Castellu (Haute-Corse)
| ,Chapitre 3. Étude du matériel
3. The finds
3. Studio del materiale
Résumé
Les sept monnaies découvertes, d’époques très différentes (du iie s. av. J.‑C. à la deuxième moitié du ive s. ap. J.‑C.), sont des témoins isolés peu significatifs. Toutefois, trois de ces exemplaires reflètent la circulation de la menue monnaie dans l’île durant l’Antiquité tardive.
La céramique africaine de cuisine et de table est présente à Castellu en quantité limitée. Les fragments de céramiqueafricaine de cuisine découverts correspondent à certaines formes particulières de céramique de cuisson et de plats ou de couverts attestées au sein de contextes des ive et ve s. ap. J.‑C, Les études les plus récentes situent en Tunisie leurs lieux de production, qui correspondent à ceux des sigillées A et D que l’on trouve aussi à Castellu en pourcentages très différents ; la sigillée africaine A représente 2 % du total ; la C est totalement absente. Les fragments de D, découverts parmi le matériel des deux sondages les plus importants, sont plus nombreux dans la couche d’occupation des pièces A et B du sondage V. A peu près 90 % des attestations se rapportent à des fragments de formes datées entre le ive et le viie s. Le répertoire des formes est plutôt varié ; nous rappelons en particulier les vases à listel de types Hayes 91 n. 28, B et D, présents surtout dans des contextes des ve et vie s.
La céramique commune de cuisine découverte à Castellu a probablement une origine locale, comme semble le confirmer en partie l’examen des argiles. La faible quantité de matériel découvert ne permet pas de déterminer de façon satisfaisante les caractéristiques de cette production ; on doit cependant signaler le pourcentage élevé des fragments de vases à listel, parmi lesquels quelques mortiers. Il s’agit probablement d’imitations de la forme sigillée Hayes 91, très répandue durant l’Antiquité tardive et souvent reproduite par la céramique d’usage courant, comme le démontre la production africaine des « flanged bowls » du ve au viie s. ap. J.‑C. Parmi les formes fermées, un petit groupe d’exemplaires se distingue par sa facture soignée et le type de l’argile (pâte 11), pour laquelle une provenance africaine a été suggérée.
Les formes pour cuisson peuvent être divisées en plusieurs groupes : ollae avec lèvre à profil quadrangulaire, qui dérivent des marmites de production africaine ; ollae à lèvre plane plus ou moins épaissie, une forme très répandue ; marmites à bord rentrant en amande, avec des éléments de préhension semi‑circulaires, qui sont‑avec des variations locales‑une des formes les plus répandues pendant l’Antiquité tardive et le Haut Moyen Age. Parmi les fragments impossibles à relier à une typologie connue, on signale un vase fragmentaire à rebord décoré avec un appendice cylindrique.
On rencontre une grande variété de formes qui sont peu représentées numériquement ; on signale un récipient en forme de petit dolium, un grand vase de forme tronconique avec des éléments de préhension, un autre vase campaniforme avec éléments de préhension, un couvercle à marli.
Les fragments d’amphores découverts à Castellu constituent un groupe homogène de matériel qui renvoie à un horizon chronologique qui comprend tout le vie s. ap. J.‑C. Le panorama des formes attestées comprend les spatia, les grandes amphores cylindriques africaines de l’Antiquité tardive, un récipient oriental (la variante la plus tardive de la LR 1) et une famille de petites amphores fuselées que l’on retrouve souvent dans les stratigraphies des vie et viie s. Ces dernières, produites en Afrique à partir du ve s., connaissent une large diffusion dans les régions méditerranéennes, en donnant peut‑être lieu à des phénomènes isolés d’imitations locales. Bien que l’échantillonnage soit réduit‑mais il n’en est pas moins significatif pour autant – les amphores de Castellu constituent le témoignage éloquent d’une économie méditerranéenne encore vitale et dynamique, qui, bien qu’éclatée en différents marchés régionaux, conserve intégralement certains des grands axes commerciaux capables d’atteindre des établissements ruraux aussi isolés et éloignés de la mer.
Les fragments ont été classés en fonction de la technique de fabrication (du verre soufflé exclusivement), de la couleur, de l’épaisseur des parois et en fonction aussi du niveau de transparence et de détérioration de la surface. Compte tenu du caractère fragmentaire du matériel, l’individualisation des types a été fondée sur la distinction entre les rebords et les fonds. La forme Isings 111 est attestée dans la phase d’effondrement du sondage I et durant la période d’occupation du sondage V. Le type Isings 105, contemporain de cette production, a été identifié par un fragment du sondage I et il est attesté en général au sein de contextes des ve et vie s. En ce qui concerne la pâte de verre, les perles de collier, caractéristiques pour leur décoration « à yeux », confirment la grande diffusion de ce type d’objet, produit dans différentes régions de l’Empire et connu jusqu’au Bas Moyen Age.
Plusieurs des os travaillés se réfèrent à une parure de toilette ; parmi ceux‑ci, un panneau de coffret et une partie de peigne décorés de scènes de thiasos marin. On a trouvé aussi, parmi d’autres éléments, de nombreuses baguettes d’encadrement ou de raccord.
Afin d’en simplifier la présentation, les objets étudiés ont été divisés en trois classes : objets d’usage personnel, objets d’usage domestique, objets d’attribution incertaine ou d’usage impossible à préciser. Parmi les objets d’usage personnel, les fibules à arc avec fixation à charnière et une fibule cloisonnée ovale, d’un type très rare, présentent un intérêt particulier. Parmi les objets d’usage domestique –tels que pointes de fuseaux, appliques et prises de récipients, spatules et bossettes–, il faut signaler la découverte d’un poids de forme tronconique. Pour de nombreux objets extrêmement fragmentaires, aucune identification n’a pu être établie. Dans le cas où une datation peut être suggérée, la fourchette chronologique couvre les ve et vie s.
D’après leur fonction, les nombreux objets de fer découverts peuvent être subdivisés en éléments liés aux structures de l’habitat (clous, crampons, crochets), instruments de la vie quotidienne (couteaux, stylets, instruments de travail, armes, mors de chevaux) et objets liés aux vêtements.
Il faut aussi ajouter, parmi les varia, les objets de définition incertaine et les fragments que l’on ne peut attribuer à des objets précis. La nature même de ces objets, plus pratique qu’ornementale, explique que souvent aucune évolution formelle ne les caractérise dans le temps ; ils conservent une typologie semblable même au sein de contextes chronologiques, géographiques et culturels très différents. Cependant, les comparaisons possibles avec des objets provenant de sites du Haut Moyen Age amènent à suggérer une datation comprise entre le ve et le viie s. ap. J.‑C.
Les objets de plomb sont jusqu’ici très rares sur le site. Comme les objets de fer, leur nature même, fonctionnelle, fait qu’ils conservent des caractéristiques constantes au cours des siècles, de sorte que leur chronologie est souvent impossible à établir. En outre, les découvertes de Castellu se présentent dans un état tellement fragmentaire qu’elles n’autorisent aucune tentative chronologique précise.
Sont étudiés dans cette partie tous les matériaux de construction de terre cuite découverts dans la stratigraphie des sondages I et V. La classification typologique qui en résulte a permis de distinguer trois types de tegulae à partir de quelques détails morphologiques, mais qui sont structurellement proches les uns des autres ; en effet, il apparaît nettement dans la stratigraphie des couches d’effondrement de la pièce B du sondage V que les tuiles étaient utilisées pour une même couverture, bien qu’en quantités différentes, Au terme de la classification se trouvent l’ensemble des fragments d’imbrices et quelques exemplaires de tegulae mammatae que l’on peut attribuer, dans les deux cas, à un prototype unique.
Les meules retrouvées en cours de fouille sont peu nombreuses ; six exemplaires fragmentaires ont été identifiés : deux meules dormantes (metae) et quatre courantes (catilli), auxquelles s’ajoute un fragment de mortier. Le matériel utilisé pour la fabrication de la majeure partie de ces objets est le granit à grain fin, très répandu en Corse. La typologie comprend un type de meule dormante, deux de meule courante et un de mortier.
L’étude des 25 000 ossements découverts dans les sondages I et V met en évidence la présence en Corse, au vie s. ap. J.‑C., du Rat (Rattus rattus) et du Cerf (Cervus elaphus). Les os des espèces domestiques (Coq, Cheval, Porc, Bœuf, Mouton et Chèvre) permettent, pour la première fois en Corse, de préciser la part qui revient aux améliorations zootechniques romaines et médiévales dans la mise en place des races traditionnelles actuelles et dans l’amélioration des techniques de gestion. La chasse était limitée mais diversifiée, surtout dans le groupe humain qui rejetait ses déchets dans le bâtiment du sondage I. On pratiquait le commerce de la viande de veau. La découpe bouchère, artisanale et raffinée, était proche de celle connue sur le continent. De nombreuses pièces en cours de façonnage, surtout dans le sondage V, témoignent d’un artisanat de l’os dont les finalités restent obscures.
L’étude carpologique porte sur les paléosemences carbonisées et minéralisées, issues d’un niveau daté du vie s. ap. J.‑C. Ces restes semblent correspondre à des déchets domestiques. Bien que très modeste, cet échantillon permet d’attester la présence de douze taxons végétaux dont la plupart appartiennent à la catégorie des Fruitiers. Deux céréales ont aussi été reconnues (Blé tendre‑compact et Orge vêtue). Ces résultats, en conformité avec ceux des sites continentaux du Haut Moyen Age, complètent les données sur l’alimentation végétale des populations humaines de cette période.
Texte intégral
3.1. Monnaies
1Les sept monnaies trouvées sur le site ne permettent aucune remarque d’ensemble. Elles appartiennent en effet à des époques trop différentes et sont presque toutes des témoins isolés de la circulation monétaire.
2L’as à la proue relève du système oncial : la différence entre son poids (21,58 g) et le poids théorique de l’as de cette série (27 g) correspond à sa très forte usure. Ces pièces ont été frappées jusqu’en 146 mais leur circulation s’est prolongée bien au‑delà de cette date, au moins jusqu’à la première décennie du ier s. av. J.‑C. L’usure même de cette pièce témoigne d’une longue circulation.
3Le sesterce de Philippe, frappé entre 244 et 249, appartient à une catégorie de monnaies qui, au contraire, n’ont guère servi plus d’une vingtaine d’années. En effet, les frappes de bronze, devenues rares au milieu du iiie s., ont été massivement refondues pour alimenter la fabrication des antoniniani émis par Gallien de façon massive.
4L’antoninianus de Tacite n’a que peu de chances d’avoir servi au‑delà des premières années du IVe s.
5Le follis de Constantin est, de toutes, la pièce dont l’existence a été la plus courte. Emise en 315‑316, elle appartient à une série autoritairement démonétisée en 318.
6Les trois dernières pièces enfin sont les seules à se regrouper et à pouvoir refléter la circulation monétaire de la même époque. Ce sont trois imitations coulées, la première au type du cavalier accompagné de la légende Fel temp reparatio, aes 3 des années 355‑361, la seconde au type de la Victoire avec la légende Securitas reipublicae, de 364‑378 ; la dernière enfin de type indéterminé mais que son module et l’aspect de son flan rattachent manifestement au même groupe que les deux précédentes. Ces imitations ont circulé jusqu’au milieu du ve s., comme le montrent en particulier les trésors d’Afrique du Nord.
7En résumé, quatre pièces sont des témoins isolés et peu significatifs d’époques très différentes ; trois, au contraire, sont le reflet de ce que pouvait être la menue monnaie dans l’île à la fin du ive s. et durant toute la première partie du ve s.
3.2. Céramique africaine (fig. 22‑25)

• Fig. 22 à 25 –Sigillée africaine. – 22. Frag, de fond, décor Hayes 1972 : 112. – 23. Frag. de rebord de cruche, forme Boninu 1972‑ 73 : 42. – 24. Frag. de fond de coupe, décor Hayes 1972 : 311. – 25. Frag. de fond, décor Hayes 1972 : A (ii)‑(iii).
- 1 Je remercie vivement M. S. Tortorella pour ses suggestions précieuses.
8La céramique africaine, de cuisine et de table, est présente à Castellu, bien que fragmentaire, en quantité assez importante. Il a été possible d’attribuer à des types déjà connus la majeure partie des tessons, grâce à la standardisation qui caractérise cette classe et à la riche bibliographie qui les concerne1.
9La céramique africaine de cuisine est peu présente. Les quatre fragments découverts sont relatifs à des formes caractéristiques : des vases destinés à la cuisson (casseroles et marmites), des plats et des couvercles. Il s’agit en général de types dits « a patina cinerognola ». C’est le cas de la casserole du type Hayes 23, retrouvée dans la couche la plus superficielle du sondage V et communément attestée dans des contextes des ive‑ve s. (Ostia IV : 72). Elle appartient à la même phase qu’un fragment de plat/couvercle du type Ostia III, 267. La production de ces types commence à l’époque des Flaviens (Hayes 1972 : 48), mais elle se poursuit jusqu’à la fin du ive s. et au début du ve s. (Atlante I : 209). Il faut plus vraisemblablement lier les exemplaires de Castellu à la phase de fréquentation du site (ve s.), plutôt que les considérer comme des attestations résiduelles. En ce qui concerne la localisation des centres de production, ils sont habituellement situés en Tunisie du Nord et en particulier dans la zone de Carthage (Atlante I : 210). Ce sont les lieux mêmes de production des sigillées africaines A et D. Ces dernières sont attestées à Castellu en pourcentages très différents : 2 % seulement, en effet, appartiennent à la production de A, alors que les 98 % restants sont en D. La production de C est totalement absente.
10La céramique sigillée africaine A est attestée de façon sporadique dans les couches les plus « polluées » du sondage I. Le caractère fragmentaire du matériel a empêché d’en proposer la typologie ; il s’agit en effet de quelques fragments de parois produits en argile D1, avec un vernis extérieur de A, de forme impossible à identifier.
11Il faut signaler un rebord de cruche reconstitué à partir de trois fragments (fig. 23) : il s’agit de la forme Boninu 1971‑72, fig. 42. Le fragment peut être comparé à un exemplaire de forme inconnue, conservé au musée de Cagliari (Boninu 1971‑72 : 356), et daté de la fin du Ier et du début du iie s. La découverte à Castellu d’une forme aussi peu connue permet d’en élargir l’aire de diffusion (Atlante I : 42).
12A partir de l’analyse de la production de D, on peut constater que la majeure partie des fragments est produite en argile granuleuse, avec un vernis opaque D1. A partir des découvertes de rebords et de fonds, on peut remarquer une nette prédominance des bols (60 %) par rapport aux coupes (20 %) et aux formes fermées (20 % : des vases uniquement).
- 2 Ostia IV : 7 ; Humphrey 1976 : 55. En général, sur le problème de la chronologie initiale, cf. Haye (...)
13Les tessons de la production de D sont attestés dans tous les sondages qui ont livré du matériel et ils sont particulièrement présents durant la période IIIA du sondage V et avec une concentration majeure durant la phase d’abandon de la pièce du sondage I. 90 % environ des fragments datés peuvent être attribués à des types datables entre le ive et le vie s. Le répertoire des formes est assez varié. Les formes ouvertes les plus anciennes sont représentées par des plats de types Hayes 58B et 61, et par des coupes du type Hayes 94. Les formes ouvertes les plus tardives apparaissent être des plats du type H ayes 93 (dont la production commence en 470) (Atlante I : 102) et des types Hayes 88, 95, 105 et 107, cette dernière forme étant plutôt rare et en général présente au sein de contextes du viie s. (Atlante I : 102). Les coupes les plus nombreuses appartiennent au type Hayes 99, daté à partir de la seconde moitié du ve s. (Hayes 1972 : 155). Le type Hayes 97 provient probablement de ces mêmes ateliers dont la production cesse autour de l’année 550 ap. J.‑C. (Atlante I : 109‑111) et dont il a été possible d’identifier un seul fragment de rebord découvert dans les couches les plus superficielles du sondage V et déjà connu en Corse, à Mariana (Jodin 1971 : 37). Parmi les vases à listel figurent les types Hayes 91, no 28, B et D, documentés au sein de contextes des ve et vie s.2.
14Il faut enfin signaler le fragment décoré de cercles concentriques (fig. 25) qu’il faut peut‑être attribuer à la forme Salomonson 1968, fig. 32. Il s’agit d’une forme semi‑fermée, qui présente une paroi légèrement convexe, décorée à l’extérieur par ces cercles estampés. Cette forme, qui appartient à la production D2, est peu représentée, et connue à Carthage dans des contextes de fin ve‑début vie s. (Atlante I : pl. LIII, 6).
15Le répertoire des décorations présentes sur le matériel de Castellu permet de mieux définir l’aire de provenance : les ateliers d’Oudna, en particulier, produisaient certaines des décorations estampées découvertes à Castellu. Au‑delà du style A(ii)‑(iii) de Hayes du fragment de la fig. 22, il faut rappeler l’estampille Hayes 112b (Hayes 1972 : 250) représentée par une feuille de lierre stylisée, imprimée sur le fond de la coupe du type Hayes 99 (fig. 22). De ces mêmes ateliers d’Oudna semble provenir la coupe qui présente un rebord à listel plan, muni de lobes, du type Hayes 97 (pour les ateliers, cf. Gauckler 1897 : 362).
16Le motif de la croix (estampille Hayes 311e), généralement imprimé sur le fond de coupes du type Hayes 99, seul ou accompagné d’autres représentations (Atlante I : pl. LIX, 42 ; Jodin 1971 : 47 ; Guéry 1970 : 291), apparaît ici reproduit deux fois sur un fragment d’un type probablement différent, mais impossible à identifier (fig. 24).
3.3. Céramique commune (fig. 26‑64)
17Avec le terme général de céramique commune, nous avons voulu indiquer à la fois la vaisselle utilisée pour la préparation et la conservation des aliments et des boissons, et celle utilisée pour la cuisson. Alors que pour d’autres sites cette différence se retrouve aussi au niveau de l’argile employée pour la fabrication du matériel (plus dégraissée pour la vaisselle de cuisine, et riche d’inclusions pour celle destinée au feu) (Ricci 1985 : 93), cela ne se produit pas toujours à Castellu où certaines pâtes se retrouvent avec les mêmes caractéristiques dans chacun des deux groupes.

• Fig. 26 à 47 – Céramique commune – 26‑29. Coupes à listel et mortiers. – 30‑31. Mortiers. – 32. Frag. de bord de mortier avec bec verseur. – 33‑35. Coupes à listel. – 36‑39. Formes ouvertes. – 40‑47. Cruches.

• Fig. 48 à 64 – Céramique commune. – 48‑49. Bouteilles. – 50. Frag. de bec verseur. – 51‑59. Fonds divers. – 60, 62. Poids de métier à tisser. – 61. Coupe à listel. – 63. Cruche. – 64. Frag. de forme ouverte (?).
18Cette première partie du texte sera consacrée à l’examen de tout le matériel non utilisé pour la cuisson ; pour son étude et sa classification, il a été décidé d’adopter un critère morphologique en suivant par conséquent la division traditionnelle entre formes ouvertes et formes fermées. Cette division est apparue plus adaptée que la séparation des différents types selon leur utilisation ; en effet, si pour certains d’entre eux, cette utilisation est matériellement évidente (par exemple pour les mortiers), pour plusieurs autres, il est difficile de l’établir avec précision. A l’intérieur des groupes ainsi obtenus, de nouvelles subdivisions ont été établies toujours en fonction de la morphologie : pour les formes ouvertes, ont été réunies les coupes à listel (en y incluant les mortiers à proprement parler) ; parmi les formes fermées, les cruches ont été distinguées des bouteilles, selon un critère ‑ utilisé lorsque l’état de conservation le permettait ‑ qui regroupe dans le premier cas celles qui ont une ouverture large, et dans le deuxième celles qui ont une ouverture plus étroite et un col distinct (Ostia III : 423, 429).
19L’étude de la céramique commune pose, en Corse plus qu’ailleurs, des problèmes objectifs liés à l’absence de comparaisons possibles dans l’île, et on ne peut, à l’heure actuelle, circonscrire d’éventuelles productions locales.
- 3 Parmi celles‑ci nous considérons aussi les formes fig. 29 et 32 qui devaient avoir des dimensions p (...)
20L’une des données les plus significatives concernant la céramique commune de Castellu est constituée par la présence dominante, par rapport aux autres formes, des coupes à listel (fig. 26‑29, 32‑35, 61) 3. Certaines d’entre elles sont des mortiers (fig. 27, 29) ; pour les autres types, l’état de conservation ne permet malheureusement pas d’en définir l’usage. L’argile utilisée pour la fabrication de la quasi‑totalité de nos exemplaires correspond aux pâtes 1 et 2, probablement d’origine locale, utilisées également pour la fabrication d’une partie des matériaux de construction en terre cuite découverts à Castellu. Nous avons par contre exclu de cet ensemble les fig. 30‑31, qui présentent la pâte 7, d’origine non identifiée. Il est important de souligner la manière dont l’exemplaire de la fig. 30 se détache des autres objets de la série même par sa morphologie : nous n’avons pas en effet de listel à proprement parler, mais un épaississement de la paroi externe, à l’endroit où elle s’unit au bord, défini dans le catalogue, pour plus de commodité, « listel atrophié ».
- 4 La fig. 20, in Humphrey 1978 : 68, illustre bien la distribution chronologique et l’évolution de la (...)
- 5 Humphrey 1976 : 88‑89 ; la classe 1 est divisée en trois sous‑classes qui correspondent à trois pha (...)
21Pour toutes les autres coupes à listel, le matériel découvert à Carthage ces dernières années permet d’effectuer des observations importantes. Le site africain a restitué une grande quantité de mortiers et de flanged bowls (Fulford, Peacock 1984 : 155) dont la chronologie, très vaste, va du ve s. à tout le viie s.4. La grande quantité de fragments à sa disposition a permis à Hayes, à partir de l’analyse de l’évolution morphologique des listels, de subdiviser les flanged bowls en deux classes, qui correspondent en outre à deux facies chronologiques différents5. Nées comme des imitations de la forme de sigillée Hayes 91, ces deux classes continuent à être produites parallèlement, sans que l’une ne remplace l’autre, à aucun moment (Humphrey 1978 : 69). Le contexte tardo‑antique de Castellu nous a livré une situation analogue en ce qui concerne les coupes à listel, où les formes de sigillée Hayes 91 côtoient des imitations en céramique commune. Les exemplaires corses (pâtes 1 et 2) sont très différents l’un de l’autre par la forme du listel, toujours présent et souvent placé immédiatement au‑dessous du bord. L’imitation de la sigillée apparaît aussi à l’évidence par le traitement de la surface externe de certaines des coupes, lissée de façon à paraître plus uniforme et à donner un aspect moins grossier à l’argile locale.
- 6 Humphrey 1976 : 89 ; cette hypothèse semble confirmée par la faible épaisseur des parois de ce type (...)
- 7 D. P. S. Peacock s’est occupé de façon spécifique des fragments de pierres découverts sur le fond d (...)
- 8 Des flanged bowls ont été également découverts à Bérénice où ils semblent cependant rares et n’appa (...)
22La forme, presque entière, que reproduit la fig. 27, se détache de tous les autres exemplaires, à la fois par son état de conservation et par sa facture soignée. La pâte 2 qui la caractérise est mieux dégraissée que dans les autres cas ; à l’intérieur, le vase est décoré de trois bandes blanches concentriques qui délimitent le fond, parsemé de minuscules éclats de pierres. Ce dernier élément devrait écarter tout doute quant à sa fonction de mortier, bien que les parois puissent sembler plutôt fines pour une telle utilisation. A Carthage, pour le type 1c de la classification de Hayes, les éclats de pierres occupent un espace trop limité sur le fond pour qu’il soit permis de penser à une utilité réelle, ce qui a amené Hayes à envisager un rôle décoratif6 ; cela semble devoir être exclu pour l’exemplaire de Castellu, à la fois à cause de la dimension des éclats de pierres, et à cause de leur répartition7. Le listel court et épais placé immédiatement au‑dessous du bord de l’exemplaire de la fig. 27 caractérise également une forme africaine répandue durant la seconde moitié du vie s. (Fulford, Peacock 1984 : 201, fig. 77, 11,1). Mais les analogies les plus convaincantes renvoient à la forme Hayes 91D, dont la forme de la fig. 27 semble être une imitation directe8. Le listel, avec son extrémité légèrement pointue et pendante (fig. 35) est également celui de Fulford, Peacock 1984, fig. 77, 13, 2, lui aussi caractéristique de la seconde moitié du vie s. Le mortier de la fig. 30 mérite aussi d’être pris en considération séparément, puisque sa morphologie se détache de celle des autres exemplaires évoqués jusqu’ici. Un exemplaire semblable à celui‑ci a été découvert à Bérénice et daté du vie s. ap. J.‑C. ; il présente un épaississement qui souligne le passage du bord à la paroi et qui conserve un angle vif sur la paroi externe (Riley 1979 : 362, fig. 131, D 1025). L’autre exemplaire de la fig. 30, lui aussi avec un bord plié à l’intérieur, mais sans listel, est comparable à un vase de la fouille de Pollentia provenant d’une couche datée approximativement entre 250 et 400 ap. J.‑C. (Vegas 1965 : 124, pl. 7, 3).
- 9 Frova 1977 : pl. 3373 ; elle est indiquée dans le texte comme ceramica grezza (céramique grossière) (...)
23Pour conclure cette présentation des coupes à listel, il apparaît opportun de noter la manière dont la fouille de Castellu constitue une nouvelle confirmation de la grande popularité de cette forme durant l’Antiquité tardive, aussi bien dans sa version en terre sigillée que pour ses imitations en céramique commune. A côté de cet ensemble homogène se trouvent les autres formes ouvertes et fermées pour lesquelles il a été difficile de trouver des références morphologiques et chronologiques pleinement satisfaisantes. Presque toujours, chacun des types n’est représenté que par un seul exemplaire et souvent en mauvais état de conservation. Les pâtes 1,2 et 3 demeurent les plus répandues. Parmi les formes ouvertes les plus caractéristiques, nous trouvons : la petite olla de la fig. 38, dont les deux exemplaires presque identiques que nous avons découverts apparaissent très proches d’un fragment de la fouille de Luni9 et d’un petit dolium de celle de Settefinestre (Ricci 1985 : fig. 23,1), et les fig. 37 et 36 qui rappellent respectivement la forme de céramique africaine de cuisine Ostia III, fig. 170 (exemplaires de la première moitié du iiie et du ive s, ap. J.‑C.) et Ostia III, fig. 267 (connue au sein de contextes d’Ostie de la fin du ive ‑ début du ve s. ap. J.‑C.).
24Outre les pâtes d’origine non identifiée (pâte 7) que l’on retrouve dans un certain nombre d’exemplaires, la pâte 11, par comparaison avec les amphores de transport de provenance sûre, pourrait provenir d’Afrique du Nord. Cette donnée doit être acceptée avec toutes les précautions nécessaires, compte tenu de la nature de l’examen qui a été pratiqué sur les argiles, fondé exclusivement sur des observations empiriques. Cette pâte est caractéristique de certaines formes fermées qui dénotent une facture plutôt soignée (fig. 42, 48‑49, 63) ; l’état de conservation extrêmement fragmentaire de ces objets ne permet pas de mieux définir leur nature et leur fonction, ce qui a amené à utiliser les définitions générales de « bouteilles » ou « cruches ». La donnée principale qui peut être tirée de l’analyse de ces tessons est qu’ils constituent un petit ensemble homogène, avec ses propres caractéristiques et, au‑delà du type de pâte qui leur est commun, avec un soin dans la facture qui le distingue à la fois du groupe des formes d’origine locale et des productions non identifiées. Cependant, l’absence de comparaisons directes (seul l’exemplaire de la fig. 63 peut être comparé à celui découvert à Settefinestre [Ricci 1985 : fig. 3,18], mais il est attesté dans la IIIe période, sévérienne) et la faible quantité d’exemplaires découverts ne permettent pas d’approfondir plus, ni de mieux préciser leur provenance ou leur centre de production.
25En conclusion, en ce qui concerne les fonds découverts, aussi bien plats (fig. 53‑56) qu’avec pied à anneau (fig. 51, 57), il est difficile de les attribuer à l’une ou l’autre des formes que nous avons identifiées, à l’exception de celle de la fig. 59 qui a un lien avec celle de la fig. 38 (traitement analogue de la surface). On doit également noter la parenté étroite des formes des fig. 55 et 56 avec les fonds des exemplaires de céramique de cuisine (fig. 103,106) où les traces de feu caractérisent mieux le type d’utilisation.
3.4. Céramique de cuisine (fig. 65‑106)

• Fig. 65 à 76 – Céramique de cuisine. – 65‑69. Ollae ourlées par une lèvre bien détachée de la panse, au profil quadrangulaire. Le fond est légèrement courbe. – 70‑76. Marmites à bord rentrant, épaissi, en amande, avec éléments de préhension sur l’épaule.

