Navigation et milieu fluvial au XIe s.
| ,Partie 2. La Charente : aménagements du lit et des rives, navigation fluviale, économie régionale
Chapitre 1. L’aménagement de la Charente, du Moyen Âge à nos jours
Chap. 1 Improvements to the Charente from the medieval period to the present
Résumé
A partir du xie s., les aménagements du lit et des rives de la Charente commencent à se multiplier. Certes, il s’agit encore d’aménagements de dimensions modestes (moulins et pêcheries en particulier), mais leur accumulation a eu une influence manifeste sur le régime du fleuve et a constitué une amorce de sa régularisation dont il est difficile de savoir, en l’occurrence, si elle a répondu à un choix délibéré. Le secteur le plus concerné fut celui compris entre Saintes et, en amont, Port‑du‑Lys. Deux raisons principales expliquent l’importance de cette zone : une pente faible du fleuve, et, à un tout autre niveau, la concurrence économique entre les divers seigneurs laïques et ecclésiastiques liée à l’installation des moulins, pêcheries, bacs... et aux revenus qui pouvaient en être retirés. Dès le xiie s. et surtout le xiiie s., les aménagements destinés à améliorer la navigation résultent à l’évidence de décisions politiques et économiques. A cette époque, la Charente est prise en compte dans les activités régionales ; une batellerie existe et possède un rôle commercial affirmé. Si les travaux ambitieux de régularisation ont débuté réellement à la fin du xviiie s. (projet Tresaguet, 1772), ce n’est que vers le milieu du xixe s. que l’aménagement de la Charente aboutit véritablement. Désormais, l’objectif des aménageurs successifs était atteint : les caboteurs pouvaient remonter jusqu’à Saintes et les gabares de tonnage important (60 t et plus) pouvaient atteindre Angoulême.
Texte intégral
1.1 Introduction
Abréviations
1ADCM : Archives départementales de la Charente‑Maritime
AHSA : Archives historiques de la Saintonge et de l’Aunis
AN : Archives nationales, Paris BMLR : Bibliothèque municipale de La Rochelle
BMS : Bibliothèque municipale de Saintes BN : Bibliothèque nationale, Paris
ms. lat. : manuscrit latin
2L’un des aspects originaux de l’archéologie médiévale est l’existence de sources écrites qui, selon les époques, les problèmes ou les régions, peuvent apporter des informations plus ou moins abondantes. La confrontation des sources écrites et des données archéologiques est l’un des problèmes les plus intéressants et les plus complexes, d’un point de vue méthodologique, qui se posent aux spécialistes du Moyen Âge. En effet, ces deux sources d’information n’abordent que très rarement les problèmes sous le même angle : il est donc difficile d’utiliser l’une pour faire parler l’autre ou pour mieux la comprendre. On peut donc juger combien les difficultés sont grandes quand on se trouve, comme ici, devant une région de France parmi les plus pauvres en archives médiévales et une question, la navigation fluviale, qui tient ordinairement peu de place dans celles‑ci.
3A ces difficultés s’en ajoute une autre qui se pose de plus en plus souvent aux archéologues médiévistes quand leur documentation archéologique correspond à un problème que les historiens ont complètement négligé ou étudié d’une manière qui ne tient aucunement compte des informations susceptibles d’être fournies par la fouille. Ce point est spécialement net ici : depuis longtemps, les historiens de l’économie et de la société de la Saintonge au Moyen Âge, comme d’ailleurs ceux des autres régions, ont écrit des synthèses souvent très documentées mais dans lesquelles fleuves et rivières n’ont guère de place, sinon aucune. Comment, dans ces conditions, interpréter dans une perspective économique et sociale des découvertes archéologiques comme celles qui sont présentées ici ?
4Il appartient alors à l’archéologue de restituer le cadre technique, social et économique dans lequel évoluait la navigation sur la Charente avant le xiiie s. Nous verrons successivement ce que l’on connaît de l’état du fleuve aux xe‑xiiie s. et ce que les sources écrites nous apprennent sur son utilisation au Moyen Âge. Puis nous tenterons, à partir de ce cadre historique général et en fonction de l’analyse archéologique de ces épaves donnée précédemment, d’utiliser ces dernières dans une interprétation historique éclairant la navigation sur la Charente aux xe‑xie s. et l’économie de ce secteur à cette époque.
1.1.1 Les étapes de la régularisation de la Charente
5Trois éléments caractérisent un fleuve : sa topographie, son hydrologie et son hydraulique.
6La topographie d’un fleuve, c’est l’étude de sa section et de la pente de son cours, d’où l’on calcule le débit, une donnée fondamentale. Le profil de ses lits mineur (où il coule en période de basse eau), moyen (où il coule en temps ordinaire) et enfin majeur (qu’il occupe en période de crue) est le second élément essentiel, les implications historiques de cette question étant de première importance.
7L’étude du régime hydrologique intervient ensuite : la pluviométrie, les modèles d’écoulement d’eau en fonction des terrains et du profil du bassin‑versant, enfin l’examen des niveaux d’eau observés, y compris anciennement, constituent cette seconde phase.
8Dans un troisième temps, connaissant les éléments topographiques et le volume d’eau qui s’écoule, on peut aborder l’étude hydraulique qui consiste en la définition de modèles d’écoulement en différents régimes, uniformes ou variés, et en la recherche, notamment, des points d’étranglement dans le lit.
9Pour l’historien, une quatrième étape est essentielle : la dynamique de l’évolution du cours du fleuve et cela en remontant aussi loin que possible dans le temps. L’utilisation de la méthode régressive s’impose. On partira donc d’un bref historique de la situation actuelle du fleuve, avant de tenter une synthèse des informations dont nous disposons sur la période antérieure.
1.1.1.1 Topographie du fleuve
- 1 ADCM, S 2092 : projet de travaux à Saint‑Savinien (27 novembre 1857).
- 2 Mémain 1936 : 54‑56. L’auteur étudie en détail la partie basse de la Charente.
10Le lit moyen de la Charente a, à Saintes, une largeur d’environ 35‑40 m. Vers l’aval, sa largeur croît : il atteint 45 m un peu en dessous, à Port‑Berteau (commune de Bussac), plus bas encore, à Taillebourg, de l’ordre de 60 à 70 m. À Saint‑Savinien en revanche, alors que la Charente a reçu en amont plusieurs affluents, il se rétrécit à seulement 38 m1 . En se rapprochant de la mer, à Tonnay‑Charente, sa largeur est déjà de 75 à 100 m, au moins autant à Rochefort, enfin de l’ordre de 600 m à l’embouchure, à l’alignement de Fouras et de l’île Madame2. Au‑dessus de Saintes, le lit moyen a une largeur très irrégulière mais souvent supérieure à celle de l’aval dans le secteur Saintes‑Taillebourg.
11Dans l’ensemble de son cours dans les départements de la Charente et de la Charente‑Maritime, le fleuve a une pente moyenne mais avec un profil très différent selon trois sections bien distinctes (Rieth 1973 : 14). En amont de Montignac (Charente), pour un cours de 154 km, la pente est forte, en moyenne 1,68 m/km. Dans son cours moyen, sur les 120 km qui séparent Montignac de Merpins (Charente), un peu en aval de Cognac et presque à la limite des deux départements, la pente moyenne est assez faible, 0,42 m/km. Au‑delà, la Charente entre dans son cours inférieur et le profil du lit se caractérise par une rupture de pente extrêmement nette : dans un premier temps, de Merpins jusqu’au confluent avec la Boutonne, en aval de Saint‑Savinien, la pente reste continue, si bien qu’en réalité, dans une partie de cette section, le lit passe au‑dessous du niveau de la mer. Puis, à partir de la confluence avec la Boutonne, il remonte progressivement pour revenir au niveau de la mer. Au total, compte tenu de cette rupture de profil, la pente moyenne du cours inférieur est très faible, de l’ordre de 0,04 m/km pour les 100 km qu’il représente.
