1LIEU DE CONSERVATION
Musée de la Société archéologique de Touraine (Hôtel Gouin), à Tours, exclusivement.

2RESPONSABLE DU SITE
Service régional de l'Archéologie du Centre.

3Références géographiques actuelles : département : lndre‑et‑Loire ; commune : Crouzilles ; lieu‑dit : Mougon.

1.20.1 Circonstances de la découverte

4La mise en évidence d’une production de statuettes à Mougon ne date que de 1936 (Auvray 1936), bien que l’atelier céramique soit connu depuis le xix^e s. (Chevalier 1871‑1974a ; pour la bibliographie générale de l’atelier, voir Ferdière, Gendron 1986 : 132 ; schweitz et al. 1986). Mais les découvertes les plus remarquables en la matière n’ont été faites qu’en 1972‑73, lors des prospections systématiques menées sur Ie site, par C. Toulier‑Vallée (Picard 1974 : 315, fig. 14 ; Toulier‑Vallée 1976 : 139‑ 141, pl. VI‑VII). Les recherches faites au xix^e s. et dans la première moitié du xx^e s. ne concernent que des découvertes fortuites et des fouilles très partielles (Auvray 1936 ; Bousrez 1899). Des prospections systématiques ont été menées en 1972‑74 (Toulier‑Vallée 1976 ; Vallée, Toulier 1976 ; CPAT 1974) et un autre four (à céramique) a été fouillé en 1974 (Toulier‑Vallée 1976 ; CPAT 1974 : fig. 3). Une nouvelle fouille de sauvetage a été faite en 1979 (schweitz et al. 1986).

5Les prospections au sol ont été complétées par des prospections aériennes et géophysiques ; elles ont permis de reconnaître l’étendue du site, son organisation et de mettre en évidence la présence de nombreux fours (plus de 20). Aucun de ceux qu’on a explorés (6 seulement) ne correspond à une production de statuettes. Toutefois, la présence de fragments de moules en surface (plus de 6) atteste la fabrication sur place. De plus, ceux qu’on a localisés ont été découverts dans la zone centrale du site (zone des fours). La région fouillée est un terrain cultivé et en partie érodé par la berge de la Vienne.

1.20.2 Contexte historico‑géographique

6L’atelier se trouve en Lyonnaise, dans la partie occidentale de la cité des Turons (ciuitas Zibera) Il se rattache à un assez important uicus (uicus Mediconntl1n [?] cité au vi^e s. par Grégoire de Tours). La capitale des Turons, Caesarodonum‑Tours, se situe à 35 km au nord‑est, placée à proximité immédiate de la voie romaine de Chinon à Port‑de‑Piles ; l’atelier bénéficiait aussi des possibilités de transport par la Vienne, sur la berge nord de laquelle il était installé. L’eau était fournie en abondance par la rivière et plusieurs puits repérés sur le site. Le bois devait provenir du plateau au nord (forêt de Chinon, landes de Cravant). L’argile mise en œuvre (plastique, verte) correspond aux alluvions anciennes de la Vienne, exploitées en berge ou par galeries (mises en évidence en 1979).

7La phase de fonctionnement de l’atelier est datée par les productions sigillées (?) (milieu du i^er s. ap. J.‑C. ‑ milieu ou seconde moitié du ii^e s. ap. J.‑C.) (Ferdière, Gendron 1986 : 131) et celles d’amphores (40‑60 ap. J.‑C., confirmée par l’archéo‑magnétisme) (schweitz et al. 1986 : 62). Le site de Mougon a donc produit certainement de la céramique commune, des amphores et des statuettes ; la production de sigillée n’est pas attestée sur le site même. Le uicus a également fourni des preuves d’activités telles que le tissage, et la métallurgie du fer est bien attestée à la même époque dans les landes de Cravant. La production d’amphores, au milieu du i^er s., témoigne par les formes présentes (Dressel 2‑4 ; Gauloises 4) de l’existence d’une activité viticole et vinicole contemporaine.

