1Les personnages en terre cuite fabriqués durant la première période de production des ateliers du Centre présentent la particularité d’avoir été exécutés à partir de plusieurs valves pour un seul sujet, ce qui permettait d’obtenir une grande diversité de poses, de la plus simple à la plus complexe, à partir d’un seul corps. Les coroplathes de l’époque ne reculaient pas devant la difficulté et les personnages pouvaient aussi bien être représentés debout qu’assis ou à califourchon, etc., tandis que les bras, moulés à part, s’orientaient différemment selon la fantaisie du modeleur ou suivant le sujet voulu ; de même, plusieurs personnages ou un personnage et un animal pouvaient être réunis sur un même socle. Il en ira tout autrement lorsque le succès transformera cette production personnalisée en une production accélérée, industrielle, stéréotypée.

2Il est donc difficile, dans ces conditions, de prétendre reconnaître les sujets représentés à cette époque, uniquement à partir des moules ; seules des figurines intactes peuvent nous renseigner, mais combien le sont ? De plus, beaucoup demeurent énigmatiques, principalement lorsqu’elles faisaient partie d’un ensemble dont elles demeurent le seul élément retrouvé. Il ne faut pas s’attendre à mieux dans des remblais formés de rebuts de cuisson. Les quelques groupes intacts connus ont été retrouvés dans des tombes, tel celui de l’homme et du bouc de Salzbourg (Heger 1974 : n^o 57) ou ceux de chevaux en couples trouvés au même endroit (Heger 1974 : n^os 58 et 117) et en Bourgogne (Rouvier‑Jeanlin 1986 : n^o 323), ou encore d’un gladiateur attaqué par un fauve (Rouvier‑Jeanlin 1986 : n^o 252).

3.1. Les archétypes

3.1.1. Liste des archétypes (A)

3A 86.554 : jambe musclée décorée (de lanières ?).A 86.570 : cucullatus.
A 86.574 : torse masculin recouvert d’une draperie en pointe.
A 86.841 : fragment de jambe musclée.
A 86.1002 : torse masculin.
A 86.1003 : grande main creusée.
A 86.1004 : trois grands fragments de jambes.

3.1.2. Commentaire typologique

4Une dizaine d’archétypes retrouvés à Bourbon‑Lancy indiquent une forte production de personnages, et de nombreux moules de membres isolés prouvent la volonté de diversifier les poses et de les compliquer.

5Parmi ces archétypes on note une pièce particulièrement curieuse : le n^o 86.570 comprend la partie inférieure d’un personnage vêtu d’une tunique plissée à moitié recouverte par les deux pointes d’un survêtement (fig. 33, 12). Le revers n’est pas travaillé. Nous avons immédiatement fait le rapprochement avec une figurine trouvée à Poitiers (Vienne) que nous hésitions à classer dans la production gallo‑romaine tant elle paraissait archaïque (Rouvier‑Jeanlin 1986a : n^o 268 bis), jusqu’au jour où nous découvrîmes une série de figurines du même type dans le matériel des fouilles gallo‑romaines inédites d’Argentomagus (Creuse). La découverte de Bourbon‑Lancy vient confirmer la fabrication dès le i^er s. de ces curieuses figurines dont l’une des caractéristiques est de se ressembler toutes sans jamais être identiques ; comme elles sont moulées, cela implique l’utilisation d’un assez grand nombre de moules différents et, par conséquent, cela veut dire que ce sujet a rencontré beaucoup de succès. D’après les pièces complètes nous voyons que le personnage de Bourbon‑Lancy est un cucullatus ; non pas un cucullatus comme les fabriquait Pistillus, non, c’est un adulte nanifié au corps enseveli dans une chasuble dont l’ouverture sur le devant est maintenue fermée dans sa partie supérieure par des brandebourgs et dont les pointes inférieures descendent parfois jusqu’à toucher les pieds. Aux bras se substituent des moignons, et ce que nous envisagions comme un accident de fabrication pour la figurine de Poitiers, se répète en réalité à chaque fois1, dans une simplification extrême qui leur donne un faux air d’idole cycladique !

6Des radiographies effectuées par le LRMF ont apporté la preuve que des archétypes qui paraissaientavoir été exécutés en pleine terre étaient creux à l’intérieur. Etait‑ce parce que durant la fabrication le coroplathe entourait de terre une âme faite dans une matière qui disparaissait lors de la cuisson ou bien l’archétype était‑il fabriqué en deux parties, collées ensuite, peut‑être issues de valves de moule ? Dans le cas du n^o 86.574, il ne reste que la partie antérieure, très épaisse et décollée, de l’archétype. Ce dernier représente un torse nu recouvert d’un court vêtement pointu plissé en V, au sexe masculin modelé ; le bras droit est collé au corps et la main s’étale sur la cuisse juste au‑dessus de la cassure, ce qui nous empêche de savoir si les jambes étaient complètes ou devaient être moulées à part (fig. 17, 1 et 32, 4). En revanche, il est certain que la tête et le bras gauche étaient modelés séparément et il est possible que la valve de moule n^o 86.793 (fig. 32, 5) corresponde à ce bras : la taille est la même et la forme des doigts très courts est de facture identique ; cependant, une légère dépression circulaire au niveau du poignet peut indiquer le bas d’une manche alors que le torse est nu ; mais peut‑être est‑ce attacher trop d’importance à un détail qui ne devait pas tellement préoccuper les modeleurs. Le vêtement est identique, par la forme et par le rendu du plissé, à celui du soldat cavalier retrouvé en plusieurs exemplaires, dont un à Saint‑Pourçain‑sur‑Besbre (Rouvier‑Jeanlin 1972 : n^o 585) et un autre aux Bolards près de Nuits‑Saint‑Georges (Rouvier‑Jeanlin 1986 : n^o 256) ; cependant, la direction verticale de ce qui reste des cuisses s’oppose à la possibilité d’asseoir ce personnage sur un cheval. Les coroplathes ont néanmoins pu le transformer en serviteur de soldat cavalier comme à Saint‑Bonnet‑Yzeure (d’après la reconstitution Vertet 1983 : fig. 7) ou l’associer à un autre animal sur un socle commun comme à Salzbourg (Autriche), ou même lui faire subir maintes transformations auxquelles nous ne pensons pas encore. On imagine aisément le nombre important de valves de moule exigées pour la fabrication de ces groupes qui illustrent parfaitement, au même titre que le Tireur d’épine, la volonté de personnalisation des figurines par les coroplathes du i^er s.

