Les enceintes fortifiées du Limousin
|Chapitre 2. Le Limousin protohistorique
Texte intégral
2.1 Introduction
1Dans ce chapitre, j’essaie de fournir un cadre pour l’étude des habitats en Limousin, en évoquant beaucoup de problèmes qui ne sont qu’esquissés.
2Les paysages méritent une analyse afin de définir les différences entre le Limousin et les régions limitrophes. L’histoire géopolitique ultérieure sera aussi abordée afin de faire ressortir sa situation marginale par rapport aux deux grands bassins français – le Bassin parisien et le Bassin aquitain.
3La biogéographie de la région sera considérée sous deux aspects. D’abord les travaux palynologiques que j’ai pu consulter seront récapitulés. Dans l’ensemble ils consistent en tableaux de pourcentage des espèces, renforcés par quelques datations au 14C ; il est évident que ces recherches en sont encore à leurs débuts. Ensuite, on examinera l’utilisation actuelle des terres, car celle‑ci a des implications importantes pour la suivie des sites et pour leur détection.
4On trouvera également un résumé des publications archéologiques concernant la région et quelques comparaisons avec des régions avoisinantes. Les synthèses concernant le matériel sont très peu nombreuses et beaucoup d’auteurs ont considéré celui‑ci dans le cadre de modèles invasionnistes, peut‑être abusivement. Il faut noter que je n’ai pas étudié ce matériel personnellement ; les commentaires sont donc sujets à caution. Les monnaies, par contre, sont étudiées de façon plus approfondie car les travaux récents tendent à accorder une certaine importance à ces données. Quand une petite trouvaille provient d’un habitat étudié ultérieurement, elle est présentée avec le site. Enfin, il ne faut jamais oublier l’effet nuisible de l’acidité du sol sur le mobilier en Limousin.
2.2 Aspects de la géographie physique et humaine
2.2.1 Introduction
5« Le Limousin offre cet avantage de former une des plus uniformes régions géographiques de la France, vaste zone de terrains cristallins au sol froid, imperméable et humide, qui constitue le premier gradin occidental du Massif central. » (Deffontaines 1933 : 461)
6Le Limousin actuel –les trois départements de la Corrèze (19), de la Creuse (23) et de la Haute‑Vienne (87)– a été formé, au cours des siècles, par de nombreuses perturbations, politiques et administratives. D’une superficie d’environ 19 000 km2, l’unité politique actuelle possède néanmoins quelques caractéristiques qui justifient une étude régionale. Pendant la dernière période de l’époque qui nous intéresse, la région semble avoir formé la plus grande partie du territoire des Lémovices mais non la totalité. D’habitude, on accepte que les limites territoriales des tribus avant la Conquête –pour autant qu’on puisse les considérer comme sûres– ont suivécu, grosso modo, clans les divisions ecclésiastiques du pays. Les différences les plus importantes entre le Limousin actuel et le diocèse de Limoges, tel qu’il existait à la veille de la Révolution, proviennent du recul des limites méridionale et occidentale (Desbordes 1983a). Quelque 34 paroisses se trouvent actuellement dans le département de la Dordogne, surtout clans le Nontronnais, et 38 en Charente, dans le Confolentais (Schmitt 1936).
7Par contre, pendant les siècles postérieurs à l’époque romaine, la région oscilla entre les Francs, après la défaite des Wisigoths en 507, et le royaume –ou duché– d’Aquitaine dans le Sud‑Ouest. Franc de 507 à 631, le Limousin appartint à l’Aquitaine de 631 jusqu’en 918, sauf de 744 à 778 où il fut, à nouveau, franc. Avant le milieu du xe s., le Limousin semble avoir perdu tout semblant d’unité politique (Leroux 1890 ; 1908 : 339), car il est certain que le comté de la Marche existait déjà à cette date (Thomas s.d. : 6). De plus, il semble que la distinction administrative entre le haut et le bas Limousin, ce dernier correspondant jusqu’à un certain point à la Corrèze, existait déjà vers la fin du xive s. (Fage 1917).
8A cause de la dépendance politique, qui oscillait entre le Sud‑Ouest (le duché d’Aquitaine et la Gascogne) et le Bassin parisien au nord, beaucoup de caractères qui, traditionnellement, différencient les influences septentrionales et méridionales en France ont une répartition particulière en Limousin (Pinchemel 1964 : fig. 48). Sans vouloir être déterministe, il est évident qu’il faut reconnaître l’influence que les caractéristiques physiques de la région ont exercé sur la géographie humaine.
2.2.2 Le relief du Limousin
9Du point de vue géologique, le Limousin constitue la partie nord‑ouest du Massif central, un des massifs hercyniens les plus importants de l’Europe occidentale. Formé surtout de roches ignées avec une couronne de schistes cristallins et de gneiss, il est séparé de la zone d’activité volcanique plus récente, centrée sur le Puy‑de‑Dôme et le Cantal, par le sillon houiller stéphanois (Rutten 1969 : fig. 87).
10Ce plateau du Massif central, une ancienne pénéplaine soulevée ultérieurement jusqu’à 1 200 m (à moins de 1 000 m dans le Limousin même), est une des barrières topographiques majeures de l’Europe occidentale. Complété vers l’est par les Alpes, il constitue une barrière climatique et, jusqu’à un certain point, culturelle entre les zones tempérée et méditerranéenne de l’Europe.
11L’élévation ultérieure du Massif central montre des signes d’un déplacement différentiel important qui a eu pour résultat une inclinaison généralisée vers le nord‑ouest avec, comme conséquence, des altitudes plus basses dans ce secteur. Si l’on exclut les montagnes dues à une activité volcanique ultérieure, les altitudes les plus élevées se trouvent au sud‑est, dans le Velay et la Lozère, à la limite opposée au Limousin. Il en résulte que les cours d’eau de cette ancienne pénéplaine s’écoulent surtout vers l’ouest et le nord‑ouest, vers les fleuves majeurs des bassins aquitain et parisien. Le Limousin partage cette dichotomie, car beaucoup de rivières sont des affluents de la Loire, de la Vienne et de la Creuse, entre autres, tandis que celles de la Corrèze (le bas Limousin) se jettent dans la Dordogne.
12Dans l’ensemble, le Limousin (fig. 1) se différencie du reste du Massif central par des altitudes plus basses et une géologie différente. Il forme donc une unité sur la bordure nord‑ouest de ce massif. En Limousin, les différences les plus importantes concernent les hauts plateaux, tel le plateau de Millevaches (où certains sommets dépassent 900 m), et les anciennes pénéplaines, plus basses, qui l’entourent. Ces dernières sont interrompues par des zones plus hautes (par exemple, le massif d’Ambazac et les monts de Blond en Haute‑Vienne) et des vallées qui découpent la topographie des plateaux de roches granitiques et métamorphisées. Dans l’ensemble, c’est une zone de hautes ternes qui n’empiètent que rarement sur les plaines sédimentaires plus basses du Berry, du Poitou et de l’Angoumois avoisinants.

FIG. 1 – Le Limousin : relief et hydrographie (d’après Notes et études documentaires, no 3118,1964).
13Depuis Demangeon, on divise les paysages du Limousin en deux groupes principaux, les « hauts sommets » et les « plateaux limousins » (Demangeon 1910). Le premier inclut non seulement des zones étendues comme la Montagne limousine, mais aussi des zones plus restreintes comme les monts de Blond, d’Ambazac, de Toulx‑Ste‑Croix, de Guéret, etc. Un troisième élément de cette topographie de hautes terres arrondies consiste en des collines isolées, comme celles qui entourent Bourganeuf. La plupart de ces hautes terres sont formées de granits et de granulites plus résistants qui dépassent les terres schisteuses avoisinantes, mais cette généralisation est loin d’être absolue. Dans l’ensemble, l’altitude diminue vers l’ouest.
14La plupart des plateaux sont marqués par des pentes plus douces correspondant à l’orientation des rivières. La Vézère, dont la pente est exceptionnellement douce, passe de 463 m près de Treignac à 430 m à St‑Bonnet‑l’Enfantier (33 m en 91 km) ; la Dordogne, de 746 m à Eygurande, quitte la région près de Beaulieu à environ 500 m ; la Creuse, à près de 700 m à Felletin, se trouve à 200 m à Argenton‑sur‑Creuse, dans le sud du Berry. Cependant, les altitudes moyennes dans la région sont élevées : environ 512 m dans la Creuse, 565 m dans la Haute‑Vienne et 700 m dans la Corrèze (Leroux 1908 : 307).
2.2.3 Climat et sols
15Du point de vue climatique, le Limousin se trouve à la limite des influences océaniques, continentales et méridionales. Le climat océanique, plus développé sur les plateaux bas de la bordure ouest de la région, où la saison la plus sèche (l’été) est suivie de la plus humide (l’automne), est inversé vers l’est, en haute Marche par exemple, où l’automne est souvent la saison la plus sèche. Les quatre cinquièmes de la région ont une pluviosité moyenne de 900 mm et un sixième reçoit 1 300 mm (Durandeau 1958).
16La plupart des sols sont comparativement légers et naturellement acides (pH 5.5‑6.5) parce qu’ils se sont formés sur des granits, des granulites, des micaschistes et des gneiss. Les meilleurs proviennent des diorites et des amphibolites. Ils sont neutres et composent environ 5 % des terres limousines, surtout dans la Haute‑Vienne et la Corrèze (dans le bassin de la Ligoure, et quelques sols autour de Bellac, Le Dorat, St‑Yrieix, Lubersac, Uzerche et les bordures du bassin de Brive) (Durandeau 1958).
17Ces facteurs s’associent pour faire du Limousin une région plus adaptée, dans l’ensemble, à l’élevage qu’à la culture. En 1958, on estimait les pâturages à 700 000 ha et les céréales à 200 000 ha. Dans le passé, les variations climatiques, associées à l’altitude, tendaient à encourager des systèmes transhumants. Dans les hautes terres limousines, les constructions en pierres sèches (les « cases ») sont bien connues mais difficilement datables : beaucoup, mais pas toutes, loin de là, peuvent être relativement récentes. Une étude plus approfondie de ce type de site et des systèmes agraires qui y sont associés doit être une priorité dans les années à venir.
18Avant d’étudier les éléments constituants principaux du Limousin, il faut mentionner un résultat de l’interaction de la géologie et du climat, car il est étroitement lié à l’archéologie de la région. Dans certaines zones, l’érosion a créé des éléments ruiniformes qui incorporent quelquefois d’immenses rochers arrondis –par exemple, Les Pierres‑Jaumâtres (Maître 194,3 : 418)– et des roches creusées de bassins naturels. Inévitablement, ils attiraient l’attention des antiquaires anciens. Mérimée signala que ces éléments étaient naturels (Mérimée 1838 : 76) ; une opinion reprise, avec beaucoup de vigueur, par Cessac (Cessac 1857 : 245‑248). Cependant, quelques‑uns furent incorporés dans des sites fortifiés plus tardifs –St‑Georges‑Nigremont en Corrèze, par exemple– et certaines de ces formations, à première vue naturelles, mériteraient une étude supplémentaire.
