Protohistoire du défilé de Donzère
|Chapitre 3. Synthèse et perspectives
Résumé
Un inventaire des dates14C calibrées pour les Alpes occidentales permet de proposer le cadre chronologie absolu suivant : Bronze ancien : 2300‑env. 1750 ; Bronze moyen : env. 1750‑1400 ; Bronze récent : 1400‑1300 ; Bronze final : 1300‑800 av. J.‑C. Les principales conséquences de cette nouvelle trame sont l’allongement de la durée du Bronze ancien, dont il faudra expliquer la lenteur de l’évolution céramique, une synchronisation avec la chronologie centre‑européenne et des contradictions avec la dendrochronologie pour la transition Bronze ancien/moyen.
Un décompte du nombre de sites de l’âge du Bronze de la Drôme et d’Ardèche pour chaque époque, effectué sur la base de ces propositions chronologiques, permet de calculer un indice‑relatif de représentation des sites (IRS). Celui‑ci fait ressortir une opposition entre les possibles densités d’occupation, faibles du Bronze ancien et au Bronze récent, plus importantes ensuite.
Texte intégral

FIG. 54a – Carte de répartition des céramiques à motifs de cannelures bouclées, du Bronze moyen au Bronze final 2a.
3.1 Les cadres de compréhension
3.1.1 Le découpage géographique
1L’espace clans lequel nos comparaisons furent faites a été divisé en 7 secteurs (fig. 55). Les données actuelles sur l’écologie et les sociétés anciennes étant insuffisantes, ils furent individualisés sur des critères uniquement géographiques (Estienne 1979).
2Les bassins de Paris et du Rhin moyen occupent le secteur nord. Le secteur central regroupe la majeure partie du bassin de la Loire, celui de la Saône ainsi que les bassins supérieurs du Rhône et du Rhin. La ligne de crête orientale et la limite nord du Massif central hercynien, ainsi que la ligne des sommets alpins, séparent le bassin rhodanien des précédents, de la plaine du Pô à l’est et du bassin de la Garonne au sud‑ouest. La moyenne vallée du Rhône s’interrompt au nord à la hauteur du Vercors et au sud selon une ligne suivie par la limite des cols et le mont Ventoux. Le défilé de Donzère marque approximativement la séparation entre les moyenne et basse vallées du Rhône, le Languedoc et la Provence ayant le fleuve pour frontière.
3A ces secteurs nord (N), central (C), ouest (O), médio‑rhodanien (MVR), italien (I), languedocien (L), provençal (P), nous ajouterons la composante locale (Loc) rassemblant les formes céramiques pour lesquelles on ne peut actuellement qu’invoquer cette origine en l’absence de comparaisons externes.
4Par souci de synthèse, notre compartimentage ne tient pas compte des disparités géographiques régionales telles que l’opposition entre les zones orientales et occidentales du Languedoc et de la Provence, et les zones septentrionales et méridionales d’Auvergne et de Franche‑Comté, par exemple.
3.1.2 Les sites régionaux : représentation chronologique
5Un pré‑inventaire des gisements de l’âge du Bronze d’Ardèche et de la Drôme a été dressé afin de voir si leur fréquence par époque suivait celle du mobilier de la Baume des Anges. Le but était de mesurer la valeur de ce gisement en tant qu’échantillon et d’examiner en quels termes pouvaient être expliquées les différences.
6Nous avons retenu les sites dans lesquels des occupations sont attestées avec quelque certitude, mais sans souci de leur nature ni de leurs caractéristiques intrinsèques, et nous avons exclu les dépôts, les sépultures et les objets isolés. Il s’agit d’un simple travail préliminaire puisque de nombreux contrôles de terrain et de collections restent à réaliser.
7Les effectifs du Bronze moyen 1 et 2 d’une part, du début et du milieu du Bronze final 2 d’autre part, ont été regroupés, le degré de finesse actuellement atteint dans la chronologie, indiquée en marge, étant inférieur à celui de la typologie.
8Nous parvenons à un total de 106 gisements se répartissant comme indiqué dans le tableau ci‑dessous.
9Un indice de représentation des sites (IRS), donné dans la colonne de droite, est obtenu par le rapport entre le nombre de sites et la durée de chaque phase (fig. 8). Il ne peut être question de l’assimiler à un indice de densité en l’état actuel des travaux, mais il fournit les premiers éléments de réflexion concernant la fréquence relative des gisements par périodes.
3.2 Chronologie et localisation des types céramiques
3.2.1 Les données
10Les formes et les portions de récipients sont considérées sur les plans chronologique et géographique (fig. 56a et b) et le décompte des occurrences signalées dans le corps du texte figure dans le tableau ci‑dessous. Les objets métalliques ont été exclus du fait de l’imprécision de leur classement.

