Annexe

Géographie du four de potier à barres d’enfournement

Jacques Thiriot

p. 344‑371


Texte intégral

1 Introduction

1La découverte assez inattendue d’un four à barres du xiiie s. à Marseille sert de prétexte à cette recherche1 Depuis quelques années, en Espagne (Balaguer, Murcia, Zaragoza et Priego de Córdoba récemment), sont apparus des fours jusqu’alors inconnus en Méditerranée occidentale. D’influence islamique, ils sont équipés d’étagères de barres d’argile cuite fichées à demeure dans la paroi portant les poteries à cuire. Faire l’inventaire de ces structures essentiellement dans le monde méditerranéen, découvertes connues et publiées pour la plupart, permet de mieux comprendre les découvertes récentes en Occident (structure et fonctionnement)2. Les barres retrouvées en de nombreux points sont‑elles révélatrices d’un type de four particulier ? Le recensement de tous les lieux où elles sont présentes, leur association avec d’éventuels fours et les données de l’ethnoarchéologie peuvent aider à y répondre3. L’étude sur la longue durée (du xe s. à nos jours) dans une aire géographique vaste (de Samarcande à l’Occident) pourrait déboucher sur une cartographie chronologique et des hypothèses d’évolution, si les découvertes étaient plus nombreuses et les zones d’ombre moins vastes. Les hypothèses de reconstitution et de fonctionnement renouvellent la question. Enfin, les types de céramiques associés à ces fours et leur datation, objet essentiel de l’existence de ces ateliers, peuvent permettre de savoir si cette technique particulière de cuisson est liée ou non à une production donnée.

Un inventaire incomplet

2Cette première cartographie, après une brève présentation à Alicante, est le reflet d’une connaissance fortement déséquilibrée suivant les pays de la Méditerranée (fig. 290). Le déséquilibre lié à une activité archéologique plus ou moins développée ou à la présence locale de chercheurs ou d’équipes est accentué par le développement de l’archéologie d’urgence en milieu urbain. Le cas de certaines villes d’Espagne, où l’archéologie urbaine liée aux grands travaux est aux marges du cœur historique de la cité, illustre bien ce dernier point. À l’opposé, l’archéologie des grands sites au Maghreb se fait au détriment de la recherche sur les ateliers producteurs. Faut‑il encore souligner ce phénomène du hasard étroitement lié à la recherche archéologique qui rend assez aléatoire un essai de synthèse ? Notre connaissance très variable des découvertes recouvre plusieurs aspects. Que sait‑on des découvertes au Maghreb ou dans les pays de l’Est ? Que sait‑on des découvertes de barres sur des sites d’habitat remaniant des dépotoirs de potiers ou non ? Sans parler d’un certain manque d’intérêt pour l’étude de l’artisanat, ou l’oubli de signaler la découverte d’un vestige construit, ou le manque d’interprétation du matériel : les barres sont souvent passées sous silence par les archéologues qui ne connaissent pas cet objet, effectivement de peu d’importance pour les études courantes, mais dont la présence peut être révélatrice d’un type particulier de chargement de four. Souvent, l’étude se limite au four et à un survol très rapide du matériel qui y est découvert en ignorant l’environnement ou l’interprétation de la stratigraphie de remplissage ; presque toujours, l’analyse partielle du matériel rend assez peu fiable une interprétation des résultats et une réinterprétation des conclusions publiées. Les publications, souvent locales et parfois anciennes, sont difficilement consultables à distance, sans parler des difficultés liées à la langue. À quelques rares exceptions près, les publications anciennes pèchent par leur manque de détails vu le peu d’intérêt que l’on portait à ce type de vestiges.

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FIG. 290 – Localisation des découvertes.

J.T./CNRS del.

3La confrontation de cette information avec ce que l’on sait des zones de productions de céramiques (état des connaissances là aussi très déséquilibré) peut nous amener à poser quelques questions. Mais est‑il bien pertinent de comparer les cartes quand, par exemple, les zones connues de production en Espagne ne sont pas toutes répertoriées ou bien quand en Italie ou au Maghreb les quelques centres connus n’ont pas, dans l’ensemble, fait l’objet de publication définitive ? Dans ces conditions, il semble vain de vouloir pousser trop loin l’interprétation de ce premier état de la question. Tout au plus, quelques hypothèses d’évolution peuvent être formulées.

2 Découvertes archéologiques occidentales

2.1 Espagne

Almeria

4 Pechina

5Une collection de céramiques issues de ramassages sporadiques, acquise par le musée d’Almería, comporte en particulier un birlos digité de petites dimensions4 (longueur : 10,3 cm ; diamètre : 2 cm) que l’auteur compare aux barres de plus grand module utilisées dans les fours de potiers (Ochotorena 1953 : 130, fig. 74.2). Il émet l’hypothèse d’une montre de température. Situé à environ 10 km au nord d’Almería sur la commune de Pechina, le site de Llano de Benitez‑Benahadux est à nouveau étudié par D. Duda en 1969‑1970 (Duda 1971 : 267‑268, Tafel 69). Des travaux agricoles ont permis de localiser un atelier d’époque califale5 : présence de vestiges de fours, de déchets de céramiques (céramiques non glaçurées, poteries peintes à l’oxyde de fer, céramiques glaçurées et émaillées), de matériel (rondeaux, pernettes, barres digitées), de fragments de creusets vitrifiés pouvant servir à la préparation de la glaçure.

6La fouille, à partir de 1985, d’une zone artisanale de verriers et de potiers d’époque califale du site de Bayyana (Acién Almansa et al. 1990 : 158 ; Acién Almansa 1995 : 21‑22) a fait apparaître un four conservé dans ses parties basses et « divers outils de potiers » ; aucune précision n’est apportée quant à leur nature6. La publication récente du matériel d’un testar installé dans le four confirme la présence de barres digitées recourbées, grandes et petites, et de pernettes (Castillo Galdeano, Martinez Rodriguez 1993 : 99, Lám. XII). Un vase tripode particulier, avec supports intérieurs (Castillo Galdeano, Martinez Rodriguez 1993 : Lâm. XV. 3), pourrait être un sublimador utilisé en alchimie selon J. Zozaya.

7Calle Mann

8Un dépotoir de potier de la fin du xe‑début du xie s., fouillé en 1992, contenait, outre les productions d’un atelier califal, des éléments nécessaires à l’enfournement : rollos o humares digités, pernettes et formes en S (Cantero Sosa, Egea Gonzalez 1994 : 815, Lâm IV).

Badajoz

9Cuartel de la Bomba

10La fouille en 1911 d’un tester a fait apparaître des fragments de barres d’argile cuite cylindriques ou coniques du début du xiiie s. Ces largueros o barras sont placés sur le four pour poser dessus les céramiques à cuire (Valdés 1985 : 313, note 228 citant Fita 1912 : 161‑162).

11Testar de la Puerta del Pilar

12La fouille en 1979 d’un dépotoir a livré un grand nombre de barres husos et de pernettes de la fin du xe‑début du xie s. (Valdés 1985 : 313, 334).

Balaguer

13J. Giralt Balaguero signale au Plà d’Almatà dès 1983 (Giralt Balaguero 1987 : 34), bien avant la fouille des fours, la présence dans un dépotoir de la seconde moitié du xie s. de barras cilíndricas, atifles y soleras7. Les deux premiers types d’objets portent des traces de glaçure, les barres sont pincées. Les soleras n’ont pas de réplique dans les gisements andalous contemporains8.

14Le site, visité en décembre 19909, montrait, dans des structures bâties très arasées, trois fours de types différents : deux à sole perforée (dont un avec pilier central), l’autre à barres (Giralt Balaguero 1995)10. Le four à barres (fig. 291), construit apparemment dans la fosse d’accès du four précédent (à sole), n’est conservé que sur environ 0,50 m de hauteur pour un diamètre d’environ 1,60 m. Le foyer excavé directement dans le sous‑sol est entouré d’une banquette très étroite en fer à cheval, interrompue à l’emplacement de la porte. Au‑dessus, la paroi verticale cylindrique n’est conservée que sur 20 cm au maximum jusqu’au niveau du sol ; les superstructures sont difficiles à définir. Creusée dans le substrat et enduite d’argile, la paroi, sans doute maintes fois réparée, devait toutefois être construite au‑dessus du sol avec des adobes à l’intérieur d’une enveloppe de pierres. Correspondant à la banquette, une série de trous assez serrés dans la paroi verticale était destinée à recevoir le premier rang de barres. Un nombre important de grands bassins (diamètre moyen : 60 cm) aux parois très épaisses (gibrell o alcadafe) ont été produits dans cet atelier. Ce sont des pièces généralement très cuites, présentant parfois des traces de surcuisson.

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FIG. 291 – Le four à barres de Balaguer.

cl. J.T./CNRS

Dénia

15Une information orale témoigne de la découverte fortuite ancienne d’un four où des barres étaient disposées comme une grille dans un site proche de la Calle Teulada.

16Avenida Montgó/Calle Teulada

17En 1985, les fouilles d’un atelier islamique daté du xiie‑début du xiiie s. ont révélé un certain nombre d’ustensiles (objets présentés au Museo del Castell de Denia) servant à l’enfournement –pernettes, éléments en S et barres digitées au bout– sans relation constatée avec les fours (Gisbert Santonja 1990 : 76 ; Gisbert Santonja 1995 : 23‑24). Les onze fours découverts n’ont apparemment pas de rapport direct avec des fours à barres (Gisbert Santonja, Azuar Ruiz 1991) ; toutefois, l’enfournement a pu y être réalisé en échappade à l’aide de barres, mais aucune preuve archéologique sur cette fouille ne vient à l’appui de cette thèse.

18Cimetière municipal

19En 1991, un four du xiie s., semblable à ceux de la Calle Teulada, a livré des pernettes et des barres sans aucun lien étroit avec la structure.

Huesca

20Parmi les nombreux vestiges mis au jour dans l’église Santa Maria « in foris », une structure en pierre avec des restes de cendres à l’intérieur avait été interprétée comme pouvant appartenir au foyer ou à la bouche à feu d’un four (Murillo Costa, Pesqué Lecina 1992 : 162‑163). L’idée d’un four à cet endroit semble abandonnée après analyse, mais la présence de nombreux déchets de cuisson de céramiques (cuisson oxydante, glaçure verte ou melado), datés de la fin du xe‑début du xie s., et de barres cylindriques lisses confirme l’existence dans cette zone d’un atelier de potiers11

Lleida

21Testare de l’église Sant Marti

22La fouille, réalisée en 1982, a fait apparaître les restes ténus d’un atelier de potiers (bassins de décantation, caniveaux et testares) dans une zone d’artisanat de la tuile et de la poterie attestée par les textes12 et abandonnée dès la seconde moitié du xiie s., au moment de la constitution d’une nécropole chrétienne. Les rebuts de cet atelier renferment, outre des ratés de cuisson, de nombreuses pernettes et barres d’enfournement (rolls o barres) digitées ou non (Gallart Fernandez et al. 1991 : 28‑29, fig. p. 57, nos 177‑181). Ces vestiges sont datés de la fin du xie à la première moitié du xiie s.

Lorca

23Calle Padre Carlén/Calle Padre Garcia

24Apparition de pernettes et barres d’enfournement lors de la mise en place d’un boîtier d’électricité (Martinez Rodriguez, Montera Fenollos 1993 : 456).

25Calle Galdo

26En 1989, un dépotoir de potier islamique de la fin du xiie‑première moitié du xiiie s. a livré des pernettes et barres d’enfournement (Martinez Rodriguez, Montera Fenollos 1993 : 466, fig. 13, Lám. 3). Elles portent des traces de glaçure melado et verte qui montrent leur utilisation après fracture.

Málaga (Bezmiliana)

27En 1981, la fouille d’un atelier des xexie s. a fait apparaître trois fours dont les vestiges ne montrent pas de rapport évident avec les quelques rollos découverts (Acién Almansa 1990 : 25).

Manises

28Dans leur article passant en revue les différents aspects des techniques de fabrication à Manises entre le xive et le xvie s., les auteurs citent, malheureusement en dehors de références précises, l’emploi de llongos et de pernettes ou ferrets13, sans oublier ces curieuses pièces mamelleta apparaissant au xvies., pour l’enfournement des poteries à cuire dans le four (Coll Conesa, Perez Camps 1994 : 884).

Morella (Castellón)

29Gonzalez Marti signale l’utilisation de ferrançons de enfornar escudelles dans un inventaire du 10 avril 1388 (Gonzalez Marti 1944‑1952 : 36, note 22)14. L’auteur les associe aux morells, cylindres d’argile de 8 cm de diamètre et 40 cm de long. Ce terme est peut‑être à rapprocher du mot ferret qui signifie triangle ; ce dernier étant synonyme de pernette à Manises (Coll Conesa, Perez Camps 1994 : 884). La signification exacte de ferrançon reste à définir15.

Murcia

30Calle San Antolin

31En 1964, un petit four ovale et une série de six cuves cylindriques pour le vernis (trempage) du xiiie s. ont été trouvés près de l’église de San Antolín. Dans les mêmes niveaux, outre la céramique, on a recueilli des pernettes et chorizos de barro (Jorge Aragoneses 1956 : 35, 36).

32Cementerio de San Nicolas

33Une série de pernettes et surtout des fragments de barres d’enfournement (« rollo « ou barra de ahornar) ont été découverts dans les couches correspondant à un dépotoir (Navarro Palazon 1986a : 162‑163, fig. 348‑351 ; Muñoz López 1995b : 24‑25). Ces barres de différents diamètres (2,3 et 3,8 cm pour les deux exemplaires présentés) sont digitées sur la plus grande partie de l’arête utile (fig. 292a). Une autre (« clavo » de ahornar) est de très petites dimensions (longueur : 8,4 cm ; diamètre : 2,5 cm) (fig. 292b). Les barres et pernettes sont datées par association aux céramiques produites et aux ratés de cuisson (Navarro Palazon 1986b : fig. 26‑31 ; Navarro Palazon 1990 : vertes et brunes, cuerda seca parcial, peinture blanche sur engobe rouge) des xe‑première moitié du xie s. Dans les niveaux antérieurs à la nécropole, un fond de four est difficile à restituer vu sa très faible hauteur conservée.

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FIG. 292 Murcia, Cementerio San Nicolas : a barre d’enfournement (Navarro 1986a : 162, no 349) ; b clavos d’enfournement (Navarro 1986a : 163, no 351).

cl. J.T./CNRS

34Calle San Nicolas, no 6 / Calle Riquelme

35Ce solar est situé en face du cimetière Saint Nicolas cité plus haut. Des pernettes et barres d’enfournement proviennent d’une couche datable du xiiie s. (Gallego Gallardo 1993 : 354).

36Calle Alfareros, no 3

37La fouille de 1989 (Muñoz López 1996)16 d’un atelier moderne installé sur des niveaux médiévaux a montré la présence de barres d’enfournement et de pernettes avec des pièces défectueuses d’époque chrétienne (niveau IV : xiiiexive s.).