2.2.4 Végétation
19Une étude récente confirme l’idée selon laquelle la distribution de la végétation en Limousin ressemble plus à celle des terres basses, vers l’ouest, qu’à celle de la zone plus montagneuse du Massif central à l’est (Denèfle 1980). Des données polliniques datées suggèrent un impact humain important sur la végétation pendant l’âge du Fer, caractérisé par une diminution relative de la zone boisée et par la manifestation d’une activité agricole. Comme la plupart des données relatives aux pollens concernent les hautes terres du Limousin, il n’est pas possible de généraliser.
20A Longéroux sur le plateau de Millevaches, un diagramme pollinique démontre la progression des Calluna et des Ericaceae aux alentours d’une date au 14C de 2070 ± 80 BP (Ny‑649) associée à une diminution des espèces d’arbres représentées (Denèfle 1980 : fig. 3). Un site à Orluc, sur le même haut plateau, donne une séquence sensiblement différente (Denèfle 1980 : fig. 4), même si on peut voir une diminution de la zone boisée et une augmentation des herbages entre 3015 ± 80 BP et 960 ± 80 BP (Denèfle 1980 : fig. 6). Parmi les données polliniques provenant des zones plus au nord vers les plateaux de la Marche, celle d’Augères semble potentiellement la plus intéressante (Denèfle 1980 : fig. 6). La stratification est fondée sur une datation au 14C de 3295 ± 125 BP que les palynologues pensent être trop récente car ils considèrent que la composition des pollens indique la fin de la période de la forêt atlantique. On a cependant reconnu un déboisement croissant dans les deux tiers supérieurs du schéma et, ici encore, il semble qu’il y ait un indice certain d’un défrichement pendant l’âge du Fer. Dauges (commune de St‑Léger‑la‑Montagne) dans les monts d’Ambazac (Haute‑Vienne) a fourni un autre schéma qu’on a interprété comme une régression de la forêt accompagnée de développements alternés d’herbes Cyperaceae et Calluna/Bricaceae pendant la même époque. Comme on a également trouvé des pollens de mauvaises herbes associées à la culture, on ne peut pas savoir si ce schéma représente des phases alternées –défrichement et reboisement– ou de simples modifications dans le cycle agricole de la zone étudiée. Dans l’ensemble, les auteurs acceptent une régression plus importante pendant le Subatlantique, qu’on fait correspondre à l’âge du Fer, que pendant le Subboréal et, comme on pourrait le prévoir, les preuves de culture, même indirectes, sont plus nettes autour de la courbe des 400 m que sur les sites du plateau de Millevaches, deux fois plus élevé.
21Une étude plus ancienne, de Lemée, sur les pollens du plateau de Millevaches et des hauts plateaux corréziens à environ 530‑680 m, a attiré l’attention sur les différences avec des régions situées plus à l’est, plus exactement les monts Dore (Lemée 1943). Lemée signale la présence de châtaigniers dans un horizon qu’il attribue au Néolithique ; par la suite, l’importance relative de cette espèce semble avoir augmenté, sauf sur le plateau de Millevaches.
22Ailleurs, les analyses polliniques suggèrent un boisement très mélangé pendant le Subatlantique, même si le choix des sites échantillonnés a pu contribuer à la présence dominante, en pourcentage, des aulnes. C’est le cas à La Draperie, dans la vallée inférieure de la Couze, un affluent de la rive gauche de la Vézère dans le sud de la Corrèze. Ici, la couche 10, au‑dessus d’une couche datée au I4C à 2560 ± 130 BP (Ly‑753) et à 2510 ± 120 BP (Ly‑752), inclut Quercus, Pinus diploxylon, Carpinus, Fagus, Corylus, Tilia et Ulmus même si Aulnus avec 68,2 %, prédomine quantitativement (Raynal 1979).
2.2.5 Le contexte géographique : synthèse
23Avant de commencer une analyse plus détaillée de la géographie physique et humaine du Limousin, il nous faut expliquer la nécessité d’une telle approche. D’abord, et peut‑être surtout, parce qu’il semble que l’environnement physique du Limousin est une variable importante qui contribue à une idée que nous développerons par la suite : que le développement structurel du Limousin protohistorique diffère nettement de celui des régions avoisinantes. Deuxièmement, le paysage offre un certain contrôle sur notre évaluation des habitats, une mesure sûrement grossière, mais qu’on ne peut améliorer sans un programme de fouilles plus important et des prospections locales plus approfondies que celles qui entraient dans les limites de notre travail. En troisième lieu, parce que nous croyons que l’environnement naturel exerce une influence considérable sur l’archéologie connue, et susceptible de l’être, du Limousin, tout comme sur celle d’autres régions d’Europe. En Limousin, l’exemple le plus évident est celui du degré de reboisement. Il n’est pas surprenant que le chercheur le plus efficace sur le terrain en haute Corrèze, par exemple, soit un forestier de métier, le député communiste Marius Vazeilles (1881‑1973). Nous pensons qu’en Limousin, c’est une exploitation systématique des zones boisées qui fournira, éventuellement, le plus grand nombre de sites. Dans d’autres régions de France, cette méthode commence déjà à donner de bons résultats, même si elle n’en est qu’à ses débuts (Desbordes 1975a ; Zuber 1978). Par contre, la photographie aérienne traditionnelle – en termes d’indices phytologiques plutôt que d’indices sciographiques ‑ sera probablement moins profitable dans cette région de bois et de pâtures que dans les régions moins humides et de culture plus intensive plus au nord (par exemple, Agache 1970, 1978 ; Jalmain 1970).
24Le Limousin se prête bien à une analyse suivant l’altitude en commençant par les hauts massifs de l’est.
2.2.5.1 Les hauts sommets : la Montagne limousine
25Les sommets les plus hauts du Limousin se trouvent sur le plateau de Millevaches, sur son voisin septentrional le plateau de Gentioux et clans les collines des Monédières, autour de la source de la Corrèze (fig. 2). Le point culminant de la Montagne se trouve à 978 m vers sa bordure sud‑est, une altitude beaucoup plus basse que celle du reste du Massif central. En fait, à part la Montagne, dont l’altitude inférieure peut être située à environ 700‑750 m (Demangeon 1911 : fig. 1), seules quelques zones limitées du Limousin se situent au‑dessus de 715 m, altitude moyenne du massif (Fel 1955 : 401), Bien que ceci puisse expliquer l’absence d’habitats aux plus hautes altitudes du Limousin, Fel a attiré l’attention sur le fait que, sur la bordure nord‑ouest du massif, l’altitude maximale d’occupation et de culture est nettement plus basse que dans l’intérieur, le sud et l’est de la région (Fel 1955).
26Tout en admettant qu’il existe une interaction complexe de facteurs historiques, climatiques, démographiques et pédologiques, Fel fait remarquer la corrélation qui existe entre l’altitude et les aspects climatiques. Il semble que la pluviométrie prend une importance particulière, surtout par rapport au seigle d’automne, la culture principale de la région au xixe s. L’effet sur le climat des influences océaniques semble être un abaissement de la limite supérieure pour les habitats et l’utilisation agricole à environ 750 m dans le Morvan et à moins de 900 m dans le Limousin et certaines régions du Cantal. La pluviométrie dans les hameaux en altitude est très importante ; Dautrement cite une moyenne annuelle de 1 370 mm (Dautrement 1966). Château‑Chinon dans le Morvan et La Courtine dans la Montagne limousine ont tous les deux des minima mensuels de 95 mm (tabl. I).

TABL. I – Pluviométrie saisonnière moyenne à La Courtine (Creuse), alt. 765 m (d’après Fel 1955 : 408).
27De plus, les zones hautes du Limousin sont désavantagées par rapport aux zones plus à l’est en termes de températures moyennes, une tendance qui est plus marquée pendant l’été (tabl. II). L’évapo‑transpiration est donc un mécanisme moins efficace en Limousin qu’ailleurs dans le Massif central, avec des répercussions sur la végétation, les sols et les habitats. La région connaît des gelées entre septembre et mai et la neige peut tenir pendant plusieurs mois (Durandeau 1958 ; Demangeon 1911).

TABL. II – Températures saisonnières moyennes, exprimées en °C, pour diverses stations du Massif central, corrigées pour tenir compte des différences altimétriques (d’après Fel 1955).
28Si l’on prend l’isotherme annuelle des 8 °C dans le Massif central, on voit qu’elle passe à environ 750 m dans le Morvan, à environ 850 m en Limousin, à environ 950 m dans le Beaujolais, le Livradois et la Margeride, et à plus de 1 000 m autour de Mende. Les « terres froides » de cette zone, et de ses voisines, indiquent normalement des ternes incultes (Perrier 1949 : 7‑8). La végétation est dominée par des landes et les tourbières hautes sont fréquentes. Il y a cependant quelques zones de cultures et d’élevage.
29Il n’est donc pas étonnant que la région ait toujours connu une densité de population assez faible : en 1908, par exemple, elle était d’environ 3 habitants/km2 (Abzac 1909). La plupart des villes principales –Aubusson, Eymoutiers, Corrèze et Ussel, par exemple– se trouvent en bordure de cette zone de terres hautes (Demangeon 1911 : 317), ce qui souligne leur importance comme centres d’échanges entre différents écosystèmes (Robert 1959). Il est possible que ce contexte soit également caractéristique de la protohistoire.
2.2.5.2 Les plateaux de moyenne altitude
30Les zones de la tranche suivante, entre 500 et 700 m, sont plus étendues au nord et au sud de la Montagne que vers l’ouest. Au nord‑est se trouve la Combraille, qui s’étend à travers la haute vallée du Cher jusqu’au département voisin de l’Allier (Ardellier 1970). Elle forme une sous‑région du plateau cristallin granitique du Limousin et se termine vers l’est au sillon houiller qui va de St‑Eloi‑des‑Mines (Puy‑de‑Dôme) à Champagnat près de Bort (Corrèze). Incluant les sources du Cher, elle peut être délimitée à l’ouest par les pentes exposées à l’est des plateaux de Chénérailles et de Bellegarde dans la haute Marche et par la plaine de Gouzon. Nivelée par une action glaciaire, la Combraille est caractérisée par un relief aux formes arrondies et le paysage est dominé par le bocage, un trait partagé avec d’autres plateaux de la même altitude tels ceux qui séparent la Creuse du Taurion.
31D’autres zones, moins étendues, s’avancent vers le nord‑ouest à partir des plateaux de la haute Marche et forment des sommets marqués au‑dessus de plateaux plus bas. Parmi eux, les monts d’Ambazac et de St‑Goussaud forment une zone de collines en granit et en granulites qui sépare la haute vallée de la Gartempe de celle de la Vienne (Lacotte 1962). Cette zone, qui se fond à l’ouest dans les plaines de Charente, est délimitée par les monts de Blond. Bien que les collines soient coupées par au moins un col important, celui de la Roche entre St‑Sulpice‑Laurière et la Jonchère, lui aussi se trouve à une altitude d’environ 500 m, et on peut considérer le tout comme une unité physique. Les bordures de cette zone hautement métamorphisée sont caractérisées par des gisements miniers exploitables. Ultérieurement, ces collines formeront la frontière entre la Marche et le Limousin.
32A l’ouest, cette suite de plateaux s’étend jusqu’au mont Gargan et ne dépasse la limite de la Montagne que de 20 km au plus. Les hauts plateaux corréziens, au sud‑est, constituent une autre zone importante qui s’étend jusqu’à la vallée de la Dordogne.
