’occupation au milieu ou dans la deuxième moitié du ier s. ; ainsi, les sites de La Tène D, dans leur ensemble, se trouvaient compressés dans une fourchette chronologique courte autour du milieu du ier s. av. n.è., ce qui ne correspondait pas à l’image donnée par les faits archéologiques. La perplexité des chercheurs se traduit alors par l’adoption d’une datation basse pour l’ensemble (tombe 5 de Beaucaire), par l’hypothèse d’une intrusion fortuite, ou tout simplement par le refus de prendre en compte la chronologie donnée par le mobilier numismatique (Levroux).
- 42 Seuil en dessous duquel J.‑B. Colbert de Beaulieu situe les premières émissions autonomes.
- 43 Ce statère appartient, selon B. Fischer, aux toutes dernières émissions d’or éduennes datables peu (...)
- 44 Statère de la classe 3 du type II de Tayac. Datation du trésor par J.‑B. Colbert de Beaulieu : débu (...)
- 45 Ripe Iles, Villaronga 1981. Les monnaies à la croix de poids lourd (plus de 4 g) sont les premières (...)
- 46 En revanche, les arguments donnés pour l’existence des potins avant La Tène D, soit avant le dernie (...)
156La décennie suivante voit s’accumuler les données qui contredisent le modèle de J.‑B. Colbert de Beaulieu. Le principe de l’hégémonie arverne interdit l’émission de monnayages autonomes avant la conquête de la Narbonnaise, c’est‑à‑dire, en somme, de toutes les monnaies d’or pesant moins de 8 g42 et de toutes les monnaies d’argent avant 120 av. J.‑C. Or, les découvertes archéologiques ne sont pas en accord avec ce postulat : on relève par exemple l’écart, à Feurs, entre la datation par les numismates du statère du type de Chenôves et celle du contexte archéologique dans lequel il a été recueilli43, ou celui, encore plus considérable, entre la datation du trésor de Tayac (Gironde) et celle de la sépulture d’Hostomice (Bohême), qui ont pourtant livré le même type de statère44 ; on souligne la présence de monnaies à la croix de poids lourd dans des trésors monétaires espagnols de la fin du iiie s.45 H. Polenz (1982) montre que des potins sont plusieurs fois associés, dans les tombes allemandes et suisses, à des objets caractéristiques de La Tène D146 ; dans les années quatre‑vingt‑dix, des trouvailles identiques en contexte d’habitat se multiplient, en Suisse comme en France (Geiser 1995 ; Lambot, Delestrée 1991 ; Guichard et al. 1993), et sont étayées par des découvertes en contexte funéraire : huit exemplaires Scheers 191/LT 8124 ont en effet été recueillis en association avec des parures de La Tène D1 dans une sépulture de la nécropole de La Croizette, à Acy‑Romance (Lambot et al. 1994, tombe 104).
157Cette position est évidemment inacceptable dans le cadre théorique développé par J.‑B. Colbert de Beaulieu et ses élèves, car il ne s’agit pas d’une simple divergence de vue sur le seul problème des potins. Si l’on admettait que celui‑ci existe à La Tène D1, voire dès La Tène C2, alors il faudrait admettre que sa création est au moins aussi ancienne que celle des monnaies d’argent, comme le suggérait H. Polenz dès 1982, ou bien vieillir considérablement la date d’apparition des autres alliages pour en respecter le principe de succession (or, argent, bronze et potin) ; c’est admettre aussi la possibilité que ces potins, ainsi que d’autres monnaies, circulent en dehors de leur territoire émetteur bien avant la guerre des Gaules. Dans tous les cas, le modèle historique de J.‑B. Colbert de Beaulieu se trouve mis en question.
Lа datation des potins
158Revenons donc sur ce problème de la date d’apparition du potin, sur lequel se sont cristallisés principalement les désaccords entre numismates et archéologues.
- 47 L’ensemble des deniers représente plus de 60 % du total des monnaies et presque 90 % des monnaies e (...)
- 48 Pour cette raison, les arguments développés par V. Guichard pour la datation du monnayage arverne d (...)
159La première question qui se pose est celle des récoltes d’Alésia qui se caractérisent par une faible représentation des potins (62 monnaies sur les 466 actuellement conservées au musée des Antiquités nationales, soit 13 % : Fischer 1994). Ce fait est l’un des arguments principaux avancés par J.–B. Colbert de Beaulieu pour postuler la production tardive des monnaies de bronze coulé. L’un des caractères frappants de la récolte monétaire d’Alésia est la prépondérance non seulement des deniers gaulois en provenance de toutes les zones alignées sur ce standard, mais aussi des deniers romains47, presque aussi nombreux que les bronzes frappés. Les autres monnayages en argent sont en comparaison marginaux, notamment les espèces arvernes, pourtant bien représentées par ailleurs en or et bronze frappé (4 des 10 monnaies en or, et la moitié des monnaies en bronze frappé). Or, les monnaies d’argent arvernes des fossés d’Alésia ne sont pas alignées sur le standard du denier (Nash 1978 : 138 sq. ; Fischer 1994 : 292). Il paraît évident qu’une sorte de sélection s’est opérée en faveur des monnaies alignées sur le denier romain, ce qui n’a rien de surprenant compte tenu du contexte : les deniers gaulois ont dû être utilisés largement pour payer la solde des auxiliaires (Colbert de Beaulieu 1973 : 309), procédé qui ne pouvait être que favorisé par l’adoption déjà ancienne de ce standard dans la zone du denier. Ces observations montrent, s’il en était besoin, que les découvertes d’Alésia sont le fruit de conditions très particulières, et ne sont pas représentatives de la circulation monétaire au milieu du ier s. À ce titre, elles ne peuvent constituer qu’un terminus ad quem pour les types représentés : ni l’absence d’un type monétaire dans les fossés d’Alésia, ni la proportion respective des métaux et alliages métalliques, ni même la proportion des types représentés ne peuvent servir d’argument chronologique48, et a fortiori, ne peuvent asseoir la datation de la création des monnaies de potin.
160La chronologie relative des métaux et alliages métalliques et de certaines séries de potin, ont récemment bénéficié d’importants acquis.