38Calle Pedro de la Flor

39La fouille de 1990 (Muñoz López 1993b ; Muñoz Lôpez 1995b : 27) a permis d’étudier les restes d’un atelier avec deux fours successifs ne présentant pas de trace dans les parois pour la fixation de barres, malgré leur présence dans différentes couches datant de la seconde moitié du xe s. au xiie s.

40Calle La Manga

41La fouille en 199117 d’un atelier assez faiblement conservé a permis la découverte d’un grand four circulaire à sole, de la seconde moitié du xiiie‑début du xive s. Un grand testar correspondant à la première période de l’atelier islamique renfermait, outre des céramiques et des biscuits, des barres et pernettes (Muñoz López 1995a)18 datées des xiie‑xiiie s.

42Calle Cortès

43La fouille d’un atelier en 1992 a permis de dégager un four installé dans un dépotoir antérieur où apparaissent des barres et des pernettes (Muñoz López 1993a : 182 ; Muñoz López 1995b : 26‑27)19. Le petit four, qui n’a pas de rapport avec l’usage des barres, est daté du xie s.

44Calle Ceferino, no 4 (fouille inédite)

45La fouille, dirigée en 1993 par F. Muñoz López et J. Navarro Palazon, montre, immédiatement sous un niveau d’habitation islamique, les restes assez ténus d’un atelier de potiers et d’un espace ouvert attenant où ont pu exister cinq fours, dont au moins deux à barres d’enfournement et un avec sole, datés de la fin du xexie s. (Muñoz Lopez 1995b : 25‑26). Deux fours sont examinés ici en raison de leur bon état de conservation.

46Le plus grand (diamètre 2,15 m pour une hauteur conservée de 1,80 m) est taillé très profondément dans des niveaux d’alluvions sableuses, d’occupations et dans des fosses antérieures ; une coupe sur la structure montre que la fosse est directement chemisée d’argile sur toute la hauteur. La superstructure au‑dessus du sol devait être en adobes. Le sol d’occupation de l’atelier semble être le niveau d’arasement du four. Celui‑ci est cylindrique et muni d’une banquette d’environ 0,70 m de hauteur pour 0,38 m de largeur (largeur de la banquette du four 1b) rechargée à maintes reprises (fig. 293). Cette banquette est interrompue au droit de la porte. La porte est conservée presque totalement à une hauteur minimale de 1,40‑1,50 m pour une largeur à la base de 0,90 m ; elle a été rechargée latéralement quatre fois et est de forme assez pointue. À la base de la paroi cylindrique et au‑dessus de la banquette, une recharge d’argile annule en partie la surface supérieure de cette banquette tout en recouvrant partiellement la première rangée de trous de barres conservée. Une rangée inférieure correspondant à la surface utile de la banquette peut avoir existé : elle a totalement disparu lors de la réparation. La paroi décrite est le résultat du rechemisage total d’un premier four la dont il subsiste environ 10 cm de hauteur de paroi en dessous de l’arasement. D’un diamètre de 2,35 m, la première paroi en argile très peu cuite (adobes seulement au‑dessus du sol) est percée d’une rangée de trous de barres. La deuxième paroi, d’un diamètre de 2,15 m, possède encore trois rangées de trous de barres d’un diamètre de 4,5 à 5 cm pour un entraxe variable (9, 10, 10,5 et 11 cm) et un espacement vertical de 34 à 40 cm. Un tracé sur l’argile est effectué avant le percement des trous. En avant de la porte, le fond de la fosse d’accès a servi de foyer : la paroi est cuite sur plus de 0,60 m en avant du four.

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FIG. 293 – Le grand four à barres de la calle Ceferino à Murcia.

47Le petit four circulaire (diamètre de 1,70 m pour une hauteur de 1,30 m conservée) est construit de la même manière. Le niveau extérieur est approximativement le sol d’occupation de l’atelier. La porte (largeur 0,75 m au maximum) a un sommet arrondi un tout petit peu plus bas que la banquette. Cette dernière, d’une hauteur de 1,10 m pour une largeur de 0,26 m, a été réparée maintes fois. Elle s’interrompt à la porte. La paroi de la salle de cuisson, cuite grise, conservée sur 15 à 20 cm de hauteur, porte la trace de deux rangs de trous de barres : une rangée au ras de la banquette (diamètre de 3 à 3,5 cm, entraxe des trous : 13 à 17 cm) ; une autre rangée à environ 6 cm au‑dessus montre les mêmes trous (diamètre : 2,5 à 3 cm, entraxe des trous : 11 à 12 cm).

48L’effondrement du cintre de la porte a entraîné un rechemisage de la paroi avec un tracé rectiligne de préparation d’une ligne de trous de barres. Le seul trou conservé ici est d’un diamètre plus grand que les autres (diamètre : 4 cm). L’accès au foyer est une fosse assez profonde. La paroi cuite, réparée plusieurs fois en avant de la porte, semble liée à la présence du foyer (hauteur de voûtement sur le foyer : environ 0,90 m).

Palma de Mallorca

49Casa Desbrull

50Une série de pernettes, de pièces en « S » (pour quelle utilisation ?) et de barres (fig. 294) sont mêlés à des céramiques à cuisson défectueuse dans un dépotoir d’atelier du xie s. (Rossello‑Bordoy 1984). Les barres, digitées sur un côté, portent des traces de glaçure. D’après l’auteur, elles servent à séparer les piles de poteries les unes des autres. Celui‑ci précise (Rossello‑Bordoy, Camps 1973 : 141, fig. 5) que « la partie inférieure, plane, pourrait être introduite dans la base du four... la coloration entre la base et le reste de la pièce est différente ». Les potiers utilisent actuellement ce type de barres (Rossello‑Bordoy 1978 : 130).

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FIG. 294 – Instruments d’enfournement, Palma de Mallorca (Rossello‑Bordoy, Camps 1973 : 141).

Paterna

51Au Testar del Moli fouillé depuis 1982 (Amigues, Mesquida Garcia 1995 : 27‑ 29), un four de plan rectangulaire du xive s. a été dégagé. Comparable en tous points au four actuel du dernier artisan traditionnel de Paterna ou à ceux de Manises, ce four à tirage vertical est composé d’un étage bas de cuisson, légèrement surélevé (table) par rapport au foyer, et d’un étage supérieur de cuisson. Les auteurs le comparent aux fours marocains (Bel 1914), tunisiens (Lisse, Louis 1954‑1955), égyptiens (Golvin et al. 1982). Dans les remblais entourant le four ont été découverts de nombreuses pernettes et llongos ou barres (Amigues, Mesquida Garcia 1987 : 19). Parmi les rodells, les llongos et les atifles utilisés comme outils par les potiers, les barres sont très rapidement décrites : elles sont lisses « à la différence de celles de l’époque musulmane qui comportaient des pincements » ; une seule d’entre elles porte une marque incisée en forme de L (Amigues, Mesquida Garcia 1987 : 75, fig. 36). Gonzalez Marti indique que des morells (barres d’enfournement) avec des marques estampillées se trouvent dans les dépotoirs de Paterna (Gonzalez Marti 1944 : 36, note 21)20. Aucun lien étroit n’existe entre ces barres et la structure du four découvert ; il faut sans doute envisager l’utilisation des barres comme à Teruel récemment.

52Des fragments de barres ont été trouvés lors de la fouille du four 3 du Testar del Moli en 1996 par M. Mesquida Garcia (découverte inédite). Les barres sans pincement d’un diamètre légèrement supérieur à 4 cm ont les bouts arrondis. Quelques rares traces d’émail (dont une au bleu de cobalt), diamétralement opposées, montrent que les barres avaient une position changeante sans doute en rapport avec la pratique récente de Teruel (une seule extrémité présente la trace d’un éventuel scellement).

53Associées à des pernettes, les barres récemment découvertes par M. Mesquida Garcia (1997) dans un solar de la Galle de los Huertos dans les ateliers du xiiie s. ayant produit entre autre de la loza dorada sont légèrement différentes (découverte inédite). Plusieurs barres entières ont une longueur proche de 40 cm pour un diamètre variable, d’une extrémité à l’autre, de 2,2 à 4 cm. Leurs extrémités sont plates à la suite d’un « tassage » sur la surface de travail. Quelques traces d’émail en position opposée semblent confirmer l’hypothèse d’emploi reconnue précédemment dans ce lieu.

Priego de Córdoba

54Au 20‑24 de la Galle San Marcos à Priego de Córdoba a été fouillé partiellement en mars 1994 un atelier de potier almohade doté d’un four à barres d’enfournement. D’après la courte information (Carmona Avila 1994a : 60‑61 ; Carmona Avila 1995 : 29) et surtout le rapport de fouille21 (Carmona Avila 1994b), il est possible de décrire cette structure datable de la fin du xiie s. à 1226. Creusé dans le substrat et enduit d’argile sur un chemisage de terre argileuse d’environ 20 cm d’épaisseur, le four proprement dit est un cylindre de 2,10 m de diamètre muni, à la base, d’une banquette (32 cm de hauteur pour 22 cm de largeur) interrompue par le foyer qui se développe à l’extérieur (1,46 m de longueur pour 0,74 m de large). À partir du sommet de la banquette la paroi est percée de trois rangées de trous (séparées d’environ 40 cm) pour y ficher des barres (diamètre 4,5 à 5 cm) dont on a retrouvé un grand nombre, en tas, à la base de la structure abandonnée (fig. 295). L’auteur pense qu’il existait un quatrième rang de barres ; cependant la fouille de la Galle San Pablo de Zaragoza nous incite à restituer une élévation plus importante. La découverte de fragments de voûte avec des trous de cheminée juste au‑dessus de la dernière rangée de barres entraîne l’auteur à restituer un voûtement total sur ce four. Le voûtement était‑il total ou doit‑on voir dans ces fragments le rétrécissement de diamètre constaté à Zaragoza (Calle San Pablo), avec, ici, la présence de cheminées22 ? La production de cet atelier est apparemment de la céramique décorée à l’oxyde de fer, de la cuerda seca, du vert et brun, céramique glaçurée, estampillée.

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FIG. 295 – Empilement de barres dans le four de Priego de Córdoba (Carmona 1994a : 60).

Sevilla

55Une intéressante communication au colloque d’Huesca en 1985 (Martín Gomez, Cliva Alonso 1986) cherche à démontrer la continuité d’utilisation des éléments d’enfournement en prenant des points de comparaison dans le monde méditerranéen au sens large et de l’époque antique à la colonisation du Mexique. Le cheminement, courageux, à partir de l’artisanat antique est à suivre avec un esprit critique. Des barres avec digitations et traces de glaçure melado d’époque califale (xexiie s.) ont été découvertes en de nombreux points de la ville (Martín Gomez, Cliva Alonso 1986 : 496)23 : Avenida de la Constitución, Calle San Gregorio, Cuesta del Rosario, Puerta de Jerez et Jardines de Murillo. À Triana, des barres sont apparues lors de la destruction récente de fours établis à cet endroit à partir du xiie s.

56Pour les auteurs, les barres associées aux pernettes évoquent la technique d’enfournement en échappade, comme G. Rossello‑Bordoy l’évoque pour Mallorca, que l’on peut sans doute rapprocher de la pratique récente de Teruel.

Toledo

57Des barres sont signalées dès 1983 (Aguado Villalba 1983 : 80). La localisation du dépotoir étudié n’est pas donnée par l’auteur : extérieur au rempart, à la limite de la juiverie du xive s. Ce dépotoir largement remanié présente en grande quantité, outre de nombreux tessons et ratés de cuisson, plusieurs sortes d’outils d’enfournement (Aguado Villalba 1986 : 128). Plusieurs années après la découverte du dépotoir, une fouille, réalisée en 1985 par J. Aguado Villalba et F. Valdés près du pont de San Martín, a confirmé les analyses présentées au colloque de Tolède en 1981 (Aguado Villalba et al. 1990). Ce dépotoir correspondrait à un ou plusieurs ateliers installés sur le haut de la colline dans la partie occidentale plus ou moins abandonnée de la ville. Le rejet s’effectuait sur la pente très escarpée du bord du Taje, à un endroit semblant dépourvu de murailles. On y a retrouvé :
– des pernettes (plus de 40 kg !) de toutes dimensions (3 à 25 cm) ;
– des barres rollos (plusieurs milliers de fragments d’un diamètre de 4 cm) dont beaucoup présentent des digitations et des traces de glaçure de différentes natures (verte, melado, morado) ou d’engobe (sic) blanc. L’engobe ne pouvant couler à la cuisson, ne faut‑il pas penser dans ce cas à la présence de glaçure stannifère qui, dégradée ou mal dosée et mal cuite, apparaît mate ?
– des davos (près de 600) digités à l’extrémité pointue recourbée. Selon l’auteur, ces davos sont utilisés par trois pour séparer les plats à cuire (en fait, la découverte des fours de Zaragoza en 1987 montre certainement le bon usage) ;
– des cajas o gacetas cylindriques en faible quantité réutilisées dans les maçonneries.

58Les formes rencontrées dans ce dépotoir concernent tous les types : non glaçurées (décorées ou non d’incisions ou peintes avec ou sans engobe), à glaçure verte avec ou sans décor estampé, à l’antimoine, melado avec brun de manganèse, « engobe » blanc seul ou décoré en vert et brun, ou cuerda seca de différents types. La datation avancée est le xie s., mais les ateliers ont sans doute existé à cet endroit pendant une très longue période.

Valencia

59Calle Sagunto, no 175

60Dans son ouvrage collectif sur la céramique islamique à Valencia, A. Bazzana répertorie un certain nombre de pernettes et de barres avec impression de doigts provenant de cette rue (Bazzana et al. 1983 : 83‑84, 149, 177) sans autre indication. Il précise leur utilisation possible sans donner de référence ni de datation (Bazzana 1983 : 58) : « los soportes hallados en el subsuelo valenciano, atifles y « llongos » o « flautas de alfarero » permiten escalonar las cerámicas, sobre todo las piezas barnizadas, de forma que no se peguen a otras [...] Contrariamente el enhornado en cobijas no parece estar atestiguado para la época musulmana. »

61Calle Sagunto, no 127

62Un atelier de potiers (seconde moitié du xiie‑début du xiiie s.) fouillé en 1994 a permis d’étudier sept fours (Ruiz Val, Garcia Villanueva 1995 : 30)24. Malgré la présence de barres d’enfournement pincées, de pernettes et d’éléments en S, les fours, insuffisamment conservés, ne présentent pas de traces pour la mise en place des barres dans d’éventuels trous sur les parois.