33Au sud de la vallée de la Dordogne, la Xaintrie (les cantons de Mercœur et de St‑Privat) est normalement rattachée au Cantal avoisinant, spécifiquement à la Châtaigneraie cantalienne. Une activité volcanique a affecté un nombre limité de cantons dans la région (par exemple, Rilhac‑Xaintrie et St‑Julien‑aux‑Bois), annonçant ainsi la géologie de l’Auvergne.
34Les plateaux bocagers et boisés de la haute Corrèze, qui s’étendent vers l’ouest jusqu’à une faille majeure à Argentat, sont divisés par les affluents de la rive droite de la Dordogne en quatre ou cinq blocs distincts. Ces affluents, qui coulent dans des vallées étroites et profondes parfois de 200 m (Adenis 1967), découpent dans les plateaux des sites faciles à défendre, Comme presque partout dans cette zone de plateaux, la haute Corrèze est dans l’ensemble assez vallonnée et manque de collines élevées.
2.2.5.3 Les plateaux bas
35Les grands plateaux du Limousin forment une large bande entourant, au nord et à l’ouest, ceux dont on vient de parler ; en général, ils se trouvent à moins de 500 m, même s’ils sont entrecoupés de zones limitées de terres plus élevées, comme autour de Toulx‑Ste‑Croix dans la Creuse et des monts Chalus dans la Haute‑Vienne occidentale. Ici aussi, les paysages bocagers prédominent et les plateaux sont déchiquetés par des vallées à pentes raides même si d’autres vallées sont plus larges, surtout vers la basse Marche. Bien que la plus grande partie de cette zone soit relativement basse, il n’y a pas beaucoup d’agriculture et les densités de population, même aujourd’hui, peuvent être extrêmement faibles (11 habitants/km2 sur la commune d’Azat‑le‑Riz, par exemple). Certains secteurs de cette zone sont « montagnards » dans le sens qu’on donne à ce mot en Limousin : un pays marqué par de nombreuses landes et friches avec des pentes relativement raides qui empêchent le développement de l’agriculture, comme, par exemple, autour de Jabreilles (Lacotte 1967). Des toponymes basés sur Gast/Gat/Gâtine indiquent souvent une terre inculte ou un lieu inhabité : Les Gâtines de Blond, par exemple (Perrier 1966). Le secteur septentrional, autour de Guéret et de Bellac, a encore connu la famine à la fin du xviiie et au début du xixe s. (Dutheil 1938).
36Dans cette région, les pâturages se situent traditionnellement dans les vallées et les cultures sur les sommets arrondis et les pentes les moins raides (Valadeau 1894). La couche arable est en général peu épaisse et même dans les secteurs à basse altitude, comme la plaine de Gouzon, où on trouve par endroits des marnes calcaires tertiaires (Mallard 1857), l’agriculture n’en bénéficie pas nécessairement (Durandeau 1958).
37Au nord, la transition entre le bas Berry et la Marche n’est marquée que par un changement progressif près de la courbe des 200 m (Roussillat 1942). On peut suivre cette zone intermédiaire vers le sud jusqu’à la vallée de la Petite‑Creuse afin d’inclure le Dunois (le pays de Dun‑le‑Palestel) et la région autour de Boussac (Robert 1959). Boussac fut à une époque une forteresse du duché de Berry. Ici aussi, nous sommes dans une zone où prédominent les bocages ; un autre changement progressif marque la transition vers le Confolentais à l’ouest. La zone n’est pas uniforme, cependant, et les plateaux inférieurs de la Corrèze serviront d’exemple. Ce secteur, avec des grès et des calcaires (Mouret 1896), est plus hétérogène, géologiquement parlant, que le nord et l’ouest, mais, même dans les parties schisteuses, il y a des zones où la terne a été enrichie par la désintégration d’amphibolites comme, par exemple, le Vendonnois. La vallée de la Tourmente, entre les grès et le promontoire calcaire du Causse corrézien, est fertile et riche car le sous‑sol est du lias. Dans les secteurs à grès, les produits de l’érosion peuvent contribuer à la formation de terres fertiles au fond des vallées.
2.2.5.4 Le Causse corrézien et le bassin de Brive
38La zone de transition dont nous venons de parler, particulièrement favorisée (Deffontaines 1933), est caractérisée par une abondance d’eau et des terres fertiles. Située à l’extrême sud‑ouest du Limousin, elle offre un contraste total avec les autres parties. Appartenant au bassin d’Aquitaine et avec un sous‑sol calcaire, elle consiste en des terres basses parsemées de quelques buttes‑témoins. On peut la comparer avec des régions avoisinantes comme le Périgord. Le bassin de Brive offre donc un contact avec le sud‑ouest de la France. Avec le Causse corrézien, c’est le secteur à la plus basse moyenne annuelle pluviométrique du Limousin et des toponymes comme « Les Varennes » témoignent souvent de la valeur agricole de ces terres pour la culture des céréales (Perrier 1966). Ces terres sont les seules en Limousin qui proviennent des dépôts secondaires (Durandeau 1958).
39Il y a des affleurements calcaires importants dans la partie sud du secteur, autour de St‑Cernin, Lissac et Meyssac, et plus limités dans l’arrondissement de Brive, plus au nord, autour d’Yssandon, Ayen et St‑Robert (Forot 1908). Il n’est peut‑être pas surprenant que cette enclave, de basse altitude par rapport au Massif central en général, donne un matériel préhistorique plus abondant que celui d’autres secteurs (Couchard 1974).
2.2.6 Les changements agricoles, le paysage actuel et les travaux sur le terrain
40Partout en Limousin, le paysage consiste en une mosaïque de bois, de friches, de pâturages et de terres arables, une mosaïque qui varie avec l’altitude et la nature du sol. Le paysage limousin est fortement marqué par le pourcentage élevé de parcelles boisées. Des chênes, des chênes sessiles, des hêtres et des châtaigniers prédominent. Ce dernier est fréquent jusqu’à 600 m environ, mais son importance a beaucoup baissé pendant les deux derniers siècles. On a arraché des châtaigneraies depuis le xixe s. pour faire place à des terres arables (Valadeau 1894). Le bouleau (Belula pendilla) se trouve également dans les bois, mais il est quantitativement plus important à des altitudes plus élevées. Une grande partie des bois, cependant, consiste actuellement en plantations de résineux. Un reboisement de ce type est en cours depuis le xixe s. (tabl. III), mais il a progressé surtout depuis la fin de la dernière guerre essentiellement aux dépens des landes (fig. 3), bien que ce type de paysage soit encore très fréquent en altitude. Même si l’évidence pollinique et les sources littéraires (par exemple, l’abbé Soudanas 1792, cité par Valadeau 1894) témoignent de la surexploitation chronique des bois pour le chauffage et la construction, on a quand même l’impression aujourd’hui d’un paysage fortement boisé. Il faut admettre qu’il y a de fortes chances pour que des sites archéologiques, même ceux qui conservent un fort relief, échappent à la détection.

TABL. III – Changements dans l’occupation du sol dans le canton d’Egletons, Corrèze, en pourcentage
d’après Perpillou 1940
41Les riches pâturages du Limousin sont reconnus comme zone d’élevage de premier choix. Les bovins forment maintenant l’élément dominant du cheptel et leur exportation est attestée depuis au moins le xve s. Par contre, et parallèlement au défrichement, le nombre de moutons a baissé radicalement d’environ 2 000 000 en 1888 à moins de 500 000 en 1933 ; il en résulte que les landes limousines n’ont pas été modifiées par la pâture ovine. Etant donné que les sites à faible relief sont facilement repérables dans les secteurs de pâturage intensif, on peut penser que cette région en recèle encore un nombre important qui seront découverts dans les années à venir. L’autre élément nécessaire pour l’élevage –des pâturages permanents– peut être, lui aussi, un facteur qui contribue au nombre peu élevé de sites non fortifiés actuellement connus, car ces sites sont essentiellement identifiables par le matériel ramené en surface par les travaux agricoles.
42Heureusement, le Limousin fut une des régions étudiées en détail pendant l’âge d’or de la géographie régionale en France et l’étude de Perpillou fournit en abondance des données cartographiques qui peuvent être juxtaposées aux données archéologiques (Perpillou 1940). Ses cartes font ressortir le fait que le paysage agricole avait commencé à changer avant la dernière guerre (Perpillou 1940 : pl. I, II). L’autre élément important dans ces changements a été le remembrement. L’existence de nombreux sites conservés en élévation en Limousin, comme ailleurs en France, peut être attribuée à leur insertion dans le parcellaire cadastral. En fait, il n’est pas rare de voir même les sites de 1 ha subdivisés, comme à Prassaud près du grand oppidum de Villejoubert à St‑Denis‑des‑Murs (Haute‑Vienne). Rares sont les levées de terre qui ne soient couvertes de bois ou de haies épaisses et quasiment impénétrables, d’où l’intérêt d’une étude des plans cadastraux. Le meilleur exemple reste peut‑être l’étude de J. Soyer sur l’existence de parcelles circulaires (Soyer 1970). Mais l’évolution dans le temps de certaines de ces parcelles, surtout dans les zones cultivées, amène la création de surcreusements au pied des haies placées dans les pentes qui ont pu faire surévaluer la hauteur de certains remparts.
43Le remembrement est actuellement moins menaçant pour les sites archéologiques en Limousin que dans d’autres régions de France. Sur une grande échelle, il est limité aux meilleures terres et il semble que la consolidation des parcelles affecte surtout les petits enclos.
2.2.7 Conclusion
44Pour conclure cette partie, il faut insister sur les points suivants qu’on peut rapprocher des inventaires départementaux et de la discussion fondée sur leur analyse.
45Les paysages limousins, l’histoire de leur utilisation et le dépeuplement rural laissent prévoir la conservation d’un plus grand nombre de sites inconnus que dans les régions plus au nord. Les inventaires de ce travail comprennent des sites que nous ne pouvons pas localiser avec assez de précision pour les évaluer à cause des contraintes de temps et de disponibilité. Il vaut mieux, cependant, les inclure plutôt que de présenter une série plus restreinte de sites « confirmés », afin de ne pas restreindre la discussion sans donner une idée du caractère incomplet de la base de données.