1.20.3 Activité céramique

8L’activité céramique de l’atelier semble prendre naissance, avec la production d’amphores et de céramique commune, dans le courant du règne de Claude, vers la fin de la première moitié du i^er s. ap. J.‑C.

9La production de figurines ne peut être exactement située dans le contexte chronologique général de l’atelier, en l’état de nos connaissances ; elle apparaît sans doute comme relativement secondaire par rapport aux autres produits de l’atelier (terres cuites architecturales, céramique commune surtout). Toutefois, les types de figurines dont la production est attestée ici (déesses‑mères, Vénus, chevaux, ...) peuvent s’accommoder d’une datation à la fin du i^er ou dans la première moitié du ii^e s. ; cette fabrication semble bien se placer dans la fourchette chronologique d’activité de l’atelier. Les affinités de cette production sont manifestes surtout avec les ateliers Arvernes du centre de la Gaule (Rouvier‑Jeanlin 1972), bien que des relations avec les ateliers du nord‑ouest (Joubeaux 1988) ne soient pas à exclure. Les moules et fragments de statuettes découverts sur le site ont fait l’objet de prélèvements, en vue d’analyses, par le Laboratoire de recherche des musées de France (C. Lahanier).

1.20.4 Définition archéologique des figurines

10La production n’est connue que par quelques fragments de moules et seulement deux fragments de statuettes. Ces derniers sont de couleur blanchâtre, apparemment sans engobe. Les moules sont en terre rosée, fine, sans dégraissant apparent, à l’exception du premier moule découvert (déesse‑mère) qui est en terre blanche, très légèrement rosée.

11Seuls trois thèmes sont actuellement attestés : déesse‑mère, Vénus, cheval. La déesse‑mère est attestée par trois échantillons (moules : une valve antérieure de moule, un fragment inférieur de valve antérieure ; positif : fragment de fauteuil). Il s’agit, dans tous les cas, d’une déesse‑mère assise dans un fauteuil d’osier. Les deux fragments antérieurs correspondent d’assez près au n^o 354 de Rouvier‑Jeanlin 0972 : 167 : trouvée dans l’atelier de Saint‑Pourçain‑sur‑Besbre, Allier). Vénus : seulement attestée par un fragment de moule (jambes) et un petit fragment de figurine du type dit « à gaine ». Le moule est trop fragmentaire pour fournir des indications typologiques. Type classique ? (Rouvier‑Jeanlin 1972 : n^o 36 sq.). Le bord de la plaque de la Vénus à gaine est décoré, comme à l’habitude, de rouelles : ce type est traditionnellement attribué à un atelier du nord : ‑ouest de la Gaule (type Rouvier‑Jeanlin 1972 : 48‑49, n^os 206 à 223 ; Joubeaux 1988). Un fragment de moule (chignon seul, valve postérieure) peut correspondre plus à une tête de Vénus qu’à celle de la déesse‑mère. Le cheval est attesté par deux moules (valve gauche entière et fragment de tête, valve droite). Les deux éléments sont assez comparables ; le premier moule, entier, montre que seul le corps de l’animal était d’abord moulé et les jambes ajoutées postérieurement. Le fragment de tête est harnaché, alors que le cheval entier (valve gauche) ne l’est pas (type : Rouvier‑Jeanlin 1972 : n^o 972 sq.). Aucun moule de figurine ou fragment de figurine de l’atelier n’a fourni à ce jour de trace de signature.

1.20.5 La fabrication

12Aucun des outils découverts sur le site (crapaudines, colifichets, ...) à l’exception des moules eux‑mêmes –ne correspond à la fabrication des statuettes. Aucun des fours fouillés à ce jour ne paraît consacré à cette production.

1.20.6 La diffusion

13En l’absence d’analyse sur les figurines découvertes sur les sites gallo‑romains de Touraine et des cités voisines, il n’est pas possible de reconnaître aujourd’hui l’aire de diffusion des produits de cet atelier. Les types sont en effet trop peu caractérisés pour permettre une identification typologique certaine.