• Fig. 77 à 94 – Céramique de cuisine. – 77‑83. Frag. de rebord d’olla à lèvre plane, plus ou moins épaissie. – 84‑86. Frag. de marmite à listel, à paroi presque verticale. – 87. Vase à lèvre décorée, avec appendice cylindrique creux. – 88. Vase campaniforme à profil continu. – 89. Vase à lèvre presque triangulaire. – 90. Vase campaniforme à lèvre presque carrée. – 91. Frag. de lèvre déformé ouverte. – 92‑94. Frag. de couvercles.
3.4.1. Introduction
26Les problèmes posés par la céramique de cuisine sont nombreux : d’abord, comme on le verra plus en détail, l’exposition au feu que ces vases ont subie à plusieurs reprises a entraîné une modification de la couleur des argiles et de leurs inclusions qui en rend difficile une classification. En l’absence de toute analyse pétrologique, il est impossible de formuler une hypothèse quelconque sur l’origine de cette céramique.
27Comme l’a bien souligné M. G. Fulford pour Carthage (Fulford, Peacock 1984 : 229), la difficulté dans la recherche de comparaisons pour cette classe de matériel est accrue pour la période qui va du ve au viie s., à cause du nombre réduit de publications. Heureusement, la publication rapide et soignée des résultats des fouilles récentes de Carthage aide à éclaircir ce panorama.
- 10 Arcelin‑Pradelle, Laubenheimer 1985 : le problème se pose, dans ce cas‑là, même pour un travail au (...)
28Enfin la technique de fabrication, par le biais du tour lent (sauf pour les couvercles, (fig. 92, 93) ne permet pas d’avoir des produits finis aussi « parfaits »10 que dans le cas de vases travaillés au tour rapide ou moulés.
29Néanmoins, parmi les vases de cuisine, on peut identifier un certain nombre de groupes qui comprennent des formes morphologiquement semblables. C’est sur cette base que l’on a ordonné le matériel dans le catalogue par sondages.
3.4.2. Vases
- 11 Les fragments fig. 69 et semblables ont une lèvre de la même allure, mais qui tend plutôt au triang (...)
- 12 Le phénomène est très clair dans les couches du grand remblai des Terme del Nuotatore à Ostie (Osti (...)
30On peut reconstituer la presque totalité du profil d’un premier groupe de formés (fig. 65‑69). Il s’agit d’ollae de forme ouverte, évasées, ourlées par une lèvre bien détachée de la panse, au profil quadrangulaire11, présentant à l’extérieur un pan plus ou moins vertical et à l’intérieur un ressaut plus ou moins marqué. Le fond, au moins pour l’exemplaire le mieux conservé (fig. 65), est convexe. Ces ollae dérivent vraisemblablement de la grande famille des marmites de production africaine, qui envahissent les marchés de la Méditerranée occidentale au cours du iie s.12. Des profils semblables aux nôtres se retrouvent dans le matériel provenant des couches médiévales de Luni (Frova1977 : 649, CS 1402, pl. 337,2 ; CS 1180/1, pl. 337, 7) et elles sont apparentées aux ollae en céramique commune grise produites à Bollène‑Jon‑queirolle (Vaucluse) et provisoirement datées de la fin du ve. (Thiriot 1986 : 243‑245, pl. v, nos 1‑17, ollae de type A1).
- 13 Comme, par ex., à Sétif (Février 1965 : fig. 26, F1,C1,14‑15 ; C 3 b, 35‑36 ; fig. 27 F 1 et 2, C 4 (...)
31Un autre groupe bien caractérisé est celui des marmites à bord rentrant épaissi, en amande, qui présentent sur l’épaule des éléments de préhension semi‑circulaires, probablement au nombre de quatre (fig. 70‑75). Le corps peut être globulaire ou à tendance cylindrique, le bord plus ou moins rentrant, les anses plus ou moins horizontales. Il s’agit d’une forme pour la cuisson, laquelle, avec des variations même importantes propres aux différents sites13, est parmi les plus répandues pendant l’Antiquité tardive et le Haut Moyen Age.
- 14 Sardaigne : Moravetti 1976 : 84, no 484, pl. XXIX, associée à une lampe du type Deneauve VIII B. Po (...)
- 15 Albintimilium : Lamboglia 1950 : page 152, nos 133‑134, fig. 87, à page 503 ; ve s. Carthage : Fulf (...)
32Le type est déjà présent en Sardaigne dans la première moitié du iie s. et se trouve abondamment dans les couches tardives de Porto Torres14. Les exemplaires sardes présentent un fond plat large (dont le diamètre est de peu inférieur à celui de la panse) : on n’a retrouvé aucune trace de fonds semblables à Castellu. Des formes analogues modelées ont été trouvées à Albintimilium, à Carthage dans des couches datables du vie s. et à Luni, dans des contextes du Haut Moyen Age15.
33De nombreux fragments de rebords d’ollae à lèvre plane, plus ou moins épaissie, parfois légèrement moulée, ont été regroupés (fig. 77‑83). Paradoxalement, il est très difficile de trouver des comparaisons précises à cause de la banalité de la forme de la lèvre, qui dérive elle aussi des productions africaines a patina cinerognola. Les bords de dimensions plus réduites à lèvre simple (fig. 81) ressemblent beaucoup à des fragments provenant de couches datables du ve s. au début du viie s. de la fouille de Via della Consolazione à Rome (fouilles de G. Maetzke, rapport à paraître).
- 16 Frova 1973 : col. 423, CM 615, 1, pl. 75, 13 ; id. 1977 : 209, CM 11279/8, pl. 135, 1 (2emoitié ive(...)
34Le dernier groupe que l’on a pu identifier est constitué par des marmites à listel, à paroi presque verticale (fig. 84‑86). Des vases semblables ont été retrouvés à Rome, dans la fouille de la Schola Praeconum (Whitehouse 1982 : 65, fig. 7, no 76) et datés de la première moitié du ve s., ainsi que dans des couches tardives et du Haut Moyen Age de Luni16.
35Il est impossible d’insérer les autres vases dans les groupes que l’on vient de décrire, car ils ne présentent entre eux aucune analogie d’un type quelconque.
36Le vase à lèvre décorée (fig. 87) présente une série de problèmes liés à son usage. L’appendice cylindrique, contrairement à d’autres vases de l’Antiquité tardive et du Haut Moyen Age à bec verseur (par ex. Lamboglia 1950 : 151‑152, no 116 ; 160, no 3, fig. 94 à p. 163) est horizontal et très proche du rebord, ce qui rend pratiquement impossible le déversement d’un liquide. L’hypothèse qui me semble donc la plus logique pour expliquer cet appendice est celle de l’insertion d’une poignée en bois pour retirer le récipient chaud du feu. Malheureusement on ne peut reconstruire qu’une partie infime du profil. Sur la surface horizontale de la lèvre a été incisé un décor avant la cuisson : il s’agit de traits rectilignes et courbes qui semblent imiter une écriture. Des signes semblables ont été tracés aussi, avant cuisson, sur des prises de marmites trouvées à Luni dans un contexte daté de la moitié du ive à la moitié du ve s. (Frova 1977 : 529, K 2514/20, pl. 277, 14 ; groupe 40).
37Pour le vase campaniforme au profil très simple de la fig. 88, dont l’argile semble mal cuite, on trouve des comparaisons, pour la forme et la pâte, dans les couches tardives de Nador (rens. oral D. Manacorda).
38Le vase à lèvre presque triangulaire (fig. 89) est malheureusement trop fragmentaire pour permettre d’établir des comparaisons sûres ; néanmoins le bord rappelle celui des ollae trouvées à Classe dans le puits d’un égout de l’habitat de l’Antiquité tardive et du Haut Moyen Age (Gelichi 1983 : 127‑129 ; Brogiolo, Gelichi 1986 : 295‑297, pl. II) qui présentent, en général, un décor à lignes ondulées sur l’épaule.
39Le vase campaniforme de la fig. 90, dont la lèvre forme des angles aigus dans la partie haute, présente une pâte qui, ayant été exposée plusieurs fois à l’action du feu, a pris une couleur noire sur les surfaces et à l’intérieur (pâte 1). Je n’ai trouvé, comme pour le fragment de la fig. 91, aucune comparaison possible.
3.4.3. Couvercles
40Il n’a été possible de reconstituer aucun profil de couvercle à partir des fragments, qui ont été retrouvés en plus grand nombre, comme du reste pour toutes les autres formes, dans le sondage I.
41Le couvercle à listel vertical de la fig. 92 est très aplati ; la paroi s’épaissit vers le sommet et le listel constitue une bande moulurée. La facture est plutôt soignée. Il ne m’a pas été possible de trouver des comparaisons.
42Le fragment de la fig. 93 se situe dans la tradition des plats‑couvercles a bordo annerito (comme le bord de la fig. 96) et peut être rapproché d’un exemplaire de Carthage daté de la fin du ve s. (Hayes 1976 : 72, fig. 11, no 13).
- 17 Classe : Gelichi 1983 : 124‑125, 6.41‑6.45 (vies.) ; Brogiolo, Gelichi 1986 : p. 295, pl. III à p. (...)
43Les deux couvercles avec prise à bouton (fig. 94‑95) ont les parois plutôt verticales ; le type est assez répandu : on en trouve dans des contextes de l’Antiquité tardive, entre autres à Classe, Luni, Carthage17.
44Les autres fragments sont tous relatifs à des bords (fig. 97‑100).
3.4.4. Fonds
45Le sondage I a livré un certain nombre de fonds (fig. 101‑104, 106) généralement aplatis, parfois légèrement convexes, qui font un angle avec une paroi plus ou moins évasée et qui peuvent être soulignés par un ressaut à l’extérieur. Les traces du début du montage du vase sont encore évidentes à l’intérieur. Il est impossible de les attribuer à des bords. On peut seulement observer que leur diamètre ne semble jamais dépasser 12 cm et qu’ils présentent des traces évidentes de feu.
3.4.5. Conclusion
46La grande majorité des fragments de céramique de cuisine a été, comme on l’a déjà souligné, trouvée dans le sondage I ; ceux qui proviennent des autres sondages semblent bien s’insérer dans le panorama qui a été tracé.
47Alors que le manuscrit était déjà en cours d’impression, nous avons reçu les résultats des premières analyses effectuées sur un choix de tessons relatifs aux ollae des formes du type fig. 70‑73 et 75‑76, confiés à une équipe de recherche de la CATHMA (Céramiques de l’Antiquité tardive et du Haut Moyen Age). Les données relatives à ces analyses sont en cours de publication : M. Bonifay, C. Raynaud, Y. et J. Rigoir, L. Rivet, L. Vallauri, avec la collaboration de J. Berato, « CATHMA – Importations de céramiques communes méditerranéennes dans le Midi de la Gaule (ve‑viie s.) », communication tenue au vie colloque international sur les céramiques médiévales, à Lisbonne (1987).
48La forme, le « type 7 » de cette recherche collective (fig. 24 et 36), est également présente dans les couches tardives d’Alicante, Valencia, Ventimiglia, Luni, Porto Torres, Olbia, Toulon, Marseille, Arles. Les analyses pétrographiques, effectuées par le Laboratoire de céramologie de Lyon, ont permis d’attribuer les fragments à un groupe supposé italique (groupe C), à cause de la présence de roches volcaniques (basalte à olivines) typiques de l’Italie du Sud et des îles voisines. Cela confirme les conclusions de la mission anglaise à Carthage (Fulford, Peacock 1984 : 166‑167 ; D. P. S. Peacock, Pottery in the Roman World : an Ethnoarchaeological Approach, London, 1987, p. 79).

• Fig. 95 à 106 – Céramique de cuisine – 95. Frag. de prise centrale de couvercle. – 96‑100. Frag. de rebord de couvercles. – 101‑104. Frag. de fonds. – 105. Frag. de paroi décorée d’incisions. – 106. Frag. de fond.
3.5. Céramique modelée (fig. 107‑113)

• Fig. 107 à 113 – Céramique modelée. – 107. Frag. de gros vase modelé en forme de dolium. – 108. Grand vase modelé de forme tronconique. – 109. Vase campaniforme modelé avec éléments de préhension. – 110‑111. Deux frag. d’ourlets de formes modelées ouvertes. – 112. Disque fragmentaire modelé. – 113. Frag. de couvercle (?) modelé, avec marli.
49Des fragments de céramique modelée ont été trouvés dans les sondages I et III : on y rencontre une grande variété de formes qui sont peu représentées numériquement, ce qui peut s’expliquer entre autres par la technique de fabrication. Cette technique fait naître un problème au niveau de la documentation, étant donné que le profil d’un même vase peut varier selon le rayon de coupe choisi pour le dessiner (ce qui se comprend encore mieux si l’on pense que même en céramique tournée, il y a des différences entre des exemplaires de la même forme fabriqués par un même potier ; Arcelin‑Pradelle, Laubenheimer 1985).
50Les fonctions des vases modelés de Castellu étaient essentiellement liées au stockage et à la cuisson ; dans certains cas, quand le fond nous manque et que les traces de feu sont plutôt à attribuer à des événements postérieurs à l’usage de l’objet, il est impossible de se prononcer.
- 18 Il est assez rare de trouver de la céramique modelée dans les tombes, et il faut donc se limiter à (...)
51La recherche de comparaisons est rendue plus difficile que pour d’autres classes de matériel à cause du petit nombre de contextes contemporains du nôtre18. Certaines fouilles ont fourni un matériel assez homogène, mais en même temps différent sur chaque site ; ce fait avait amené à considérer la céramique modelée comme un produit de fabrication exclusivement locale. Les résultats des fouilles anglaises récentes à Carthage, à l’aide d’analyses pétrologiques des inclusions, ont démontré que les « hand‑made wares form the largest proportion of imported wares » (Fulford, Peacock 1984 : 240 ; sur les modes de production et de commercialisation possibles, cf. Peacock 1981, et 1982 : 75‑80).
- 19 A cause du manque de fonds, ce qui est particulièrement grave pour cette classe de matériel, pour l (...)
52A Castellu nous n’avons pas eu la possibilité de faire analyser les argiles19 qui ont été classées seulement à partir d’une observation empirique. Il semble cependant que l’argile de la plupart des fragments modelés soit la même que celle des tuiles. En ce qui concerne une éventuelle hypothèse de production locale, de reprise d’anciennes traditions qui auraient toujours survécu pendant l’occupation romaine (cf. pour Porto Torres, Villedieu 1984 : 155‑156), je voudrais souligner, d’une part, qu’à ma connaissance les formes provenant de la fouille de Castellu ne se retrouvent pas dans le panorama protohistorique corse (le seul élément commun est constitué par des « languettes » de préhension, qui d’ailleurs ne sont pas propres à la Corse pendant le Néolithique) ; d’autre part, que tout discours sur cette question est oiseux, en l’absence d’une analyse qui, seule, pourrait donner des résultats dignes de foi. Malheureusement, la céramique d’époque romaine et tardive en Corse est très peu connue, étant donné l’absence quasi totale de fouilles stratigraphiques et de publications.
53Le récipient en forme de petit dolium (fig. 107) était probablement destiné au stockage de denrées : les parois ne présentent pas de traces de feu. Il n’existe aucun élément qui permette la restitution du profil du fond. Il faut souligner l’épaisseur de la paroi (2,5 cm) et le poids que le vase entier devait avoir : la partie conservée, correspondant environ à 20‑25 % de la forme entière, pèse 1 100 g. Sa fonction étant de contenir des aliments, il est vraisemblable que son déplacement ait été assez peu fréquent et que son contenu ait été prélevé sur place ; cette hypothèse semble confirmée par l’absence d’éléments de préhension ou d’anses.
54Le grand vase de la fig. 108, en revanche, est muni, dans la partie conservée, d’une prise semi‑circulaire perpendiculaire à la paroi. Il devait être lui aussi très lourd, puisque la portion qui nous est parvenue, qui en représente de 25 à 30 %, atteint un poids de 2 245 g. Des traces de feu sont visibles par endroits, mais elles ne sont pas particulièrement localisées vers le fond.
55Des éléments de préhension, mais de dimensions bien plus réduites, se retrouvent sur la panse du vase campaniforme à fond plat, grossièrement façonné (fig. 109). La forme suggère une destination pour la cuisson, mais la surface externe du fond ne montre aucune trace de feu. C’est le seul cas où il semble possible de reconnaître les traces du montage au colombin.
- 20 Dans les Marches : Maetzke 1978 ; un exemplaire avec listel, fait au tour, sans anse (p. 101‑102, f (...)
- 21 Brogiolo, Gelichi 1986 : p. 300, pl. V à p. 302, nos 3‑4 (au moins xe s.) ; p. 312, pl. XI à p. 313 (...)
- 22 Fulford, Peacock 1984 : 164, fig. 59, nos 28, 1 et 2 : « lid or possibly bowl... with roughly smoot (...)
56L’objet de la fig. 113 pose une série de problèmes : façonné avec la même pâte que certaines tuiles (la no 2), il est de forme ovale ; la surface a été lissée seulement du côté convexe, ce qui suggère un emploi comme couvercle ou pied de vase, ce dernier ne trouvant pas de comparaison à ma connaissance. Le couvercle conique, qui avec un plat‑base forme une espèce de four portatif (l’ensemble est communément nommé testa dapane par les médiévistes italiens ; aujourd’hui, on trouve le même principe avec les tajines), se retrouve couramment en Italie pendant le Moyen Age : il peut avoir une anse horizontale appliquée sur le sommet aplati, comme on le voit dans les Marches, à Classe et à Rome20, pour ne citer que quelques cas, ou bien des anses verticales sur la paroi21. Une forme apparentée, datée peu avant 533, a été trouvée dans les fouilles anglaises de Carthage22. La forme ovale et les petites dimensions de notre objet incitent toutefois à une certaine prudence dans l’interprétation.
57Le petit disque de la fig. 112 peut être comparé à des couvercles trouvés dans les couches datées de la fin du ive s. à la première moitié du ve s. à Porto Torres (Villedieu 1984 : 160‑161, fig. 175‑177 ; ces disques présentent toutefois un sillon dans l’épaisseur).
3.6. Amphores (fig. 114‑134)

• Fig. 114 à 125 – Amphores. – 114‑115. Amphores cylindriques de grandes dimensions de l’Antiquité tardive. – 116‑117. Amphores cylindriques fuselées de l’Antiquité tardive dites spatia. – 118‑125. Amphores cylindriques fuselées de petites dimensions.