46Néanmoins, d’après l’expérience de Buchsenschutz et de ses collaborateurs dans leur examen des sites du Cher (Buchsenschutz 1979) et en la complétant par le corpus du Limousin présenté dans ma thèse et d’autres travaux, les conclusions suivantes semblent être relativement sûres. Le nombre de « nouveaux » ouvrages découverts en surface est dépassé, et de loin, par les ouvrages nettement médiévaux –même si cette division est ici moins évidente que dans le Berry, par exemple. Jusqu’ici, j’ai l’impression – et ce n’est qu’une impression– que les enceintes protohistoriques signalées par des indices phytologiques sont relativement rares en France et manquent totalement en Limousin où l’archéologie aérienne en est encore à ses débuts. Vu l’expérience britannique, il est possible que certaines des « fermes indigènes » signalées par Agache dans la Somme (Agache 1981) aient une fonction plus défensive que cette désignation ne le laisse supposer, mais elles aussi manquent dans le Limousin. Nous suggérons que, parmi les sites fortifiés protohistoriques, c’est dans les plus petits qu’on peut faire le plus grand nombre de découvertes (cf. le chapitre sur les Viereckschanzen). Par contre, c’est à J.‑P. Guillaumet que je dois l’idée que les grands sites, relativement peu fortifiés et dont la surface dépasse les hypothèses des prospecteurs aériens, sont sous‑représentés. Même si j’accepte, dans l’ensemble, la validité de cette hypothèse, je pense que les paysages bigarrés du Limousin sont susceptibles de révéler ce type de site potentiel non par la photographie aérienne mais plutôt par les prospections sur le terrain. Il est évident que les sites non fortifiés sont sous‑représentés, mais je ne pense pas que le Limousin fournisse autant de ces sites dans les années à venir que les régions plus favorisées du Massif central, surtout la Limagne et le Forez, car ces dernières sont mieux définies géographiquement et plus délimitées dans l’espace. En outre, elles ont bénéficié d’une tradition de recherches sur le terrain plus longue et plus poussée.
2.3 Types de sites non pris en considération
47En se fondant sur l’enregistrement des artéfacts disponibles au moment de la rédaction de la thèse qui est à l’origine de cette étude, deux catégories de sites, qui dataient potentiellement de l’âge du Fer, n’ont pas été étudiées : les souterrains et les cases/cabanons. Il est possible que certains de ces derniers – et des éléments des systèmes agraires auxquels ils sont quelquefois associés – se révèlent protohistoriques lors de la fouille.
2.3.1 Souterrains
48Dans d’autres régions de France, particulièrement en Bretagne, ce type de site existait pendant l’âge du Fer. Il est souvent tacitement admis que certains souterrains du Limousin pourraient dater de cette époque (par exemple, Lecler 1894a) par référence aux auteurs de l’Antiquité qui auraient évoqué ce type de construction, et parce qu’ils se trouvent à proximité d’autres sites de l’âge du Fer. Bombal, par exemple, en a étudié plusieurs près du Puy du Tour à Monceaux (Bombal 1904, 1911a).
49En Limousin, cependant, la plupart sont creusés dans un granit pourri, ce qui les différencie de la série bretonne. Leur plan est également beaucoup plus complexe que la norme protohistorique habituelle (Lombard 1977a ; Gady 1973, comm. pers. ; Gady 1989). Les débris de matériel associés sont normalement médiévaux ou même plus récents – une datation au 14C de 780 ± 90 BP est donnée pour un échantillon de St‑Pardoux‑le‑Neuf, Corrèze (Lombard 1968a).
2.3.2 Cases et cabanons
50Des structures en pierre sèche, souvent groupées en ce qu’on a appelé des » agglomérations anhistoriques » (Guébhard 1919), sont fréquentes dans le Massif central et les zones montagneuses du Midi. D’après Barruol, la majorité de la série provençale a été construite entre 1700 et 1850 (Barruol 1966). La forme varie beaucoup et certaines d’entre elles montrent des signes d’une couverture en encorbellement. Dans le Sud‑Est, la fourchette chronologique pour ces structures est large car on connaît des exemples néolithiques, notamment à Fontbouisse.
51L’architecture de celles du Massif central semble moins complexe et, si beaucoup peuvent être attribuées à une époque récente et être mises en relation avec une agriculture transhumante, certaines –comme à Chastel‑sur‑Murat, dans le Cantal– peuvent être protohistoriques.
2.4 La protohistoire tardive en Limousin : le mobilier
2.4.1 Introduction
52Au départ, celte étude ne concernait pas le mobilier (ni les monuments funéraires qui en ont fourni une grande partie), mais il semble opportun de présenter un résumé des données sur lesquelles les habitats (et le matériel qu’on y a trouvé) peuvent être jugés. Bien qu’on ait affirmé que les sites funéraires – en termes de localisation et de distribution des tumulus ‑ offrent une indication générale des zones habitées (Couchard 1968 : 14) et qu’on ait démontré cette corrélation pour des tumulus pris individuellement ‑ à Augères dans la Creuse, par exemple, où la terre du tumulus contenait beaucoup de tessons (Léger 1977) – je n’ai pas essayé de faire une étude systématique de ce type de monuments même en termes de répartition. Lintz a publié une carte pour la Corrèze (Lintz 1979a). Il est certain, cependant, d’après les revues locales, que des découvertes de tumulus ont encore lieu (par exemple, Lintz 1970) et qu’ils ne sont pas exclusivement protohistoriques. On a souvent parlé de la richesse apparente du Limousin en zones métallifères en la mettant en parallèle avec les objets des âges des métaux et leur répartition. Même si les opérations minières ont pu commencer vers la fin de la préhistoire dans certaines zones, les preuves certaines d’une exploitation avant l’époque gallo‑romaine manquent.
2.4.2 Le mobilier
53Une grande partie de ce mobilier a été découverte au cours des fouilles du xixe s. Depuis la fin des années 1950, on a constaté une augmentation du nombre de fouilles, même si elles ont concerné –du moins jusqu’aux années 1980– les monuments funéraires plutôt que des habitats. Toutefois, la plus grande partie du mobilier consiste en trouvailles isolées plus ou moins associées à des sites connus. En ce qui concerne les influences externes au cours de la protohistoire, le Limousin montre des indices de contacts avec des régions de l’est du Massif central (jusqu’au Rhin dans l’est de la France), avec l’Ouest et surtout le Sud‑Ouest et l’Aquitaine (et même jusqu’en Ibérie) et avec le littoral méditerranéen français. Il est possible que les ressources métallifères aient contribué à ces divers contacts.
54L’étude de Daugas montre clairement que le Bronze final en Limousin est mal connu (Daugas 1976a), à la différence du Bronze moyen qui semble être une période riche et innovatrice, surtout peut‑être en ce qui concerne la Creuse (Janicaud 1944 : Delage 1949). Dans le sud de la Corrèze, quelques tessons de céramiques à légères cannelures sont connus aux Allées à Noailles, mais dans l’ensemble les céramiques des Champs d’Urnes semblent rares. Millotte a pensé que les contacts externes primaires pendant le Bronze moyen et final avaient une origine atlantique (Millotte 1963b) – par exemple, des haches en bronze à douille rectangulaire et le moule d’un marteau à douille provenant de La Roche‑l’Abeille, Haute‑Vienne (Gomez 1979).
55La transition vers l’âge du Fer précoce est, elle aussi, difficile à reconnaître en Limousin sous la forme d’une phase attribuée au Hallstatt ancien. Même si Mohen les a vigoureusement critiquées (Mohen 1980) et même si elles ne sont pas très appropriées, j’ai retenu les dénominations traditionnelles de Hallstatt et La Tène pour l’âge du Fer car, le plus souvent, ce sont elles que la littérature emploie. On a évoqué l’apparition d’une nouvelle aristocratie, avec des épées en fer, dans d’autres secteurs du Massif central vers 650‑625 av. J.‑C., en se fondant sur les monuments funéraires. Le contact avec ces groupes aurait pu être à l’origine de ce que Sandars a appelé le « Groupe des Garrigues » (Sandars 1957) ; on trouve déjà des céramiques graphitées. Ces groupes se sont avancés jusqu’en Roussillon mais, en ce qui concerne le Massif central, et en s’appuyant sur divers éléments culturels, on a suggéré que les liens avec l’Est et avec l’Allemagne du sud s’étaient maintenus (Daugas 1976c : 735). Dans le Limousin, ce groupe n’apparaît que sur le Causse corrézien, par exemple dans le monument mégalithique réemployé de la Route‑Vieille à Noailles en Corrèze (Couchard 1963). D’autres sépultures sont moins faciles à dater à cause de la pauvreté du matériel. Le tumulus du Pech‑Pialat à Noailles est un exemple pertinent (Couchard 1962, 1974). Plus à l’est dans le Massif central, ont été repérés des sites non fortifiés de cette époque, par exemple Brezet III à Clermont‑Ferrand dans le Puy‑de‑Dôme (Daugas 1976c). Il semble que les éperons barrés existaient dès le début de l’âge du Fer, du moins dans la haute Auvergne. Dans la Creuse et la Haute‑Vienne, une continuation des caractéristiques du Bronze final semble probable.
56Le Hallstatt moyen est relativement mal connu en Limousin, même si certains tumulus –plus substantiels que ceux de la phase précédente car ils ont jusqu’à 20 m de diamètre et 2 m de hauteur– semblent dater de cette époque. Parmi ceux de St‑Ybard, en Corrèze (Brugère 1890), au moins un présente les mêmes caractéristiques architecturales internes que d’autres tumulus du Massif central, par exemple celui de St‑Simon (Cantal) (Delporte 1966).
57Il semblerait que cette époque soit caractérisée par des sépultures avec des bracelets multiples (Millotte 1963b : 682 ; Lambert 1974). Faux‑la‑Montagne a livré une soixantaine environ de ces bracelets, groupés en trois séries (Abzac 1894). Bien que les objets de cette époque soient peu nombreux, on en a trouvé sur des sites de hauteur ; Faux‑la‑Montagne, par exemple, se trouve à 750 m. En Auvergne aussi, le mobilier, bien que peu abondant, indique une occupation des sites en altitude – à Jœuvres par exemple et peut‑être à Corent (Daugas 1976c).
58Les influences extérieures sont dominées par des ressemblances avec les régions plus à l’est et au nord‑est, bien que Lambert ait identifié un objet au moins pour lequel on trouve un exemple directement comparable pendant la troisième période du premier âge du Fer languedocien. Actuellement, on ne peut pas séparer le Hallstatt moyen de l’époque suivante, et il est possible qu’il existe un chevauchement chronologique important avec le développement du Hallstatt final.
59Même si on lui donne d’habitude une durée d’environ un siècle autour de 500 av. J.‑C., il existe des indications d’après lesquelles cette période se serait prolongée plus longtemps clans le Massif central occidental et, plus spécifiquement, en Limousin. En effet, étant donné qu’il n’existe que peu d’éléments attribuables aux débuts de La Tène, il est difficile de préciser une date terminale pour le Hallstatt final qui, quantitativement, est mieux représenté que les phases précédentes.
60Grâce au travail des fouilleurs de la fin du xixe s., les sépultures sont les éléments les mieux connus (Masfrand 1893, 1904, 1910 ; Vazeilles 1936a). Ce matériel a généré une littérature importante ces dernières années (Lambert 1974 ; Boisseau 1975 ; Léger 1975 ; Daugas 1976b ; Chevillot 1976b ; Lambert 1980 ; Routière 1981 ; Lintz 1981a) qui inclut les résultats des fouilles de Glandon (Haute‑Vienne), Augères et St‑Pierre‑de‑Fursac (Creuse), et St‑Priest‑de‑Gimel (Corrèze). L’élément prédominant est une céramique graphitée trouvée dans des tombes du Limousin (en Haute‑Vienne, au sud de Limoges ; dans la Creuse orientale ; en Corrèze ; dans le nord‑est du Lot) et les régions avoisinantes, même si dans ces derniers cas cette céramique n’est pas l’élément prédominant de l’ensemble. A plusieurs reprises, on a reconnu un tesson de cette poterie dans l’arrière‑pays méditerranéen ; le site le plus au sud se trouve au Cayla‑de‑Mailhac (Lambert 1980 ; 102, carte). Dans le Limousin même, deux habitats –Crozant (Creuse) et Chalucet (Haute‑Vienne)– ont fourni des céramiques de ce type, dans le deuxième cas associée à une poterie du Bronze final IIIb. On la connaît également plus au nord, par exemple au Camp Allaric, à Aslonnes (Vienne). On a proposé une fourchette de datation absolue (entre le viiie et le ve s. av. J.‑C.) pour ce type de vase, avec une évolution typologique interne (Lambert 1980). On peut attribuer la grande majorité des tessons trouvés en Limousin à la fin de cette fourchette.
