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Bourbon-Lancy (Saône-et-Loire)

 | 
Micheline Rouvier-Jeanlin
, 
Martine Joly
, 
Jean-Claude Notet

Introduction

2. Les structures exhumées

Martine Joly

Résumé

Le site, couvrant plusieurs hectares, n’a été exploré que ponctuellement. La fouille dans quatre grands secteurs a mis en évidence une occupation humaine durant les ier et iie s. ap. J.‑C. Les vestiges découverts appartiennent à un quartier d’habitation en rapport avec l’atelier de coroplathes (et sans doute de potiers) tout proche.

Texte intégral

2.1. Introduction

1Il convient tout d’abord de préciser que la zone archéologique révélée par les terrassements des engins couvrait plusieurs hectares. Quatre secteurs (fig. 3) ont été choisis pour une intervention d’urgence en fonction de l’intérêt sensible des vestiges mis au jour.

● Fig. 3  Localisation de la zone surveillée sur le cadastre et situation des 4 secteurs de fouille, e = 1/2000.

Relevé : J.‑F. Enault, A. Mailler. Dessin : J.‑F. Enault.

2.2. Premier secteur (tableau I)

2Plusieurs phases de l’occupation humaine du site ont été mises en évidence par la fouille dans ce secteur.

● Tableau I – Matériel d’accompagnement du premier secteur. – 1. 1re couche d’occupation, première moitié du Ier s. ap. J.‑C. – 2. Couche d’incendie, début ou première moitié du IIe s. – 3. Couche d’abandon, deuxième moitié ou fin du IIe s,

3La plus ancienne implantation repérée là peut être datée de la 1re moitié du ier s. ap. J.‑C. ; elle correspond à une couche sableuse grise riche en matériel céramique et osseux, associée à un lambeau de sol formé de petites pierres calcaires compactées. Cette couche se trouvait directement au contact du sol géologique, une argile grise chargée de nodules ferrugineux.

4Ce premier niveau a été perturbé par l’établissement d’une construction dont seul subsistait le soubassement. Celui‑ci se présentait sous la forme d’un assemblage de blocs de pierre bruts posés à même le substrat argileux et dessinant un plan orthogonal à trois côtés (fig. 4 et 5). Comportant de une à trois assises, pour une hauteur moyenne de 0,40 m, et une largeur moyenne de 0,40 m, ce soubassement supportait sans doute à l’origine des parois en matériaux putrescibles, Un remblai argileux mis au jour de part et d’autre des bases pierreuses devait avoir pour objet de maintenir ces fondations précaires et d’assurer la stabilité de la construction. Par ailleurs, le plan ouvert de cette installation semble correspondre à l’arrachement des fondations sur un côté (on aurait pu penser également à un appentis largement ouvert), ce que suggère également l’absence des niveaux de sol en relation avec les substructions.

● Fig. 4  Secteurs 1 et 2, localisation des structures. limite de sondage. – 1. Pavage de galets. – 2. Lambeau de sol en pierres concassées. – 3. Plaque rubéfiée.  4. Structure en tessons de tuiles, de dolia et d’amphores. – 5. Base de colonne. – 6. Niveau de sol (gravillons et terre battus). – 7. Structure en tessons de tuiles, de dolia et d’amphores. – 8. Fragment de fût de colonne, e = 1/500.

● Fig. 5 (à gauche) – Secteur 1, structures du ier s. ap. J.‑G. – 1. Lambeau de sol en pierres concassées de la première moitié du ier s. – 2. Soubassement en pierres de la deuxième moitié du ier s. e = 1/100.
● Fig. 6 (à droite) – Secteur 1, structures de la première moitié du IIe s. – 1. Mur arasé. – 2. Structure en tessons de tuiles, de dolia et d’amphores. – 3. Plaque rubéfiée, e = 1/100.

5Cette deuxième occupation (fig. 6) peut être cernée chronologiquement grâce à la position stratigraphique des vestiges découverts, scellés par une couche d’incendie dont le matériel est attribuable à la première moitié du iie s. ap. J.‑C.

