1LIEUX DE CONSERVATION
Les moules et les figurines de Pistillus sont conservés dans les réserves archéologiques du musée Rolin, 3 rue des Bancs, 71400 Autun; quelques pièces sont présentées dans les vitrines du musée.
L'intégralité du mobilier découvert rue des Pierres est au dépôt de fouilles municipal du musée Rolin, 5 rue Bouteiller, 71400 Autun.

2RESPONSABLE DU SITE
Service régional de l'Archéologie de Bourgogne.

3Autun est une commune du département de Saône‑et‑Loire, à la fois chef‑lieu de canton et d’arrondissement.

4Située aux abords du Morvan et accrochée à un flanc du bassin de l’Autunois, la ville, orientée au nord, s’étage (passant de 287 à 351 m d’altitude) depuis la rive gauche de l’Arroux et ses affluents, le Ternin et l’Accaron, jusqu’au pied de la montagne de Montjeu (643 m).

5La ville d’Autun est construite sur la marge méridionale du bassin permo‑carbonifère. Au nord, ce bassin est bordé par le synclinorium du Morvan, formé essentiellement de tufs volcaniques (carbonifère). En quelques points, on observe des passées de calcaire sombre marin du Viséen (Cussy‑en‑Morvan) ou des lambeaux de calcaire métamorphisés en marbres blancs (Champrobert). Au sud, la dépression d’Autun est dominée par le massif d’Antully constitué de granite et de gneiss, roches du socle hercynien qui ont été recouvertes, comme le bassin d’Autun par les dépôts lagunaires de la transgression du Trias : les arkoses. Au‑dessus, il reste des placages de grès fin gris ou roux du Rhétien, sur lesquels reposent des marnes, et des calcaires du Jurassique moyen et supérieur n’affleurent que plus loin vers l’est (au moins à 20 km d’Autun).

6Autun se situe à un carrefour de voies naturelles ; cette partie de la vallée de l’Arroux constitue un point de convergence entre les bassins de la Loire, de la Saône et du Rhône. Le réseau routier antique est développé : douze voies aboutissent à la ville, dont deux importantes, la voie d’Agrippa, de Lyon à Boulogne par Chalon‑sur‑Saône, Autun, Auxerre, sens et Beauvais, et la transversale mettant en communication l’est et le centre, Besançon et Bourges, par Beaune, Autun et Decize.

7Augustodunum était le chef‑lieu des Eduens, ciuitas de la Gaule lyonnaise. Les découvertes de ces dernières années à Autun témoignent de l’importance de l’artisanat, sous‑estimé dans les fouilles du siècle passé, tant elles s’intéressèrent avant tout au caractère monumental d’Augustodunum. Pourtant le rôle de la ville dans l’économie de production de la Gaule n’est pas négligeable : le chef‑lieu de la ciuitas Aeduorum, héritier de la population de Bibracte, le fut aussi naturellement des traditions artisanales de l’oppidum. Dès l’époque augustéenne, le long des voies, les portiques mis au jour dans les fouilles récentes ont révélé de nombreux ateliers de petit artisanat, principalement de métallurgie du bronze, dispersés d’abord dans toute la ville. Mais à partir du règne des Flaviens, ce qui paraît correspondre au moment où le programme d’urbanisme est en voie d’achèvement ‑on place traditionnellement à cette époque la construction du théâtre et de l’aqueduc de Montjeu, par exemple ‑, les ateliers sont relégués dans un quartier spécialisé, au nord‑est de la ville, contre l’enceinte. L’abandon partiel de certaines maisons dans la seconde moitié du iii^e s., puis à nouveau à la fin du iv^e s., verra divers ateliers se réinstaller dans des bâtiments du centre de la ville.

1.16.1 Atelier (?) de Pistillus

Circonstances de la découverte

8En 1841, la commis ion des Antiquités d’Autun, lors de l’exploration des aqueducs et égouts antiques de la ville, mit au jour, près d’un grand collecteur, dans l’ancien parc de l’abbaye Saint‑Jean‑le‑Grand, près de la Porte d’Arroux, au nord de la ville, un certain nombre de statuettes et de moules signés pistillvs. En 1866, lors des travaux d’établissement du chemin de fer, on découvrit dans le parc Saint ‑Jean, non loin du lieu où avait été faite la trouvaille précédente, une dizaine de petites Vénus dans des niches et divers autres objets en argile.