61Le rite funéraire habituel semble avoir été l’incinération. On trouve des tumulus semblables par leurs dimensions à ceux du Hallstatt moyen et, pendant cette période, ils sont souvent groupés par cinq à dix en cimetière. On peut citer comme exemples St‑Mathieu et Glandon ; sur ce dernier site, il y en avait au moins neuf, et peut‑être quatorze. Certains cimetières se trouvent dans des régions métallifères ; de nouveau, on peut citer Glandon (Boisseau 1975). Dans certains tumulus, fouillés pendant ces dernières années, on a reconnu une structure interne en pierre ; la plus élaborée se trouve au Puy de Lafont en Corrèze, mais il semble qu’il s’agisse d’une inhumation (Lintz 1981a). Il est possible que certains tumulus limousins aient renfermé un cercueil en bois, car on signale souvent des clous en bronze ou en fer. Une différenciation sociale est perceptible dans le mobilier et dans l’opposition entre les tumulus et les incinérations en pleine terre (Lambert 1974 : 56‑57, table). Ces dernières signalées dans l’Allier et dans la Flaute‑Vienne, près de Chalucet, sont probablement plus largement répandues. Le site de Merlines, Corrèze, est peut‑être plus ancien (Lombard 1968b). Parmi les formes de la céramique graphitée, une minorité, les vases à pied, trouve facilement un parallèle dans le Sud et l’Ouest, surtout en Aquitaine (Lambert 1974 : 53 ; Mohen 1980 : surtout la période IV). Il existe des formes non décorées contemporaines (par exemple, les bols de St‑Mathieu ; cf. Roulière 1981 : fig. 4 ; Daugas 1976b ; Boisseau 1975 : fig. 18) qu’on retrouve dans les poteries grossières faites à la main, attribuées auparavant au « Hallstatt prolongé » (par exemple, Vazeilles 1962 : 33).
62Il n’y a pas de poterie grecque en Limousin, alors que des tessons ioniens ont été trouvés à Jœuvres (Loire) et des tessons attiques à Bègues (Allier). Il semble que les principaux contacts externes furent établis avec le Sud‑Ouest plutôt qu’avec la côte méditerranéenne.
63L’inventaire métallique montre le remplacement bien connu d’épées en fer par des poignards et des couteaux. Des plaques de fer couvertes de tôles en bronze, trouvées dans le tumulus de Cornoloubo à Beaune (Haute‑Vienne), ont été interprétées comme étant des morceaux d’une cuirasse (Daugas 1976c d’après Ardant 1857) ou comme ceux d’un harnachement ou d’un char (Chevillot 1976c : 281, fig. 4). Autrement les harnachements sont très rares.
64Parmi les bijoux, les fibules sont les plus caractéristiques ; normalement en fer, on en connaît quelques‑unes en bronze : dans le tumulus IX à Glandon, Haute‑Vienne, par exemple. Les deux variétés dominantes ont un ressort interne et transversal, un arc arrondi, un long porte‑ardillon et un pied élaboré à bouton ou à cabochon. On a également trouvé des bagues en bronze, un bassin en bronze à St‑Mathieu (tumulus D), aujourd’hui perdu (Roulière 1981), et des aiguisoirs (Gomez 1976). On a également signalé une série de bracelets en schiste ou jais avec un décor géométrique ; il est possible que le décor ait été ajouté à Chalucet sur des importations provenant de l’Allier. Ces bracelets ont été trouvés soit dans les sépultures, par exemple dans le tumulus du Puy de Lafont à St‑Priest‑de‑Gimel en Corrèze (Lintz 1981a) et à Isle en Haute‑Vienne, soit sur des habitats comme le Puy de Gaudy (Creuse) ou Aslonnes (Vienne).
65Le Limousin semble avoir été ouvert aux influences provenant du sud et de l’ouest, d’Aquitaine et même d’Espagne. Lambert et Mohen en ont identifié de nombreuses manifestations (Lambert 1974 ; Mohen 1980), par exemple des agrafes de ceinture comme à Nexon en Haute‑Vienne (Daugas 1976b : fig. 7) et des céramiques à piédestal. On peut ajouter la fibule zoomorphe en bronze de Chalucet, à St‑Jean‑Ligoure (Haute‑Vienne) et la fibule pyrénéenne de St‑Mathieu (Roulière 1981 : fig. 5). Les habitats de hauteur sont plus fréquents qu’avant, et on a postulé une première phase défensive sur divers sites du Puy‑de‑Dôme (Daugas 1976c). Le premier objet datable et rattaché de façon certaine à un site fortifié en Limousin (Aubusson dans la Creuse) peut être attribué à la fin de cette période.
66En résumé, le premier âge du Fer en Limousin se manifeste par l’apparition d’un groupe de haut statut social, caractérisé principalement par le mobilier funéraire. Il est possible que sa richesse ait été fondée sur l’exploitation de ressources métallifères, bien que les objets en or manquent dans cet inventaire, sauf peut‑être dans un tumulus à Troche en Corrèze (Mohen 1980 : 264). Il semble certain que des relations existaient avec l’Est (suggérées par un cygne en bronze sans provenance, mais d’origine locale, au musée de Guéret [Pautreau 1978b : 3‑7]) et avec le Sud‑Ouest.
67Du mobilier de La Tène a été trouvé en Limousin avec des objets du Hallstatt final : une épingle à tête perforée et une fibule à arc nervuré, par exemple, dans le tumulus IX à Glandon (Boisseau 1975 : fig. 18, 49), ce qui suggère que la culture hallstattienne s’est prolongée après la date finale théorique du milieu du ve s. av. J.‑C. ; ceci rappelle la situation observée dans le Bassin parisien (Freidin 1982) et le Berry (Willaume 1985). A part cela, le mobilier de La Tène ancienne est mal représenté en Limousin. Mises à part les fibules de Crozant (Creuse) et d’Aubusson, les objets les plus significatifs accompagnaient des inhumations secondaires dans des troncs d’arbres dans le tumulus datant du Bronze final/âge du Fer ancien de St‑Ybard, Corrèze. Il s’agit de deux bracelets de bronze au décor moulé et d’un fragment de torque en bronze : une extrémité, décorée d’un tampon, existe (Brugère 1890 ; Bouyssonie 1954, 1955 : 139‑141). La Tène II, également, semble peu représentée en Limousin. Une continuité d’occupation pendant l’époque de La Tène est signalée sur quelques sites fortifiés en Limousin –à Crozant, Creuse, et au Puy du Tour, Corrèze (Daugas 1976c)– mais en dehors de cela, les trouvailles attribuables à cette époque semblent être des monnaies copiées sur le statère en or du type de Philippe de Macédoine, trouvé à St‑Silvain, Montaigut‑le‑Blanc, Creuse (Daugas 1976c) comme à Limoges (Allen 1980 : no 168).
68Une petite applique en bronze en forme de tête, trouvée à Vicq (Haute‑Vienne), pourrait elle aussi dater de La Tène II (Perrier 1964 ; Delage 1936). La phase finale de La Tène, La Tène III, est la mieux connue en Limousin. Les sépultures ne sont pas fréquentes, mais du matériel a été récolté sur les sites d’habitats et sera examiné avec eux. On rencontre encore de grandes difficultés pour classer les séries de poteries grossières, comme celles, par exemple, du Puy du Tour décrites par Hatt (Hatt 1943a, 1945), et pour différencier les ensembles exclusivement de La Tène III de ceux qui contiennent des éléments de l’époque gallo‑romaine précoce et sont postérieurs à la Conquête.
69A ce jour, seule une série de monnaies a été considérée comme un phénomène territorial spécifique des Lémovices et ce sont elles que nous allons maintenant étudier.
2.4.3 Les monnaies du Limousin et le système monétaire des Lémovices
2.4.3.1 Introduction
70Nash a dit que les monnaies des Lémovices étaient « relativement bien connues » (Nash 1978a : 271), mais l’attribution à ce groupe des deux séries étudiées ci‑dessous pose quelques problèmes. L’explication donnée par Nash ‑ la perturbation dans les répartitions créée par le plateau de Millevaches (Nash 1978a : 280) ‑ est difficilement acceptable vu les altitudes plus élevées où elles sont trouvées ailleurs dans le Massif central ; et il semble que cet auteur soit revenu sur cette théorie (Nash 1981 : 16, note).
71Le meilleur prétendant au titre de monnaie des Lémovices est le groupe en argent à la tête coupée, bien que, comme le signale Nash, le fait que pour cette monnaie soit utilisé le standard du quinarius (environ 1,90 g) a probablement contribué à sa large diffusion (Colbert de Beaulieu 1955 : carte ; Nash 1981: 16, note, 1978a : 280, lieux de découverte). L’attribution par Nash de ces monnaies à « une partie des Lémovices » est donc surprenante (Nash 1978a : 280). Colbert de Beaulieu a accepté plus facilement l’attribution aux Lémovices dans leur ensemble (Colbert de Beaulieu 1978). Les deux séries étaient en circulation avant 52 av. J.‑C., en admettant la date généralement reconnue pour les dépôts d’Alésia (Colbert de Beaulieu 1955).
72Les contextes pour ces monnaies en Limousin incluent les habitats et habitats potentiels suivants :
– Margerides (Corrèze) ;
– Puy Chalard, Yssandon (Corrèze) ;
– Puy de Gaudy, Ste‑Feyre (Creuse).
73En 1978, sur la question de l’attribution aux Lémovices des monnaies en or, Colbert de Beaulieu et Nash émettaient des avis légèrement différents. Colbert de Beaulieu opposait la richesse en minerais aurifères du Limousin au fait qu’il n’est pas certain que les Lémovices aient frappé des monnaies en or, malgré les certitudes des auteurs du début du siècle (Colbert de Beaulieu 1978 : 151). Les raisons qui avaient poussé Nash à proposer l’attribution aux Lémoviœs de la série en or grue‑et‑trèfle (des affinités de structure avec des statères armoricains et pictons et une façon de graver les poinçons qui ressemble à celle de la série à tête coupée) n’étaient pas suffisantes pour suggérer une attribution autre que problématique. L’évolution interne de la série est également incertaine même si quelques types, y compris deux trouvés dans le trésor de Marcillat, circulaient au moment de la Conquête. Nash a suggéré que la série à la teneur la plus faible (type 4), la plus fréquemment trouvée dans les habitats, est la plus récente (Nash 1978a : 280). Ses propres données, cependant, ne permettent pas de généraliser cette hypothèse (Nash 1978a : 284‑285). Les contextes en Limousin incluent
– Puy du Tour, Monceaux‑sur‑Dordogne (Corrèze) : type 4 ;
– Puy Chalard, Yssandon (Corrèze) : type 4.