12Une première conséquence de ce profil en long est une navigation relativement aisée dans le cours inférieur, soumis par ailleurs aux effets des marées et sujet à des remous importants. Par contre, au‑dessus de Cognac, la disparition de l’onde‑marée et de ses effets et la pente du fleuve limitent les possibilités de remontée en courant libre. Une seconde conséquence est liée au profil transversal du lit. Jusqu’en amont de Cognac, la Charente coule dans un lit majeur, le plus souvent bien limité par deux lignes parallèles de collines ; les méandres sont peu importants, sinon inexistants. En dessous de Cognac et jusqu’à Saint‑Savinien, le paysage change : le lit majeur peut atteindre une très grande largeur (1 km, parfois 1,5 km et même, en certains endroits, 2,5 km, comme lors de la grande crue de l’hiver 1982‑1983) et le fleuve coule dans une vallée alluviale où il trace souvent des méandres très marqués.
13Mises à part de courtes sections, l’une des deux lignes de collines entre lesquelles coule le fleuve est souvent au contact de celui‑ci, l’autre restant relativement éloignée, séparée de lui par des alluvions : d’où, d’une manière générale, des rives dissymétriques, d’un côté haute et concave, formée par la ligne de collines qui peut même se transformer en falaises (par exemple à Saint‑Vaize ou Saint‑Savinien), de l’autre basse, obtenue par comblement alluvial en avant du relief limitant le lit majeur.
14Les agglomérations se succèdent tout le long du fleuve, occupant, au bord du lit moyen, les avancées de la ligne de relief qui vient souvent au contact de l’eau. On peut distinguer les petites agglomérations, comme Orlac, et les grandes, comme la ville de Saintes ou, plus souvent, d’anciens bourgs castraux comme Taillebourg ou Cognac. Les petites agglomérations, dont Orlac est un exemple type, sont au bas de la ligne de colline, avec un développement très limité en direction du fleuve, en général un simple quai plus ou moins aménagé, complété parfois par une chaussée d’accès insubmersible. Dans le cas des agglomérations d’une certaine importance, comme Cognac, Saintes, Taillebourg, Saint‑Savinien ou Tonnay‑Charente, une excroissance de l’agglomération s’est installée, dès le Moyen Âge, en lit moyen, toujours auprès d’un port avec quais, le cas échéant au débouché d’un pont. Elle est parfois complétée par l’apparition d’un véritable faubourg sur la rive opposée, au débouché du pont, comme à Saintes, Taillebourg ou Cognac. Le développement de ces agglomérations a conduit à la mise en place, à partir du Moyen Âge, d’un étranglement plus ou moins marqué du lit majeur, sinon moyen, le cas le plus remarquable étant Saintes.
1.1.1.2 Hydrologie
15Un ensemble d’affluents existe en aval de Cognac et jusqu’en amont de Saint‑Savinien, soit en rive droite (Antenne, Coran, Boutonne, Bramery, etc.), soit en rive gauche (Ne, Seugne, Arnoult), sans conséquences notables sur le débit de la Charente à cause de leur faible débit propre. Mais ces rivières ont joué un grand rôle dans l’histoire locale à cause des nombreux aménagements de déversoir de moulins qu’elles permettaient.
16L’influence de la marée fluviale est plus importante pour le débit que l’apport de ces affluents. La large embouchure de la Charente avec, de plus, une orientation en direction de l’arrivée de l’onde‑marée, permet une bonne remontée de celle‑ci, du moins dans un premier temps. Les méandres de Rochefort et Tonnay‑Charente ralentissent assez vite sa progression qui est ensuite très freinée par le seuil naturel de Saint‑Savinien.
1.1.1.3 Hydraulique
- 3 ADCM, S 1401 : séance du conseil général du 7 septembre 1849, décrivant le courant rapide qui exist (...)
17Du point de vue de la navigation, le seuil de Saint‑Savinien est une donnée essentielle3 Il entraîne l’arrêt en ce lieu d’une partie de la navigation remontant le fleuve et cela d’autant plus que cet accident topographique se combine avec un changement d’orientation de la Charente. En aval, celle‑ci est à peu près O.‑E., donc très bien orientée pour que les embarcations montantes bénéficient des vents dominants de secteur ouest, alors qu’en amont, au contraire, elle est d’orientation N.‑S., donc moins favorable à la remontée à la voile aux allures portantes. La conjonction de ces deux phénomènes naturels au moment où la navigation sur la Charente devint importante, aux xiie‑xiiie s., a fait apparaître à Saint‑Savinien, en aval de Taillebourg –centre de la seigneurie du même nom et château de toute première importance– une bourgade nouvelle qui, progressivement, a supplanté comme port de rupture entre la mer et le fleuve le port, certainement plus ancien, du bourg castrai de Taillebourg.
18Saint‑Savinien n’était pas le seul seuil dans le fleuve : les deux ponts d’origine gallo‑romaine de Taillebourg et de Saintes avaient les mêmes conséquences, au point que pour l’essentiel les navires de cabotage, dès le xvie s. au moins, ne dépassaient pas Saintes et passaient difficilement au‑dessus du pont de Taillebourg, sauf avec le flot.
19Il n’en reste pas moins que l’effet de l’onde‑marée se fait sentir, même actuellement encore, après la construction d’un barrage à Saint‑Savinien en 1968, bien au‑delà de ce lieu. Selon les auteurs anciens, C. Masse au début du xviiie s. ou l’ingénieur Munier en 1779, l’effet des hautes marées, conjugué à un courant de rivière faible, pouvait se faire sentir jusqu’au pont de Cognac, avec des variations de niveau d’eau de trois à quatre pouces (Munier 1779 : 91). Avant l’achèvement du barrage de Saint‑Savinien en 1968, le gonflement des eaux du fleuve, lors des marées de vives‑eaux, venait expirer au barrage de La Baine, à Chaniers, à 85 km de l’embouchure (Papy 1941, I : 79). Il ne s’agissait plus de la remontée de l’onde‑marée : dès la confluence Charente‑Boutonne, en aval de Saint‑Savinien, l’eau de mer était, à marée haute, en quantité infime et la progression de l’intumescence duc à l’onde‑marée vers l’amont n’existait plus dès Saint‑Savinien. Par contre, l’action du jusant refoulait en amont l’eau du fleuve, faisant monter le niveau de celui‑ci et inversant temporairement le sens du courant, Ce phénomène, de durée limitée et circonscrit à certaines marées, était favorable à la remontée du fleuve par la navigation.
20Ces données générales étant posées, il est nécessaire de reconstituer l’évolution de l’aménagement de la Charente.
1.2 Le vrai départ de la régularisation : le projet Trésaguet (1772)
1.3 Au xixe s., une volonté de régularisation de l’ensemble du fleuve
- 4 Sur cette phase des travaux, on consultera également les deux auteurs nommés ci‑dessus.
21Dès la création de Rochefort en 1666, des travaux d’aménagement de la Charente furent entrepris, mais avant tout en aval de ce port. En 1767 commence une ère nouvelle : les intendants se préoccupent activement de l’état des voies de communication et l’aménagement de la Charente va entrer dans leur champ d’intervention (Munier 1779 : 91‑99 ; Sépulchre 1978, 1989). Le 22 août, un arrêt du Conseil d’État charge l’ingénieur en chef des Ponts‑et‑Chaussées de la généralité de Limoges, Trésaguet, de faire un projet d’aménagement de la Charente4. Celui‑ci rend son rapport en 1772. Le 27 septembre 1775, un arrêt du Conseil ordonne d’entreprendre les travaux. En 1783, vingt‑et‑une écluses sont établies, huit en amont d’Angoulême, treize en aval, de Saint‑Cybard à Jarnac.
