1.1. Méthodologie

1Il apparaît tout à fait logique de commencer l’étude archéologique du site du Bois‑du‑Mont par l’analyse de son architecture. Dans les cavités aménagées la vie a été, plus que partout ailleurs, étroitement conditionnée par l’environnement et le volume occupable disponible. Sur un site de surface, ajouter à l’ensemble habitable une salle ou deux ne pose pas de problèmes aussi ardus que ceux auxquels ont dû faire face les constructeurs de souterrains. Il est donc essentiel dans cette recherche de définir avant tout le cadre dans lequel ont évolué les hommes du Moyen Age. D’ailleurs les publications traitant des souterrains ont la plupart du temps analysé l’architecture. Deux autres raisons conduisent à privilégier cette étude.

2Tout d’abord, la vision que l’on a en pénétrant dans une cavité est celle d’un lieu plus ou moins comblé et dont les limites (la roche elle‑même) se perdent souvent dans une confusion de courbes, de rentrants et de saillants. La tradition a toujours voulu que l’on dressât des plans dans la zone visible. La seconde raison est associée, elle, à la partie justement délaissée dans l’exploration. Les chercheurs ne se sont que très rarement interrogés sur la nature stratigraphique des dépôts sur lesquels ils rampaient ou, tout du moins, ils marchaient péniblement. Nous connaissons donc actuellement une floraison de plans souterrains qu’il n’est pas possible généralement, hélas, d’associer à un quelconque niveau archéologique. Le plus gênant dans une telle situation dépasse d’ailleurs le problème de l’absence d’études approfondies du remplissage. Les plans étant dressés sur les dépôts, ils omettent par conséquent tous les éléments structuraux fossilisés. Ces documents fragmentaires ont donné lieu à des interprétations à la fois fausses et incomplètes.

3Notre but est donc de donner une analyse complète de la série d’éléments architecturaux relevés dans la cavité du Bois‑du‑Mont. Le remplissage ayant été enlevé, la roche mère a été atteinte dans toutes les zones du souterrain concernées par cette étude. Le travail de relevé a été conduit selon trois directions. Au fur et à mesure que la fouille dégageait la base d’un élément donné, nous procédions, à l’aide du carroyage, aux mesures de la surface utilisable. Les relevés étaient conduits tous les 10 cm sauf, évidemment, dans le cas d’un élément de dimensions réduites (les mesures étaient alors plus rapprochées). Le travail consistait ensuite à prendre les mesures en hauteur afin d’obtenir des coupes de tous les éléments : ces coupes transversales et longitudinales étaient levées par rapport au niveau général de référence de la cavité. Enfin, au terme de la fouille, nous avons commencé à établir le levé topographique des bases et des voûtes des différents éléments structuraux. Ce système permet d’obtenir des coupes dans des zones précises pour une étude donnée. Nous émettrons cependant des réserves : le levé topographique n’est pas totalement terminé. Nous dirons en revanche que l’analyse a pu être effectuée sans problèmes particuliers dans les zones non levées.

4La partie fouillée de la cavité a été divisée selon six unités architecturales. Nous ne traiterons pas les unités V et VI qui correspondent à des fosses externes1. Chaque unité est associée à un accès. Les interprétations de l’étude architecturale montreront d’ailleurs que la répartition des divers éléments structuraux composant la cavité rend logique une telle délimitation (fig. 21).

1.2. Unité I

5L’unité I (zone septentrionale du souterrain) est en relation avec l’accès I et organisée à partir du couloir A. L’aménagement général de l’unité I était apparu dès 1970. Nous nous trouvions dans une zone où le remplissage était en épaisseur le plus faible de toute la cavité. Cependant un certain nombre d’éléments disparaissaient sous les dépôts (fig. 22, 23).

6Le système d’entrée à l’intérieur de la cavité est caractérisé par la présence d’un escalier de pierres sèches d’une hauteur de 290 cm (élément 1). A son sommet une ceinture de petites pierres plates rejoint à ses extrémités la roche mère, ménageant ainsi un passage grossièrement rectangulaire, long de 60 cm et large de 35 cm. L’ouverture est étudiée pour permettre une fermeture aisée. Deux dalles d’une longueur de 50 cm et d’une largeur de 40 cm la recouvraient.

7L’échelonnement, à ‑100, ‑160, ‑230, ‑250 et enfin ‑270 cm sous la surface du sol, des pierres en saillie permet une descente rapide de l’escalier. Il faut noter l’aménagement régulier des trois pierres superposées à sa base qui font penser à de véritables marches d’escalier.

8De très gros blocs forment la paroi de l’escalier, fixant solidement les pierres en saillie. Des sondages entre la paroi du passage A et les pierres ont montré que le blocage devait se prolonger au‑delà de l’escalier. Nous avons donc cherché les limites du passage. La fouille totale de la zone concernée risquant de provoquer un éboulement de l’escalier, nous avons procédé à un sondage à deux mètres de distance de l’accès. Par un repérage de surface, nous avons ainsi atteint l’élément 2. Cette nouvelle structure a été dégagée jusqu’à une profondeur de 120 cm sous la surface. Le sondage a montré qu’il est très probable que l’élément 2 soit le prolongement du passage A.

9La direction générale de l’élément 2 suit un axe nord‑sud. Au niveau de l’entrée, le passage A marque un changement de direction. La paroi de l’élément 2 est subverticale à l’est et à l’ouest ; seule, au sud, la paroi marque une concavité. La base de l’élément 2 ne doit pas être, d’après les chiffres livrés par des sondages restreints, à plus de 200 cm sous la surface du sol. Si l’on retient dans ce total la hauteur de sol traversé, la profondeur ne serait donc que de 120 cm environ, indiquant dès lors une pente douce de la base vers le nord.