7Le torse masculin n^o 86.1002 (fig. 17, 2), autre archétype qui, à l’inverse du précédent, est en terre pleine, ne présente pas d’indices suffisants permettant de l’identifier avec certitude. Sa tête et ses bras étaient moulés séparément ; quant aux jambes, il ne subsiste que le haut des cuisses dont la direction indique une station verticale, avec un vide entre les jambes comme on l’observe dans certaines productions précoces. Le torse doit être recouvert d’un vêtement très collant dont on ne distingue plus, au‑dessus des cuisses, qu’une bande horizontale de plis ronds juxtaposés et légèrement bouffants2 ; on retrouve ces derniers sur différents moules (Rouvier‑Jeanlin 1972 : n^o 668) ou figurines de personnages debout dont on ne sait s’ils sont soldats, lutteurs ou serviteurs.

8Il est également bien difficile de savoir à qui appartenait la main n^o 86.1003 (fig. 32, 2) ; on ne peut qu’observer sa grande taille et le fait qu’elle soit tenue creusée. Il en va de même pour les fragments de jambes, sans originalité particulière, dont une, cependant, est curieusement décorées de sortes de lanières (?) disposées sans ordre (fig. 32, 8).

9Avant de quitter le domaine des archétypes, il est bon de rappeler que chacun de ceux décrits ci‑dessus présente la particularité qui les distingue de simples figurines, à savoir une ligne continue ou discontinue creusée qui symbolise la délimitation des différentes pièces des futurs moules.

3.2. Les personnages debout

3.2.1. Liste des moules (M) et figurines (F)

10M 86.388 : fragment antérieur d’un personnage nu ?
M 86.795 : pieds joints.
M 86.805 : fesse et jambe droite.
M 86.810 : jambe.
M 86.823 : personnage vêtu d’une courte tunique.
M 86.826 : fragment d’un dos drapé.
M 86.837 : jambe et pied droit.
F 86.609 : fragment postérieur d’une tunique de cucullatus.
F 86.863 : fragment postérieur d’un lutteur ?
F 86.865 : fragment antérieur d’un couple.
F 86.986 : fragment d’un personnage indéterminé.
F 86.987 : pied seul sur un socle complet. Ex voto ?
F 86.996 : partie inférieure d’un personnage féminin.

3.2.1.1. Fragments antéro‑supérieurs

11M 86.785 : personnage avec voile ou cucullus.
M 86.793 : valve de moule du dessus d’un bras gauche.
M 86.921 : haut de torse avec cavité (pour tête rapportée ?).
F 86.160 : pèlerin avec cape.
F 86.988 : torse féminin.

3.2.1.2. Fragments postéro‑supérieurs

12M 86.147 : A. personnage féminin ?
M 86.147 : B. personnage ?
M 86.342 : personnage vêtu, coiffure en diadème à cupules.
M 86.395 : torse drapé ?
M 86.724 : dos voûté, vêtement avec cucullus ?

3.2.2. Commentaire typologique

13Parmi les moules qui servaient à fabriquer les personnages représentés debout, le n^o 86.823 (fig. 21, 8 et 33, 8) est remarquable par le mouvement dynamique du corps et des plis de la tunique qui le moulent ; mais ici, contrairement aux n^os précédents, seuls les bras sont à ajouter ; la tête, ou du moins ce qu’il en reste, laisse perplexe : nous croyons y reconnaître une tête de gladiateur casqué, ce qui est compatible avec le mouvement pivotant du corps qui rappelle celui d’autres gladiateurs trouvés à Vichy (Allier) mais ne correspond pas au type de vêtement porté. Du moins en ce qui concerne la partie efféminée de la tunique, car le buste est tout à fait identique, jusqu’à la forme de l’emplacement réservé aux bras qui seront rapportés, aux moules de lutteurs (?) trouvés au Champ‑Lary près de Toulon‑sur‑Allier (Rouvier‑Jeanlin 1972 : n^os 572‑573).