- 49 Si l’on compare en effet les horizons 1a et 1b du site d’Alésia, on remarque que le bronze frappé a (...)
161Selon l’hypothèse de J.‑B. Colbert de Beaulieu, le choix du métal ou de l’alliage métallique des monnaies gauloises obéit à un ordre chronologique bien précis : or, argent, bronze frappé puis coulé. Leur représentation en pourcentage peut donc avoir un sens du point de vue de la chronologie, et c’est selon ce principe que j’avais examiné, dans le cadre de mon travail universitaire, les corpus monétaires d’un certain nombre de sites ouverts et d’oppida. Il s’était avéré alors que dans les gisements du centre‑est de la Gaule (de la Bourgogne au Forez et à la Suisse), le bronze frappé était soit absent, soit toujours moins bien représenté que l’or, l’argent ou le bronze coulé, ce dernier étant en revanche toujours prédominant (fig. 23). Un rapide examen bibliographique avait ensuite montré que dans les contextes augusto‑tibériens de cette zone, le pourcentage des bronzes frappés augmente tout en restant toujours déficitaire49. Dans le Centre‑Est, la circulation ultime des monnaies gauloises se caractérisait par la faveur tardive du monnayage de bronze frappé, alors qu’auparavant étaient privilégiés l’argent et le potin (le pourcentage élevé de monnaies d’argent pouvant s’expliquer dans ce cas précis par la localisation des sites dans la zone du denier).
- 50 Dont un cas où le bronze frappé provient d’un puits qui a livré aussi la fibule la plus récente du (...)
162Une conclusion proche avait été obtenue également à l’examen des trouvailles monétaires de Levroux/Les Arènes. Les bronzes frappés y sont en effet recueillis seuls ou associés entre eux ; on les rencontre également une fois avec une monnaie coloniale à l’autel de Lyon, deux fois avec un potin50. Inversement, hormis les deux cas précédents, les potins sont associés deux fois à une monnaie d’argent, une fois à une monnaie d’or, ou associés entre eux. À part un cas douteux, les bronzes frappés de Levroux ne sont donc jamais associés, contrairement aux potins, à du numéraire précieux. La présence de bronzes frappés avait alors été rapportée à un état du site plus récent que celui représenté par l’association potins/or ou argent. Depuis, V. Guichard et P. Pion, s’appuyant sur des données inédites, ont systématisé cette conclusion en l’étendant à la Gaule du Centre et à la Gaule Belgique, et ont proposé un modèle de l’évolution du monnayage de bronze gaulois qui fait apparaître en Gaule chevelue les émissions de bronze coulé avant les émissions de bronze frappé (Guichard et al. 1993). L.‑P. Delestrée confirme l’apparition tardive (au milieu du ier s. av. J.‑C.) des nombreuses séries belges de bronzes frappés, plus tard donc que certaines séries de potins (Delestrée 1996 : 106). La convergence de ces différentes observations est telle qu’on ne peut plus douter, aujourd’hui, de la véracité de ce constat, en n’oubliant pas toutefois que toutes les séries de potins ne doivent pas être considérées comme précoces, et que les évolutions régionales ne sont pas nécessairement synchrones.
- 51 D’après les travaux de S. Scheers (1969), trois seulement sont indiscutables, et deux d’entre eux s (...)
163Une des difficultés à dater les potins provient de la multiplication des séries, et de leur état de conservation souvent très médiocre qui rend leur étude ingrate et laborieuse. Des numismates, en collaboration avec des archéologues, ont entrepris depuis peu de s’attaquer au problème du classement des potins et commencent à distinguer des séries anciennes en s’appuyant sur des contextes archéologiques fiables (Gruel 1995a). On admet aujourd’hui (Gruel 1995b : 138‑139) qu’en Gaule du Centre et du Centre‑est (probablement aussi en Suisse) les séries les plus anciennes sont celles qui sont inspirées des petits bronzes marseillais au taureau cornupète : potins à la grosse tête, en particulier A1 à A4, A7 et A8 (Gruel, Geiser 1995) ; potins au long cou (Nash 594), exclusifs dans les habitats ouverts arvernes, dont V. Guichard place l’occupation avant le milieu du ier s. av. J.‑C. (Guichard et al. 1993 : 34) ; potins à légende ma (LT 5284) : en Grande‑Bretagne, ils constituent les premiers monnayages de bronze du Kent dont les émissions initiales devraient remonter au iie s. (Haselgrove 1995b : 119‑120, type Thurrok) ; sans doute aussi certaines séries de potins à la tête diabolique. Comment ne pas être frappé, d’ailleurs, par l’abondance de ces potins au taureau ou au quadrupède ? Même si celle‑ci procède en partie de la prolifération de copies, elle contraste étrangement avec la rareté des potins inspirés de prototypes romains51. Les prototypes marseillais apparaîtraient dans la première moitié du iie s. av. n.è., voire à la fin du iiie (Gentric 1987 : 392‑393 ; Py 1990b : 602, 604 ; Brenot 1990). Rien d’étonnant alors à ce que certains, comme H. Polenz (1982), à la suite de D. Allen, de A. Furger‑Gunti et H.‑M. V. Kaenel, aient formulé depuis longtemps l’hypothèse selon laquelle la création des potins qui s’en inspirent remonterait à l’époque où l’influence massaliote était encore à son apogée, soit dans la seconde moitié du iie s. av. J.‑C. Le choix des prototypes n’est en tout cas pas fortuit, et conduit à s’interroger sur l’influence des pratiques monétaires de Marseille dans la création du monnayage de bronze gaulois (Guichard et al. 1993 : 43). La question se pose différemment pour les potins de Gaule Belgique, dont l’iconographie ne rappelle aucun prototype monétaire, et dont les émissions sont étroitement liées aux sanctuaires (Delestrée 1991). Les récentes découvertes en milieu funéraire d’Acy‑Romance, auxquelles on peut ajouter les associations de mobiliers recensées dans les habitats ou les sanctuaires, attestent sans aucun doute que le potin Scheers 191/LT 8124 est déjà bien représenté dans les contextes de La Tène D1 (Haselgrove 1995a).