• Fig. 126 à 129 – Amphores. – 126. Late Roman Amphora 1, Kellia 164. – 127. Productions non identifiées ; formes Keay LXX. – 128. Productions non identifiées ; formes Keay LXXIX. – 129. Amphore non identifiée.
3.6.1. Introduction
58Toutes les amphores découvertes à Castellu proviennent du sondage I qui en a restitué 1 053 fragments. La reconstruction partielle de certains exemplaires a été possible grâce au caractère relativement homogène de la stratification, qui n’a pas connu de bouleversements postérieurs. On peut penser, de façon approximative, qu’une vingtaine d’amphores avaient dû être déposées dans la pièce fouillée. Le cadre d’ensemble qui se dessine à partir de l’analyse des formes attestées suggère une datation autour du vie s. ap. J.‑C.
3.6.2. Amphores cylindriques de grandes dimensions de l’antiquité tardive (fig. 130)
3.6.2.1. Généralités
59Les deux fragments provenant du sondage I peuvent sans aucun doute être attribués à cette famille complexe d’amphores africaines, dont les dimensions sont sensiblement supérieures à celles de tous les autres types de récipients de transport fabriqués jusque‑là dans la Tunisie actuelle. Certains de ces exemplaires peuvent atteindre 1,20 m de hauteur, et leur capacité varie de 40 à 50 litres (pour une première synthèse relative aux problèmes posés par cette classe de récipients cylindriques, cf. Panella 1983b : 182‑184).
- 23 S. Keay, par exemple, a tenté de créer une typologie pour les amphores de cette famille découvertes (...)
60Ces récipients, que certains aspects permettent de rapprocher des amphores de forme Africaine II, présentent cependant une grande variété de bords. Ce n’est que récemment que les premiers classements typologiques ont été tentés, mais les résultats obtenus sont discutables23. Il est utile cependant de souligner qu’avec l’ensemble de cette production est abandonné le type de lèvre en corolle pendante (caractéristique des productions d’amphores précédentes) et que l’on adopte la lèvre en bandeau vertical ou le type qui présente une lèvre fortement arrondie et convexe. Le col, de hauteur et de diamètre variables, est généralement tronconique. Les anses, en ruban grossi, ne présentent que dans quelques cas le profil court arrondi bien connu, caractéristique des amphores africaines de forme I et II, alors que le plus souvent leur aspect est différent. Elles sont en général appliquées sur le col et sur l’épaule large arrondie. Le corps, allongé, parfaitement cylindrique, se termine généralement par un pied bas, de dimensions plutôt réduites, parfois caractérisé par un regonflement autour de son extrémité.
- 24 L’argile du col découvert dans l’épave de St‑Gervais II, daté de la fin du vie ou du début du viie (...)
61La majeure partie des différents types d’argile attestés pour les exemplaires de ces formes indiquent une zone de production en Afrique du Nord ; il est cependant probable que des récipients semblables à ceux‑ci aient pu être produits durant l’Antiquité tardive même dans d’autres provinces, jusqu’ici non identifiées24,
62Les découvertes de Carthage, à l’intérieur de contextes bien datés, ont permis d’établir que les débuts de cette production se situent autour des décennies centrales du ve s., au moment de la disparition des productions africaines précédentes, qui avaient dominé les marchés occidentaux à partir de la moitié du iiie s. (Panella 1983b : 184). Il n’existe pas d’éléments suffisants qui permettent de parler d’une continuité de production dans les mêmes centres, à l’exception peut‑être de Nabeul, dont l’atelier ne semble connaître aucune interruption (Panella 1983a: 54). Cependant, la transformation typologique de ces amphores semble indiquer une nette séparation par rapport à la tradition précédente, et il est légitime d’y voir une mutation profonde, aussi bien en ce qui concerne l’industrie directement liée à la production des amphores, qu’à propos des denrées qu’elles contenaient.
63L’apparition en Afrique de ce type nouveau de récipient durant les décennies de l’invasion vandale semblerait démontrer comment cet événement historique, auquel on attribue spontanément la cause principale de la fin des productions précédentes, a pu déterminer des transformations importantes de l’économie agricole de l’Afrique du Nord. Cette occupation eut vraisemblablement pour conséquence l’interruption d’une certaine forme d’économie, suivie au bout de quelques années d’une réorganisation de la production et du commerce des denrées africaines, qui continuera durant toute l’époque byzantine, et aura cependant une portée et des indices de diffusion moins importants par rapport à l’époque immédiatement précédente. La distribution de ces nouveaux récipients apparaît en effet nettement plus limitée et semble se concentrer surtout sur les côtes de la Méditerranée occidentale (cf. Panella 1983a : 56 sq ; la théorie opposée est soutenue dans Fulford 1980 : 68‑80).
3.6.2.2. Répartition géographique des découvertes
Péninsule Ibérique
64La diffusion de ce type d’amphore en Espagne a été amplement mise en évidence par S. Keay (cf. Keay 1984). Des exemplaires de cette famille proviennent :
-
de Barcelone : nécropole de la basilique de S. Maria del Mar (Ribas Bertran 1967 : 212‑213, fig. 11‑12) et Plaza del Rey (Pascual Guasch 1963 : 227, fig. 1, 1‑6) ;
-
de Tarrasa (Pascual Guasch 1963 : 229, fig. 2, 1‑2) ;
-
des nécropoles Estruch et Marti d’Ampurias (Almagro 1955) ;
-
des nécropoles de Tarragone (Pascual Guasch 1963 : 231, fig. 3, 3‑4).
65D’autres attestations ont été également enregistrées à :
-
Carteia (Presedo 1982 : 240, fig. 155.3) ;
-
Elche et Carthagène (cité dans Keay 1984 : 660) ;
-
Valence (Reynolds 1984 : 535, fig. 476, 481) ;
-
Malaga (bibl. dans Keay 1984 : 660) ;
-
Porto Pi, dans l’île de Majorque (id.).
66Un exemplaire provient aussi du Portugal, où il a été découvert à l’embouchure du Rio Sardo (Cardoso 1978 : pl. VII, 19). On peut ajouter à cette liste les découvertes de la villa romaine de Vilauda (Jones, Keay 1982 : 273, fig. 16 B).
Gaule
- 25 Epave de St‑Gervais II, cf. Jézégou 1983 : p. 202‑205, pl. 91, 1 ; 92,1 ‑2. Quatre exemplaires déco (...)
67Une grande concentration de découvertes a été enregistrée dans la zone du golfe de Fos. Outre l’exemplaire provenant de l’épave de St‑Gervais II, il en existe d’autres, cités par M.‑P. Jézégou25, ainsi qu’un col avec une inscription peinte (Liou, Marichal 1978 : 170‑173, fig. 78). En outre, un récipient appartenant à cette classe a été récupéré en Languedoc et il est conservé au dépôt de fouilles de Palavas dans l’Hérault (cité par Jézégou 1983 : 205) ; un autre encore provient de l’épave de la Palu à Port Cros (cité par Panella 1983b : 183). Quelques bords ont été découverts à l’intérieur de contextes de la première moitié du ve s. et de la fin du vie‑début du viie s. dans le cadre des fouilles de la Bourse, à Marseille (rens. de M. Bonifay). Des exemplaires, entiers ou fragmentaires, d’amphores de ce même type proviennent également des épaves de Dramont E (Joncheray 1975 : 145, pl. Il, à gauche), datée de la première moitié du ve s., de Mateille A (Gruissan) (Solier 1981 : 177‑179, fig. 59, 6‑7, 14) –probablement aussi du ve s.– et de découvertes fortuites près de l’île de Fraile (Aguilas) (Pareja 1972 : 107‑108), à Pommègues (Liou 1975 : 582, fig. 13), et le long des côtes de la Corse (Bebko 1971 : 10, pl. II, 10). Un dernier exemplaire, enfin, est signalé en Suisse, à Bellinzona (Meyer 1976 : 74, D8, f. 3).
Italie
68De nombreuses amphores de ce type sont conservées au musée archéologique d’Aquilée (rens. de M.‑T. Cipriano). D’autres attestations en Italie du Nord sont relatives aux sites de :
-
Castelseprio (Lusuardi, Siena 1982 : 204, pl. 270, 4) ;
-
Arriano Polesine (Toniolo 1982 : 61, fig. 19, i, en bas) ;
-
Luni (Frova 1977 : pl. 280, 20) ;
-
Imola (Parmeggiani 1979 : 84, nos 1‑4 ; 95, no 4) ; et dans des couches de la première moitié du Ve s., dans le chantier de l’École française de Rome de la Vigna Barberini, sur le Palatin à Rome, ainsi que dans les fouilles d’un four découvert récemment à Classe (Stoppioni Piccoli 1983 : 144, fig. 8, 30).
- 27 Volpe 1985c : p. 158, no 22, pl. III ; p. 164, no 40, pl. V. L’exemplaire no 22, typologiquement co (...)
69En Italie centrale, il faut rappeler l’amphore entière conservée au musée national de Civitavecchia (Gianfrotta 1981 : 85, fig. 46) et les découvertes à Rome, au sein de contextes du ve s., de ces récipients dans la zone située face au temple de la Magna Mater sur le Palatin (j’ai entrepris l’étude de ce matériel), dans les stratigraphies de même époque de la Schola Praeconum (Whitehouse 1982 : nos 129, 141, 175), et, hors contexte, un nombre limité de fragments provenant de la fouille de la Crypta Balbi27. Plus au sud, d’autres exemplaires ont été découverts à Mondragone (cités dans Keay 1984 : 661), à Naples, dans un contexte du vie s. (Arthur 1983 : 389, fig. 2, 6) et dans la fouille de la zone dite du temple de Giove Toro à Canosa, dans les Pouilles (Volpe 1985b : fig. 3, 7‑8).
70De Sicile enfin, proviennent les récipients des épaves de Filicudi (Kapitän 1977 : 49, fig. 9, à droite) et de Marsala (Culican, Curtis 1974 : 48, fig. 12, 22), des fragments de la villa de Vito Soldano (Canicatti) (La Loma 1961 : pl. XXVII‑5) et un exemplaire du musée national de Syracuse. En Sardaigne, d’autres fragments encore proviennent des stratigraphies datées de l’Antiquité tardive à Porto Torres (Villedieu 1984 : 194) et à Cornus (Giuntella 1986 : 139, pl. LXIII). Un exemplaire de cette même famille a été découvert dans les fouilles de Tas Silq à Malte (cité par Keay 1984 : 349).
Afrique
71La fouille de Bérénice n’a livré que peu d’éléments (Riley 1979 : fig. 87, 282‑286), alors que ces types sont bien plus nombreux dans les stratigraphies de Carthage, des missions américaine (Humphrey 1978 : fig. 21, 14), anglaise (Fulford, Peacock 1984 : 129, fig. 39, 64) et italienne (Panella 1983b : 196, fig. 26). Une dernière découverte provient de la nécropole sud de Carthage (Annabi 1985 : 21, 25, fig. 5), où le récipient cylindrique était utilisé comme tombe d’un défunt de la moitié du VIe s. Plusieurs exemplaires, enfin, sont attestés à Tipasa.
Pont et Danube
72La seule attestation connue jusqu’ici en Méditerranée orientale est relative à Constance, en Roumanie actuelle (Radulescu 1976 : pl. V, 3‑3a).
3.6.3. Amphores cylindriques fuselées de l’antiquité tardive, dites « spatia » (fig. 131)
3.6.3.1. Généralités
73Le terme de spation, utilisé ici pour définir un type de récipient cylindrique, est repris d’une appellation conventionnelle, désormais traditionnelle. Il s’agit de petites amphores fuselées, aussi bien de grande (jusqu’à 90 cm) que de petite dimension (de 40 à 45 cm). Cette terminologie, proposée il y a maintenant vingt‑cinq ans par V. Grace (1961 : fig. 67), est devenue partie intégrante de la littérature archéologique, et elle est communément acceptée, bien que de façon tacite et non sans réserves.
- 28 Ostia IV : 219‑220. J’aurais plutôt tendance à inverser ce processus logique, et par conséquent chr (...)
74Le premier traité systématique des problèmes relatifs à cette classe de récipients, de la part de D. Manacorda, dans le cadre de l’étude du matériel des Terme del Nuotatore à Ostie (Ostia IV : 211‑221, 281‑282), prend aussi en considération la question liée à la terminologie. Spation (ou spathion, ou spatheion ou encore spateion, et en dehors de la graphie l’accentuation est elle aussi variable) est lié directement à spathe/petite épée, à cause de la forme allongée de ces amphores. Ce terme serait né dans un premier temps pour exprimer une idée de mesure, de capacité en liquide, pour être étendu par la suite au récipient de céramique destiné au transport de ces mêmes liquides28.
75D. Manacorda a recueilli une série très ample de témoignages fournis par des papyrus égyptiens, dans lesquels le terme spation se retrouve associé à ses différents contenus (vin, dans la majeure partie des cas, mais aussi huile, garum, miel et lentilles). Ainsi est mise immédiatement en évidence une anomalie, d’ailleurs relevée par l’auteur, entre la datation des sources papyrologiques, plus anciennes, la fin du iie s. ou les débuts du iiie s. ap. J.‑C., et la documentation archéologique, qui enregistre les premières attestations seulement durant la deuxième moitié du ive s.
76A cette objection d’ordre chronologique, on peut en ajouter une seconde, moins importante, relative à la distribution géographique de ce récipient. A la richesse et au nombre d’informations fournies par les sources (vingt‑cinq mentions dans les papyrus, fruit d’un « dépouillement ample, mais non exhaustif ») ne correspond qu’une distribution très modeste de ce type d’amphore fuselée en Egypte (guère plus d’une demi‑douzaine d’attestations différentes publiées jusqu’ici : Ehnasia, Ballana, Clysma‑Qolzoum [Suez], etc. ; cf. bibliographie dans Ostia IV, passim).
77Ces données, bien qu’elles ne soient pas décisives, concourent cependant à émettre de sérieux doutes sur l’identification de notre amphore fuselée de production africaine avec le spation mentionné par les sources égyptiennes.
78Il faudrait par conséquent rechercher, parmi les nombreux types d’amphores de production sûrement égyptienne, un récipient de transport ou une famille de récipients, que l’on puisse associer à partir de leur forme et de leur chronologie au spation des papyrus.
- 29 Cf. supra, note 23, ainsi que Egloff 1977:108‑119 ; je pense également à la forme LR 7 de Riley.
79Une telle recherche est encore à entreprendre ; je me limite à observer que de nombreux récipients de fabrication égyptienne présentent une forme triangulaire très allongée qui rappelle le profil d’une épée. Je pense en particulier à certaines formes, très répandues, découvertes au cours de fouilles effectuées dans la région du Nil et d’époque copte29. Toutes ces amphores, il est vrai, datent elles aussi de l’Antiquité tardive (de la fin du ive s. au début du viiie à Kellia) (Egloff 1977, formes Kellia 172‑ 180). Cela ne permet pas cependant d’exclure que des antécédents attribuables à cette même famille aient pu être fabriqués durant les siècles précédents.
80En ce qui concerne la description morphologique, les caractéristiques techniques, les centres de production, le contenu et la chronologie des amphores fuselées, il faut se référer au traité analytique exhaustif de D. Manacorda, dans Ostia IV et aux fiches de C. Panella (rapport au congrès de Carthage sur la céramique antique ; cf. Panella 1983b : 178‑180). En récapitulant dans les grandes lignes, on peut rappeler qu’il s’agit d’un récipient d’une hauteur moyenne de 90 cm dont le profil du corps est allongé et cylindrique, avec une lèvre plus ou moins moulurée (en bandeau vertical pendant, en corolle ou épaissie, pour ne citer que les types les plus communs), de petites anses en « poignée », un long pied plein et fin. Cette description met clairement en évidence la parenté morphologique avec les amphores cylindriques de dimension moyenne, dont la production et l’exportation semblent s’achever dans le courant de la première moitié du ve s., au moment même où s’affirment les spatia. Ces derniers présentent des argiles essentiellement africaines (fours d’Ariana), même si sporadiquement certaines pâtes très différentes semblent renvoyer à d’autres zones de production (Panella 1983b : 179). Une autre caractéristique technique qui renvoie à la tradition de centres africains est constituée par la présence de lissages verticaux à l’estèque sur la surface externe de l’amphore.
81En ce qui concerne le contenu, il faut probablement penser à une utilisation non exclusive de ces récipients : certaines amphores de cette famille, provenant de l’épave de Dramont F, contenaient des traces de résine (Liou 1973 : 599‑600), alors que deux autres, de l’épave de Dramont B, contenaient des noyaux d’olives (Tchernia 1969 : 472). Enfin, la production de spatia commença probablement pendant la dernière décennie du ive s. pour s’achever au cours du vie s.
82La diffusion et la circulation de ce récipient ont fait l’objet d’une première tentative de reconstruction de la part de D. Manacorda, qui a suggéré une répartition géographique sur une carte publiée dans Ostia IV (p. 262, fig. 2). Il faut y ajouter l’addendum bibliographique publié par le même auteur, dans un article postérieur (Manacorda 1981 : 1052). Nous fournissons ci‑après de nouvelles données à partir de publications récentes.
3.6.3.2. Répartition géographique des découvertes
Péninsule Ibérique
83De nombreux exemplaires fragmentaires proviennent de Catalogne et plus précisément des régions de :
-
Rosas (Keay 1984 : 218, fig. 91, 4 [type XXVI K], 6 [type XXVI J]) ;
-
Tarragone (rd : 217, fig. 90, 11 [type XXVI F] ; 218, fig. 91, 1 [type XXVI H], 3 [type XXVI I]) ;
-
Barcelone(id. : 217, fig. 90, 10 [type XXVI F] ; 218, fig. 91, 2, 7, [type XXVI I], 8 [type XXVI]).
Gaule
84Quelques fragments ont été retrouvés au sein de contextes de la première moitié du ve s. et de la fin du vie‑début du viie durant les fouilles de la Bourse, à Marseille (rens. de M. Bonifay).
Italie
85De nombreux spatia ont été découverts au cours de la fouille d’un four au lieu‑dit Chiavichetta (Classe, Ravenne) dans un contexte du ve s. (Maioli 1980 : pl. XXXVIII ; Stoppioni Piccoli 1983 : 140‑141, fig. 8‑20 à 8‑24). Un fragment de bord provient de la fouille de S. Basilio à Arriano Polesine (Rovigo) (Toniolo 1982 : 61, fig. 19, g), une amphore entière de Cremone (Lusuardi Siena 1982 : 204, pl. 270), alors que de nombreux autres récipients de ce type sont conservés au musée archéologique d’Aquileia (rens. M.‑T. Cipriano). Un spation sans bord se trouve également au musée de Tarquinia et provient du littoral (Gianfrotta 1981 : 89, fig. 57).
- 30 Ce matériel est en cours d’étude ; ces deux fouilles sont conduites dans le cadre d’un projet commu (...)
86Pour Rome, on peut ajouter à la documentation déjà publiée les fragments provenant de la fouille de la Schola Praeconum sur le Palatin (Whitehouse 1982 : 75, nos 135‑140), datés de la moitié du ve s., l’exemplaire entier du Musée national romain, lui aussi découvert au Palatin (Cipriano 1985 : 199, fig. 180), les trois amphores entières et les fragments très nombreux (au sein de contextes des ive‑ve s.) trouvés dans le secteur situé immédiatement à l’extérieur devant le temple de Cybèle sur le Palatin, et encore inédits, à l’exception d’un col avec inscription (Pensabene 1981 : 211, fig. 26 ; j’ai entrepris l’étude de ce matériel) ; toujours sur le Palatin, des récipients fuselés en nombre important ont été exhumés dans le cadre de contextes de la première moitié du ve s., dans la zone de la Vigna Barberini (enquête entreprise par l’École française de Rome), et également au sein de couches du ive s. qui constituent, sur ce même site, un remplissage de l’espace actuellement souterrain dit « crypte de St‑Bonaventure »30. Des bords, trouvés hors contexte, proviennent aussi des fouilles de la Crypta Balbi (Volpe 1985c : 160).
87Dans les Pouilles, un spation portant le sigle XMГ a été trouvé dans la zone du temple dit de Giove Toro, à Canosa(Volpe 1985a : 216‑220, fig. 2, 4 ; 1985b : fig. 2, 2 et 3, 4‑6), des amphores de ce type se trouvent au musée G. Fiorelli de Lucera (id. 1982‑83 : 47‑48, no 25, pl. VII), une au musée De Nittis de Barletta et une autre chez des particuliers à Manfredonia (cité dans Volpe 1982‑83: 49) ; il faut signaler enfin le récipient fuselé de la collection Guarini, provenant de Marinadi Pulsano(Fedele 1984 :30, no 33 ; pl. XX, no 33). Un exemplaire fragmentaire a été également trouvé à Métaponte (Giannotta 1980 : 79, pl. XXXVIII ; Giardino 1985 : passim). En Sicile, des amphores de cette famille se trouvaient dans l’épave byzantine de Cefalu (Purpura 1983 : 103, fig. 13), sur le Monte Pellegrino (Palerme), au sein de contextes du ve s. du Monte lato (Palerme ) (Giustolisi 1979 : 86, pl. F, 17 ; Isler 1982 : 216, fig. 3, pl. 78, 3), dans l’épave du ive s. de Capo Graziano (Filicudi) (Kapitän 1977 : 41‑42, fig. 2, en haut à droite). En Sardaigne enfin, il faut rappeler les fragments restitués par les stratigraphies de l’Antiquité tardive de la ville de Turris Libisonis (Porto Torres) (Villedieu 1984 : 194, 329, nos 284‑285) et de la nécropole de Cornus (Giuntella 1986 : pl. LXII, 1).
Péninsule des Balkans
88Il faut mentionner pour cette région les découvertes effectuées le long des côtes de la Dalmatie (Vrsalovic 1974 : 140, nos 135 [Parenzo], 136 [Sebenico], 137 [Zara], 138 [Korcula]), les exemplaires des fouilles de Butrinto (Lako 1981 : 102, pl. I, 1‑8), les récipients entiers ou partiellement conservés du musée de Durazzo (Durrës) (Tartari 1982 : 261, fig. 23 ; 277, pl. V, 4‑6) et les bords trouvés à l’occasion de la fouille de la forteresse d’Ouhezmit (Sardara), en Albanie méridionale, des ive‑vie s. (Lako 1984 : pl. III, 1, 3).
Région du Pont
89Dans cette zone, où se retrouvent plusieurs attestations de ce type d’amphore, il faut ajouter l’exemplaire de Karanovo, dans la région de Sliven (Bulgarie) (Borisov 1985 : 40).
Orient
90Une amphore entière est conservée au musée de Bodrum (Oguz Alpözen 1975 : 29, fig. 6), et d’autres exemplaires proviennent de l’île de Samos (Hautumn 1981 : 215‑216, nos 104, 105, 108).
Afrique
91En Cyrénaïque, il faut signaler les attestations peu nombreuses de Bérénice (Riley 1979 : 227‑228), alors que des fragments bien plus nombreux proviennent des fouilles de Carthage : des chantiers de la mission canadienne (Neuru 1980 :202, pl. VI, nos36‑37) (ve s.) ; de ceux de la mission britannique (un exemplaire daté du dernier quart du ve s.) (Fulford, Peacock 1984 : 134, fig. 42, no 100) et des stratigraphies de la mission italienne (360‑440) (Panella 1983b : 195, fig. 22).
3.6.4. Amphores cylindriques fuselées de petites dimensions (fig. 132)
3.6.4.1. Généralités
- 31 La première synthèse relative aux problèmes spécifiques posés par ce petit récipient se trouve dans (...)
92Ces petits récipients de transport ont une hauteur de 43 cm et un diamètre interne du bord qui varie de 5 à 7‑8 cm ; ils attendent encore un classement typologique, et c’est seulement récemment que l’on a commencé à affronter le problème de leur fonction commerciale durant l’Antiquité31 Leur forme fuselée caractéristique justifie sans aucun doute le rapprochement que l’on fait avec les spatia plus grands (eux aussi récipients fuselés de l’Antiquité tardive, qui ont jusqu’à 90 cm de hauteur), dont ils reprennent les traits morphologiques les plus significatifs (bord, anse, profil du corps, pied). Jusqu’ici ces deux types d’amphores ont été souvent confondus dans les classements typologiques (Beltran Llorris 1970 ; Scorpan 1976 ; Keay 1984 ; Kuzmanov 1985 ; etc.), surtout dans les publications des régions du Pont et du Danube, où l’on rencontre souvent ces amphores de petites dimensions.
93A propos de ces récipients, la certitude désormais acquise concerne leur origine : il faut les relier et les intégrer à la tradition de la production nord africaine. Des indices dans ce sens sont constitués par la parenté morphologique étroite avec les spatia et les amphores cylindriques de moyennes dimensions, et par l’argile utilisée, attestée pour de nombreux exemplaires, qui renvoie à la Zeugitana et à la Byzacène, centre de production de ces dernières (Panella 1983b : 184 ; il est possible, bien que rien ne le prouve à l’heure actuelle, que nos petites amphores aient pu provenir des fours d’Ariana, producteurs dans un premier temps des amphores de la forme Africaine I, des récipients cylindriques de dimensions moyennes et des spatia).
94On peut penser à deux fonctions pour ces petites amphores. Tout d’abord, elles ont pu constituer un sous‑multiple de mesure par rapport aux récipients fuselés plus grands, produits à la même époque, et destinés au transport des mêmes denrées. La deuxième hypothèse consiste à envisager la possibilité d’un contenu commercial de produits précieux tels que les huiles, onguents ou baumes, qui justifierait ces dimensions réduites. A l’heure actuelle, aucun élément particulier ne permet de résoudre ce problème dans l’un ou l’autre sens, même si l’on ne peut exclure que ces amphores aient pu répondre à cette double exigence.
95A côté de cette production, sûrement d’Afrique du Nord, sont attestés de nombreux exemplaires qui présentent des types d’argiles différents qui ne sont sûrement pas nord africains. Les centres de production n’en sont pas connus, et ces argiles se retrouvent dans une vaste gamme de pâtes, probablement d’origines diverses. On peut donc penser à des récipients produits dans différentes régions, à imitation d’un prototype d’Afrique du Nord.
96On ne peut douter du caractère plus ancien de ce dernier, compte tenu de sa parenté avec la tradition de production d’amphores de Zeugitana et de Byzacène et ses liens avec le spation, dont il ne se distingue que par les dimensions. Si cette antériorité ne semble pas évidente après le passage en revue des découvertes, elle est très probable, même s’il ne s’agit que de quelques années : à cause des caractéristiques formelles et techniques déjà mentionnées, auxquelles il faut ajouter le traitement particulier de la surface à l’estèque, qui amène à conclure que ce récipient n’a pu être « pensé » que dans les centres de production africains.
97Malheureusement, la majeure partie de ces exemplaires sont publiés très sommairement, souvent sans une photographie ni un dessin correct, et presque toujours sans aucune référence à la pâte de fabrication. Ce manque d’informations constitue un obstacle certain, non seulement pour la rédaction de cartes de distribution, mais aussi dans le cadre d’une tentative de distinction au niveau de la répartition des amphores africaines par rapport à celles qui ont une origine différente (une tentative dans ce sens a été faite par M.‑P. Jézégou [1983 : 240‑245] ; la mienne, fondée sur une bibliographie revue et élargie, confirme en de nombreux points plusieurs de ses considérations).
98Malgré ces difficultés, une sélection et un classement des découvertes publiées, à la suite d’une recherche bibliographique systématique, a permis d’aboutir a des résultats intéressants ; d’une part, on obtient certaines conclusions, et, d’autre part, il est possible de jeter les bases de la problématique liée aux ateliers nord africains, même si l’on reste loin de solutions satisfaisantes.
- 32 Il est superflu à ce propos de rappeler que les cartes de distribution sont toujours le fruit d’une (...)
99Nous suggérons ci‑après un panorama rapide de la répartition des découvertes, en les présentant par grandes zones géographiques32.
3.6.4.2. Répartition géographique des découvertes
Péninsule Ibérique
100Une concentration importante de découvertes est enregistrée le long des côtes de la Catalogne :
-
à Tarragone, de Torre de Audencia, datées du vie s. (Keay 1984 : 217, fig. 90, 9 [type XXVI C], 13, 15‑17 [type XXVI G]) ;
-
à Barcelone : du musée archéologique (Keay 1984 : 212‑ 213, fig. 196,5) ; de Plaza S. Ivo, Plaza del Rey et Montjuich (Keay 1984 : 217, fig. 90, 12 et 14 [type XXVI G], 6 [type XXVI C]) ;
-
à Ampurias (Keay 1984 : 218, fig. 91, 12 [type XXVI M]) ;
-
à Rosas (Keay 1984 : 218, fig. 91, 11 [type XXVI M]).
101D’autres exemplaires proviennent des fouilles de Pollentia (Arribas 1978 : fig. 16, 19, datés du vie s.) et de Cartagène (Beltran Lloris 1970 : 570, fig. 234, 5). La majeure partie des amphores découvertes en Espagne est de production africaine. En Tarraconaise, la présence d’argiles locales est improbable.
Gaule
102La situation est semblable à celle de la péninsule Ibérique. Nous retrouvons ces petites amphores :
-
dans la nécropole mérovingienne de Condau, dans le Gard, de la fin du ve ou du début du vie s. (Gagnière 1963 : 113, fig. 11 ; 1965 : fig. 26);
-
dans les fouilles de la Bourse, à Marseille, de la fin du vie‑début du viie s. (Bonifay 1986 : fig. 11, 44) ;
-
à St‑Rémy‑de‑Provence, Géménos (Bouches‑du‑Rhône) et St‑Blaise (Alpes‑Maritimes) (citées dans Bonifay 1986 : note 77) ;
-
dans l’épave de St‑Gervais II, du viie s., à Fos‑sur‑Mer (Jézégou 1983 : 240‑245, pl. 116, fig. 1 et 2).
103Toutes ces amphores sont de production africaine.
Italie
104On y enregistre aussi une nette majorité d’amphores en argile africaine. A ce groupe appartiennent :
-
l’exemplaire conservé au musée de Suse (Debergh 1978‑79 : 50‑51 [A1 ]) ;
-
les exemplaires de la nécropole de Castel Trosino (Baldassarre 1967 : 162, no 48 ; 163, no 50) ;
-
ceux de Luni (dans les contextes romains tardifs et du Haut Moyen Age, de toute façon postérieurs au ive s. ; cf. Frova 1977 : pl. 268, 10‑13 ; pl. 130, 3 ; pl. 281, 9, 13 ; pl. 282, 12) ;
-
les fragments découverts à Rome, hors contexte, durant la fouille de la Crypta Balbi (Volpe 1985c : 163‑164, pl. V, 33, 35, 36) ;
-
les fragments découverts dans les couches du ve s. de la zone située devant le temple de Cybèle sur le Palatin (j’ai entrepris l’étude de ce matériel) ;
-
les fragments découverts dans un remplissage du vie s. d’une pièce de la Basilica Hilariana sur le Caelius (fouilles récentes de la Soprintendenza archeologica de Rome dans la zone de l’hôpital militaire) ;
-
les exemplaires de la fouille de la basilique cimétériale de Generosa à la Magliana (à l’intérieur du remplissage d’un puits condamné autour du viiie s. ; fouilles dirigées par P. Pergola, campagne 1985 : cf. Pergola 1986b : 399‑ 401);
-
les exemplaires trouvés à Canosa, dans les Pouilles (Volpe 1985b : fig. 3, 11);
-
ceux trouvés à Syracuse (Fallico 1971 : fig.33,190‑191) ;
-
ceux de S. Croce di Camarina, à Raguse (Gentili 1969 : fig. 40) ; de Monte lato, à Palerme (Isler 1982 : 216, fig. 2 ; pl. 78, 1‑2) ; de Cornus, en Sardaigne (Giuntella 1985 : 106, pl. XXXVI ; 1986 : 139, pl. LXII).
105Nous ne savons rien de la pâte des petits spatia découverts dans la fouille du château de Ibligo Invillino, au Frioul (Fingerlin 1968 : 119, fig. 11,1, 3, 8), de l’exemplaire conservé à Acireale, à la Biblioteca Zelantea (cité dans Ostia IV : 282) et de l’amphore trouvée dans l’épave byzantine de Vendicari du vie s. (Parker 1981 : 332, fig. 23).
106Certains fragments provenant de deux des contextes romains mentionnés présentent par contre une argile micacée de couleur blanchâtre qui ne peut être attribuée à une production d’Afrique du Nord (Volpe 1985c : pl. V, 34).
Zone des Balkans, du Pont et du Danube
107Deux exemplaires ont été livrés par les fouilles effectuées en Yougoslavie méridionale, dans la villa romaine de Visici (Cremosnik 1965 : pl. VII, 5), et à Panicu, près de Bilece en Erzégovine (id. 1974 : pl. XV, 2).
108De la Roumanie actuelle proviennent les exemplaires de :
-
Istria (Condurachi 1954 : fig. 388 ; Popescu 1976 : 171, no 153 ; Scorpan 1976 : type XV S, pl. XIV ; Barnea 1971 : 194 ; id. 1977 : 233, fig. 90, 3) ;
-
Tomis (cité dans Jézégou 1983 : 265) ;
-
Sucidava (Tudor 1965 : 119, pl. IV, 4) ;
-
Noviodunum (Barnea, Barnea 1984 : 510, pl. VIII, 1) ;
-
Cetatea (Barnea 1971 : 200).
109De Bulgarie proviennent les amphores de :
-
latrus (Böttger 1974 : 132, pl. I E2C ; mais il s’agit très probablement d’un spation bien plus grand) ;
-
Sliven (Borisov 1985 : 40, pl. 1d) ;
-
Varna (Kuzmanov 1985 : 66, pl. 5, type VIII, A 50) ;
-
Brestovica (Zoncev 1950 : 235, fig. 167) ;
-
Capo Kaliakra (Kuzmanov 1978 : 23, fig. 4d ; id. 1985 : 66, pl. 5, type VIII, A 48);
-
la région de Tolbuhin (Kuzmanov 1985 : 66, pl. 5, type VIII, A 49, A 51);
-
la région de Voivoda (id. : A 52) ;
-
la région de Kavarna (id. : A 53) ; et ailleurs (id. : A 54).
110De Grèce proviennent les découvertes de :
-
Cythère (Coldstream, Huxley 1972 : 173, pl. 49, nos 57‑ 64) ;
-
Egine (Felten 1975 : 68, no 95 ; pl. 21, 95).
111Et enfin d’Istanbul (Sarakhane) proviennent quelques fragments de contextes du viie s. (Hayes 1968 :215).
112On est surtout en présence d’argiles non africaines, attestées de façon sûre pour les spatia d’Istria, Tomis, Sucidava, latrus, Varna et Egine alors que l’on ne dispose pas d’informations précises sur l’argile des autres exemplaires. On ne relève pas, de toute façon, la présence d’autres récipients fabriqués en Zeugitana ou en Byzacène.
Orient
113En Orient, les découvertes se concentrent le long des côtes occidentales et sud occidentales de l’Asie Mineure. Au cours de ses explorations sous‑marines, H. Frost a récupéré un exemplaire sans anses dans une épave du viie s., proche de l’île de Karabagla (Frost 1963 : 167, fig. 34, 11). Une autre amphore entière a été trouvée sur cette même épave au cours de fouilles ultérieures de G. F. Bass (Bass 1962 : 550, fig. 12). Les deux petites amphores de Yassi Ada I (une épave qui a désormais ce nom dans la littérature archéologique), qui ne faisaient pas partie du chargement, mais du matériel de bord, présentent toutes deux une argile jaunâtre (Bass 1982 : fig. 8.18, 8. 22 [P 66, P 67]). D’autres exemplaires, d’origine non africaine, proviennent de la fouille du tunnel d’Eupalinos, dans l’île de Samos (Hautumn 1981 : 216, nos 106‑107, 109, fig. 310‑311, 313) et sont datés du viie s. On ne connaît pas, en revanche, la nature de la pâte des petites amphores découvertes à Chio (marché) (citées dans Bass 1982 : 181, note 61), elles aussi au sein de contextes du viie s. Des exemplaires d’argile sûrement africaine, proviennent des fouilles récentes de l’Ecole archéologique italienne d’Athènes, conduites à Gortyne (Crète).
Afrique
114En dehors d’un exemplaire découvert en Egypte et conservé au Royal Ontario Muséum (Hayes 1976 : 67, no 362 ; 112, no 362), une grande partie des découvertes ont eu lieu en Tripolitaine (Sabratha ; cf. Riley 1979 : 226) et, en Cyrénaïque, à :
-
Bérénice, du VIe s. (Riley 1979 : 226‑227, nos 362‑364, fig. 92 [LR 8A]) ;
-
Tocra, du VIe s. (Boardman, Hayes 1973 : 116);
-
Apollonia (Riley 1980‑81 : no 665 [LR 8]) ;
-
Cyrène (citée dans Boardman, Hayes 1973 : 116).
115Des côtes de la Cyrénaïque provient également un exemplaire conservé à l’heure actuelle au Manchester Muséum (cité dans Riley 1979 : 226).
116A Carthage enfin, des amphores appartenant à cette famille ont été restituées par les fouilles des missions américaine (vie‑viie s.) (Humphrey 1978 ; 87, fig. 29, 28), italienne (fin ve‑moitié du vie s.) (Panella 1983b : 184, fig. 29) et anglaise (500 ap. J.‑C.) (Fulford, Peacock 1984 : 135, no 67 ; fig. 42, 101‑103).
- 33 Cf. Maioli 1980 : 226, fig. 7‑8, pl. XXXVIII ; Stoppioni Piccoli 1983 : 140‑141, fig. 8.20, 8.24. C (...)
117Pour la majeure partie de ces exemplaires, on ne dispose d’aucune information, sauf à Carthage (pâte africaine) et à Bérénice (où sont présents les deux types d’argile). L’exemplaire d’Apollonia ne devrait pas avoir une pâte africaine ; elle est de couleur rougeâtre, et on l’a récemment comparée à l’argile de certains spatia, découverts il y a peu durant la fouille d’un four d’époque byzantine à Classe (Ravenne)33.
3.6.4.3. Conclusion
118Ce survol rapide permet de mettre en évidence la distribution géographique particulière des différentes attestations. Le bassin occidental de la Méditerranée, comprenant les côtes de la péninsule ibérique, de la Gaule, de la péninsule italienne, des îles de Sicile et de Corse et le littoral africain jusqu’à Carthage, apparaît comme presque exclusivement intéressé par l’exportation d’amphores produites en Afrique. Au contraire, les spatia découverts sur le versant oriental de la Méditerranée et surtout dans la région du Pont et du Danube présentent en général des pâtes différentes de celles que l’on rencontre habituellement pour la production africaine. Bien que ce panorama soit susceptible de modifications, même profondes (le nombre d’exemplaires pour lequel aucune information précise relative à la pâte n’est disponible reste élevé), il existe une nette différenciation ‑ qui n’est certes pas due au hasard – entre les types d’argiles : vers l’Orient, les récipients africains ne semblent pas aller au‑delà du canal de Sicile et de la Tunisie actuelle, avec la seule exception de l’exemplaire de Bérénice et des amphores de Gortyne ; ceux d’origine non identifiable se retrouvent uniquement, de façon significative, dans les contextes romains signalés ci‑dessus.
119En ce qui concerne la datation de ces récipients fuselés aux dimensions réduites, la majeure partie des exemplaires découverts provient de contextes des vie et viie s. Cela correspond sans aucun doute à la période durant laquelle s’intensifie la circulation de ces petites amphores, même si le début de leur production et de leur exportation devrait remonter au moins au Ve s. Des exemplaires de cette famille proviennent en effet du remplissage de certaines structures de la zone du temple de la Magna Mater, sur le Palatin, à l’intérieur de couches qui ne devraient pas être postérieures aux années 480 ap. J.‑C. Leur exportation, et peut‑être même leur production, semblent s’achever au cours de la deuxième moitié du VIIe s. Aucune petite amphore attribuable à cette famille n’est datée, en effet, au siècle suivant.
120Au cours des vie et viie s., on assiste à l’affirmation sur les marchés méditerranéens du récipient fuselé de petites dimensions, alors, que la production du spation traditionnel, de 90 cm de hauteur, semble s’achever dans le courant du vie s. (Panella 1983b : 180).
121Il ne s’agit pas cependant de la répétition mécanique d’un processus de substitution : durant la première moitié du ve s., en liaison avec l’invasion vandale de l’Afrique du Nord, les amphores cylindriques de dimensions moyennes de l’Antiquité tardive avaient progressivement disparu pour être remplacées par les amphores cylindriques de grandes dimensions et par les récipients fuselés de 90 cm (Panella 1983b : 189). Dans le cas présent, en revanche, les dimensions nettement moindres et la capacité réduite de petites amphores de 43 cm de hauteur ne permettent pas de formuler l’hypothèse d’un simple changement du modèle d’amphore choisi. Par rapport aux spatia traditionnels, il faut penser à une fonction différente, et aussi à des modalités différentes de production et de circulation (par exemple, aussi bien pour l’épave de Yassi Ada I que pour celle de St‑Gervais II, elles ne faisaient pas partie du chargement, mais seulement du matériel utilisé à bord). Les ateliers devaient être nombreux, surtout en Méditerranée orientale et dans la région du Pont et du Danube, et destinés probablement à satisfaire les exigences des marchés locaux de régions circonscrites. La même vaste variété morphologique des bords ou de la position des anses peut être attribuée –de façon hypothétique– à la pluralité des centres de production. Cette considération, comme d’ailleurs celles qui la précèdent, auront besoin de vérifications ultérieures et ne doivent être envisagées à l’heure actuelle que comme des suggestions provisoires, fondées sur la documentation disponible, souvent incomplète et imprécise. De toute façon, une étude typologique soignée des exemplaires publiés, ainsi qu’une analyse des pâtes, pourraient fournir des indications d’une grande utilité pour la définition des problématiques relatives à cette famille hétérogène de petits récipients qui constituent l’un des derniers témoignages, et l’une des dernières expressions matérielles des activités commerciales de la Méditerranée durant l’Antiquité tardive.
3.6.5. LATE ROMAN AMPHORA 1, FORME KELLIA 164 (fig. 133)
122La recomposition au laboratoire de nombreux fragments caractérisés par une argile sablonneuse de couleur gris blanchâtre, contenant de nombreuses inclusions, a permis la restitution quasiment complète d’une amphore de dimensions modestes, de corps approximativement carré, et caractérisée par la présence de cannelures sur toute sa surface. Ces dernières sont à espaces irréguliers, et elles sont plus denses sur l’épaule et en coïncidence avec le fond.
- 34 Egloff 1977 : 112, no 164 ; 113, no 169 ; l’amphore apparaît dans de nombreuses autres typologies, (...)
123Malgré l’absence presque totale du col, du bord et des anses (il n’existe qu’un petit fragment de l’une d’elles), on reconnaît facilement ici un exemplaire de LR 1, selon la définition qu’en donne J. A. Riley, dans sa classification de certains des types les plus communs de récipients de transport de l’Antiquité tardive, produits en Orient (Riley 1979 : 212‑216 ; Humphrey 1981 : 120‑121). Pour être plus précis, il s’agit de la variante la plus tardive de cette forme, attestée dans de nombreux contextes des vie et viie s. et généralement désignée par les termes Kellia 164, à la suite de l’étude de M. Egloff sur les amphores découvertes dans le cadre des fouilles suisses effectuées dans cette localité de la Basse Egypte34.
124La morphologie de ce récipient se reconnaît immédiatement, même s’il présente de nombreuses variantes dans les solutions attestées en ce qui concerne le rapport entre la hauteur et la largeur du col. Il existe deux variantes (la plus ancienne, dite Kellia 169, a un contenu plus important : 27 contre 16 I) qui ne présentent pas de grandes différences. Le bord est en forme de lèvre légèrement évasée ourlant un col vertical pour le type plus ancien ; la lèvre est verticale dans le cas du type plus récent. Les anses ont un départ perpendiculaire au col et à l’ample épaule pour le type Kellia 164, et une courbe plus douce et arrondie pour le type Kellia 169. Dans les deux cas, elles sont très facilement identifiables par le sillon profond qui les traverse longitudinalement. Le fond, qui est absent de notre exemplaire, est généralement arrondi et caractérisé par un petit bouton.
125Pour la définition de la problématique relative à l’amphore LR 1, je renvoie à la bibliographie plus récente, et en particulier aux nombreux articles de J.A. Riley. Je me limite à illustrer ici sommairement les données acquises jusqu’à présent, utiles à l’étude de l’exemplaire retrouvé à Castellu.
126La thèse de J. A. Riley à propos de la provenance est convaincante (Riley 1979 : 212; 1983 : 116 ; Humphrey 1981 : 120 ; Fulford, Peacock 1984 : 200) ; après une période d’incertitude et différentes hypothèses sur le lieu de production (de l’Egypte à la Syrie et à la Crète), l’origine de cette amphore a pu être retrouvée, à partir d’analyses pétrographiques, le long des côtes sud‑orientales de lapéninsule d’Anatolie et dans le territoire de la cité d’Antioche (cf. Williams 1979 : 181 ; 1983 : 102‑103 ; les analyses ont révélé, dans la composition de l’argile, des traces de serpentin, dont la diffusion se situe en particulier le long des côtes méridionales de la Turquie et en Syrie du Nord).
- 35 Un exemplaire de Ballana se réfère sûrement à l’huile (Emery, Kirwan 1938 :401‑405) ; un titulus re (...)
127On est par contre encore loin d’avoir trouvé une solution en ce qui concerne le contenu commercial de ces amphores. L’hypothèse la plus plausible reste celle de l’huile si l’on tient compte du grand développement de la production d’huile dans la région d’Antioche, une huile précieuse, de qualité bien supérieure à celle produite en Afrique, ce qui éliminait tout risque de concurrence ; cela expliquerait aussi la présence abondante de ce type d’amphore dans les stratigraphies de Carthage. Bien que moins probables, restent les hypothèses traditionnelles liées au vin ou à d’autres denrées solides, que l’on ne peut exclure en l’état actuel de la question35.
- 36 Panella 1983a : 55. Même les autres fouilles internationales de Carthage offrent des indications se (...)
- 37 Saints Pierre et Marcellin : Manacorda 1981. Il est intéressant de noter que manquent presque total (...)
128La datation de ce récipient va de la seconde moitié du ive au ve s. pour la Kellia 169 et du vie à la seconde moitié du viie s. pour la variante la plus tardive attestée à Castellu. Une donnée significative est constituée par la présence de la forme la plus ancienne à partir du ive s. dans les contextes de la Méditerranée orientale et des régions du Pont et du Danube, de façon régulière et homogène, alors qu’elle n’apparaît dans le monde romain occidental qu’au début du ve s. A Carthage, en effet, dans les fouilles de la mission italienne, la forme LR 1 n’est enregistrée qu’à la fin du ive s., en coïncidence avec la première vague, de vaste portée, des importations d’amphores produites dans la zone qui va de l’Anatolie à la Palestine, en passant par la Syrie ; en plus de cette amphore, on retrouve également le récipient dit monoansé, et l’amphore de Gaza36. A Rome la forme LR 1 n’est attestée ni dans la fouille de la basilique constantinienne des saints Pierre et Marcellin sur la voie Labicana, durant la deuxième moitié du ive s., ni dans le remplissage contemporain de l’une des tabernae de la zone située devant le temple de Cybèle sur le Palatin ; on la retrouve par contre en quantité toujours plus importante dans la stratigraphie d’autres tabernae datées entre le début et la fin du ve s.37, et dans les couches de la moitié du ve s. de la fouille voisine de la Schola Praeconum (Whitehouse 1982 : 77).
129La forme Kellia 164, enregistrée de façon sporadique à Rome dans un contexte de la fin du ve s. au Palatin (remplissage de la taberna P, 450‑490 ap. J.‑C.) –mais il s’agit peut‑être d’une intrusion, compte tenu du caractère absolument isolé de ce témoignage– se retrouve par contre communément à l’intérieur de nombreux contextes des vie et viie s., par exemple à Kellia (Egloff 1977 : passim), ou dans l’épave de Yassi Ada, au viie s. (Bass 1982 : 154‑157, type 1).
- 38 La liste détaillée des sites et la bibliographie qui s’y rapporte ne sont pas données ici ; cette r (...)
130En ce qui concerne la forme LR 1, le cadre de sa diffusion, fourni ici, permet une mise à jour des cartes publiées par J. A. Riley, avec plusieurs apports nouveaux38, malgré le caractère récent de celles‑ci (Riley 1979 : 214, fig. 42 ; Humphrey 1981 : 121, fig. 14) ; ce cadre constitue également une mise à jour de la liste des découvertes par zones géographiques de S. J. Keay (Keay 1984 : 654‑655). Il est intéressant de relever que la fréquence des découvertes, qui est naturellement plus intense le long des côtes de la Méditerranée orientale et de la mer Noire, s’étend cependant de façon considérable à plusieurs sites du versant occidental de la Méditerranée : en Afrique, en Sardaigne (en dernier lieu à Porto Torres, cf. Villedieu 1984 : 175‑176), dans la péninsule Ibérique (Keay 1984 : 268‑278) et en Gaule (Congés 1983 : 352‑ 353, fig. 5, grotte de la Fourbine, St‑Martin‑de‑Crau [B.‑ du ‑R.]) jusqu’à représenter une présence importante dans la lointaine Britannia (Thomas 1959 : passim).
131Une allusion rapide enfin à l’aspect épigraphique lié à ces amphores. Si aucune estampille n’a été retrouvée sur un exemplaire de la forme LR 1, on enregistre fréquemment des inscriptions en caractères grecs peintes en rouge. Dans certains cas, elles fournissent simplement des informations concernant la mesure de la quantité des denrées transportées, dans d’autres, assez fréquemment, des tituli, sigles et abréviations chrétiens. Outre le monogramme constantinien, attesté durant la première période de la production, le sigle qui apparaît le plus fréquemment est XMГ différemment interprété, mais qui signifie probablement XplστOV Mαpiα yεvvα (Pensabene 1981 : 190‑ 194 ; Whitehouse 1985 : 190‑200).
3.6.6. Productions non identifiées : formes Keay LXX et LXXIX (fig. 134)
132Le sondage I a restitué de nombreux fragments caractérisés par une argile rose bien dégraissée, qui présente une fracture nette et lisse ; une partie de ces fragments a permis la reconstitution partielle d’un récipient de petites dimensions, avec une seule anse, dont la particularité principale est la décoration incisée d’une série de petites palmettes disposées sur l’épaule ample. Il a été impossible de reconstituer le col et le bord de ce récipient (dont manquent aussi le fond et l’anse), mais le fragment fig. 128 est probablement à attribuer au col, et plus précisément au faible épaississement qu’il présente en général à mi‑hauteur.
133La forme entière de ce vase pourrait être rapprochée du type 42 de M. Vegas qui publie un exemplaire de Pollentia, caractérisé par un corps globulaire de 36 cm de hauteur et de 24,6 cm de largeur. Le fond, plat, présente une partie très concave au centre, avec un bouton (Vegas 1973 : 98, fig. 34, 1 ; les comparaisons proposées ne semblent pas toujours dignes de foi).
134S. J. Keay publie quelques fragments découverts dans la région catalane, très proches de notre exemplaire (Keay 1984 : 362, fig. 168 [type LXX] ; 369‑374, fig. 170, 1‑7 [type LXXIX]). Les sept dessins qui illustrent le type LXX peuvent être sûrement comparés avec la petite amphore de Castellu. La correspondance est également parfaite en ce qui concerne la description de l’argile et la décoration gravée, avec le motif de palmettes.
- 39 Keay distingue les argiles relatives à deux types : Fabric 32 pour le type LXXIX, et Fabric 34 pour (...)
135En ce qui concerne la forme LXXIX, la documentation est plus complète ; on en connaît six bords et son argile est semblable à celle de la forme LXX39. Ce type, que l’on peut relier directement à la forme Vegas 42, est caractérisé par la même décoration, déjà mentionnée, gravée sur l’épaule, bien que les motifs en soient différents (des pétales ou des lignes parallèles). L’élément intéressant est que sur le col, au niveau du grossissement, se trouve un décor incisé formé d’une série de lignes parallèles, horizontales, qui alternent avec une double ligne ondulée : un motif que l’on rencontre également sur notre fragment (fig. 128).
136En se fondant sur les données acquises jusqu’ici et sur la base de l’attribution sûre que l’on peut suggérer pour le fragment de col (fig. 128) attribuable au récipient partiellement reconstitué, il est possible de suggérer raisonnablement une identification ou du moins un rapprochement des fragments de Castellu avec les deux types pris en considération par Keay.
137Différentes définitions sont utilisées en général pour ces formes dénommées amphores, jarres ou petites amphores, et insérées, selon les auteurs, parmi les amphores ou la céramique commune ; on retrouve ces récipients assez régulièrement au sein de contextes de la partie occidentale de la Méditerranée, datés entre le vie et le viie s.
138Le motif décoratif des palmettes croisées, en forme de X, sur l’épaule de ce récipient est, à notre connaissance, retrouvé ici pour la première fois hors de la péninsule Ibérique. L’exemplaire de Castellu est aussi, de loin, le mieux conservé ; des comparaisons ponctuelles sont possibles avec les cinq parois de Torre de Audencia, à Tarragone (Keay 1984 : fig. 168, 2‑5, 7 ; l’exemplaire no 2 présente également la partie inférieure d’une anse à ruban) et les deux de Barcelone (Keay 1984 : fig. 168, 1, 6). D’autres témoignages proviennent des fouilles de Grau Vell à Sagunto, à l’intérieur de contextes de la fin du ive ou du début du ve s. (?) (Aranegui, Gasco 1982 : pl. X, 9) et à Barrio de Benalua à Alicante (id. : pl. XI).
139D’autres comparaisons sont possibles avec des découvertes effectuées à Rosas (Keay 1984 : 663), un fragment du musée d’Elche (id.), des fragments au sein de niveaux de l’Antiquité tardive dans l’île de Majorque, à Porto Cristo (Frey 1970 : pl. 2e ; ce fragment conserve le départ d’une anse à ruban) et à Pollentia (Arribas 1973 : 67, fig. 13, 11).
140La décoration avec palmettes, bien qu’il s’agisse d’une disposition différente –les rameaux des palmettes sont incisés verticalement, au lieu de se croiser en forme de X– se retrouve à Carthage dans les niveaux des vie‑viie s. du dépôt XXIX (citerne 1977.2) fouillé par la mission américaine de l’université du Michigan (Humphrey 1981 108‑109, no 64, fig. 7, 64, pl. 5, 64). Des fouilles canadiennes provient également un fragment de la partie supérieure d’un col, dont l’ouverture est décorée de petits cercles peints rouges. Si ce n’était la qualité différente de la pâte et la présence de nombreuses impuretés, l’exemplaire pourrait être rapproché morphologiquement de notre récipient (Therrien 1981 : 116, no 129; 152, fig. 129).
141Pour le fragment de col fig. 128, on peut citer les comparaisons avec les exemplaires :
-
de Torre de Audencia (Tarragone) (Keay 1984 : fig. 170, 1, 2, 4, 5, 7); il s’agit d’exemplaires monoansés et biansés : les variantes A et B de Keay ;
-
de Barcelone (Keay 1984 : fig. 170, 3, 6) ;
-
du musée d’Elche (id. : 663) ;
-
d’Els Antigons (Alicante) (Tarradell, Martin 1970 : pl. XXIX, 20).
142Aux Baléares, il faut signaler les exemplaires de :
-
Can Flit (Ibiza) (Roca 1974 : 423, no 21) ;
-
Porto Cristo (Frey 1970 : pl. 3, 1) ;
-
Pollentia (Majorque) (Arribas 1978 : 61, fig. 28) ; ainsi que le bord de Formentera (Niemayer 1965 : fig. 2,10).
143En dehors de la péninsule Ibérique, les seules autres attestations concernent Luni (Frova 1973 : pl. 110, 14‑15 ; deux fragments de col) et les fouilles de la mission anglaise de Carthage, où l’exemplaire est daté autour des années 600 ap. J.‑C. (Fulford, Peacook 1984 : 220‑221, fig. 86, 32).
144La géographie même de ces découvertes, qui se concentrent toutes entre l’Espagne, l’Afrique, la Ligurie et la Corse, suggère une origine occidentale pour la production de ce récipient. Une analyse plus soigneuse de l’argile, d’un type assez spécial, très bien dégraissée et avec très peu d’inclusions, pourra fournir des indications plus précises ; nous ne disposons à l’heure actuelle d’aucune autre donnée complémentaire.
145Une origine nord africaine a été suggérée par M. Roca (Roca 1974 : 433) à partir de la décoration comparée à celle de céramiques arabes. Cette hypothèse a été rejetée par S. J. Keay, à la suite de la découverte d’un titulus pictus (A) sur un exemplaire provenant de Tarragone, et surtout à cause de la présence d’un graffiti (Saturninus), effectué après la cuisson, sur l’exemplaire découvert à Pollentia ; ce témoignage épigraphique serait à attribuer plutôt à un milieu romain de la fin de l’Antiquité (Keay 1984 : 374).
146Il est de toute façon fort probable que l’origine de cette petite amphore doive être recherchée le long des côtes de la péninsule Ibérique ou sur le littoral africain. Enfin, nous ne disposons d’aucune information sur le contenu de ce récipient.
3.6.7. Conclusion
147Il est bien évident qu’à partir d’un contexte aussi faible numériquement, on ne peut prétendre à des conclusions définitives. Quelques centaines de fragments, pour un total d’une vingtaine de récipients, constituent seulement un échantillonnage dont on ne peut tirer que des informations limitées.
148D’autre part, on se doit de constater et cela apporte des nuances à l’affirmation qui vient d’être faite, que la quantité de matériel relative à un contexte déterminé revêt une valeur exclusivement en fonction de la définition du type particulier de stratigraphie auquel elle appartient (décharge, dépôt, exhaussement, couche d’abandon, etc.) et que cette quantité n’a aucune incidence sur la représentativité des différentes productions en présence. En d’autres termes, le caractère restreint de la base numérique sur laquelle est fondée l’analyse quantitative peut appauvrir ou simplifier les résultats obtenus, sans pour autant les déformer.
149Ces considérations veulent indiquer les limites que se donne le chercheur, au moment de l’interprétation historique des données objectives fournies par le matériel céramique provenant d’un contexte déterminé, aussi hétérogène qu’il soit.
150La reconquête byzantine de la Méditerranée occidentale, qui a lieu en différentes phases durant le deuxième tiers du vie s., reconstitue une unité politique que les règnes « romano‑barbares » avaient commencé à rompre bien avant l’année 476 ; d’un point de vue économique cependant, l’héritage n’est ni celui d’une organisation commerciale désarticulée, ni celui de marchés en crise. Les résultats offerts par les fouilles récentes, nombreuses, effectuées à Carthage, Rome, Turris Libisonis, Neapolis, etc., fournissent des données très précises et indiscutables qui vont dans ce sens (sur Carthage, cf. Panella 1983a ; Fulford, Peacock 1984 ; Riley 1983 ; sur Neapolis, cf. Arthur 1985).
151La conquête vandale, après la chute de Carthage en 439, non seulement n’avait pas entamé la productivité agricole de l’Afrique, mais avait permis, en interrompant les liens tributaires avec l’annone de Rome, de diversifier la commercialisation de ses produits ; parmi d’autres exemples, on peut citer le cas intéressant de la Catalogne où les importations d’Afrique semblent augmenter sensiblement au cours du ve s. (Keay 1984 : 423‑424 ; il faut cependant tenir compte des considérations générales exprimées par Panella 1983a : 61‑62). Il est désormais impossible aussi d’affirmer que les rapports commerciaux furent interrompus entre l’Afrique vandale et la pars Orientalis de l’empire, compte tenu du nombre élevé des importations d’Asie Mineure, de Syrie, de Palestine et d’Egypte, qui caractérisent les stratigraphies des différentes missions qui mènent les fouilles de Carthage.
152En somme, l’unité économique et commerciale du monde méditerranéen survit à la chute de l’Empire romain d’Occident ; les échanges commerciaux continuent à suivre les anciennes voies et de nouveaux circuits apparaissent ; les bouleversements politiques ne contribuent nullement à étouffer la vitalité des échanges. Il est certes vrai que le sens des échanges commerciaux n’est plus celui des débuts ou du milieu de l’époque impériale, mais les changements sont bien antérieurs à l’année 476. Le vrai grand tournant dans les échanges commerciaux se situe entre la crise politico‑militaire de la deuxième moitié du iiie s. et la fondation de Constantinople en 330 ap. J.‑C. A un système d’échanges structuré le long d’un axe centripète, entre les provinces productrices et Rome seule importatrice, se substitue une organisation pluricentrée, caractérisée par l’émergence et l’affirmation de nouveaux marchés de plus grande consommation (avant tout Rome et Constantinople, mais aussi Athènes, Carthage, Antioche, Alexandrie, Marseille, les ports de la Catalogne, etc.) à côté de marchés mineurs à caractère régional. De nouvelles liaisons commerciales, souvent affranchies de l’attraction romaine, se créent : Constantinople/Carthage, mais aussi Carthage/Catalogne ; elles sont destinées à durer trois siècles au moins.
153La documentation archéologique, et en particulier les données tirées de l’analyse de la céramique, confirment par conséquent la thèse de la continuité des échanges commerciaux en Méditerranée au moins jusqu’au viie s. Dès 1927, H. Pirenne avait mis en évidence la façon dont les activités commerciales avaient survécu à la désintégration politique de l’Empire, en garantissant une unité effective et une interdépendance économique entre Orient et Occident. Le savant belge avait porté en particulier son attention sur le cas de Marseille, et sur les échanges entre la Gaule mérovingienne et la lointaine Syrie durant les vie‑viie s. assurés par des commerçants orientaux, surtout juifs. Ce n’est donc pas par hasard que les fouilles récentes menées à la Bourse de Marseille ont livré une quantité impressionnante d’amphores orientales, probablement destinées au transport de l’huile (les amphores dites Late Roman Amphora 1). La conquête barbare de l’Occident, concluait H. Pirenne, ne fut pas synonyme de germanisation. La Méditerranée faisait encore partie du grand patrimoine hérité du monde antique par les règnes « romano‑barbares » : ce n’était plus le mare nostrum –même l’expérience de la reconquête byzantine se révéla éphémère et ne tarda pas à se solder par un échec– mais on peut encore parler de véhicule des échanges culturels et des trafics commerciaux.
154Il faut bien sûr prendre en compte, dans le cadre de cette reconstruction, l’affaiblissement progressif des économies régionales, entre la deuxième moitié du vie s. et la conquête arabe. Les informations qui nous sont données par les fouilles sont le reflet pour cette époque d’une tendance générale au fractionnement des marchés, à la diminution des échanges et au retour à l’autarcie. L’expansion de l’Islam n’a pas signifié l’arrêt de mort pour une économie vitale et florissante, mais elle a donné le coup de grâce à un équilibre précaire depuis le ive s. La Méditerranée deviendra alors une sorte de frontière entre deux civilisations radicalement différentes.
155Que dire alors de la signification de la documentation qui nous est offerte par les amphores de Castellu ? Nous écartons pour le moment, pour les raisons exprimées ci‑dessus, l’idée d’une quantification, mais il faut se rendre à l’évidence que l’ensemble des productions les mieux attestées provient d’Afrique du Nord : les formes les plus courantes –les récipients cylindriques de grande dimension, ceux dits spatia, fuselés, de très petite dimension (40 à 45 cm)– enregistrent une diffusion diversifiée (voir les différentes cartes de distribution fig. 130‑134) durant une période qui va du ive (pour les spatia) au ve (pour d’autres formes) et au viie s.
156D’autre part, nous avons l’exemplaire de Late Roman Amphora 1, produit dans la région d’Antioche, dans sa variante la plus tardive des vie‑viie s. (Kellia 164). Il faut rappeler aussi le type Keay LXX‑LXXIX (bien qu’il soit difficile de l’attribuer à la classe des récipients de transport), d’origine encore inconnue (peut‑être espagnole ou africaine) et répandu dans tout le bassin occidental de la Méditerranée aux vie et viie s.
157Même en excluant la comparaison avec d’autres matériels qui offrent des datations plus sûres, la présence de toutes ces formes, la comparaison possible avec d’autres contextes publiés chronologiquement semblables, et en tenant compte d’absences particulièrement éloquentes, on peut suggérer de dater de la seconde moitié du vie s. ou du début du siècle suivant, l’époque du comblement de la structure fouillée dans le sondage I. On retrouve en particulier les petits spatia associés aux récipients cylindriques de grande dimension dans l’épave de St‑Gervais II (fin du vie s.) et à la forme Kellia 164 dans l’épave de Yassi Ada I (début du viie s.).
158Ces associations se retrouvent aussi dans de nombreux contextes datés de la même époque, fouillés en Méditerranée (comme à Carthage ou en Catalogne par exemple), mais la comparaison avec les deux épaves citées se révèle être la plus convaincante, compte tenu du nombre limité des formes qu’elles contenaient. Il reste aussi le problème particulièrement intéressant de la concentration des récipients fuselés de petite dimension, qui constituent à eux seuls plus de la moitié des amphores découvertes. Leur origine africaine apparaît indiscutable, ce qui n’est pas le cas de leur contenu.
159L’établissement de Castellu, dont l’extension reste à vérifier, s’intégre ainsi, malgré sa position totalement décentrée par rapport aux principales voies commerciales, au contexte du commerce en Méditerranée à la fin de l’Antiquité tardive. Les amphores, comme les bronzes ou la céramique fine de table, remontent depuis la côte la vallée du Tavignano pour atteindre, en nombre assez important, le centre géographique de la Corse, à près de vingt‑cinq milles (à vol d’oiseau) de la mer.
160A ce propos, on pense spontanément à la comparaison possible avec un autre site rural semblable, fouillé récemment à S. Giovanni di Ruoti, au cœur des Appenins de Lucanie. Ses dernières phases de vie remontent au premier tiers du vie s., quelques décennies seulement avant la datation du dépotoir de Castellu. Il est intéressant de noter que l’on n’y trouve qu’une présence extrêmement limitée de récipients de transport d’importation (moins d’1 %), par rapport au total des fragments de céramique découverts (Freed 1983 : 99, fig. 8). C’est le signe d’une tendance à l’autarcie, qui est le reflet de l’instabilité politique, mais également du décentrement géographique.
161A Castellu, au contraire, la situation se présente de façon tout à fait différente : le pourcentage enregistré pour les amphores est loin d’être insignifiant, et il témoigne de l’engagement effectif de l’économie de cet habitat au sein d’un contexte aux vastes proportions.
3.7. Verres
162Bien qu’un grand nombre de parois de coupes et de calices de verre aient été découvert dans les deux principaux sondages, leur caractère extrêmement fragmentaire exclut dans plusieurs cas la possibilité d’un classement typologique. En l’absence d’un répertoire des pâtes et de codes spécifiques de couleurs auxquels se référer, la terminologie adoptée est la plus simple et la plus objective possible.
163Les fragments ont été classés en fonction de la technique utilisée (du verre soufflé exclusivement), de la couleur, de l’épaisseur des parois, du degré de transparence et de détérioration des surfaces. Une analyse statistique des couleurs permet de noter une nette prédominance du verre de couleur vert d’eau, suivi dans l’ordre du vert olive, du jaune opaque, et du vert‑bleu ; le verre incolore est lui aussi largement attesté.
164Compte tenu du caractère fragmentaire du matériel, l’individualisation des types se fonde surtout sur l’examen des rebords et des fonds. Il a été possible de distinguer la forme Isings 111, attestée dans la phase d’effondrement à l’intérieur du sondage I, et durant la période IIIA du sondage V. Il s’agit d’un verre en forme de coupe, avec un corps en forme de U, caractéristique pour son pied de calice, dont la paroi se termine par un repli en forme d’anneau. Les deux variantes attestées de ce type se distinguent seulement pour des raisons d’ordre technique ; la première a un pied ajouté après le soufflage ; la seconde est travaillée de façon unitaire, le pied et la paroi ayant été soufflés ensemble. Ce type, caractéristique de l’Antiquité tardive, et produit jusqu’au Haut Moyen Age (Isings 1957 : 139‑140), se retrouve surtout dans la pars orientalis de l’Empire (à Chypre, Karanis, Corinthe, Doura Europos ; cf. Harden 1936 : pl. XVI, nos 479‑4, 81), mais aussi en milieu italien, au sein de contextes datés des ve et vie s. La forme est présente à :
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Torcello (Leciejewicz 1961 : fig. 13a‑c ; id. 1963‑64 : fig. 4, nos 8‑9) ;
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Castelseprio (Leciejewicz 1965 : fig. 5) ;
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Luni (Frova 1973 : pl. 81 ; 1977 : pl. 285, 15) ;
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Cornus (Giuntella 1985 : pl. XLI, 291) ;
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Nocera Umbra (Pasqui‑Paribeni 1919 : 172, 204, 215, 249, 269, 287, 317, fig. 20 et 55) ;
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Castel Trosino (Mengarelli 1902 : 248, 299, pl. XI, 4) ; (voir en outre le calice découvert durant les fouilles de S. Reparata [Hessen 1975b : 213] et, plus généralement, Philippe 1970 : 58‑74, 84‑100).
165A Borgo d’Ale, cette forme a été découverte à l’intérieur de sépultures lombardes (Brecciaroli Taborelli 1982 : 118, pl. LII, 2 et pl. LIII). Sa production a été attribuée à un atelier syrien (Vessberg, Westholm 1956 : 200). Le type Isings 105, auquel il faut peut‑être attribuer un fragment découvert dans le sondage I, est contemporain de cette production. Il s’agit d’un balsamaire, attesté dans des contextes des ve et vie s. (Isings 1957 : 126).
166Les pâtes de verre méritent aussi quelques considérations. Les perles de collier, caractéristiques par leur décoration « à yeux », sont une preuve supplémentaire de la grande diffusion de ce type d’objet, produit dans plusieurs régions de l’Empire et connu longtemps encore durant tout le Moyen Age (Neuburg 1962 : 89 ; Uberti 1975 : 109).
167On peut aussi penser que la pâte de verre était travaillée à Castellu. Il est établi que les petites barres de pâte de verre qui circulaient dans l’Antiquité étaient utilisées aussi bien comme objets décoratifs, qu’après leur fusion pour la réalisation d’éléments ornementaux. Le caractère probable de cette double utilisation permet d’expliquer la composition et la couleur identiques du fragment de perle de collier et du petit bâton cylindrique découverts dans le sondage I.
3.8. Os travaillé (fig. 135‑171)

