Les figurines en terre cuite gallo-romaines
| , ,Chapitre 1. Les ateliers
1.24 Saintes (Charente‑Maritime)
Atelier
Texte intégral
1LIEU DE CONSERVATION
Musée archéologique de Saintes.
2RESPONSABLE DU SITE
Service régional de l'Archéologie de Poitou-Charentes.
3L’atelier de production de Saintes se situe sur la rive droite de la Charente dans la prairie de la Pallue, commune de saintes, département de la Charente‑Maritime, canton et arrondissement de saintes, altitude 5 m.
1.24.1 Circonstances de la découverte
4Le site a été découvert fortuitement en octobre 1986 lors du creusement d’un canal de dérivation du fleuve Charente. Une fouille de sauvetage urgent a été menée par G. Vienne, collaborateur au Musée archéologique de saintes. Les recherches se sont cantonnées dans la zone menacée après un décapage de l’humus à l’engin mécanique. L’existence de l’officine a été attestée par la présence de ratés de cuisson et d’essais grossiers, voire maladroits.
5Une partie du site a été entièrement détruite à l’emplacement du canal. Le reste de l’officine n’a pas été fouillé, il est protégé. La superficie de l’atelier est d’environ 1 ha.
1.24.2 Contexte historico‑géographique
6Saintes, le Mediolanum antique, était la capitale de l’Aquitaine augustéenne et avait le statut de ciuitas (ciuitas et non municipe d’après 1. Maurin).
7Déjà plusieurs officines de potiers ont été mises au jour à la périphérie de la ville. Ici l’atelier est situé sur la rive droite du fleuve Charente (Carantonus), immédiatement le long d’une voie ou d’un chemin qui borde la berge, dans une zone inondable de nos jours et déjà peu occupée dans l’Antiquité.
8Le matériau utilisé était puisé sur place comme l’attestent les fosses d’extraction. L’argile locale, marneuse, était travaillée dans des fosses de décantation. Les potiers utilisaient peu de dégraissant, cependant on note parfois du sable fin (fluviatil ?) et des fragments de chamotte. L’eau du fleuve tout proche fournissait l’atelier. De même le bois des forêts de Saintonge était exploité abondamment ; par ailleurs, on pouvait compter sur le bois en transit sur le fleuve.
9La production de l’atelier a dû couvrir la période flavienne et le début de celle des Antonins (80‑130). Cette datation fut précisée grâce au style des figurines (coiffures) et par le mobilier céramique associé. Dans la même prairie, au sud‑est, une autre officine a produit des céramiques contemporaines (fouilles A. Michaud 1982‑83). Sur la même rive, au nord‑est, d’autres fours de la même époque furent mis au jour (rue du Jardin‑du‑Roy, A. Michaud 1987). De même, la tradition d’une activité métallurgique importante a été attestée dans le secteur (Abbaye aux Dames, C. Vernou 1988). L’atelier de la Prairie, comme ceux sus‑cités, sont contemporains de l’apogée de Mediolanum et sont une expression de sa richesse. L’abandon de l’officine vers le milieu du iie s. doit correspondre à un déclin progressif de la ville, probablement en relation avec la perte de son statut de capitale.
1.24.3 Activité céramique
10Dans l’atelier de la prairie de la Pallue la production des figurines était de type secondaire, on produisait avant tout de la vaisselle utilitaire, en céramique commune rouge : couvercles, coupes et assiettes, pichets, cruches, œnochoes, « bouteilles ». D’autre part on note une production en terre cuite variée : tuiles, briques, tubulures, pavés, plaquettes décoratives moulées pour l’architecture, ainsi que des antéfixes avec l’inscription front. f. (pronto ou Frontinus ?). Enfin, l’officine a produit des masques, des médaillons et des oscilla.
11Pour ce qui est des figurines, les indices de production sont fournis par la présence de moules et ratés de cuisson, d’un matériel répétitif et de produits inachevés.
1.24.4 Définition archéologique des figurines
12La pâte des figurines est de type calcaire, à faible dégraissant ; elle est rayable à l’ongle. sa couleur est brun clair, avec des variantes orangées à roses. Les bustes féminins portent un revêtement blanc : engobe kaolinique dont la conservation est mauvaise.
13L’officine a produit les sujets suivants : des bustes féminins, des éléments anthropomorphes ; des poissons, des petits quadrupèdes et des oiseaux ; des noix. Seuls bustes et noix sont constitués des deux parties creuses et jointives traditionnelles, pour le reste les figurines sont pleines, parfois moulées sur une seule face (poissons).
14Les moules ont un aspect schématique qui devait entraîner des reprises à l’ébauchoir après moulage. Les éléments de production semblent parfois frustes et sommaires, il s’agit peut‑être d’essais ou de jeux ?
1.24.5 La fabrication
15Peu d’outils ont été découverts sur le site : on note avant tout un moule de noix, d’autres fragments sont difficiles à déterminer. En revanche, des bustes féminins en terre de l’Allier (?) mis au jour sur place ont pu servir de modèles. Un four a été décelé et fouillé, mais il s’agit d’un four de séchage (d’après F. Le Ny). Les chercheurs ont mis en évidence des structures de type hangars, entrepôts, ateliers et cours. Il s’agit d’architectures légères signalées par des plinthes calcaires, des murets ou solins (?).
16En réalité, les éléments de figurines ont été mis au jour dans des remblais, pêle‑mêle avec des tessons divers servant à l’assainissement d’une cour de l’officine. Le contexte de découverte est donc mal déterminé, les relations paraissent complexes avec le lieu précis de production. Les fours de l’officine proprement dits n’ont pas été découverts.
1.24.6 Les potiers
17Les noms des potiers ayant réalisé les figurines sont inconnus. Dans l’atelier on peut cependant affirmer que Fronto (ou Frontinus ?) produisait des antéfixes ; est‑il devenu coroplathe ?
1.24.7 La diffusion
18Pour l’instant le type de production de l’atelier de la prairie a été peu remarqué dans la ville antique comme sur son territoire. On note toutefois un fragment de partie. postérieure de buste féminin à pâte ocrée et engobe blanc dans un habitat du iie s. (rue Port‑de‑Ia‑Rousselle ; C. Vernou 1983 : no 1188). Par ailleurs, des éléments de chien assis et de cheval ont été découverts dans des puits antiques du site de « Ma Maison » (puits 21 et 6, N. Laurenceau et L. Maurin 1975‑1981). Si la technique est la même, ce type de figurines n’est pas attesté à la prairie. En revanche, plusieurs éléments de noix bivalves ont été mis au jour à saintes.
Bibliographie
Bibliographie
Vernou 1986.
Vernou, Vienne 1987.
© Éditions de la Maison des sciences de l’homme, 1993