FIG. 56 – Histogramme du nombre de récipients (A) ; fréquences des occurrences géographiques (B), géographiques et chronologiques (C). Le découpage géographique est le suivant : secteurs nord (N), central (C), ouest (O), médio‑rhodanien (MVR), italien (I), languedocien (L), provençal (P) et composante locale (Loc.)
11Les indices de représentation des sites d’Ardèche et de la Drôme (IRS) sont rappelés en marge, ainsi que leurs pourcentages.
12On peut remarquer que les sommes marginales des occurrences chronologiques sont toujours supérieures au nombre de vases (colonne D : Donzère), plusieurs comparaisons pouvant être effectuées à propos d’un même récipient.
3.2.2 Méthodes d’étude
13Les histogrammes des occurrences géographiques par phases chronologiques (fig. 56c) permettent d’entrer dans le détail des phénomènes évolutifs.
14Malgré le recours à de nombreux complexes de référence, nous ne pouvons prétendre à la perfection des comparaisons et à celle des résultats sur le plan spatial ; les régions typologiques restent peut‑être à définir sur d’autres critères que la seule géographie physique comme nous le proposons, faute de mieux. Les incertitudes de classement d’un certain nombre de vestiges, rangés en conséquence dans les catégories BR+BF2a et BF2a+2b, font que les décomptes de ces dernières n’ont pas été retenus. La nette identité de leurs histogrammes (non figurés) avec ceux du Bronze final 2a indique que ce choix sera sans conséquence.
15Le nombre des affinités régionales est parfois surestimé ou sous‑estimé, car les décomptes ont été effectués sur la base du nombre de formes présentes à Donzère, ne connaissant pas les effectifs réunis dans chacune des régions. De ce fait, la part des relations qu’elles entretiennent reste également inconnue, ce vaste travail de synthèse étant à réaliser.
16Ces contraintes marquent les limites actuelles de ce genre d’analyse, mais n’altèrent pas fondamentalement la compréhension globale des phénomènes.
17Dans une première approche (Vital 1984 : 286 et fig. 56), l’information du tableau de données fut estimée, en recourant à la distance du Khi2, par la mesure du « Lien et par sa traduction en image (Laplace 1979‑80 ; Livache 1979‑80). Un résultat identique peut maintenant être obtenu par une simple construction graphique (Laplace 1983‑84), que nous avons appliquée au tableau de contingence du paragraphe 3.2.1 (fig. 57).
18Ainsi, dans chaque série chronologique, les écarts à la moyenne des catégories géographiques, ou écarts conditionnels, positifs ou négatifs, figurent en ordonnées (fig. 57). Ils sont calculés par différence entre les fréquences catégorielles en colonnes et la fréquence marginale toutes colonnes (catégories géographiques) confondues. Les écarts à l’indépendance, c’est‑à‑dire à une équivalence des fréquences de case, figurent en surface. Ils sont acquis grâce au produit des écarts à la moyenne par les fréquences marginales en colonnes correspondantes. Les écarts à l’indépendance pondérés (fig. 57) sont calculés en substituant aux fréquences marginales catégorielles les valeurs des différences entre les fréquences de case en ligne et les fréquences marginales toutes lignes confondues correspondantes.

FIG. 57 – Spectres du lien des industries céramiques de la Baume des Anges. Le découpage géographique est le suivant : secteurs nord (N), central (C), ouest (O), médio‑rhodanien (MVR), Italien (I), languedocien (L), provençal (P) et composante locale (Loc.).
19La hauteur des histogrammes, correspondant à l’écart à la moyenne, traduit une association spécifique, positive ou négative, entre une phase chronologique et une région, mais surtout sa force et ce malgré la faiblesse de certains effectifs. La surface des histogrammes, correspondant à l’écart à l’indépendance et à la valeur calculée du lien, traduit la sensibilité des variables, indépendamment de leurs effectifs.
20Ces écarts correspondent à des traits pertinents au sens statistique (Laplace 1983‑84 : 71). En comparant les spectres de chaque époque (fig. 57), on peut noter que le lien favorise les petits effectifs.
21Il est possible de résumer en affirmant que les histogrammes par phases chronologiques (fig. 56c) et les spectres du lien (fig. 57) fournissent respectivement une information sur la quantité et la qualité des occurrences géographiques.