Zaragoza

63Avenida César Augusto/Gómez Ulla

64Deux fours d’époques assez éloignées (xe‑xie s. et xvie s.) y ont été découverts en 1985. Seul le four datable des xexe s. (Mostalac Carrillo 1986 : 54‑55 ; Mostalac Carrillo 1990 : 68‑70, fig. 3a et b) nous intéresse ici. Creusé directement dans le gravier naturel, il est de plan rectangulaire à l’extérieur (2,44 x 2,67 m) et circulaire à l’intérieur (1,40 à 1,72 m de diamètre pour 1,10 m de haut). La paroi, d’une épaisseur de 0,35 m, est construite avec un mélange d’argile, de graviers et tapial jusqu’à 1 m de haut, puis à l’aide d’adobes et briques cuites retaillées liées à l’argile (fig. 296‑297). Dans la chambre unique de combustion et de cuisson, une banquette, de 0,30 m de large et de 0,46 à 0,51 m de haut, commence sur le sol naturel ; elle est interrompue au droit de la « cheminée » ouverte sur l’un des grands côtés. Deux rangs de tubes pour introduire des barres sont conservés (un de ces tubes a été découvert en fouille muni d’une barre, fig. 297). Les tubes de plus grand diamètre sont disposés en bas ; leurs dimensions diminuent en montant. Dans certaines zones, les barres lisses ou digitées sont fichées dans des trous effectués directement dans les adobes. L’auteur pense que la porte du foyer, presque diamétralement opposée à la « cheminée », a été détruite pour mettre en place le four du xvie s. Cette interprétation, si elle pouvait être vérifiée, ferait de cette structure un cas unique fort intéressant : en effet, un orifice opposé à la porte du foyer stimulerait le tirage dans la partie inférieure de la charge (cfinfra les interprétations concernant le fonctionnement de ces fours).

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FIG. 296 Vue du four de Zaragoza, avenida C. Augusto (Mostalac 1986 : 54).

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FIG. 297 Instruments d’enfournement, Zaragoza, avenida C. Augusto (Mostalac 1986 : 55).

65Toutefois, la « cheminée », qui a une ouverture très réduite à la base du four, s’évase vers l’intérieur. La paroi opposée à la « cheminée » étant détruite, il semble difficile de supposer l’existence de la porte de chargement de ce four à cet endroit ; il paraît plus logique de situer la porte du foyer à l’emplacement de ladite « cheminée », car à cet endroit la banquette est largement interrompue par une ouverture très évasée ayant apparemment la hauteur de la banquette pour une largeur plus grande encore (fig. 296). Cette hypothèse de porte du foyer au nord, porte basse, induit l’existence possible, mais non obligatoire, d’une porte de chargement qu’il est difficile de restituer.

66Enfin, à partir des vestiges conservés, l’auteur propose en 1987 la restitution (fig. 298) d’un voûtement presque total sur ce petit four (Mostalac Carrillo 1990 ; fig. 3a) avec orifice sommital plus ou moins large (trou d’homme ?) à l’image semble‑t‑il des fours récents de Teruel. Cette couverture semble différente de celle des fours découverts de 1987.

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FIG. 298 – Reconstitution du four de l’avenida César Augusto à Zaragoza (Mostalac 1990 : fig. 3a).

67Calle San Pablo, nos 93‑104

68La fouille en 1987 dans la rue et le solar correspondant25 a fait apparaître une dizaine de fours datés du xie s. : six sont de plan rectangulaire ou ovale avec sole, un autre, de petites dimensions, est interprété comme étant un four à essais et trois autres sont à barres (Mostalac Carrillo 1990 : 63 ; Zaragoza 1991 : 44 ; Mostalac Carrillo 1995 : 31‑32)26.

69L’un des fours à barres est conservé sur presque toute son élévation (fig. 299). Le foyer, creusé dans le substrat géologique alluvial de galets, est bordé de plusieurs gradins, deux à trois, qui portent le diamètre à environ 2,60 m. Ces gradins sont interrompus à l’emplacement de la haute porte qui semble commune au foyer et au chargement/déchargement des poteries. Les marches semblent avoir été construites en cours de fonctionnement du four car la paroi en arrière paraît cuite. À chaque palier correspond une rangée de trous pour de grosses barres s’appuyant sur celui‑ci afin de caler sans doute les plus grosses charges de poteries. La paroi cylindrique est percée régulièrement de rangées de trous pour de grosses barres et parfois de rangées, simples ou doubles, pour des petites barres ou clavos dans l’espace entre deux rangées de grandes barres. Des crochets ganchos y étaient également utilisés. La partie supérieure de la paroi, conservée sur près de 3 m de haut, présente un rétrécissement du diamètre (2,24 m) sur quelques dizaines de centimètres de hauteur où des rangées de trous de barres sont également présentes. La paroi construite en briques crues est ensuite enduite d’argile et régulièrement entretenue. Le four a donc l’aspect d’une bouteille à gros goulot hérissée de barres. Du matériel a été trouvé dans les fours : cuerda seca parcial et total, céramique engobée rouge, céramique à décor vert et brun, melado...

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FIG. 299 – Un des grands fours de la calle San Pablo à Zaragoza.

cl. F. Escudero

2.2 Les découvertes de Marseille

70Au quartier Sainte‑Barbe, plusieurs ateliers du xiiie s. utilisaient différents fours sans spécialisation apparente, hormis les trois fours à préparer la glaçure27. Parmi eux, un four à barres d’enfournement (fig. 300) a été utilisé au début de l’activité artisanale, dans la première moitié du xiiie s., et transformé assez rapidement en four à arcs parallèles portant une sole. Le four primitif d’un diamètre de 2 m est à tirage vertical sans sole. Sa paroi maintes fois réparée présente plusieurs rangées (espacées de 30 cm) de trous régulièrement répartis qui sont destinés à recevoir des barres de terre cuite d’environ 40 à 45 cm de long pour un diamètre maximal de 5 cm. Les barres effilées, fichées par le gros bout dans la paroi, forment des sortes d’étagères rayonnantes supportant les poteries à cuire. Plusieurs centaines de fragments de barres et de pernettes ont été recueillis pendant la fouille. Les barres, à l’exception d’une seule, sont dépourvues de digitations. Barres et pernettes portent des traces de glaçure plombifère ou stam nifère. Quelques fragments de plaques de terre cuite avec trace de glaçure suggèrent l’emploi exceptionnel de petites gazettes.

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FIG. 300 – Reconstitution du four de Marseille : maquette P. Vallauri.

cl. C. Durand/CCJ, CNRS

71Sur la place du Général‑de‑Gaulle, la fouille d’un quartier suburbain du xiiie s., non loin du Vieux Port et à une certaine distance du quartier Sainte‑Barbe (Bouiron 1994 ; 231), a livré, dans les niveaux antérieurs à la construction du faubourg (comblement d’un chenal), sept fragments de barres d’enfournement identiques à ceux de l’atelier de Sainte‑Barbe ; ils ne sont pas liés à la présence d’un atelier à cet endroit (Richarté 1994 : 308‑309).

2.3 Les barres en Italie28

Agrigente (Sicile)

72Santa Lucia

73En 1960, les fouilles de D. Bernini (Ragona 1966b) ont fait apparaître un four pour le vernis de plomb (1150‑1250) et trois fours à poterie (1250‑1350). D’après la description et les relevés (D’Angelo 1972), les fours ne semblent pas en rapport avec les barres trouvées en cours de fouille. La céramique à cuire « venivano ammucchiate e distanziate l’una dall’altra con anelli e sbarre di argilla oppure venivano poste in cassette... » (D’Angelo 1972 : 131 ; D’Angelo 1995 : 33). Ces dernières, trouvées sur le site et conservées au musée de Caltagirone, sont rares et peut‑être en emploi conjoint avec des barres. Au milieu des productions de l’atelier et des ratés de cuisson, ont été découvertes des pernettes et deux fragments de « supporti per l’impilaggio dei manufatti in fornace » (Fiorilla 1990 : 46, nos 112‑113). Ce sont des cylindres effilés (4,1 et 4,3 cm de diamètre) portant des traces de glaçure verte.

74Grotta di Fragapane

75L’état de conservation des deux fours (xiexiie s.) ne permet pas de rapprocher les barres trouvées sur ce site de leur emploi dans ces structures (Bonacasa 1990)29.

Sciacca (Sicile) (Ragona 1975)

76S. Fiorilla y signale des barres semblables à celles de santa Lucia à Agrigente (Fiorilla 1990 : 46)30.

2.4 Les fours byzantins

77Quelques barres d’un diamètre de 3,5 cm, des éléments en S et des pernettes (Papanikola‑Bakirtzis 1992 : 31) sont associés à des dépotoirs de potiers (pas de vestiges de four) sur le site de Serres (Grèce). Les différents types de sgraffito byzantin permettent de dater cette découverte de matériel après 1200 et surtout après le milieu du xiiie s. L’auteur indique que les fours à barres sont bien connus pour la période byzantine et postbyzantine dans les régions de la Grèce, des Balkans, de la Crimée (Chersonèse) et à Chypre. Les fours sont généralement conservés jusqu’à la sole perforée. La restitution proposée en 1992 (fig. 301) associait sans justification le bas du four découvert à Serres avec la reconstitution généralement proposée en Iran (par exemple à Takht‑i‑Suleiman, fig. 318). Les barres permettaient de disposer la charge à cuire dans la chambre de cuisson supérieure dont on ne sait pas si elle était voûtée ou non (les deux types de fours ayant coexisté en Grèce et en Méditerranée orientale jusqu’à aujourd’hui). La bibliographie de cette aire géographique, récemment portée à notre connaissance, reste à explorer afin de définir une éventuelle filiation avec les formes orientales de ces structures. Des barres nous ont été signalées dernièrement à Corinthe par C. Williams dans le matériel des anciennes fouilles (Morgan 1942).

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FIG. 301 – Reconstitution des fours à barres byzantins et post‑byzantins (Papanikola‑Bakirtzis 1992 : fig. 22).

2.5 Les découvertes au Maghreb

78Peu de découvertes sont connues et les publications manquent.

Kairouan (Sabra Mansouria, Tunisie)

79Des barres semblent y avoir été découvertes mais aucune publication ne le confirme.

Sijilmassa (Maroc)

80Les prospections réalisées en 1988 (Taouchikht 1989) ont permis de recueillir en surface, près du terrain de football nouvellement créé, une série de pernettes et barres d’enfournement appartenant à des ateliers installés après l’abandon de Sijilmassa au xive s. L’auteur les date d’une période comprise entre le xve et le xiie s. Apparemment c’est le seul endroit qui ait livré des barres sur les multiples sites de production repérés.

Tlemcen (Algérie)

81Atelier d’Aïn el‑Qouïdès

82Alfred Bel a découvert et partiellement dégagé en 1913 un four à Agâdir, dans la banlieue de Tlemcen, en dehors des remparts et près de la porte de Bâb‑el‑’Aqba, à quelques centaines de mètres du tombeau de Sîdi‑d‑Dâoudi (Bel 1914). Cet atelier, le premier atelier ancien découvert en Afrique du Nord à l’époque, daté du xe au début du xie s., est identifié par de grandes masses de tessons et un four partiellement conservé. Ce four est de plan carré ou rectangulaire (longueur conservée : 2,10 m, hauteur : 0,70 m). Le foyer était couvert d’au moins trois ou quatre arceaux d’après l’interprétation que l’on peut faire de la description d’A. Bel. Il est construit en briques de deux modules semblant correspondre à des réparations d’arceaux : 22 x 11 x 3 ou 28 x 14 x 3 cm. C’est donc un four à tirage vertical avec une sole portée par des arcs parallèles. Le matériel découvert (céramique culinaire modelée, poterie tournée « unie, gravée ou sigillée », émaillée ou non avec décor, pavements et briques ; il faut néanmoins noter l’absence de carreaux émaillés) est accompagné de nombreux fragments de barres d’enfournement, portant parfois des taches de glaçure verte, et d’un seul fragment de pernette (Bel 1914 : 33, fig. 16). De ce rapide résumé, il est possible de déduire qu’il existait à cet endroit un atelier ayant plusieurs fours car il ne semble pas que le four découvert soit en rapport avec les barres. Ces dernières sont sans doute à mettre en relation avec un four circulaire de type particulier (les fours à barres sont circulaires et sans sole).

83Atelier de Bâb‑el‑Quarmâdîn

84Alfred Bel signale un autre atelier à cet endroit. De nombreuses pernettes et « cylindres » y ont été remarqués. Aucune fouille n’a été faite.

3 Découvertes orientales

3.1 Le traité d’Abul‑Qasim

85La partie concernant la céramique du fameux traité d’Abu’l‑Qasim récemment traduite et commentée par J. W. Allan (Allan 1973) expose les connaissances de l’auteur sur les matériaux, leur préparation et leur mise en œuvre sur la céramique dans les ateliers de la région de Kashan. Les deux manuscrits datés de 700/1301 et 991/1583, traduits du persan en allemand (Ritter et al. 1935), ont fait l’objet d’une publication intégrale en persan (Afshâr 1966). Nous laisserons de côté les deux premiers points pour lesquels quelques informations utiles concernant les fours sont exploitées pour les fours à glaçure découverts à Marseille (cf. supra § 3.4.3.1). À l’article 26, Abu’I‑Qasim décrit un four à cuire les céramiques construit comme une haute coupole31. À l’intérieur existent des rangées de bâtons d’argile cuite d’un peu moins de 70 cm de longueur montés dans des trous ménagés dans les parois. La vaisselle est placée dessus apparemment dans des cazettes. Abu’l‑Qasim n’apporte aucune information ni sur la manière exacte de charger le volume du four ni sur son fonctionnement (tirage).

86J.W. Allan commente ensuite cet article (Allan 1973 : 119, § 26). Il signale des fours comparables à Takht‑i‑Suleiman et Siraf (voir ces sites). Il indique différentes grandeurs de barres : 55 à 60 cm de long pour un diamètre maximal de 5,5 cm à Takht‑i‑Suleiman (Naumann 1971) ; 70 cm de long actuellement à Meybod (Centlivres‑Demont 1971) ; en comparaison avec la valeur du dhira donnée par Wulff (une coudée = environ 41 inches soit 104 cm), la longueur des barres (un dhira et demi) paraît invraisemblable pour Allan.

3.2 Les découvertes

Ahlat (Anatolie, Turquie)

87J. Soustiel, citant B. Karamagalari, présente un dessin d’un four seldjoukide trouvé à Ahlat (fig. 302) et donne la description suivante : « D’une hauteur totale de 2,74 m (foyer plus chambre de cuisson) et d’un diamètre de 2,10 m (chambre de cuisson), ce four possède également des conduits latéraux à la hauteur de la sole ; selon B. Karamagalari, ces « évents » d’appoint (reliés à une troisième chambre ?) faisaient fonction de « régulateurs de température » (ou d’atmosphère ?) pour la cuisson de céramiques à reflets métalliques. » (Soustiel 1985 : 386‑387, fig. 7.) Le dessin schématique donné par Soustiel semble suggérer un foyer étroit enterré débouchant dans la chambre de cuisson par un seul grand trou de chauffe central. La chambre de cuisson au‑dessus, voûtée, avec cheminon central, possède deux rangs de barres sur lesquelles sont curieusement enfilées les céramiques à cuire. Les orifices au niveau de la sole (un seul est représenté, fig. 302 en c) sont sans doute à comparer à ceux de Meskene ou Nishapur.

