Préface
p. 9-10
Texte intégral
1Lorsque le Président François Mitterrand, le 17 septembre 1985, déclara le Mont-Beuvray grand site national, il développa plusieurs thèmes.
2Il évoqua d’abord l’ampleur du monde celtique. Une civilisation (« non pas Etat, non pas patrie ») qui, depuis la Gaule à l’ouest, s’étendait jusqu’au cœur de la Hongrie et qui amèneà réfléchir sur « les cadres étatiques qui sont les nôtres », constitués « par le sang et par les négociations », et donc fragiles, provisoires. Prémonition des événements qui ont depuis lors bouleversé l’Europe ?
3Le Président de la République mit en valeur aussi le poids de l’histoire, de ses continuités. Le Mont-Beuvray, qui fut un grand habitat aux IIe et Ier s. av. J.-C., ne fut pas pour autant délaissé lorsque Rome créa Augustodunum (Autun). Il demeura un haut lieu spirituel, des rassemblements annuels s’y firent tout au long du Moyen Age et des Temps Modernes : la fréquentation de son sanctuaire antique - qui devint la chapelle Saint-Martin –, les foules que la foire annuelle amenait à gravir ses pentes au début du mois de mai, voilà autant de preuves de la pérennité que connaissent certains hauts lieux.
4Dans son discours du 17 septembre 1985 le Président souligna enfin le charme qui se dégage du Mont, surtout pour le promeneur solitaire qui le parcourt à pied. Une forêt qu’ont modelée les récentes décennies, mais où les châtaigniers ont résisté à l’invasion des résineux. Subtilement une flore - peut-être immémoriale – dégage des odeurs qu’on ne retrouve nulle part ailleurs. Comment n’être pas sensible aux trouées qui, depuis le Morvan, offrent des vues qui se méritent ? Certains jours la « Terrasse » permet d’apercevoir le Mont Blanc ou vous laisse le mystère de ses brumes... Nous sommes sur un lieu très fort où les symbolismes sont multiples.
5Mais c’est surtout sur la reprise des recherches archéologiques que le Président insista, montrant à quel point elle révélait l’importance du Mont-Beuvray aujourd’hui comme hier. Je m’étais moi-même laissé convaincre, en 1982, de la nécessité d’y reprendre des fouilles. On m’avait expliqué que ce site, exploré au XIXe s. par Bulliot et Déchelette, servant de référence pour la « civilisation celtique », méritait qu’on y fasse intervenir des équipes internationales dotées de moyens modernes. La décision, prise à la demande du Président, d’y lancer de nouveaux chantiers a suscité un mouvement qui m’a moi-même surpris. Comment imaginer, que, si rapidement, accourraient des professeurs, des chercheurs, des étudiants venant de Grande-Bretagne, d’Italie, de Belgique, d’Allemagne, d’Espagne, de Tchécoslovaquie, de Hongrie - sans compter tous ceux qui simplement viennent visiter les fouilles ou qui fréquentent la base archéologique ! Ainsi que l’avait souhaité François Mitterrand, le Mont-Beuvray devient symbole spirituel tout à la fois de l’unité nationale - Vercingétorix y rassembla pour la première fois les chefs de la Gaule – et de l’unité européenne à construire.
6C’est pour répondre au souci de qualité des conditions de la recherche qu’a été élaboré le projet de centre archéologique européen, retenu parmi les Grands Travaux de province et dont la réalisation doit être achevée en 1993. Un de ses constituants est la base archéologique de Glux-en-Glenne. Son ambition est aussi plus largement culturelle, avec l’implantation, au col du Rebout, d’un musée de la civilisation celte et la mise en valeur du site. Elle est également touristique et économique – car elle s’applique à un territoire aux ressources rares et à la population en diminution — avec la recherche du développement d’un tourisme culturel de qualité.
7Ce n’est pas le lieu d’évoquer tous les efforts qui ont concouru à la mise en œuvre de ces projets : de la part d’autres ministères, d’établissements publics, des collectivités territoriales - et aussi de tant de chercheurs ou de bénévoles. Je me réjouis particulièrement de l’entente entre le ministère de la Culture, celui de l’Education nationale et le CNRS, qui a présidé à la création de la collection des Documents d’Archéologie Française dans laquelle vient tout naturellement s’inscrire cette série consacrée à la recherche sur le Mont-Beuvray.
8Puisqu’il s’agit ici de l’inaugurer, je souhaite insister sur un point que j’ai souvent évoqué : à quoi bon fouiller si les résultats ne sont pas transmis ? Dès le départ nous avons voulu que cette opération consacrée au Mont-Beuvray fût exemplaire et j’éprouve donc une satisfaction profonde à préfacer cet ouvrage qui constitue le premier volume de cette série.
9Lorsque Bulliot découvrit des monceaux d’amphores, il en connaissait mal l’origine et n’imaginait pas qu’elles matérialisaient, entre l’Italie et le peuple éduen, un commerce d’une incroyable densité - le vin italien contre... sans doute des esclaves, des minerais... Mais il a su préserver l’essentiel de ses découvertes. Il n’a pas effectué de décomptes – on ne s’y est appliqué que depuis peu – mais il a dessiné, fait photographier et aussi déposé à Autun les pièces qu’il considérait comme significatives. J. Déchelette a fait de même.
10Cet ouvrage jette donc un pont entre les fouilleurs du XIXe s. et les archéologues d’aujourd’hui. C’est un maillon de la chaîne qui constitue... la recherche. D’autres volumes viendront présenter le résultat des travaux les plus récents. Hier et aujourd’hui se rejoignent ainsi au fil d’une même quête : celle d’un passé qui peut et doit nous aider à construire l’avenir.

Auteur
Ministre de la Culture, de la Communication et des Grands Travaux.
Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
Mottes castrales en Provence
Les origines de la fortification privée au Moyen Âge
Daniel Mouton
2008
Géoarchéologie de sites préhistoriques
Le Gardon (Ain), Montou (Pyrénées-Orientales) et Saint-Alban (Isère)
Dominique Sordoillet
2009
L’enceinte des premier et second âges du Fer de La Fosse Touzé (Courseulles-sur Mer, Calvados)
Entre résidence aristocratique et place de collecte monumentale
Ivan Jahier (dir.)
2011
Lyon, Saint-Georges
Archéologie, environnement et histoire d’un espace fluvial en bord de Saône
Grégoire Ayala (dir.)
2012
Les gisements précolombiens de la Baie Orientale
Campements du Mésoindien et du Néoindien sur l’île de Saint-Martin (Petites Antilles)
Dominique Bonnissent (dir.)
2013
L’Îlot du palais de justice d’Épinal (Vosges)
Formation et développement d’un espace urbain au Moyen Âge et à l’époque moderne
Yves Henigfeld et Philippe Kuchler (dir.)
2014
Bettencourt-Saint-Ouen (Somme)
Cinq occupations paléolithiques au début de la dernière glaciation
Jean-Luc Locht (dir.)
2002
Campements mésolithiques en Bresse jurassienne
Choisey et Ruffey-sur-Seille
Frédéric Séara, Sylvain Rotillon et Christophe Cupillard (dir.)
2002
Productions agricoles, stockage et finage en Montagne Noire médiévale
Le grenier castral de Durfort (Tarn)
Marie-Pierre Ruas
2002