3.3 Conclusion
3.3.1 Chronologie et géographie
22Plusieurs incertitudes demeurent avant d’aborder les conclusions de ce travail. Il est encore difficile de proposer une périodisation des phases de l’âge du Bronze, même si un progrès certain a été obtenu pour certaines d’entre elles (Bronze moyen et Bronze final) depuis notre précédente synthèse (Vital 1984). Le recours à de nouveaux complexes régionaux ou extérieurs en est l’origine (Vital 1986b et 1988), soulignant la nécessité de poursuivre et de produire l’inventaire des données médio‑rhodaniennes, simultanément à la constitution de complexes datés. C’est ainsi seulement qu’il sera possible de remédier aux imprécisions engendrées ici par la discontinuité de la répartition dans le temps des séries de la Baume des Anges, que l’abondance ne doit pas estomper.
23La chronologie élaborée à partir des principales informations disponibles dans les Alpes occidentales (fig. 8) s’écarte de celle admise jusqu’alors (Guilaine 1976a : 19). Les conséquences sont nombreuses, telles :
– une synchronisation avec le développement des différents stades de l’âge du Bronze en Europe centrale et au Proche‑Orient, dont la contemporanéité avait été soulignée par A. F. Harding (1980 : 180‑181 1984 : 276‑279) ;
– des contradictions entre les dates radiocarbones et dendrochronologiques de certains gisements du Bronze ancien et du Bronze moyen ;
– un allongement de la durée de ces phases et corrélativement une dispersion des sites dans le temps.
24L’allongement de la durée du Bronze ancien pose le problème de la lenteur d’évolution morphologique et sémiotique apparente des mobiliers céramiques. Les détails de cette trame chronologique restent toutefois à confirmer dans la moyenne vallée du Rhône,
25Sur le plan géographique, les faits que nous dénommons avec neutralité des occurrences dans le domaine de la céramique, ne peuvent actuellement recevoir de définition précise ni univoque. La circulation de poteries est possible au travers des comparaisons à longue distance (basse Autriche), le stockage d’une série de typologie exceptionnelle comme celle de la grotte de La Rousse à Sainte‑Marie‑du‑Mont (Isère : Bocquet, Degueurce 1976) pouvant attester de telles pratiques. Mais il est indéniable que la grande majorité des céramiques de la Baume des Anges fut fabriquée dans la moyenne vallée du Rhône, l’homogénéité et la répartition régionales de certains détails techniques et de traits décoratifs ne pouvant trouver d’autre explication. Les occurrences devraient alors être mises au crédit des relations physiques entre les groupes humains, dont la portée et la nature restent à préciser.
3.3.2 Caractères généraux
3.3.2.1. La représentation des sites
26Les symboles figurant sur la droite du tableau de données (cf. § 3‑2.1) indiquent les déficits entre les pourcentages de récipients de la Baume des Anges et les indices de représentation des sites (IRS) traduits en pourcentages. Ainsi, le Bronze ancien, le Bronze moyen et le Bronze final 2b‑3a sont mieux attestés parmi les sites que clans nos industries, alors que c’est l’inverse pour le seul Bronze final 2a ; quant aux Bronze récent et Bronze final 3b, les pourcentages sont comparables.
3.3.2.2. Le nombre des récipients
27L’histogramme du nombre de récipients par phase (fig. 56a), indique que la majorité d’entre eux se rapporte au Bronze final 2a, 3b et 2b. Les différences entre les effectifs de ces trois stades, et entre ceux du BF2b et du Bronze récent, ont été testées par le Khi2 , où l’indicateur d’écart X2 est donné par la formule :
28et où dans une suite décroissante de k termes et d’effectif total N, a et b représentent deux effectifs observés et c et cl leurs complémentaires par rapport à N. Ces différences sont significatives, la probabilité qu’elles soient dues au hasard étant comprise entre 0,01 et 0,001 ou inférieure à 0,001.
29Ces variations d’effectifs peuvent être représentatives du volume des groupes humains et de leur équipement, du nombre et des durées d’occupation du site. Il est par contre improbable qu’elles soient entraînées par une sur‑représentation des récipients en matière périssable, les gisements palafittiques (lacs de Neuchâtel, de Garde, de Ledro, etc.) attestant leur petit nombre par rapport aux céramiques.
30L’excès de vestiges du Bronze final 2a, par rapport à l’IRS, se double d’une abondance numérique qui irait de pair avec l’importante sédimentation anthropique (cf. § 1.2.4) et nous attribuons ces faits à une plus intense occupation de la grotte à cette époque. L’utilisation de la Baume des Anges en habitat pouvant difficilement passer pour autre que temporaire, cette fréquentation se serait déroulée sous l’effet de contraintes externes restant à déterminer.
31Les effectifs du Bronze final 3b, figurant en seconde position, confirment les observations opérées sur les sites récemment étudiés, ou en cours de fouille. Ils démontrent l’abondance des productions céramiques dans les habitats, le niveau du Bronze moyen de la grotte de la Chauve‑Souris ayant par exemple livré 3 formes, contre 54 au BF 3b pour une surface moindre.