1.3.1 La Restauration et la Monarchie de Juillet
- 5 L’essentiel des données sur les aménagements du fleuve au xixe s. se trouve dans les dossiers d’amé (...)
22Le 24 mars 1825 est votée une loi sur l’amélioration de la Charente : de cette décision va découler un effort d’aménagement qui s’étendra quasiment jusqu’au début de la IIIe République et qui, à son terme, donnera, à peu de chose près, l’état actuel du fleuve5 .
- 6 ADCM, S 1402 : sous‑liasse : « La Charente : Projet d’amélioration générale 1825‑1837 ». Cf. aussi (...)
- 7 ADCM, S 1403 : sous‑liasses : « Travaux à La Baine. Construction 1) d’une écluse à La Baine ; 2) d’ (...)
- 8 ADCM, S 1402 : « Notice sur la situation des travaux de la Charente au 1er juillet 1843 ».
23Le projet que l’ingénieur en chef de la Charente‑Maritime remet en 1834 et qui servira de base à l’essentiel des travaux postérieurs prévoit trois sortes d’interventions : la construction d’aménagements dans le lit du fleuve et sur les berges et des dragages6. Dans le secteur qui nous intéresse, en amont de Saintes, nous trouvons surtout un gros projet dans le lit du fleuve, dans l’île de La Baine à Chaniers : la construction d’une dérivation et d’une écluse à sas au centre de l’île, d’un barrage fixe dans le bras du fleuve, au sud de l’île, afin de remonter le niveau en amont7. Sur les berges, il s’agit de la création de quais, du balisage du fleuve et de l’aménagement du chemin de halage, à Saintes ou en aval de cette ville. Des dragages sont proposés en divers endroits, de la limite du département, notamment dans le secteur qui nous intéresse, jusqu’à Rochefort. L’adjudication du projet de La Baine est passée le 12 décembre 1838. En 1842, ces travaux sont achevés, l’écluse à sas ouverte à la navigation8. Cela a fortement modifié les conditions de navigation en amont en maintenant à un niveau constant et relativement élevé le bief supérieur.
- 9 ADCM, S 2130, contient notamment un rapport sur les dragages à faire en 1840, tous en aval de Saint (...)
24Le projet détaillé de dragages, établi le 25 avril 1840, montre que ceux‑ci ont été effectués entre Courbiac (un peu en dessous de Saintes) et L’Houméc (un peu au‑dessus de Tonnay‑Charente). D’autres furent faits cependant à la même époque pour enlever les très nombreux pieux de pêcherie présents dans la section La Baine‑Saintes ou dans cette dernière ville9. Mais nous ne trouvons pas, à cette époque, mention de dragages au‑dessus de La Baine.
1.3.2 L’action du Second Empire
- 10 ADCM, S 1401 et 2130 (pour Chaniers). Une nouvelle demande de construction de deux cales en pente f (...)
25Pour l’essentiel, au milieu du xixe s. et dans les années qui suivent, les demandes de travaux portent sur la création de quais dans des lieux un peu marginaux, comme à Chaniers en 1846 (travaux réalisés en 1848‑1849), ou en 1867 à Courcoury, avec la réfection, sur les deux rives, des cales du bac10. La réalisation à Saint‑Savinien d’un pont, accompagné d’une chaussée insubmersible en rive gauche et d’une dérivation éclusée, commencée en 1866 et achevée en 1881, fut la plus grande entreprise de cette époque et des débuts de la IIIe République (ADCM, S 1009, S 1014, S 1399).
26Dès la fin du Second Empire, la période des travaux d’aménagement de la Charente pour la navigation est terminée : les ingénieurs considèrent que leur premier et ancien objectif, mettre tout le cours du fleuve en amont et en aval de La Baine à un niveau de mouillage de 2 m, est atteint. Le 26 novembre 1873, l’ingénieur ordinaire de l’arrondissement de Saintes écrit ainsi que dans la Charente, en aval du port du Lys, il n’y a pas de point « où le tirant d’eau disponible [à l’étiage] soit inférieur à 1,60 m », des hauts‑fonds s’étendant sur 2,5 km en amont du port du Lys (ADCM, S 2131). Le 27 octobre 1880, le même ingénieur indique que les « bateaux qui font la navigation de Charente [Tonnay‑Charente] à Cognac tirent 2 m [...] ». « Des hauts‑fonds existent au port du Lys et à Saintes », les premiers, dans les étés secs, pouvant amener le mouillage à 1,20 m (ADCM, S 2098). Le Règlement de Police sur les canaux et rivières canalisées, du 15 septembre 1884, indique que l’enfoncement maximum des embarcations circulant du port du Lys à Taillebourg devra être de 2 m, contre 3,60 m de Taillebourg à Rochefort (ADCM, S 2144). Un rapport sur les résultats obtenus ou à attendre de l’exécution des travaux indique, le 4 janvier 1888, que le mouillage minimum est de 1,60 m à basse mer à l’étiage en aval de La Baine et de 2 m en amont (ADCM, S 2098).
1.3.3 La fin du xixe s.
- 11 ADCM, S 1009 (sous‑chemise dans la liasse « Rivière de Charente, 1867‑1880 » : dragages entre Brive (...)
27Dès 1870 environ, outre l’entretien du fleuve par des dragages, il ne s’agit plus de faire que quelques travaux d’appoint. Un projet de dragage concernant le port du Lys est établi en 1870 (ADCM, S 2078) ; d’autres sont entrepris, à partir de 1874, entre Brives et Saintes, puis, en septembre 1890, à La Baine11. En 1884, de nouveaux dragages destinés à enlever, entre autres choses, des pieux et pièces de charpente, sont faits dans la traversée de Saintes (ADCM, S 1013). Ces dragages multiples ont dû considérablement réduire le nombre de témoins archéologiques dans le lit de la Charente entre Saintes et Cognac.
28Quelques maires ou des particuliers, soucieux de permettre l’expédition des produits de leur commune ou de leur entreprise, demandent dans ces mêmes années, et obtiennent parfois, la création ou la réparation de quais. C’est ainsi qu’à la fin de 1889 le maire de Dompierre demande la reconstruction du mur du quai du bas bourg, ce qui fut accepté dès le 20 janvier 1890 et exécuté la même année (ADCM, S 1013 et 2098). Mais les temps sont finis des aménagements portuaires et fluviaux destinés à la navigation. La seule réalisation importante de la période suivante fut la substitution, décidée en 1879, d’un barrage mobile au barrage fixe de La Baine (ADCM, S 1013, 2098, 2144, 2146).
29Plus récemment, le seul grand aménagement dans la basse Charente fut l’inauguration, en 1968, du barrage mobile de Saint‑Savinien dont la fonction est double : retenir l’eau douce nécessaire pour l’irrigation des marais ; doubler la section d’écoulement en ce lieu, de 200 à 400 m3/s. En réalité, dès après la Première Guerre mondiale, la navigation sur le fleuve est quasi terminée ; elle subsistera jusqu’à la Seconde Guerre mondiale, entre Cognac et Tonnay‑Charente essentiellement, mais dans des conditions de plus en plus difficiles, dans un fleuve qui a perdu son statut de rivière navigable. Un décret du 28 décembre 1926 a en effet déclassé la section Montignac‑Cognac, la section aval l’étant à son tour par un décret du 27 juillet 1957.