74Aucun fabricat associé à la fabrication de monnaies n’est signalé dans les trois départements du Limousin et il vaut mieux considérer que le début de la frappe de monnaies dans cette civitas n’est pas daté. La plupart du matériel associé à un contexte sûr, soit dans un trésor soit dans un habitat, suggère une date très peu éloignée de la Conquête. Des indications d’une utilisation antérieure de monnaies en Limousin se trouvent dans les trésors et parmi les trouvailles isolées. En ce qui concerne les monnaies en argent, tout lien entre le trésor de Bridiers et un site éventuel datant d’avant la Conquête reste à prouver, et il semble qu’aucune monnaie de cette série, avec ses développements postérieurs, n’ait été trouvée sur le site d’un habitat en Limousin. Les monnaies en or offrent, peut‑être, un peu plus de possibilités. La série commence avec le véritable statère macédonien de Montaigut‑le‑Blanc (St‑Silvain‑Montaigut, Creuse), et il semble que des copies de la première et de la deuxième génération soient représentées dans la région. Il est possible que ces monnaies en or du iie s. av. J.‑C. indiquent des liens avec des habitats potentiels comme à St‑Priest‑de‑Gimel (Corrèze) et Limoges (Haute‑Vienne).
2.4.3.2 Les monnaies méditarréennes
75Des monnaies méditerranéennes datant d’avant la Conquête, ou juste postérieures, ont été trouvées dans les habitats confirmés ou potentiels suivants :
– Les Angles (Corrèze) : celtibère, néo‑punique ;
– Monceaux‑sur‑Dordogne (Corrèze) : Narbonne ;
– Yssandon (Corrèze) : drachme massaliote tardive ;
– La Souterraine (Creuse) : denarii républicains ;
– Limoges (Haute‑Vienne) : aureus de 43 av. J.‑C. ;
– St‑Nicolas‑Courbefy (Haute‑Vienne) : bronze d’Ampurias.
76Si on élargit cette liste afin d’inclure des as de Nîmes, on peut y ajouter :
– Margerides (Corrèze) ;
– Naves (Corrèze) ;
– St‑Goussaud (Creuse) ;
– Toulx‑Ste‑Croix (Creuse).
77L’inventaire présenté en annexe à ce chapitre inclut toutes les monnaies avec une provenance limousine que nous connaissons. Deux habitats ‑ le Puy du Tour et Yssandon, tous les deux dans le sud de la Corrèze – se signalent par le fait qu’ils ont fourni tous deux plusieurs monnaies. Il faut reconnaître que les résultats sont fortement biaisés par le manque de fouilles, mais on peut noter le manque de monnaies sur des sites labourés (par exemple St‑Gence et Villejoubert à St‑Denis‑des‑Murs) et qui ont été publiés. De plus il semble qu’actuellement aucune monnaie ne soit connue sur les sites qu’on a tenté d’identifier comme des habitats ouverts de La Tène III.
2.4.4 Conclusion
78En conclusion, il faut mettre en rapport le matériel dont nous avons parlé ici avec les principaux événements rapportés par les textes historiques et particulièrement avec ceux‑ci : le développement de ce qu’on appelle l’hégémonie arveme dans le centre de la France avant 121 av. J.‑C., et la rupture provoquée par la conquête de César au milieu du ier s. avant notre ère.
79En laissant de côté les données numismatiques, nous trouvons peu d’éléments dans les données archéologiques pour suggérer un développement de la richesse du Limousin comme satellite de ses voisins orientaux à La Tène moyenne. Les données de La Tène III montrent clairement un changement à partir de la fin du iie s. av. J.‑C., mais les effets de la Conquête dans cette région, périphérique à la fois par rapport aux événements militaires et peut‑être aussi par rapport au premier impact de la romanisation, ne devraient pas avoir laissé de traces bien marquées dans les données archéologiques. Evidemment, cette vision pourrait être totalement modifiée par des fouilles futures. Mais dans l’état actuel de notre information, la période protohistorique du Limousin la mieux cernée semble être un faciès régional du Hallstatt tardif, caractérisé plus particulièrement par la céramique graphitée.
Annexe 1. Les monnaies du Limousin : un premier inventaire

FIG. 4 – Le Limousin : carte des trouvailles de monnaies gauloises ou importées réparties par communes.
80009 — LES ANGLES‑SUR‑CORRÈZE, Puy de Merle
Site?
– Monnaie néo‑punique en argent de Juba Ier, roi de Numidie (60‑46 av. J.‑C.).
– Monnaie celtibère (Deloche 1884 : 13 ; Lintz 1981b : n° 85).
8119 028 – BORT‑LES‑ORGUES, sans indication précise
Trouvaille isolée.
– Bronze celtibère de Osca en Aragon : comparable aux monnaies romaines de 53‑40 av. J.‑C. (Deloche 1884 : 16 ; Lintz 1981b : no 161).
8219 128 – MARGERIDES, Les Pièces Grandes
Site.
– 16 monnaies en argent, datées par association de la deuxième moitié du ier s. av. J.‑C.
– 2 x BN 4561 (Colbert de Beaulieu 1955 : série A).
– 5 x BN 4566 (Colbert de Beaulieu 1955 : série A, variété C) avec des fractions (Colbert de Beaulieu 1973 : 301, note 573) ; on trouve des poids plus bas dans les dépôts d’Alésia ; attribuées aux Lémovices.
– 1 x BN 4091 (on trouve les mêmes à Jalesches, Creuse), attribuée aux Lémovices ou aux Pictons.
– 3 + 2 incertaines x BN 4365, attribuées aux Cadurques.
– 1 x variante tardive d’une monnaie à la croix qu’on a trouvée également dans le trésor de Cuzances, Lot.
– 1 x type inconnu.
– 1 as de Nîmes, postérieur à 2 av. J.‑C. (Mitard 1979 : 45‑48).
8319 140 – MONCEAUX‑SUR‑DORDOGNE, Puy du Tour
Site.
Dans les fouilles, stratigraphie incertaine dans l’ensemble.
– 3 (au moins) x bronzes des MOTVIDIACA : arvernes (Blanchet 1910).
– 1 x bronze grue‑et‑trèfle (Nash 1978a : 285, type 4).
– 1 x potin Q DOCI : Séquanes (Nash 1978a : 276).
– 1 x potin imitation du type massaliote au taureau cornupète (Colbert de Beaulieu 1973 : 321).
– 1 x bronze des NERONCEN avec inscription ibérique (Murat 1968 : 278‑279) ; originaire de Narbonne.
– 1 x bronze des Bituriges, non spécifié (Nash 1978a : 276).
– 1 x monnaie en argent des Bituriges, à l’épée (Nash 1978a : 241).
8419 145 – MOUSTIER‑VENTADOUR, Chamalot
Trésor dispersé ?
Trouvé dans la terre d’un jardin (Lombard 1972a).
– 1 x obole massaliote en argent, poids 0,5 g, diamètre 9 mm, variété E.
– 2 x monnaies en argent de TOGIRIX : à 2,8 g et 2,5 g, leurs poids semblent bien supérieurs à la moyenne de la série –1,9 à 1,99 g– (Colbert de Beaulieu 1973) ; d’après sa carte de répartition, ces monnaies seraient les exemplaires trouvés le plus loin vers le sud‑ouest, mais son explication de leur répartition très large –une utilisation par l’armée– semble peu convaincante (Colbert de Beaulieu 1973 : 309) ; attribuées aux Séquanes (cf. BN 5550).
– 1 x quart de statère armoricain en billon ; Coriosolites ?
– 1 x monnaie en argent DVR(NACVS), poids 2 g, cf. BN 5795 ; c’est à peu près le poids moyen pour la série (Colbert de Beaulieu 1973 : 313‑314, n° 607) ; ces monnaies au chevalier de la vallée du Rhône sont très largement répandues ; attribuées aux Voconces.
– 1 x monnaie en argent DVRNO (sic), poids 2,4 g ; probablement DUBNOCOV ou DUBNOREX (et variantes) ; attribuée aux Eduens, la série est très largement répandue (Colbert de Beaulieu 1973 : 311) ; le poids est élevé par rapport à la moyenne pour la série – entre 1,8 et 1,99 g (Colbert de Beaulieu 1973 : 274).
– 1 x monnaie en argent, peut‑être des Eduens.
Ce groupe de monnaies semble appartenir à la phase tardive des grandes circulations monétaires.
8519 146 – NAVES, Crédit agricole Site.
1 x as de Nîmes (Antignac 1977 : 100).
8619 151 – NOAILLES, aux alentours de Noailles
Douteux.
Trouvées pendant la construction d’un chemin de fer vers 1883. La numérotation est celle de Labrousse (Labrousse 1972).
– 1 x bronze frappé : LUXTIIRIOS, très usé ; Lucterius, attribué aux Cadurques (no 1) ; en circulation avant 52 av. J.‑C.
– 1 x bronze frappé : « 0 » de VANDII(A)LOS ; attribué aux Bituriges (no 2) ; daté d’après la Conquête à Levroux (Fischer 1981 : 102).
– 1 x bronze frappé, cf. BN 7493 ; attribué aux Sénons ; fréquent sur les oppida (Colbert de Beaulieu 1959 : n° 116) ; six exemplaires dans les dépôts d’Alésia (no 6).
– 1 x potin ; des pièces semblables sont largement répandues dans le Centre‑Ouest (no 7).
– 1 x bronze ; incertain, très usé (no 8). Si cet ensemble était fermé, il semblerait peu probable qu’il date d’avant la Conquête et pourrait très bien avoir été déposé après. On a émis des doutes sur l’authenticité de cette trouvaille (Lintz 1981b : no 15).
8719 158 – PANDRIGNES, Camp des Saulières
Site.
Apparemment des trouvailles isolées dans l’enceinte (Lombard 1972a).
– 1 x bronze de GIAMILOS (cf. BN 7565) attribué aux Sénons ; poids 2,5 g ; doit être postérieur à 49 av. J.‑C. (Allen 1980).
– 1 x monnaie en métal non spécifié, attribuée aux Pictons.
Vu l’acidité de cette mince couche de terre, la survie de ces monnaies est remarquable.
88202 – SAINTE‑FÉRÉOLE, aux alentours de Sainte‑Féréole
Trouvaille isolée.
– 1 x imitation d’un statère en or de Philippe II ; la pièce semble posséder les deux traits caractéristiques d’une « imitation de la première génération » (Allen 1980 : 70 ; Lalande 1912 : 630‑ 632 ; Lalande 1913 : 92).
8919 236 – SAINT‑PRIEST‑DE‑GIMEL, près de Brach
Site?
Trouvée en 1879 dans les champs entre Brach et Brousse (Pau 1880 : 575‑576). Colbert de Beaulieu l’a attribuée aux Arvemes (Colbert de Beaulieu 1973 : 201, note 314). Bost l’a comparée au BN 4543 (Bost 1981). C’est peut‑être le type Tête d’Helios de Nash (Nash 1978a : 90) qu’on retrouve à Limoges (BN 4541) et qui est attribué à la phase moyenne des monnaies en or du Centre. Datée au iie s. av. J.‑C. Origine centrale ou occidentale (Lintz 1981b : no 83).