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FIG. 302 – Reconstitution du four d’Ahlat (Soustiel 1985 : 386. 7 d’ap. Karamagalari 1978 : 491).

Alexandrie (Égypte)

88Quelques fragments de barres auraient été trouvés hors contexte dans les fouilles polonaises du dépotoir d’époque islamique de Kôm el‑Dikka32.

Bagdad (Irak)

89J. Sauvaget, dans son exposé des techniques de fabrication de la céramique musulmane (Sauvaget 1965 : 23), donne le dessin d’un four à cuire les carreaux de faïence d’après une publication non référencée de O. Reuther (fig. 303)33. Il ne précise pas la datation de ce four à tirage vertical, équipé d’un seul trou de chauffe central débouchant dans la chambre de cuisson munie, curieusement, de seulement deux rangs de barres destinées à porter la charge de carreaux. Le système d’évacuation dès gaz y est très particulier. Dans la voûte, hormis un orifice central subdivisé pour en réduire la surface, une série de trous sont percés au ras de la sole et débouchent dans des cheminées extérieures qui permettent de réchauffer la paroi. Ce dispositif doit être mis en rapport avec un système de tirage particulier à flamme renversée.

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FIG. 303 Four de Bagdad (Sauvaget 1965 : 23 d’ap. O. Reuther).

Beyrouth (Liban)

90Les grands travaux préliminaires à la reconstruction du centre‑ville ont mis au jour des traces d’artisanat potier avec emploi de fours à barres ou, en l’absence de ce type de four, des barres elles‑mêmes. La publication du premier numéro du Bulletin d’archéologie et d’architecture libanaises (Saghiyeh 1996 ; Aubert 1996 ; Arnaud et al. 1996) permet seulement d’évoquer des recherches qui continuent d’apporter actuellement des informations précieuses sur cet artisanat.

91Bey 004 zone des Églises. Quatre fours de période omayyade ont été trouvés avec une grande quantité de kiln rods et de déchets de cuisson autour (Saghiyeh 1996 : 40). La mention trop succincte ne permet ni de préciser le type de four ni de décrire les barres et leur rapport éventuel avec les fours.

92Bey 002 zone du Petit‑Sérail, place des Martyrs. Depuis la publication du rapport préliminaire (Aubert 1996), un four à barres d’époque mamelouke vient d’être découvert. Les auteurs mentionnent la paroi cylindrique partiellement conservée et pourvue de trois rangées de trous de barres ainsi que des fragments de ces dernières dans le comblement (Aubert, Nicolaïdes à paraître : fig. 3).

93Bey 027. La zone abandonnée a été remblayée du xiie au xiiie s. par des « détritus de fours de potiers et de ratés de cuisson provenant d’ateliers voisins » (Arnaud et al. 1996 : 114‑115). Dans ces remblais, de nombreuses barres « terminées en ogive surcuites » proviennent des fours détruits. Les ratés de cuisson renvoient aux productions de la fin du xiiie s.

Fustât (Égypte)

94Près du tombeau du cheikh Abou Séoud, A. Bey Bahgat a découvert environ vingt fours (Bey 1914 : 234, note 2) assez mal conservés. L’un d’eux, en meilleur état, permet à l’auteur d’effectuer une reconstitution toutefois sujette à caution, surtout avec le recul que nous avons. Pour lui, le four « arabe » (vertical) possède un foyer surmonté d’une sole percée d’un seul trou central débouchant dans la chambre de cuisson supérieure. Un alandier existe en avant du foyer. En l’absence de publication de relevés précis, la photographie (Bey 1914 : Pl. X) n’a pas la netteté nécessaire pour permettre un examen des parois de la chambre de cuisson ni des arrachements de la voûte sur le foyer. Il est donc difficile de reprendre l’interprétation de l’auteur dans le sens d’un éventuel four à barres d’enfournement qui pourrait, c’est une hypothèse, être suggéré par le trou de chauffe unique. Aux alentours, on a retrouvé des pernettes, des petites colonnes et des anneaux de terre cuite servant à l’enfournement (Bey 1914 : 236‑237).

95Les fouilles récentes à Istabl Antar, réalisées depuis 1985 par R.‑P. Gayraud de l’IFAO du Caire, ont permis de retrouver, entre autres, quelques fragments de barres cylindriques non pincées, d’un diamètre de 3 à 4 cm, avec trace de glaçure bleu turquoise, de la seconde moitié du xe s. ou du xie s.34

Jérusalem (Israël)

96Quatre fours ont été fouillés sur la colline de Khirbet el‑Burj. L’un d’eux (Onn, Rapuano 1994 : 90, fig. 84) servant à la poterie glaçurée est équipé d’une banquette, la paroi supérieure conservée présente des trous de barres caractéristiques. Des déchets et des lampes moulées indiquent une datation entre les xiiie et xve s.

Gurgan (Iran)

97De nombreuses petites barres et pernettes trouvées sur le site proviennent du remaniement de fours de potiers (Bahrami 1949 : 125‑126). Plusieurs fours sont de plan circulaire avec plusieurs rangs de barres fixées horizontalement (Bahrami 1949 : Pl. 10). Des fours semblables ont été trouvés à proximité des centres producteurs du Moyen Âge ; des fours de conception aussi élaborée ont été utilisés après les premières décades du xiiie s. par les potiers de Kashan et Rayy (Bahrami 1938). Les deux photographies publiées (Bahrami 1949 : Pl. 10) montrent la paroi du même four (fig. 304). En partie haute (mais à quelle hauteur ?) apparaît une seule rangée de briques percées dans lesquelles on a, pour les besoins de la photographie, replacé des fragments de barres. Les parties basses sont assez dégradées et ne permettent aucune interprétation : salle unique ou foyer séparé de la chambre de cuisson supérieure dont la voûte/sole aurait disparu ? Curieusement, les parois de briques n’existent qu’en partie haute, témoignant peut‑être d’une transformation des parties basses surcreusées.

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FIG. 304 – Vue d’un four de Gurgan (Bahrami 1949 : PI. 10).

Kashan (Malekabad, Iran)

98M. Centlivres (1971 : 29) y signale des barres identiques à celles de Meybod utilisées dans les fours seldjukides du xiiie s. (Bahrami 1938 : 225). La description publiée en 1938 par Bahrami n’est pas très claire : les informations qui suivent en sont extraites (Bahrami 1938 : 227‑229).

99Les fours dégagés par M. Bahrami (fig. 305‑306) sont :

100« de formes diverses, mais un seul d’entre eux était à la fois perfectionné et intact. Mesurant plus de 3,10 m de profondeur et 1,90 m de diamètre au sol, ce four de Malekabad affecte une forme étagée, le centre de l’étage inférieur étant occupé par une pierre rectangulaire reliée d’un côté à la paroi (Bahrami 1938 : fig. 23‑29). Trois gradins superposés et deux conduits à l’étage supérieur sont les parties essentielles du four. [...] L’un des conduits fait communiquer le four avec un endroit clos, sorte d’étuve, où s’accumulait une partie de la chaleur. L’autre aboutissait à l’extérieur.

101Il est possible aujourd’hui, grâce aux renseignements fournis par le Traité de la technique de la faïence [Traité d’Abu’l‑Qasim], de se représenter d’une façon approximative le fonctionnement d’un four, mais il ne faudrait pas croire que chacun d’eux était garni de clous destinés au soutien des objets pendant le temps de leur cuisson. Dans celui que nous venons d’examiner, les pièces à cuire étaient posées sur les gradins. Par contre tout le tour des fours du type shakhurè en comportait plusieurs rangées (Bahrami 1938 : fig. 143). Le shakhurè, indispensable à chaque atelier, destiné à la fabrication des ouvrages de céramique non lustrée était, selon l’auteur du Traité, semblable à une haute coupole. [...] Chaque clou, long d’une trentaine de centimètres, avait la forme d’un cylindre de 6 centimètres de diamètre et était encastré dans le mur. Les parois d’un important shakhurè trouvé dans une maison de Kalahar en étaient couvertes et les fragments de pièces ratées qui y sont parfois collées (Bahrami 1938 : fig. 144) appartiennent à la céramique monochrome, ce qui permet de préciser un passage du Traité d’Abu’l‑Kasem ‘Abdallah relatif aux instruments nécessaires à la fabrication des kashis. Aucune trace de capsule ou d’étui n’est demeurée autour des fragments collés aux clous et, en conséquence, nous ne pouvons guère admettre leur emploi dans le shakhurè. Ce type de four est d’ailleurs sans intérêt pour la solution du problème des ateliers, car les fouilles de Raiy, Sawé et Nishapur, comme celles de Kashan, ne lui connaissent qu’une seule forme. »

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FIG. 305 – Vue d’un des fours de Kashan du XIIIe s. (Bahrami 1938 : 226, fig. 142).

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FIG. 306 – Schéma du four de Kashan (Soustiel 1985 : 386, no 5 d’apr. Bahrami 1938 : 225).

102Cette longue citation paraît indispensable. La description, qui gagnerait à être complétée par la relation des fouilles des centres voisins, apporte des informations capitales quoique par endroit nébuleuses ; les illustrations sont alors d’assez peu de secours.

Meskene (Syrie)

103Ce centre producteur de l’Euphrate syrien35 est à environ 40 km de celui, plus connu, de Raqqa. Son activité a été illustrée pour les périodes abbasside et ayyubide (Bernus, Thiriot à paraître). Les grands fours de période ayyubide sont évoqués ici rapidement.

104Leur diamètre varie de 2,65 à 3,80 m pour une hauteur conservée de la salle de cuisson de 0,68 à 1,32 m. Le foyer en forme de couloir a une hauteur de 0,76 à 1,19 m. Les portes du foyer et de la chambre de cuisson sont superposées. Aucune paroi ne présente d’emplacement de barres d’enfournement ; il n’est donc pas prouvé que ces fours aient utilisé ce principe malgré la découverte de nombreuses barres. Toutefois, la comparaison avec d’autres publications (par exemple Sauvaget 1965 pour Bagdad ou Fedorov‑Davidov, Bulatov 1989 pour Selitrennoe) laisse planer quelques doutes.

105Le four 4B présente un foyer à ciel ouvert alimenté par une petite bouche à feu horizontale. La chambre de cuisson cylindrique au‑dessus ne présente aucun aménagement ; un ensemble de barres y était stocké. Ce four fonctionne suivant le principe classique du tirage vertical à flamme directe.

106Le four voisin 4A est un peu différent : le foyer couvert d’une voûte débouche à l’extérieur dans une fosse profonde ; sa porte est verticale. Mais surtout la paroi de la chambre de cuisson a été modifiée en cours d’utilisation : la paroi identique au four précédent est transformée pour la mise en place de cinq cheminées extérieures dont l’orifice s’ouvre à environ 30 cm au‑dessus de la sole. Toujours à tirage vertical, ce four semble utiliser un principe plus savant de la flamme renversée.

107Le four 3L du faubourg voisin, construit directement sur ce principe, présente les mêmes caractéristiques, pratiquement au point au moment de la construction (fig. 307).

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FIG. 307 – Le four 3L de Meskene.

cl. J. Dufour

108La proposition de reconstitution montre le principe de la flamme renversée (à comparer aux fours occidentaux modernes) : flamme ascendante partant du centre, redescendant pour obtenir une meilleure cuisson et remontant à l’extérieur tout en chauffant la paroi du four, d’où une certaine économie calorique (fig. 308).

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FIG. 308 – Reconstitution du four à flamme renversée de Meskene.

J.T./CNRS del.

109Les productions ayyubides36 sont les suivantes : la poterie non émaillée représente 85 à 90 % du matériel, vases à liquide de différents types avec une grande variété de décors le plus souvent peignés et appliqués. Tous les types de poterie émaillée attribués à l’époque ayyubide ne sont pas représentés ici : vaisselle utilitaire à pâte claire et glaçure turquoise ou autre, vaisselle de luxe à pâte siliceuse blanche.

110Ces fours semblent avoir fonctionné dans le deuxième quart du xiiie s. jusqu’en 1260. C’est sans doute à cette époque qu’intervient le grand changement de technologie de cuisson.

Nishapur (Iran)

111Trois fours, datés du premier quart du xie s. à 1221 (arrivée des Mongols), ont été dégagés à l’est de la tombe de Muhammad Mahruq (Wilkinson 1973 : fig. 2). Ils sont du même type37. Le foyer circulaire est excavé dans le sol au centre du four (Wilkinson 1973 : fig. 14‑20). Il est bordé par une large banquette, servant de sole, interrompue à l’endroit de la porte du foyer. Cette dernière se présente de différentes façons : soit une ouverture ovoïde oblique (Wilkinson 1973 : fig. 15‑21), soit, pour les deux autres se faisant face, une ouverture apparemment verticale débouchant dans une courte tranchée commune (fig. 309). La chambre de cuisson et son dôme, construits en briques, sont trop en ruine pour situer l’accès permettant de charger et détourner. Pour l’auteur, la méthode de chargement est claire : les poteries sont placées sur des barres fichées dans les parois, le petit bout étant fiché dans les trous des briques de la voûte (Wilkinson 1973 : fig. 17). Dans le petit four subsiste une rangée de barres ; dans le grand en face, trois rangs. La voûte est circulaire (les fours actuels de Nishapur’s qanats sont allongés) (Wilkinson 1973 : fig. 18). Dans le plus grand four, le foyer est surélevé pour former une petite plate‑forme38. Toujours dans ce four, de gros conduits verticaux sont aménagés dans la banquette (fig. 310) ; ils s’ouvrent au bas du foyer et débouchent à la surface de la banquette (certains, dit l’auteur, sont fermés par une réparation (Wilkinson 1973 : fig. 19).

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FIG. 309 – Grand four à flamme renversée de Nishapur (Wilkinson 1973 : fig. 16).

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FIG. 310 – Petit four à flamme renversée de Nishapur (Wilkinson 1973 : fig. 15).

112D’après les illustrations, il est possible de faire les observations suivantes qui complètent l’analyse de C.‑K. Wilkinson : 
– le foyer est profondément creusé dans le sol. Pour les grands fours, le foyer semble équipé d’un support central utile sans doute pour mettre en place la charge centrale ;
– la large et haute banquette est percée de plusieurs conduits qui semblent être nécessaires pour une meilleure répartition de la chaleur dans la charge supérieure (fig. 310). Sont‑ils indispensables ici à cause de l’exceptionnelle largeur de la banquette ?
– les orifices triangulaires (fig. 310‑311) percés au bas de la paroi de la salle de cuisson, ou un peu en dessous de la première rangée de barres, correspondent à des cheminées externes (fig. 310 : petits trous de forme ovale visibles de part et d’autre de la porte du foyer). La présence de cheminées externes s’ouvrant assez bas dans la chambre de cuisson indique que le four fonctionne suivant le principe de la flamme renversée.

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FIG. 311 – Four à flamme renversée de Nishapur (Wilkinson 1973 : fig. 14).