1.3.4 Conclusion
30L’aménagement de la Charente pour la navigation culmine vers le milieu du xixe s. : à cette date, un mouillage permanent, sauf aux mortes‑eaux et en aval de Saintes, est établi à 2 m – c’est‑à‑dire au gabarit des canaux environnants– celui appellé gabarit Freycinet et commun aux canaux français de l’époque. L’objectif des aménageurs successifs depuis des siècles est atteint : les caboteurs les plus courants peuvent remonter jusqu’à Saintes ; une batellerie d’un tonnage important, 60 tonneaux ou plus, peut aller jusqu’à Angoulême, la partie supérieure ayant de fait été abandonnée dès la Restauration. Par rapport à cet état du fleuve, pratiquement celui encore présent sous nos yeux, il est essentiel de reconstituer la situation antérieure. Difficile pour les xiiie‑xvi s., cet objectif est quasi impossible à atteindre pour la période antérieure.
1.4 Les aménagements des xe‑xve s dans la section Saintes‑Cognac
31Au xiiie s., la Saintonge, notamment la vallée de la Charente entre Saintes et Cognac, est largement entrée dans l’économie de marché (Chapelot 1984). Ce siècle est aussi celui à partir duquel des sources écrites un peu plus abondantes permettent de faire le point.
1.4.1 Les moulins à eau
32Dans l’ensemble des pays de la Charente, comme ailleurs, dès le milieu du xe s. les moulins à eau sont relativement nombreux. Ils « [...] ont connu un essor continu à partir de 950 avec une période d’expansion particulièrement rapide entre 1050 et 1100, mais toujours soutenue ensuite aux xiie et xiiie s. » (Debord 1984 : 322 et 324). En créant une succession de biefs, ils ont fait sortir le fleuve de l’état du courant libre et favorisé indirectement la navigation fluviale. L’ingénieur Munier, l’un des responsables des travaux d’aménagement, écrit à ce propos en 1779 : « Les Artistes qui ont travaillé à l’établissement des moulins qu’on voit aujourd’hui sur la Charente ont contribué en même temps, mais peut‑être sans le savoir, aux moyens de la rendre navigable » (Munier 1779 : 92). En 1726, un autre auteur peut écrire que les destructions de barrages ordonnées après 1662‑1663 par un intendant ont eu pour conséquence, en accélérant le débit, de diminuer les possibilités de navigation au‑dessus de Cognac (Gervais 1725‑1726 : 24).
1.4.1.1 Conditions d’aménagement
33Un moulin à eau est d’abord un barrage établi en travers du lit et créant une chute. Fondé sur des pieux de bois battus, plus ou moins maçonné, ce barrage possède deux types d’ouverture : l’une (porte ou pertuis), que l’on peut obturer selon le débit de la rivière, sert à l’établissement du niveau du bief et au passage des embarcations ; elle doit être ouverte pour laisser passer celles‑ci, d’où des conflits fréquents entre gabariers et meuniers qui répugnent à perdre ainsi de l’eau. Les autres ouvertures dans la chaussée, plus ou moins nombreuses en fonction de la longueur de celle‑ci, reçoivent chacune une roue de moulin, associée ordinairement à un piège à poisson. Les sources écrites, relativement abondantes (les moulins à eau, qui représentent un investissement conséquent et constituent une source de revenus importante, sont cités très tôt et très régulièrement), montrent la pérennité d’une large part de ces chaussées, créées le plus souvent aux xe‑xiie s. et presque toujours utilisées à la fin du siècle dernier : cela s’explique par le fait que les sites utilisables n’étaient pas en nombre illimité.
1.4.1.2 Nombre et localisation des moulins
34En aval de Cognac, faute de pouvoir, sauf à La Baine, barrer d’une chaussée un lit mineur désormais trop large, les établissements monastiques, ceux de Saintes, de Fontdouce ou de La Frenade, créent très tôt des moulins sur les affluents de la Charente, y compris les plus petits ruisseaux, dans les seigneuries de Taillebourg, Authon, Ecoyeux, Pons, etc. En raison de leur faible débit, l’aménagement des petits affluents a sans doute eu une influence limitée sur le débit de la Charente et donc sur les possibilités de la navigation dans le fleuve. Il n’en est pas de même avec le moulin de La Baine à Chaniers qui se situe en un point qui a joué jusqu’au xixe s. un rôle déterminant dans la navigation fluviale.
1.4.1.3 Le moulin de La Baine à Chaniers
35Nous ne savons à quelle époque remonte ce moulin. La destruction des archives de l’évêché de Saintes, à qui, comme la seigneurie de Chaniers, il a dû appartenir dès son origine, nous empêche d’en fixer la date de création, probablement antérieure au xiie s. Il est douteux en effet que ce site privilégié n’ait pas été aménagé très tôt. Nous avons des informations assez précises sur son état au début du xive s. En 1310, le doyen et le chapitre de la cathédrale de Saintes se plaignent au commissaire du roi de la destruction, quelques années auparavant, par le comte de la Marche, de leurs moulins à drap de La Baine, de la chaussée et d’une pêcherie (AHSAXII : 106‑108, d’après AN, JJ 49, no 78, fol. 37). Des dépositions faites en 1311 montrent qu’il s’agissait avant cette date d’une installation ancienne et très développée, comprenant deux moulins à drap à chaque extrémité de la chaussée et une pêcherie, et bâtie totalement de bois (AHSAXII : 108‑110, d’après AN, JJ 49, no 78, fol. 37). En juin 1313, permission fut accordée au chapitre de reconstruire ici deux moulins, une chaussée et une pêcherie (AHSAXII : 106‑111). Plus tard, à une date inconnue, le moulin de La Baine fut remplacé par une construction de pierre dont il reste l’essentiel sous forme d’une série d’arcs supportant une longue bâtisse et où en 1778, selon un État des moulins, pertuis, vannes, écluses et autres objets de cette nature qui sont établis sur les rivières navigables dans le département de Saintes, se trouvaient cinq roues de moulin (ADCM, C 51).
1.4.1.4 Effet des moulins sur la navigation
36Au‑dessus de La Baine et jusqu’à Angoulême, nous trouvons une vingtaine de sites plus ou moins comparables à ce moulin. En 1779, Munier indique la présence entre Civray, sur la haute Charente, et Cognac de 74 chutes diverses, le plus souvent de moulins, représentant pour une distance totale de 92 400 toises (180,2 km), une hauteur totale de chute de 184 pieds 5 pouces 5 lignes, soit près de 60 m (Munier 1779 : 92). En 1818, un autre auteur, pour la même section et pour les 73 chutes alors existantes, indique que la somme des dénivellations est de 30 toises et demie, soit 58,88 m (Quénot 1818 : 5). Grâce à ces aménagements, l’ingénieur en chef, dans un mémoire sur le régime de la navigation de la Charente daté du 31 décembre 1810, estime que la pente du fleuve entre Civray et Cognac est de 0,6 m/km au lieu de 1 m/km en courant libre (AN, F14 536).
1.4.1.5 Conclusion
37Nous sommes dans l’incapacité de dater précisément la mise en place des moulins dans la Charente et ses affluents mais nous pouvons cependant risquer quelques observations. L’investissement dans des aménagements de moulins à eau fut précoce, dès le milieu du xe s. au plus tard, et sans doute systématique, tous les sites utilisables étant rapidement aménagés. Cela eut des conséquences sur la régularisation de la Charente en amont de Cognac, beaucoup moins pour le secteur Saintes‑Cognac, où peu de moulins pouvaient être installés mais où, par contre, l’installation généralisée de pêcheries eut une influence directe sur la navigation.
1.4.2 Les pêcheries
38Si les moulins étaient régulièrement pourvus de pièges à poisson, on trouvait aussi dans la Charente, en particulier dans la section qui nous intéresse ici, des installations exclusivement réservées à la pêche. Les textes montrent la présence, dès les xe‑xie s., entre Saintes et Cognac, de deux sortes de pêcheries : de grandes installations seigneuriales, sur lesquelles nous sommes assez bien documentés, et des pêcheries appartenant à des riverains, sans doute moins importantes et sur lesquelles nous avons peu d’informations.