14A notre grand étonnement, il n’y a pas le moindre fragment de moule d’un couple enlacé –ce sujet pourtant si répandu dès le i^er s.–, tout juste un fragment de figurine (fig. 33, 9). A moins que la partie supérieure du dos d’un couple de type inconnu soit identifiable dans le fragment de la pièce de moule n^o 86.826 (fig. 33, 5). Mais, ici, le bras externe du personnage sort nu du vêtement drapé, ce qui ne se voit jamais dans aucun des types connus jusqu’à présent, où l’homme et la femme, lorsque tous les deux sont vêtus, ont le dos entièrement drapé ; seul leur bras interne sort des plis pour enlacer le cou de l’autre. Il peut donc tout aussi bien s’agir d’un personnage drapé isolé (Rouvier‑Jeanlin 1972 : n^o 549). Quant au fragment (fig. 21, 7 et 33, 9), il ne reste que la portion antérieure amputée des têtes et d’une partie du corps situé à gauche pour le spectateur. Malgré cela, nous pouvons affirmer que ce corps appartient à une femme : en effet, lorsque le couple est représenté habillé, le bras de la femme est toujours dénudé alors que celui de l’homme est toujours dissimulé dans les plis de la toge. La femme est donc à droite de l’homme dans ce cas, tandis qu’elle est plutôt située à sa gauche (à droite pour le spectateur) lorsque dans le couple –copié sur le groupe Capitolin– la femme est nue. Le type du couple de Bourbon‑Lancy ne correspond à aucun autre rencontré jusqu’à présent. Tout au plus pouvons‑nous dire que le bras de la femme tenu à l’horizontale (sur d’autres couples le bras est disposé en biais), ainsi que le pouce écarté des autres doigts réunis sont des caractéristiques qui se retrouvent sur des figurines de Chalon‑sur‑Saône, Langres, Trêves et Worms.

15Un autre sujet très populaire dès le i^er s., le ou les personnages enveloppés dans une grande cape à capuchon (cucullus), est aussi quasi absent, seulement représenté par deux fragments de figurines en plus de l’archétype décrit plus haut. Le premier (fig. 41, 14), dont il ne reste que la partie antéro‑supérieure de la cape fermée en un double liseré vertical, avec une pièce de tissu torsadé apparaissant dans l’encolure a été trouvé en stratigraphie, dans une couche datée de la fin du i^er s.‑début du ii^e ; cette datation correspond parfaitement à ce type de cucullatus dont la facture, si elle est très éloignée de celle produite plus tard par Pistillus pour les siens, est au contraire toute proche de celle des pèlerins trouvés aux Sources de la Seine (Deyts 1975 : 22). D’autres cucullati de ce type ont été retrouvés en Bourgogne, dont un fragment identique, la tête couverte du capuchon, dans les fouilles des ateliers de Gueugnon (Rouvier‑Jeanlin 1985 : n^o 276 bis) et un autre trouvé aux Bolards (Nuits‑Saint‑Georges), (Musée archéologique de Dijon n^o 6010(88), inédit). Le second fragment est très réduit (fragment postérieur du bas de la tunique).

16Il serait passionnant de retrouver dans leur intégralité des personnages dont nous devons, hélas, nous contenter des fragments énigmatiques suivants. Du premier il ne reste que la partie supérieure du revers : c’est un homme aux bras repliés et collés au torse, avec un ornement sphérique fixé entre les omoplates (fig. 33, 6) qui rappelle le nœud dorsal des lutteurs fabriqués dans les ateliers de Vichy. Un autre fragment pourrait appartenir à un personnage debout tenant un panier ou une lampe à bout de bras (fig. 33, 4).

17Que représentaient les fragments de moules de personnages n^o 86.147 (fig. 33, 1), n^o 86.342 (fig. 21, 5 et 33, 2) à la coiffure en diadème très rustique décoré de cupules et n^o 86.785 (fig. 33, 3) avec un capuchon ?

18Le fragment n^o 86.921 faisait‑il partie d’un moule servant à fabriquer des personnages avec un creux à la place du cou pour y adjoindre ensuite une tête modelée à part, comme pour le personnage allongé ou pour celui qui lit assis dans un fauteuil, dont il a été retrouvé un fragment de figurine à Alésia (Rabeisen, Vertet 1986 : n^o 194), trouvés à Colchester (Gonzenbach 1986 : fig. 38, 1‑10) ? D’ailleurs, un autre fragment de moule de Bourbon‑Lancy pourrait représenter le bas d’un fauteuil semblable et accréditerait cette hypothèse. Et pourquoi ne pas y rattacher aussi la valve de moule postérieure n^o 86.724 (fig. 33, 10) qui représente un dos voûté enveloppé dans un vêtement drapé avec un capuchon rabattu ? Les bras étaient moulés séparément. Ce type correspond assez bien aux représentations de grotesques comme ceux de Colchester.

19Enfin, peut‑on considérer comme un ex‑voto le pied qui repose sur un socle prévu pour lui seul (fig. 33, 11)?

3.3. Les personnages assis

3.3.1. Le tireur d’épine

20Nous commencerons par le personnage assis illustrant le mieux la complexité de certaines poses puisque sa confection réclamait plus de dix pièces : le Tireur d’épine ou Spinario. Pourquoi le Tireur d’épine assis sur un rocher a‑t‑il connu si longtemps la célébrité ? Conçu en Grèce plusieurs siècles avant n. è., copié en Italie, en marbre ou en bronze, on le retrouve en Gaule romaine parmi les premiers modèles en terre cuite, comme le prouve son importante présence à Bourbon‑Lancy. Son succès ne se dément jamais. Qui est donc ce personnage ? Fils de divinité ou simple sujet de genre ? (Rouvier‑Jeanlin 1972 : 69‑70 ; Boekel 1987 : 158‑161). Bien mieux, l’unanimité sur la détermination de son sexe n’est pas encore faite ; reconnu comme garçon dans la plupart des cas, on le pense fille dans d’autres (Rüger 1980 : n^o 180).

21A Bourbon‑Lancy, aucun Tireur d’épine complet n’a été retrouvé, il n’est donc pas possible de faire entrer les nombreux éléments dans une typologie précise. Une telle typologie n’ayant pas encore été créée, nous en proposons une qui pourra servir de premier cadre, avec un élargissement toujours possible des types et groupes au fur et à mesure de nouvelles découvertes.