Monnaies d’argent gauloises et monnaies méditerranéennes
164L’apparition des monnaies d’argent après la conquête de la Narbonnaise n’est plus aujourd’hui considérée comme un repère chronologique incontestable pour l’évolution du monnayage gaulois. Les conclusions de D. Allen et D. Nash sur la chronologie haute des premiers monnayages d’argent dans la Gaule du Sud‑Ouest et du Centre‑Ouest sont des hypothèses de travail admises par S. Scheers, ou J. Hiernard : la chronologie de D. Nash pour les monnaies d’argent du trésor de Bridiers (Creuse), dont s’inspirent les séries ultérieures du Berry et du Poitou, est confirmée dans les grandes lignes par s. Scheers (1982 : première moitié ou premier tiers du iie s. av. J.‑C.). La mise en évidence de leur filiation d’une part avec des espèces espagnoles (monnaies de Rodas et d’Ampurias), et d’autre part avec les drachmes de Marseille, illustre bien la diversité des influences qui concourent à la création des monnayages gaulois. On a pu de même montrer le rôle joué par l’étalon ampuritain, qui correspond au denier romain, dans la métrologie des monnaies d’argent lourdes de Narbonnaise occidentale, et par la drachme légère de Marseille, proche également du denier romain, dans le couloir rhodanien (résumé de la question : Roman 1982 ; 1983) ; les influences stylistiques sont non moins évidentes. Ces deux étalons monétaires sont en usage bien avant la conquête de la Narbonnaise, et un certain nombre des monnaies qui s’en inspirent ont toutes les chances d’avoir été créées elles aussi avant 120 av. J.‑C.
165Dans une vaste zone géographique allant du Berry à la vallée du Rhône et de celle‑ci à l’embouchure de la Garonne, les monnaies d’argent tendent à un certain stade de leur évolution vers un poids qui oscille entre 2 g et 1,8 g, c’est‑à‑dire non seulement proche du poids théorique du demi‑denier romain (1,95 g), mais qui n’est pas très éloigné non plus de celui de la drachme légère de Marseille, dont le poids (théoriquement de 2,6 g) peut descendre jusqu’à 1,7 g (Gruel 1989 : 42). Outre la zone du denier proprement dite, définie par J.‑B. Colbert de Beaulieu pour les cités éduenne, séquane, lingone et probablement leuque, d’autres régions présentent en effet cette particularité : la vallée du Rhône avec les deniers au cavalier (Deroc 1983), le Sud‑Ouest avec les monnaies à la croix (Colbert de Beaulieu, Richard 1972), le Berry, le Limousin et le Centre‑Ouest, où l’on constate également une évolution du poids des monnaies d’argent, de celui de la drachme légère de Marseille vers celui du demi‑denier romain (Buchsenschutz et al. 1993 : 254). On ne manque pas d’être frappé par ce découpage géographique qui correspond justement à la zone de diffusion maximale des monnaies de Marseille (fig. 24), qui pose encore une fois la question de l’influence marseillaise sur la création et l’évolution d’une partie du monnayage gaulois. La date de l’adoption de cet étalon est incertaine, et d’ailleurs certainement variable selon les régions. L’un des monnayages frappés dans le Centre‑Est, au nom de kaletedv associé à sulla, pourrait avoir été émis au moment de la dictature de ce dernier, soit vers 80 av. J.‑C. (Colbert De Beaulieu 1965 : 167‑168). On a pu objecter que ce lien historique n’est pas entièrement convaincant : sulla est aussi le nom du monétaire qui fit frapper vers 150 av. J.‑C. le denier servant de modèle à la monnaie de kaletedv ; il peut figurer dans la légende de celle‑ci comme un simple emprunt typologique au même titre que l’image elle‑même (Allen 1973 : 497). Les arguments de J.‑B. Colbert de Beaulieu paraissent toutefois extrêmement solides, et D.F. Allen lui‑même ne remet pas véritablement en question la chronologie de ce monnayage. Tous deux étaient au moins d’accord pour rejeter la possibilité d’une réduction antérieure, ou même immédiatement postérieure à la conquête de la Narbonnaise ; l’émission de deniers gaulois serait alors un phénomène caractéristique surtout de la première moitié du ier s. av. n.è.

FIG. 24 ‒ Les monnaies de Marseille en Gaule interne d’après Nash 1978, Hiernard 1985, avec additions : 1 Pommiers (Aisne) ; 2 Jersey 6 (île de Jersey), 3 Charbuy (Yonne) ; 4 Vernon (Vienne) ; 5 Châteaumeillant (Cher) ; 6 Plouguerneau (Finistère) ; 7 Yssandon, Le Puy du Chalard (Corrèze) ; 8 Saint‑Marcel (Indre) ; 9 Bénévent‑L’abbaye (Creuse) ; 10 Roanne (Loire) (Gentric, Poncet 1985) ; 11 Les Martres‑de‑Veyre (Puy‑de‑Dôme) ; 12 Vendœuil‑Caply (Somme) ; 13 Le Mont‑Beuvray (Saône‑et‑Loire) ; 14 Allonnes (Sarthe) ; 15 Bourg (Ain) ; 16 Aiise‑Sainte‑Reine (Côte‑d’or) ; 17 Goux (Jura) ; 18 Coulommiers (Seine‑et‑Marne) ; 19 Poitiers (Vienne) ; 20 Millau (Aveyron) ; 21 Sainte‑Eulalie‑de‑Cernon (Aveyron) ; 22 Chambles (Loire) (Preynat 1983b) ; 23 La Roche‑Blanche (Puy‑de‑Dôme) ; 24 Naintré (Vienne), 25 Mâlain (Côte‑d’or) (Fischer 1985b) ; 26 Varennes‑lès‑Mâcon (Saône‑et‑Loire) ; 27 Charraix (Haute‑Loire) (Simonnet 1982) ; 28 Auinat (Puy‑de‑Dôme) (Nash, Collis 1983) ; 29 Épiais‑Rhus (Oise) (Lardy et al. 1987) ; 30 Berne‑Tiefenau (Suisse) ; 31 La Tène (Suisse) ; 32 Feurs (Loire) (Vaginay, Guichard 1988) ; 33 Tournus (Saône‑et‑Loire) (Vaussanvin 1987) ; 34 Saint‑Jean‑de‑Trolimon (Finistère) ; 35 Paimpont (Ille‑et‑Vilaine) ; 36 près de la Mayenne (Mayenne) ; 37 près de Verneuil‑sur‑Avre (Eure) ; 38 Pitres (Eure) ; 39 Orléans (Loiret) ; 40 Auxerre (Yonne) ; 41 Troyes (Aube) ; 42 près de Châlon‑sur‑Marne (Marne) ; 43 Le Titelberg (Weiller 1977) ; 44 près de Neustadt (Allemagne) ; 45 Bullet (Suisse) ; 46 Vevey (Suisse) ; 47 Genève (Suisse) ; 48 Grand‑Saint‑Bernard ; 49 Songieu (Ain) ; 50 Levroux (Indre) ; 51 Morthomier (Cher) ; 52 Bourges (Cher) ; 53 Bridiers (Creuse) ; 54 Mouliets‑et‑Villemartin (Gironde) (Boudet 1987b) ; 55 La Roche‑sur‑Yon (Vendée) ; 56 Rouillac (Charente) ; 57 Rouffignac (Dordogne) ; 58 Yssandon (Corrèze) ; 59 Le Moustier Ventadour (Corrèze) ; 60 Bordeaux (Gironde) ; 61 La Réole (Gironde) ; 62 Lectoure (Gers) ; 63 Albias (Tarn‑et‑Garonne) ; 64 près de Rodez (Aveyron) ; 65 Saint‑Rome‑de‑Cernon (Aveyron) ; 66 La Chaussée‑Tirancourt (Somme) (Brunaux et al. 1990).