Rahba‑Mayadin (Syrie)

113Des fours sont signalés dans les deux sites proches. Toutefois, ce n’est qu’à Mayadin que des « boudins de fours » sont évoqués dans une couche de remblais contenant des éléments de destruction d’un atelier du xie s. (Rousset 1996 : 67).

Raqqa (Syrie)

114C’est à Er‑Rafiqa plus exactement, dans le faubourg est, que Sauvaget dit avoir vu du matériel d’enfournement : « disques et colonnettes de terre cuite portant des coulées de glaçure, colifichets » (Sauvaget 1948 : 34). Doit‑on voir dans ces colonnettes des barres d’enfournement ? Dans le même ouvrage, Sauvaget rappelle la fouille d’E. de Lorey en 1924, à l’intérieur de l’enceinte d’Er‑Rafiqa, d’un four circulaire à sole39 qui ne semble pas avoir utilisé de barres d’enfournement (Sauvaget 1948 : fig. 7). Enfin, la dernière découverte40 en 1985 à l’est d’Er‑Rafiqa d’un four rectangulaire semble confirmer l’utilisation de ce type de four (Meinecke 1991 : 30). Lors du colloque d’archéologie islamique du Caire, en février 1993, M. Meinecke a signalé l’existence de fours à barres pour la céramique glaçurée41.

Rayy (Iran)

115(Bahram ! 1938)

Samarcande (Ouzbékistan)

116Les ateliers islamiques découverts depuis plus de vingt ans par les archéologues russes ont fait l’objet d’une exposition à l’institut du Monde arabe à Paris (Samarcande 1992)42. Les quartiers dégagés depuis 1960 par G.‑V. Shishkina et L.‑V. Pavchinskaja, et partiellement publiés, correspondent à la période située entre le ixe et le début du xiiie s., avant l’invasion mongole de 1220 qui a entraîné l’abandon de la ville d’Afrasiab et sa reconstruction plus au sud pour devenir la capitale de Tamerlan à la fin du xive s. Des quartiers entiers de potiers, dégagés lors des fouilles, rassemblaient de nombreux ateliers spécialisés se déplaçant dans des zones différentes suivant les époques : « La structure des fours variait selon le type d’objet auquel ils étaient destinés » (Samarcande 1992 : 35)43. Les fours pour la vaisselle glaçurée (entre le ixos et le début du xie s.) sont circulaires à flamme verticale sans sole. Le foyer est creusé dans le sol sur environ 0,70 m de profondeur et débouche dans une fosse à plan incliné en avant de la porte de chargement du combustible. Il est entouré d’une banquette au niveau du sol de la cour. La paroi cylindrique du four est « construite en briques crues et surmontée d’une voûte » (fig. 312)44. Pour la description des fours, nous avons préféré les citations à une interprétation libre du texte afin d’aborder la discussion dans les parties de synthèse concernant la reconstitution des fours et leur fonctionnement : « Comme la chambre de cuisson devenait chambre de chauffe, sur le palier circulaire qui laissait un espace libre au foyer, on disposait des céramiques, en quantité restreinte. La majorité des pièces étaient placées sur des bâtons d’enfournement en terre cuite, plantés dans les trous de 10 à 15 cm de profondeur, qui couvraient en rangs horizontaux toute la surface verticale des parois. La densité de ces bâtons pouvait être facilement modifiée par le potier. On y accrochait les récipients par l’anse ou par le bord de l’ouverture, directement ou à l’aide de crochets en terre cuite. Si les bâtons étaient disposés de manière suffisamment dense, on pouvait placer sur eux, comme sur une étagère, une cruche par exemple ou une pile de plats creux. » (Samarcande 1992)

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FIG. 312 – Reconstitution du four de Samarcande (Samarcande 1992 : 36).

117Le potier utilisait également les pernettes. L’hypothèse ancienne d’enfournement (fig. 313) reprise récemment (Samarcande 1992) reste surprenante.

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FIG. 313 – Hypothèse ancienne d’enfournement des petites pièces à Samarcande (Naumann 1971 : 185, Abb. 9).

118Au xiie s., les fours destinés aux productions glaçurées « ont une deuxième chambre séparée de la première par une sole reposant sur un pilier de grandes dimensions (jusqu’à 3 m de diamètre intérieur). Dans ce type de four, contrairement à ce qu’on trouve dans les fours à bâtons aux ixe et xe s., les bâtons faisant saillie de la paroi portaient des plaques en céramique de forme ovale où l’on disposait les objets à cuire » (Samarcande 1992 : 44). Les fours de la seconde moitié du xiie au début du xiiie s. n’ont pas été retrouvés, malgré la présence d’ateliers et de rebuts.

Selitrennœ45 (région de la Volga)

119Un important atelier y a été dégagé partiellement entre les années 1968 et 1977. Des bâtiments, de très nombreuses fosses et vingt‑sept fours de types très divers y ont été utilisés apparemment au cours du xive s. (Fedorov‑Davidov, Bulatov 1989 : 134, fig. 1). Dans cet ensemble, deux fours (nos 20, 23) installés l’un à côté de l’autre utilisent le principe des barres d’enfournement (fig. 314).

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FIG. 314 – Plan d’ensemble et façade des deux fours de Selitrennœ (Fedorov‑Davidov, Bulatov 1989 : 135, fig. 2.1 et 156, 16).

120D’après l’illustration, ils sont conçus à peu près sur le même principe (fig. 314‑316). Le foyer est un couloir allongé et assez large débouchant dans la sole par un seul et grand trou de chauffe. La porte verticale du foyer s’ouvre dans une petite fosse creusée dans le sol de l’atelier situé approximativement au niveau de la sole46. La chambre de cuisson, au‑dessus, est cylindrique dans les parties conservées. On y accède par une petite porte curieusement basse (fig. 314‑315) située au‑dessus de la porte du foyer47. La paroi de la chambre de cuisson est aménagée de plusieurs rangées de trous pour des barres d’enfournement apparemment assez serrées48. Les deux fours sont également munis de quatre cheminées ménagées dans l’épaisseur de la paroi de la chambre de cuisson et s’ouvrant au niveau de la sole ; le conduit est carré dans le grand four 20 (fig. 315), rond dans le petit 23 (fig. 316)49. Le grand four 20 possède un aménagement particulier au niveau du foyer et de la sole (fig. 315) : quatre fentes étroites ouvertes à mi‑hauteur de la paroi du foyer drainent une partie de la chaleur vers de petits orifices percés sur le pourtour de la sole50. Ces deux fours jumelés (fig. 314) sont également intéressants par leur état de conservation jusqu’à environ 1 m au‑dessus du sol. La totalité de l’emprise est donc intacte et étonnamment mince : 0,50 m à la base pour les parties les plus étroites. Deux contreforts semblent avoir été ajoutés en avant du petit four 20.

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FIG. 315 – Four 20 de Selitrennœ : plan au niveau d’une rangée de barres, coupes axiale et transversale (Fedorov‑Davidov, Bulatov 1989 : 156, fig. 17a, b et d).

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FIG. 316 – Four 23 de Selitrennœ : plan au niveau d’une rangée de barres et coupe axiale (Fedorov‑Davidov, Bulatov 1989 : 135, fig. 2.II et III).

Shahrukhiyya (Ouzbekistan)51

121Sur le Syr Daria à 75 km au sud‑ouest de Tachkent, la ville de Shahrukhiyya possédait des ateliers de potiers du xe au xviie s. dont une partie a été fouillée par M. Tikhonin. Les fours photographiés par F. Grenet et J. Soustiel sont cylindriques avec une banquette et plusieurs rangées de trous pour des barres d’enfournement, ils présentent apparemment de nombreux rechemisages (fig. 317).

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FIG. 317 – Vue d’un des fours de Shahrukhiyya.

cl. F. Grenet

Siraf (Iran)

122Les fouilles d’un quartier artisanal des xexie s. ont permis de dégager trente fours de trois types dont quatre sont des fours à barres (Whitehouse 1968 ; Whitehouse 1971 ; Whitehouse 1972 ; Majidzadeh 1975). Ces fours à chambre unique (Whitehouse 1977 : 51) sont cylindriques. D’après l’auteur, le fond est aménagé d’une fosse peu profonde destinée probablement au foyer. Les parois du four sont percées de nombreux trous destinés à recevoir des barres d’argile sur lesquelles sont posées les poteries à cuire.

Takht‑i‑Suleiman (Iran)

123Des ateliers de potiers des xiexiiie s. y ont été découverts entre 1961 et 1969 (Naumann 1971). Signalés par J.‑A. Milan Crespo au colloque de Tolède en 1986 (fig. 318), les deux fours du xiiie s. sont partiellement conservés : le foyer d’un diamètre de 1,80 m pour 1 m de hauteur est voûté à l’aide de briques cuites de 20 x 20 x 5 cm. La voûte, percée au centre d’un unique trou de chauffe de 0,60 m de diamètre, est aménagée de cinq niches à arc brisé de 52 cm de largeur pour environ 60 cm de hauteur et 22 cm de profondeur (fig. 319). Ces niches s’ouvrent latéralement à 15 cm au‑dessus du fond du foyer et débouchent, à mi‑hauteur de leur élévation, dans une saignée de 7 cm de largeur qui court entre la voûte et la paroi cylindrique du four. Un amas important de fragments de barres cylindriques (diamètre 5,5 cm pour une longueur de 55 à 60 cm) recouvre l’ensemble du fond d’un des fours (celui du sud est moins bien conservé). Naumann, à partir d’exemples des ateliers modernes de Laledjin près de Hamadan, de fouilles et du traité d’Abu’I‑Qasim, les reconstitue de la façon suivante (Naumann 1971 : fig. 3) : deux chambres superposées séparées par une voûte percée d’un grand trou de chauffe central (fig. 318, 320). Ce dispositif est complété par six orifices périphériques très étroits s’ouvrant dans le foyer et débouchant au niveau de la sole dans une sorte de rainure profonde52. La chambre de cuisson, reconstituée en entier, montre un système de chargement du four sur trois rangs de barres et sur la sole (grosses jarres en bordure du trou central) tel qu’il a pu l’observer à Laledjin. L’auteur se rapporte également aux fouilles de Suse, Samarcande, Nishapur et d’autres lieux (Naumann 1971 : 178) dont le lien avec des fours à barres ne semble pas évident. Il envisage également la reconstitution d’un four‑mouffle tout en précisant qu’aucune diffusion de ce modèle sophistiqué n’a été trouvée.

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FIG. 318 – Fours de Takht‑i‑Suleiman : détail (Naumann 1971 : fig. 3),

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FIG. 319 – Foyer avec niches du four nord de Takht‑i‑Suleiman (Naumann 1971 : Taf. 55.2).

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FIG. 320 – Vue du four nord (sole et saignée circulaire) de Takht‑i‑Suleiman (Naumann 1971 : Taf. 55. 1).

Tell Hrim (Syrie)

124Les recherches sur ce site par S. Berthier de l’IFEAD de Damas lui ont permis de découvrir des barres cylindriques dans une couche contenant des matériaux apparemment liés à la production céramique des xiiiexive s. (Raffaillac‑Desfosses 1994 : 223). Malheureusement, aucun four n’a été découvert pour l’instant, mais des « emplacements rubéfiés, des aires de plusieurs mètres carrés de cendres noires ainsi que des centaines de fragments de cylindres de potier et des blocs de terre vitrifiée » ont été repérés en surface (Berthier, Geyer 1988 : 71). D’après l’auteur des fouilles, ces ateliers auraient produit des céramiques à glaçure turquoise monochrome sur pâte calcaire.

Terqa (Syrie)

125Découvert en 1976 en bordure d’une tranchée pour une canalisation, ce « four » du xiie s. fait 1,47 m de haut pour 0,97 m de long et 0,90 m de large (Mahmoud 1978 : 3). Il me semble que seule la porte (et le foyer qui s’y développait) soit conservée53. Des fragments de barres et des permettes ont été trouvés dans le foyer.

Tiberias (Israël)

126Lors du creusement d’une tranchée au sud de l’enceinte de Hammat, un four apparu en coupe a fait l’objet d’une description sommaire (Stern 1995). Ce four à tirage vertical construit en briques avec une enveloppe de pierres est comblé de vaisselles et de Jarres datables des xexie s. Les barres toujours fragmentaires ont un diamètre de 3 à 3,5 cm et présentent parfois des traces de glaçure (Stern 1995 : 58, fig. 1.6). La relation barres‑four n’est pas formellement attestée.

4 Artisanat traditionnel contemporain

4.1 En Europe

Sa Cabaneta (Raima de Mallorca, Espagne)

127G. Rossello‑Bordoy indique que les potiers récents ont utilisé ce type de barres (Rossello‑Bordoy 1978 : 130)54.

Nijar (près d’Almería, Espagne)

128Les potiers récents utilisaient des barres posées sur des pilettes pour l’enfournement55.

Olocau del Rey (Castellón, Espagne)

129M. Gonzalez Marti signale que les barres cassées peuvent être remployées comme ici, verticalement, pour un pavement (fig. 321) dont il ne donne pas la datation (Gonzalez Marti 1944 : 28, fig. 12 et 36, note 21).

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FIG. 321 – Pavement fait de barres d’enfournement à Olocau del Rey (Gonzalez 1952 : 28, fig. 12).

Paterna et Manises (Espagne)

130Le four médiéval du Testar del Moll est comparable en tous points au four actuel du dernier artisan traditionnel de Paterna. Ce dernier se rappelle que l’enfournement s’y faisait à l’aide de barres.

Salvatierra de los Barros (près Badajoz, Espagne)

131Köpke présente la photo d’un four actuel (fig. 322) en avant duquel est stocké le matériel (éléments cylindriques et longues barres d’argile) servant d’échafaudage pour empiler les productions dans la chambre de cuisson (Köpke 1985 : Abb. 102). L’auteur ne précise pas dans son texte la façon de procéder, qu’on peut imaginer proche de celle de Nijar, Paterna ou Teruel. Dans sa présentation de ce centre de production, Sempere ne parle pas des barres pour l’enfournement (Sempere 1982 : 187‑190).

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FIG. 322 – Eléments d’enfournement en dehors d’un four de Salvatierra de los Barras (Köpke 1985 : Abb. 102).

Teruel (Espagne)

132Dans les fours à poterie, les barres sont employées pour la construction des parois internes en alternance avec des lits de briques (Almagro Basch, Llubia Munne 1962 : 37‑38, lâm. V). Aucun trou n’est prévu dans ces parois de la chambre de cuisson (fig. 323). Les barres56, pointues aux deux bouts57, sont aussi utilisées pour monter la charge de poteries à cuire suivant le principe de l’échappade (Brongniart 1977) en association avec des tuiles et des briques (à cuire !) ; les barres s’appuient sur deux rangs de deux tuiles posées de chant et forment une étagère58.

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133FIG. 323 – Chargement du four de Teruel (Almagro, Llubia 1962 : Lám. V).

4.2 En Orient

134De nombreux centres iraniens contemporains fabriquent de la faïence cuite en théorie dans des fours à barres. Micheline Centlivres cite, outre les centres relevés à la fin du xixe s. sans distinction de production ni de four, ceux produisant de la faïence (utilisant en théorie un four à barres) : Estehbanat, Isfahan, Meybod, Natanz, Qum, Shahreza (Centlivres‑Demont 1971 : 83, 85).