  • 1 C’est le cas au nord‑est de ce secteur où un pavage de galets était associé aux constructions (fig. (...)
  • 2 Ces pierres proviennent peut‑être de la carrière de Maltat, située à quelques km d’ici.

6La dernière phase est représentée essentiellement par un ensemble de murs dont les arases affleuraient par endroits après le décapage mécanique. Le plan de cet ensemble, en raison des aléas de la fouille, n’a pu être établi avec précision et demeure incomplet. En général, il ne subsistait des murs que leurs fondations qui ne présentaient d’ailleurs aucune différence de construction avec les élévations, comme on a pu l’observer lorsqu’une partie de celles‑ci était conservée1. D’une largeur moyenne de 0,60 m, les murs, montés en pierres grises calcaires2, sont à double parement avec remplissage interne. Un sondage a permis d’observer qu’ils traversaient la couche d’incendie de la première moitié du iie s. et la couche d’occupation de la première moitié du Ier s. pour prendre appui sur le substrat argileux.

7Outre le pavage de galets (fig. 4, no 1), une petite structure associant un aménagement carré en tuiles et tessons d’amphores et de dolia (fig. 7), et une plaque rubéfiée (fig. 4, nos 3 et 4) peut être mise en relation, en raison de sa position stratigraphique, avec cet ensemble de murs. Il s’agit visiblement d’une aire de chauffe à usage domestique. Le matériel archéologique associé, constitué pour l’essentiel de vaisselle de table (poteries sigillées et surtout communes) et d’un chenet en terre cuite en très mauvais état, renforce cette hypothèse.

● Fig. 7 – Secteur 1. Structure en tessons de tuiles, de dolia et d’amphores.

8Cette dernière phase, caractérisée par l’établissement de plusieurs bâtiments en pierre a été relativement brève. En effet, la couche de démolition, présente sur tout le site, permet de situer son abandon dans la seconde moitié ou à la fin du iie s.

2.3. Deuxième secteur (tableau II)

  • 3 Les lignes concernant ce secteur font la synthèse du rapport de fouille.

9La fouille de ce secteur, contigu au secteur 1, a été effectuée par J.‑C. Notet et son équipe3. Cette partie du site a livré la quasi‑totalité des figurines et des moules en terre blanche. Lors de leur découverte, il n’avait pas été possible d’établir les circonstances de leur enfouissement. La fouille dans ce secteur a permis d’établir que ce gisement de fragments de figurines n’est pas directement lié à une structure ou à des substructions antiques ; il constituait en fait la matière principale d’un remblai vraisemblablement apporté progressivement au cours du ier s. ap. J.‑C. (d’après le matériel qui accompagnait les fragments de moules et de figurines) afin d’assainir cet endroit marécageux. Il n’est donc pas possible d’évoquer une zone dépotoir d’artisans potiers dans la mesure où le matériel formant cet ensemble se trouve en position secondaire. L’étude typologique devrait permettre d’établir s’il s’agit d’un lot homogène ou non.

● Tableau II – Matériel d’accompagnement du deuxième secteur. – 4. Remblai le plus ancien (glaise noire). – 5. Couche d’abandon, IIe s.

10Dans ce secteur le plus ancien remblai a été repéré dans deux petits sondages. Situé au‑dessus de l’argile vierge, c’est un niveau argileux riche en charbons de bois, contenant du matériel dont la chronologie s’étend de La Tène III au milieu du ier s. ap. J.‑C.