32L’Ardèche et la Drôme possèdent un grand nombre d’habitats chalcolithiques ; il n’est pour s’en convaincre que de consulter l’inventaire dressé en 1980 par A. Beeching. La dégression de l’IRS et du nombre de vestiges jusqu’au Bronze moyen 2 n’en prend que plus de relief, précédant leur progression rapide. Cette ténuité des manifestations humaines au milieu de l’âge du Bronze a été soulignée à maintes reprises, mais il est possible ici de l’insérer dans une séquence historique cohérente. Il reste à déterminer les raisons de ce phénomène majeur de la protohistoire régionale ; la fouille et l’étude d’une occupation du Bronze moyen 1 dans la grotte voisine de la Chauve‑Souris fourniront, espérons le, des éléments décisifs dans cette recherche.
3.3.2.3. Les occurrences géographiques
33L’histogramme des occurrences géographiques toutes époques confondues (fig. 56b) est sans grande surprise. Plus l’on s’éloigne du défilé de Donzère et de la moyenne vallée du Rhône, moins les occurrences sont nombreuses, la composante locale étant mineure.
3.3.2.4. Les liens
34Les spectres (fig. 57) indiquent que des phénomènes évolutifs sensibles se sont déroulés durant tout l’âge du Bronze. Plusieurs régions sont affectées de mouvements inverses (fig. 57 et 56c). Les plus marquants opposent le Centre et le Languedoc, l’Ouest et l’Italie, la moyenne vallée du Rhône et l’Italie. Les deux premiers correspondent à une opposition géographique, par l’intermédiaire de la région donzéroise, ce qui rend le troisième plus surprenant. Les dynamiques locales du Nord et de la Provence semblent par contre indépendantes.
35L’absence de similitude entre les différents profils du lien, ou entre les profils des histogrammes des occurrences, indique la diversité des rapports régionaux concourant, durant la Protohistoire, à la mise en place des complexes industriels.
3.3.3 Le Bronze ancien
36La durée générale de cette phase ainsi que l’IRS du tableau des données, confrontés à la faible quantité de mobilier, indiquent que la série de la Baume des Anges est peut être un échantillon régional à la limite de la représentativité.
37Sur le graphe du lien, les rapports les plus soutenus s’opèrent avec l’Italie et dans une bien moindre mesure avec la Provence, mais il est actuellement impossible de déterminer s’ils affectent tout ou partie de la chronologie. Ces connexions italiques succèdent à leur relative discrétion durant le Chalcolithique, bien que des pièces de silex rhodaniennes (Beeching 1980/1b : 189) et des productions céramiques de la grotte de la Chauve‑Souris évoquent le groupe de Remedello. L’indépendance du Centre concerne notamment le plateau suisse et, malgré les comparaisons s’y référant, jette un voile sur la prééminence de la « Civilisation du Rhône » dont l’unité et l’impact durant tout le Bronze ancien doivent être révisés. Nous avons même indiqué qu’il était possible de voir dans des gobelets méridionaux l’origine de certaines tasses de type « Les Roseaux ». Tout comme le Centre, le Languedoc répond de façon indépendante avec un effectif conséquent. Les petits écarts à l’indépendance de la moyenne vallée du Rhône, qui se répètent ensuite, s’expliquent par l’insertion géographique du défilé de Donzère dans cette entité.
38La segmentation chronotypologique du Bronze ancien reste localement difficile à saisir. Pourtant, les gobelets à décors impressionnés et incisés ainsi que des jarres lisses indiquent l’existence d’un probable stade ancien. Ces décors trouvent des comparaisons directes dans des éléments chalcolithiques –classés dans le Tardiferrières par R. Montjardin (1976) et retrouvés en milieu fontbuxien dans la grotte de la Chauve‑Souris– ainsi que dans le Bronze ancien provençal de type « camp de Laure », les formes évoquant les mêmes complexes (Gutlierz 1975 : fig. 15 à 18 ; Gasco 1976 : fig. 3, nos 12 à 16 ; Courtin 1978).
39La chronologie des autres types céramiques reste à préciser. Les pots et jarres à cordons digités doivent beaucoup aux ensembles de Ferrières et de Fontbouisse (Coularou et alii 1980 : fig. 2 ; Coste, Gutherz 1973 ; Gutherz 1975 : fig. 25) et les gobelets non décorés renvoient au Languedoc où des prototypes existent aux mêmes époques dans la grotte des Chambres d’Alaric et à Saint‑ Côme‑et‑Maméjols (Aude : Duday, Guilaine 1980 : fig. 1, no 3 ; Gard : Roudil et alii 1974 : fig. 32, no 8).