3.3.1.1. Typologie

■ Types

22Type I – Le Spinario, la jambe droite repliée sur la cuisse gauche, est nu.
Type II – Le Spinario, la jambe droite repliée sur la cuisse gauche, est vêtu.

■ Groupes

23Groupe A – La tête est nue.
Groupe B – La tête est recouverte d’une coiffe.

3.3.1.2. Liste des archétypes (A), moules (M) et figurines (F)

■ Tireur d’épine

24A 86.337 : jambe pliée.
M 86.312 : revers, personnage assis avec mèches en catogan.
M 86, 340 : identique, il ne reste que la tête.
M 86.791 : face, personnage assis de sexe masculin.
M 86.358 : main droite.
M 86,779 : côté d’une jambe pliée.
M 86.798 : côté d’une jambe pliée.
M 86.825 : dessous d’une jambe pliée.
M 86.944 : dessous d’une jambe pliée.
F 86.866 : pied complet.

■ Socle en forme de rocher

25A 86.654 : fragment, Archétype ?
M 86.905 : dessus du rocher.
F 86.626 : dessus du rocher.
F 86.1005 : fragment.

3.3.1.3. Commentaire typologique

26Il est tout à fait vraisemblable que le grand fragment de valve de moule antérieure n^o 86.791 (fig. 32, 3) ait servi à la fabrication de Tireurs d’épine ; en effet, la jambe droite est pliée à angle droit dans l’axe du corps, et non en biais comme chez les cavaliers, et dans le minuscule fragment du côté gauche qui demeure on reconnaît la partie verticale de la jambe volontairement sectionnée à sa naissance afin d’y adjoindre une jambe moulée à part ; bien que la section soit ici plus verticale, on peut comparer cet exemplaire à l’archétype de l’atelier de Saint‑Pourçain‑sur‑Besbre et au moule de Toulon‑sur‑Allier, tous deux conservés au MAN (Rouvier‑Jeanlin 1972 : n^os 625 et 626), tous deux asexués. Deux détails du moule de Bourbon‑Lancy ont leur importance : les orteils y sont dessinés et, surtout, un sexe masculin est modelé. Si ce personnage est bien un Spinario, il était garçon à Bourbon‑Lancy !

27Il est également fort probable que les valves de moules postérieures n^os 86.312 et 86.340 (fig. 21, 4) appartiennent à cette catégorie, malgré la facture inhabituelle de la coiffure ; mais nous connaissons d’autres exemplaires dont la pose correspond tout à fait à celle du Tireur d’épine et dont la coiffure est encore bien plus insolite ; tel celui du musée de Brive par exemple (inédit), dont la tête est recouverte d’un capuchon solidaire d’un vêtement qui recouvre tout le dos et qui ne peut donc pas être le résultat d’un montage fantaisiste à partir d’une valve de moule sans tête comme il en existait parfois.

28Si la quasi‑totalité des Tireurs d’épine reposait sur un rocher, certains étaient assis sur un socle cubique (recouvert d’un coussin ?) comme celui trouvé à Chalon‑sur‑Saône (Rouvier‑Jeanlin 1986 : n^o 280) ou à Clermont‑Ferrand (Rouvier‑Jeanlin 1972 : n^o 660) et il est possible que parmi les nombreux moules de socle trouvés à Bourbon‑Lancy certains aient servi à cet usage. A l’inverse, le socle en forme de rocher, déjà emprunté au Mercure assis romain, a pu accueillir d’autres personnages ; si la figurine dessinée par Tudot (Tudot 1860 : pl. 71) était bien solidaire du roc, elle en serait une parfaite illustration et quelques moules de Bourbon‑Lancy pourraient prétendre à la même destination.

3.3.2. Autres

3.3.2.1. Liste des moules (M)

29M 86.338 : revers d’un homme nu, sans tête ni bras.
M 86.792 : dessus d’une jambe.
M 86.796 : dessous de la jambe droite et des fesses.
M 86.800 : deux jambes et une partie d’un vêtement.
M 86.815 : jambe fléchie.
M 86.884 : fragment.

3.5.2.2. Commentaire typologique

30La pièce de moule postérieure n^o 86.338 (fig. 32, 6), qui est intacte, nous permet d’observer qu’il fallait compléter ce personnage nu, représenté assis, par une tête et des bras (mais les jambes sont comprises) comme nous l’avons observé sur les archétypes. Ici malheureusement, aucun détail ne permet une identification et il en va de même pour quelques autres fragments de moules.

3.4. Fragments indéterminés

3.4.1. Liste des moules (M) et figurines (F)

31M 86.166 : torse ?
M 86.389 : ?
M 86.393 : ?
M 86.399 : fragment de jambe ?
M 86.721 : fragment de jambe ?
F 86.989 : fragment de buste ?

3.5. Les bustes féminins

3.5.1. Typologie

3.5.1.1. Types

32Type I – Cheveux relevés en diadème :
– a: haut;
– b : large.

33Type II – Cheveux relevés en larges bandeaux gonflés (toupets).

34Type III – Cheveux en bandeaux :
– a : plats ;
– b : élevés.

35Type IV – Cheveux tirés vers le sommet de la tête et divisés en deux coques.

36Type V – Cheveux sans apprêts.

37Type VI – Cheveux nattés autour du visage.

38Type VII – Cheveux tirés vers le sommet en fines nattes.

3.5.1.2. Groupes

39A – Avec boucles.
B – Avec rouleaux :
– 1 : sur les côtés ;
– 2 : registres superposés ;
– 3 : registres concentriques.
C ‑ Crêpés.
D – Avec double volutes.
E – Sommés d’un nœud de cheveux ou corymbe.
F – Sommés d’un Stéphané.
G – Avec ornement décoratif :
– 1 : sur les cheveux ;
– 2 : en dehors des cheveux.
H – Sans ornement.
J – Avec couronne tourelée.
K – Avec chignon sommital.
M – Avec nattes.