10Dans l’hypothèse de l’existence d’une tranchée fermée à son extémité nord par l’escalier, nous pouvons admettre que le couloir A mesurait environ 9 m. Ce couloir assure la liaison entre l’extérieur de la cavité et l’unité II. Son ouverture au contact de la salle B permet un échange de plain‑pied. La pente générale est de 27 degrés, pourcentage le plus élevé de toute la partie connue du souterrain. Cependant la voûte, elle aussi marquée par un pendage du même ordre, séparée de la base par une hauteur moyenne de 160 cm, ménage un espace suffisant pour se déplacer debout. Cette voûte est caractérisée par une relation sans solution de continuité avec la voûte de l’élément B. Près de l’accès l, la hauteur sous voûte dépasse 200 cm. La surface utilisable du passage A permet le déplacement d’une seule personne à la fois. Ce type de constatation met en évidence l’intérêt qu’il y a de réaliser un levé au niveau de la structure. La base est la seule zone de mesure qui donne des renseignements exacts sur le nombre de personnes pouvant évoluer simultanément dans un espace donné. Ce caractère n’est évidemment considéré que pour la disposition originelle, les mesures devant être adaptées à chacun des niveaux d’occupation livrés par la stratigraphie.

11Trois éléments occupables sont annexés au couloir A. Le renfoncement 3 marque, par son emplacement, l’extrême limite d’extension du creusement nord de la cavité. Il s’ouvre en position centrale et basse sur le passage A. Cette ouverture est située en face de l’escalier ; elle n’est pas creusée dans l’axe longitudinal du renfoncement. La base est plus basse de 6 cm que celle du passage à son contact. Elle est subhorizontale sur toute sa surface. Il n’y a pas d’irrégularités marquées à la jonction avec les côtés. La hauteur sous voûte est de 110 cm en moyenne. Toutefois cette mesure est faite le long d’une brisure confondue avec le grand axe du renfoncement. Cette brisure ne coïncide pas avec une zone de faiblesse (diaclase, filon de roche altérée). La préméditation d’une telle voûte est certaine. Le renfoncement 3 possède un élément annexe : le renfoncement 4. Il est ouvert en position centrale ; il a l’aspect d’un léger surcreusement. Sa hauteur est de 20 cm. Le renfoncement 3 est donc remarquable par ses propres caractères. Nous constatons son rapport direct avec l’accès I. Aucun système ne les sépare.

12Le second renfoncement visible de l’entrée est l’élément 5. Sa hauteur de 100 cm à l’entrée permet un accès aisé. Vers le nord, au contraire, la voûte se rapproche peu à peu de la base et atteint une hauteur libre limitée à 40 cm près du fond. Cette voûte, en plein cintre, connaît un abaissement de même importance de part et d’autre de l’ouverture. La base, elle, reste subhorizontale. La différence de niveau entre les zones au contact des côtés et la partie centrale se limite en effet à 5 cm environ. Bien que cette base forme une surface utilisable largement dégagée, la pénétration est peu aisée sur sa totalité du fait de l’inclinaison rapide des côtés. La base domine celle du couloir de 10 cm en moyenne. Or, une séparation se dresse (élément 7), les isolant l’une de l’autre. La hauteur de ce relief est régulière : 12 cm. A l’origine du creusement, ce relief pouvait empêcher tout échange par glissement naturel entre le passage et le renfoncement. Il faut donc noter une volonté de séparer l’élément 5 du passage.

13Les éléments annexés au renfoncement 5 sont au nombre de 4 (élément 7 non compris). Tout d’abord il faut noter l’association des éléments 6 et 15. Ces éléments ont des volumes proches de la sphère.

14Le renfoncement 21 domine, sans pour cela être en association obligatoire avec elle, une alvéole d’un diamètre de 6 cm à son ouverture (n^o 14). Elle était comblée par l’altérite dont la couleur se confondait avec celle de la roche sous‑jacente.

15Le renfoncement 11 marque des différences essentielles par rapport aux éléments 3 et 5. est certes en relation directe avec le passage A, mais sa hauteur maximale est de 170 cm. La voûte et la base sont en relation avec celles du passage sans solution de continuité. La largeur de l’ouverture, 180 cm, contraste avec la faible profondeur : 90 cm. En fait, cet élément n’a pas été creusé pour être utilisé tel quel, mais en fonction de la conception d’un autre élément occupable ; le relief 12 remplit en effet une grande partie du renfoncement. Sa hauteur est de 35 cm. Sa partie supérieure est à faible déclivité : 5 à 10 % vers le centre de l’élément 11. A ce point de l’analyse nous considérons que le renfoncement fut creusé dans le but précis d’établir un siège en léger retrait par rapport à l’aire de passage sans gêner les déplacements. Ce siège accueille aisément trois personnes.

16L’élément 11 est également caractérisé par son emplacement au‑delà des éléments 9 et 10. A mi‑distance entre les points 3 et 4 sont aménagés deux éléments composés. L’alvéole 10, d’un diamètre de 20 cm, s’ouvre en contrebas de la base du passage. Sa profondeur est de 10 cm. Elle est surmontée par un renfoncement creusé dans le côté qui la jouxte. Dans la voûte nous n’avons pas décelé de trace d’une excavation en opposition avec l’alvéole. En revanche le schéma est complet dans le système de l’élément 9. De plan ovale, il est d’un volume comparable à celui de l’élément 10. Le dominant, un surcreusement apparaît dans la paroi ; il se prolonge jusqu’au renfoncement 8. Dans la voûte, à sa verticale, est creusée une excavation ovalaire. Nous avons donc là un dispositif associé de part et d’autre du passage. Nous pouvons le considérer ainsi sans trop de risques, ne serait‑ce qu’à cause de la similitude dans l’aménagement des éléments qui le composent. Son rôle comme séparation est déjà perçu.

17Par sa relation avec les éléments 9 et 10 , l’ensemble « renfoncement + siège » apparaît comme le premier système interne du fait même que le dispositif 9‑10 marque la limite entre les éléments liés à l’ouverture au nord et l’ensemble des structures situées plus au sud.