1.4.2.1 Les grandes pêcheries seigneuriales
39Les cartulaires parlent couramment des grandes pêcheries appartenant aux abbayes mais donnent peu de détails sur leur structure qui est connue avant tout, dans la Charente ou ailleurs, par des documents post‑médiévaux et quelques fouilles récentes qui montrent que ces installations étaient très développées afin de pouvoir barrer complètement le cours du fleuve. Les pieux utilisés pour ce faire étaient enfoncés dans le fond du fleuve selon un plan triangulaire ayant comme axe le lit du fleuve. Au sommet du triangle se trouvait le piège proprement dit, dans lequel s’accumulait le poisson. Ces installations étaient d’un coût élevé et on trouve régulièrement dans les cartulaires mention de la donation de parts de ces pêcheries. L’intérêt qu’elles suscitent de la part des établissements ecclésiastiques comme des donateurs plaide aussi en faveur d’installations très importantes. Ces aménagements avaient des conséquences directes sur la navigation, positives en régularisant le débit du fleuve, négatives en opposant un obstacle au passage des embarcations.
40La section du fleuve comprise entre le port du Lys, à la limite des départements de la Charente et de la Charente‑Maritime, et Saintes semble, dès le xie s., avoir été spécialement riche en pêcheries de ce genre. Le cartulaire de Saint‑Jean‑d’Angély, notre principale source documentaire, témoigne de l’intérêt précoce de cette abbaye pour cette section du fleuve.
- 12 Cart. St.‑Jean‑d’Angély, charte CCLXIX (vers 1093) : « tertiam partem trium piscaturarum ». Cart. S (...)
- 13 Cart. St.‑Jean‑d’Angély, charte CCLXXV (vers 1018‑1038) : « et est inter castello Fracta Bute et ec (...)
41Pour rester dans le secteur de la Charente proche d’Orlac, l’abbaye de Saint‑Jean‑d’Angély possède au xie s. des pêcheries ou des parts de pêcherie dans pratiquement toutes les paroisses de la rive gauche, d’amont en aval, trois ou quatre à Salignac12, une à Brives13, deux, peut‑être trois, à Saint‑Sever.
- 14 Cart. St.‑Jean‑d’Angély, charte CLVIII : Cart. St.‑Jean‑d’Angély, charte CCLXXVI : « et duabus part (...)
- 15 Cart. St.‑Jean‑d’Angély, tome II, p. CLXXXV et CCXXX ; Cart. St.‑Jean‑d’Angély, charte CCLXXIX : » (...)
42L’exemple de Saint‑Sever est significatif des multiples possessions de cette abbaye dans le fleuve et de sa politique de développement des pêcheries et des moulins au xie s. Elle avait reçu en don, vers 1066, un monastère situe à Saint‑Sever avec toutes ses dépendances, dont deux parts dans des pêcheries jumelles14 . Ce don fut augmenté par Cadelon, vicomte d’Aunay, vers 1071 (Cart. de St.‑Jean‑d’Angély, charte CCLXXVII). Vers 1075, à l’occasion d’un accord passé entre l’abbé et Pierre Villicus à cause de la prévôté de Saint‑Sever, l’abbé concède à ce dernier tout ce qu’il avait du fief prévôtal mais à la condition de construire une conduite (mancas) à l’une des pêcheries de l’abbaye et moyennant le paiement de certains revenus ou droits et l’acquisition du moulin prévôtal. Il y est dit que si l’abbaye a des moulins, le meunier du prévôt ne se permettra pas de s’opposer aux droits qui y sont attachés et qu’elle en posséderait toutefois le tiers. Une dîme du onzième poisson pris sera versée15. Plus en aval, cette abbaye possède aussi, à partir de 1075 environ, la moitié d’une pêcherie sous l’église Saint‑Aignan de Saintes (Cart. De St.‑Jean‑d’Angély, charte CCLXXX).
- 16 Marvaud 1870, I, 48‑49, n. 1 : « quidem anguillare ad capiendum pisces et aquam ad piscationem... » (...)
- 17 AN, R1 265 (déclaration de biens de l’abbaye de la Frenade, du 27 octobre 1535 ; cahier papier ; co (...)
43Les épaves des archives des autres établissements religieux de la région montrent qu’eux aussi, dès les xie ou xiie s., selon leur époque de création, reçoivent en don ou aménagent dans ce même secteur des pêcheries. On en trouvait par exemple sur les bras des îles de la Charente à Cognac : l’une d’entre elles est donnée dès 1031 à l’abbaye d’Ebreuil16. D’autres pêcheries, attestées tardivement, remontent au moins au début du xiie s., date de création des établissements ecclésiastiques auxquels elles appartenaient : ainsi celles de l’abbaye de la Frenade, situées à Merpins, et celle de l’abbaye de Fontdouce, installé au port des Singes, sur la rive droite de la Charente, entre l’embouchure de l’Antenne et la limite de la paroisse de Chérac17.
1.4.2.2 Les pêcheries des habitants riverains
- 18 Gal. Christ. Il : 478. Ce droit est cité dans BMLR, ms. 2633.
- 19 Il semble s’agir de la même chose qu’en 1380‑1381 mais il convient d’être prudent dans cette identi (...)
44A côté de ces grandes installations ecclésiastiques, les sources écrites montrent l’existence de pêcheries permanentes, sans doute de moindre ampleur, utilisées par des habitants des paroisses riveraines. Un texte du 8 mars 1196 indique ainsi que les bourgeois de Saintes étaient tenus, à la demande du comte de Poitiers, qui transporte alors ce droit à l’abbaye de Sablonceaux, de faire, « cum navibus suis », entre Saintes et Merpins, une fois par an, la levée des anguilles18. En mars 1245, l’évêque de Saintes et le comte Alphonse de Poitiers s’accordent sur leurs droits respectifs à Saintes, dont la levée des pêcheries dans la Charente, « levaturas piscariarum in Charenta de Dorreone usque adportum de Lys» (AHSA X : 34‑39, d’après AN, J 190, no 87). Pour l’année 1380‑1381, le droit de levée de la seigneurie des Gonds (un peu en amont de Saintes, rive gauche), une nuit par an, sur les « pescheries qui sont entre Courcoril [Courcoury] et Cheirac [Chérac] », appartenant moitié à l’évêque et moitié au roi, héritier du comte de Poitiers, rapporte au second 10 livres tournois (AN, 1 AP 1675). Exactement un siècle plus tard, pour l’année 1480‑1481, le droit des pêcheries de cette même seigneurie des Gonds rapporte 12 sous (AN, 1 AP 1672)19. À la Saint‑Jean‑Baptiste 1410, les fermages de Cognac et Merpins sont adjugés, dont la levée des pêcheries (BMS, ms 523, no 5). Dans tous ces cas, nous sommes certainement en présence de pêcheries analogues aux précédentes mais que l’on peut supposer moins développées.
1.4.2.3 Les autres installations de pèche
45Aucune source écrite médiévale ne nous permet de savoir si d’autres sortes d’installations de pêche que les barrages de pieux examinés ci‑dessus ont existé avant le xve s. dans ce secteur de la Charente. À Saintes et en aval, par exemple à Taillebourg, nous connaissons l’existence au xviie s. de petites communautés de pêcheurs utilisant, à l’aide de quelques pieux fixés dans le lit du fleuve, de grands filets appelés « seines » pour prendre le poisson. De telles installations pourraient expliquer la présence de pieux erratiques, découverts en divers endroits dans le lit mineur du fleuve et dont certains, comme deux pieux découverts à Taillebourg près de l’épave d’une pirogue monoxyle, remontent, comme nous l’avons vu plus haut, aux ve‑vie s. Mais nous n’avons aucune indication sur des systèmes de pêche semblables au Moyen Âge, leur présence paraissant néanmoins vraisemblable.