Notes
1 Le système est utilisé par exemple à Étival‑Clairefontaine (Vosges) par A. Deyber (1984).
2 Fibule de schéma La Tène 2 à long ressort et fibule de Nauheim.
3 Krämer 1962 ; Polenz 1971 ; Haffner 1974. « La fibule de Nauheim [...] est le fossile directeur par excellence de cet horizon (même si ces fibules perdurent dans l’horizon suivant) « (Millier, Kaenel 1986 : 166) ; les mêmes auteurs soulignent par ailleurs (ibid. : 93) « l’importance démesurée » des fibules dans la chronologie de l’âge du Fer en général.
4 La question de l’emplacement d’Alésia doit être une fois pour toutes évacuée ; elle a été définitivement réglée avec la reprise des fouilles en 1991, sous la direction de M. Reddé, professeur à l’EHESS, qui ont mis au jour à de multiples reprises les fossés de la circonvallation et de la contrevallation, les tours qui couronnaient l’agger, et les défenses avancées.
5 La prudence de S. Sievers, qui a réexaminé les anciennes découvertes d’armes, est significative : elle penche pour une attribution au milieu du ier s. av. J.‑C., tout en signalant des « dissensions » dues à la présence d’objets semblant plus anciens ou plus récents (Sievers 1994 : 285) ; les explications qu’elle avance (présence de plusieurs générations de combattants, difficulté à distinguer les panoplies des Celtes et des Germains) sont sans doute justes, mais jusqu’à quel point ?
6 Allen 1971 : 354 sq. Par ailleurs, H. Polenz (1982 : 154) fait remarquer que le poids plutôt faible du denier de KALETEDV (1,547 g) ne constitue pas un argument suffisant pour en supposer la datation basse, car c’est un objet isolé, et seules les séries sont fiables.
7 Krämer 1971 : 117 sq. Contra, Feugère 1985.
8 Trois fibules de ce type proviennent d’une couche de comblement d’une fosse qui a par ailleurs livré un bois abattu en 109 av. J.‑C. La structure dont il s’agit est une grande fosse‑dépotoir (de plus de 3 m de profondeur) qui, par essence, est le contraire d’un ensemble clos ; l’US concernée (4959) ne paraît d’ailleurs pas homogène au vu de la coupe publiée (Guilhot, Goy 1992 : 62, fig. 22) ; enfin, le bois recueilli n’est pas en position primaire : il a pu être utilisé avant d’être jeté. On ne peut donc pas affirmer que « l’enfouissement [de l’US en question] a pu être daté par la dendrochronologie de l’année 109 av. J.‑C. » (Feugère 1992 : 136).
9 La Cavalière : quatre monnaies datables donnent une fourchette chronologique d’une cinquantaine d’années entre le dernier tiers du iie s. et les deux premières décennies du ier s. av. J.‑C. ; Punta Scaletta : la moitié des treize monnaies recueillies sont datables de la première moitié du iie s., une seule donne un terminus post quem vers 140 av. J.‑C. ; Le Cap Sicié : la monnaie la plus récente du petit trésor monétaire recueilli dans cette épave est de 74 av. J.‑C. ; La Madrague de Giens : neuf deniers d’argent dont les deux plus récents datent de 75 av. J.‑C. conduiraient à une datation dans la décennie 75‑65, mais A. Tchernia pose le problème de la présence à bord d’une amphore Haltern 70, isolée dans ce contexte précoce (1990 : 296) ; Pianier 3 : l’épave a livré des amphores timbrées au nom de m. tuccius galeo, mort en 47 av. J.‑C. L’épave de La Plane 1 est indirectement datée par la présence sur de la céramique campanienne du timbre Q. AF, connu par ailleurs sur de la céramique arétine ancienne vers 40‑30 av. J.‑C.
10 Sur l’argumentation historique : Schnurbein 1981 ; Schonberger 1985.
11 Trois grandes étapes de la vie du site ont été mises en évidence, du début du iiie s. av. J.‑C. au début du ier s. ap. J.‑C ; ces étapes sont subdivisées en phases, correspondant à des ensembles stratigraphiques successifs inscrits dans l’évolution urbaine du site (Py 1978a ; 1990b : 280‑281) ; Nages I : 290‑250 : Nages II ancien : 250‑175 (nette rupture stratigraphique avec Nages I) ; Nages II récent : 175‑100 (importantes transformations architecturales) ; Nages III ancien : 100‑70 (nouvelles transformations) ; Nages III moyen : 70‑30 (deniers romains émis entre 84 et 48 av. J.‑C., monnaies d’Antibes et de Lyon émises entre 44 et 27 av. J.‑C.) ; Nages III récent : 30 av. J.‑C.‑10 ap. J.‑C. (deniers romains émis entre 35 et 28 av. J.‑C., as de Nîmes).