18Il semble qu’un autre aménagement de séparation existait entre les points 4 et 5. Un simple surcreusement dans la roche (n^o 19) apparaît dans la paroi opposée au renfoncement 11, à la fois dans le côté et la voûte. Il affecte une forme courbe sur la coupe du passage. Le siège 12 serait donc isolé dans un espace fermé au nord comme au sud.

19Le renfoncement 8 est creusé à mi‑hauteur dans la paroi. Son emplacement paraît illogique au milieu du renfoncement lié à l’élément 9. Il soulève le problème de la contemporanéité des différents éléments structuraux. Certains éléments annexes ont pu être le résultat d’aménagements successifs, créant des superpositions.

1.3. Unité II

20Cette unité a pour centre de gravité l’élément central B. L’accès Il lui est associé directement. Cet accès est constitué du puits D et du passage C.

21Le puits est profond de 300 cm ; sa largeur est de 80 cm, sa longueur de 120 cm. Son volume représente environ 3 m³. Les limites entre les côtés, et entre eux et la base, sont marquées par une légère courbure. La verticalité des côtés est pratiquement constante. En des points limités le profil devient subvertical. Ainsi, à mi‑hauteur, une concavité amorcée depuis la surface, mais n’affectant pas le caractère de verticalité global, accuse un retrait de 10 cm. On peut voir là une conséquence du creusement. Les conditions de travail ont provoqué cet élargissement relatif des côtés.

22Des diaclases subverticales semblent avoir guidé largement l’élaboration du puits. Elles sont visibles sur le côté est de l’élément. Les diaclases provoquent une pénétration d’acides humiques. L’altération chimique qui en résulte affaiblit la cohésion des minéraux près de la diaclase ; or, la paroi est laisse apparaître un miroir de diaclase se desquamant. La coïncidence d’une paroi avec un miroir de diaclase n’est pas fortuite : nous constaterons des faits similaires dans d’autres zones de la cavité.

23Une succession de renfoncements est visible sur la paroi est, une autre série est creusée dans la paroi ouest. Lors de la fouille du puits une portion de roche située au‑dessus du renfoncement 37 est tombée sous la forme d’une plaquette. Seule la partie profonde de l’élément 36 est désormais visible. L’écartement moyen entre les renfoncements est de 32 cm. Ce système permet une descente et une montée rapides dans le puits, mais leur emploi prolongé conduit à leur destruction progressive. Cela implique une limitation dans le temps de l’utilisation de tels éléments. Cette faible durée d’utilisation peut être déduite en particulier de la configuration du renfoncement 31 , très bien conservé. Il est séparé de la voûte du passage C par une dizaine ce centimètres d’épaisseur de roche en place. Cette fragile assise n’aurait pas supporté longtemps le poids d’un homme. L’interprétation que nous exposerons à propos de cet ensemble devra tenir compte de ces faits.

24L’analyse de l’élément 20 l’associe au remplissage du puits. L’étude architecturale met en évidence une longue rainure au contact de la surface du sol, creusée dans l’angle formé par les côtes nord et ouest, atteignant la voûte du passage C. La largeur moyenne est de 20 cm pour une profondeur de 10 cm. Le profil courbe de l’élément 20 interdit toute installation d’une pièce de bois allongée. A l’aménagement de la rainure dans la roche mère étaient associés des blocs de granit liés au remplissage du puits. Des pierres la fermaient tout au long de la paroi. La fermeture ainsi réalisée de l’élément 20 assurait‑elle une réelle étanchéité ? La stratigraphie révélera une preuve du filtrage de la terre à l’intérieur de l’élément 20, devenu par l’établissement des blocs un étroit conduit.

25L’angle oriental du puits est marqué par la présence du passage 18. Sa largeur maximale ne dépasse pas 40 cm ; l’élévation montre deux ouvertures losangiques dont les pointes les plus aiguës sont situées en haut et en bas de l’élément. Sa profondeur est faible. Il faut noter qu’en cette zone les parois du puits et du passage I s’approchent à moins de 10 cm l’une de l’autre. Le percement de la roche lors du creusement doit expliquer l’existence du passage 18. Une diaclase subverticale est confondue avec un pan du losange, cause supplémentaire de fragilité.

26Le passage C relie le puits D à la salle B. Au contact de la fosse, l’ouverture sur un côté est en position basse, sans solution de continuité entre la base du passage et celle du puits. Cette disposition, nous le verrons, n’est pas unique dans la cavité. La relation avec l’élément central est matérialisée par une ouverture à mi‑hauteur dans la paroi ; cette position ménage cependant une différence de niveau d’environ 45 cm entre la base du passage et celle de l’élément central. La voûte du passage est marquée par une brisure longitudinale ; on ne constate pas la présence d’une diaclase. La conception d’une voûte à arc brisé est volontaire. La largeur de la base du passage varie de 40 à 60 cm, ne permettant dans cette zone que le déplacement d’une seule personne à la fois.

27La fouille de 1973 a montré, à la base du remplissage du puits, une accumulation volontaire de gros blocs obstruant en totalité l’accès dans le passage C. Les pierres s’appuient de part et d’autre de l’ouverture sur la paroi de D. Elles ne risquent en aucun cas de glisser vers l’intérieur de la cavité sous la pression du remplissage, ce qui se serait produit dans l’hypothèse d’une absence de bordures. Une large dalle, à la base du muret, était brisée, ses fragments restant en connexion. L’idée de fractures dues à la pression des matériaux sus‑jacents paraît peu probable : d’autres pierres sont restées intactes. Le bloc a peut‑être été brisé par la chute d’une grosse pierre lors de l’élaboration du mur.