Kashan (Iran)

135(Caldwell 1967)

Laledjin (près de Hamadan, Iran)

136Naumann décrit les ateliers vus en 1968 et qu’il compare avec Takht‑i‑Suleiman (Naumann 1971 : 178). Les fours sont à deux chambres superposées séparées par une voûte percée d’un gros trou de chauffe central et de quatre petits, latéraux. Le foyer a subi des transformations pour passer du bois aux huiles lourdes. La chambre de cuisson est alimentée par une porte de 0,80 m de hauteur. C’est un cylindre de 2,50 m de diamètre pour 3,00 m de hauteur, surmonté d’une voûte peu pointue. Sur la terrasse, une ouverture centrale est fermée avec un couvercle muni d’un orifice qui peut être obturé par un second couvercle non percé pour régler le tirage. Sur les parois de la chambre de cuisson, trois rainures (à 0,36, 0,65 et 1,30 m de hauteur) servent à placer des barres d’argile cuite de forme ovale aplatie de 60 cm de longueur destinées à poser les poteries à cuire (fig. 324). Les grosses poteries sont directement empilées sur la sole.

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FIG. 324 – Chargement du four contemporain de Laledjin (Naumann 1971 : Taf. 59.1).

Meybod (Iran)

137L’enquête (Centlivres‑Demont 1971) menée en 1964 concerne une communauté de potiers rassemblés en vingt et un ateliers et produisant des poteries « poreuses », des poteries glaçurées et des faïences cuites dans deux types de fours. Celui qui sert à cuire les faïences est de même conception générale que celui pour la céramique commune, mais de dimensions plus réduites (Centlivres‑Demont 1971 : 29 ; la planche X semble un croquis à l’échelle approximative). Le four construit en briques cuites est entièrement enterré dans le sol à l’intérieur de l’atelier (fig. 325). L’accès au foyer se fait par l’extérieur, à 3 m de profondeur environ. Le foyer très bas (près de 3 m de diamètre pour une hauteur de 0,50 m) était alimenté en broussailles avant l’utilisation du pétrole. Un seul trou de chauffe central, de grand diamètre (environ 0,50 m), débouche dans la chambre de cuisson (environ 2,50 m de diamètre pour un peu plus de 2 m de hauteur) ouverte au centre par un trou d’homme au ras du sol (environ 0,80 m de diamètre), utilisé pour le chargement et fermé pendant la cuisson (Centlivres‑Demont 1971 : pl. X). Suivant le relevé publié (le processus de cuisson n’est pas décrit de façon précise), la flamme pénètre verticalement dans la chambre de cuisson et doit redescendre, emprunter curieusement le trou de chauffe précédent pour pouvoir s’échapper dans les quatre cheminées externes. Celles‑ci, selon le dessin, s’ouvrent dans le foyer, longent la paroi externe de la chambre de cuisson pour déboucher dans l’atelier. Il faut probablement envisager un autre schéma en ce qui concerne les cheminées qui devraient, logiquement, s’ouvrir au bas de la chambre de cuisson et non directement dans le foyer ; il semble matériellement impossible que la flamme descendante puisse forcer le passage de la flamme montante (cf. supra § 3.2, Bagdad).

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FIG. 325 – Schéma du four à faïences de Meybod (Centlivres 1971 : pl. X) et, en médaillon, schéma proposé.

J.T./CNRS del.

138Ce qui est plus important ici, c’est l’aménagement de la chambre de cuisson avec sept rangs de barres (mix) de 0,70 m de longueur fichées dans la paroi et servant à empiler les poteries à cuire par l’intermédiaire de rondeaux, de couronnes et de supports rectangulaires (fig. 326‑327). Le plan de chargement de chaque étage est immuable. Le potier joue sur les pièces de différents diamètres : les plus grandes étant près de la paroi, les plus petites vers le centre (Centlivres 1971 : 36, pl. XVIII). L’auteur de l’étude ne dit rien de l’espace central du four (plus d’1 m de diamètre sur toute la hauteur) : est‑il vide ou chargé ? Elle indique enfin que « selon la grandeur du four, le nombre de mix varie de 70 à 200 » ; il faut donc en conclure que ces fours sont de dimensions très variables (le dessin représente un four de 90 barres disposées sur cinq rangs).

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FIG. 326 – Enfournement de bols à Meybod : différents types de supports (Centlivres 1971 : fig. 26).

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FIG. 327 – Enfournement sur les barres à Meybod (Centlivres 1971 : fig. 27).

Rayy (Iran)

139En 1932, les fours étaient équipés d’étagères circulaires construites en briques couvertes d’argile (Farajollah 1939 : 1705).

Samarcande (Ouzbékistan)

140L’artisanat récent utilisait des barres il y a environ vingt ou trente ans (Samarcande 1992 ; Peskereva 1959).

Shah Reza (Iran)

141Dans ce centre proche d’Isfahan, H.‑E. Wulff (Wulff 1966 : 159‑160, fig. 239) décrit une structure double abritée sous une coupole commune (fig. 328). Chaque four possède un foyer débouchant dans la chambre de cuisson par un trou unique. On accède à la chambre supérieure par une porte latérale et par un trou d’homme percé dans la coupole. Les parois sont recouvertes d’étagères. Le dessin reproduisant le circuit de la flamme, montant puis redescendant pour emprunter des cheminées externes (cinq à huit), indique bien l’application du principe de la flamme renversée.

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FIG. 328 – Coupe du four de Shah Reza (Wulff 1966 : fig. 239).

5 Restitution des fours et emploi des barres

5 1 Restitution du four

142fig. 329

Le foyer et sa porte

143Après une série d’interrogations toujours issues de la reconstitution de la charge, il a été possible de rechercher la position du foyer dans les fours de la Calle Ceferino de Murcia. Ce qui semble assuré, c’est la présence du foyer dans la porte ou un peu en avant de celle‑ci. Le foyer est voûté et légèrement en avancée sur le four. La dernière découverte à Priego de Córdoba confirme bien les déductions antérieures et le début de preuve obtenu à Murcia. Dans plusieurs cas, un aménagement particulier du « foyer » ou plus exactement de la « chambre du feu » est réalisé. Dans les grands fours de Nishapur ou de Kashan, un socle peu élevé est bâti à la base de l’espace central du four et semble utile pour y faire reposer la charge centrale.

144Il reste à définir l’aspect de la porte du foyer. Deux cas peuvent se présenter et sont illustrés archéologiquement :
– le foyer, précédé d’une fosse d’accès taillée assez profondément dans le sol, s’ouvre par une porte verticale qui peut être assez haute. Dans ce cas, on peut sans doute envisager, en cours de chauffe, une obturation partielle, illustrée à Solitrennœ, du type encore utilisé à Fustat (plusieurs ouvertures superposées sont utilisées successivement pendant la cuisson) ;
– le foyer s’ouvre directement au niveau du sol par une petite ouverture horizontale ou légèrement oblique (cas d’un des fours de Meskene, par exemple, ou peut‑être à Priego de Córdoba).

La sole

145Lorsqu’elle existe, la sole s’ouvre sur la chambre de cuisson par un unique trou central de grand diamètre. Dans ce cas, le foyer ressemble à un couloir relativement étroit. Les fours byzantins semblent avoir une sole classique sur un ou plusieurs supports (fig. 301). Plusieurs fours sur des sites différents (Takht‑i‑Suleiman et Solitrennœ) ont un aménagement particulier : plusieurs conduits étroits sont percés dans les parois du foyer et débouchent au niveau de la sole par de petits orifices dans une rainure périphérique au pied de la paroi. Dans ce cas, il semble que l’on ait voulu mieux équilibrer la progression de la chaleur (hypothèse apparemment en contradiction avec les hypothèses de chargement et de cuisson).

Les banquettes

146En l’absence de sole, le four peut être ou non muni d’une ou plusieurs banquettes en retrait réduisant progressivement la surface afin de faciliter la mise en place de la charge et la progression du feu. Lorsque la banquette est assez large, plusieurs conduits percés au bas du foyer débouchent à la surface de cette dernière, sans doute pour équilibrer le feu. Ce dernier aménagement est à rapprocher de celui réalisé dans la sole et doit avoir le même but.

La chambre de cuisson et les barres

147La chambre de cuisson séparée ou non du foyer est aménagée de plusieurs rangées de barres, fixées à demeure dans la paroi. C’est d’ailleurs ce détail qui justifie la différence de couleur, donc de température, constatée sur l’une des extrémités des barres. Lorsqu’il n’y a pas ce changement de couleur, il faut sans doute opter pour une utilisation du type Teruel. Le volume de cuisson est sans doute très variable ; il semble difficile d’envisager une hauteur moindre par rapport au diamètre, la hauteur « idéale » étant proche d’une fois et demie le diamètre.

Les portes

148Apparemment, tous les systèmes ont pu être utilisés. Peu de fouilles ont apporté un indice sérieux pour la configuration de l’éventuelle porte de la partie destinée à la cuisson, sauf peut‑être à Zaragoza où la porte du foyer est aussi celle de la chambre de cuisson. Dans plusieurs cas, il existe deux portes superposées pour ces deux parties. Pour les vestiges occidentaux, hormis Zaragoza, la solution est difficile à argumenter faute d’indice archéologique suffisant. Seule l’hypothétique mode de remplissage de tels fours rend indispensable l’accès direct à la « chambre de cuisson », soit par une porte spécifique, soit par un « trou d’homme » aménagé dans le haut du voûtement.

La voûte

149À partir des modèles de l’artisanat récent à Meybod et Shah Reza, ou, plus près, à Teruel, on peut proposer deux hypothèses pour la reconstitution de la couverture de ces fours :
– une voûte munie d’un trou d’homme sur la chambre de cuisson légèrement conique pour les fours de petites dimensions (fig. 329. 1) ; ce modèle est obtenu en restituant sur le four de Zaragoza de la Calle César Augusto le système des fours actuels de Meybod. Le trou d’homme paraît en effet nécessaire pour faciliter le chargement ;
– un voûtement partiel et un large trou sur les grands fours cylindriques (fig. 329. 2) ; cette restitution prend son modèle sur les grands fours de la Calle San Pablo de Zaragoza présentant un rétrécissement du diamètre en partie haute, et sur les fours récents de Teruel. La large ouverture, de l’ordre de 1,20 m à Teruel, permet d’achever le chargement de la partie centrale du four par le haut.

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FIG. 329 – Proposition de reconstitution : 1 petit four de Zaragoza et Balaguer ; 2 four de Marseille ; 3 grand four de Murcia ; 4 grand four de Zaragoza ; 5 four de Nishapur ; 6 four de Meskene ; 7 four de Serres.

J.T./CNRS del.

150Faut‑il restituer un voûtement complet comme certains auteurs le proposent (fig. 296, 312, 318) ? Doit‑on suivre les inventeurs du four de Priego de Córdoba dans leurs déductions à partir des éléments de voûtement recueillis en fouille et portant au‑dessus des rangées de trous de barres la trace de conduits de cheminées à la naissance du voûtement ? Cette découverte est troublante. La question reste ouverte. L’absence de porte dans les parties hautes sur certaines des structures découvertes semble nécessiter l’ouverture supérieure dans la voûte. Cette hypothèse est à conjuguer avec la thèse soutenue ici à propos du chargement et du fonctionnement de ce type de four.

5.2 Chargement et accessoires, esprit de la cuisson

151Le chargement des poteries est envisagé successivement pour les fours à flamme directe et les fours à flamme renversée ; cet aspect, comme le principe de la flamme renversée, n’a jamais été abordé par les auteurs des découvertes anciennes.

Fours à flamme directe

152Le problème du chargement semble en théorie lié au fonctionnement du four. Aucune description connue pour l’instant ne décrit complètement cette opération : seule la partie sur les barres est traitée. Cela suppose‑t‑il que le centre reste vide ? Dans ce cas, une très grande part du volume du four est dédiée au tirage qui risque d’être fort important et la chaleur a peu de chances d’irradier correcte ment sur les bords (sans parler du gaspillage de combustible). Dans ce cas toujours, pourquoi des barres ? La présence de barres semble liée à l’obligation de faire passer prioritairement la flamme par ces étagères, d’où, semble‑t‑il, un indispensable obstacle à la progression du feu dans l’espace central, pour les fours à flamme directe, c’est‑à‑dire une charge serrée. Les fours d’Espagne ou de Marseille sont de ce type.

153Les pièces de qualité, recouvertes de glaçure stannifère et décorées, sont placées, ouvertures en bas, sur les étagères de barres et sont séparées entre elles par des pernettes. L’espace central, plus ou moins grand suivant le diamètre du four, pourrait être chargé à partir du bas sur tout ou partie de la surface laissée par les barres59. Cette charge réalisée avec des pièces plus grandes et plus épaisses, ouvrage courant non glaçuré ou glaçuré au plomb (les pièces plus petites étant placées plus haut dans cette charge centrale), peut également s’appuyer latéralement sur le bout des barres portées par les banquettes lorsqu’elles existent60. Cette charge centrale, supposée plus « serrée » que la charge sur les barres dite ici « aérée », ralentit la progression de la flamme et surtout empêche la progression des cendres. Elle ne laisse donc passer qu’une chaleur « propre » vers les bords où les poteries émaillées se trouvent sur les barres ; la chaleur peut progresser facilement grâce à l’espacement des barres et la charge « aérée ».

Fours à flamme renversée

154Dans le cas des fours de Bagdad, Nishapur ou Meskene en comparaison avec Shah Reza, la reconstitution des parties hautes semble plus problématique : voûtement ou non, cela n’a en fait pas beaucoup d’importance. Le but est d’obliger la flamme à redescendre pour sortir par les orifices bas des cheminées. Pour leur chargement, il faut peut‑être imaginer la même chose que précédemment (ici avec l’ouverture des poteries vers le haut) mais avec un aménagement particulier de la charge centrale. En effet, afin que le tirage soit assez violent, il paraît nécessaire que le trou de chauffe unique corresponde à un vide dans cette charge matérialisée par un empilement assez serré. La flamme est alors propulsée vers le haut, bute contre la « fermeture » et redescend dans la charge latérale « aérée » posée sur les barres pour atteindre les cheminées et remonter dans celles‑ci vers l’extérieur. La cuisson mieux équilibrée est alors de meilleure qualité.