12 À Saint‑Romain‑en‑Gal, le premier contexte a livré deux monnaies d’Octave frappées postérieurement à 40 av. J.‑C. : à Lyon (rue des Farges), le premier contexte a donné cinq monnaies républicaines frappées entre 100 et 43 av. J.‑C. C’est la proportion de la sigillée très précoce qui, cependant, place les débuts de Saint‑Romain‑en‑Gal (vers 30 av. J.‑C.) avant ceux de Lyon (vers 25‑20 av. J.‑C.) (Desbat 1990).
13 La tombe B est plus récente que la tombe A et doit se situer aux alentours de 20 av. J.‑C. (Metzler 1984b : 96).
14 À Bolsena le terminus post quem du premier horizon qui a livré de la sigillée est donné par un denier de 90 av. J.‑C., mais le terminus ante quem est fixé avant 30 av. J.‑C. par les lampes et la céramique campanienne. La proportion très majoritaire de celle‑ci par rapport à la sigillée incite à placer le début de cet horizon vers 50/40 av. J.‑C. (Goudineau 1968 : 99, 278‑279).
15 Voir Dedet 1978, Py 1978b, qui donnent de nombreux exemples de présence massive et tardive de céramique campanienne A dans cette région, par exemple à Nages dans le contexte AXIV2b couche 5, qui a livré un denier d’Octave frappé entre 35 et 28 av. J.‑C.
16 Py 1978a ; Morel 1981. Campanienne A ancienne : 220/210 à 190/180 (Py 1990a : vers 225 à 175 av. J.‑C) ; A moyenne : 190/180 à 120/100 av. J.‑C. (Py 1990a) ; A classique : v. 175‑100 av. J.‑C. ; A tardive : 120/100 à 50 av. J.‑C. (Py 1990a : 100‑30/20 av. J.‑C.).
17 Mais on en trouve cependant épisodiquement dans des contextes de la première moitié du ier s. av. J.‑C., en Provence (Arcelin 1978).
18 Des productions régionales ont été mises en évidence par exemple en Provence (Arcelin 1978).
19 La céramique arétine décorée est peu fréquente en Gaule, où elle ne semble apparaître que dans la dernière décennie du ier s. av. J.‑C. (Saint‑Romain‑en‑Gal deuxième contexte).
20 Schnurbein 1982 : 170, tabl. 4 ; les productions de La Muette représentent les 2/3 des vases des services I et II de Haitern. Cet atelier fonctionne à partir de 10 av. J.‑C ou peu avant (ibid., 121 sq.).
21 À Bram, Narbonne, Montans, Saint‑Romain‑en‑Gal... (Passelac 1986 ; Desbat, Savay‑Guerraz 1986).
22 À Numance, dans la nécropole de Las Cortes à Ampurias (Mayet 1978), et à Lattes (Py 1990b : 592, n. 471).
23 À Nages, ils n’apparaissent pas avant la phase iii finale qui couvre le dernier tiers du siècle (Py 1978a) ; à Cavaillon, ils sont récoltés dans des contextes de la même période (Dumoulin 1965 ; puits 7, couche inférieure).
24 M. Py cite d’ailleurs pour la région nîmoise un exemple de site de production en Vaunage daté de cette époque (Py 1990b : 588, note 428). Cet atelier produit également des mortiers.
25 D. Paunier note, à propos des mortiers à bandeau vertical de Genève : « Si les premiers exemplaires augustéens proviennent peut‑être d’Italie, [...] on peut admettre que la majeure partie de nos récipients ont été fabriqués dans des ateliers locaux ou régionaux » (Paunier 1981 : 249). C’est aussi la conclusion de M. Py (cf. note précédente).
26 À Nages, une fibule provenant d’un dépotoir est associée à de la campanienne A (dont trois fonds décorés de palmettes et un fond incisé) ; parmi les formes représentées il ne s’en trouve aucune caractéristique du ier s. dans cette région. À Constantine, une fibule de Nauheim associée à des monnaies de Marseille du début et de la fin du iie s. av. J.‑C. se trouve en position stratigraphique antérieure à du mobilier du ier s. (non décrit), et à un fond en campanienne A à décor de palmettes et cercle incisé.
27 Polenz 1982 : 87‑88 et fig. 15, no 2 ; la fibule est brisée.
28 Celle de la tombe A de Goeblingen‑Nospelt, très simple, rappelle encore la fibule à disque médian, mais celle de la tombe B est déjà une véritable queue‑de‑paon. À Dangstetten on a recueilli une fibule qui possède le décor d’une fibule à queue‑de‑paon, mais pas de protège‑ressort (Fingerlin 1972, fig. 9, no 2). Quoi qu’il en soit on peut considérer que le type se fixe définitivement entre 20 et 15 av. J.‑C.
29 M. Feugère fait remarquer que le réflexe qui conduit à dater un contexte de l’époque augustéenne à cause de la présence d’une fibule à charnière bloque la remise en question de la chronologie de cette fibule. La majorité des fibules à charnière se placent toutefois dans des contextes bien datés de la fin du ier s. av. J.‑C. Notons qu’il n’y a aucune fibule à charnière dans les tombes de Goeblingen‑Nospelt.
30 On comprend avec le lignite les formations sédimentaires (schiste, sapropélite, jais etc.).
31 En France, par exemple, à Chalucet (Haute‑Vienne) pour le premier âge du Fer (Chevillot 1976), et dans les nécropoles champenoises (Hatt, Roualet 1977).
32 Un bracelet en lignite a été recueilli à La Lagaste en compagnie de plusieurs fibules de Nauheim (Rancoule 1980).
33 La couleur pourrait apparaître dès la fin de La Tène C2 selon R. Gebhard (1989b : 102).
34 Par exemple à Étival‑Clairefontaine (Deyber et al. 1984), à Roanne (Bessou 1976), ou dans le site d’Épiais‑Rhus (Lardy et al. 1987).
35 Par exemple dans la nécropole de Mehun (Gourvest 1971, fig. 3). La fabrication de ces vases est attestée notamment à Nevers (rens. M. Joly et P. Barrai).