• Fig. 136 à 160, 162 – Os travaillé. – 136. Schéma de la décoration végétale géométrisée des éléments des fig. 137‑139. – 137‑139. Eléments de décor, appartenant vraisemblablement à un coffret. – 140. Schéma de la décoration géométrique des éléments des fig. 141‑142. – 141‑142. Eléments de décor, appartenant vraisemblablement à un coffret. – 143. Schéma de la décoration végétale géométrisée de l’élément de la fig. 144. – 144. Elément de décor, appartenant vraisemblablement à un coffret. – 145‑147. Eléments à décor végétal stylisé, appartenant vraisemblablement à un coffret. – 148‑150. Eléments de revêtement. – 151. Fragment de baguette en forme de colonne torse à base attique. – 152‑153. Deux baguettes, faisant partie d’un cadre. – 154. Schéma de la décoration de la côte centrale d’un peigne (cf. fig. 155‑156). – 155‑156. Deux fragments de côte centrale d’un peigne. – 157‑160. Quatre éléments dentés d’un peigne. – 162. Développement graphique du décor d’une pyxide fragmentaire : des deux côtés d’un arbre ou buisson sont représentés un oiseau (à gauche) et un amour (à droite).

• Fig. 161 – Elément central de peigne décoré avec la représentation d’une Néréide nageant à côté d’un cheval marin. Sur la face postérieure on peut voir clairement les traces du travail pour la création des dents.