3.5.1.3. Sous‑groupes

40a – Oreilles apparentes.
b – Boucles d’oreilles.
c – Oreilles cachées.

3.5.1.4. Revers

41a – Avec chignon.
b – Sans chignon.
c – Cheveux tirés vers le sommet.
d – Cheveux remontés en grosses mèches :
– 1 : non torsadées ;
– 2 : torsadées ou tressées.
e – Avec une large natte plate.
f – Cheveux en longues mèches ondulées :
– 1 : jusqu’à la nuque ;
– 2 : plus bas que la nuque.
g – Cheveux en courtes mèches.
h – Avec des rouleaux.
i – Avec des anglaises.
j – Entièrement spiralé.
k– Entièrement lisse.

3.5.2. Liste des moules (M) et des figurines (F)

3.5.2.1. Type I

42Les cheveux sont relevés en diadème.

■ Groupe B

43Le diadème est formé de rouleaux ou de mèches stylisées disposés en registres superposés.

■ Groupe G

44Avec un ornement décoratif.

3.5.2.2. Type II

45Les cheveux sont rassemblés en larges bandeaux gonflés ou toupets.

■ Groupe C

46En toupets crêpés,

3.5.2.3. Moules de plastrons

4786.952 : partie gauche d’un buste plat.
86.953 : fragment d’épaule avec col ou collier.
86.954 : fragment avec plis.
86.899 : drapé, avec torque.

3.5.2.4. Figurines

■ Têtes

4886.553 : fragment antérieur. Très grand modèle.
86.555 : fragment supérieur de 86.553.
86.557 : revers de coiffure.
86.562 : face antérieure ; chevelure en bandeaux ondés.
86.563 : face antérieure ; enfant ?
86.566 : revers de coiffure flavienne.
86.664 : fragment de coiffure ?

■ Plastrons

4986.498 : fragment de plastron plat avec bande en biais.
86.613 : fragment de plastron avec 3 plis ronds en biais.
86.636 : fragment de revers.
86.642 : épaule gauche avec 2 gros plis ronds obliques.
86.676 : fragment d’épaule droite identique à 86.934.
86.934 : vêtement à encolure, plis sur les côtés.
86.965 : fragment d’un grand plastron plat avec drapé festonné.
86.968 : fragment de plastron plat avec plis ronds.
86.969 : fragment de plastron plat avec plis ronds.

3.5.2.5. Médaillons

5086.324 : fragment de médaillon

3.5.3. Commentaire typologique

3.5.3.1. Type I

51La coiffure en haut et large diadème formé de plusieurs registres étagés de rouleaux ou de mèches stylisées a été abondamment diffusée en terre cuite dans toute la Gaule romaine et nous la trouvons interprétée de diverses manières à Bourbon‑Lancy, avec des variations qui jouent tant sur le nombre de registres –de un à quatre– que sur la représentation des mèches ou des rouleaux, voire des ornements. Cependant, au fil des variations un critère demeure, celui de la forme générale de la tête complète qui s’inscrit dans un quart de cercle disposé pointe en bas ; le visage seul s’inscrit plutôt dans un losange dont la partie supérieure épouse la ligne de la racine des cheveux. Les yeux sont grands, exorbités et soulignés par le fin liseré des paupières. Le nez est long et pointu ; les lèvres sont apparemment minces alors qu’en réalité la lèvre supérieure est écrasée sous le nez et que son échancrure centrale renforce l’effet de profondeur de la gouttière nasale fort courte. Dans cette série de coiffures en diadème, toutes les oreilles sont découvertes et présentées de face, donc très décollées du crâne.

■ Type Bourbon‑Lancy n^o 1 (fig. 22, 1‑4)

52Une valve de moule antérieure de ce type a pu être reconstituée presque dans son intégralité. La coiffure, très volumineuse, comporte quatre registres superposés : le premier, à partir de la racine des cheveux, est composé de mèches incurvées parallèles disposées en oblique symétriquement de part et d’autre du centre du front puis, à partir de là, de taille croissante. Au‑dessus, un rang de petits rouleaux verticaux stylisés précède un registre de mèches disposées en oblique de gauche à droite sur la totalité de la largeur ; le registre supérieur reprend la disposition du premier.

53Le buste, très plat, est recouvert d’une tunique dont la partie centrale, délimitée par de fines bandes verticales, est composée de plis en fort relief qui forment des V emboîtés ; des plis incurvés s’étagent en oblique sur les épaules, de part et d’autre du plastron central. Un torque plat, façonné à la manière du métal articulé et dont chaque extrémité se termine en une boule perforée sur le devant, épouse le décolleté rond du vêtement. La disposition des plis est à rapprocher de celle d’un moule signé piso conservé au MAN (Rouvier‑Jeanlin 1972, n^o 832) ; là se limite la ressemblance puisque le buste de piso est de plus petite taille et que son collier est constitué de perles rondes ; cependant, il faut garder en mémoire que des moules de piso ont été retrouvés à Bourbon‑Lancy. Dans les toutes récentes fouilles d’un four situé à Rennes (Saint‑Louis), il a été mis au jour un plastron de buste encore plus proche que celui de piso, puisque le cou est également orné d’un torque ; toutefois, les boules terminales ne sont pas percées (Joubeaux 1988 : 63, n^o 102).