36 Elles peuvent être siliceuses ou calcaires, micacées ou non (Ferdière 1972). Les recherches les plus récentes situent le foyer d’origine du pot de type Besançon en zone éduenne (Morvan‑Nivernais d’une part, et Chalonnais‑Verdunois d’autre part), d’où ils sont diffusés, au moins dans les premiers temps de leur production, selon des axes privilégiés (vers la Franche‑Comté et la Suisse d’une part, vers la Loire moyenne d’autre part : Barrai, Huet à paraître).
37 Varennes‑les‑Mâcon, Tournus, Roanne, Bâle/Usine à gaz...
38 Cf. les observations de J.‑L. Flouest pour les nécropoles de Ménil‑Annelles et Villé‑sur‑Retourne, phases A et D (Flouest 1984) et celles de J.‑M. Lardy pour la nécropole d’Épiais‑Rhus (Lardy et al. 1987 : 170 sq., groupes techno‑morphologiques).
39 Par exemple à Roanne (phase II), à Épiais‑Rhus (Lardy et al. 1987, groupe techno‑morphologique 3), à Étival‑Clairefontaine...
40 Le bol de Roanne proprement dit n’est pas antérieur à la période augustéenne, et n’apparaît probablement pas avant l’extrême fin du ier s. av. n.è. ; il est précédé par une forme plus carénée dont la chronologie n’est pas très bien assurée (Périchon 1974, forme 14 ; Périchon 1985).
41 Monnaies de Lyon : vers 43 av. J.‑C. (Rogers 1986 : 92) ; monnaies d’Hirtius : vers 49 av. J.‑C. (Scheers 1977 : 168‑172).
42 Seuil en dessous duquel J.‑B. Colbert de Beaulieu situe les premières émissions autonomes.
43 Ce statère appartient, selon B. Fischer, aux toutes dernières émissions d’or éduennes datables peu avant la guerre des Gaules, vers 70‑60 av. J.‑C. (Fischer 1982). Or, l’exemplaire de Feurs appartient à un contexte daté par le reste du mobilier archéologique de la fin du iie s. au plus tard (Vaginay, Guichard 1988 : 189). Même si l’on peut formuler certaines réserves sur la chronologie haute des chercheurs de Feurs, le décalage entre les deux datations –numismatique et archéologique– n’en subsiste pas moins.
44 Statère de la classe 3 du type II de Tayac. Datation du trésor par J.‑B. Colbert de Beaulieu : début du ier s. av. J.‑C. ; datation de la sépulture d’Hostomice : La Tène B2 (Kruta 1982), soit deux siècles d’écart. R. Boudet a récemment diminué cet écart chronologique entre les deux contextes en alléguant que l’attribution au trésor de la monnaie la plus récente (un statère vénète), sur laquelle repose la datation basse de l’ensemble, n’est pas certaine ; mais il subsiste encore, au mieux, un bon siècle entre les deux contextes (Boudet 1987b).
45 Ripe Iles, Villaronga 1981. Les monnaies à la croix de poids lourd (plus de 4 g) sont les premières émissions de ce monnayage. Elles ne sauraient précéder la conquête de la Narbonnaise, selon J.‑B. Colbert de Beaulieu ; pour d’autres numismates (A. Soutou, D. Allen, D. Nash...), ces premières séries remonteraient à la fin du iiie s. ou au début du iie s. av. J.‑C. (cf. Nash 1978 : 22).
46 En revanche, les arguments donnés pour l’existence des potins avant La Tène D, soit avant le dernier quart du iie s., nous paraissent plus faibles : H. Polenz la déduit du seul fait que leur présence assez fréquente dans les contextes de La Tène D1 implique une création antérieure à cette période et il cite à l’appui des sites d’habitat, ce qui fragilise sa démonstration à notre sens, puisqu’il ne fait plus appel ici à des ensembles clos. D’autre part la seule sépulture de La Tène C2 (Marienborn) ayant livré un potin est datée par un type de fibule rarissime, dont la chronologie peut être de ce fait mal assurée ; il s’agit en outre d’une fouille ancienne assez mal connue.
47 L’ensemble des deniers représente plus de 60 % du total des monnaies et presque 90 % des monnaies en argent.
48 Pour cette raison, les arguments développés par V. Guichard pour la datation du monnayage arverne de bronze et d’argent à partir des découvertes d’Alésia, et qui se fondent sur l’absence ou la rareté de certaines monnaies, paraissent assez fragiles (Guichard et al. 1993).
49 Si l’on compare en effet les horizons 1a et 1b du site d’Alésia, on remarque que le bronze frappé augmente légèrement aux dépens de l’argent, tandis que le pourcentage des potins n’évolue pratiquement pas. La même observation peut être faite sur le site proche de Mâlain (Fischer 1985a) entre le niveau le plus ancien (dit « La Tène 3 ») et les niveaux « augustéens » et du ier s. ap. J.‑C. qui correspondent assez exactement à l’horizon 1b d’Alésia ; il est observable aussi à Bâle, en Suisse : l’absence de bronzes frappés sur le site de l’Usine à gaz contraste avec une meilleure représentation sur le site de la Colline de la cathédrale, où ils concurrencent les monnaies en argent, alors que le pourcentage de potins diminue légèrement. Or, si les numismates et les archéologues s’affrontent sur la chronologie des deux gisements, ils s’accordent au moins pour reconnaître à la Colline de la cathédrale une phase d’occupation postérieure à l’abandon du site de l’Usine à gaz.
50 Dont un cas où le bronze frappé provient d’un puits qui a livré aussi la fibule la plus récente du site. Un seul exemple d’association avec une monnaie d’argent et un potin a été relevé, mais le fragment de monnaie concerné est mal conservé : il ne s’agit peut‑être pas d’un bronze frappé.
51 D’après les travaux de S. Scheers (1969), trois seulement sont indiscutables, et deux d’entre eux sont tardifs. Inversement, le nombre de bronzes frappés imités de monnaies romaines est relativement important.