• Fig. 163 à 171 – Os travaillé. – 163. Elément de boîte à glissière ; sur l’une des faces on peut lire des lettres, vraisemblablement en rapport avec l’assemblage des différents éléments. – 164. Aiguille fragmentaire. – 165. Prise de couvercle de pyxide. – 166. Appendice terminal d’un objet non identifié. – 167. Fuseau fragmentaire. – 168. Couvercle rectangulaire de boîte. – 169. Appendice terminal de prise. – 170‑171. Deux fragments de charnière moulurée.
168L’étude du mobilier en os travaillé présente une série de difficultés dues en grande partie à la pauvreté de la littérature sur ce sujet. L’os est un matériel très délicat et l’état de conservation des objets que l’on trouve dans les fouilles est souvent mauvais ; par conséquent, si l’on ne manque pas de catalogues de musées et de collections, les données de fouille qui permettent d’établir des séries avec des repères chronologiques sûrs font cruellement défaut. Seule la publication systématique de tout le mobilier découvert en cours de fouille –chose devenue courante ces dernières années– commence à rendre possible la détermination d’une série de points fixes pour la chronologie et la typologie de ces objets (Frère‑Sautot, Béal 1980 ; Béal 1983, 1984 ; Le cycle 1978).
- 40 Weitzmann 1972 : 1 : « The obstacle presented by the pagan ivories is that there exists no corpus w (...)
169Le problème reste ouvert, comme on le verra, pour les objets de meilleure qualité à décor figuré : précisément à cause de leur moindre diffusion, le point de repère pour les comparaisons reste de vieux catalogues aux datations souvent très approximatives40.
170Dans la fouille de l’habitat de Castellu les os travaillés ont été trouvés exclusivement dans le sondage I : il s’agit d’une série assez importante qui, à cause de la nature du terrain, nous est parvenue dans un état de conservation exceptionnellement bon.
171La plus grande part est constituée d’éléments qui décoraient probablement des objets de bois, meubles ou coffrets ; mais ces éléments ne représentent qu’une très petite partie des objets d’origine, et il est impossible de tenter une reconstitution du support.
172Les deux objets qui se détachent des autres par la finesse de leur exécution sont la plaquette (fig. 135) –décor probable d’un coffret– et le peigne à décor figuré (fig. 161) avec des scènes de thiasos marin (Vismara 1984a). Il est évident qu’ils faisaient partie d’une même parure de toilette, peut‑être un cadeau de noces. L’organisation de la composition ainsi que le style sont les mêmes et il est très vraisemblable qu’ils aient été sculptés par le même artisan.
173En ce qui concerne la plaquette, il faut souligner que la restauration ancienne, dont témoignent les trous le long de la cassure, prouve que l’objet a dû être utilisé assez longtemps, en raison de sa valeur.
174Le peigne mérite quelques observations d’ordre technique : on voit d’abord, sur la face postérieure, que la surface est lisse et que la partie spongieuse commence à être évidente au départ des dents ; celles‑ci sont délimitées vers l’intérieur de l’objet par des sillons perpendiculaires à leur axe et semblent régulièrement coupées. Tout cela amènerait à conclure que l’on se trouve en présence de la plaque centrale d’un peigne composé d’éléments dentés (du type à deux rangées opposées de dents et côte centrale, comme celui des fig. 154‑160) et qui devait aussi comporter une autre plaque décorée symétrique sur l’autre côté. Cependant, à cette hypothèse s’opposent d’une part, l’absence de trous de fixation de cette plaque aux éléments dentés et à la plaque symétrique qui lui aurait correspondu dans ce cas ; d’autre part, la forme même du peigne qui empêche de penser à des éléments dentés d’une telle longueur. Il faut souligner enfin que les peignes simples de cette forme ont, en général, un décor disposé selon un axe perpendiculaire à la direction des dents, ou bien, s’il s’agit d’un champ rectangulaire décoré comme dans notre cas, les dents sont pratiquées sur les côtés longs.
175Les comparaisons iconographiques pour le décor des deux objets sont nombreuses, des tissus aux mosaïques (Vismara 1984a : note 18) ; la plus proche, à cause aussi de la nature du support et de la réunion de plusieurs thèmes marins, est représentée par le coffret de Proiecta, daté du milieu du ive s. (Shelton 1981 : 54, 72‑75). En ce qui concerne le style, plusieurs détails d’exécution se retrouvent sur une plaquette en os de Thugga, au musée du Bardo (De Carthage 1982 : 142, no 197) datée de la fin du ve‑vie s., avec la représentation d’un supplice au cours de jeux dans un amphithéâtre. Le sillon qui délimite les figures, le traitement du pelage des animaux et de leurs dents, les yeux, l’implantation des cheveux sont presque identiques.
- 41 Strzygowski 1902 : 12‑16, fig. 5‑11 : plaquette, musée d’Alexandrie. Longhurst 1927 : 17, pl. III, (...)
176Un autre objet d’une certaine finesse est la pyxide (fig. 162) présentant, pour l’exécution du décor figuré, la double technique du sillon et du raclage, qui se retrouve surtout sur des objets coptes41. Le sujet, d’ailleurs plutôt fréquent, se retrouve lui aussi sur la même classe de matériel (plaquette d’Alexandrie, cf. Strzygowski 1902 : 13, fig. 6 ; panneau de boîte du musée du Caire, cf. id. 1904 : 175‑177, nos 7065‑7067).
- 42 Comme, par exemple, dans le cas d’un couvercle de Corinthe (Davidson 1952 : 134, no 943, pl. 68) ou (...)
177Le couvercle de boîte rectangulaire (fig. 168), de facture soignée, présente la caractéristique d’avoir deux angles découpés en arrondi, ce qui est étonnant alors que l’on s’attendrait plutôt, comme d’habitude, à deux protubérances destinées à jouer dans deux encoches pour en assurer la rotation42.
178D’une boîte, ou peut‑être de l’étui d’un peigne, faisait partie l’élément représenté fig. 163, qui rappelle un système de fermeture coulissante actionnée par l’appendice perforé. Sinon, il pourrait s’agir d’une paroi avec des encoches relatives aux autres pièces assemblées ; dans ce cas‑là les lettres auraient servi d’aide pour le montage (sur les boîtes assemblées en général, cf. Vaulina, Wasowicz 1974 : 135‑144, nos58‑66, pl. CXVIII‑CXXIII).
179L’élément de charnière (fig. 170‑171), très soigneusement exécuté et poli, devait d’après ses dimensions faire partie d’un meuble (sur les charnières en général, cf. Béal 1983 : 101‑126, A 11 ; id. 1980).
180En ce qui concerne les bandes et baguettes décorées, il faut d’abord rappeler que l’on a isolé trois motifs (fig. 136, 140, 143) fondés sur les séries de X formant des losanges, avec ou sans palmettes (fig. 137‑139, 141‑142), qui sont proches, d’un point de vue technique, de l’autre motif à festons (fig. 145). Le fait que le fond des traits incisés soit laissé brut est en contraste avec le reste de la surface, généralement bien polie, ce qui pourrait laisser à penser que les parties creuses étaient remplies d’une pâte colorée dont il ne reste d’ailleurs aucune trace. Dans les éléments angulaires on retrouve souvent le même angle (ou son supplémentaire), mais le nombre de fragments ne permet pas d’assemblages cohérents avec le décor.
181Le fragment fig. 148 présente un décor végétal différent, par sa technique et par son style, des autres fragments, à losanges et palmettes ; le même motif se retrouve sur un panneau de coffret et sur un élément courbe conservés au Victoria and Albert Muséum (Longhurst 1927 : inv. 623‑1884 et A 165‑1920 ; cf. supra note 40) et sur un autre élément courbe du musée du Louvre (inv. DOA 9060 ; photo in Marangou 1976 : pl. 4A ; cf. supra note 40).
182L’objet fig. 150 faisait partie d’un cadre, mais ses côtés asymétriques et l’espace semi‑cylindrique postérieur posent un problème. Il faut aussi attribuer à des cadres les baguettes fig. 152 et 153 et le fragment fig. 149.
- 43 Des baguettes identiques ont été trouvées à Montmaurin (Fouet 1969 : pl. LVIII) mais on n’a pas de (...)
183Les baguettes torses faisaient partie d’un décor appliqué ; pour l’élément en forme de colonne à base attique (fig. 151 ) on trouve quelques comparaisons d’époque tardive43.
- 44 Sardaigne : peigne en os de la nécropole de Scoglio Lungo (PortoTorres), daté au moins du vie s., c (...)
184La fouille a restitué aussi une série de fragments de peigne à éléments qui faisaient probablement partie du même objet (sur la technique de fabrication, cf. Galloway, Newcomer 1981). Le type est très répandu au Bas Empire et l’on retrouve le même décor dans d’autres exemplaires de Sardaigne, Toscane et Provence44.
185Il n’est malheureusement pas possible de remonter aux objets dont les exemplaires fig. 165‑166 étaient l’appendice terminal ; pour ce dernier, il faut penser qu’il enrobait l’extrémité d’un cylindre de bois ou, moins probablement, de métal ; l’autre pourrait être la prise d’un couvercle de pyxide.
186Les témoignages relatifs aux travaux quotidiens sont limités à une aiguille fragmentaire (fig. 164) et à un fuseau de type courant dont manque l’extrémité qui aurait permis de le rattacher à une typologie (entre autres, cf. Béal 1983 : pl. XXVII) (fig. 167).
187Le mobilier en os que l’on a analysé nous donne un aperçu sur les objets d’un certain luxe qui étaient en usage durant la formation du grand remblai de la pièce. La chronologie de ce matériel, comme on l’avait anticipé, ne peut être définie avec précision durant la longue période de l’Antiquité tardive. Pour certains objets on n’arrive même pas à établir des comparaisons assez proches. Il faut dire aussi que les contraintes dues à la nature de l’os (dimensions, formes, fragilité, etc.), ainsi que la valeur relative des objets, unie aux usages traditionnels (bandes décorées, charnières, pyxides), ont amené à un certain conservatisme dans les formes, qui évoluent lentement dans le temps et dans l’espace.
188Une dernière réflexion doit être faite à propos des absences, notamment de l’un des objets que l’on retrouve abondamment dans les fouilles, à savoir l’épingle à cheveux : même avec toute la prudence que les argumenta ex silentio doivent inspirer, il est fort probable que ce fait puisse être indicatif de quelques changements au niveau de la coiffure.
189Il est aussi à souligner qu’aucun objet n’était décoré avec les cercles concentriques ou à point central, motif très répandu dans l’espace et le temps pour le décor de l’os.
190On ne rentrera pas, dans le cadre de cet ouvrage, dans les détails relatifs aux techniques employées pour le travail de l’os, sinon pour souligner les différentes façons de rendre le décor.
191Une reprise de l’enquête pourra peut‑être établir si les différents objets ont été travaillés sur place ou bien s’il s’agit d’importations ; pour le moment on peut rappeler, d’un côté, l’abondance d’ossements et le fait que quelques‑uns montrent des traces d’ébauche et, de l’autre, que les ressemblances stylistiques de la plaquette et du peigne à thiasos marin avec la plaquette deThugga, ainsi que les grandes dimensions des os à partir desquels ils ont été taillés font plutôt penser à des importations (sur ce problème, cf. infra § 3.14.6.).
3.9. Bronzes (fig. 172‑190)

• Fig. 172 à 190 – Bronzes. – 172‑175. Fibules à arc. – 176. Fibule cloisonnée ovale. – 177. Boucle de ceinture. – 178. Boucle d’oreille. – 179‑180. Bagues. – 181‑183. Bossettes. – 184. Petite spatule. – 185. Manche. – 186. Pointe de fuseau. – 187. Agrafe à double crochet. – 188. Applique. – 189. Poids. – 190. Prise de récipient.
3.9.1. INTRODUCTION
192La quantité et la qualité des bronzes recueillis durant la fouille permettent d’exprimer certaines considérations d’ordre général. Dans la majeure partie des cas, les objets, plus ou moins fragmentaires et souvent non identifiables, ont été découverts dans le sondage I, c’est‑à‑dire au sein de couches de comblement d’une pièce de dimensions réduites. Même si l’on admet que cette pièce devint un dépotoir après son abandon, il faut noter qu’ils représentent un pourcentage plus élevé que celui de la céramique fine et du verre, au même titre que l’os travaillé et les objets de fer.
193Parmi les bronzes provenant de Castellu, le groupe le plus consistant et relativement homogène est constitué par les objets d’usage personnel, ayant une fonction d’ornementation ou d’accessoire vestimentaire. Pour le matériel de ce type, il est possible de suggérer une analyse typologique et l’on peut tenter également d’en proposer une datation, qui reste approximative ; la recherche de comparaisons ponctuelles demeure difficile, car trop souvent, surtout dans le cadre des publications de fouilles les plus anciennes, on a eu tendance à privilégier la présentation des objets produits dans un matériau plus précieux, tel que l’or ou l’argent. Pour les autres catégories de bronzes prises en considération, les problèmes sont encore plus délicats. De très nombreux fragments –en général de petites plaques– ne peuvent être attribués à aucun objet précis ; pour d’autres encore on ne peut proposer aucune utilisation possible. D’autres objets, de par leur forme due à des raisons purement fonctionnelles et par conséquent non sujette à transformations, ne permettent aucune analyse typologique et ne sont d’aucune aide quant à l’établissement d’une chronologie. Pour des raisons de clarté d’exposition, les objets étudiés ont été divisés en trois classes : la première regroupe tous ceux qui étaient destinés à l’usage personnel, des bijoux aux fibules ; la seconde ceux liés aux différentes activités domestiques ; la troisième comprend tous les éléments d’attribution difficile, ou dont on ne peut préciser l’utilisation.
3.9.2. Les objets d’usage personnel
194Les fibules à arc avec fixation à charnière découvertes à Castellu appartiennent à un type très répandu à l’époque romaine, et pour lequel sont attestées plusieurs variantes aussi bien dans la forme que dans la décoration (pour une bibl. générale, cf. Lerat 1979 ; Feugère 1978 ; Guillaumet 1984 ; cf. aussi Conimbriga VII : pl. XXVII). Il a été cependant impossible d’en trouver des comparaisons ponctuelles, à la fois à cause de la forme de l’arc et du porte‑ardillon‑dans notre cas particulièrement réduit‑et compte tenu de la décoration. Pour les trois fibules décorées étudiées (une quatrième, fig. 175, est sans décoration), l’une presque entière, deux autres fragmentaires (fig. 172‑174), on retrouve le motif en épi, dont la disposition est variable dans le champ figuré et surtout dont la répétition est constante ; une croix, positionnée de façon différente sur la surface de chacun des trois arcs, constitue l’autre élément de décoration de ces fibules. Cette variété accentuée des formes et des schémas décoratifs est la confirmation intéressante qu’il ne s’agit pas d’une production en série. Un autre aspect très important est l’utilisation du symbole chrétien de la croix qui, non seulement constitue un terminus post quem indiscutable pour l’établissement d’une datation, mais apparaît à l’heure actuelle comme un unicum, étant donné qu’on ne l’a encore signalé sur aucune des fibules de ce type publiées jusqu’ici. On peut donc affirmer que les exemplaires découverts à Castellu appartiennent, d’un point de vue morphologique, à un filon traditionnel plutôt antique et bien connu, alors que la décoration, extrêmement linéaire et stylisée, ainsi que la répétition de la croix, doivent sûrement être attribuées à des productions de l’Antiquité tardive ou du Haut Moyen Age (je n’ai pu trouver de parallèles précis de ce type de croix dans les « arts mineurs » ; A.‑M. Giuntella et M. Salvatore m’ont cependant suggéré une datation autour du ve s., compte tenu de modèles possibles utilisés dans les « arts majeurs »).
- 45 Cf. à ce propos la bibliographie suivante, non exhaustive, donnée à titre indicatif : Mengarelli 19 (...)
- 46 Mes remerciements les plus vifs vont à M. O. von Hessen pour les suggestions qu’il a bien voulu me (...)
195Un autre objet d’un grand intérêt est constitué par la broche cloisonnée, ovale, de bronze plaqué d’or, qui possédait un chaton central –non conservé– autour duquel étaient disposés, en alternance, huit petits chatons en pâte de verre rouges et verts –en partie conservés– (fig. 176) (un autre exemplaire du même type, très fragmentaire et en très mauvais état, provient de l’US 102). La production cloisonnée, très commune à partir du ve s. dans toutes les régions méditerranéennes et celles de l’Europe occidentale, à l’intérieur de contextes culturels et sociaux très différents, ne peut être considérée comme l’élément de distinction d’une civilisation donnée, mais plutôt comme le trait d’union d’une sorte de κοινη artistique de l’Antiquité tardive45. De nombreux objets cloisonnés, de facture beaucoup plus raffinée et réalisés dans des métaux précieux, ont certainement une « valeur » plus importante, mais l’exemplaire de Castellu se distingue par sa forme ovale et sa division interne jusqu’ici inconnue, malgré la large variété morphologique que présentent habituellement les broches de ce type. O. von Hessen, tout en confirmant l’absence de comparaisons immédiates pour cet objet, en considération de sa facture plutôt grossière, propose de lui attribuer une origine de Gaule méridionale mérovingienne ou d’Espagne ; il suggère en outre une datation autour du VIe s., qui correspond parfaitement au contexte historique et archéologique de Castellu46.
196Toujours parmi les objets d’usage personnel, et en particulier ceux liés aux vêtements, la boucle ovale de ceinture (fig. 177) appartient à un type très simple, très largement répandu dans toute l’Europe durant le VIe s., et utilisé indifféremment aussi bien pour l’habillement masculin que féminin (Hessen 1983 : 24, 41, pl. 8, 7).
197Une découverte remarquable est constituée par une agrafe à double crochet (fig. 187), un objet peu commun –ou peut‑être qui n’a pas toujours été bien reconnu et étudié comme tel–, dont la fonction devait être de maintenir des vêtements, surtout des voiles légers, unis entre eux. Ce type d’objet, particulièrement bien attesté en Gaule, dans des contextes gallo‑romains (cf. Fouet 1963 : 277‑292) et mérovingiens a été découvert également ailleurs, par exemple à Conimbriga (Conimbriga VII : 143‑ 144, pl. XXXIV, 229‑232) ou à Corinthe (Davidson 1952 : 142, pl. 72,1030; exemplaire daté cependant de l’époque hellénistique). Mais il a été particulièrement étudié pour l’époque mérovingienne (Roes 1954 : 330‑334 ; Audin 1955 : 158‑159 ; Jeannet 1957 : 149‑151). Notre exemplaire, caractérisé par sa section plate et par l’absence totale de décoration, n’offre aucune indication particulière qui permette d’en affiner la chronologie.
- 47 Vágó Bóna 1976 : 191‑192, pl. 4, 361 ; pl. 8, 133/2 ; pl. 13, 1001/1‑2, 1005/1 ; pl. 15, 1050/6‑7 ; (...)
198Parmi le nombre réduit des bijoux découverts à Castellu, celui qui présente le plus grand intérêt est sans aucun doute la boucle d’oreille (fig. 178), d’un type qui, à travers d’innombrables variantes, est attesté durant toute la période allant du ier au viie s. Les exemplaires les plus anciens, tels ceux de la collection Burton Y. Berrys (ier‑iiie s.) (Ancient Jewelory 1973 : 152, pl. 124 ; 160, pl. 128), celui du musée Sanna de Sassari (ive s.) (Serra 1976 : 7, pl. I, 1), et les nombreux exemplaires de la nécropole d’Intercisa (ve s.)47, présentent un pendentif constitué, comme dans notre cas, par un élément métallique de forme conique ou pyramidale et par une perle de pâte de verre ou de pierre dure. Pour l’exemplaire de Castellu on se doit de noter comment la petite lame métallique, de forme pyramidale, recouvre presque complètement, contrairement aux autres exemples cités, la perle d’ambre. Les boucles d’oreille découvertes à Nurachi (Oristano) (Stefani 1985 : 64, pl. 53, fig. 2) et à Castel Trosino (Grosseto) (Maetzke 1959 : 63, fig. 20 ; Hessen 1971 a : 79, pl. 49, 2‑3), datées respectivement du vie et du viie s., amènent plutôt à penser à une évolution de ce type, avec la disparition de l’élément métallique et, ce qui en découle, la simplification du pendentif devenu une simple perle en pâte de verre.
199Toujours parmi les bijoux, on compte deux bagues (fig. 179‑180), l’une avec un chaton d’ambre, l’autre avec une barrette ondulée, décorée d’une croix gravée. Aucune comparaison précise n’a pu être trouvée dans ces deux cas, et il est par conséquent difficile de suggérer une indication chronologique, sinon à partir du terminus post quem évident que constitue la croix.
3.9.3. Les objets d’usage domestique
200Parmi les objets d’usage domestique, il importe de signaler tout d’abord la présence de six exemplaires de pointes de fuseaux (fig. 186) ; leur forme étant conditionnée par leur fonction, ils présentent des caractéristiques morphologiques constantes. Leur présence à Castellu, en nombre relativement important, peut être associée sans aucun doute à l’importance que devait avoir la filature de la laine, au sein d’une communauté où l’élevage ovin était particulièrement développé, comme le démontre l’étude de la faune (cf. infra § 3.14. ; cf. à ce propos la typologie des pointes de fuseaux, Davidson 1952 : 173, pl. 78, nos 1223‑8). On peut également rapporter aux travaux féminins la découverte de fragments d’aiguilles à coudre.
201Toujours dans le cadre des objets domestiques, il faut aussi signaler l’applique d’un récipient (fig. 188) d’un type bien connu à l’époque romaine (cf. par exemple, Frova 1973 : 557, pl. 136, 14), mais qui continue à être répandu durant l’Antiquité tardive et le Haut Moyen Age (on peut voir plusieurs appliques du même type au Museo dell’Alto Medioevo à Rome, par exemple) ; il faut y ajouter encore quelques fragments de petites lames qu’il est peut‑être possible d’attribuer à des récipients de bronze et une prise fragmentaire d’un type commun en forme d’Ω (fig. 190).
202Un objet singulier, de forme tronconique, présente une surface décorée d’incisions, révélant des traces d’usure (fig. 189). Il s’agit très probablement d’un poids, dont l’unité pondérale de mesure correspond à une sextula, c’est‑à‑dire à 1/16 de libra, soit 20 g ; aussi bien la typologie de ce poids que son type de décoration sont à l’heure actuelle sans comparaison possible.
203Deux petites spatules (fig. 184), peut‑être d’usage cosmétique, ont été également découvertes, mais on ne peut les rattacher à une typologie précise, compte tenu de leur forme constante à travers les siècles (pour une typologie sommaire, cf. Davidson 1952 : 181‑185, pl. 82‑83, nos 1320‑1370). On ne peut être guère plus éloquent à propos du petit manche à section quadrangulaire (fig. 185) : ses dimensions et l’encastrement évident à l’une de ses extrémités font penser au manche d’un petit ustensile, peut‑être une cuillère, mais l’absence de parallèles étroits ne permet pas d’être plus précis. On doit peut‑être aussi penser à un manche, pour un ustensile de plus grandes dimensions, pour un autre élément plein avec un trou d’encastrement interne.
204La fouille a livré également des bossettes (fig. 181‑183) et de nombreux fragments de petites lames pourvues de trous pour des clous et qui constituaient probablement des éléments de fixation. Leur utilisation ne peut être suggérée avec précision, mais elles avaient vraisemblablement aussi une fonction ornementale et pouvaient être appliquées à des objets en peau (des ceintures par exemple), en bois ou en métal (cf. par exemple, Ricci 1985 : 234, pl. 237).
3.9.4. Varia
205Parmi les objets dont l’usage n’a pu être défini, il faut compter les fragments de chaînes, les crochets, les petits clous ; ces derniers étaient peut‑être utilisés pour des objets ornementaux ou appliqués à des meubles. De très nombreux fragments de lames, de différentes dimensions, parfois unis entre eux, présentent des clous ou des trous prévus pour des clous, et ils sont parfois réunis ; ils étaient probablement utilisés pour la finition d’objets de toutes sortes, dont on ne peut préciser la nature.
206A propos seulement de trois petites lames, qui semblent modelées et dont l’une présente des traces de fer dans la partie interne, on peut penser à une fonction d’emmanchement d’ustensiles, peut‑être de couteaux.
3.9.5. Conclusion
207Comme cela a déjà été remarqué, la quantité des objets de bronze de Castellu est remarquable, si on la compare à celle de la céramique et du verre, surtout compte tenu du milieu et des dimensions décidément modestes de la construction où ils ont été découverts. Naturellement, les éléments pour lesquels une attribution est douteuse ou qui présentent un intérêt archéologique relatif, sont les plus nombreux, mais les objets pour lesquels il a été possible de réaliser une étude typologique –surtout ceux destinés à une ornementation– fournissent une contribution certainement intéressante aussi bien pour l’établissement d’une chronologie du contexte archéologique pris en considération, que, de manière plus générale, pour une connaissance artistique préliminaire de la Corse durant l’Antiquité tardive. De tels objets, en particulier les fibules et la boucle d’oreille, semblent être la réalisation d’artisans qui ont assimilé le goût et les techniques répandus à l’époque romaine, et qui reprennent certains motifs, en les transformant, en les simplifiant, ou en innovant. De cette manière ils ont créé des objets qui unissent aux caractères traditionnels des éléments tout à fait nouveaux. Nous avons ainsi des fibules à arc d’un type bien connu durant l’époque classique, mais renouvelé aussi bien par les dimensions réduites du porte‑ardillon que, surtout, par le choix d’une décoration extrêmement linéaire et caractérisée par l’insertion du motif chrétien de la croix. La broche cloisonnée, quant à elle, reprend une technique très répandue durant l’Antiquité tardive dans toute la Méditerranée et l’Europe occidentale mais cet objet se présente de façon inédite sous une forme ovale. Enfin, la boucle d’oreille, qui appartient à une typologie traditionnelle, attestée tout au long d’une période très étendue, s’en détache par la particularité du pendentif métallique modelé autour de la perle d’ambre.
208En ce qui concerne leur datation, ces objets n’offrent pas, à cause justement de leur caractère original, d’éléments chronologiques précis ; on peut cependant les situer à l’intérieur d’une période qui couvre les ve et vie s. Leur nombre relativement élevé et leur caractère –en particulier les analogies avec des objets de la même époque dans différents contextes– permettent de penser que la communauté vivant à Castellu aux ve et vie s. utilisait des objets liés aux vastes courants culturels et artistiques de la Méditerranée nord‑occidentale, vraisemblablement à travers le filtre des sites côtiers.
3.10. Fers (fig. 191‑233)

• Fig. 191 à 226 – Fers. – 191‑193 et 195‑202. Clous à tête circulaire. – 194. Clou à tête hémisphérique. – 203. Tige à deux têtes coniques. – 204‑205. Crampons en forme de U. – 206. Crochet de suspension (? ). – 207‑210. Eléments de suspension (?). – 211‑212. Crochets. – 213. Anneau circulaire. – 214‑215. Tiges rectangulaires. – 216‑224. Couteaux. – 225‑226. Stylets.