■ Type Bourbon‑Lancy n^o 2 (fig. 23, 1)

54Trois autres fragments de valves antérieures de moules (qui comprennent chacun la partie droite de la tête) sont très proches du buste précédent ; plus grands, la différence réside surtout au niveau du registre supérieur qui est composé de petits rouleaux verticaux, aplatis, dont les mèches sont indiquées par des incisions obliques. C’est cette petite différence qui va cependant permettre de reconnaître en un buste complet (fig. 23, 2) trouvé à Bern‑Rossfeld (Suisse) une épreuve sortie d’une de ces valves de moule et de là à pouvoir les dater. En effet, ce buste a été trouvé dans une tombe dont le contexte appartient à la période Trajan‑Hadrien (Gonzenbach 1986 : 26‑27, pl. 96‑3). En outre, il permet d’attribuer à ce même type un fragment de valve antérieure de moule qui représente la partie droite du plastron (à gauche pour le spectateur) recouvert d’un vêtement plissé sur chaque épaule, ainsi que de nombreux socles cubiques isolés dont la petite taille nous paraissait incompatible avec celle de ces grands bustes. Encore mieux, grâce à cette figurine nous avons pu retrouver les moules qui ont servi à confectionner les revers de ce type de buste, dont un qui est signé gen, signature propre à Bourbon‑Lancy (voir le type suivant) ; revers qui se caractérise par une coiffure en diadème entièrement lisse, seulement ponctuée sur la nuque par un minuscule chignon plat, triangulaire. Nous avons là un pur produit de Bourbon‑Lancy qui, jusqu’à présent, détient l’exclusivité de cette signature et de ce type de coiffure.

■ Type Bourbon‑Lancy n^o 3 (fig. 23, 3 et 31, 1)

55Ce type est représenté par une valve antérieure de moule qui comprend le côté droit du visage et de la coiffure ; cette dernière est semblable à la précédente mais ne comporte que trois registres superposés. Une signature est tracée en creux au revers : ge.. pour gen que nous venons de rencontrer dans le type précédent. On peut raisonnablement penser que ces deux types ont eu un archétype commun et que, pour une raison indéterminée, le modeleur a été amené ou a souhaité supprimer le registre supérieur de la coiffure antérieure ; on peut également supposer que les valves postérieures de moules représentant des coiffures lisses étaient utilisées indifféremment pour ces deux types.

56D’autres petits fragments de moules sont semblables par la forme de la coiffure mais présentent des différences dans la disposition et la stylisation des mèches de chaque registre ; ils ne sont mentionnés là que pour montrer l’extrême diversité de l’interprétation d’une même coiffure par les potiers de Bourbon‑Lancy. Parmi eux, certains peuvent entrer dans le type n^o 4 (inv. 86.812) tout proche du type n^o 3.

■ Type Bourbon‑Lancy n^o 5 (fig. 31, 2)

57Tout en restant dans le même type de coiffure en diadème à registres, un autre groupe (B cb) se différencie déjà par une plus petite taille. La coiffure se situe entre celle mise à la mode par les élégantes de la fin du règne de Néron, mais toujours en faveur à l’époque flavienne, et celle interprétée par Piso, que nous verrons plus loin (type n^o 7). De la première, qui était constituée de trois rangs concentriques de rouleaux juxtaposés –et illustrée par un buste du MAN (Rouvier‑Jeanlin 1972 : n^o 772) ou encore par un buste en terre cuite trouvé près de Tulle (Rey 1986 : n^o 9)–, on retrouve bien ici les trois rangs superposés, mais qui ne sont plus tous d’égale hauteur puisque le registre supérieur est plus important ; il faut aussi remarquer que chaque rangée n’est pas formée de petits rouleaux juxtaposés, mais se présente plutôt comme un rouleau continu, Le sens des mèches est certainement rayonnant pour les rangées inférieures, mais est peut‑être totalement oblique de gauche à droite dans la rangée supérieure, comme le laisse supposer la moitié droite qui subsiste. C’est par cette disposition de mèches que cette coiffure s’apparente au type n^o 7 qui ne comporte que deux niveaux au lieu de trois. Une très grosse masse sphérique apparaît sous la coiffure, à l’emplacement des oreilles : représente‑t‑elle une boucle d’oreille ?

■ Type Bourbon‑Lancy n^o 6 (fig. 23, 7)

58Un fragment de valve de moule antérieure de la partie gauche d’une tête met en évidence un autre groupe de coiffure du type I. C’est la plus simple de toutes : les cheveux sont relevés en diadème, sans aucun effet de boucles ou de rouleaux. Les mèches sont suggérées par de simples incisions rectilignes qui rayonnent autour du visage. Le nez est droit, l’œil en amande est légèrement exorbité et les lèvres, minces et rectilignes, sont largement entrouvertes. La cassure du moule empêche de savoir si les oreilles étaient cachées ou non. Ce buste est de taille moyenne.

3.5.3.2. Groupe G

■ Type Bourbon‑Lancy n^o 7(fig. 24, 2‑5)

59Un très petit fragment de valve de moule antérieure (fig. 24, 2) nous met une nouvelle fois sur la piste du potier piso, déjà présent à Bourbon‑Lancy avec un moule de socle signé de son nom.