Four mouffle

155Naumann envisage cette restitution pour les fours de Takht‑i‑Suleiman sans avoir la possibilité de la justifier par des exemples archéologiques médiévaux. Il s’appuie sur une hypothèse de H. Hodges (Naumann 1971 : 181, Abb. 7)61 pour la cuisson des glaçures. Partant de l’existence d’une saignée séparant la sole de la paroi cylindrique du four, il restitue un mouffle sur la sole à l’intérieur de la paroi du four. L’avantage de ce type de structure est d’isoler la charge à cuire de la flamme et des gaz pour une meilleure cuisson des glaçures par irradiation entraînant une grande qualité des couleurs. Pour cela, Naumann est obligé d’annuler le grand trou de chauffe central existant dans la sole d’un des deux fours de ce site. Il ne peut non plus justifier l’utilité des barres dans ce cas de figure. Apparemment, les barres deviennent assez inutiles puisque leur rôle de support « aéré » est alors fort réduit. Sans nier l’existence possible du four mouffle en des temps reculés (il faudrait tout de même avoir quelques indices probants), il semble assez hasardeux de conserver à l’esprit cette hypothèse.

Accessoires d’enfournement

156Les pernettes de différents modèles et surtout de dimensions très variables sont employées dès que l’on cuit de la céramique glaçurée, a fortiori émaillée. Il n’est donc pas étonnant d’en relever la présence un peu partout. Ce n’est pas une nouveauté !

157Les gazettes, en revanche, sont rarement évoquées pour des périodes aussi anciennes. Cela tient sans doute à leur emploi semble‑t‑il assez rare mais aussi à des difficultés d’identification formelle. En l’absence d’étude exhaustive du mobilier dans la plupart des fouilles et de l’examen attentif de tous les tessons, il est effectivement impossible de détecter de tels objets lors des travaux de terrain. Les quelques fragments de caissette en terre mêlée trouvés à Marseille en sont un bel exemple : ils ont été identifiés en fin d’étude typologique. En Occident, elles sont présentes aussi à Agrigente et Toledo, ce qui est très peu comparé au nombre de sites étudiés, en Espagne surtout. Abu’l‑Qasim mentionne, dans son traité, leur emploi sans autre précision.

158Les barres sont appelées différemment suivant les auteurs : amudfs, rollos, barras de ahornar, davos de ahornar, llongos, cylindres, pilaretes, carretes, birlos. Leur emploi reste hypothétique dans les publications relativement anciennes en Espagne (par exemple Rossello‑Bordoy, Camps 1973) : séparer les piles de poteries dans le four afin de les empêcher de coller entre elles. La formule est floue car la barre peut être envisagée verticale (et servir de support aux rodells comme dans une charge en échappade suivant l’une des hypothèses d’emploi à Paterna62) ou horizontale pour séparer les pièces au même titre que la pernette. Il n’est plus nécessaire de reprendre le long cheminement de ces interprétations pour admettre l’utilisation classique des barres : séries de barres fichées dans la paroi portant les pièces séparées entre elles par des pernettes (atifles). Rossello‑Bordoy indique, à juste titre, une différence de couleur de cuisson sur les barres qu’il attribue à une différence d’intensité de cuisson. Mostalac Carrillo, grâce aux barres en place (Mostalac Carrillo 1990), indique la raison retenue maintenant et vérifiée partout : les barres sont fichées dans la parpi du four directement dans des trous ou plus rarement dans des cylindres63 scellés dans la paroi. L’emploi du petit modèle de barre (clavos)64 permet d’appuyer les petites formes glaçurées sur la paroi, d’où sa forme généralement courbe et digitée, pour empêcher la pièce de glisser, en collant le moins possible à la barre.

159L’emploi classique des barres ne doit pas faire oublier d’autres façons de les utiliser. Les barres toujours cylindriques effilées sont utilisées pour fractionner le poids de la charge. Elles reposent à l’horizontale sur des supports verticaux créant des sortes de caissons où les poteries à cuire sont disposées. Cette pratique récente, comme à Teruel par exemple (Mesquida Garcia et al. à paraître), est suggérée par différents auteurs pour le Moyen Âge ; elle est envisagée pour les fours de Paterna, entre autres, toujours en comparaison avec l’artisanat actuel. Aucune certitude n’est acquise pour les périodes anciennes, mais de bonnes raisons permettent d’envisager sérieusement cette hypothèse.

160D’autres ustensiles peuvent avoir été employés pour disposer les pièces à cuire dans le four quel que soit le dispositif des barres. Les rondeaux (rodells) ont parfois été interprétés comme des supports de cuisson sans toutefois présenter de trace de collage de la glaçure. Leur usage traditionnel se rapporte au tournage, mais un remploi ne peut être exclu pour la cuisson (des objets de ce type sont employés dans les fours contemporains à Meybod en Iran) : objet entier ou, sans doute plus plausible, fractionné, utilisé alors comme cale. On utilise surtout des pernettes de différentes grandeurs, en grande quantité, des anneaux ou des formes en S, plus rarement65. Naumann citant Albaum (Albaum 1969) indique qu’à Samarcande (Afrasiyab) les petites pièces, des lampes surtout, étaient suspendues aux barres à l’aide de petits crochets de terre cuite en forme de S ou de 0 (fig. 313).

5.3 Production

161Y a‑t‑il une production spécifique que l’on cuit de façon préférentielle dans les fours à barres ? Il est bien difficile de répondre à une telle question car elle dépend étroitement de l’interprétation stricte de la stratigraphie de comblement du four découvert (Thiriot 1990) : seuls les tessons appartenant aux couches de cendres en place au fond du four peuvent être considérés comme les productions de ce four. Il est naturellement admis que cette définition stricte est à dépasser pour définir les productions de l’atelier, mais alors le lien entre four et production n’est plus à faire, surtout si plusieurs types de fours coexistent. Dans ces conditions, peu de fouilles permettent cette distinction, en admettant que les fours aient conservé une partie des cendres « de production » (ce qui n’est malheureusement que très rarement le cas). Alors doit‑on prendre à la lettre la liste des « productions » annoncées d’un atelier et la mettre en rapport avec le four à barres associé à d’autres types ? Dans l’état actuel, une critique assurée des publications disponibles étant difficilement envisageable (il faut la remettre à plus tard !), on constate que sur la plupart des sites où des fours à barres sont présents, la production est très diversifiée : poterie commune glaçurée ou non, poterie fine en biscuit, glaçurée ou émaillée et décorée. La présence de céramique à glaçure stannifère paraît constante mais ne semble pas la raison d’être indispensable de ce type de four sophistiqué ; le cas des fours byzantins en est la preuve. Si on peut cuire de la céramique émaillée dans des fours divers, on peut sans doute mieux les cuire dans un four à barres grâce au système évolué de la mise en place de la charge et du flux de chaleur différencié entre étagères et charge centrale. Alors d’où vient l’intérêt pour un four aussi compliqué qui semble avoir subi de nombreuses transformations dans sa conception jusqu’à aboutir à la flamme renversée au Proche‑Orient ?

5.4 Barres seules

162Il semble assez clair maintenant que la présence de barres n’implique pas obligatoirement une paroi de four percée de trous, même si, pour l’instant, nous n’avons pas la preuve formelle de l’existence de tels fours médiévaux (sauf peut‑être à Paterna ?)66 à l’image de Teruel.

163Que représentent les barres découvertes sans fours sur certains sites ? Sont‑elles la trace d’un artisanat de la poterie utilisant cette technologie avancée, ou une des formes dégradées de cette technique ? Sont‑elles plus simplement remployées comme matériau de construction (banquette, arceau...) pour les fours ou pour une utilisation domestique (étagères, sols...) ? Quelle est l’utilisation des barres découvertes avec des fours qui, partiellement conservés, ne présentent pas les caractéristiques des fours à barres ? Les fours byzantins illustrent bien ce problème. C’est le cas du four de Paterna par exemple qui, pourquoi pas, pourrait avoir des trous dans les parois hautes de la chambre de cuisson, même si l’on n’a pas trouvé de fragment de paroi avec trou et même si l’artisanat récent employait l’échappade pour le chargement des poteries.

164En conclusion, la présence de barres ne peut pas être associée systématiquement à l’existence d’un four à barres mais à une possible pratique d’empilage particulier. Cependant, il y a de grandes chances que les barres soient le témoignage d’un four ancien ; les cas de remploi sont sans doute plus fréquents qu’on ne pense.

6 De l’évolution du four à barres

165Les découvertes évoquées ici permettent d’avancer un peu, mais la synthèse reste encore floue (fig. 289, 329). On peut émettre quelques hypothèses même si de grandes zones géographiques n’ont pas, pour le moment, livré de tels fours (le Maghreb par exemple).

166Un modèle primitif à chambre unique sans aménagement particulier (type Marseille ? fig. 329.2) évoluant vers le four à banquette(s) (Zaragoza, etc. fig. 329.1, 3, 4) peut avoir été utilisé dans tout le monde islamique dès le xe s. (ixe s. à Samarcande fig. 312). Les marches peuvent apporter une plus grande résistance aux barres qui s’appuient sur elles. Servent‑elles alors de support ou de calage latéral à la charge centrale ? Les fours fonctionnent sur le principe du tirage vertical et nécessitent un système sophistiqué de mise en place des poteries à cuire afin que le tirage soit modulé entre la charge centrale et les parties latérales. Est‑ce un modèle qui vient en Occident directement dès son apparition ? Des découvertes au Maghreb, où l’on peut imaginer a priori des fours simples, seraient d’une grande utilité.

167Ce qui semble évident, c’est son évolution faible en Occident. La plupart des fours découverts jusqu’à présent sont munis de banquettes simples ou multiples (surtout au xie s.). Le four de Marseille, très tardif (xiiie s.), n’a plus de banquette. Faut‑il voir là une dégénérescence ? L’abandon rapide du four à barres juste après la création de l’atelier au début du xiiie s. (fig. 329.2) semble indiquer que le potier a rencontré des difficultés pour adapter son savoir‑faire à son milieu d’adoption (dans la recherche de matériaux appropriés à sa technique forcément différents de ceux habituellement utilisés dans son lieu d’origine, et l’implantation dans un environnement artisanal ayant d’autres habitudes). Le potier semble avoir perdu la raison d’être des barres et l’utilité d’un tel four, lui préférant un modèle plus classique (le procédé originel a‑t‑il perdu sa raison d’être ?). N’est‑ce pas le cas du four de Paterna (fin xive‑début xve s.), où les barres ont pu être utilisées comme à Teruel à l’époque contemporaine pour une charge en échappade (fig. 323) ? Dans ce dernier cas (Teruel mais aussi Paterna et Manises), les potiers n’ont‑ils pas perdu l’utilité première de ces barres tout en les employant d’une façon très astucieuse67, issue peut‑être d’une pratique ancienne ?

168Les fours byzantins à barres pourvus apparemment d’une sole perforée, issus d’on ne sait quelle filiation, ont‑ils joué un rôle dans l’évolution occidentale ? La recherche dans cette zone géographique peu connue est pour le moins à poursuivre !

169Si on peut faire une synthèse des quelques rares fours de ce type découverts au Proche‑Orient, et peut‑être plus loin vers l’est, l’évolution semble, à partir des fours à flamme ascendante, aboutir à la flamme renversée dont on date l’arrivée de façon précise à Meskene (fig. 307‑308). Entre 1230 et 1260, les fours à flamme directe sont d’abord transformés puis enfin construits directement suivant le nouveau modèle. Mais a‑t‑on affaire à des fours à barres ? Dans ces derniers, la flamme, après être montée, redescend sur le pourtour en passant par la charge sur barres (d’où une cuisson plus efficace de cette partie en flamme descendante) puis remonte dans les cheminées externes en réchauffant la paroi (ici la flamme sert trois fois). L’aboutissement de cette évolution semble illustrée, plus à l’est, à Nishapur, quelque temps avant sans doute, où les conduits intérieurs sont destinés à mieux répartir la flamme (fig. 310). Ici la technique dégénère aussi, mais plus tardivement peut‑être, puisque les fours récents de Rayy sont équipés d’étagères pleines. S’agit‑il d’une dégénérescence du four perfectionné à barres et à flamme renversée avec charge totale, ou d’une adaptation plus simple du four primitif à barres et à flamme directe dans lequel les barres ne semblent pas se justifier, avec, parallèlement, une perte de signification des barres ?

170Le sujet est loin d’être épuisé. Les hypothèses émises sont à étayer. Tout cela est bien entendu une vue de l’esprit simplement destinée à stimuler les imaginations, à susciter les critiques...

Bibliographie de l’annexe

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172Acién Almansa 1995 : ACIEN ALMANSA (M.). — Alméria. In : Le Vert et le Brun, de Kairouan à Avignon, céramiques du xexve siècle : catalogue d’exposition, Marseille La Vieille Charité, nov. 1995‑ janv. 1996. Marseille : RMN/musée de Marseille, 1995, p. 21‑22.

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279Soustiel 1985 : SOUSTIEL (J.). — La Céramique Islamique : le guide du connaisseur. Paris : Éd. Vilo, 1985. 424 p.

280Stern 1995 : STERN (E.J.). — An Early Islamic Kiln in Tiberias. Atiquot, XXVI, 1995, p. 57‑59.

281Taouchikht 1989 : TAOUCHIKHT (L.). — Étude ethno‑archéologique de la céramique du Tafilalet (Sigilmassa). État de la question : thèse dactylographiée, Aix‑en‑Provence, 1989.

282Terres secrètes... 1992 : Terres secrètes de Samarcande : céramiques du viiie au xiiies. Paris, Caen, Toulouse : Institut du Monde Arabe, Musée de Normandie, Musée des Augustins, 1992. 128 p. : ill.

283Thiriot 1990 : THIRIOT (J.). — Les fours de potiers, problèmes de méthode. In : Fours de potiers et testares médiévaux en Méditerranée occidentale : table‑ronde, Madrid 1987. Madrid : Casa de Velázquez, 1990, p. 169‑200. (Série Archéologie ; XIII).

284Thiriot 1994 : THIRIOT (J.). — Bibliographie du four de potier à barres d’enfournement. In : IV Congreso de Arqueologia Médiéval Espahola, sociedades en transicíon, Alicante, 1993. Alicante, III, 1994, p. 787‑798.

285Thiriot 1995b : THIRIOT (J.). — Les ateliers : textes rassemblés par J. Thiriot. In : Le Vert et le Brun, de Kairouan à Avignon, céramiques du xexve siècle : catalogue d’exposition, Marseille La Vieille Charité, nov. 1995‑ janv. 1996. Marseille : RMN/musée de Marseille, 1995, p. 18‑39.

286Thiriot à paraître : THIRIOT (J.). Les Ateliers de potiers de Bâtis/ Meskene : prospection magnétique et fouille. Bâlis III, à paraître.

287Valdés 1985 : VALDES (F.). — La Alcazaba de Badajoz. I. Hallazgos islamicos (1977‑1982) y testar de la Puerta del Pilar. Excavaciones Arqueologicas en España n° 144, Madrid, 1985.

288Whitehouse 1968 : WHITEHOUSE (D.). — Excavations at Siraf. Iran, VI, 1968, p. 1‑70.

289Whitehouse 1971 : WHITEHOUSE (D.). — Excavations at Siraf. Iran, IX, 1971, p. 1‑17.

290Whitehouse 1972 : WHITEHOUSE (D.). — Excavations at Siraf. Iran, X, 1972, p. 63‑ 99.