1.4.2.4 Conclusion
46Le caractère très poissonneux du secteur Saintes‑Cognac, une donnée encore sensible de nos jours et concrétisée par une concentration importante de pêcheries dès le Moyen Âge, n’est pas la seule raison de l’intérêt précoce que les seigneurs laïcs et ecclésiastiques accordent, dès le xiie s., à cette partie du fleuve : elle présentait aussi un grand intérêt agricole.
1.4.3 La création de prairies dans le lit moyen
- 20 Sur ce mot : Eveillé 1887 : 305 (verbe « Prée ») ; Rézeau 1984 : 229 ; Doussinet 1971: 32 ; Musset (...)
47En aval de Cognac, particulièrement entre cette ville et Saint‑Savinien, le fleuve coule sur des alluvions fluviales et marines avec une pente presque nulle. Le lit majeur, recouvert chaque année par les eaux sur une largeur de plusieurs centaines de mètres (parfois, aux grandes crues et en certains endroits, jusqu’à 2 000 et même 2 500 m), est occupé par des prairies qui sont soit en rive droite, soit en rive gauche (cas le plus courant en aval de Saintes). Ces prairies sont localement appelées « rivières » ou « prées », mot du français général dérivé du pluriel latin Prata et resté dans la langue locale pour designer ces secteurs caractéristiques des basses vallées de la Charente et des principaux affluents de son cours inférieur, la Seugne et la Boutonne20. Elles ont joué un rôle essentiel dans la vie rurale locale en approvisionnant en fourrage, dès le Moyen Âge, les villages environnants. Leur possession était donc un enjeu important.
- 21 AHSA VII : 422 (aveu du 20 juin 1323 cité dans un arrêt du Conseil d’État du 18 octobre 1669).
48Au xive s., nous trouvons plusieurs mentions de « rivières » importantes le long de la Charente, comme celle qui appartient au prieur de Saint‑Vaize en ce lieu en 1325 (AHSA XXIX : 280). La « grande rivière » de Saint‑Sornin‑de‑Séchaud, appelée plus souvent « grande rivière de Taillebourg », située sur la rive gauche, depuis le débouché du pont de Taillebourg jusque vers l’actuelle commune de Saint‑Saturnin‑de‑Séchaud (devenue en 1853 Port‑d’Envaux) au nord, est aussi très souvent citée21.
- 22 Cart, St.‑Jean‑d’Angély, charte CCCCLXXXII : « Et [...] dedit præfatus Vuillelmus sancto Joanni tot (...)
49Plusieurs acquisitions de l’abbaye de Saint‑Jean‑d’Angély au xie s., dans le secteur du fleuve qui nous intéresse, témoignent de la volonté de disposer de telles prairies. Le don que fait, vers 1071, le vicomte d’Aunay, Cadelon, des deux tiers de Saint‑Sever, dont « quidquid aquarum et cultæ terra incultæque habeo ibidem, [...] », est clair de ce point de vue, par l’assimilation explicite de « l’eau » et des « terres », cultivées ou non (Cart. De St.‑Jean‑d’Angély, charte CCLXXVII). Vers 1081‑1082, un don de terres à F Arceau (commune de Celles, près de Merpins, sur le Né, un affluent de rive gauche de la Charente) mentionne un bois et deux tenures rurales situées dans « l’eau », la « rivière » appelée « Lines », sans doute Le Né22.Le 17 juin 1549, un dénombrement des possessions de l’abbaye de Saint‑Jean‑d’Angély mentionne plusieurs « rivières » dans ce secteur, notamment à Dompierre‑sur‑Charente, dont une appelée « La Basse Rivière », et d’autres à Saint‑Sever, dont le grand pré appelé « La Rivière Commune » (Cart. de St.‑Jean‑d’Angély : t. II, pièce annexe XXIX, p. 244 et 245). Une partie de ces toponymes existe encore aujourd’hui.
50La présence de ces « prées » de bord de fleuve eut des conséquences directes sur l’aménagement de celui‑ci. Les grands propriétaires fonciers, possesseurs des seigneuries locales, et plus largement les riverains ont en effet été préoccupés très tôt par un point essentiel : la présence de bacs permettant la desserte de ces « rivières » et le transport éventuel sur la berge opposée, essentiellement la rive droite, des fenaisons.
1.4.4 Les bacs
- 23 AN, H4 3065, dans lequel plusieurs documents du xviiie s. mentionnent un conflit de ce genre en 147 (...)
- 24 AN, H4 3065 contient plusieurs pièces qui font référence à la recette de ces trois bacs aux xvie‑xv (...)
51A l’époque gallo‑romaine et au Moyen Âge, de Cognac à la mer, on ne trouve que deux ponts sur la Charente, à Saintes et Taillebourg. Les bacs ont donc été, pendant tout le Moyen Âge, un élément essentiel d’aménagement du fleuve et d’utilisation de ses abords. De ce point de vue, la section Saintes‑Cognac se distingue de l’aval où, pendant tout le Moyen Âge, les bacs, presque toujours liés à des châteaux flanqués d’un bourg castrai, comme Tonnay‑Charente ou Saint‑Savinien, ont été peu nombreux mais d’un revenu le plus souvent important car situés sur des voies de communication d’intérêt régional. Au‑dessus de Saintes par contre, les bacs, plus nombreux, sont, pour l’essentiel, d’intérêt local. Si les bacs de Chaniers et de Chauveau, encore au milieu du xviiie s., sont des points de passage relativement importants, les autres sont avant tout fréquentés par les riverains : installés dans des villages ou des hameaux, non dans des bourgs castraux, ils assurent essentiellement la liaison entre les prairies riveraines du fleuve et les villages où résident les exploitants. Cette fonction principale tient à la nature de ce secteur, marqué par l’importance des « prées » et l’absence de bourgs castraux. Destinés à un trafic local d’une importance limitée et surtout à caractère saisonnier, les bacs du secteur Saintes‑Cognac n’ont que très modestement retenu l’attention des seigneurs locaux qui, dès la fin du Moyen Âge et dans l’Ancien Régime, ont systématiquement tenté de regrouper tous les passages en quelques lieux seulement, mieux contrôlables et d’exploitation moins coûteuse. Les paysans, au contraire, ont toujours été tentés de mettre en place, au moment utile et au lieu adéquat, des bacs plus ou moins autorisés. Nous avons trace d’un conflit de ce type dès le xve s.23. Jusqu’à la fin de l’Ancien Régime, le chapitre de la cathédrale de Saintes, propriétaire des droits de passage dans ce secteur, afferma régulièrement trois bacs, à Chaniers, Chauveau et Brives24. II lutta victorieusement contre des bacs non autorisés installés périodiquement dans le cours du xviiie s., notamment à Orlac, Courcoury et Dompierre (AN, H4 H 3065).
1.4.5 Les péages
52Le problème des péages est lié à celui des bacs : les aménagements nécessaires aux uns, un quai, une chaussée d’accès et une ou plusieurs embarcations de service ou de contrôle, sont aussi nécessaires aux autres. De plus, les péages comme les bacs ont très souvent été imposés en même temps et dans la même aire de rayonnement d’un château ou d’un bourg castrai riverains.
- 25 AN, H4 30331 : mention dans l’arrêt du 8 mai 1731 supprimant ce péage.
- 26 AN, H4 30331 : mention dans l’arrêt du 8 mai 1731 supprimant ce péage.