60Il s’agit d’un fragment de la partie droite d’une coiffure d’abord gonflée comme un toupet, qui se redresse en un diadème séparé en deux registres superposés par une bandelette : la vitta. Les mèches du registre inférieur sont obliques de gauche à droite pour le spectateur et se prolongent dans le même sens au registre supérieur. Cette coiffure est identique à celle qui appartient à des bustes trouvés à la source de Treigny (Yonne) (Rouvier‑Jeanlin 1986 : n^o 303) et dans une fontaine de Mayence (Allemagne) (fig. 24, 8), datés de la fin du i^er s. de n. è. Sur ces bustes à la coiffure complète on observe que les mèches sont figurées par des lignes creuses parallèles, en obliques symétriques par rapport à la raie médiane. Au revers, les cheveux sont figurés par des stries profondes et espacées, disposées en quart de cercle de chaque côté de la raie médiane ; un mince chignon plat occupe la pointe du triangle que dessinent les côtés de la coiffure. Forme triangulaire qui se retrouve sur la face dont le menton se situe dans la pointe ; les oreilles elles‑mêmes, très décollées, modelées de face, ont leur bord externe qui part en biais pour relier le bas de la coiffure à la ligne oblique de la joue. Ces deux bustes ont été fabriqués à partir d’une valve de moule signée PI(SO) (fig. 24, 5) dont il a été question plus haut (Rouvier‑Jeanlin 1986 : n^o 304). Deux fragments de figurines confirment la présence de ce type à Bourbon‑Lancy : pour le premier, il s’agit d’un plastron drapé orné d’un collier de perles rondes (fig. 24, 4) sorti du moule de Piso, pour le second, de la partie postérieure de la coiffure (fig. 24, 3). Ce type de revers se retrouve sur d’autres bustes qui seraient identiques s’ils ne présentaient une orientation de certaines mèches différente d’un modèle à l’autre ; il s’agit de simples variations sur un thème commun.

61Tous ces bustes ont été trouvés dans un contexte de la fin du i^er s. de n. è. Il faut prendre garde de ne pas inclure dans cette série un buste trouvé à Finham, près de Montauban (Marchand 1980 : 25‑45), dont les mèches du registre supérieur ne sont pas disposées symétriquement mais toutes orientées dans le même sens d’une oreille à l’autre, et dont le collier est remplacé par le bourrelet d’une encolure ronde. Néanmoins, cette figurine est une variante de la même coiffure vue par un autre potier contemporain et elle nous intéresse fortement dans la mesure où la tombe dans laquelle elle a été trouvée est datée de 65‑85 de n.è.

■ Type Bourbon‑Lancy n^o 8 (fig. 23, 4)

62Un autre fragment de valve de moule antérieure d’une chevelure du même groupe, mais d’une série différente, permet d’y reconnaître, malgré la petitesse du fragment, une coiffure semblable à celle du type 2 des bustes de Saint‑Bonnet‑Yzeure (Mercier 1974 : 37). Cette coiffure diffère de la précédente par la présence d’un rang de petits rouleaux juxtaposés qui se substitue à la simple vitta. Sur le revers du buste de Saint‑Bonnet il n’y a pas à proprement parler un chignon, mais la masse entière des cheveux, dirigée en une spirale volumineuse qui occupe tout l’arrière de la tête, en fait office. Rien ne prouve qu’il en était de même à Bourbon‑Lancy ; pas plus que pour le plastron sur lequel, dans la reconstitution de M. Vertet pour Saint‑Bonnet, s’étale un grand torque à têtes de serpents (Vertet, B et, Corrocher 1980 : pl. V).

63Un autre buste quasi complet (Gonzenbach 1986 : pl. 96‑2) trouvé dans une tombe à Bern‑Rossfeld (fig. 23, 5) (même nécropole et même datation que pour le buste décrit dans le type n^o 2) présente une coiffure identique à celle de Saint‑Bonnet à un détail près : les incisions des mèches du registre inférieur de la coiffure sont plus rectilignes et rayonnantes à Berne, alors qu’elles sont incurvées et s’inclinent vers l’extérieur à Saint‑Bonnet. Les plastrons sont également différents et il n’y pas trace de collier à Berne. Il faut donc être très prudent et se borner à constater que nous sommes en présence d’un élément de coiffure qui s’apparente à celle qui était en vogue à la fin de l’époque flavienne et que les coroplathes de Bourbon‑Lancy, comme ceux de Saint‑Bonnet, l’ont interprétée avec quelques variantes qui, pour être mineures, n’en sont pas moins significatives de leur style. Nous venons d’en examiner deux variantes, il est fort possible que le fragment de Bourbon‑Lancy appartienne à une troisième.

3.5.3.3. Type II

64Le type II rassemble les bustes dont la caractéristique essentielle se situe dans le volume très gonflé de bandeaux hauts et larges projetés vers l’avant.

65Dans le groupe C, les bandeaux « crêpés » –appelés aussi « toupets » par certains auteurs– sont constitués d’une multitude de mèches striées disposées en « nid d’abeille » ; l’ensemble s’apparente à une résille.

66Trois valves de moules antérieures et deux figurines de ce type II, C se scindent en deux sous‑groupes : celui qui comprend les bustes dont les oreilles sont apparentes (a) et celui dont les oreilles sont cachées par les cheveux (c).

■ Type Bourbon‑Lancy n^os 9 et 10 (fig. 31, 3‑4)

67Les bustes du groupe Ca sont grands, les toupets sont élevés et les oreilles, très décollées, sont représentées de face. L’œil est grand, en amande, peu exorbité et finement ourlé par les paupières ; une large pupille est imprimée en creux au centre. Le dessin des mèches, bien que fruste, laisse apparaître un effet de résille, plus fantaisiste que le rigoureux nid d’abeille.