28La roche qui compose les éléments du muret est absolument identique à celle de la cavité : nous voyons là un réemploi des pierres issues du creusement du souterrain. Ce fait entraîne une hypothèse qu’il faut établir. D’abord il y a eu peut‑être un choix de ces blocs au fur et à mesure du creusement. Il y aurait donc, dès l’origine, une volonté de condamner dans un laps de temps donné l’ouverture du passage C. La mise de côté des blocs ne. pouvant probablement pas se prolonger indéfiniment, à l’intérieur de la cavité comme à l’extérieur, l’aménagement du muret a, selon nous, suivi de peu la fin de l’élaboration du souterrain en cet endroit.

29En tout cas, l’installation du mur n’est pas hâtive (fig. 24). Les pierres furent érigées avec soin. Dans la partie supérieure de l’accumulation des blocs, un espace de 4 à 5 cm de largeur séparait la paroi du muret, risquant de provoquer l’infiltration de particules terreuses dans la cavité. Or, tout cet espace fut comblé par de petites pierres enfoncées en coin, améliorant ainsi l’étanchéité du mur. En fait, l’analyse du remplissage dans l’étude stratigraphique révélera que le filtrage des terres fut important. Nous avons donc de l’accès Il la vision d’un ensemble homogène dont tous les aménagements semblent indiquer une utilisation limitée dans le temps.

30Par l’accès Il nous pénétrons directement dans l’élément central. En 1973 le remplissage, important, laissait voir seulement la voûte de l’élément B. L’orientation de son grand axe est telle qu’il entre en relation à son extrémité occidentale avec l’unité I. Sa longueur totale est de 340 cm ; sa largeur varie, elle, au niveau de la surface utilisable, de 130 à 180 cm. Il s’agit donc d’une zone dans laquelle plusieurs personnes peuvent évoluer simultanément. L’occupation est d’autant plus aisée que la hauteur sous voûte atteint, le long de l’axe longitudinal, une valeur moyenne de 160 cm à l’est du point 6. Entre les points 5 et 6, la hauteur est de 150 cm. Il faut noter que le long de cet axe court une diaclase qui, au‑delà du point 8, concerne aussi le passage I. Or, les coupes transversales de B montrent une voûte à arc brisé dont la brisure coïncide avec la diaclase, au miroir visible. Nous ne devons pas dans ce cas considérer comme certaine la conception volontaire d’une telle configuration. La friabilité de la roche au contact de la diaclase a entraîné peut‑être un surcreusement. De plus, les dépôts d’altérite dans la stratigraphie nous conduisent à préciser l’aspect originel que pouvait revêtir la voûte dans l’élément B.

31Les côtés, prolongeant sans transition la voûte, marquent une légère concavité dont le recul maximal se situe à une hauteur voisine de 90 cm à partir de la base. Le contact avec cette base paraît légèrement subhorizontale, tant sur les profils transversaux que sur les coupes longitudinales. Signalons toutefois, comme pour le renfoncement 5, une dépression. Elle est inscrite dans un triangle dont les sommets sont les points 6,8 et 9. La surface utilisable coïncide donc avec la totalité de la base grâce d’une part à la régularité de ses limites et d’autre part à la verticalité des côtés qui permettent l’occupation sur les marges de l’élément B.

32Lorsque la fouille a débuté, nous ignorions l’existence des éléments 22 et 23, qui étaient fossilisés par le remplissage. Les travaux ont mis au jour ces structures dont les ouvertures mesurent80 cm de hauteur. Leur base domine de 22 à 25 cm celle de l’élément B. La surface utilisable correspond à la totalité de la base dans les deux renfoncements, grâce en particulier à la verticalité des côtés. Cependant la surface de la base de l’élément 22 représente à peu près le double de celle du renfoncement 23. Un fait important concernant ces structures est caractérisé par leur association. Les créateurs de la cavité avaient un choix d’emplacements assez larges pour loger les renfoncements. Or, ils les ont creusés de part et d’autre de l’élément central. Il faut remarquer qu’ils sont présents là où l’élément B se rétrécit au maximum.

33Le dernier élément compris dans l’unité Il est un renfoncement de dimensions très réduites, en position basse entre les passages H et C. L’élément 24 paraît isolé dans la structure générale.

1.4. Unité III

34La complexité de l’ensemble formant l’accès III est unique dans l’architecture connue du souterrain. Les éléments fondamentaux sont cependant comparables à ceux de l’accès Il. En dehors de ses caractères spécifiques, l’aspect général de l’unité III est voisin de celui de l’unité II : un élément central lié à un accès vers l’extérieur.

35Le puits E a été creusé dans une roche diaclasée dont les zones de faiblesse ont servi de guide à sa conception. Le côté ouest suit une diaclase verticale parallèle à celle qui a facilité l’élaboration du côté oriental. Paradoxalement, il existe un système de diaclases subverticales, dont le pendage tend vers le nord et qui semblent avoir fortement affecté la structure des côtés nord et sud. Des miroirs de diaclase sont en effet nettement visibles à la base du côté sud, et cela particulièrement de ‑40 à ‑100 cm sous la surface du sol. Il en est de même pour la paroi opposée. La fouille du passage F a révélé un amoncellement d ’altérite. Au cours de l’utilisation de l’accès III, une altération s’est donc produite par décollement le long des miroirs de diaclases sur la paroi nord. L’altération concernait aussi (à un degré moindre toutefois) l’extrême sud de la salle G.

36L’érosion brutale du puits a eu des conséquences importantes. On peut estimer que sa paroi nord comportait des renfoncements superposés, semblables à ceux creusés dans la paroi opposée. Ils ont pu disparaître par érosion régressive. Entre les renfoncements 58 et 59, si l’on tient compte de l’écart moyen séparant les éléments 55 à 60, l’existence d’un renfoncement supplémentaire paraît logique. On distingue une petite zone évidée, que nous n’avons pas considérée dans le plan structural général, mais qui représente probablement le vestige d’un renfoncement aujourd’hui arasé. L’évolution du côté nord permet d’élargir une telle constatation à toute une partie de la paroi. Son recul est d’ailleurs calculable grâce aux observations comparatives établies entre les régions saines et les zones altérées. Il est de 10 cm d’une manière générale. Dans la mesure où les renfoncements superposés ont une profondeur moyenne de l’ordre de 10 cm, nous considérons donc leur présence comme probable à l’époque du creusement de la cavité.