Contexte historico‑géographique

9L’emplacement du parc de l’abbaye Saint‑Jean‑le‑Grand (environ 5 ha) est principalement occupé actuellement par des jardins et la caserne Changarnier (école militaire). La politique de rénovation de ce faubourg d’Autun menace à plus long terme les vestiges archéologiques de ce quartier.

10Ce quartier antique est bordé à l’ouest par le cardo maxilnus, bien visible jusqu’au xvii^e s. et dont le tracé correspond exactement à l’actuelle rue du Faubourg d’Arroux, et au nord par le rempart. Plusieurs autres rues et des vestiges d’habitation (murs, puits, ...) et d’ateliers de métallurgie ont été découverts à proximité, mais l’on ignore la topographie complète de ce secteur de la ville dans l’Antiquité, même si les activités artisanales occupent une part essentielle, en comparaison avec les autres quartiers connus.

11Pistillus, dont la production était initialement datée par H. Vertet de la fin du i^er s. uniquement sur des critères stylistiques –le coroplathe étant vu comme un avatar de l’art hellénistique tardif– est actuellement vu au contraire comme le potier qui a réalisé la synthèse des figurines des i^er et ii^e s. et a renouvelé cette production à l’extrême fin du ii^e s., voire du début du iii^e s. Cette datation s’appuie cette fois uniquement sur des critères archéologiques (contextes d’habitat et de nécropoles).

Activité céramique

12En l’absence de fouilles, nous ne connaissons les productions de Pistillus que par des figurines portant sa signature, découvertes non seulement à Autun mais aussi dans diverses régions de la Gaule, et par les figurines qui peuvent lui être attribuées pour des raisons stylistiques. Mais il reste encore à prouver que Pistillus a uniquement exercé son activité à Autun, ce qui gêne considérablement la caractérisation de ces ateliers autunois. Nous ne pouvons pas, par exemple, savoir quelle est l’importance des figurines par rapport aux autres produits céramiques.

Définition archéologique des figurines

13La pâte est le plus souvent blanche, bien épurée certains exemplaires présentent cependant des variations de couleur pouvant aller du rose au beige. Les figurines sont souvent soigneusement lissées.

14Le nom de Pistillus apparaît sur les figurines (en capitales en relief, inclus ou non dans un cartouche) et les moules (en cursives, tracé à la pointe avant cuisson). Trois formes se rencontrent principalement : le nom seul, pistillvs, une initiale seule P, ou encore la phrase pistillvs fecit. Le trou d’évent est circulaire, sa place n’a pas encore été étudiée.

15Le répertoire iconographique des statuettes découvertes à Autun et portant la signature de Pistillus se répartit ainsi (fig. 24) :
– divinités : déesses‑mères à un enfant (4 types), déesses‑mères à deux enfants (2 types), Abondance, triade de déesses‑mères, Vénus debout (4 types), Vénus dans un édicule, Vénus avec amour ;
– personnages : Risus et bustes d’enfant (5 types), couple dans un lit ;
– animaux : coq.

16On ne connaît pas de fruits ou de mobilier.

17Si l’on tient compte des statuettes signées pistillvs découvertes en d’autres lieux, le répertoire est beaucoup plus étendu ; de même, certaines figurines non signées découvertes à Autun peuvent lui être attribuées, en dehors des sujets déjà cités :
– divinités : Epona, Hercule, Sucellus, Minerve, Mercure ;
– personnages : cucullatus ;
– animaux : cheval.

La fabrication

18Les fouilles du xix^e s. n’ont pas rencontré de fours ou de structures d’atelier, mais uniquement des objets (moules et figurines) issus sans doute d’un dépotoir, étant donné leur concentration.

Les potiers

19Le nom de Pistillus apparaît toujours seul, tant sur les figurines que sur les moules. Selon certains chercheurs, la dispersion des figurines portant ces signatures empêche de savoir s’il s’agit d’un artiste ou du propriétaire d’un atelier et de localiser précisément ce ou ces ateliers. L’argument selon lequel il y aurait eu plusieurs potiers nommés Pistillus ne semble plus tenir après les études stylistiques (Vertet) et compte tenu des données chronologiques (Lange, Rebourg).