9019 249 – SAINT‑YRIEIX‑LE‑DÉJALAT
Trouvaille isolée.
– 1 x argent du groupe de Bridiers : poids le plus bas (3,60 g) pour le type au chevalier (par exemple, Nash 1978a : 38, type A).
9119 274 ‑ USSAC, Bols de Tulle
Trésor.
– 120 monnaies trouvées dans un vase dans une grotte au‑dessus de la plaine de Brive pendant la Première Guerre mondiale (Bost 1981 : 19‑20 ; cf. BN 4072). Trésor de monnaies en or de la série « grue‑et‑trèfle » du type 3 de Nash (Nash 1978a : 284) appelé le trésor de Brive (Nash 1978a : 311, trésor 36). Phase tardive.
9219 275 – USSEL, aux alentours d’Ussel
Trouvaille isolée.
– 1 x monnaie en argent (Colbert de Beaulieu 1955) ; non attribuable aux séries A ou B sans d’autres renseignements ; attribuée aux Lémovices (Lacrocq 1940).
9319 276 ‑ UZERCHE, ou aux alentours
Site ?
– 1 x potin, attribué aux Sénons mais très répandu dans le bassin de la Seine, cf. BN 7417 (Labrousse 1972 : no 5 ; Colbert de Beaulieu 1959 : no 112).
9419 289 – YSSANDON
Sites
Les deux enceintes possibles ‑ qui en réalité ne représentent peut‑être qu’un seul site – ont fourni des monnaies : la répartition suivante entre les deux semble être la plus plausible (Lacroix 1882 ; Lacroix 1887).
95Puy Chalard
– 1 x monnaie en or, trouvée avant 1887 (Bost 1981: 20) ; peut‑être en électrum (Labrousse 1972 : n° 3) ; attribuée aux Pictons ; répartition vers l’ouest Jusqu’en Armorique, rare au sud du site, bien qu’il en existe deux provenant de Vieille‑Toulouse –ier s. av. J.‑C.–toujours en circulation à Alésia (Nash 1978a : 246‑247).
– 1 x monnaie en argent (Colbert de Beaulieu 1955 : série A, no 20, cf. BN 4561) ; d’après Lalande, trouvé à Chalard (Lalande 1878 : 147) ; attribuée aux Lémovices.
– 4 x bronzes du type cheval‑et‑grue au revers (Blanchet 1910) ; attribués aux Bituriges par Lalande (Lalande 1890a : 195) ; Nash dit que ces monnaies, de son type 4, sont attribuables aux Lémovices et sont essentiellement d’origine locale (Nash 1978a : 285).
96Puy d’Yssandon
– 1 x potin à la grosse tête (Lalande 1890a : 195), trouvé avant 1882, largement imité, et en circulation avant 52 av. J.‑C. ; attribuable aux Séquanes (Labrousse 1972 : no 4) ou aux Eduens (Nash 1978a : 340).
– 1 x statère en or dévalué (Lalande 1890a : 195) ; peut‑être la monnaie des Bituriges signalée ci‑après.
– 1 x drachme massaliote.
97Non spécifié/les deux
– 1 x monnaie attribuée aux Bituriges (Nash 1978a : 278).
– Quantité inconnue de petites pièces tardives en argent trouvées sur les deux sites ; peut‑être cadurques (Nash 1978a : 294).
98Monnaies méditerranéennes
On relève également cinq monnaies républicaines en argent trouvées à Yssandon, deux as de Nîmes et la monnaie massaliote en argent déjà signalée (Lacroix 1882).
9923 001 – AHUN, aux alentours d’Ahun
Trouvaille isolée.
Fragment d’un potin (Desbordes 1976a).
10023 021 BÊNÉVENT‑L’ABBAYE
Trésor.
Trésor de 44 monnaies en argent à la tête coupée trouvées dans une source (Lacrocq 1940 : 44‑46), composé de la série A de Colbert de Beaulieu, cf. BN 4561 (Colbert de Beaulieu 1955 : n° 15 ; Bost 1978 : trésor n° 4 ; Nash 1978a : trésor n° 35) ; série tardive.
10123 021 ‑ BÉNÉVENT‑L’ABBAYE
Trouvaille isolée.
Drachme massaliote en argent (Dugenest 1862 : 343 ; Nash 1978a : 336) ; Nash a signalé une autre trouvaille isolée dans cette commune mais qui vient de la Brionne (Nash 1978a : 336).
10223 028 – BOSROGER
Trouvaille isolée.
1 x moyen bronze EMPOR avec légende celtibère (Dugenest 1862 : 343 ; Cessac ms) ; malgré l’affirmation de Nash, il ne vient pas de Bénévent (Nash 1978a : 336).
10323 034 – BROUSSE
Trouvaille isolée.
Monnaie en or, trouvée dans un pré vers 1845 (Cessac ms) ; la description suggère des comparaisons avec le BN 3716 (Bost 1981 : 21) ; attribué aux Arvernes, la seule provenance pour ce type est le trésor de Pionsat (Nash 1978a : 156, série B5) ; tardive.
104« 23 CHAMBON »
Trouvaille isolée.
Bien qu’on l’ait décrite comme une monnaie en argent du groupe à l’épée CAM, et attribuée aux Bituriges et à cette commune (Nash 1978a : 214), cette monnaie vient en réalité de Cheverny « en Sologne » (probablement la commune de ce nom dans le Loir‑et‑Cher). La confusion a probablement commencé au début du xixe s. quand on a essayé d’attribuer la série de CAM soit à Chambon, soit à une tribu, les Cambiovicenses, à la limite orientale des Lémovices. Il semblerait que La Saussaye soit à l’origine de cette erreur (Tripon 1837 : 160‑161, no 5 ; Fillioux 1862b : 454).
10523 053 – CHARD
Trésor.
Trouvé vers 1850 (Janicaud 1936 : 407‑415). Quelques confusions sont possibles avec le trésor en or de Pionsat (Puy‑de‑Dôme) trouvé presqu’en même temps (Bost 1981 : 22). Quelques monnaies de Pionsat (ou peut‑être Chard) furent vues chez un bijoutier d’Aubusson vers 1858 (Fillioux 1862a). Les deux trésors de Chard (souvent appelé Auzances et quelquefois situé en Auvergne) (Nash 1978a : 307, trésor no 15) et de Pionsat (Nash 1978a : 307, trésor no 19) incluaient des statères en or de Vercingétorix ; ceux de Pionsat étaient légers et furent attribués à la fin de la Guerre des Gaules (Colbert de Beaulieu 1973 : 222) ; et il semble que le trésor de Chard, contrairement à ce que dit Nash, comprenait des monnaies en argent (Bost 1981: 22). Une monnaie qui provient peut‑être de ce trésor, dont l’importance est inconnue, a été identifiée au musée de Limoges et comparée au BN 3754 (Bost 1981). Si cela est vrai, c’est le type A5 de Nash, qu’on a également trouvé à Pionsat (Nash 1978a : 149).
10623 076 ‑ ÉVAUX‑LES‑BAINS
Trouvaille isolée.
1 x bronze de Nîmes au crocodile (Fillioux 1862a : 197).
10723 079 ‑ FELLETIN, « près de Felletin »
Trouvailles isolées ?
Tripon signala ici des monnaies mais elles sont rejetées par Bost dans son étude des trésors (Bost 1978). Comme c’est Beaumesnil qui les a signalées en premier, la découverte est peut‑être douteuse. Colbert de Beaulieu a suggéré qu’une monnaie à l’inscription SEDULLUS (qui ne serait pas le chef lémovice) pourrait se lire CEDWIX et serait mérovingienne (Ellis Evans 1967 : 468‑ 469).
10823 097 – ISSOUDUN‑LÉTRIEIX, La Villette
Trouvaille isolée.
1 x bronze celtique ; cheval galopant au revers (Monnet 1890 : 399 ; Pérathon 1904).
10923 098 – JALESCHES, Marcillat
Trésor.
110Trouvé en 1908 et vendu à Paris en 1909, quand quelques monnaies avaient déjà été perdues. Il y avait au moins 79 monnaies, dont 13 x statères, 4 x quarts de statère et 62 x monnaies d’argent, trouvées dans un pot rouge‑grisâtre, monté à la main et entouré par une bande en fer et accompagné d’un fer de hache typologiquement semblable à celui qui a été trouvé avec un trésor à St‑Etienne‑des‑Landes, Dordogne (Blanchet 1910).
Le trésor, décrit par Nash et attribué à une phase tardive (Nash 1978a : 312, trésor no 41), incluait 31 monnaies de la série A de Colbert de Beaulieu, cf. BN 4561 (Lacrocq 1938) et 15 monnaies de la série B, cf. BN 4572 (Colbert de Beaulieu 1955 : trésor no 13), avec un poids moyen inférieur à celui du trésor de Bénévent‑l’Abbaye. On peut attribuer ces monnaies aux Lémovices. Nash mentionne 80 monnaies. D’autres incluent des monnaies en argent du groupe, tardif, à l’épée du Berry, avec une fraction (Nash 1978a : 219) et 4 (ou 5 ?) x CAMBOTRE (Nash 1978a : 213). On a trouvé un coin pour le revers d’un des types (Bl1) au Puy de Corent. Il y avait également un TOGIRIX en argent et une autre monnaie des Eduens avec inscription qui trouve un parallèle après la Conquête à Levroux (Fischer 1981 : 192). Les monnaies en or appartiennent à la série grue‑et‑trèfle. Ce trésor est le seul où on trouve ensemble des statères et des quarts de statère, attribuables, peutêtre, aux Lémovices. Trésor tardif.
11123 105 – LAVAVEIX‑LES‑MINES
Trouvaille isolée.
Monnaie en or trouvée dans un jardin (Cessac ms). Décrite comme étant une fraction de statère et probablement attribuable aux Arvernes (Bost 1981 : 24). D’après la description de Cessac, il s’agit peut‑être d’une copie de la deuxième génération d’un philippus.
11223 128 – MAZEIRAT
Trouvaille isolée.
– 1 x monnaie celtique (Lacrocq 1932 : 99).
11323 140 – MOUTIER‑ROZEILLE, La Grave
Trouvaille isolée.
– 1 x monnaie « des Lémovices » est signalée à La Grave, « au nord‑est d’Aubusson » (Dayras 1970 : 22).
11423 160 ‑ RETERRE, Coust
Trouvaille isolée.
Un lingot d’or, triangulaire et pesant 863 g, fut trouvé près d’une source dans une région marécageuse ; il est actuellement perdu (Urien 1970 : 19 ; Bost 1981). Il était peut‑être ancien mais Cessac dit que la légende locale voulait qu’il ait été amené dans la commune par un soldat rentrant d’Espagne au début du xixe s. (Cessac ms). Le lingot était connu avant les années 1840 (Bonnafoux 1847 : 12‑13).
11523 174 – SOUMANS, Montebras
Site ?
Cessac signale 3, peut‑être 5, bronzes pour cette localité (Cessac 1871 : 339). Leur association éventuelle avec les activités minières n’est pas claire. ‑ 1 x bronze d’EPASNACTUS ; attribué aux Arvernes. Nash suggère que ces monnaies ont été frappées à Gergovie‑Merdogne (Nash 1978a : 161) ; Colbert de Beaulieu signale qu’à Alésia la série (cf. BN 3907‑3920 ; 3886‑3899) est la plus commune des bronzes non locaux (Colbert de Beaulieu 1973 : 304) ; il est peu probable qu’ils soient antérieurs aux phases finales de la Guerre des Gaules.