37L’existence sur le côté sud d’une superposition de renfoncements rend obligatoire leur association avec des éléments semblables sur la paroi opposée. Nous pouvons établir la disposition théorique de ces éléments disparus. Le côté sud comporte actuellement six renfoncements et en possédait un septième. La paroi nord, si l’on admet un aménagement comparable (dimensions des éléments, écarts entre eux), devait en accueillir six. Mais le sixième, qui aurait été opposé à l’élément 59, aurait été creusé à moins de 20 cm de la voûte du passage F.

38Un rapprochement peut être établi avec la disposition du renfoncement 31 dans l’accès II. Nous ne pouvons affirmer cependant si une attitude commune a été suivie dans les deux accès et si un renfoncement a pu être creusé au niveau de l’élément 59. Il faut remarquer toutefois que le puits E est nettement plus diaclasé que D. Il s’ajoutait peut‑être à l’ensemble un renfoncement à l’est de la paroi nord, zone épargnée lors du creusement du passage F. Nous retrouvons ainsi une disposition connue dans l’accès II.

39Une autre conséquence résultant de l’étude de ces aménagements pose le même problème de finalité que celui entrevu à propos de l’accès II. Ces renfoncements ne peuvent absolument pas permettre une utilisation très prolongée. Si cette constatation n’apparaît pas comme une preuve tangible dans un ensemble tel que celui de l’accès intégré à l’unité Il, l’apport de l’étude géomorphologique du puits E suffit à rendre hautement probable l’hypothèse d’une utilisation limitée dans le temps des deux accès.

40Lorsqu’on considère l’intensité de l’altération hivernale dans les accès (en un seul hiver les parties hautes de la paroi de l’accès IV, simplement couvertes par des tôles, ont reculé de près de 5 cm...), il apparaît évident qu’au bout de quelques années les petits renfoncements sont très érodés. Cela est d’autant plus vrai que la pression des pieds provoque des tassements et des dissociations entre les composantes de la roche.

41L’existence du passage F confirme les associations de structures caractéristiques des accès II et III. La largeur du passage F, à son contact avec D est de 80 cm. Une bordure étroite subsiste à l’ouest. La base est en contrebas par rapport à celle du puits. Cet aménagement diffère de celui de l’accès II. Cependant il met le passage en contact de plain‑pied avec l’élément central G, permettant d’une part un arrêt du creusement du puits, déjà profond de 340 cm, et d’autre part un creusement à un niveau très bas de la salle G, phénomène qui, nous le verrons, traduit probablement une volonté précise.

42Un muret de pierres sèches dominait l’élément G, reposant sur la base du puits. Il s’appuyait contre la paroi nord, fermant le passage F. Latéralement la bordure ouest de la paroi forme une simple frange, suffisante néanmoins pour arrêter un glissement éventuel des blocs vers le bas. Notons la similitude des accès Il et III à propos de cette caractéristique. Afin de permettre l’étanchéité la plus complète possible, les hommes ont disposé de petites pierres dans les interstices au sein du muret et surtout à sa partie sommitale, qui ne coïncide pas exactement avec la partie haute du passage. L’ensemble était remarquablement intact au moment où la fouille atteignit sa base. Pourtant le comblement total de l’accès exerçait une forte pression sur le muret.

43Le puits E contient, en plus des renfoncements superposés, une série d’éléments présentant un intérêt pour la connaissance du creusement de la cavité.

44En surface fut dégagée une longue rainure étroite creusée dans la roche mère (n^o 50). Ce type d’élément est unique pour le site. L’aménagement était comblé par de la terre. A son contact avec le puits E un bloc recouvrait les deux côtés de la rainure. On avait creusé alentour la roche mère pour installer cette pierre plate. La profondeur maximale de l’élément 50 est de 73 cm à son contact avec l’accès. A l’extrémité est, elle se réduit à 39 cm.

45Près de la base de E, par contre, trois renfoncements sont creusés, chacun dans un angle de la paroi. Le renfoncement 51, large d’une quinzaine de centimètres et long de 30 cm, est orienté est‑ouest, tout comme l’élément 50. Son emplacement exclut à la première analyse une association avec les séries de renfoncements superposés étudiés plus haut, cela d’autant que, si les dimensions de l’ouverture sont voisines de celles des éléments 55 à 60, il n’en est pas de même pour la profondeur, nettement plus importante, qui donne au renfoncement 51 l’allure d’un conduit ébauché. Il doit plutôt être mis en relation avec les éléments 52 et 53, creusés au même niveau que lui. Leurs dimensions et leurs formes sont pourtant différentes de celles de l’élément 51. Mais ils sont, eux, en association avec un conduit probable (39 et 54).

46L’élément 39 est orienté nord‑est/sud‑ouest. Nous l’avons repéré sur 70 cm environ. Le passage 54, de longueur voisine, a une orientation est‑sud‑est. Nous n’avons pas pu distinguer les extrémités de ces passages. Lors de la fouille nous avons cependant atteint à l’extrémité ouest de 54 un élargissement très net marquant probablement la fin de l’élément et son débouché dans un ensemble plus vaste.

47Les renfoncements 52 et 53 ont une base de plan trapézoïdal. A l’intérieur existe un surcreusement des parois à chacune des deux extrémités de la grande base du trapèze. Il semble que 52 et 53 connaissent l’association de renfoncements semblables à l’élément 51, creusés dans des directions différentes puis réunis afin de former les éléments actuels. Les passages 39 et 54 s’ouvrent dans un angle des renfoncements.