- 27 Aveu du l"août 1674 (AHSA XLV : 298‑301, d’après Archives départementales de la Gironde, C 2250). C (...)
53Le seigneur de Pons, dont la seigneurie englobait la rive gauche du fleuve, des abords de Saintes jusqu’avant Cognac, semble avoir possédé ici très tôt des droits de bac et de passage, de port et de péage. En 1323, Regnaud, seigneur de Pons, donne à un nommé Gombaud Brunaud un droit de metive ou péage sur toutes les marchandises qui passent sur la Charente, en montant ou en descendant, ou qui seraient transportées dans les limites de la seigneurie de Pons25. En mars 1338, Philippe VI de Valois approuve ce don qui est encore confirmé en octobre 1373 par Charles V26. Nous ne possédons malheureusement pas de détails sur la nature et le lieu de perception de ce droit au Moyen Âge. Au XVIIe s. –selon un phénomène classique ailleurs dans la Charente dès le xvie s.–, le lieu de perception avait été transporté sous le pont de Saintes où il venait s’ajouter à d’autres analogues mais relevant du roi27. Avant cette date et dans tous les cas au xive s., ce péage devait être perçu dans l’un des petits ports de la rive gauche, Saint‑Sever, Brives ou Salignac. Il est vraisemblable que ce droit sur la navigation remontait à l’époque du développement de celle‑ci en amont de Saintes (milieu du xie s.). Ce droit de péage du seigneur de Pons est le seul dont on connaisse l’existence pendant tout le Moyen Âge et l’Ancien Régime entre Saintes et Merpins‑Cognac où, par contre, des perceptions sur le trafic de sel sont connues dès le milieu du xie s. Un péage, sans doute de courte durée et de faible importance, est cependant connu au port du Lys par sa suppression en 1737.
- 28 AN, H4 3065 ; cette affaire est aussi citée dans ADCM, C 28.
54Mais il est certain que le chapitre de la cathédrale de Saintes devait posséder des droits équivalents à ceux du seigneur de Pons. Nous savons en effet qu’il était propriétaire entre Saintes et le port du Lys de tous les droits de ports et de passage, du droit de pêche et du droit de juridiction sur la moitié droite du cours de la Charente, l’autre moitié étant la propriété du seigneur de Pons : une transaction du 23 septembre 1477 et un jugement du 20 octobre de la même année, rendus entre ce dernier et le chapitre, l’indiquent28. Une déclaration de biens du chapitre de Saintes du 8 mai 1639 rappelle cette situation (AHSA XXXV, 9). La disparition de la quasi‑totalité des archives de l’évêché et du chapitre de Saintes nous empêche non seulement de connaître ce droit mais aussi d’en fixer l’origine ainsi que celle des droits de passage et de ports que le chapitre a dû mettre en place dans ce secteur dès le xie s. au plus tard. Dans toute notre étude de la navigation et des aménagements du fleuve entre Saintes et Cognac, il faut garder à l’esprit cette grave lacune de notre documentation.
1.4.6 L’installation de levées transversales dans le lit majeur
55La topographie du lit de la Charente, en particulier l’existence d’un lit majeur fort large envahi lors des crues, a contraint les possesseurs de bacs, de péages et de ports à construire des chaussées du côté de l’aménagement principal mais aussi, très souvent, sur l’autre rive. Il fallait pouvoir, en toutes saisons, traverser les prairies inondées pour atteindre le lit mineur où l’eau coule avec un tirant d’eau suffisant pour le passage de l’embarcation du bac ou l’accostage de celles venant payer les droits de péage. Partout dans le cours de la Charente, de Cognac à Martrou, un peu en amont de Soubise, l’installation de chaussées insubmersibles importantes fut nécessaire du côté inondable, le plus souvent la rive gauche. Même sur la rive opposée, peu ou pas inondable, une autre chaussée plus ou moins longue ou au moins une grève, c’est‑à‑dire une rampe empierrée, furent indispensables.
56L’aménagement de levées transversales n’est pas particulier à la Charente : on en trouve partout dans le cas de rivières ayant une forte différence de largeur entre leurs lits mineur et majeur. La plus remarquable de ces levées transversales est la chaussée de Saint‑James à Taillebourg, en rive gauche, certainement d’origine gallo‑romaine comme le pont de ce lieu. Plusieurs installations analogues, moins monumentales et plus courtes, subsistent encore, notamment à Port Chauveau, à Orlac ou à Brives. Il est difficile de les dater mais quelques‑unes ne peuvent qu’être d’origine ancienne, au moins des xiie–xiiie s., dans le cas des principaux bacs de la Charente, par exemple celui de Chaniers.
- 29 AN, H4 3065, qui contient diverses pièces des xviie‑xviiie s.
57Obstacles à l’écoulement de l’eau lors des crues, ces chaussées jouent un rôle important pendant celles‑ci, notamment dans la section entre Saintes et Cognac, en stockant les eaux dans le lit majeur mais aussi en accroissant de cette manière les conséquences en amont des inondations. Le coût de construction et d’entretien de ces chaussées entraîne des indications régulières dans les archives. Nous sommes ainsi bien renseignés sur les chaussées des passages de Chaniers, Chauveau et Brives, appartenant au chapitre de la cathédrale de Saintes29.
1.4.7 Conclusion : une zone aménagée dès le xe‑xie s.
58Dès l’époque gallo‑romaine, quelques pêcheries ou d’autres aménagements sont certainement en place dans la Charente en amont de Saintes. Mais, à partir de cette époque, les deux grands ponts de Saintes et de Taillebourg, complétés par des chaussées insubmersibles, en rive droite pour le premier, gauche pour le second, furent ce qui influa le plus sur le débit du fleuve : surtout par leur radier, ils restèrent, jusqu’à leur destruction totale vers le milieu du xixe s., des éléments essentiels de perturbation de la navigation fluviale.
59À partir du xe s., les aménagements divers dans le lit ou en berge commencent à se multiplier. Certains peuvent sembler d’importance modeste. Mais leur accumulation, de la création des « prées » à celle des moulins, a eu, partout dans le fleuve, des répercussions directes sur le régime de celui‑ci : ces aménagements furent les premiers éléments de régularisation. Dans la section entre Saintes et le port du Lys, les conséquences furent certainement plus sensibles que partout ailleurs et cela pour deux raisons. La pente, ici, est faible, l’écoulement des eaux en période de crue très lent et sensible à tous les obstacles, l’altitude moyenne des berges des lits moyen et majeur peu élevée par rapport au niveau du fleuve dans son lit mineur. Par ailleurs, très disputé entre seigneurs, ecclésiastiques ou laïques pour sa richesse en poisson, ses possibilités d’installation de moulins, la présence des « prées » et, dans une moindre mesure, pour les revenus susceptibles d’être tirés des bacs et des péages, ce secteur fut aménagé très tôt et avec une ampleur particulière. Toute la question est de savoir dans quelle mesure il y eut prise de conscience des conséquences indirectes de ces aménagements pour la navigation et à partir de quand apparut, en complément ou en correction, une politique d’aménagement consciente.
60Dès le xiie et surtout au xiiie s., il est certain que l’on est sorti de cette première époque où la régularisation du fleuve s’est faite indirectement, à la faveur d’aménagements ayant une autre destination. On entre dans une période où la batellerie existe, a une importance commerciale et où une partie de la région, notamment les habitants des villes du littoral ou du cours du fleuve, commence à se préoccuper de l’amélioration des conditions de navigation. En fut‑il de même auparavant, aux xe‑xie s. ? Les sources écrites le montrent dans le cas d’autres bassins fluviaux, par exemple ceux du Tibre, du Rhône, de la Durance, de la Somme, de la Garonne, dans les comtés et villes de Flandre, etc. (Fossier 1982 : II, 736‑737). Faute, dans le cas de la Charente, de sources écrites directes, l’histoire de la navigation au Moyen Âge va nous permettre de répondre partiellement à cette question difficile.