– 1 x bronze, sans inscription.
– 1 x bronze de Nîmes, probablement un as.
11623 176 – LA SOUTERRAINE, Breith
117Site ? Trésor.
– Ce trésor‑clé avec ses divers prototypes méditerranéens (Allen 1980 : 57‑58) a été considéré comme représentant les monnaies en argent les plus anciennes de la Gaule centrale (Nash 1978a : trésor n° 2). Bien qu’on les ait quelquefois attribuées aux Lémovices (par exemple Muret 1889 : 102, BN 4549), il semble que ce soit sans raison particulière. D’après Fillioux, on trouva 36 monnaies, mais d’autres auteurs parlent de plus de 40 (Fillioux 1862b : 457). Les monnaies furent trouvées dans un pot à engobe noir, probablement pendant les fouilles de Fesneau.
En plus des monnaies étudiées par Nash, Blanchet prétendait que, dans la collection, se trouvait une imitation d’une drachme d’Ampurias refrappée sur une monnaie à la croix. Colbert de Beaulieu n’était pas convaincu (Colbert de Beaulieu 1973 : note 545), mais le poids de cette monnaie –4,30 g– correspond bien à ceux de la série principale des monnaies à la croix (type II) pour lesquelles on a proposé une datation au iie s. (Nash 1978a : 22).
– Un deuxième trésor d’environ 120 à 200 monnaies a été découvert par Fesneau pendant la fouille de la « Maison de Gaburos » avant 1861. Trouvé dans un pot, ce trésor fut dispersé avant son étude (Buisson de Mavergnier 1863a : 51 ; Janicaud 1948 ; Bost 1978 : no 27) mais il aurait compris une monnaie de « Vergasillaunus », peut‑être un bronze de VERGA. En se fondant sur cette identification provisoire, on peut proposer une datation pendant la phase tardive de répartitions très larges : on connaît des monnaies de VERGA jusqu’en Languedoc (Colbert de Beaulieu 1973 : 328).
– Un bronze attribué aux Pétrocores (cf. BN 4326) a été trouvé pendant les fouilles. Le contexte stratigraphique associé était perturbé (Gallia, 33, 2, 1975 : 444).
11823 176 – LA SOUTERRAINE
Trésor.
La commune a également fourni des denarii républicains, peut‑être formant un trésor (Bost 1978 : 161).
11923 193 – SAINTE‑FEYRE, Le Puy de Gaudy
Site
– 1 x monnaie en argent (Lacrocq 1938) du type tête coupée de la série A (Colbert de Beaulieu 1955 : no 14 « St‑Léger‑le‑Guéretois » ; cf. BN 4561) attribuée aux Lémovices ; provient des fouilles de Thuot au Puy de Gaudy (Blanchet 1910).
12023 200 – SAINT‑GOUSSAUD
Site.
– 1 x monnaie des Bituriges Cubi (Laborderie 1921).
12123 220 – SAINT‑MÉDARD‑LA‑ROCHETTE, Lioreix
Trouvaille isolée.
Trouvée pendant la construction d’un chemin de fer.
– 1 x statère en or, attribué aux Arvernes (Bost 1981: 25) ; la même monnaie a été trouvée dans un contexte daté de la deuxième moitié du ier s. av. J.‑C. à Ambrussum, Hérault (Fiches 1978 : 77, carte 7, note 16).
12223 242 – SAINT‑SILVAIN‑MONTAIGUT
Trouvaille isolée.
Sans contexte précis ; trouvée avant 1890 (Monnet 1890 : 395) et maintenant perdue (Bost 1981).
– 1 x statère en or, poids 8,60 g, nettement macédonien (Colbert de Beaulieu 1973 : 200‑201 et note 312).
123« 23 TOULL »
La monnaie attribuée à cette commune (Nash 1978a : 214) provient de Cheverny, Loir‑et‑Cher, en Sologne (Tripon 1837 : 160‑161, no 4 ; Fillioux 1862b : 454). Cf. Chambon ci‑dessus.
12423 254 – TOULX‑SAINTE‑CROIX
Site.
– 1 x as de Nîmes (Barailon 1784 : 2).
12523 261 – VIERSAT
Trouvaille isolée.
– 1 x monnaie celtique (Lacrocq 1932 : 99).
12687 026 – BUSSIÈRE‑BOFFY
Trouvailles isolées.
– 1 x statère gaulois en or, poids 7 g environ ; perdu (Taya 1859 : 139‑141 ; Bost 1981).
– 1 x monnaie en argent à la tête coupée, attribuée aux Lémovices (Colbert de Beaulieu 1955 : n° 16, série A ; cf. BN 4561).
12787 047 – C0MPREIGNAC, La Jante
Trésor.
Trouvé par un ouvrier en 1811 : un mélange de plus de 1 000 monnaies celtiques et romaines ; on a proposé jusqu’à 2 000 comme chiffre maximum (Lecler 1867 : 20). Un terminus post quem pour le trésor est donné par des monnaies romaines – 43 av. J.‑C. pour Nash ou 37 av. J.‑C. pour Rolland et Colbert de Beaulieu (Nash 1978a : 314, trésor 47 ; Colbert de Beaulieu 1973 : 260). Les monnaies, attribuées parmi d’autres aux Eduens, aux Séquanes, aux Leuques ?, aux Pictons et leurs voisins, aux Rèmes, aux Bituriges et aux Arvernes, indiquent une aire de répartition très large (Colbert de Beaulieu 1973 : 357 ; Nash 1978a : 314).
12887 059 – LE DORAT
Trouvailles isolées.
Même si on a quelquefois dit qu’une seule monnaie provient de la commune (BSAHL, 91, 1964 : 300), il semble que 2 statères y aient été découverts (Bost 1981 : 29).
– 1 x statère gaulois, connu au xviiie s.
– 1 x statère en or du type C tardif du Berry (Nash 1978a : 105‑106) ; le revers est probablement imité des monnaies de Philippe V de Macédoine (220‑179 av. J.‑C.).
12987 079 – LA JONCHÈRE‑SAINT‑MAURICE, La Cigogne
Trésor.
– 32 x statères en or, attribués aux Pictons ; émis avant la fin de la Guerre des Gaules, on peut les comparer à une monnaies dans un trésor, trouvé à Yssandon, qui comprenait des denarii romains républicains et consulaires (Colbert de Beaulieu 1973 : 261 ; Nash 1978a : 249).
13087 085 – LIMOGES
Site?
– 1 x aureus romain de 43 av. J.‑C. (Bost 1981: 31), trouvé dans la rue Torte, actuellement rue de la Boucherie.
– 1 x statère en or de la collection F. de Saucy (Muret 1889 : 102 ; cf. BN 4541), attribué traditionnellement aux Lémovices (Bost 1981) ; il appartient au type Tête d’Helios de Nash (Nash 1978a : 90, fig. 230), attribué à la phase moyenne des monnaies en or du Centre‑Ouest.
13187 106 – NEXON
Trouvaille isolée.
– 1 x monnaie, probablement en électrum, de la série grue‑et‑trèfle (Nash 1978a : 285).
13287 119 – PIERRE‑BUFFIÈRE, villa d’Antone
Site ?
– 4 x bronzes tardifs, décrits par Nash et une monnaie, « imitation d’Emporion », en argent ; les bronzes sont attribués aux Arvernes et aux Bituriges ; le Dictionnaire archéologique de la Gaule signale d’autres monnaies des Bituriges du type ABVDOS.
13387 127 – LA ROCHE‑L’ABEILLE
Trouvaille isolée.
– 1 x statère gaulois ; imitation d’un statère macédonien (Bost 1981: 36).
13487 135 – SAINT‑AUVENT
Trouvaille isolée.
– 1 x monnaie gauloise, trouvée en 1849 et maintenant perdue ; probablement en électrum (Bost 1981: 36).
13587 143 – SAINT‑GENCE, La Grande Châtre
Site.
– 1 x monnaie gauloise (Juge 1969).
13687 156 – SAINT‑JUST‑LE‑MARTEL, Fort‑Manoir
Trésor ?
On y a trouvé 10 monnaies en argent dont 3 étaient probablement romaines et les autres gauloises (Perrier 1964 : 48, no 52). Il semble que la collection incluait :
– 1 x monnaie en argent (BN 4460) appartenant à la série de Nash « de Bridiers, développement tardif, au cavalier, type A » (Nash 1978a : 38, fig. 60).
13787 158 – SAINT‑LAURENT‑SUR‑GORRE
Trouvaille isolée.
– 1 x imitation de statère macédonien (Arbellot 1880 : 305 ; Bost 1981 : 37).
13887 159 ‑ SAINT‑LÉGER‑LA‑MONTAGNE, Lailloux
Trouvaille isolée.
– 1 x monnaie en argent, trouvée en 1935 ; cf. BN 8178/8291 de Caletedu : une des « incertaines de l’Est » (Fitte 1965 ; Colbert de Beaulieu 1959 : 46‑47).
13987 171 – SAINT‑NICOLAS‑COURBEFY
Trouvaille isolée.
– 1 x bronze d’Ampurias (Perrier 1964 ; Nash 1978a : 338).
14087 198 – VAULRY
Trésor et trouvailles isolées. Trésor comprenant environ 300 bronzes (Delage 1930 : 359) et plusieurs monnaies isolées à côté ; il comporte des monnaies en or de la série grue‑et‑trèfle des types 2 et 3 (Nash 1978a : 281, 284).
Table des illustrations
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Légende | FIG. 1 – Le Limousin : relief et hydrographie (d’après Notes et études documentaires, no 3118,1964). |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/37433/img-1.jpg |
Fichier | image/jpeg, 77k |
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Légende | FIG. 2 – Le Limousin : zones principales (d’après Notes et études documentaires, no 3118, 1964). |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/37433/img-2.jpg |
Fichier | image/jpeg, 50k |
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Légende | TABL. I – Pluviométrie saisonnière moyenne à La Courtine (Creuse), alt. 765 m (d’après Fel 1955 : 408). |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/37433/img-3.jpg |
Fichier | image/jpeg, 8,8k |
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Légende | TABL. II – Températures saisonnières moyennes, exprimées en °C, pour diverses stations du Massif central, corrigées pour tenir compte des différences altimétriques (d’après Fel 1955). |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/37433/img-4.jpg |
Fichier | image/jpeg, 17k |
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Légende | TABL. III – Changements dans l’occupation du sol dans le canton d’Egletons, Corrèze, en pourcentage |
Crédits | d’après Perpillou 1940 |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/37433/img-5.jpg |
Fichier | image/jpeg, 5,5k |
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Légende | FIG. 3 – Le Limousin : extension des landes au début du XIXe s. |
Crédits | d’après Perpillou 1940 |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/37433/img-6.jpg |
Fichier | image/jpeg, 54k |
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Légende | FIG. 4 – Le Limousin : carte des trouvailles de monnaies gauloises ou importées réparties par communes. |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/37433/img-7.jpg |
Fichier | image/jpeg, 70k |
© Éditions de la Maison des sciences de l’homme, 1992