■ Type Bourbon‑Lancy n^os 11 et 12 (fig. 31, 5‑6)

68Les bustes du groupe Ce sont d’une taille inférieure, les toupets crêpés sont moins volumineux et descendent plus bas le long des joues puisqu’ils recouvrent entièrement les oreilles ; les mèches sont très distinctes et bien disposées en nid d’abeille. Les yeux sont grands, exorbités, chacun en forme d’amande finement ourlée de paupières ; le mauvais état des pièces conservées ne permet pas de savoir si les pupilles étaient indiquées. Le nez est droit et une courte mais profonde gouttière nasale surmonte une petite bouche aux lèvres charnues. Sur un de ces bustes (valve antérieure de moule type n^o 11) le cou est trapu et, à sa base, sur la petite partie du plastron qui subsiste, apparaît le départ soit d’un collier de métal articulé, soit d’une encolure de vêtement, sous forme d’une succession de minces rectangles juxtaposés ; le cou du buste n^o 1 de Saint‑Bonnet (Vertet, Bet, Corrocher 1980 : pl. II) est orné d’un torque représenté de la même façon (Mercier 1974 : n^o 152‑155). Si la forme générale des toupets est la même dans les deux ateliers, le décor en est différent et les oreilles sont apparentes à Saint‑Bonnet. Encore une fois, tout en présentant des analogies avec cet atelier, Bourbon‑Lancy s’en différencie nettement. Un autre rapprochement peut être fait entre ces bustes de Bourbon‑Lancy et une série dont un exemplaire a été trouvé à Chalon‑sur‑Saône (cimetière Saint‑Marcel) et l’autre à Salzbourg en Autriche, chacun dans une tombe datée de la fin du i^er s. Si la forme générale des toupets n’est pas identique, en revanche, on remarque le décor en nid d’abeille, les oreilles cachées par les toupets, ainsi que la forme des plis du vêtement disposés en trois parties, détails déjà rencontrés à Bourbon‑Lancy ; de plus, l’exemplaire de Chalon‑sur‑Saône a été trouvé en même temps que le buste du potier Piso signalé plus haut (buste type n^o 7) dont des exemplaires sont présents à Bourbon‑Lancy. Il est encore trop tôt pour savoir si Piso qui a travaillé à Saint‑Pourçain‑sur‑Besbre (Allier) est également venu sur le site de Bourbon‑Lancy ou si seuls ses moules étaient commercialisés et utilisés dans d’autres ateliers. Un grand nombre d’analyses de ses moules et des figurines qui en sont issues pourraient nous donner la solution.

69Notre ignorance de la forme du revers de ce type de buste est regrettable, mais aucune figurine complète n’est là pour nous renseigner. Cependant, la partie postérieure d’une figurine pourrait peut‑être y être rattachée car le mouvement spiralé du chignon est proche de ceux de Chalon‑sur‑Saône et Saint‑Bonnet.

■ Type Bourbon‑Lancy n^o 13 (fig. 24, 1)

70En revanche, toujours dans le groupe Cc, grâce à trois valves de moules et deux figurines, il est possible de reconstituer avec certitude un type complet.

71De moindre taille que les précédents, ce type de buste affirme aussi sa différence dans le style. Le visage s’inscrit dans un losange dont la partie supérieure, formée par la base des toupets autour du front, est très aiguë. Les toupets partent en oblique et se rejoignent en ogive. Le revers est sans chignon, les cheveux sont tirés vers le haut jusqu’à mi‑hauteur pour s’évaser en éventail sous la ligne qui suit le bord supérieur des toupets, ce qui est exceptionnel jusqu’à présent. Seules quelques figurines du monde grec antique présentent cette particularité dans laquelle il faut peut‑être voir le désir des femmes de réaliser cette coiffure sans le secours de cheveux postiches qui entraînaient une dépense élevée. En effet, cette absence de chignon ne se constate jamais dans les bustes en marbre qui représentaient des femmes fortunées portant des toupets et des postiches.

72La forme et l’inclinaison du ou des toupets permettent de dater ces bustes d’époque flavienne (Delhaye‑Cahen 1968‑70 : 39). Toupets bas et verticaux apparaissent en 80 de n. è. (Julia Titi) pour s’élever progressivement et se pencher davantage jusqu’à former un angle obtus avec le front à la fin du règne de Domitien en 96 de n. è. (fille de Titus).

■ Type Bourbon‑Lancy n^o 14 (fig. 31, 8)

73Un fragment de valve de moule antérieure d’une grande tête nous révèle une œuvre d’un style beaucoup moins figé. Les cheveux sont détaillés en mèches modelées avec souplesse et harmonieusement disposées en bandeaux ondulés sous un diadème orné d’un listel parallèle au bord. L’œil droit qui seul subsiste est finement ourlé de paupières mais ne présente pas de pupille.

74De nombreux fragments appartenant à des bustes de petite ou de grande taille (fig. 21, 9‑11) nous indiquent que les modèles étaient nombreux et variés. Les socles, tous ornés d’une pastille qui cachait le collage du buste, étaient tantôt hémisphériques et moulurés, tantôt carrés, avec ou sans moulure.

3.6. Divers

3.6.1. Enfant

75M 86.327 : visage poupin ; courtes mèches ondulées (fig. 31, 11).

3.6.2. Risus

76M 86.731 : épaule.
F 86.970 : crâne avec oreille gauche.

3.6.3. Grotesque

77M 86.789 : valve de moule anterieure (fig. 31, 12). F 86.971 : tête complète.

3.6.4. Socles

78On trouve aussi de nombreux socles cubiques avec pastille, détachés accidentellement des bustes.

79Il serait fastidieux, et peut‑être inutile, de passer en revue les nombreux fragments de moules et de figurines ayant pu appartenir à des personnages qui se trouvent, en plus de ceux décrits ci‑dessus, dans le matériel de Bourbon‑Lancy ; tout en conservant à l’esprit qu’il ne faut pas les négliger et que de futures trouvailles aideront certainement à les identifier avec sûreté.