40Dans le défilé de Donzère, le Bronze ancien ne constitue donc pas une période de renouvellement total des industries en rupture avec le substrat néo‑chalcolithique. Ces deux phases partagent la diversité géographique des manifestations typologiques et, dans le Midi, l’occupation des sites de hauteur. Mais les modalités de leur succession restent peu documentées.
41Le fait le plus marquant demeure toutefois l’insertion de l’ensemble de la Baume des Anges dans le complexe sud‑alpin du Bronze ancien, qui déborde largement la notion de « Civilisation de Polada ». Les répertoires mobiliers piémontais (Gambari, Venturino Gambari 1983 : 106‑107) et donzérois interdisent désormais de se référer directement à ce concept qui reste avant tout applicable aux zones situées à l’est du Piémont. Les rondelles perforées et décorées méridionales constituent un témoin discret, mais évident, des relations latérales sud‑alpines.
42Bien que peu nombreux, les objets en métal et le fragment de moule montrent la part qui revient à la métallurgie locale, dont le développement est avant tout imputable au groupe de Fontbouisse (Guilaine, Vaquer 1976 et 1979).
3.3.4 Le Bronze moyen
43Deux stades sont identifiables au Bronze moyen, un troisième, probable, ayant été rejeté dans le Bronze récent.
44Le Bronze moyen 1 est absent de la Baume des Anges mais le niveau 11b de la grotte de la Chauve‑Souris qui s’y rapporte nous autorise à faire quelques remarques générales. Le spectre du lien, bien que calculé sur 3 récipients et 8 occurrences (Vital 1984 : fig. 56d), est identique à celui du Bronze ancien de la Baume des Anges : aucun‑changement dans la dynamique évolutive n’intervient ; l’origine des formes de ce stade est à rechercher dans celles du début de l’âge du Bronze d’Italie, du Languedoc et de Provence.
45L’identification du Bronze moyen 2 repose sur le mobilier de la grotte du Hasard (couche 3B du Carrefour), dans le Gard. La composante régionale est forte avec la participation de techniques et thèmes décoratifs à base de cannelures, incisions et impressions, définissant le Proto‑Saint‑Vérédème (Roudil 1972). Ce fait se confirme à Donzère sur une série malheureusement extrêmement réduite et déficitaire face à l’IRS, avec une association spécifique de la composante locale (fig. 57). Les relations avec la moyenne vallée du Rhône et le Languedoc sont soutenues.
- 1 Depuis la rédaction de ce travail, une révision de la documentation rhodanienne rapportée au Bronze (...)
46Il est patent qu’au Bronze moyen 2, on assiste à une rupture majeure dans l’histoire des cultures protohistoriques rhodaniennes. La fréquence réduite des sites, transcrite par l’IRS pour l’ensemble de la phase, le renouvellement des formes et des décors des récipients, la fréquence croissante des objets métalliques, en sont les marqueurs les plus évidents. Aucune explication ne peut encore être fournie, mais il est notable qu’à l’inverse le développement ne s’interrompt ni au nord ni au sud des Alpes1.
3.3.5 Le Bronze récent
47Sous cette appellation figurent les mobiliers qui pourraient relever de la fin du Bronze moyen et du Bronze final 1, mais dont la séparation n’est actuellement ni démontrée ni possible. Cet ensemble vient pallier l’absence d’information jusqu’alors reconnue entre le Bronze moyen et le Bronze final 2.
48Les céramiques d’affinités septentrionales deviennent nombreuses avec un lien positif ; le secteur central (Franche‑Comté et Plateau suisse) en est le principal pourvoyeur. Il s’oppose au Languedoc, caractérisé par un déficit, et où le décor de type Saint‑Vérédème serait la seule production notable. Les rapports avec l’Italie et la composante locale sont également crédités d’un lien positif. Le poids des premiers est remarquable, malgré des effectifs inférieurs à ceux des régions septentrionales et malgré des fréquences décroissantes. Les productions locales sont identifiées à partir du motif décoratif de cannelures bouclées et excisées, et de formes spécifiques.
49Des relations à longue distance (Italie ; basse Autriche ; bassins rhénan, parisien et ligérien) attestées par quelques individus céramiques, dont les tessons apenniniques, apparaissent comme un fait nouveau qui se poursuivra jusqu’au début du Bronze final 3b.
50Tous les objets métalliques sont d’origine extérieure à la région, cinq trouvant des comparaisons dans le domaine septentrional et le sixième en Italie du Nord. Cette constatation rejoint celles effectuées à propos de la céramique, si l’on néglige l’absence de productions métalliques locales.
51Au travers de la diversification des formes céramiques et des décors et avec un IRS en progression, Le Bronze récent apparaît à Donzère comme le point d’origine de la dynamique évolutive du Bronze final, en rupture complète avec celle du Bronze moyen. Qu’en est‑il dans les régions limitrophes ?