• Fig. 227 à 233 – Fers. – 227. Outil. – 228‑229. Coins. – 230. Pointe creuse d’arme. – 231. Mors de cheval. – 232. Ardillon de boucle. – 233. Fragment de plaquette linguiforme.
3.10.1. Introduction
209Les objets de fer constituent l’une des catégories de matériel les plus complètes découvertes à Castellu. Cependant, la nature même de ces objets, de caractère plus pratique qu’ornemental –qui les rend par conséquent plus semblables, typologiquement, au cours des siècles, au sein de contextes distants les uns des autres, aussi bien d’un point de vue culturel que géographique et chronologique– rend souvent difficile toute tentative de classification ou d’encadrement historique bien défini. En outre, l’état de conservation des objets, souvent fragmentaires, usés ou déformés par une utilisation prolongée ou par le temps, ne permet même pas, dans certains cas, une identification sûre. Si l’on tient compte de plus du manque de considération accordée aux objets de fer dans le cadre de plusieurs publications de fouilles, on comprend mieux la difficulté d’une recherche qui doit souvent se contenter de simples listes, sans aucun commentaire, pour du matériel auquel on semble attribuer une valeur moindre par rapport aux autres découvertes.
210Par conséquent, il a été jugé opportun de présenter le matériel de fer découvert à Castellu par rapport à sa fonction, sûrement établie ou présumée, depuis les éléments liés aux structures de l’habitat (clous, crampons, crochets), jusqu’aux instruments utilisés pour les activités liées à la vie quotidienne (couteaux, stylets, outils de travail, armes, mors de cheval), aux objets liés à l’habillement (éléments de ceinture). Enfin, dans les varia ont été regroupés tous les objets dont la fonction n’est pas clairement compréhensible, et les fragments qui ne peuvent être rapportés à aucun objet précis.
3.10.2. Les objets de charpente
3.10.2.1. Clous et crampons
- 48 A propos des clous dans l’Antiquité, je renvoie au Dict. Ant, 1, 2, Paris 1887, s. v. clavus (Sagli (...)
211Un très grand nombre de clous, dont très peu sont entiers et la majeure partie sous forme de très petits fragments, proviennent de la fouille. Ils sont caractérisés par une tige à section carrée, obtenue par forgeage au marteau ; ils se différencient par leur épaisseur et par la forme de leur tête48.
212On peut ainsi en proposer une typologie par une triple division : les gros clous à tige épaisse et tête conique circulaire, ovale (fig. 191‑193) ; les clous moyens, à tige mince et longue et tête hémisphérique, conique, circulaire ou quadrangulaire (fig. 195‑198) ; les petits clous, à tige courte et pointue et tête circulaire ou quadrangulaire (fig. 199‑202).
213Les clous, qui constituent certainement la découverte la plus fréquente au sein de contextes de toutes les époques, ne semblent pas connaître d’évolution particulière au cours des siècles, ni au niveau des formes, ni au niveau des types. On peut cependant en identifier plusieurs variantes, en fonction –selon toute évidence– de l’usage auquel ils étaient destinés (à titre d’exemple, on peut signaler une tentative de classification dans Manning 1966 : 41‑43 ; Gaitzsch 1980).
214Les gros clous se trouvent en général à l’intérieur de constructions, et sont en particulier utilisés pour les charpentes, de manière à assurer la fixation des différents éléments. On les trouve avec cette fonction aussi bien dans des édifices publics que privés de l’époque romaine et du Haut Moyen Age, par exemple à :
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Ostie, aux Terme del Nuotatore (Ostia I : pl. LXVI, fig. 939 ; Ostia III : 642) ;
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Angera (Sena Chiesa 1985 : 561) ;
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Luni (Frova 1977 : 322, 585) ;
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Conimbriga (Conimbriga VII : 30) ;
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Fishbourne (Cunliffe 1971 : 131);
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Verulamium (Frère 1972 : 186) ;
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Sirmium (Minic 1980 : 49) ;
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Torcello (Leciejewicz 1977 : 189‑190).
215Cependant, on les trouve également à l’intérieur de sépultures, probablement utilisés pour des cercueils de bois, comme le prouvent les découvertes d’époque lombarde de :
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Castel Trosino (Mengarelli 1902 : 313) ;
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Nocera Umbra (Pasqui, Paribeni 1919 : col. 341) ;
-
Torcello (Leciejewicz 1977 : 189‑190) ;
-
Cividale (Menghin 1977 : 21).
216A Castellu, les clous proviennent surtout du sondage I (US 101, 102, 116) –deux petits exemplaires seulement dans le sondage V et un dans le sondage IV– et ils sont associés à du matériel plutôt disparate (céramique, verre, bronze, os, tuiles et briques, et autres objets de fer) qui a été déposé et s’est accumulé au cours d’un abandon progressif de cette partie du site. Il n’est pas improbable qu’ils aient pu y parvenir au moment de l’abandon de ces pièces, après avoir été utilisés dans d’autres parties du complexe qui restent à découvrir. Dans le sondage V sont attestées des phases d’effondrement de tuiles provenant d’un toit de couverture. Les structures maçonnées de ces pièces, en pierres locales grossièrement taillées et liées à l’argile, permettent de penser que ces clous étaient plutôt utilisés pour le toit. L’absence de trous dans les tuiles (de terre cuite et de pierre) amène à attribuer ces clous à l’armature de la charpente ; on a en effet découvert, en contact avec des restes carbonisés de poutres, des restes d’argile crue : un revêtement qui devait avoir également la fonction de lier entre elles les tuiles de la couverture.
217Il faut probablement aussi attribuer à la charpente les clous de dimension moyenne, utilisés aux endroits de moindre épaisseur, ou de toute façon pour les structures secondaires. Par contre, la fonction de petits clous très pointus –à tête à base circulaire ou quadrangulaire– n’est guère évidente et il faut plutôt penser qu’ils étaient utilisés pour fixer des objets (meubles ou boîtes).
218L’un des exemplaires se distingue des types les plus communs ; il présente une tige longue et très mince et une tête hémisphérique (fig. 193). Des objets semblables proviennent de tombes d’Angera (Sena Chiesa 1985 : 563) et de contextes totalement différents en Lombardie, où ils sont utilisés pour fixer les axes de bois d’une embarcation lacustre (Bonino 1971 : 181‑182). On peut en déduire qu’il servait à fixer des éléments peu épais.
219Un objet dont la destination fait problème, reproduit à la fig. 203, présente une barre longue, à section circulaire, qui se termine par deux petites têtes coniques. Des types semblables ont été également découverts à Angera (Sena Chiesa 1985 : 563) et en Espagne, au sein de contextes chronologiques différents, d’époque républicaine (Almagro Gorbea 1984 : fig. 29, no 1), et qui ont été interprétés comme des clous « à deux têtes », mais dont l’utilisation n’a pu être précisée.
220Deux crampons en forme de U ont également été découverts, associés aux clous, dans le sondage I (US 104) ; ils ont une tige à section plate, et il s’agit là aussi d’objets répandus au sein de contextes d’époques et de cultures différentes, par exemple à :
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Settefinestre (Ricci 1985 : 490) ;
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Luni (Frova 1973 : 560) ;
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Conimbriga (Conimbriga VII : 36) ;
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Angera (Sena Chiesa 1985 : 561) ;
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Fishbourne (Cunliffe 1971 : 137, nos 66‑68).
221Ils sont utilisés en général pour fixer des plaques de revêtement aux parois, ou plutôt ici pour assembler entre eux des éléments de bois (fig. 204‑205).
3.10.2.2. Crochets
222Certains objets ont la forme caractéristique d’un crochet. Leur variété typologique, enferme de U (fig. 207), de crochet (fig. 210) ou de fer à cheval (fig. 208‑209), est fort bien attestée durant l’Antiquité. Il n’est pas toujours possible d’en établir la fonction primitive, comme élément de suspension (Conimbriga VII : 30‑32), ou avec le rôle de crochet de porte ou de serrure (ibid.: 36).
223A Castellu tous les crochets ont été découverts à l’intérieur du sondage I (US 102,116), parmi le matériel qui s’y est accumulé après l’abandon du site. Comme pour les clous et les crampons, on peut penser qu’ils appartenaient à des structures voisines, mais il est malheureusement difficile, dans l’état actuel de nos connaissances, d’être plus précis à propos de leur fonction.
224Il faut porter une attention particulière à un objet qui consiste en une barre à section plate, dont manque l’une des extrémités et dont l’autre se termine par un anneau ouvert (fig. 206). Il est attesté sur plusieurs sites de différentes époques et interprété de façons diverses, à Montmaurin (Fouet 1969 : 101,201 ), Conimbriga (Conimbriga VII : 187), sur différents sites des Gaules (FaiderFeytmans 1970 : pl. 51 ), de Grande Bretagne (Frère 1972 : 86, fig. 69, no 95 ; Neal 1974 : 176, nos 549‑550) et des Germanies (Schmidt 1970 : 16, pl. 2). L’interprétation la plus commune y voit un élément de suspension : l’une des extrémités de la barre devait être fixée dans ce cas dans un mur ou sur un support de bois, alors que l’autre, grâce à sa forme d’anneau, pouvait par exemple servir de porte‑lampes. L’état fragmentaire de l’objet, auquel manque justement l’extrémité qui devait servir à le fixer, ne permet pas d’avancer d’hypothèse précise. A Castellu, il provient du sondage I, et d’une couche (US 102) qui s’est formée avec l’accumulation de matériel divers après l’abandon de ce secteur du site, ce qui ne permet même pas d’en suggérer la position initiale.
3.10.3. Les objets de ménage quotidien
3.10.3.1. Couteaux
225Les couteaux sont parmi les objets les plus nombreux et typologiquement les mieux connus, dans le cadre des découvertes effectuées à Castellu. Dix exemplaires sont pratiquement entiers (ou il n’en manque qu’une partie infime) et leur forme ne pose aucun problème ; il faut y ajouter quatre fragments probables de lames. Etant donné que les couteaux sont peut‑être les seuls parmi les objets de fer à avoir bénéficié d’études systématiques et de tentatives de classification typologique, il est possible d’en distinguer différents types à partir de la forme de la lame et du profil du dos. Ils sont généralement pourvus d’une soie, fragmentaire dans la majeure partie des cas, qui s’insérait dans un revêtement de peau, d’os, de métal, ou simplement de bois, qui en constituait le manche.
226Parmi les exemplaires de Castellu, l’un des types présente une lame rectangulaire à dos légèrement convexe, à terminaison pointue et soie étroite (fig. 216). Il semble appartenir au type le plus communément attesté à l’intérieur de contextes chronologiques et culturels différents, depuis l’époque romaine jusqu’au Moyen Age, à :
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Conimbriga(Conimbriga VII : pl. XLII, nos 74‑75, 79, 82) ;
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Frénouville (Filet 1980 : 55, 149) ;
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Cornus (Amante Simoni, Martorelli 1986 : 167‑168, pl. XCVIII, no 71);
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Cividale (Mutinelli 1960‑61 : fig. 8, 9, 12) ;
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Bergame (Menghin 1977 : 21, pl. 6, 2) ; et dans le Frioul (Brozzi 1961 : fig. 1, no 5).
227Deux autres couteaux sont analogues au précédent (fig. 217‑218) ; le premier présente une lame rectangulaire et un dos rectiligne à terminaison plus arrondie, et une soie étroite ‑ cette forme est connue au sein de contextes lombards du viie s. à Castel Trosino (Mengarelli 1902 : col. 289, fig. 182‑183)et à Rivignano (Brozzi 1961 : pl. F, 3) ; le second, à lame étroite, et dont la terminaison n’est pas conservée, avec soie longue et mince, est attesté à Carpi sur la mer Noire (Bichir 1976 : pl. CLXV, no 15) et à Castel Trosino (Mengarelli 1902 : col. 289, fig. 181‑182).
228Un type plus rare, même s’il n’est pas inconnu, assez bien conservé ici (fig. 219), présente une lame triangulaire pointue, à longue soie effilée, et il est connu dans les contextes romains de Newcastle (Manning 1966 : 38, fig. 22, no 133) et Conimbriga (Conimbriga VII : pl. XLI, nos 69‑70), ainsi qu’au niveau du mobilier funéraire de la tombe d’un jeune Lombard riche, où il fait fonction de petit poignard, à Cividale (Mutinelli 1960‑61 : fig. 14‑15).
229La lame rectangulaire du couteau de la fig. 220 se rétrécit progressivement, et son dos est légèrement replié en forme de S ; la soie est étroite ; ce type se retrouve à Carpi (Bichir 1976 : pl. CLXV, no 14), Conimbriga(Conimbriga VII : pl. XLIV, nos 98, 104 ; XLIII, no 95) et dans les régions danubiennes (Menghin 1985 : 71, fig. 57, no 6).
230Une lame rectangulaire, fragmentaire, légèrement en forme d’arc, présente une terminaison arrondie et n’appartient à aucune des typologies habituelles (fig. 221 ) (un exemplaire semblable est interprété comme une lime, cf. Gaitzsch 1980 : pl. 12, fig. 56).
231La fouille a livré également trois soies de couteaux (fig. 222‑224). On ne peut en tirer de grandes conclusions sur leur typologie, la soie étant en général la partie la moins attestée de ces objets. Des exemplaires semblables au nôtre ont cependant été mis au jour à Castel Trosino (Mengarelli 1902 : col. 340, fig. 244) et à Torcello (Leciejewicz 1977 : 191, fig. 134, no 67). Par leur forme, quelques fragments de lames de bronze pourraient permettre de penser à l’utilisation de manches métalliques, mais leur caractère fragmentaire interdit d’être plus précis à ce propos. Cependant, on ne peut exclure l’utilisation de revêtements en matériel périssable, tel que le bois, qui ont disparu avec le temps. La confirmation d’une telle hypothèse peut venir d’un petit fragment, de soie probablement (fig. 224), sur lequel des traces de bois ont été mises en évidence au cours de la restauration.
232Les couteaux sont bien attestés à l’intérieur de régions très éloignées les unes des autres. Leur utilisation est essentiellement domestique et ils sont associés à la cuisine ou aux activités qui lui sont étroitement liées. Celui de la fig. 221, par exemple, qui ressemble beaucoup à une faucille, s’en distingue par un arc moins prononcé, et on pourrait peut‑être penser à une utilisation liée à la coupe de plantes (Sena Chiesa 1985 : 586). Cependant, ils peuvent avoir aussi la fonction d’outils de travail ou d’armes (Hessen 1971a : 38‑39). On les découvre fréquemment, en effet, non seulement à l’intérieur de maisons, où ils avaient vraisemblablement un usage domestique, mais également comme éléments du mobilier funéraire, surtout masculin, dans plusieurs nécropoles. D’après sa position, au moment de la découverte, on peut en déduire que le couteau, à l’intérieur d’un fourreau, était porté à la ceinture, comme instrument d’usage pratique, mais aussi éventuellement de défense personnelle, et comme tel enterré avec le défunt (Hessen 1975a : 15‑16).
233La découverte d’exemplaires typologiquement semblables entre eux, au sein de contextes aussi différents les uns des autres, constitue la preuve que cet instrument, comme tous ceux qui ont un caractère plutôt fonctionnel, a maintenu au cours des siècles une forme constante, sans subir de variations sensibles. Le fait que la majeure partie des exemplaires connus semble provenir de contextes funéraires d’époque lombarde doit probablement être attribué à une utilisation comme élément du mobilier funéraire à l’intérieur des tombes. Ces instruments ont ainsi échappé aux pertes inévitables liées aux structures habitées ; on ne peut cependant en tirer de conclusions quant à l’établissement d’une chronologie absolue.
234Même à Castellu, après les clous, les couteaux représentent, parmi les objets de fer, le groupe le mieux attesté et typologiquement le plus varié. Ils proviennent surtout du sondage I (US 101, 102, 104, 116), et de ce groupe de matériel souvent mentionné, lié à la période d’abandon de cette partie du site. Deux exemplaires seulement proviennent du sondage V (US 19, 36), où ils appartiennent aux couches d’effondrement de tuiles mêlées à de la terre argileuse.
3.10.3.2. Stylets
235Parmi le matériel utilisé dans la vie quotidienne, les stylets sont aussi attestés à Castellu où deux exemplaires ont été découverts. L’un (fig. 225), retrouvé dans le sondage I (US 104), a une forme longue et effilée, avec une extrémité pointue et l’autre fragmentaire. Le second, provenant du sondage V (US 1), est aussi conservé sans terminaison, alors que son autre extrémité s’élargit en forme de spatule (fig. 226). Les stylets pouvaient avoir plusieurs utilisations : pour l’écriture, l’incision du cuir, ou les cosmétiques (Davidson 1952 : 181 ; Conimbriga VII : 177). On ne dispose d’aucun élément permettant de proposer une fonction précise dans le cas des exemplaires de Castellu.
3.10.3.3. Outils
236On doit probablement considérer comme des outils à perforer quatre objets provenant du sondage I (US 102 et 116) (fig. 227‑228) et un du sondage V (fig. 229, US 3), à tige de section quadrangulaire, d’épaisseur variable, et à terminaison pointue ou absente. De nombreux exemplaires analogues, retrouvés au sein de contextes différents, ont été interprétés comme des ciselets utilisés dans le cadre du forgeage des métaux, aussi bien chauds que déjà refroidis, à Pompéi (Gaitzsch 1980 : pl. 18 no 99 et pl. 19, no 100) et Verulamium (Frère 1972 : 163, fig. 60, no 2), ou encore comme poinçons pour l’incision grâce à la terminaison pointue, toujours à Pompéi (Gaitzsch 1980 : pl. 18, no 97) et à Verulamium (Frère 1972 : 163, fig. 60, no 4), ou même comme scalpels, dans les Germanies (Gaitzsch 1980 : pl. 39, nos 45‑46) ou en Grande‑Bretagne (Manning 1966 : 25, fig. 15, nos 61, 62).
- 49 Dans un village de montagne d’Italie, entre le Piémont et le Val d’Aoste, se trouve un habitat où a (...)
237La présence de tels objets, en nombre tout de même important par rapport à l’ensemble des fers de Castellu, utilisés en général pour le travail des métaux et non dans un cadre domestique, pourrait suggérer l’existence d’un secteur artisanal sur le site49
3.10.3.4. Éléments de ceinture
238Il est rare que des parties d’habillement soient en fer, matériau que l’on réserve en général aux éléments qui ont une fonction de fermeture.
239Dans le sondage I (US 102) a été découvert un ardillon de ceinture à barrette qui présente un léger élargissement (fig. 232) ; ce type est connu en particulier en milieu byzantino‑lombard, mais sans cet élargissement (Hessen 1975a : 16‑20).
240On a jugé opportun d’associer aux éléments de ceinture un fragment linguiforme (fig. 233), qui rappelle les plaquettes terminales de ceinture, provenant de contextes lombards d’Italie et des zones danubiennes (Hessen 1971b : 19, fig. 4). Elles présentent des décorations incisées ou même damasquinées, alors que l’exemplaire de Castellu, qui provient du sondage I (US 116), est totalement lisse ; son attribution demeure par conséquent incertaine.
3.10.3.5. Armes
241Un objet conique, creux, partiellement conservé (fig. 230), provient du sondage I (US 102). Il s’agit certainement de l’extrémité d’une arme, mais on peut douter du type auquel il faut l’attribuer. Les comparaisons possibles, particulièrement nombreuses, concernent des pointes de lance, de flèche ou de ferrula. Il s’agit de toute façon d’une arme de choc, bien attestée à l’intérieur d’une période plutôt étendue, à :
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Carpi (Bichir 1976 : 39, fig. 7) ;
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Conimbriga (Conimbriga VII : pl. XVII, nos 12‑13) ;
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Newcastle (Manning 1966 : 21, fig. 13, nos 24‑26) ;
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Montmaurin (Fouet 1969 : 178‑179, fig. 77) ;
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Fishbourne (Cunliffe 1971 : 135, no 53) ;
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Richborough (Cunliffe 1968 : 109, pl. LVI, no 282) ;
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Corinthe (Davidson 1952 : no 1536) ;
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Sirmium (Minic 1980 : 51) ;
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Zignago (Ferrando Cabona 1978 : 358) ;
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en Sardaigne (Caprara 1978 : 213, pl. LXXXVII, 2) ;
-
en Roumanie(Vladescu 1983 : 176, fig. 12) ; et datés depuis l’époque romaine jusqu’au Moyen Age.
242Cet instrument est lié en général à un équipement de type militaire (Conimbriga VII : 85) mais il pouvait aussi avoir une utilisation différente, par exemple pour la chasse. Aucune autre découverte de Castellu ne peut permettre de penser à un équipement militaire ; par contre, la position géographique de ce site montagneux – ainsi que la découverte d’ossements de gibier, bien que peu nombreux, comme les mouflons, les cerfs ou les volatiles – amènent plutôt à supposer une utilisation de cet instrument dans la vie de tous les jours, peut‑être pour la chasse.
3.10.3.6. Mors de cheval
243Une partie de mors de cheval provient du sondage I (US 101) (fig. 231) ; des objets de ce type sont attestés à l’intérieur de contextes lombards où ils constituent une partie du mobilier funéraire de certains défunts. Une reconstitution en a même été tentée à partir de deux mors à proprement parler, unis par deux anneaux fondus l’un à l’intérieur de l’autre, et se terminant par un autre anneau traversé par une barre qui présente d’une part une extrémité conique, et de l’autre une terminaison en forme de spatule ; deux anneaux supplémentaires servaient d’élément de réunion entre les deux mors, à travers lesquels passaient les rênes (Galli 1942 : 13 ; Hessen 1971b : 20). Ce type est connu en Italie, à Nocera Umbra (Pasqui, Paribeni 1919 : col. 177, fig. 23), Arcisa (Hessen 1971b : 20) et Castel Trosino (Mengarelli 1902 : col. 296, fig. 192). Un exemplaire semblable, mais non identique, a également été découvert à Luni (Frova 1977 : 663). Son utilisation paraît attestée surtout durant le VIIe s., mais il est difficile de préciser à quel moment commence cet usage.
3.10.4. Varia
244Comme cela a été dit plus haut, on a attribué à ce groupe les objets dont il n’a pas été possible de comprendre la fonction avec certitude ; il s’agit en général de fragments de barrettes, de petites plaques, de lames impossibles à définir.
245Parmi ceux‑ci se trouvent : un anneau à section plate (fig. 213), probablement le maillon d’une chaîne de suspension ; une barre fragmentaire, longue et rectangulaire à section plate, se terminant par une tête hémisphérique, plate elle aussi (fig. 214), qu’il faut peut‑être assimiler à celle de la fig. 206 (Manning 1966 : 43) ; une barre à section quadrangulaire(fig. 215), dont la forme suggérerait au premier abord une utilisation comme verrou ou comme élément de fermeture d’une porte ou d’une boîte, pour laquelle nous n’avons trouvé aucun élément de comparaison.
246En dernier lieu, il faut signaler une série de fragments de plaques, de lames, de barres de définition difficile à établir et ne présentant aucun élément de comparaison convaincant.
3.10.5. Conclusion
247En conclusion, il faut rappeler que la majeure partie des objets de fer provient du sondage I, un nombre réduit du sondage V, très peu du sondage IV. Comme cela a été observé à différentes reprises, ce matériel a été déposé dans cette pièce à la suite de son abandon et de celui, peut‑être, d’autres constructions de ce secteur du site.
248La quantité et la variété des objets, en outre, suggéreraient plutôt l’existence d’un complexe constitué par un habitat, mais aussi par des ateliers à caractère artisanal. En effet, la découverte d’outils utilisés pour le travail des métaux pourrait être l’indice d’une activité de ce genre, certainement dans le but de répondre aux besoins propres de cet habitat ; cette hypothèse ne peut être que suggérée prudemment dans l’état actuel de notre connaissance du site.
249En ce qui concerne, enfin, la datation de ces objets de fer, qui ne subissent souvent aucune évolution typologique au cours des siècles, les analogies ne permettent pas de proposer de conclusions chronologiques absolues. Cependant, il faut tout de même remarquer que la plupart d’entre eux sont abondamment présents au sein de contextes de l’ Antiquité tardive et du Haut Moyen Age, depuis le ve jusqu’au viie s. inclus, confirmant ainsi toutes les propositions de datation données pour les objets de céramique, de verre, d’os ou de bronze.
3.11. Plombs
- 50 La bibliographie concernant le mobilier de plomb est relativement peu importante. En l’état actuel, (...)
250Les objets de plomb découverts sur le site sont très peu nombreux. Les considérations générales formulées précédemment, à propos du reste du matériel métallique (le bronze et en particulier le fer), relatives aux difficultés que pose une classification typologique, s’appliquent aussi aux objets de plomb ; on ne peut en effet en dessiner un cadre historique et chronologique plus précis, compte tenu du caractère homogène que présentent ces objets au cours des siècles, mais aussi et surtout à cause de leur état au moment de la découverte50. S’agissant d’objets très fragmentaires, on ne peut non plus en proposer une identification sûre, ni en déterminer la fonction.
251Deux petits objets cylindriques se distinguent de l’ensemble ; ils sont formés par une lame fine, repliée sur elle‑même par superposition, et ils s’amincissent vers leur extrémité. Des objets de ce type sont déjà connus au sein d’autres contextes. Ils sont signalés par exemple à Torcello (Leciejewicz 1977 : 192, fig. 137,1‑2). Cependant, on ne dispose pas d’éléments suffisants qui permettent de comprendre leur utilisation primitive.
252On peut en dire de même d’un petit fragment de lame, légèrement arrondie, qui présente une sorte d’empreinte centrale.
253Comme pour les objets de fer, il est encore plus difficile de suggérer une attribution possible ou l’identification d’objets précis pour des lames de différentes formes, repliées sur elles‑mêmes et rabattues.
3.12. Matériaux de construction de terre cuite (fig. 234‑238, tableau IV)

• Fig. 234 à 238 – Matériaux de construction en terre cuite. – 234‑236. Tegulae. – 237. Imbrices. – 236. Tegula mammata.

Tableau IV – Matériaux de construction de terre cuite (tableau récapitulatif). Le premier chiffre correspond aux nombres de fragments, le second aux pourcentages.
3.12.1. Présentation de l’étude
254L’étude des matériaux de construction de terre cuite, destinés à la couverture, découverts durant la fouille du site de Castellu, répond à l’exigence d’affronter une analyse technique et morphologique de tout l’ensemble de ce type de matériel pour un site donné.
- 51 Il faut signaler à ce propos l’importance de la contribution que fournissent les travaux de M. G. C (...)
255Cette tendance s’est affirmée durant ces dernières années, en contraste avec le caractère traditionnel (encore assez répandu) des études de cette classe de matériel pour laquelle l’intérêt principal était centré essentiellement sur les exemplaires estampillés ou caractérisés par des marques de différentes natures51.
256La cause du manque d’intérêt pour cette classe de matériel doit être recherchée à la fois au niveau des difficultés pratiques que comporte l’étude systématique de ces productions, et également dans l’incompréhension grave des acquisitions essentielles qui peuvent en dériver.
257Au‑delà, en effet, de la donnée objective –constituée par la découverte à l’intérieur des couches archéologiques de ce type de matériel, mis en rapport avec son contexte– d’autres aspects doivent encore être pris en considération, et évalués de façon opportune, afin de contribuer à déterminer le cadre des étapes historiques et archéologiques que l’on peut restituer pour un site donné. L’un de ces aspects est constitué par la nécessité d’envisager l’examen de ces produits d’un point de vue fonctionnel, à savoir en rapport étroit avec l’édifice dont ils assuraient la couverture.
258Pour obtenir des résultats à ce niveau, il est nécessaire de procéder à une étude typologique de ce matériel. Une telle typologie ne peut cependant être généralisée, et elle demeure nécessairement liée à un contexte précis. Malgré tout, elle peut constituer un élément irremplaçable pour mettre en évidence des phénomènes que rien d’autre ne permettrait de comprendre. La mesure et la forme des tuiles sont à ce sujet le seul critère possible qui permette de créer des séquences chronologiques internes. En effet, un même toit pouvait difficilement comporter des tuiles de forme et de dimensions différentes, ce qui aurait impliqué de graves problèmes de pose et d’étanchéité. La classification permet donc de déterminer quelles tuiles pouvaient se trouver au même moment sur un toit donné, et quelles autres peuvent être éventuellement attribuées à d’autres types de couverture ou à d’autres fonctions (Steinby 1973‑74 : 124‑125).
259Une approche de ce genre est rendue particulièrement difficile à Castellu à cause de l’absence d’exemplaires entiers ou reconstitués qui puissent permettre de donner une valeur définitive à une quelconque typologie.
260Il faut souligner en outre le caractère partiel de la documentation prise en considération, qui ne concerne qu’un secteur limité du site, dont l’extension globale reste encore à découvrir. De telles circonstances ne peuvent permettre par conséquent de suggérer un type de restitution possible de la couverture des structures. En tenant compte cependant de leur position à l’intérieur d’une région pluvieuse, et sujette l’hiver à des chutes de neige, il est probable qu’il ait pu s’agir de toits à plusieurs pentes, du type dit « à pavillon » (Massano 1936 : 50‑52).
261Un autre aspect de cette étude consiste aussi à faire le point sur les modes de production et l’éventuelle circulation de ces produits, selon un cheminement devenu désormais canonique pour toutes les autres classes de matériel de terre cuite, mais que l’on hésite encore à appliquer aux matériaux de construction.
262Il faut signaler à ce propos le grand intérêt de l’étude à caractère « ethno‑archéologique » conduite par D. P. S. Peacock, qui passe en revue cinq systèmes de production différents pour tuiles et briques, qui étaient encore appliqués à des époques récentes (Peacock 1979). Certains de ces systèmes peuvent présenter des éléments de comparaison étroits avec ceux utilisés durant (’Antiquité, là où se vérifient des conditions analogues : disposer notamment de bons gisements d’argile afin de garantir l’approvisionnement des centres de production, et aussi d’une densité de population suffisante pour justifier une consommation constante. L’absence de données sur d’autres sites éventuels de la région, dont les matériaux proviendraient de la même source que ceux de Castellu, empêche de déterminer pour le moment auquel des modes de production indiqués par D. P. S. Peacock pourrait appartenir le matériel découvert. J’aurais cependant plutôt tendance à exclure l’éventualité d’une production domestique, c’est‑à‑dire liée à ce seul site. En effet, la présence de dalles de schiste dans la couche d’effondrement du toit indique clairement qu’au moment où des restaurations de la couverture furent nécessaires on ne put se procurer automatiquement de nouvelles tuiles, une circonstance qui ne serait pas vérifiée si un four avait été en fonction à proximité immédiate.
- 52 Pour un panorama complet relatif aux fours de l’Antiquité et à leurs productions de céramique et de (...)
263Une hypothèse plus plausible, et qui est la mieux prouvée dans le monde antique, permet de supposer l’existence d’un (ou de plusieurs) centre de production organisé qui assurait une diffusion de produits de terre cuite, à l’intérieur d’une région circonscrite grâce à un réseau de distribution bien structuré. Les points communs qui sont apparus à l’occasion du prélèvement des argiles, entre la plupart des pâtes des matériaux de construction de terre cuite et de la céramique grossière à usage domestique, amènent en effet à penser pour les premiers à une manufacture dans les mêmes ateliers qui produisaient également la seconde, et pour la matière première à une provenance de carrières identiques52. Ces dernières, selon toute logique, ne devaient pas être très éloignées des centres de production, de même que ceux‑ci ne devaient pas être trop distants des lieux de consommation. Il s’agit là bien sûr d’une hypothèse qui reste à vérifier, mais que l’on peut justifier par le fait que le poids de l’argile brute et celui des tuiles et briques devaient inciter à éviter des transports trop longs et coûteux entre les centres de production et ceux de consommation. En ce qui concerne les matériaux de construction, il faut aussi tenir compte du fait que, contrairement à la céramique, le produit final était d’un coût très bas, par rapport à son poids (Peacock 1979 : 6). Il est donc possible que les tuiles découvertes à Castellu puissent être attribuées à un centre de production local, dont l’emplacement et le réseau de diffusion éventuel restent pour le moment totalement inconnus.
264L’étude des matériaux de construction de terre cuite de Castellu a posé quelques problèmes pratiques qu’il faut signaler, étant donné qu’ils ont fortement conditionné les critères de base adoptés pour le classement présenté ici. Tout d’abord, la position du site, d’accès impossible à tout moyen de transport, nous a contraint à effectuer l’étude sur place, en renonçant à bénéficier du support d’un laboratoire bien équipé. Cette difficulté nous a amené à renoncer à toute tentative de reconstitution des objets, dans la plupart des cas extrêmement fragmentaires. Le choix s’est donc porté sur une évaluation quantitative du matériel dans son ensemble, et s’est concentré sur une observation attentive des particularités techniques et morphologiques présentes sur chaque fragment, pour tenter de mettre en évidence les caractéristiques les plus courantes et les plus généralisées. Il est bien certain que l’on ne peut attribuer de valeur définitive à cette classification qu’il faut plutôt considérer comme une exposition objective de données que leur caractère préliminaire rend susceptibles de modifications futures.
265La première phase de cette étude a été consacrée à la mise en évidence des types morphologiques de tuiles. Même si le matériel était extrêmement fragmentaire, un examen préliminaire a permis d’établir que la majeure partie des fragments identifiables (à savoir ceux qui conservaient un élément significatif de l’objet) se rapportait à un même modèle (type fig. 234).
266Une analyse systématique des fragments attribués à ce groupe a permis d’effectuer la reconstruction quasiment intégrale d’un exemplaire. La comparaison avec une autre dizaine de tuiles, dont les trois quarts pouvaient être reconstitués, a confirmé les affinités morphologiques des exemplaires attribués à ce type.
267A côté de celui‑ci il a été possible de distinguer deux autres groupes constitués de fragments numériquement bien moins importants, dont chacun présente dans les détails des caractéristiques différentes de celles du premier type (type fig. 235 et type fig. 236).
268Dans les deux cas l’analyse des fragments n’a donné aucun résultat appréciable d’un point de vue typologique. Il est cependant permis de penser que les variantes rencontrées sur les fragments, et qui différencient les objets de ces deux groupes de ceux du premier type, ne concernent que certains détails qui n’ont pas une importance extrême, alors que la structure d’ensemble ne devait pas trop s’en éloigner. Au sein des couches d’effondrement du toit, on a retrouvé en effet des fragments des trois types de tuiles en question, ce qui indique clairement que ceux‑ci étaient utilisés indifféremment, bien qu’en quantités inégales. A ce propos, il a déjà été signalé que la technique de couverture en tuiles, qui prévoit tout un système de superpositions et d’encastrements, nécessite une standardisation des éléments qu’elle utilise.
269En ce qui concerne les imbrices, une observation des nombreux fragments n’a donné aucun résultat typologique particulier. L’examen d’ensemble donne cependant l’idée d’un groupe substantiellement homogène, bien évidemment.
270En dernier lieu, dans la classification qui suit, apparaît un nombre restreint de fragments de tegulae mammatae, qui se rapportent morphologiquement à un type unique.
271Dans une deuxième phase de cette étude, a été réalisée une distinction des pâtes. Le processus utilisé, fondé sur une observation empirique des caractéristiques techniques macroscopiques, a été le suivant : à l’intérieur de chaque groupe typologique, chaque exemplaire a étéexaminé de manière à vérifier si les différences morphologiques enregistrées initialement se retrouvaient au niveau des pâtes. Le résultat a été négatif : aussi bien les différents types de « tuiles à crochets » que les imbrices apparaissaient réalisés –malgré une grande diversité dans les pourcentages– à partir de la majeure partie des pâtes identifiées (six en tout).
272A l’intérieur de cette subdivision la majorité absolue appartient à l’ensemble relatif à la pâte 1, qui enregistre dans le sondage I 89 % des attestations sur l’ensemble des matériaux de construction de terre cuite découverts, et 75,74 % dans le sondage V.
273Pour le nombre restant, limité, des autres fragments de tuiles, la pâte 3 est moins attestée dans le sondage I (2,52 %) que dans le sondage V (17,9 %) ; la pâte 2, celle de meilleure qualité parmi les pâtes rencontrées, se retrouve plus dans le sondage I (14,33 %) que dans le sondage V (2,97 %) ; la pâte 6 est peu représentée : 3,83 % dans le sondage I, et 2,31 % dans le sondage V. Les pâtes 4 et 5 ne se retrouvent que dans un nombre insignifiant de fragments.
274Dans les pages qui suivent les différents types de tuiles identifiés sont présentés séparément, dans l’ordre de leur importance numérique, suivis par les imbrices et les tegulae mammatae. Pour chacun d’entre eux est fourni : une description, les mesures, et un tableau relatif aux présences dans les différents contextes des sondages I et V. Dans ce tableau, les données quantitatives sont exprimées en chiffres réels correspondant au nombre des fragments découverts. Les pourcentages donnés entre parenthèses sont relatifs aux totaux et sont calculés sur le cent théorique représenté par l’ensemble du matériel de chacun des groupes. Le but principal est de mettre en évidence les rapports quantitatifs entre les différents types de pâtes.
275Les fragments non identifiés n’ont pas été pris en considération ; leurs attestations ont cependant été enregistrées dans le tableau récapitulatif où, à côté des nombres réels, ont été reportés les pourcentages relatifs à l’ensemble des fragments de matériaux de construction de terre cuite découverts durant la fouille.
3.12.2. Les tegulae
3.12.2.1. Type fig. 234
276Tuile de forme trapézoïdale dont les rebords convergents sont relevés de sorte à en former les ailes ; celles‑ci ont un profil régulier, approximativement rectangulaire, parfois légèrement concave à l’extérieur. Toujours sur le profil externe des ailes, à proximité du petit côté, se trouve un léger ressaut en creux, de 0,5 cm environ, destiné à faciliter la superposition et l’encastrement des tuiles entre elles (retraite).
277La partie supérieure de la tuile présente une bonne finition, lissée à la spatule et, dans certains cas, ornée d’un motif ondulé effectué avec les doigts avant la cuisson. Dans certains exemplaires, à proximité des angles formés par le rehaussement des ailes, on note deux sillons fins réalisés eux aussi manuellement. La partie inférieure présente une surface rugueuse, due au séchage sur le sol. Les angles entre la partie inférieure et le profil externe sont émoussés. La majeure partie des exemplaires est recouverte d’un engobe de couleur jaune crème.
Mesures
278Côtés longs : 50 cm ; base majeure : 38,5 cm ; base mineure : 30,5 cm ; épaisseur : 2,5‑3 cm.
Hauteur de l’aile : 5,5 cm (ext.) ; 3 cm (Int.) ; épaisseur de l’aile : 2 cm ; épaisseur de l’aile sur le ressaut : 2‑2,5 cm.
Longueur du ressaut ; 6‑8 cm.
Poids
27911.5 kg.
Attestations
Sond.I |
Sond.V |
Totaux |
% |
|
Pâte 1 |
99 |
58 |
157 |
80,10 |
Pâte 2 |
7 |
12 |
19 |
9,69 |
Pâte 3 |
2 |
10 |
12 |
6,12 |
Pâte 4 |
‑ |
3 |
3 |
1,53 |
Pâte 6 |
2 |
3 |
5 |
2,55 |
Totaux |
110 |
86 |
196 |
|
% |
56,12 |
43,88 |
100 |
280Il s’agit du type le plus largement attesté dans les deux contextes pris en considération. L’unité morphologique du groupe est un indice clair de la contemporanéité des produits de cette forme. L’unique élément variable à l’intérieur de ce type semble être la longueur du ressaut. Cette particularité semblerait confirmer l’hypothèse de M. Steinby, selon laquelle le ressaut aurait pu être effectué manuellement après l’extraction de la tuile du châssis, et avant la cuisson (Steinby 1973‑74 : 125). A ce propos, il faut signaler également l’hypothèse différente de T. Rook, qui fournit une reconstruction possible d’un châssis qui présente les encastrements destinés aux ressauts (Rook 1979 : 299, fig. 16‑3).
281Des tuiles de cette forme sont communes dans toutes les régions et à toutes les époques ; on ne trouve ici aucune caractéristique particulière qui permette d’envisager une évolution de ce type. On souffre particulièrement dans ce cas de ne pouvoir établir de comparaisons avec du matériel analogue découvert dans la région. Notre témoignage demeure par conséquent isolé dans l’attente de fouilles futures ou de prospections des zones aux alentours, afin de pouvoir disposer d’une documentation plus exhaustive relative à cette région de la Corse.
3.12.2.2. Type fig. 235
282Fragment de tuile trapézoïdale qui conserve la partie médiane inférieure gauche, en vue plane. L’aile présente à l’extérieur un profil vertical, alors que l’intérieur est légèrement fuselé vers le haut. Comme pour le type précédent, le plan supérieur est lissé à la spatule, tandis que l’inférieur présente une surface rugueuse ; engobe jaune crème ou, dans certains cas, rosé.
Mesures
283Epaisseur de la tuile : 3 cm.
Hauteur de l’aile : 9 cm (ext.) : 6 cm (int.) ; épaisseur de l’aile : 5 cm (sup.) ; 3 cm (inf.).
Attestations
Sond.I |
Sond.V |
Totaux |
% |
|
Pâte 1 |
54 |
21 |
75 |
81,52 |
Pâte 2 |
1 |
– |
1 |
1,09 |
Pâte 3 |
5 |
10 |
15 |
16,30 |
Pâte 5 |
1 |
‑ |
1 |
1,09 |
Totaux |
61 |
31 |
92 |
|
% |
66,30 |
33,70 |
100 |
284Cette tuile se différencie du premier type essentiellement par les dimensions de l’aile qui apparaît plus massive. Cette caractéristique, ainsi que la longueur, la largeur et l’épaisseur de la tuile sont déterminées par le châssis. En revanche la forme des ailes est due à la finition manuelle qui a lieu après l’extraction du cadre ; ceci amène à accepter que des tuiles qui présentent des ailes de forme différente, mais qui ont les mêmes dimensions, puissent provenir d’un même châssis (Lugli 1957 : 530, 581‑582 ; Mac Donald 1982 : 151).
285Pour les raisons déjà exposées, il n’a pas été possible de reconstruire un seul exemplaire complet de ce type. Nous avons cependant de bonnes raisons de croire que toutes les tuiles de ce groupe, dans leur ensemble, devaient être plutôt proches de celles du premier groupe, étant donné qu’elles étaient destinées à la couverture de mêmes structures. Si cela était, ces deux groupes de tuiles devraient être contemporains. En effet, l’utilisation d’un type de châssis différent, comme unique variante, implique une hauteur des ailes légèrement supérieure sans déterminer pour autant une variation qui puisse empêcher la coexistence sur le même toit de ces deux types de tuiles. D’ailleurs, cela ne devait pas non plus créer d’inconvénient pour la superposition des imbrices, étant donné que les dimensions de celles‑ci étaient suffisantes pour garantir la couverture des ailes des tuiles des deux types. Dans leur ensemble, ces produits semblent appartenir aux mêmes centres de production, puisque dans les deux cas on retrouve des argiles et des techniques de finition identiques.
286La seule particularité qui puisse être signalée est la présence dans cet ensemble d’un fragment de tuile semblable aux autres, réalisée à partir d’une pâte qui n’est attestée qu’une autre fois seulement par deux autres fragments de tuiles du groupe des « non identifiées », avec lesquels ‑ bien que les fragments ne présentent aucune jonction possible – il faut probablement le mettre en rapport. Il est probable qu’il s’agisse dans ce cas d’un réemploi.
3.12.2.3. Type fig. 236
287Fragment de tuile trapézoïdale dont est conservée la partie médiane inférieure gauche (vue en plan). Comme dans le cas précédent, le profil de l’aile est vertical à l’extérieur et légèrement fuselé vers le haut à l’intérieur. Le plan supérieur présente une surface lissée à la spatule ; le plan inférieur, selon l’habitude, n’a pas été lissé. Engobe jaune crème.
Mesures
288Epaisseur de la tuile : 2,5‑3 cm.
Hauteur de l’aile : 4,5 cm (ext.) ; 2 cm (int.) ; épaisseur de l’aile : 2,5‑3 cm.
Attestations
Sond. I |
Sond.V |
Totaux |
% |
|
Pâte 1 |
35 |
8 |
43 |
93,48 |
Pâte 3 |
1 |
‑ |
1 |
2,17 |
Pâte 6 |
– |
2 |
2 |
4,34 |
Totaux |
36 |
10 |
46 |
|
% |
78,26 |
21,74 |
100 |
289Les fragments relatifs à ce type sont numériquement les moins importants. Une vision d’ensemble du matériel de ce groupe, les dimensions constatées sur des fragments et les caractéristiques techniques des pâtes tendraient à suggérer un rapprochement avec le premier type, dont ces fragments ne diffèrent que par des détails secondaires : des ailes moins hautes et l’absence d’émoussement de l’angle entre le plan inférieur de la tuile et le profil externe de l’aile.
3.12.3. Les imbrices
3.12.3.1. Type fig. 237
290Fragment d’imbrex trapézoïdal à section semi‑cylindrique dont est conservée la partie terminale inférieure. Les côtés longs se rétrécissent vers l’extrémité supérieure ; la surface est lissée à la spatule à l’extérieur, alors qu’à l’intérieur, elle n’a pas été lissée.
Mesures
291Épaisseur : 2,5‑3 cm.
Ouverture de l’extrémité inférieure : 20 cm.
Attestations
Sond.I |
Sond.V |
Totaux |
% |
|
Pâte 1 |
139 |
55 |
194 |
77,60 |
Pâte 2 |
17 |
– |
17 |
6,80 |
Pâte 3 |
‑ |
18 |
18 |
7,20 |
Pâte 6 |
18 |
3 |
21 |
8,40 |
Totaux |
174 |
76 |
250 |
|
%% |
69,60 |
31,40 |
100 |
292L’ensemble de ces fragments, d’après ce que l’on a pu constater, ne présente aucune caractéristique notable. Sur aucun d’entre eux n’existe de particularité ou d’élément destiné à en faciliter la superposition. En substance, ils semblent appartenir au type le plus simple d’imbrex, largement employé dans le système de couverture en matériau de terre cuite depuis l’Antiquité jusqu’à nos jours. L’élément qui les caractérise est la différence d’ouverture des deux extrémités qui, comme dans le cas des tuiles, garantit la possibilité de les superposer et de les encastrer en coïncidence avec les joints formés par le contact entre les ailes des tuiles.
3.12.4. Les tegulae mammatae
293Par ces termes conventionnels, on désigne un type particulier de grandes briques (surtout des bipedales) de forme carrée, et parfois rectangulaire, qui présentent sur les deux faces des saillies angulaires. L’utilisation de ce type de brique était dictée par la nécessité de créer un vide entre les murs périmétraux et les parois internes d’une pièce donnée, dans le but de l’isoler de l’humidité. L’utilisation de tegulae mammatae est fréquente également dans les pièces dotées d’un chauffage à air chaud.
3.12.4.1. Type fig. 238
294Exemplaire fragmentaire dont est conservée la partie d’un angle. Les plans inférieur et supérieur sont lissés à la spatule. Sur le plan supérieur, à proximité de l’angle, émerge une saillie de forme cylindrique, traversée à l’intérieur par un trou. Celui‑ci se rétrécit progressivement depuis le plan inférieur de la brique jusqu’au terme de la partie en saillie.
Mesures
295Épaisseur de la tuile : 2,5‑3 cm.
Hauteur de la saillie : 5‑6 cm ; ø de la saillie : 5‑6 cm. ø du trou : 2 cm (inf.) ; 1 cm (sup.).
Attestations
Sond. I |
|
Pâte 1 |
4 |
Pâte 2 |
1 |
Totaux |
5 |
296Les exemplaires en question appartiennent au type de tegula mammata le plus répandu à l’époque romaine (Lugli 1957: 580, fig. 123, en haut, à gauche). Le trou qui traverse la saillie est par contre un phénomène moins fréquent ; cette particularité peut être rapportée à deux facteurs, technique et fonctionnel. D’une part, on peut penser à une pratique dictée par la nécessité de réduire l’épaisseur de la saillie et d’en faciliter la cuisson grâce à la création d’un passage pour l’air chaud ; d’autre part, la présence de ce trou pouvait être exploitée, au moment de l’utilisation de ce matériau, pour y insérer un clou et garantir de la sorte sa fixation aux parois. Il faut signaler en outre que sur les cinq exemplaires découverts à Castellu, il n’existe aucune trace de rouille ou d’autres indices qui puissent permettre de penser à une utilisation suivant cette technique.
3.12.5. Conclusion
297D’après les constatations qu’il a été possible d’effectuer, la fouille de la pièce découverte dans le sondage I a livré une quantité de tuiles bien plus importante que celle de l’ensemble des deux pièces du sondage V. Cela est vraisemblablement dû au fait que dans la majeure partie des cas les tuiles du sondage V appartiennent à des couches d’effondrement, alors que celles du sondage I ne sont relatives qu’en partie à l’effondrement du toit. En effet, dans ce sondage, la présence de tuiles dans la stratigraphie est sensible à partir des couches les plus superficielles, ce qui amène à penser que plusieurs de ces objets faisaient partie vraisemblablement du matériel déposé dans cette pièce après son abandon. Cette hypothèse confirmerait aussi la présence de fragments de tegulae mammatae, dont les fonctions sont absolument inconciliables avec la nature de la pièce découverte dans le sondage I, et pour lesquelles il faut penser à une provenance de constructions d’un autre type.
298En ce qui concerne le sondage V, la plus grande concentration de tuiles se retrouve, bien sûr, surtout dans les couches d’effondrement du toit. Les traces évidentes d’incendie, présentes uniquement sur les tuiles provenant de la pièce B, confirment que la cause de sa destruction doit être attribuée au feu qui prit sans doute à un moment où la couverture de la pièce A voisine s’était déjà écroulée. Les tuiles provenant de cette pièce, en effet, ne présentent aucune trace d’incendie et, de plus, furent très probablement en partie récupérées.
3.13. Meules à main, mortier (fig. 239‑243)