48Nous ne pouvons donner une direction précise quant au passage 39 : l’ouverture 52 est trop étroite pour permettre une vision de cet élément. Au nord, il semble se diviser.

49L’interprétation de ces ensembles nous expliquera peut‑être ce que fut leur fonction. Si nous concevons le renfoncement comme une tentative inachevée d’élaborer un conduit, nous expliquerons par là même la direction prise par le passage 39. Nous constatons en effet qu’il tend vers une zone concernée par l’élément 51 si nous prolongeons son grand axe. Il se peut que des raisons diverses, touchant au contexte géologique en particulier, aient conduit à l’abandon de 51 au profit de 52 et, par voie de conséquence, de 39. On pourra objecter que, dans ce cas, il n’était pas nécessaire de creuser plus largement les renfoncements 52 et 53 si l’on n’avait voulu élaborer qu’un seul conduit. Une hypothèse peut être avancée en faveur de l’utilité de tels renfoncements élargis. La technique de creusement des passages 54 et 39 impliquait peut‑être pour l’ouvrier la nécessité d’aménager un espace assez grand en préalable à leur élaboration. Les éléments 39 et 54 ont dû répondre seuls (sans le secours de l’élément 50) aux besoins que les hommes attendaient d’eux. Sans nous avancer encore sur leur fonction, nous devons considérer que ces éléments ont été creusés à partir du puits E et qu’ils sont étroitement liés à son évolution. Dès que E est comblé, les passages ne sont plus utilisables à partir de l’accès lui‑même. Cela n’indique en aucune façon que leur rôle s’arrête alors.

50L’accès III débouche, par le passage F, sur une salle de plan allongé selon un grand axe nord‑nord‑est – sud‑sud‑est et de 320 cm de longueur maximale. La largeur moyenne est de 150 cm. Sa régularité est notable du nord au sud. Au contact du passage F la hauteur sous voûte atteint 150 cm, alors qu’à l’extrémité nord elle s’abaisse à 120 cm. La coupe nord‑sud indique un pendage progressif de la voûte vers le nord ; le pendage de la base est conforme à cette tendance jusqu’au point 14, puis la base prend une allure subhorizontale. Il est à noter l’absence de discontinuité entre G et F au niveau des voûtes comme au contact des bases entre elles.

51La surface utilisable dans l’élément G ne subit pas (on le perçoit sur le plan) d’accident topographique accentué et elle coïncide avec la surface maximale en plan, soit 4,45 m². Les courbes de niveau montrent un microrelief doux plongeant régulièrement vers le nord, puis prenant une allure subhorizontale. Avant de quitter l’étude de la base retenons‑en la vision d’une surface potentiellement utilisable dans sa totalité.

52L’élévation des côtés rend l’élément G occupable même sur ses marges. Cependant les côtés marquent une tendance convergente en direction de l’intérieur de G. Cette courbure progressive ne permet pas de distinguer précisément la délimitation de la voûte, laquelle adopte une forme en arc brisé par rapport à une ligne imaginaire jalonnant les points 12’ à 14’. Il s’agit de l’arc brisé le plus visible de la cavité. Or, cette conception est nettement volontaire.

53La brisure de voûte n’est pas confondue avec une diaclase. Aucune trace de desquamation n’est perceptible. Ce caractère architectural est resté intact depuis l’origine. D’ailleurs, les excavations analysées plus loin ne sont pas altérées par l’érosion.

54A ce stade de l’analyse, il est essentiel de saisir le contraste qui existe entre l’état d’altération intense du puits E et l’aspect de très bonne conservation de l’élément central G. Plusieurs causes visibles ou latentes expliquent cette différence. L’accumulation du remplissage a protégé la paroi de G jusqu’à un niveau situé à 15 cm environ au‑dessous de la brisure de la voûte. La tenue de la partie superficielle de la roche en place s’est prolongée au point que l’on distingue nettement les traces des outils ayant servi à régulariser les côtés de l’élément. Toutefois, dans la mesure où nous avons constaté la rapidité de l’érosion au sein de la roche mère, il faut penser que l’élément G s’est trouvé isolé de tout contact externe à la cavité pendant un moment très court après le creusement du système de l’accès III. La conservation en effet des marques de travail dans une roche propice à la desquamation est inhérente à une stabilité parfaite de la température et du degré hygrométrique. L’occupation de l’élément G n’a pas dû revêtir les mêmes caractères que celle de l’élément B. Il est important à ce propos d’associer l’état de bonne conservation de G au fait que la hauteur moyenne sous voûte y est plus faible que dans B.

55L’analyse des éléments complémentaires de G concerne en premier lieu cinq excavations. Les éléments 45 à 49 sont creusés dans la voûte au sud du point 13’. Leur forme, leurs dimensions, leur volume, présentent des analogies marquées. Les alvéoles ont la forme d’un cône dont l’axe est subhorizontal. L’ouverture est située à l’emplacement de la base du cône. Son diamètre est de 10 cm environ ; la profondeur varie de 10 à 12 cm. Le volume est inférieur à 1 dcm³• Les éléments 46 et 49 ont une orientation nord‑ouest/sud‑est ; 45, 47 et 48 prennent une direction est‑ouest.

56La distribution des aménagements montre une relation tout d’abord générale, puis établie selon deux groupes perceptibles. Il s’agit d’une part du groupe 48 et 49 et d’autre part du groupe 45, 46 et 47. Nous avons affaire là à des associations identiques. La volonté de mise en relation de 49 et 48 est évidente. La distance entre les deux ouvertures est de 90 cm, mais les axes des deux excavations ne sont pas confondus. Il en est de même de l’association 46‑47 au sein du deuxième groupe. La distance entre les deux ouvertures est proche de 85 cm. La seule relation parfaite est celle qui unit 45 à 47 où les ouvertures sont opposées, séparées l’une de l’autre par un écart de 85 cm, et orientées selon le même axe. Ces excavations concernent la partie sud de l’élément G et, par conséquent, le rôle de cet élément est étroitement lié à l’activité résultant de la présence des excavations dont les dimensions sont pourtant faibles.