52Dans le nord‑est de la France, C. Mordant (1982) invoque l’arrivée de nouvelles populations et de leurs industries, qui se développent sur place entre la fin du Bronze moyen et le Bronze final 2a. Ce dynamisme des groupes des vallées de l’Yonne et de la Seine trouve un parallèle dans le Jura (Pétrequin 1982) et selon P. Brun (1986 : 75) « c’est pendant le Bronze moyen qu’intervient un changement important dans le Bassin parisien ». Dans le sud‑ouest de l’Allemagne, l’explication selon laquelle le Bronze final 1 tirerait son origine d’une invasion des « peuples des Champs d’Urnes » a été rejetée par C. Unz (1973) et A. Beck (1980), qui s’appuient pour cela sur les points communs entre ces industries et celles de la « Civilisation des Tumulus du Bronze moyen ». En Languedoc, le renouvellement des formes et des décors céramiques est attribué à l’intrusion de petits groupes humains, assimilés par les populations autochtones qui conservent leurs rites funéraires traditionnels (Guilaine 1972 ; Roudil 1972 ; Duday, Guilaine 1975),
53Il est difficile de proposer une hypothèse explicative concernant l’important changement culturel du Bronze moyen. La méconnaissance de la structure des habitats et des nécropoles devra être surmontée avant de proposer des inférences socio‑économiques de valeur. La faiblesse du nombre des sites semble toutefois correspondre à un état de fait prompt à donner quelque poids à une hypothèse de désanthropisation.
54A partir du Bronze récent, les rapports avec l’Ouest et le Languedoc iront croissant, à l’image de l’IRS, et les connexions avec la moyenne vallée du Rhône s’imposeront. A l’inverse, l’Italie et les secteurs Nord et Centre verront leur influence décroître, la Provence restant indépendante de ces mouvements.
3.3.6 Le Bronze final 2
55Dans la moyenne vallée du Rhône, la partition du Bronze final 2 est malaisée et trois stades au moins se laissent individualiser. Seuls les Bronze final 2a et 2b ont été reconnus à la Baume des Anges, les vestiges qui pourraient relever du stade intermédiaire étant peu fréquents.
56Au Bronze final 2a, la présence des productions locales est extrêmement sensible. Les liens positifs et marqués avec le Nord et le Centre s’opposent au caractère négatif de ceux de la moyenne vallée du Rhône, et surtout du Languedoc et de l’Italie, bien que des relations à longue distance semblent lier cette dernière et les bassins de la Loire et de l’Allier par l’intermédiaire du bassin rhodanien. Les connexions vigoureuses avec le Nord et le Centre s’accompagnent de la progression du mode sépulcral des champs d’urnes dans les Alpes occidentales (Chabestan, Pérouges, grotte du Gardon). Mais nous devons nous garder de conclure à une quelconque relation de cause à effet, tant que dans ce mouvement l’impact des groupes padans, qui put être fort, n’aura pas été établi.
57Malgré de nombreuses occurrences, la moyenne vallée du Rhône est affectée d’un lien négatif mais cette caractéristique est à pondérer par l’importance de la composante locale. Aux formes régionales d’écuelles et de jattes à rebord caractérisant ce stade s’ajoutent les motifs décoratifs cannelés spécifiques des jarres à col et à rebord. Certaines affinités avec ceux du Bronze récent de la Baume des Anges, de la Baume Sourde à Francillon et du Proto‑Saint‑Vérédème de la grotte du Hasard doivent être soulignées, renforçant la netteté du lien positif des caractères typologiques locaux.
58Un certain nombre de pots et de jarres de fort volume, de finition peu soignée, est rapporté au Bronze final 2 et permet d’effacer la singulière absence de cette catégorie. Ils avaient jusqu’alors été rattachés soit à l’incontournable « Civilisation du Rhône », soit à l’imperceptible « transition Bronze‑Fer » sur laquelle nous reviendrons.
59Au Bronze final 2, les ateliers métallurgiques rhodaniens parviennent à une certaine indépendance, comme l’attestent les épingles du type de Donzère, les haches du type Allevard (Bocquet 1981 : fig. 6) et plus généralement les découvertes alpines (Bocquet, Lebascle 1976). On peut plus généralement considérer qu’au Bronze final 2a la moyenne vallée du Rhône atteint une certaine autonomie qui se perpétue durant le stade médian au travers d’associations céramiques spécifiques.