• Fig. 239 à 243 – Meules et mortier. – 239. Meule dormante. – 240‑241. Meules courantes. – 242‑243. Mortier en pierre.
3.13.1. Introduction
- 53 Cf. TLL s. v. mola, § β L’on manque cependant d’études générales. Malgré la fréquence des découvert (...)
299L’utilisation de meules à main pour le broyage des céréales est largement attestée chez les Romains aussi bien par les sources littéraires que par un grand nombre de découvertes archéologiques53.
300La nécessité, implicite pour ces objets, de répondre à des exigences précises de nature strictement fonctionnelle, fait que, malgré des différences de forme et de dimensions, les meules conservent au cours des siècles un critère de fonctionnement pratiquement immuable. Elles se composent de deux parties superposées. La meule dormante (meta) en constitue la partie inférieure et sa base devait être fixée à l’origine à un support, de bois en général ; de forme cylindrique ou, plus fréquemment, conique, elle présente une cavité au centre de sa partie supérieure, qui permet d’y loger le pivot. La meule courante (catillus) constitue par contre la partie mobile de la meule qui, par son mouvement, provoque le broyage des grains de céréales.
301Le catillus se superpose à la meta par l’inclinaison de sa face interne si celle‑ci est conique, ou bien par l’intermédiaire d’un anneau qui s’encastre dans le pivot, si elle est cylindrique. Le catillus est aussi traversé en son centre, sur toute son épaisseur, par un orifice, circulaire en général, à l’intérieur duquel passait le pivot et à travers lequel les céréales destinées à être broyées pénétraient à l’intérieur de l’instrument. Souvent la face supérieure présente une inclinaison convergente vers l’orifice central, ce qui lui permet de remplir sa fonction de trémie.
302Le mécanisme est mis en mouvement à la main, en agissant sur un manche de bois inséré dans une cavité qui peut se trouver, ou bien sur le côté du catillus, ou bien sur sa face supérieure, vers le bord extérieur.
303Une caractéristique fréquente des meules à main, que Servius rappelle au ive s. (Georg., I, 274 : molam manualem cudendo asperatam), est celle d’un dégrossissement approximatif de la surface de broyage, qui est même souvent volontairement regrattée de manière à faciliter la pulvérisation de la céréale, qui, d’autre part, en se réduisant en farine, joue un rôle lubrifiant.
304Par rapport aux meules cylindriques, les meules coniques présentaient l’avantage de garantir le caractère concentrique des deux parties, par leur structure à encastrement, et aussi la possibilité de rejeter naturellement le produit travaillé, grâce à l’inclinaison de la surface de broyage. En revanche, les meules cylindriques étaient bien plus simples à confectionner et par conséquent plus répandues ; elles excluaient en outre l’éventualité (fréquente dans le cas des meules coniques) d’une évacuation prématurée du grain (Moritz 1958 : 107 ; il faut aussi rappeler la pratique du regrattage de la surface de broyage des meules pour faciliter l’expulsion des grains moulus ; cf. Curwen 1937 : 145).
305A côté des meules, un autre instrument manuel, indispensable dans le cadre d’un établissement à caractère agricole, est le mortier (mortarium), utilisé pour écraser les olives, les céréales, le sel, etc., mais aussi pour la préparation d’onguents et de parfums. Il s’agit en général d’un récipient tronconique, assez étroit et profond, toujours accompagné d’un pilon (pistillum) (White 1975 : 9‑10).
306On retrouve ces instruments au sein du matériel de Castellu, en quantité plutôt limitée. Nous avons dénombré six exemplaires fragmentaires de meules, deux dormantes et quatre courantes, auxquels s’ajoute un fragment de mortier.
307Dans le catalogue qui suit, sont indiqués uniquement les objets qui offraient la possibilité d’une reconstitution sûre, grâce à leur état de conservation et qui reflètent le panorama complet des différents types présents à Castellu. Les exemplaires non publiés seront signalés à la suite du type illustré auquel ils s’apparentent par leur forme, avec l’indication du matériel dans lequel ils sont réalisés. Si l’on exclut le travertin, dans lequel a été taillé le mortier, le matériel le plus couramment utilisé pour la fabrication des meules est le granit à grain fin (très commun en Corse) que nous retrouvons pour cinq exemplaires sur six (à propos du lapis molaris, terme par lequel les auteurs antiques définissent la pierre la plus adéquate pour le façonnement des meules, cf. Gianfrotta, Pomey 1980 : 220, 222).
308La majeure partie de ces fragments ne provient pas de contextes stratigraphiques, mais de découvertes de surface ou d’un réemploi dans les murets de délimitation de la vigne. Il est par conséquent impossible d’établir des données chronologiques précises ou des comparaisons, car nous ne possédons aucune autre donnée archéologique relative à des découvertes semblables dans cette région.
3.13.2. Meules dormantes
309• Fig. 239, découverte de surface.
Exemplaire fragmentaire qui comprend environ les deux tiers d’une meule. Surface de broyage arrondie, légèrement convexe. L’autre face est elle aussi arrondie et inclinée dans sa partie inférieure vers la base plane. Orifice central cylindrique arrondi vers le fond.
ø 40 ; h. max. 13 ; ø de l’orifice 10 ; h. de l’orifice 4.
Granit à grain fin.
Un autre fragment, découvert lui aussi hors stratigraphie, peut être attribué au précédent ; il comprend environ le tiers d’une meule de granit à grain fin.
3.13.3. Meules courantes
310• Fig. 240, sond. V, US 36.
Exemplaire fragmentaire qui comprend environ une demi‑meule. Sa face supérieure, légèrement inclinée vers l’extérieur, présente un ressaut arrondi autour du trou central. Celui‑ci est circulaire, à section cylindrique. Sur sa face supérieure, vers sa limite extérieure, on note une petite cavité circulaire verticale, à section trapézoïdale. Côté arrondi vers le haut et incliné vers l’extérieur. Surface de broyage concave et travaillée de façon plutôt grossière,
ø 39 ; h. max. 8,5 ; ø du trou 10 ; a du trou latéral 3.
Granit à grain fin.
Deux fragments plus modestes appartiennent à ce même type ; ils ont été découverts en surface et sont en granit à grain fin,
311• Fig. 241, découverte de surface.
312Exemplaire fragmentaire comprenant environ un quart de meule. Face supérieure rectiligne, sensiblement inclinée vers le trou central et délimitée vers l’extérieur par un bord à listel vertical. Côté rectiligne et vertical. Surface de broyage rectiligne, sensiblement inclinée vers l’extérieur et caractérisée par une série de rayons qui partent de l’orifice central. Celui‑ci est à section circulaire.
ø 38 ; h. max. 13,5 ; h. min. 2 ; ø du trou 6. Pierre volcanique grise.
3.13.4. Mortier
313• Fig. 242‑243, sond. I, US 104.
Fragment comprenant environ les deux tiers d’un mortier. Bord vertical non distinct, aplati dans sa partie supérieure. Le corps présente à l’extérieur un profil tronconique qui tend à s’évaser vers le haut et à s’arrondir dans la partie inférieure. Le profil intérieur est curviligne ; la base, apode, est circulaire. Quatre becs arrondis dépassent à l’extérieur du rebord supérieur et présentent une section triangulaire.
ø sup. (int.) 13 ; h. int. 9 ; ø de la base 12 ; épaisseur des parois max. 4, min. 1,5.
Travertin.
3.14. Faune (fig. 244‑259, tableaux V‑IX)

• Fig. 244 – Fréquence des parties du squelette exprimée en nombre minimal. Les effets de la destruction différentielle apparaissent nettement pour les dents les plus fragiles, les éléments du squelette axial et les épiphyses les moins ossifiées des os longs. La comparaison des graphes A et B met en évidence une moins bonne conservation relative des éléments du squelette appendiculaire dans le sondage V, qui s’explique par une plus grande activité des chiens.
A = Caprini du sondage V ; B = Caprini du sondage I ; C = Suinae du sondage I ;
D = Bovinae du sondage I,
1 = chevilles osseuses ;
2 = crâne ;
3 = M3 sup. ;
4 = M1‑2 sup. ;
5 = P3‑4 sup. ;
6 = D3‑4 sup. ;
7= C sup. ;
8 = Isup. ;
9 = M3 inf. ;
10 = M1‑2 inf. ;
11 = P3‑4 inf. ;
12 = D3‑4 inf. ;
13 = C inf. ;
14 = I inf. ;
15 = mandibule ;
16 = hyoïde ;
17 = vertèbres cervicales ;
18 = vertèbres thoraciques ;
19 = vertèbres lombaires ;
20 = vertèbres sacrées et caudales ;
21 = côtes ;
22 = sternum ;
23 = scapula ;
24 = coxal ;
25 = humérus ;
26 = fémur ;
27 = radius ;
28 = ulna ;
29 = tibia ;
30 = fibula ;
31 = carpe ;
32 = tarse ;
33 = métacarpe ;
34 = métatarse ;
35 = phalange I ;
36 = phalange II ;
37 = phalange III ;
38 = rotule ;
P = épiphyse proximale ;
D = épiphyse distale.

• Fig. 245 – Comparaison des proportions relatives des quatre principaux taxons domestiques dans les trois locus étudiés : le sondage V se différencie des deux autres qui montrent, entre eux, une forte parenté.
3.14.1. Introduction
314Par sa position chronologique (vie s. ap. J.‑C.), le site de Castellu lève le voile sur l’une des époques les plus mal connues de l’histoire corse des relations entre l’Homme et les animaux, le premier millénaire de notre ère. Pour cette période, on ne disposait jusqu’alors que de trois sites : Mariana (Ginsburg 1978), Scaffa Piana (Poulain, à paraître), Capula abris 1 et 3 (Vigne 1988a), qui représentent en tout moins de 300 ossements. Les pages qui suivent résultent de l’étude de 25 000 vestiges dont près de 10 000 ont pu être répartis entre une vingtaine de genres de Vertébrés (tableau V).

• Tableau V – Composition de la faune de Castel lu, exprimée en nombre de restes (NR), en nombre minimal d’individus (NMI) et en poids d’os (Pds).
315Le matériel du sondage I qui, avec 80 % du total, en représente la plus grande part, a fait l’objet d’une étude approfondie, tant en ce qui concerne la macrofaune que la microfaune qui a été recherchée par tamisage de prélèvements de sédiments. Moins bien documentés, les lots du sondage V et surtout du sondage IV ont été analysés de manière moins complète (il ne sera rien dit ici de la poignée de vestiges issus des secteurs sud et nord du sondage III).
3.14.2. État de conservation et signification archéologique du matériel
316Les trois ensembles étudiés ont en commun un bon état de conservation des fragments osseux et dentaires qui témoigne d’une faible évolution taphonomique (s.s.) : seules quelques traces de corrosion radiculaire et d’autres, un peu plus nombreuses, de dents de Rongeurs, évoquent cet épisode final de l’histoire du matériel.
317Les agressions subies avant l’enfouissement furent en revanche plus vulnérantes : un grand nombre de pièces témoigne d’une forte fragmentation et de l’action insistante des molaires des chiens, particulièrement dans le sondage V. La fig. 244 en illustre les conséquences sur la composition anatomique du matériel : les parties les plus fragiles (épiphyses, rachis...) ont « fondu », et certains os tels que le fémur, réduits en éclats, ont échappé à la détermination et alimentent la masse considérable (plus de 65 % des restes en moyenne) des ossements indéterminés. Cependant, la présence de quelques épiphyses parmi les plus fragiles, et de quelques pièces de petite taille montre que l’état de conservation n’est finalement pas si mauvais comparé à celui de bien d’autres sites de plein air en sol acide.
318Si les agressions subies par le matériel risquent de biaiser quelque peu certains résultats, leurs séquelles sur les ossements constituent en revanche de précieux intermédiaires pour comprendre la signification du dépôt. Un coup d’œil suffit à s’assurer que la forte fragmentation, dont il a été question plus haut, résulte essentiellement du découpage boucher et de la recherche systématique de la moelle des os longs, surtout celle du fémur. Il s’agit donc de restes alimentaires dont l’abondance ne laisse aucun doute quant à l’utilisation finale des structures comme dépotoir. Les ordures domestiques n’ont pas été les seules à être jetées dans ces habitations abandonnées, puisque 2 % de la macrofaune déterminée porte les séquelles d’un début de façonnage artisanal.
319C’est à ce niveau qu’apparaît la première différence entre le sondage V, où ces derniers déchets représentent 5 % des macrorestes, et le sondage I, où ils sont sensiblement plus rares (1 %). D’autres éléments confirment que ces deux structures (nous avons vérifié l’homogénéité de chacune d’entre elles au niveau de la composition faunique) ont été alimentées en ordures d’origine différente : la proportion des principaux taxons domestiques (fig. 245), l’abondance des espèces chassées, les techniques bouchères et culinaires diffèrent légèrement d’un locus à l’autre. De manière plus précise et nuancée, on peut imaginer le schéma suivant : un premier groupe (habitat + artisanat) rejetait l’essentiel de ses déchets dans la ruine du sondage V et le reste dans celle du sondage I, alors que le second groupe, plus enclin à la chasse mais ne pratiquant peut‑être pas le travail de l’os, préférait le dépotoir du sondage I, sans doute pour des raisons de proximité. En ce qui concerne le dépôt du sondage IV, seule la part relative des taxons domestiques (fig. 245) permet d’avancer qu’il était alimenté par ce même second groupe.
320Il reste souhaitable que des fouilles ultérieures interviennent pour mettre à l’épreuve cette interprétation, dont les implications débouchent sur la compréhension de la répartition spatiale et sociale des tâches et habitations dans l’agglomération de Castellu.
3.14.3. Description zoologique et zootechnique de l’ensemble du matériel
3.14.3.1. Le hérisson: Erinaceus europaeus L. 1758
321Les ossements trouvés à Castellu sont trop peu nombreux pour compléter valablement les connaissances sur cette espèce, apparue en Corse dès le Néolithique moyen (Vigne 1988a).
322Le nombre d’individus représentés suggère par ailleurs que l’animal aurait pu être consommé par les habitants de Castellu.
3.14.3.2. Le chien : Canis familiaris L. 1758
323Seul un fragment vestibulaire de carnassière inférieure droite renseigne sur l’apparence physique de l’un des auteurs des innombrables morsures observées sur les os. L’individu était de la taille d’un grand berger (à moutons ?).
324La très faible proportion de restes de Chien dans ces déchets essentiellement alimentaires élimine la cynophagie.
3.14.3.3. Le mulot : Apodemus cf. sylvaticus (L. 1758)
325Les deux seuls restes issus du tamisage et en tout point semblables à ceux décrits du Néolithique récent d’Araguina‑Sennola (Vigne 1988a), ne renseignent guère sur l’évolution de ce taxon depuis son introduction sur l’île.
3.14.3.4. Le rat: Rattus rattus (L. 1758)
326L’abondance des restes dans tous les secteurs de la fouille et l’absence totale de connexion anatomique ne laissent maintenant plus aucun doute quant à l’appartenance de ces ossements au vie s. de n. è. Il s’agit là d’un important jalon de l’histoire du Rat en Europe occidentale, comme nous l’avons déjà signalé ailleurs dans une courte note (Vigne, Marinval‑Vigne 1985).
327Il nous avait alors été impossible de préciser l’espèce ; nous sommes maintenant en mesure de le faire, puisque nous avons presque quintuplé le corpus depuis. Malgré l’absence d’éléments dentaires et crâniens significatifs, l’appartenance à R. rattus ne fait aucun doute pour la plupart des restes. Ils sont tous de petite taille (annexe ostéométrique, 3.14.8.2.) et s’inscrivent sans peine dans les intervalles de variation définis pour l’espèce par P. Wolff et alii (1980). Seul un fémur adulte (signalé par * dans l’annexe ostéométrique) dépasse légèrement la valeur limite donnée par ces auteurs, ce qui, comme l’a fait justement remarquer F. Audoin‑Rouzeau (1983), n’est guère significatif eu égard à l’origine exclusivement autrichienne du corpus de référence de leur étude.
328Cette pièce présente d’ailleurs, comme tous les autres fémurs de Castellu, un très net foramen nourricier proximal, qui, d’après les mêmes auteurs, constitue un bon critère discriminant. Signalons encore que la forme de l’acétabulum et de la tubérosité d’insertion du muscle droit de la cuisse des trois coxaux étudiés est tout à fait caractéristique de R. rattus.
329Il est risqué d’établir des comparaisons avec les autres pièces subfossiles de Corse, le corpus ostéométrique étant, à ce jour, encore embryonnaire (Vigne 1988a). Il ne semble pas toutefois y avoir de différence notable entre les rats de Castellu et ceux de Bonifacio (xive‑xvie s.). Le constat, avancé par ailleurs (Vigne 1988a), d’une infériorité de taille des fossiles par rapport aux individus actuels s’en trouve renforcé.
3.14.3.5. Le porc et le sanglier : Sus scrofa L. 1758
330Le matériel de Castellu illustre, une fois de plus, l’impossibilité de différencier le Porc du Sanglier corses sur les ossements. La morphologie rustique des animaux d’élevage, la probable origine des populations sauvages par marronnage des bêtes domestiques et les constants contacts reproductifs entre les deux groupes expliquent cela (Vigne 1988a). Il n’est donc pas impossible que quelques‑uns des ossements du site cortenais renvoient au Sanglier.
331Cependant, la structure d’abattage (fig. 246, tableau VI) qui témoigne d’une gestion stricte, indique clairement que la grande majorité des vestiges est attribuable au Porc : 15 % des individus étaient abattus avant l’âge de deux mois (ce chiffre est probablement sous‑évalué en raison de la destruction différentielle), 30 % ont été tués au début de leur seconde année, 50 % entre 18 et 36 mois, alors que quelques reproducteurs seulement, surtout des truies (tableau VI), étaient conservés jusqu’à un âge avancé.

• Tableau VI – Répartition par sexe et âge des canines définitives de Suinés (Sus scrofa) du sondage I.

• Fig. 246 – Courbe d’âges d’abattage des Suinés (Sus scrofa) de Castellu, exprimée en nombre de dents (en haut) et nombre d’individus (en bas). Pour la méthode de calcul, cf, Vigne 1988a.
332La morphologie osseuse des porcs de Castellu mérite une attention toute particulière. Cette population s’inscrit en effet dans l’histoire de l’élevage porcin corse à une époque pour laquelle les renseignements manquent. Pour résumer : aux « grands » porcs du Cardial ont succédé des bêtes plus petites et à moindre rentabilité bouchère ; les Chalcolithiques ont amené un considérable renouveau en portant le rendement en viande de 50 kg à près de 90 kg par individu, grâce, entre autres, à l’introduction de bêtes continentales plus grandes ; la situation s’est ensuite dégradée jusqu’à l’âge du Fer (moins de 40 kg par individu), dernier jalon avant la fin du Moyen Age, où l’on trouve des porcs morphologiquement comparables à ceux du Néolithique, mais à bien meilleure rentabilité en viande. On ne sait rien de ce qu’il advint durant le premier millénaire de notre ère (Vigne 1988a et b).
333Comme on pouvait s’y attendre, les dimensions des ossements de Castellu (annexe ostéométrique, 3.14.8.3.) correspondent, grosso modo, à celles de tous les Suinés fini– et postnéolithiques de l’île, avec une taille au garrot avoisinant 70 cm en moyenne. Les profils frontaux (fig. 247A) ne sont pas plus concaves que ceux du Néolithique, et les indices d’allongement des lacrymaux ([H/DAP] x 100), compris entre 60 et 80 %, témoignent d’un redressement crânien plus faible que celui de certaines bêtes néolithiques. L’architecture crânienne n’a donc pas subi de profond remaniement entre la fin de l’âge du Fer et l’occupation de Castellu.
334Quelques détails témoignent cependant de minimes évolutions durant cette période. Les rangées jugales du site cortenais montrent un télescopage antéro‑postérieur plus fréquent et en moyenne plus accentué (fig. 247B) que celui qu’on observe pour les porcs préhistoriques. Sur ce point, on est tenté de rapprocher les Suinés de Castellu de ceux du site de Rocche di Sia, à Ota (XVe s.) qui ne sont malheureusement pas encore tous étudiés. De même, les cambrures mentonnières des symphyses mandibulaires évoquent les formes observées dans le dépôt des remparts de Bonifacio (xive‑xvie s.) (Vigne 1988a). Ces ressemblances permettent de considérer la population porcine corse médiévale comme ostéologiquement homogène.