Table des illustrations
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Légende | TABL. II ‒ Les principaux systèmes chronologiques de la fin de l’âge du Fer. |
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Légende | FIG. 1 ‒ Les principales formes de céramique campanienne A recueillies dans les sites d’habitat de Gaule interne : 1 Lamb. 27B ; 2 Lamb. 31 ; 3 Lamb. 33b ; 4 Lamb. 6 ; 5 Lamb. 36 ; 6 Lamb. 5. |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/44658/img-2.jpg |
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Légende | FIG. 2 ‒ Les principales formes de céramique campanienne B recueillies dans les sites d’habitat de Gaule interne : 1 Lamb. 5 ; 2 Lamb. 1 ; 3 Lamb. 2 ; 4, 5 Lamb. 3 ; 6 Lamb. 6. |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/44658/img-3.jpg |
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Légende | FIG. 3 ‒ Quelques formes précoces de céramique sigillée italique recueillies dans les sites d’habitat de Gaule interne : 1 plat découvert au Pétrisberg ; 2, 3, 5 Consp. 1.1, 7, 13.1 (G. 1, 2, 7) ; 4 Consp. 10.1 ; 6 Consp. 5.2 (G. 12b, service Ib de HaItern) ; 7‑10 Consp. 12.5, 12.4, 14.2, 12.3 (G. 23/Ha. 1, G. 24/Ha. 7, G. 17/Ha 1, service Ic de Haltern). |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/44658/img-4.jpg |
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Légende | FIG. 4 ‒ Quelques formes de céramique sigillée italique recueillies dans les sites d’habitat de Gaule interne : 1 Consp. 18.2 (Ha. 2, service II de Haltern) ; 2 Consp. 19.2 (G. 28/Ha. 3b, service II) ; 3 Consp. 22.1 (G. 27/Ha. 8, service III) ; 4 Consp. 15 (Ha. 10, service III) ; 5 Consp. 31.1 (Ha. 11, service III) ; 6 Consp. 4.4 (G, 19/Ha. 4a) ; 7 G. 19b ; 8 Consp. 20.1 (G. 36b/Ha. 5, service IV) ; 9 Consp. 26.1 (G. 20/Ha.15, service IV). |
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Légende | FIG. 5 ‒ Les principaux types de vases à paroi fine recueillis sur les sites d’habitat de Gaule interne au Ier s. av. J.‑C. : 1, 2 gobelet fusiforme Marabini 1 et 2 ; 3 gobelet tonneau à lèvre en bourrelet ; 4 gobelet ovoïde à bord concave Marabini 4 ; 5 bol hémisphérique ; 6 gobelet à panse cylindrique et pied mouluré ; 7 gobelet d’aco. |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/44658/img-6.jpg |
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Légende | FIG. 6 ‒ Autres importations méditerranéennes : 1‑4 lampes (1 : Dressel 2 ; 2 : Dressel 3 ; 3 : Dressel 4 ; 4 : lampe à volutes) ; 5, 6 plat à engobe interne rouge pompéien ; 7 pichet ampuritain ; 8‑12 céramique commune claire (8 : cruche à lèvre en bourrelet ; 12 : cruche à lèvre striée ; 9‑11 : mortiers). |
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Légende | FIG. 8 ‒ Les principaux types d’amphores importées en Gaule interne aux IIe et Ier s. av. J.‑C. : 1 gréco‑italique ; 2 Dressel 1A ; 3 Dressel 1B ; 4 Pascual 1 ; 5 Haltern 70 ; 6 amphore de Rhodes ; 7 Dressel 2/4 ; 8 Dressel 7/11 ; 9 Dressel 20 ; 10 Gauloise 2 ; 11 Gauloise 4. |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/44658/img-8.jpg |
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Légende | FIG. 7 ‒ Chronologie des principales catégories de céramique importée en Gaule aux IIe et Ier s. av. J.‑C. (datations admises pour les contextes gaulois). |
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Légende | FIG. 9 ‒ La chronologie des amphores (datations admises pour les contextes gaulois). |
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Légende | FIG. 10 ‒ Les types de fibules rencontrés dans les sites d’habitat de Gaule interne aux IIe et Ier s. av. J.‑C. Fibules à ressort nu : 1, 2 fibule de schéma La Tène 2 ; 3 fibule de schéma La Tène 2 à ressort multispires (Feugère 1 b1) ; 4 fibule de schéma La Tène 2 à corde interne (Feugère 3a) ; 5 fibule pseudo‑La Tène 2 (Feugère 3b) ; 6 fibule de Nauheim (Feugère 5a) ; 7 fibule à tête couvrante (Feugère 7a) ; 8 fibule à coquille (Feugère 7c) ; 9, 10 fibules filiformes (10 : Feugère 5b) ; 11‑13 fibules à arc mouluré (11 et 12 : Feugère 8a et b). |
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Légende | FIG. 11 ‒ Les types de fibules rencontrés dans les sites d’habitat de Gaule interne aux IIe et Ier s. av. J.‑C. Fibules à griffe, à ressort protégé et à charnière : 1 Kragenfibel (Feugère 10a) ; 2, 3 fibule à ailettes (Feugère 13) ; 4 fibule à disque médian (Feugère 15a) ; 5 fibule Almgren 241 (Feugère 14a) ; 6 fibule Feugère 9a ; 7, 8 fibules à ressort protégé (7 : type de Langton Down, Feugère 14b1b ; 8 : queue‑de‑paon, Feugère 16) ; 9, 10 fibules à charnière (9 : fibule d’Alésia, Feugère 21 ; 10 : fibule d’Audssa, Feugère 22a). |
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Légende | FIG. 12 ‒ Chronologie des fibules. |
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Légende | FIG. 13 ‒ Types de parures en verre recueillies sur les sites d’habitat de Gaule interne aux IIe et Ier s. av. J.‑C. : 1‑5 bracelets en verre côtelé Haevernick 7 et 8 ; 6 bracelet en verre lisse Haevernick 2 ; 7 bracelet en verre lisse Haevernick 3 ; 8‑11 perles Haevernick 22 à 25 ; 12 perle côtelée. |