57L’étude des éléments complémentaires creusés dans le côté est de l’élément G nous remémore les découvertes réalisées dans le puits E. Le renfoncement 43 est creusé dans la paroi en position centrale et haute. L’analyse de sa base et de son aspect général conduit à des réflexions voisines de celles faites lors de l’étude des éléments 52 et 53. On a nettement la vision, au nord et au sud de 43, de creusements en cônes, formant des renfoncements secondaires. Ce système est très voisin de celui de l’élément 53, à cela près que dans ce dernier le stad9 initial n’est plus visible. L’élément 43 a été utilisé tel, c’est‑à‑dire avec des ébauches de creusement non poursuivies.

58L’élément 44 débouche au fond du renfoncement. Son ouverture est en position centrale et basse. Une diaclase subhorizontale suit la voûte sur une longueur proche de 80 cm. Nous avons vraisemblablement affaire à un conduit, mais dont l’extrémité orientale n’est pas analysable au stade actuel des travaux. La coupe longitudinale est subhorizontale, dépendant étroitement, nous l’avons vu, de la diaclase dont le miroir forme la voûte.

59L’élément 42 peut être comparé à 44, cependant il débouche directement dans la paroi de l’élément G. L’ouverture est en partie basse : la base de G et celle de 44 sont au même niveau. Il s’agit d’un élément incomplètement dégagé dont la longueur atteint 120 cm. L’orientation générale est ouest‑nord‑ouest/est‑sud‑est. En coupe, l’élément 42 marque un très léger pendage vers l’est qui n’a pu être calculé précisément mais qui doit être proche de l’horizontalité. La largeur et la hauteur de l’ouverture mesurent environ 20 cm, mais semblent se réduire vers l’est de 2 à 3 cm.

60La relation entre les éléments centraux B et G s’effectue par l’intermédiaire du passage H. La section de chacune de ces deux ouvertures est d’une surface très voisine. Au contact de l’élément B, l’ouverture a une base large de 60 cm ; la hauteur atteint 110 cm ; au débouché dans l’élément G la base est plus large de 54 cm et la hauteur ne dépasse pas 90 cm.

61Si la régularité de la base est constante tout au long du passage, il n’en est pas de même pour la voûte. Autant en plan qu’en coupe la base apparaît très bien définie. Sa largeur varie de 10 cm au maximum sur 195 cm de longueur totale. L’amincissement est très progressif vers le sud. La coupe transversale montre une base très plane, aux contacts particulièrement nets avec les côtés. Dans la direction nord‑sud la pente tendant vers le sud est caractérisée par une dénivellation de 20 cm pour 195 cm.

62Bien différent est l’aspect de la voûte. La section transversale est ovalaire aux ouvertures (en tenant compte de l’aplatissement dû à la base) ; elle tend au cercle dans le milieu du passage, entre les points 10’ et 11’. Parallèlement à ces modifications, la hauteur sous voûte diminue considérablement au milieu de H. De l’ouverture nord un abrupt abaisse la voûte à 80 cm : la dénivellation atteint 30 cm pour une distance de 20 cm. La pente s’affaiblit ensuite vers le sud mais reste cependant marquée : la hauteur la plus réduite (au point 10, 60’) ne dépasse pas 50 cm. Un processus inverse tend alors à l’élévation continue de la hauteur en direction du sud. Il faut remarquer qu’au nord la relation des bases de H et de B s’établit de plain‑pied ; au sud, la base du passage domine de 6 cm celle de l’élément central.

63Que pouvons‑nous déduire de cette analyse du passage étroit ? Il symbolise l’un des problèmes les plus controversés par les chercheurs qui ont étudié les souterrains.1I nous faut d’abord établir un caractère déterminant quant au mode de creusement : il s’agit de la nette division du passage en deux éléments uniformes convergeant par leurs pointes. Ensuite, sur le plan de l’organisation interne, nous percevons le contraste très visible entre l’élément B ouvert sur deux passages larges et l’élément G relié à B par un seul passage étroit. L’étude des occupations, associée à la synthèse des caractères architecturaux, permettra de comprendre cette différence d’organisation.

1.5. Unité IV

64Il s’agit d’un ensemble formé d’un accès débouchant dans un passage, établissant la liaison entre la zone nord de la cavité, analysée plus haut, et la partie sud du souterrain, actuellement non fouillée en totalité. La fouille de l’ensemble IV a commencé dès 1972 par l’étude de l’accès IV, puis jusqu’en 1973, fin de la fouille du passage, par l’exploration de son contact avec l’élément B jusqu’au point 8.

65L’accès IV est composé d’un seul élément architecturai : le puits J. Il se présente sous la forme d’une fosse dont le côté sud débouche directement dans le couloir I. A la surface du sol, l’ouverture est de section rectangulaire, de dimensions moyennes (190 cm x 70 cm) ; son grand axe a une orientation nord‑nord‑est/sud‑sud‑est. Les côtés sont creusés selon un plan subvertical. Le plus fort écart par rapport à la verticale est perceptible sur le côté sud ; on note 20 cm pour une profondeur de 190 cm.

66Au fur et à mesure que l’on descend dans l’élément, on assiste à un rapprochement des côtés, aussi bien entre les côtés est et ouest qu’entre les côtés nord et sud. L’amplitude est faible : à la base de J, c’est‑à‑dire à ‑290 cm sous la surface, la largeur est de 65 cm, soit une progression de 1 cm tous les 60 cm. Dans le sens nord‑sud, on constate un écart de 10 cm par mètre. Cette régularité des côtés n’est pourtant pas facilitée par l’existence de diaclases qui, telles qu’elles apparaissent, surtout dans la roche constituant les parois est et ouest, ont provoqué la formation de zones d’altération pénétrant profondément dans le granit.