11Par ailleurs, deux alignements d’une seule assise de pierres sèches ont été dégagés (fig. 4). Leur plan est incomplet à cause d’arrachements anciens. Le premier alignement dessine un angle droit et est associé à une surface en gravillons et terre battue (fig. 4, no 6). Ces alignements sont comparables à ceux du secteur 1 –il s’agit également de bases de constructions en matériaux putrescibles– mais non contemporains, leur position stratigraphique les rattache en effet à la dernière phase d’occupation du site. Un aménagement en tuiles (à rapprocher de l’aire de chauffe en tuiles et tessons d’amphores du secteur 1) appartient également à cette période (fig. 4, no 7). La couche de démolition de la fin du iie s. recouvrait ces structures ainsi que des lambeaux de murs, dont les limites restent floues, et renfermait un fragment de fût de colonne (fig. 4, no 8). Une base de colonne a été retrouvée quelques mètres plus loin dans une masse cendreuse (fig. 4, no 5).

2.4. Troisième secteur (tableau III)

12Ce secteur est situé au sud du ruisseau du Borne, à un endroit où des vestiges ont été mis au jour par les derniers décapages des bulldozers vers la fin de la période prévue pour la fouille.

● Tableau III – Matériel d’accompagnement du troisième secteur. – 6. 1re couche d’occupation, Ier s.  7. Tache cendreuse, début IIe s. – 8. 2e couche d’occupation, 1re moitié du IIe s.  9. Couche d’abandon, IIe s.

13L’occupation la plus ancienne est représentée par une couche de sable brun contenant de nombreux fragments de céramiques et d’os datables du ier s. ap. J.‑C. Elle avait été perturbée par l’installation de soubassements en grosses pierres sèches comparables à ceux mis au jour dans les deux premiers secteurs (voir ci‑dessus). Une large tache cendreuse et un aménagement rectangulaire en fragments de tuiles posés à plat ayant servi de base à un foyer sont à mettre en relation avec les constructions en matériaux légers qui s’élevalent à cet endroit. Un niveau d’occupation contemporain (couche de glaise marron comportant un matériel archéologique diversifié : céramique, os, moules et figurines en terre blanche) permet de dater ces stuctures de la première moitié du iie s. La couche d’abandon du iie s. est également présente ici.

2.5. Quatrième secteur

14Dans cette zone marécageuse, proche du ruisseau du Borne, notre intervention a surtout consisté à relever et prélever pour analyse des pieux en bois qui émergeaient de la vase. Deux ensembles peuvent être distingués :

  • le premier ensemble, dans le ruisseau, se présentait sous la forme de pieux très espacés qui ne dessinaient pas de plan précis. De forme circulaire, ils étaient conservés sur environ 40 cm de haut. Aucune couche, aucun matériel archéologique ne leur est rattachable ;

  • le deuxième ensemble, plus intéressant, était constitué de 45 pieux dessinant un double alignement (fig. 8 et 9). De forme généralement rectangulaire (10 à 20 cm x 4 cm), conservés sur une hauteur de 20 cm avec une base en biseau de 15 cm, ils étaient enfoncés dans l’argile vierge. Par ailleurs, cette structure en bois délimitait au nord une couche d’occupation noire argileuse riche en os et poteries datées d’après les analyses dendrochronologiques (cf. annexe) du premier tiers du ier s. ap. (entre 5 et 35 ap. J.‑C., vraisemblablement 12 ap. J.‑C.), tandis qu’au sud on rencontrait de l’argile gris clair dans laquelle le matériel était quasiment inexistant. La destination de cet ensemble est incertaine (structure d’habitat sans doute, peut‑être palissade avec des fosses détritiques ?).

● Fig. 8 – Secteur 4. – 1. Couche d’occupation du premier tiers du Ier s. ap. J.‑C. – 2. Couche argileuse grise (substrat), pieu en bois. e = 1/50.

● Fig. 9  Secteur 4. Détail du double alignement de pieux en bois.

2.6. Conclusion

15La surface limitée de la fouille invite à distinguer avec prudence les remaniements ou aménagements secondaires, limités dans l’espace et dans le temps, des grandes phases de l’occupation du site.