291Whitehouse 1977 : WHITEHOUSE (D.). — Kangan : Una fabbrica di ceramiche tradizionale neli’lran méridionale : X convegno internazionale délia ceramica, Albisola, 1977. p. 41‑62.

292Whitehouse 1984 : WHITEHOUSE (D.). — Kangan : a traditional pottery in Southern Iran. Medieval Ceramics, 8, 1984, p. 11‑ 26.

293Wilkinson 1973 : WILKINSON (Ch. K.). — Nishapur : Pottery of the Early Islamic Period. New York : The Metropolitan Museum of Art, New York Graphie Society, 1973.

294Wulff 1966 : WULFF (H.E.). — The Traditional Crafts of Persia. Cambridge (Mass.), Londres, 1966.

295Zaragoza 1991 : Zaragoza, Prehistoria y Arqueología. Zaragoza : Ed. Ayuntamiento, 1991.

Notes de bas de page

1 Cette recherche, dans une version courte et peu argumentée, a été présentée au IVe Congreso de Arqueologîa Médiéval Española d’Alicante (Thiriot 1994). Elle est complétée par l’étude de sites récemment portés à notre connaissance ou fouillés dernièrement et est présentée dans le catalogue de l’exposition Le Vert et le Brun (Thiriot 1995).

2 Des remerciements particuliers sont à adresser à M. Acíen, F. d’Angelo, D. Papanikola‑Bakirzis, G. Berti, R. Carmona, S. Fiorilia, V. François, J. Giralt, J. Gisbert, Y. Ivaschenko, J. Marti et ses collègues, M. Mesquida, F. Muñoz, A. Mostalac, J. Navarro Palazon et son équipe, A. Sazanov, F. Valdés, mais aussi à J. Allan, M. Bernus‑Taylor, F. Grenet, E.J. Stern, D. Whitehouse, Ch. Williams II, et enfin à P. Arnaud, C. Aubert, A. Nicolaïdes, C. Richarté et Y. Porter. Des échanges très constructifs avec M. Picon ont permis de justifier le fonctionnement des fours à flamme renversée et d’avancer des hypothèses de chargement des fours à barres. L’illustration a été traitée par le service de reprographie du service régional de l’Archéologle de Provence‑Alpes‑Côte d’Azur (J. Prodhomme, C. Hussy et M. Olive) et par F. Gillet (LAMM).

3 Le recensement des barres découvertes dans les lieux autres que les ateliers est loin d’être exhaustif car il nécessiterait le dépouillement de l’ensemble des publications archéologiques...

4 Ce qui correspond bien aux davos trouvés à Zaragoza.

5 À partir d’informations du conservateur du musée d’Almerïa, une visite du site a été réalisée en 1978 par G. Démians d’Archimbaud et M. Picon.

6 La consultation des informations préliminaires dans Anuario Arqueológico de Andalucía à partir de 1987 serait nécessaire pour plus de précisions.

7 Les plaques d’argile circulaires ou oblongues de différentes grandeurs, appelées ici soleras, sont sans doute à comparer, entre autres, aux rodells de Paterna. Comme l’indique J. Giralt, ces Instruments de potiers sont essentiellement utilisés pour porter la pièce à tourner sur la girelle du tour, comme on peut le voir encore dans de nombreux endroits. Curieusement, cet outil est absent à Marseille.

8 La publication initialement prévue dans les actes du colloque de Rabat est parue dans la revue Catalunya Romanica (Giralt Balaguero 1994).

9 La visite du chantier de J. Giralt, effectuée avec L. Vallauri et J.‑I. Padilla, était destinée à préparer la fouille de Marseille où des barres avaient été trouvées dans les sondages préliminaires.

10 Un troisième four à sole (sans pilier) a été découvert depuis, à proximité immédiate des deux autres. Ces fours doivent faire l’objet de moulages. À cette occasion, des prélèvements pour la datation par l’archéomagnétisme devraient être effectués. Information J. Giralt.

11 Information inédite de J.M. Pesqué Lecina.

12 Travaux de J. Lladonosa mentionnant la présence du tuilier Bernat Teuler en 1174 (Gallart Fernandez et al. 1991 : 156).

13 L’auteur signale l’existence de deux formats pour le xviie s. : ferrets comuns et ferrets de partera,

14 Protocolo de Guillem Esteve en el Archive Eclesiástico de Morella : le potier Guillem Ripoll a vendu le 12 septembre 1386 pour 12 livres aux jurés de Morella ses fours situés dans la paroisse San Juan près de la Portella de la Placeta den Monestrol. Pedro Jullach les utilise pour la fabrication de canters, escudelles, canons teilles, etc.

15 La consultation des dictionnaires par Santiago Alberti n’a pas permis d’élucider cette question.

16 Information de F. Munoz López qui a eu l’amabilité de me communiquer les manuscrits de publication de la Calle Alfareros et de la Calle Pedro de la Flor.

17 Information J. Navarro Palazon et F. Muñoz López au moment du prélèvement effectué par l’auteur dans le four pour la datation par l’archéomagnétisme.

18 En septembre 1993, F. Muñoz López m’a communiqué son manuscrit.

19 En 1993, F. Muñoz López signale dans les remblais trois fragments de rollo de alfar.

20 R. Alfonso Barbera parle de marrels pour les barres (Alfonso Barbera 1978 : 76).

21 R. Carmona Avila, responsable de la fouille, m’a obligeamment communiqué le rapport de fouille publié maintenant (Carmona 1994b). Qu’il soit remercié pour son fructueux courrier.

22 Un fastidieux travail de recollage des fragments de voûte tombés dans le four au moment de son abandon et recueillis en fouille sera effectué. Il permettra de prouver quel était le voûtement et de transformer une hypothèse en certitude. L’enjeu en vaut la peine ; ce n’est pas si courant de pouvoir arriver à une telle information concernant le voûtement d’un four. Il faut rappeler ici l’importance, dans une fouille de four, que revêt le ramassage systématique de tous les fragments de terre cuite, même informes, afin de pouvoir éventuellement, en fin de fouille, faire de telles observations (Thiriot 1990).

23 Notre analyse se bornera à la revue des sites où des barres ont été découvertes.

24 Information Javier Marti. Fouille de l’Ayuntamiento de Valencia dirigée par I. Garcia Villanueva et E. Ruiz Val.

25 Les numéros indiqués par C. Aguarod et F. Escudero (Zaragoza 1991 : 44) sont 95‑103.

26 Les trois fours à barres ainsi que deux autres dans le solar ont été vus lors d’une visite en 1990 en compagnie des archéologues de Zaragoza avec L. Vallauri, J. Giralt et L. Padilla. Ces fours, maintenant détruits, ont fait l’objet de moulages.

27 Fouille de 1991 par H. Marchesi, J. Thiriot et L. Vallauri (cf. supra).

28 Renseignements de G. Berti, S. Fiorilla et F. d’Angelo.

29 F. Ardizzone ne signale pas de découverte de barres dans sa présentation partielle du matériel in : Bonacasa 1990. La découverte de barres m’a été signalée par S. Fiorilla dans un courrier.

30 Cette comparaison découle d’une information verbale de A. Ragona à S. Fiorilla.

31 Description du four d’après Abu al‑Qâsem Kâshâni (traduction d’après Afshâr 1966 par Y. Porter de l’université d’Aix‑en‑Provence, Porter à paraître) : « Chaque pièce [est mise] dans un « moule » couvert en terre [cuite] fait à cet effet et placée à cuire dans le four, qu’on appelle en arabe shakhure et dans le langage des artisans, dam. Celui‑ci est bâti comme une haute coupole et à l’intérieur [il y a] des « clous » faits en terre cuite qui mesurent un arsh et demi [68,58 cm] et qui sont placés par rangées dans des trous du mur. On pose les pièces là‑dessus et on les cuit pendant douze heures à feu vif et constant. La condition [pour une bonne cuisson] est de ne pas rajouter de bois avant que toute fumée et vapeur ne soit sortie, afin que la fumée ne gâte ni ne noircisse les pièces. »

32 Information de R.‑P. Gayraud. Toutefois, Véronique François, qui a étudié le matériel de Kôm el‑Nadoura et Kôm el‑Dikka (François à paraître), n’en a pas vu mais n’exclut pas leur existence sur le site (le matériel ayant subi divers tris avant son étude).

33 Le professeur Ch. Ewert, du Deutsches Archäologisches Institut de Madrid, a recherché en vain l’origine de ce dessin.

34 Information inédite de R.‑P. Gayraud.

35 Ces ateliers ont été fouillés très partiellement en 1973 par l’auteur sous l’autorité de L. Golvin et A. Raymond. Leur publication est à paraître.

36 Étude préliminaire du matériel et informations de M. Bernus‑Taylor.

37 La description, Issue du texte de C. Wilkinson, est suivie d’une interprétation personnelle des illustrations.

38 Cette surélévation au centre du foyer, non illustrée ici malheureusement, est peut‑être à rapprocher des fours de Kashan (Bahrami 1938 : 226, fig. 142).

39 Four semblable à celui découvert à Damas dans le faubourg des potiers de la porte orientale (Sauvaget 1948 : 34, note 7). Malheureusement les documents concernant ces deux fouilles sont introuvables (information de N. Saliby de la direction générale des Antiquités et des Musées de Syrie).

40 M. Meinecke a bien voulu me communiquer les premiers renseignements sur ce premier four dégagé. La photographie illustrant une communication inédite faite à Alep en 1992 montre un four à arceaux transversaux semblable aux fours d’époque abbasside de Meskene.

41 Indication de M. Meinecke. Les fouilles qu’il avait projetées avant son décès devaient se développer dans le secteur repéré des ateliers de potiers.

42 Outre le catalogue de l’exposition, on a utilisé plusieurs publications en russe communiquées par F. Grenet, directeur français de la Mission franco‑ouzbèke de Samarcande depuis 1989.

43 Cette information est à vérifier dans les publications en russe. Les découvertes d’ateliers en Espagne ou à Marseille montrent qu’il n’y a pas de spécialisation apparente des ateliers. Si, par chance, il est possible de retrouver tout ou partie de la charge dans un four (c’est surtout ce dernier cas qui prime ; il faut un fait exceptionnel comme l’invasion des Mongols pour que le potier abandonne ses produits commercialisables...), ou tout au moins des tessons relatifs à ses productions, cela reste presque toujours du domaine de l’anecdote par rapport à la production réelle de l’atelier, surtout lié à une possible commande particulière.

44 Apparemment, les vestiges de fours, conservés toutefois sur une hauteur conséquente, ne présentent pas de trace formelle pour justifier un voûtement total : c’est ici une hypothèse de reconstitution. Ces fours sont à comparer aux autres découvertes orientales et aux ateliers traditionnels contemporains malheureusement assez méconnus.

45 Information de A. Sazanov et Y. Ivaschenko. En l’absence de traduction de la publication de Fedorov, la description s’appuie sur l’illustration graphique remarquable (Fedorov‑Davidov, Bulatov 1989 : 135, fig. 2.1 à IV ; 139, fig. 6 ; 156, fig. 16‑17 ; 157, fig. 19) et la photographie des deux fours (Fedorov‑Davidov, Bulatov 1989 : 157, fig. 18).

46 Les deux portes semblent partiellement bouchées.

47 La superposition des portes est comparable à Meskene.

48 Le four 20 a conservé deux rangs assez espacés de trous de barres. Les trous sont nettement plus resserrés dans le grand four 20 que dans le petit four 23.

49 Ces cheminées sont‑elles construites avec la structure ou sont‑elles une transformation du four ? La vue d’ensemble des fours (Fedorov‑Davidov, Bulatov 1989 : 157, fig. 19, dessin au trait apparemment d’après photo) semble suggérer qu’une des cheminées du grand four 20 est une transformation.

50 Cet aménagement semble correspondre à la structure des fours de Takht‑i‑Suleiman. Dans les deux cas, une rainure peu profonde pour Selltrennœ court au bas de la paroi du four en périphérie de la sole.

51 Information F. Grenet et J. Soustiel (visite du site en 1991).

52 Une rainure a été trouvée dans un four de Selltrennœ. Peu profonde, elle relie également de petits orifices latéraux de chauffe afin d’homogénéiser la température dans les parties basses de la charge.

53 Il semble difficile de suivre l’auteur dans sa rapide analyse de ce reste de four qu’il interprète comme un très petit four en signalant toutefois sa particularité par rapport aux fours connus dans cette région.

54 Information de G. Rossello‑Bordoy : un vieux potier, maintenant décédé, lui g indiqué qu’avant des barres étalent utilisées pour séparer les piles de pots dans les fours à Sa Cabaneta.

55 Indications de F. Amigues qui a rencontré ces potiers.

56 I. Alvaro Zamora parle de birlos pour Teruel (Alvaro 1981 : 36). Elle mentionne également les clavos, sans préciser le lieu d’utilisation.

57 Les fragments plus ou moins longs, présentant par conséquent un bout plat et un autre effilé, sont utilisés aussi.

58 Le processus de chargement sera abordé en détail dans une étude particulière réalisée en collaboration avec le dernier potier ayant pratiqué cette technique (Mesquida et al, à paraître).

59 Une partie de la surface intérieure du four peut être réservée pour le feu, mais cela ne semble pas indispensable.

60 Les rangées de barres sur les banquettes pouvaient peut‑être porter des charges plus grandes ou subir une action plus violente du feu. Ces barres renforcées ont pu également servir à caler la charge centrale.

61 Naumann précise que cet auteur (Hodges 1968 : 38, Abb. 3, 4) n’avance malheureusement aucune preuve : « ohne jeglichen historischen Nachweis ». Le four mouffle est composé d’un four classique à l’intérieur duquel une chambre de cuisson étanche sert à cuire les poteries protégées de la flamme et des gaz qui passent entre les deux parois.

62 Indications de F. Amigues.

63 Les tubes trouvés avenue César Augusto, à Zaragoza, sont de différents diamètres (Mostalac 1990 : 68‑70). Toutefois, ces éléments sont à distinguer des pieds de tambourins couramment fabriqués dans ces ateliers du sud de l’Espagne.

64 Curieusement, les fragments de grandes barres sont appelées davos à Teruel (information D. Punter).

65 Ces éléments sont systématiquement signalés lors des découvertes. Une étude plus précise serait à entreprendre à leur sujet afin d’en définir la typologie (Martín Gomez, Cliva Alonso 1986) et l’emploi différencié. Par exemple, vérifier cette hypothèse de l’emploi des pernettes pour empiler les formes ouvertes et des anneaux pour les formes fermées ou définir correctement l’usage des formes en S (y accrocher de petites formes par l’anse paraît étonnant).

66 Peut‑on envisager un emploi plus domestique des barres pour des étagères dans les maisons, même si cet aspect n’est pas documenté ? M. Gonzalez Marti (Gonzalez Marti 1944 : 28) signale leur remploi dans le pavement d’un atelier à Olocau del Rey (Castellón) à côté de Morella où l’auteur semble avoir relevé l’emploi de barres (?) dans des textes de 1388.

67 La conception récente de barres à section carrée s’est révélée totalement inappropriée...


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