La diffusion

20Dans l’état actuel de nos connaissances, les figurines de Pistillus ont été diffusées d’abord dans la cité des Eduens (Mâlain, Beire‑le‑Châtel, Nuits‑Saint‑Georges, Pagny‑la‑Ville, etc.) et chez ses clients (Alésia, Vertault, etc.), puis hors de la région, principalement selon deux grands axes : vers l’ouest, par la voie de Bourges, puis Poitiers et en direction de l’Atlantique (Nantes, saintes, Bordeaux) ; cette voie est moins importante que la suivante ; vers l’est et le nord‑ouest, suivant la voie d’Agrippa et ses ramifications (Langres, Arcis‑sur‑Aube, Soissons, Compiègne, Beauvais, Rouen, Lisieux, Arras). En dehors de découvertes très ponctuelles (Lyon, Arles), la vallée du Rhône n’a pas accueilli les produits de Pistillus.

1.16.2 Atelier de la rue des Pierres

Circonstances de la découverte

21En 1987, la construction d’un lotissement dans les jardins et les terrains vagues de la partie nord de la rue des Pierres, au nord‑est de la ville d’Autun, a donné lieu à une fouille de sauvetage, sur un terrain d’environ 4000 m². Le site a été entièrement détruit. L’atelier couvrait une superficie d’environ 100 m² (avec d’autres productions).

Contexte historico‑géographique

22Quartier artisanal intra‑muros, le long de l’enceinte augustéenne, délimité par deux decumani (dont l’un menait à une tour de l’enceinte) et un cardo secondaires. Cet atelier peut être daté grâce aux autres productions céramiques fabriquées concurremment avec les figurines. Au nord de la parcelle fouillée, le long d’un decumanus conduisant à une tour de l’enceinte augustéenne, s’étend un ensemble d’échopes et d’ateliers d’artisans, regroupant les métiers du feu : potiers, bronziers et verriers.

Activité céramique

23sur le chantier de la rue des Pierres, le travail de la céramique, qui est de loin le plus important, est attesté pendant trois siècles : terra nigm et céramiques communes grises de type indigène au début du i^er s. (dépotoirs), gobelets à parois fines décorés de guillochis, de dépressions et de motifs à la barbotine au ii^e s. (four et dépotoir). Ces activités sont particulièrement bien représentées au iii^e s., où l’on ne compte pas moins de 8 fours, en bon état de conservation et de nombreux dépotoirs qui ont livré une production variée et parfois originale : céramique commune (cruches, assiettes et autres formes ouvertes), mortiers (avec estampilles), céramique estampée et figurines en terre cuite blanche (moules et statuettes de Vénus, déesse‑nourrice, cheval, Risus, etc.). L’activité métallurgique, apparemment limitée au i^er s., est connue par des fosses contenant des centaines de débris de moules en terre pour la fonte à la cire perdue, des creusets et des débris d’objets de bronze.

Définition archéologique des figurines

24La pâte est généralement très blanche, mais peut aussi (problèmes de cuisson) présenter une couleur brune ou rose (quelques exemplaires seulement) ; elle Il est généralement bien lissée. Toutes les statuettes et les moules sont anépigraphes. Le trou d’évent est de forme circulaire, très net, mais pas percé de façon systématique : sur Vénus, il est placé derrière la hanche gauche ; sur Epona, sous le bras droit.

25Les sujets connus par au moins plusieurs exemplaires ou par des moules sont les suivants :
– divinités féminines : déesse‑mère, Vénus, Epona, Minerve ;
– divinités masculines : Mercure ;
– personnages : Risus ;
– animaux : cheval, lion, taureau (?).

26Le répertoire est très limité dans le temps. Tout paraît‑contemporain. La plupart des types semblent des surmoulages. Aucun moule ou figurine ne porte de signature.

La fabrication

27Un seul prototype est connu, plus une indication de découpe de valve par pointillé. On possède 22 moules et fragments de moules (socles hémisphériques, socles parallélépipédiques, taureau, Vénus, cheval) ; il n’y avait pas d’outillage. Le site comportait 8 fours C7 circulaires et 1 four canal) ; le dépotoir contenant les figurines était entouré par 3 fours circulaires.

Les potiers

28Aucun nom n’est connu pour cet atelier. La plupart des figurines semblent issues de surmoulages. On peut déceler une influence lointaine de Pistillus pour Epona (cf. Epona, Abondance et triade de déesses‑mères de ce potier).

La diffusion

29Ces productions ont eu une diffusion très restreinte, sans doute uniquement locale.