60Le passage au Bronze final 2b se traduit par l’introduction des types de récipients du groupe Rhin‑Suisse‑France orientale représentés dans quelques complexes purs (nécropole de Pérouges), marquée par des liens positifs avec le Nord et l’Ouest. Leur coexistence avec plusieurs formes du Bronze final 2a (écuelles à rebord surbaissées ou à base plate et jarres à col parallèle ou à rebord divergent, toutes à décor cannelé) clans la Baume Sourde, dans la grotte du Prével Supérieure et sur le site de plein air de Vénissieux, interdit d’imaginer une rupture majeure entre ces deux stades. La permanence du mode sépulcral en pleine terre à Pérouges va dans le même sens.
61Comme nous le soulignions récemment (Vital 1988), il est difficile de privilégier une quelconque interprétation de ces faits : apports par des groupes humains extérieurs parcourant la région ou plus probablement renouvellement partiel, sous leur influence, des décors et des types céramiques et de la symbolique qu’ils représentent. A l’appui de la seconde proposition l’on doit remarquer, et ceci est évident clans les ensembles et complexes du BF 2b de la grotte des Cloches (Vital 1986b), que l’introduction des nouvelles céramiques engendra de nombreuses variantes locales conservant les motifs décoratifs à base de cannelures, alors que quelques formes connues antérieurement s’ornaient de décors exécutés à l’aide de nouvelles techniques (peigne à dents fines). Cette observation, tout comme la présence d’une réelle production régionale (bols, écuelles et gobelets à épaulement) signalée par le lien positif de la MVR, pondèrent grandement le lien négatif de la composante locale, alors que la décroissance des rapports avec le sud des Alpes se confirme. Par contre, l’association et la similitude des liens positifs enregistrés avec la moyenne vallée du Rhône et le Languedoc attestent le parallélisme des influences enregistrées, ainsi que l’intrusion et l’unité des apports du Bronze final 2b, malgré leurs effectifs plus discrets.
3.3.7 Le Bronze final 3
62La méconnaissance des industries du Bronze final 3a est un état de fait généralisé dans le sud‑est de la France. Dans l’est du pays et sur le Plateau suisse, où il est bien attesté, il apparaît en continuité avec le Bronze final 2b. Tant que la limite chronologique terminale du Bronze final 2b restera inconnue dans la région, et en l’absence de complexes du Bronze final 3a, il demeurera impossible de déterminer si l’IRS élevé du BF 2b précède un IRS extrêmement réduit au BF 3a et correspond à une mutation sociale d’importance, comparable à celle du Bronze moyen, ou s’il s’applique à la tranche chronologique comprise entre le BF 2a et le BF 3b.
63En Languedoc, les complexes de mobilier du Bronze final 3b succèdent sans grand changement apparent à ceux bien moins nombreux du BF 3a (Dedet 1985).
64Les céramiques du Bronze final 3b trouvent des comparaisons nombreuses dans le Languedoc, l’Ouest et la moyenne vallée du Rhône, avec un lien positif. Le déficit des rapports avec le Nord et le Centre s’explique par la progression des précédents et par la relative absence de contexte dans ces deux régions. Aucune connexion ne semble par contre renvoyer aux céramiques d’Italie. L’indépendance de la Provence sur le spectre du lien indique une progression des occurrences depuis le Bronze final 2. Le fort lien négatif de la composante locale est amplement atténué par la vigueur de ceux de la moyenne vallée du Rhône et du Languedoc, qui signifient qu’une unité plus large était réalisée. Ces liens traduisent l’indépendance des centres du nord des Alpes et du plateau suisse, face à ceux des régions du bas Rhône qui offrent des produits spécifiques (jattes à panse carénée et segmentation indifférenciée).
65Dans la moyenne vallée du Rhône, les sites de Moras‑ en‑Valloire, Saint‑Uze (Drôme) et du Ranc‑Pointu n° 3 (Ardèche) définissent le Bronze final 3b avec leurs décors peints, ou en métopes, et avec leurs motifs anthropomorphes et zoomorphes, formant les pendants régionaux du Mailhacien L du Languedoc. Ces gisements servaient jusqu’alors à caractériser la « transition Bronze‑Fer » ; le réexamen de leurs documents, lié à l’étude de ceux de la grotte de la Chauve‑Souris, permet de fixer avec un peu plus de précision le cadre chronotypologique des périodes conduisant à l’âge du Fer.
66Le Bronze final 3b ne précède pas directement l’âge du Fer et le complexe de la couche 9 de la grotte de la Chauve‑Souris atteste, par la présence d’éléments céramiques tardifs (Vital 1984), l’existence d’un stade contemporain de celui qui prend place, en Languedoc, entre le Bronze final 3b et le faciès « suspendien » (de la grotte Suspendue à Collias, Gard : Coste et alii 1976) (Dedet 1978 et 1981 ; Dedet et alii 1978 ; Garmy 1979a et 1979c ; Py, Reynaud 1982).