16Les faits suivants semblent bien établis : l’implantation humaine commence au début du ier s. ap. J.‑C. et se termine à la fin du iie s. Les différents sondages ont permis de constater la continuité, sur la plus grande partie du site, de deux couches d’occupation, l’une du ier s. ap. J.‑ C., l’autre de la première moitié du iie s. Au ier s., seules des structures en bois dont la finalité reste inconnue (secteur 4) et des soubassements en pierres sèches sur lesquels s’élevaient des parois en matériaux légers (secteur 1) ont été repérés.

17Au iie s., on observe également la présence de constructions en matières putrescibles et d’aires de foyers domestiques (secteur 1, 2 et 3). La principale nouveauté réside dans l’apparition de bâtiments avec des murs maçonnés qui semblent concentrés dans la partie nord‑est du site.

18Par ailleurs, l’aménagement du site à toutes les époques se caractérise par de profonds remaniements, et l’apport de remblais (en quantité grandissante à mesure qu’on approche du ruisseau) pour assainir cette zone marécageuse.

Notes

1 C’est le cas au nord‑est de ce secteur où un pavage de galets était associé aux constructions (fig. 4, no 1).

2 Ces pierres proviennent peut‑être de la carrière de Maltat, située à quelques km d’ici.

3 Les lignes concernant ce secteur font la synthèse du rapport de fouille.

Table des illustrations

Légende ● Fig. 3  Localisation de la zone surveillée sur le cadastre et situation des 4 secteurs de fouille, e = 1/2000.
URL http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/35725/img-1.jpg
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Légende ● Tableau I – Matériel d’accompagnement du premier secteur. – 1. 1re couche d’occupation, première moitié du Ier s. ap. J.‑C. – 2. Couche d’incendie, début ou première moitié du IIe s. – 3. Couche d’abandon, deuxième moitié ou fin du IIe s,
URL http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/35725/img-2.jpg
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Légende ● Fig. 4  Secteurs 1 et 2, localisation des structures. limite de sondage. – 1. Pavage de galets. – 2. Lambeau de sol en pierres concassées. – 3. Plaque rubéfiée.  4. Structure en tessons de tuiles, de dolia et d’amphores. – 5. Base de colonne. – 6. Niveau de sol (gravillons et terre battus). – 7. Structure en tessons de tuiles, de dolia et d’amphores. – 8. Fragment de fût de colonne, e = 1/500.
URL http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/35725/img-3.jpg
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Légende ● Fig. 5 (à gauche) – Secteur 1, structures du ier s. ap. J.‑G. – 1. Lambeau de sol en pierres concassées de la première moitié du ier s. – 2. Soubassement en pierres de la deuxième moitié du ier s. e = 1/100.● Fig. 6 (à droite) – Secteur 1, structures de la première moitié du IIe s. – 1. Mur arasé. – 2. Structure en tessons de tuiles, de dolia et d’amphores. – 3. Plaque rubéfiée, e = 1/100.
URL http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/35725/img-4.jpg
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Légende ● Fig. 7 – Secteur 1. Structure en tessons de tuiles, de dolia et d’amphores.
URL http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/35725/img-5.jpg
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Légende ● Tableau II – Matériel d’accompagnement du deuxième secteur. – 4. Remblai le plus ancien (glaise noire). – 5. Couche d’abandon, IIe s.
URL http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/35725/img-6.jpg
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Légende ● Tableau III – Matériel d’accompagnement du troisième secteur. – 6. 1re couche d’occupation, Ier s.  7. Tache cendreuse, début IIe s. – 8. 2e couche d’occupation, 1re moitié du IIe s.  9. Couche d’abandon, IIe s.
URL http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/35725/img-7.jpg
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Légende ● Fig. 8 – Secteur 4. – 1. Couche d’occupation du premier tiers du Ier s. ap. J.‑C. – 2. Couche argileuse grise (substrat), pieu en bois. e = 1/50.
URL http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/35725/img-8.jpg
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Légende ● Fig. 9  Secteur 4. Détail du double alignement de pieux en bois.
URL http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/35725/img-9.jpg
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© Éditions de la Maison des sciences de l’homme, 1989

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