67L’ouverture sur le passage I affecte, nous l’avons vu, essentiellement le côté sud de u dans sa partie basse. La situation de l’ouverture dans 1 est caractérisée par une position haute et centrale. La hauteur ainsi libérée pour passer d’un élément à l’autre est de 100 cm. La dénivellation entre les deux bases est de 60 cm.

68Il n’existe aucune différence importante d’aspect dans le passage entre la zone proche de l’accès IV et le reste de cet élément. L’accès (et ce fait doit retenir notre attention) n’est accompagné d’aucun aménagement interne. C’est le système d’accès le plus simple qui ait été reconnu jusqu’alors. En contrebas de l’ouverture sur J, un surcreusement de la paroi crée une pente d’environ 100°. Si l’on excepte ce caractère, limité spatialement et résultat d’une volonté évidente d’adoucir un abrupt rocheux, on remarque que, dans un périmètre proche de J, les parois ne montrent aucun traitement architectural particulier.

69Sur les dix mètres que compte (actuellement) le passage l la hauteur sous voûte varie entre 60 et 50 cm. On le voit donc, la régularité de cette configuration est remarquable. Par contre les coupes transversales traduisent une variabilité de la largeur du passage selon les endroits. Près du point 16 1a largeur à la base est de 110 cm. C’est le chiffre le plus important, alors que, du point 13 au point 14, du point 10 au point 11, la base est large de 60 à 70 cm.

70Ces variations de dimensions accompagnent des modifications de l’aspect de la paroi. Des points 15 à 17 la base marque transversalement une planéité relative et se différencie des côtés par une limite visible. On retrouve un phénomène voisin à partir du point 18 vers le sud. Ailleurs la base s’évase peu à peu et l’on passe sans transition aux côtés : c’est le cas en particulier de la zone allant du point 12 au point 15. La zone proche du point 12 livre des caractères mixtes : à l’ouest il n’existe pas de limite précise entre base et côtés ; à l’est le côté, subvertical, est lié à la base par un angle droit.

71L’identification de la voûte paraît aisée à définir dans la zone sud du couloir, à partir du point 15 jusqu’au point 16, 50. Elle a la forme d’un arc brisé. Ailleurs la voûte est arrondie ou plane : on ne peut déterminer de grandes zones homogènes.

72Il semble que la géologie et la géomorphologie ont joué un rôle dans les modifications de détail. Des diaclases importantes parcourent la voûte longitudinalement, de l’élément B jusqu’au point 10. De même la voûte est affectée par la tectonique du point 16 au point 18. Les diaclases transversales sont remarquables à chaque changement de direction du couloir. Un filon de feldspath très altéré coupe la paroi au voisinage du point 15. Nous devons associer la présence d’un coude dans le passage à celle de zones de faiblesse particulière. Il va sans dire qu’une telle association n’a peut‑être aucun rapport avec la réalité du creusement, toutefois elle doit être établie.

73De même il faut noter qu’un surcreusement de deux coudes est décelable sur le plan au niveau des points 12 et 18. Or, il est à chaque fois associé à une zone particulièrement étroite (entre les points 17 et 18 et près du point 11). Dans les deux cas le couloir forme un angle très fermé. La structure aux points 15 et 16 ne révèle pas de surcreusement. Nous avons là plutôt un arrondi qu’un angle marqué ; de plus, notons que la largeur moyenne atteint 100 cm à la base.

74En dehors du passage 18, analysé au sein de l’ensemble II, le couloir I renferme un autre élément annexé : le renfoncement 17. Il s’ouvre à la base de la paroi : l’extrémité du surcreusement du point 12. Profond de 40 cm pour une couverture d’un diamètre de 25 cm, il évoque un conduit ébauché, cela d’autant plus que son extrémité orientale est d’un faible diamètre : 10 cm environ. Nous avons là une sorte de cône dont le grand axe serait horizontal. L’évocation de l’élément 51, dans l’accès III, permet d’établir une ressemblance évidente.

75En fait l’ensemble IV nous apparaît moins fourni en éléments annexes que les zones précédemment étudiées ; il faut dire que sa fonction étant différente, nous devons nous attendre à une organisation également différente.

1.6. Synthèse

76La seule analyse des éléments, conduite selon chaque unité architecturale, permet de tirer des conclusions portant sur le mode de creusement, parfois aussi sur une fonction éventuelle (fig. 25). Chaque unité correspond à ce que nous définissons comme une unité de creusement. Une telle unité est homogène en elle‑même et l’étude spécifique et comparative des différentes unités permet d’appréhender une chronologie relative du creusement de l’ensemble souterrain.

77A la fin de cette étude de la structure nous saisissons l’esquisse d’une organisation que nous devons exprimer par des définitions utilisées lors des analyses et interprétations ultérieures. Les ensembles ainsi établis ne se confondent pas toujours avec les unités architecturales (fig. 26). L’ensemble l, de relation externe‑interne, concerne une zone occupant l’espace interne de l’accès I aux éléments 9 et 10. L’ensemble II, ouvert, d’occupation interne, englobe l’élément B et ses renfoncements. Il est ouvert par ses relations multiples avec d’autres zones organisées dans le souterrain. L’ensemble III, formé du passage H et de l’élément G, est un ensemble d’occupation interne, écarté (accessible par le seul ensemble II). L’ensemble IV, de relation externe‑interne, joue aussi un rôle de relation interne entre l’ensemble Il et la partie sud de la cavité. L’axe de circulation concernait lors du creusement tous les ensembles. Il ne s’applique plus, désormais, qu’au couloir A, à la salle B, au couloir I et au puits J. Les accès I et IV sont des accès permanents ; les accès Il et III ne furent plus utilisés au‑delà de la période du creusement.