67L’accroissement du nombre des vestiges et des sites conditionnant la progression de l’IRS sont à rapprocher de la vigueur de l’économie méridionale à l’âge du Fer, qu’ils semblent préfigurer. Les débuts de cette période sont encore peu documentés dans la région. D’après les découvertes de la sépulture primaire du tumulus 3 de Chabestan (Hautes‑Alpes), il semble qu’aucune rupture majeure n’affecte l’évolution des industries céramiques. Mais les informations dans ce domaine sont à elles seules insuffisantes pour mesurer les changements culturels et d’autres observations doivent être prises en compte. Comment interpréter par exemple l’occupation, puis l’abandon, des sites de hauteur au début puis à la fin du Bronze final 3b, ainsi que le retour aux rites de l’incinération et de l’inhumation sous tumulus ? Ces manifestations sont‑elles synchrones ? S’il ne peut être actuellement répondu à ces interrogations avec certitude, faute de fouilles amenant de nouveaux documents, elles indiquent que la recherche ne peut se satisfaire du seul critère d’analyse représenté par le classement typologique des céramiques.
3.4 Perspectives
68Au terme de ce travail, il est possible de dégager quelques perspectives.
69Le classement typochronologique des industries de la Baume des Anges aboutit à des conclusions importantes concernant la connaissance des assemblages typologiques et leur dynamique évolutive. La recherche détaillée des occurrences chronologiques et géographiques s’avère une conception particulière de l’analyse typologique, au pouvoir heuristique certain. Elle bénéficie en outre de l’efficience de la métrique du Khi2 et de la distance du lien qui sous‑tendent nos raisonnements.
70Le caractère parfois approximatif de nos résultats, dû aux conditions de récolte des vestiges et à l’état de la documentation de certains contextes de référence, réclame une approche identique sur l’ensemble des séries alpines, ainsi que la constitution de complexes de référence régionaux par la poursuite des fouilles. Mais l’investissement en temps nécessaire à la recherche et à l’étude de ces assemblages industriels, et de ceux des cadres de comparaison, nécessite une systématisation. Sa forme la plus aboutie nous paraît être la construction d’une base de données des types céramiques, actuellement en projet, qui permettrait la pratique automatique des tableaux d’occurrences et des calculs de distances sur des transects géographiques.
71Le gain en finesse du découpage chronologique, qui devrait sanctionner ce projet, demeure une condition préalable à une approche archéologique spatiale des sociétés de l’âge du Bronze.
72Lyon, mai 1987.
Notes
1 Depuis la rédaction de ce travail, une révision de la documentation rhodanienne rapportée au Bronze moyen nous a conduit à proposer un nouveau découpage, tripartite, de cette période (Vital 1989). Nous avons également opéré une révision de la chronologie des incinérations Bronze final de la nécropole de Champ‑Crose à Chabestan (Hautes‑Alpes : cf. § 2.6.3.1) (Vital, à paraître). Enfin, l’étude des séquences protohistoriques des sites du Cirque de Choranche (Isère‑Vercors) vient de révéler de nouvelles données typogéographiques (Vital, Bintz et alii, à paraître).
Table des illustrations
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Légende | FIG. 54a – Carte de répartition des céramiques à motifs de cannelures bouclées, du Bronze moyen au Bronze final 2a. |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/36235/img-1.jpg |
Fichier | image/jpeg, 97k |
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Légende | FIG. 54b – Carte de répartition des écuelles surbaissées du Bronze final 2. |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/36235/img-2.jpg |
Fichier | image/jpeg, 49k |
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Légende | FIG. 55 – Cadre géographique de référence et découpage régional. |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/36235/img-3.jpg |
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URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/36235/img-4.jpg |
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Légende | FIG. 56 – Histogramme du nombre de récipients (A) ; fréquences des occurrences géographiques (B), géographiques et chronologiques (C). Le découpage géographique est le suivant : secteurs nord (N), central (C), ouest (O), médio‑rhodanien (MVR), italien (I), languedocien (L), provençal (P) et composante locale (Loc.) |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/36235/img-5.jpg |
Fichier | image/jpeg, 96k |
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URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/36235/img-6.jpg |
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Légende | FIG. 57 – Spectres du lien des industries céramiques de la Baume des Anges. Le découpage géographique est le suivant : secteurs nord (N), central (C), ouest (O), médio‑rhodanien (MVR), Italien (I), languedocien (L), provençal (P) et composante locale (Loc.). |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/36235/img-7.jpg |
Fichier | image/jpeg, 98k |
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URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/36235/img-8.jpg |
Fichier | image/jpeg, 2,3k |
© Éditions de la Maison des sciences de l’homme, 1990