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Légende | FIG. 14 ‒ Types de parures métalliques recueillies sur les sites d’habitat de Gaule interne aux IIe et Ier s. av. J.‑C. : 1 bracelet tubulaire à décor gravé ; 2 bracelet à double attache en spirale ; 3 chaîne et agrafe de ceinture ; 4‑8 agrafes de ceinture. |
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Légende | FIG. 15 ‒ Les formes de la céramique indigène imitées de céramiques d’importation : 1 assiette Lamboglia 36 ; 2 Lamboglia 27 ; 3 bol Lamboglia 31 ; 4 bol Lamboglia 1 ; 5 assiette à marli Lamboglia 6 ; 6, 7 assiettes à bord redressé Lamboglia 5 ou 5/7 ; 8 vase de type Beuvray ; 9 cruche ; 10 marmite tripode. |
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Légende | FIG. 16 ‒ La céramique indigène, principales formes basses : 1, 2 écuelle à bord rentrant ; 3‑5 écuelle carénée ; 6 bol ; 7, 8 bol caréné. |
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Légende | FIG. 17 ‒ Les zones de diffusion privilégiées de l’écuelle carénée et de l’écuelle à bord rentrant. La trame indique approximativement la zone où les écuelles à bord rentrant dominent en nombre les écuelles carénées (en pointillés : limite nord de la province de Gaule Narbonnaise). |
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Légende | FIG. 18 ‒ La céramique indigène. Les formes hautes : 1 vase à profil caréné ; 2 vase à profil mouluré ; 3 vase élancé ; 4 vase tonnelet ; 5 piédestal bagué. |
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Légende | FIG. 19 ‒ La céramique indigène. Les formes à lèvre moulurée : 1 vase de type Besançon ; 2 vase haut sans col et lèvre en bourrelet ; 3 écuelle ; 4 vase de stockage. |
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Légende | FIG. 20 ‒ La céramique indigène. Les principaux types de décors : 1, 2 décor incisé ponctuel ; 3 décor incisé linéaire ; 4, 5 décor lissé ; 6 lignes concentriques lissées et décor ondé au peigne ; 7, 8 moulurations ; 9 décor ondé au peigne ; 10, 11 décor estampé ; 12 décor oculé ; 13, 14 décor à la molette. |
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Légende | FIG. 21 ‒ La céramique peinte : 1, 4 vases à décor géométrique ; 2 bol caréné ; 3 décor zoomorphe ; 5 bol « de Roanne ». |
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Légende | FIG. 22 ‒ La céramique « gallo‑belge » ; 1, 2 assiettes ; 3 urne ; 4 vase‑bobine ou « diabolo » ; 5 bol caréné. |
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Légende | FIG. 23 ‒ La représentation des alliages monétaires dans les sites d’habitat. |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/44658/img-24.jpg |
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Légende | FIG. 24 ‒ Les monnaies de Marseille en Gaule interne d’après Nash 1978, Hiernard 1985, avec additions : 1 Pommiers (Aisne) ; 2 Jersey 6 (île de Jersey), 3 Charbuy (Yonne) ; 4 Vernon (Vienne) ; 5 Châteaumeillant (Cher) ; 6 Plouguerneau (Finistère) ; 7 Yssandon, Le Puy du Chalard (Corrèze) ; 8 Saint‑Marcel (Indre) ; 9 Bénévent‑L’abbaye (Creuse) ; 10 Roanne (Loire) (Gentric, Poncet 1985) ; 11 Les Martres‑de‑Veyre (Puy‑de‑Dôme) ; 12 Vendœuil‑Caply (Somme) ; 13 Le Mont‑Beuvray (Saône‑et‑Loire) ; 14 Allonnes (Sarthe) ; 15 Bourg (Ain) ; 16 Aiise‑Sainte‑Reine (Côte‑d’or) ; 17 Goux (Jura) ; 18 Coulommiers (Seine‑et‑Marne) ; 19 Poitiers (Vienne) ; 20 Millau (Aveyron) ; 21 Sainte‑Eulalie‑de‑Cernon (Aveyron) ; 22 Chambles (Loire) (Preynat 1983b) ; 23 La Roche‑Blanche (Puy‑de‑Dôme) ; 24 Naintré (Vienne), 25 Mâlain (Côte‑d’or) (Fischer 1985b) ; 26 Varennes‑lès‑Mâcon (Saône‑et‑Loire) ; 27 Charraix (Haute‑Loire) (Simonnet 1982) ; 28 Auinat (Puy‑de‑Dôme) (Nash, Collis 1983) ; 29 Épiais‑Rhus (Oise) (Lardy et al. 1987) ; 30 Berne‑Tiefenau (Suisse) ; 31 La Tène (Suisse) ; 32 Feurs (Loire) (Vaginay, Guichard 1988) ; 33 Tournus (Saône‑et‑Loire) (Vaussanvin 1987) ; 34 Saint‑Jean‑de‑Trolimon (Finistère) ; 35 Paimpont (Ille‑et‑Vilaine) ; 36 près de la Mayenne (Mayenne) ; 37 près de Verneuil‑sur‑Avre (Eure) ; 38 Pitres (Eure) ; 39 Orléans (Loiret) ; 40 Auxerre (Yonne) ; 41 Troyes (Aube) ; 42 près de Châlon‑sur‑Marne (Marne) ; 43 Le Titelberg (Weiller 1977) ; 44 près de Neustadt (Allemagne) ; 45 Bullet (Suisse) ; 46 Vevey (Suisse) ; 47 Genève (Suisse) ; 48 Grand‑Saint‑Bernard ; 49 Songieu (Ain) ; 50 Levroux (Indre) ; 51 Morthomier (Cher) ; 52 Bourges (Cher) ; 53 Bridiers (Creuse) ; 54 Mouliets‑et‑Villemartin (Gironde) (Boudet 1987b) ; 55 La Roche‑sur‑Yon (Vendée) ; 56 Rouillac (Charente) ; 57 Rouffignac (Dordogne) ; 58 Yssandon (Corrèze) ; 59 Le Moustier Ventadour (Corrèze) ; 60 Bordeaux (Gironde) ; 61 La Réole (Gironde) ; 62 Lectoure (Gers) ; 63 Albias (Tarn‑et‑Garonne) ; 64 près de Rodez (Aveyron) ; 65 Saint‑Rome‑de‑Cernon (Aveyron) ; 66 La Chaussée‑Tirancourt (Somme) (Brunaux et al. 1990). |
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