Notes
1 ADCM, S 2092 : projet de travaux à Saint‑Savinien (27 novembre 1857).
2 Mémain 1936 : 54‑56. L’auteur étudie en détail la partie basse de la Charente.
3 ADCM, S 1401 : séance du conseil général du 7 septembre 1849, décrivant le courant rapide qui existe là à marée basse ; S 2092 : projet de travaux à Saint‑Savinien (27 novembre 1857 : sous‑liasse « Construction d’un pont et amélioration de la navigation à Saint‑Savinien ») qui décrit ce seuil et en donnait un profil (qui manque dans la liasse) ; S 2092 (23 juillet 1857 : sous‑liasse « Amélioration du passage de Saint‑Savinien ») qui indique qu’à marée descendante, le courant est de 4 à 5 m par seconde à l’étiage et 6 m en grandes eaux. Cf. aussi Papy 1941: 78‑82 ; Rieth 1973 : 15, 19.
4 Sur cette phase des travaux, on consultera également les deux auteurs nommés ci‑dessus.
5 L’essentiel des données sur les aménagements du fleuve au xixe s. se trouve dans les dossiers d’aménagement versés dans la série S des archives départementales de la Charente‑Maritime.
6 ADCM, S 1402 : sous‑liasse : « La Charente : Projet d’amélioration générale 1825‑1837 ». Cf. aussi S 1402 (sous‑liasse : « Affaires générales », rapport sur les travaux de la Charente, de 1842 et 1843).
7 ADCM, S 1403 : sous‑liasses : « Travaux à La Baine. Construction 1) d’une écluse à La Baine ; 2) d’un barrage dans le bras appelé Etier ; 3) d’une maison éclusière ; 4) ouverture d’un canal de dérivation ». Cf. aussi S 1401.
8 ADCM, S 1402 : « Notice sur la situation des travaux de la Charente au 1er juillet 1843 ».
9 ADCM, S 2130, contient notamment un rapport sur les dragages à faire en 1840, tous en aval de Saintes, et un profil des attérissements qu’il faut ainsi éliminer (8 avril 1840) ; S 2130 contient aussi une sous‑liasse « Enlèvement d’attérissements en amont et en aval du vieux pont de Saintes (1845) » et divers autres documents sur les dragages faits alors dans cette ville (cf. aussi S 1401 pour les années suivantes en ce lieu).
10 ADCM, S 1401 et 2130 (pour Chaniers). Une nouvelle demande de construction de deux cales en pente fut faite ici en 1854 (ADCM, S 2078) ; ADCM, S 1009 (pour Courcoury).
11 ADCM, S 1009 (sous‑chemise dans la liasse « Rivière de Charente, 1867‑1880 » : dragages entre Brives et Saintes, notamment près de l’écluse de La Baine, en 1874 ; S 2131 : sous‑chemise « Dragages près de l’écluse de La Baine (1873‑1875) : projets de dragage à exécuter à Brives, dans le canal de La Baine, à Chaniers et à Saintes...» dans la sous‑liasse « Achèvement des travaux de Saint‑Savinien ». Une pièce du 22 juillet 1875, dans cette sous‑chemise, mentionne des dragages à Brives « pour pieux et enrochements dans le lit de la rivière », à Chaniers « pour pieux et enrochements rencontres dans le fond de la rivière » et à Saintes « pour pieux, enrochements et blocs de maçonnerie rencontres dans le fond de la rivière ». Sur les dragages de 1890 à La Baine : ADCM, S 2098.
12 Cart. St.‑Jean‑d’Angély, charte CCLXIX (vers 1093) : « tertiam partem trium piscaturarum ». Cart. St.‑Jean‑d’Angély, charte CCCCLXXXI (vers 1093) : don de la moitié d’une des pêcheries précédentes ou d’une quatrième.
13 Cart. St.‑Jean‑d’Angély, charte CCLXXV (vers 1018‑1038) : « et est inter castello Fracta Bute et eclesiae quae vocatur Brivas, et in loco qui dicitur fossato de campo ». Un lieu‑dit La Fosse, près du lieu‑dit Port de Brives, sont portés tous les deux sur la carte IGN au 1/25 000, feuille 1532 est.
14 Cart. St.‑Jean‑d’Angély, charte CLVIII : Cart. St.‑Jean‑d’Angély, charte CCLXXVI : « et duabus partibus geminae piscatoris ».
15 Cart. St.‑Jean‑d’Angély, tome II, p. CLXXXV et CCXXX ; Cart. St.‑Jean‑d’Angély, charte CCLXXIX : » tali pacto ut faciat mancas ad unam de piscaturis sancti Joannis... ».
16 Marvaud 1870, I, 48‑49, n. 1 : « quidem anguillare ad capiendum pisces et aquam ad piscationem... ». BN, ms. lat. 12754, fol. 408‑411.
17 AN, R1 265 (déclaration de biens de l’abbaye de la Frenade, du 27 octobre 1535 ; cahier papier ; copie du xviiie s.). AN, R1 265 (déclaration de biens de l’abbaye de Fontdouce, du 8 novembre 1535 ; cahier papier ; copie du XVIIIe s.) et S 3226 (id., cahier papier, 8 folios ; pièce publiée dans AHSA XV : 217‑244, avec une date erronée, 8 novembre 1537, et une cote fausse, AN, S 3225. La pêcherie de Fontdouce est citée Ibid., 220).
18 Gal. Christ. Il : 478. Ce droit est cité dans BMLR, ms. 2633.
19 Il semble s’agir de la même chose qu’en 1380‑1381 mais il convient d’être prudent dans cette identification de ces deux redevances à une même chose.
20 Sur ce mot : Eveillé 1887 : 305 (verbe « Prée ») ; Rézeau 1984 : 229 ; Doussinet 1971: 32 ; Musset 1938 : 256 (verbo « Prée ») et 401 (verbo « Rivières »).
21 AHSA VII : 422 (aveu du 20 juin 1323 cité dans un arrêt du Conseil d’État du 18 octobre 1669).
22 Cart, St.‑Jean‑d’Angély, charte CCCCLXXXII : « Et [...] dedit præfatus Vuillelmus sancto Joanni totum boscum et duas borderias ex parte aquæ quæ vocaturLines » Cf. aussi Cart. St.‑Jean‑d’Angély, charte CCLXXII.
23 AN, H4 3065, dans lequel plusieurs documents du xviiie s. mentionnent un conflit de ce genre en 1477 entre un habitant de Rouffiac, soutenu par le seigneur de Pons, et le chapitre de la cathédrale de Saintes. Cette affaire est aussi mentionnée dans ADCM, C 28.
24 AN, H4 3065 contient plusieurs pièces qui font référence à la recette de ces trois bacs aux xvie‑xviiie s.
25 AN, H4 30331 : mention dans l’arrêt du 8 mai 1731 supprimant ce péage.
26 AN, H4 30331 : mention dans l’arrêt du 8 mai 1731 supprimant ce péage.
27 Aveu du l"août 1674 (AHSA XLV : 298‑301, d’après Archives départementales de la Gironde, C 2250). Ce péage fut supprimé par un arrêt du 8 mai 1731 (AN, H4 30331 ; cf. aussi ADCM, C 52) et rétabli par un autre du 12 août 1738 (AN, H4 30851) qui indiquent tous les deux une perception sous le pont de Saintes.
28 AN, H4 3065 ; cette affaire est aussi citée dans ADCM, C 28.
29 AN, H4 3065, qui contient diverses pièces des xviie‑xviiie s.
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