• Fig. 247 – Morphologie de la tête des Suinés (Sus scrofa) de Castellu : A = profils crâniens (n = Nasion ; les flèches indiquent l’avant) ; B = rangées alvéolaires et dentaire en vue occlusale (de haut en bas et de gauche à droite : maxillaire gauche adulte, maxillaire droit jeune, maxillaire gauche adulte, mandibule droite adulte ; les flèches indiquent l’avant et la position de l’axe de symétrie) ; C = profils mentonniers de la symphyse mandibulaire,
335De cet ensemble ressort l’impression que l’occupation romaine a malgré tout infléchi l’élevage porcin corse. Mais l’empreinte des événements zootechniques intervenus alors reste difficilement perceptible sur la morphologie. Elle est sans commune mesure en tout cas avec celle laissée par les grands mouvements d’amélioration des races de la fin du Néolithique.
336On peut alors se demander si les Romains sont réellement à l’origine de l’amélioration de rentabilité en viande observée entre l’âge du Fer et les xiiie‑xve s. Le matériel de Castellu permet de répondre positivement à cette question : avec près de 2 700 kg de viande et abats (voir plus loin) pour 52 individus, soit une moyenne de 52 kg par individu, l’élevage dont il témoigne est deux fois plus performant que ceux de la fin de la Protohistoire, et presque autant que ceux de la fin du Moyen Age. Les races n’ayant pas changé, c’est sur le compte d’une meilleure maîtrise alimentaire et démographique des troupeaux qu’il faut mettre cette amélioration.
337Pour la première fois en Corse, il est donc établi que l’apport zootechnique romain est à l’origine du renouveau de l’élevage au premier millénaire de notre ère.
3.14.3.6. Le cerf : Cervus elaphus L. 1758
338Les quatre premières années de fouille n’ont livré aucun reste de Cerf si l’on excepte trois fragments de merrain tronçonnés, évidés et polis, dont l’origine corse était, a priori, démentie par l’absence d’autres vestiges attribuables à l’espèce. Et il a fallu attendre le tri de la dernière boîte d’ossements (sondage I) pour qu’une poignée d’os amène à réviser cette opinion, après qu’eurent été passés en revue près de 20 000 fragments. L’anecdote mérite d’être portée au dossier de la question de l’échantillonnage en zooarchéologie.
339Elle illustre aussi la rareté de ce taxon dans la faune de Castellu. Une frappante homogénéité de taille et un fort pourcentage de remontages indiquent que l’ensemble du matériel issu de l’unité stratigraphique US 116, a appartenu au même adulte jeune. Il s’agit de 14 des 19 pièces attribuées au Cerf ; elles renvoient à une partie de poignet gauche (capitato‑trapézoïde, unciforme, métacarpien), à une portion du pied droit (cubonaviculaire, plusieurs fragments du même métatarsien) et à une portion de cage thoracique qui a pu être recomposée grâce aux traces de boucherie que portaient quatre premières côtes droites. De plus rien n’empêche de rattacher à cet ensemble les fragments de scapula de l’US 102 et le métatarsien de l’US 104.
340Cependant, les dimensions des ossements (annexe ostéométrique, 3.14.8.4.), semblables à celles décrites jusqu’alors pour les îles Tyrrhéniennes (Vigne 1988), et la présence d’ossements postcrâniens portant des traces de découpe bouchère et de cuisson ne laissent aucun doute quant à l’origine cynégétique et corse de cet animal.
341Cela permet de reculer d’au moins huit siècles la date d’introduction du Cerf en Corse (Vigne, Marinval‑Vigne 1988), et d’accorder plus de crédit à l’origine insulaire des restes décrits par Ginsburg (Ginsburg 1973) à Mariana (ier‑ive s. ap. J.‑C.). Si l’on se fie à Polybe (XII, 3) qui dément la présence du Cerf en Corse au iiie s. av. J.‑C., cela rend les Romains responsables de son introduction. Mais la présence de l’espèce en Sardaigne dès les viiie‑viie s. av. J.‑C. (Vigne, Lanfranchi 1981) incite à la prudence, dans l’attente de plus de données sur les âges des Métaux en Corse. Il reste que les populations de cette île devaient être peu denses ou peu chassées au premier millénaire de notre ère.
3.14.3.7. Le bœuf : Bostaurus L. 1758
342Un seul os long entier (métacarpien) permet d’évaluer la taille au garrot (113 cm) d’après les coefficients de Matolcsi (Matolcsi 1970).
343Pour caractériser le format de la population de Castellu, il faut donc avoir recours à l’ensemble des mensurations (annexe ostéométrique, 3.14.8.5.) rapportées à la longueur latérale de l’astragale, par des coefficients établis sur des squelettes de vachettes corses actuelles.
344Il apparaît alors qu’une taille de 115 cm au garrot peut être retenue pour les Bovins de Castellu, et que ce format dépasse nettement celui des bêtes des âges des Métaux, et surtout de la fin de l’âge du Fer (fig. 248). Une sensible amélioration est donc intervenue entre‑temps, qu’il faut sans doute attribuer à l’influence zootechnique romaine.

• Fig. 248 – Comparaison de la taille des Bovins (Bos taurus) de Castellu, exprimée par la longueur latérale de l’astragale, avec celle d’autres populations corses (d’après Vigne 1988). 1 = âge des Métaux (N = 4) ; 2 = Castellu (N = 33 ; x = 59,1 ; s = 3,1) ; 3 = Bas Moyen Age de l’intérieur montagneux de l’île (Capula, Castello d’Istria, Ota ; N = 11) ; 4 = Bonifacio (XIVe‑XVIe s, ; N = 28) ; 5 = Aleria (citerne du domus au dolium, XVe‑XVIe s. ; N = 17) ; 6 = vachettes corses actuelles de race traditionnelle (musée de Lévie).
345Au sein du corpus bovin corse médiéval, la population de Castellu apporte une pièce supplémentaire à un dossier complexe et chargé d’interrogations : au Bas Moyen Age, on trouve, dans l’intérieur montagneux, de petits bovins peu différents de la race traditionnelle actuelle, alors qu’en plaine orientale existent des populations hétérogènes, de format moyen un peu (Bonifacio) ou beaucoup (Aleria) plus grand ; on se perd en conjectures pour expliquer les liens entre ces différents groupes (Vigne 1988a).
346Les bovins de Castellu, de taille intermédiaire entre celles des bêtes de Bonifacio et de l’intérieur montagneux (fig. 248), n’éclaircissent guère la situation, mais complètent la description dans l’espace et/ou dans le temps. On peut en effet les considérer comme les représentants d’un quatrième groupe, qui serait caractéristique de l’intérieur peu montagneux que constitue la plaine de Corte ; à moins qu’il ne faille les intégrer dans une perspective évolutive, en les considérant comme la souche ancestrale commune aux trois autres populations qui auraient alors subi, du moins en plaine côtière, de sensibles améliorations au cours du Moyen Age (fig. 248). Les autres éléments morphologiques qui permettraient de trancher entre ces deux conceptions manquent sur le matériel de Castellu, trop fragmenté : la forme des bordures infra‑orbitaires du jugal, illustrée par une dizaine de pièces, varie entre tous les extrêmes que l’on retrouve chez les bovins traditionnels actuels comme chez ceux des différents sites de la fin du Moyen Age ; et l’indice d’allongement des troisièmes molaires, très homogène, est semblable à celui de toutes les populations médiévales corses. Il reste donc que les populations bovines médiévales corses constituent un ensemble disparate et complexe, dont on parvient mal à démêler l’écheveau au seul moyen de l’anatomie.
347La courbe d’abattage de la fig. 249 apporte peut‑être quelques éclaircissements. Elle montre en effet un profil tout à fait inhabituel, caractérisé par l’abattage presque exclusif d’adultes. Ces derniers sont cependant trop jeunes en moyenne pour évoquer un élevage tourné vers la production d’animaux de trait ou de portage (par ailleurs, rien sur le matériel n’indique la pratique de la castration). En revanche, l’absence totale de veaux de moins de trois ans indique clairement qu’on ne consommait pas de telles bêtes à Castellu. L’interprétation la plus vraisemblable est qu’elles étaient toutes vendues, soit sur pied pour être engraissées ailleurs, soit directement pour la consommation. Quelques animaux étaient conservés à Castellu jusqu’à l’âge adulte pour cet élevage essentiellement tourné vers le commerce. Certains d’entre eux étaient toutefois consommés par le groupe éleveur.

• Fig. 249 – Courbe d’âges d’abattage des Bovinés (Bos taurus) de Castellu, exprimée en nombre de dents (en haut) et nombre d’individus (en bas). Pour la méthode de calcul, cf. Vigne 1988a.
348La mise en évidence de circuits de vente de viande de veau en Corse, dès le Haut Moyen Age, pourrait, dans une certaine mesure, expliquer la coexistence dans la faune de Bonifacio de grands Bovins de plaine et de petites bêtes à la morphologie plus primitive, achetées aux éleveurs de l’intérieur de l’île. La présence d’une majorité d’animaux tués entre 1,5 et 3 ans à Bonifacio pourrait corroborer cette interprétation (Vigne 1988a) sans bien sûr, que cela implique que le comptoir génois s’approvisionnait en viande de veau dans la plaine de Corte.
3.14.3.8. Le mouflon, le mouton et la chèvre : Caprini simpson 1945
349Sur la base des critères morphoscopiques et métriques proposés par Boessneck et alii (1964), 10 % des restes de Caprinés ont pu être répartis entre Ovins (Ovis L. 1758) et Caprins (Capra L. 1758), avec un faible avantage numérique (55 %) pour ceux‑ci.
350Au sein du genre Ovis, un gros cornillon à faible torsion et à section basale subtriangulaire (fig. 250C) est la seule pièce dont les caractéristiques morphoscopiques attestent sans équivoque de la présence du Mouflon (O. ammon musimon Pallas 1811). Les autres chevilles osseuses renvoient au Mouton (O. aries L. 1758). L’analyse métrique (fig. 251 ; annexe ostéométrique, 3.14.8.6.) confirme l’existence de deux populations distinctes d’Ovins, d’importance numérique très inégale : quelques pièces sortent nettement du lot et sont de taille si grande et si semblable à celle du Mouflon corso‑sarde actuel qu’elles ne peuvent avoir appartenu à de gros béliers domestiques ; le reste constitue un ensemble relativement homogène, à l’intérieur duquel il est cependant impossible de différencier les plus petits mouflons des plus gros moutons. C’est pour cette raison que nous avons laissé planer le doute en attribuant l’ensemble des os de modeste dimension à Ovis sp. Néanmoins, il va de soi que la majorité de ces derniers renvoie à O. aries.

• Fig. 250 – Morphologie des chevilles osseuses d’Ovins (Ovis) de Castellu ; A = Bélier domestique (O. aries) ; B = Brebis domestique ; C = Mouflon (O. ammon musimon) mâle ; les flèches indiquent l’avant et la position de l’axe de symétrie.

• Fig. 251 – Description métrique des populations de Caprines (Caprini) de Castellu. Les abréviations sont celles utilisées dans l’annexe ostéométrique.
351Les mesures obtenues pour la Chèvre (Capra hircus L. 1758) s’intercalent entre celles des deux groupes précédents, sauf dans le cas de l’ulna et du métacarpe (fig. 251) où les différences morphoscopiques entre Ovins et Caprins expliquent l’inversion de l’ordre de taille.
352Nous avons profité de l’abondance des données métriques concernant les Caprinés pour chercher s’il existe une différence de format entre les animaux consommés par les deux groupes humains qui ont rejeté leurs déchets respectivement dans les structures des sondages I et V. Par leur grand nombre dans les deux locus, seuls les restes dentaires se prêtent à cette investigation ; mais ils présentent l’inconvénient de ne pouvoir être répartis entre les trois taxons en présence. Dès lors, le léger décalage métrique qui apparaît entre les deux sondages (fig. 251) peut tout aussi bien refléter une disparité de taille qu’une différence de proportion entre les groupes zoologiques. Le fait que le sondage I a livré plus de grandes dents (sans doute attribuables au Mouflon), fait pencher pour la seconde interprétation.
Le Mouflon (Ovis ammon musimon Pallas 1811)
353La taille est identique à celle des bêtes des âges des Métaux et du Bas Moyen Age du plateau de Lévie, et à celle du Mouflon corso‑sarde actuel (Vigne 1988a). De plus, on retrouve, sur la cheville osseuse de Castellu (fig. 250C), toutes les caractéristiques déjà signalées pour les Ovins sauvages tyrrhéniens, et notamment le très vaste sinus frontal qui existait déjà chez les Moutons du Cardial dont ils sont issus par marronnage (Vigne 1988a).
354Ces vestiges apportent la preuve que les habitants de Castellu, surtout ceux qui ont alimenté en déchets le sondage I, pratiquaient une active chasse au Mouflon. De ce qui a été dit plus haut, il résulte en effet que les décomptes du tableau V ne constituent qu’une évaluation par défaut de la fréquence de cette espèce dans les restes alimentaires. Et on peut estimer à une dizaine les individus représentés par l’ensemble du matériel si l’on choisit d’attribuer au Mouflon une partie des restes qui témoignent d’un âge d’abattage supérieur à trois ans.
Le Mouton (Ovis aries L. 1758)
355Les chevilles osseuses de béliers (fig. 250A) sont robustes et de taille légèrement supérieure à celles du xve s. d’Aleria et de Bonifacio. Mais les fortes courbures et torsions (annexe ostéométrique, 3.14.8.6., chevilles osseuses : Ovis), ainsi que le sinus frontal peu profond sont très semblables à ceux qu’on observe pour tous les cornillons de mâles du Bas Moyen Age (Vigne 1988a).
356Une seule cheville osseuse courte, dépourvue de sinus, à spongiosa compacte, à section en « goutte d’eau » et marquée à la base par une forte dépression de malnutrition (fig. 250B), est sans doute attribuable à une brebis. Elle ressemble considérablement à l’une de celles de l’ensemble I de Bonifacio (xive‑xve s.) (Vigne 1988a : fig. 69). Mais la présence de fragments pariétaux et frontaux adultes de faible épaisseur incite à penser que certaines femelles étaient inermes. L’existence de deux modes d’ouverture bouchère de la boîte crânienne, l’un sagittal l’autre transverse, pourrait appuyer cette hypothèse.
357Le format et la robustesse des éléments postcrâniens, qui évoquent une taille au garrot comprise entre 57 et 62 cm (annexe ostéométrique, 3.14.8.6., tailles au garrot), apportent une preuve supplémentaire que les Ovins domestiques de Castellu sont tout à fait semblables à ceux du Bas Moyen Age et à ceux actuels (et traditionnels) de Corse, qui constituent jusqu’à présent un ensemble homogène.
358Il en résulte que l’amélioration des races ovines corses s’est faite durant la période d’occupation romaine de l’île. Le pastoralisme médiéval n’a pas modifié la morphologie des bêtes, contrairement à ce qui avait été supposé par ailleurs (Vigne 1988a).
La Chèvre (Capra hircus L. 1758)
359La Chèvre de Castellu est de format (annexe ostéométrique, 3.14.8.6.) semblable à ce qu’on observe dans les autres sites médiévaux corses, et, de manière plus générale, dans tous les gisements holocènes de l’île qui constituent, jusqu’à présent, un ensemble métrique homogène (Vigne 1988a).
360Mais il n’en va pas de même si l’on compare la forme des chevilles osseuses des chèvres du Haut Moyen Age de Castellu et celle des bêtes des xive‑xvie s. d’Aleria et Bonifacio. Certes, ces trois populations étaient pourvues de cornillons d’égale robustesse, en forme de cimeterre et à rayon de courbure le plus souvent compris entre 15 et 20 cm (annexe ostéométrique, 3.14.8.6., chevilles osseuses : Capra) (Vigne 1988a). Cependant, ceux du site cortenais montrent un dimorphisme sexuel plus marqué, une carène antérieure moins accentuée (fig. 252), une courbure latérale plus fréquente et surtout une torsion beaucoup moins développée que ceux des deux autres gisements.

• Fig. 252 – Sections transverses basales des chevilles osseuses des Caprins adultes (Capra hircus) de Castellu (f = femelle ; m = mâle ; les flèches indiquent l’avant et la position de l’axe de symétrie).
361Ces différences témoignent d’une sensible évolution de la race dans le courant du Moyen Age. Le format n’ayant pas changé, on peut se demander si le but des sélections (ou introductions ?) n’était pas assez éloigné d’un strict souci de productivité bouchère (lait, cabris, résistance...).
L’abattage des Caprinés (fig. 253)

• Fig. 253 – Courbe d’âges d’abattage des Caprinés (Caprini) de Castellu, exprimée en nombre de dents (NR) et nombre d’individus (NMI). Pour la méthode de calcul, cf. Vigne 1988a.
362Pour les sondages I et V, l’absence presque totale d’individus abattus entre 30 et 36 mois permet de distinguer deux groupes, celui des animaux tués entre 3 et 5 ans et celui des bêtes consommées avant l’âge de deux ans et demi.
363En l’absence de détermination spécifique sur les restes dentaires qui ont servi à la détermination des âges (selon les critères de Ducos 1968 et de Silver 1969), il est difficile d’interpréter le premier groupe. La lacune d’abattage dans la seconde partie de la troisième année interdit d’évoquer exclusivement le Mouflon. Cela témoigne‑t‑il alors de la conservation d’une petite proportion de reproducteurs qui, ajoutée au Mouflon, serait à l’origine de l’importance de cette classe d’âge ? ou faut‑il invoquer, comme nous l’avions fait pour le site de Rocche di Sia (Vigne 1988a), des pratiques pastorales et alimentaires différentes pour le Mouton et la Chèvre, comme semble l’indiquer la répartition des sexes (tableau VII) ?

• Tableau VII – Répartition par sexe et âge des cornillons et coxaux (d’après les critères de Boessneck 1964) de Caprinés (Caprini) de Castellu.
364Le groupe des bêtes plus jeunes rappelle (en tenant compte de l’état de conservation différent) celui mis en évidence dans le Bas Moyen Age de Capula. Il peut être éventuellement subdivisé en deux (cabris‑agneaux, et bêtes entre 6 et 24 mois), et témoigne clairement du double but, laitier et boucher.
3.14.3.9. Les équidés : Equus L. 1758
365Huit des quinze fragments attribuables au genre Equus (M1‑2 sup., radius, fragments de fémurs, première phalange) renvoient sans doute au Cheval (E. caballus L. 1758). Un radio‑cubitus et une dent jugale inférieure montrent des caractères caballins et asiniens mêlés, ce qui pourrait indiquer la présence d’hybrides ; mais le matériel est insuffisant pour confirmer cette hypothèse. Il reste néanmoins qu’aucune pièce n’évoque clairement l’Ane (E. asinus L. 1758), d’autant moins que les dimensions des os (annexe ostéométrique, 3.14.8.7.) sont nettement supérieures à celles qu’on est en droit d’attendre pour un petit âne médiéval corse, dont les descendants, hauts de moins de 1 m, ont été décrits par F. Tertrais (1982).
366Pour évaluer les hauteurs au garrot à partir des deux radius entiers, nous avons préféré les coefficients de Vitt à ceux de Kiesewalter (tous deux cités dans Driesch, Boessneck 1974), les seconds apportant des résultats manifestement trop élevés par rapport aux références prises dans les collections d’anatomie comparée du Muséum national d’Histoire naturelle (Paris). Les résultats sont de 134 cm pour l’os de cheval et 125 cm pour celui de détermination douteuse (hybride ?), ce qui évoque de petites bêtes semblables à celles que les textes anciens qualifient de « poneys ».
367Malheureusement, les références zooarchéologiques en Corse sont absentes. On peut toutefois remarquer que ces tailles sont du même ordre de grandeur que celles citées dans les enquêtes administratives et les statistiques équestres du début du xixe s. (citées par Tertrais 1982), toutes « races » confondues. Mais le dossier est encore loin d’être suffisamment étayé pour mettre à l’épreuve l’hypothèse de F. Tertrais (1982) qui pense que « l’occupation [sic] sarrazine, à partir du viiie siècle » a joué un rôle important dans l’histoire du Cheval sur l’île.
368Signalons enfin que les rares os d’Equidés de Castellu ne présentent aucune trace d’outil métallique et sont nettement moins fragmentés que ceux des autres grands Mammifères, ce qui élimine sans doute l’hippophagie.
3.14.3.10. L’homme : homo sapiens
369Deux molaires sont attribuables à l’Homme. La première est lactéale, totalement rhizalysée ; tombée de la bouche d’un enfant, elle fut jetée aux ordures. La seconde est définitive, radiculée et indemne de toute anomalie pathologique.
3.14.3.11. Le coq domestique : Gallus domesticus L. 1758
370Absent de la faune insulaire aux âges des Métaux, le Coq domestique fut sans doute introduit en Corse au début de l’Antiquité classique. Mais la plus ancienne mention pour l’île, un tarso‑métatarse de mâle, ne date que des ier‑ive s. ap. J.‑C. (Ginsburg 1973). Plusieurs sites datés entre le xiiie et le xvie s. (Aleria, Capula, Castello d’Istria, Rocche di Sia et surtout Bonifacio) témoignent de sa présence en Corse au Bas Moyen Age. Castellu apporte donc, ici encore, un intéressant jalon.
371Le Coq y est représenté par une population de petite taille (annexe ostéométrique, 3.14.8.11.), un peu plus réduite et moins homogène que celle qu’on trouve à Bonifacio aux xive‑xvie s. Par ailleurs, près de la moitié des os issus du sondage V sont sensiblement plus grands que ceux récoltés dans le sondage L Nous garderons cependant la plus grande prudence sur ce point.
372Ce dernier locus livre suffisamment d’éléments pour comprendre l’abattage des poulets, coqs et poules à Castellu : le radius, notamment, permet d’évaluer la proportion de jeunes (1 à 2 mois) consommés à un peu plus de 50 %, alors que 43 % des fémurs montrent un épaississement interne calcifié caractéristique des poules pondeuses ; il reste 4 à 7 % pour les coqs, chiffre confirmé par les tarso‑métatarses porteurs d’ergots.
3.14.3.12. Les oiseaux sauvages
373Le tableau V donne la liste des taxons représentés à Castellu. Ils sont presque tous attestés sur l’île dès avant le Néolithique ancien, mais la Perdrix (Alectoris sp.)n’avait jamais été signalée antérieurement au xive s. (Bonifacio, cf. Vigne 1988a) ; la Foulque (Fulica atra) et les grands échassiers proches du Héron (Ardea sp.) n’avaient jamais livré de fossiles holocènes en Corse.
374Ces deux derniers taxons témoignent de l’exploitation cynégétique des zones humides, soit dans la plaine de Corte, soit, plus vraisemblablement, dans celles d’Aleria ou de Bastia, qui ne se situent qu’à quelques heures de marche. Toutes les autres espèces ont pu être tuées dans le Cortenais, puisqu’elles renvoient à un paysage mixte vallonné et boisé (Buse, Pigeon ramier et Grive/Merle)et de terrains plus découverts (pâtures, cultures, maquis bas qu’affectionne la Perdrix rouge), parsemé de petites falaises rocheuses (Pigeons bizet ?).
3.14.3.13. Les amphibiens et les poissons
375Il est malheureusement impossible de préciser la détermination des deux os d’Amphibiens Anoures (un tibio‑fibulaire et une clavicule).
376Parmi les Poissons, nous avons mis en évidence deux espèces exclusivement marines (tableau V), qui témoignent de la pêche côtière. Elles sont toutes deux représentées par des individus de grande taille.
3.14.4. L’approvisionnement carné
3.14.4.1. L’élevage
377Le moyen le plus fiable de connaître la proportion des différentes espèces domestiques dans l’alimentation carnée est d’évaluer les poids de viande et abats (PVA) fournis par chaque taxon, selon une méthode exposée par ailleurs (Vigne 1988a).
378Le tableau VIII montre que, comme partout en Corse depuis le Néolithique moyen jusqu’à la fin du Moyen Age, le Bœuf, le Porc et les Caprinés domestiques sont, dans cet ordre d’importance, les trois piliers de l’alimentation camée (les poids d’os du tableau V donnent des résultats sensiblement différents, que nous jugeons moins fiables ; de plus, toutes les comparaisons possibles en Corse reposent sur le PVA). Naturellement, il n’est pas possible de tenir compte ici de la production laitière, qui revaloriserait sans doute considérablement la part des Caprinés ; et celle du Porc est sans doute un peu surévaluée en raison de la présence de quelques sangliers indiscernables.

• Tableau VIII – Evaluation des poids de viande et abats (PVA) et des rendements en viande (PVA/NMI) des animaux consommés du sondage I (PP = poids vif ; RB = rendement boucher ; NMI = nombre minimal d’individus). La méthode utilisée est exposée dans Vigne 1988a.
379Quoi qu’il en soit, les proportions obtenues à Castellu sont très proches de celles observées sur les sites les mieux documentés du Bas Moyen Age de Corse, tant en zone montagneuse (Capula) qu’en région côtière (Bonifacio). La fig. 254 montre cependant que, pour ce caractère, Castellu s’apparente plus aux premières qu’aux secondes. En revanche, la forte proportion de Chèvres au sein des Caprinés rapproche le site cortenais de la plaine plus que de la montagne, mais reste toujours aussi difficile à expliquer (Vigne 1988a).

• Fig. 254 – Proportion relative des Mammifères domestiques consommés de Castellu (B), exprimée en poids de viande et abats (PVA) et comparée à celles obtenues pour les autres sites médiévaux de région montagneuse (A) et de plaine côtière (C) (d’après Vigne 1988a). Au sein des Caprini, les pourcentages de Chèvre (en blanc) et de Mouton (en noir) ont été évalués sur la base du nombre de restes.
380Ici encore, comme à propos de la morphologie des races porcines, ovines et caprines, tout se passe comme si rien n’avait changé entre le Haut et le Bas Moyen Age. Pourtant, la fig. 255, qui situe les rendements bouchers de Castellu par rapport à ceux de l’âge du Fer et de la fin du Moyen Age, témoigne d’une légère mais sensible amélioration pour les Caprins et les Porcins. Les races n’ayant pas changé, c’est par une amélioration de la gestion démographique et de la croissance pondérale qu’il faut l’interpréter.

• Fig. 255 – Rendements bouchers (PVA/NMI) des Caprinés (Caprini) et Suinés (Sus scrofa) de Castellu, resitués dans l’évolution des rendements bouchers observés en Corse depuis l’âge du Fer(d’après Vigne 1988a). Une telle représentation n’aurait aucun sens pour le Bœuf, puisque la faune de Castellu est dépourvue de veaux.
381Ainsi, il apparaît clairement que, même si elle n’a apporté que de modestes modifications raciales, la civilisation médiévale corse a provoqué des progrès zootechniques, et cela en dépit des longues et nombreuses périodes d’instabilité socio‑économique et politique qui ont sans cesse désorganisé la vie rurale. Il reste à trouver laquelle des accalmies (période de tutelle du Saint‑Siège, courts répits pisans ou aragonais... ?) a le mieux contribué à ces mutations pastorales.
382L’élevage du Poulet mériterait sans doute une mention particulière ici, mais l’absence de points de référence archéologique nous interdit pour l’instant toute hypothèse.
3.14.4.2. La chasse et la pêche
383La prédation en général a livré 2 % de la masse de viande consommée sur le site (tableau VIII). Cela n’est pas négligeable dans l’absolu, mais reste relativement faible par rapport à ce que nous avons constaté sur certains autres sites médiévaux corses, notamment à Bonifacio (Vigne 1988a).
384L’essentiel de cet apport vient de terre, les zones humides et la mer représentant moins de 20 % du total. Il faut cependant souligner la diversité des espèces chassées, tant en grands Mammifères qu’en Oiseaux (dix en tout), qui ne se retrouve, jusqu’à présent, dans aucun autre site médiéval corse.
385On peut enfin se demander si les coquillages et les poissons, représentés uniquement par des individus de grande taille (en dépit du tamisage fin) et d’espèces peu variées, ont été pêchés par les habitants de Castellu ou achetés.
3.14.5. Les techniques bouchères et culinaires
3.14.5.1. La découpe des caprinés (fig. 256)
386Aucune différence n’est apparue entre le schéma de découpe du Mouton et celui de la Chèvre.
387Quelques fines traces sagittales sur le toit crânien et des sillons transverses sur la face antérieure des métapodes témoignent de l’écorchage.
388Les marques laissées par la découpe bouchère de gros sont masquées par celles du demi‑gros et du détail. Mais l’absence de découpe en demi‑carcasse par le plan sagittal du rachis est une certitude. En cela, le schéma boucher de Castellu se différencie nettement de tous ceux connus en Corse pour le Bas Moyen Age, et s’apparente plutôt à ceux du Néolithique et de l’âge du Bronze ; cependant, la position des traces sur le squelette axial et les côtes indique clairement que, contrairement à ce qui se faisait aux époques préhistoriques, les habitants de Castellu pratiquaient l’ouverture de la bête par « déséchinage », avec une technique proche de celle décrite par F. Audoin‑Rouzeau pour le Bœuf et le Porc des xie‑xiie s. de La Charité‑sur‑Loire (Audoin‑Rouzeau 1983) : sans doute après l’ablation de la tête et du cou, le tronc, posé sur le ventre, était ouvert de part et d’autre du rachis, comme en témoigne la rupture ou désarticulation de près de la moitié des têtes costales. Ce procédé permet l’éviscération par le dos, et sépare le tronc en deux morceaux longitudinaux, la cage thoracique (accompagnée de la paroi abdominale ?) et une longue échine qui s’étend de la première vertèbre dorsale à l’extrémité de la queue. Les membres peuvent être séparés avant, ou plutôt après le « déséchinage ». Ce type de découpe n’a, à notre connaissance, jamais été signalé pour le mouton.
389Le traitement de la tête, libérée par un coup de tranchet sur l’atlas ou l’axis, débutait par l’ablation des cornes, la lame frappant toujours de l’avant, et souvent à plusieurs reprises. L’ouverture de la boîte crânienne pour en sortir la cervelle était obtenue par un coup de tranchet tantôt sagittal sur le frontal, le pariétal ou parfois l’occipital, tantôt transverse, à hauteur de la suture fronto‑pariétale. La présence de cornes était sans doute l’élément déterminant pour le choix de la méthode. Le prélèvement de la langue, facilité par l’ablation de la mâchoire inférieure, était systématique, comme le montrent les nombreuses marques sur l’hyoïde.
390Le cou, séparé du tronc derrière la dernière cervicale, sans doute avant le « déséchinage », était ensuite débité en tranches de collier. Ces dernières étaient relativement fines puisque 90 % des vertèbres (hormis atlas et axis) portent des traces de coup de tranchet transverse ou de désarticulation.
391Le membre antérieur était séparé en deux à hauteur du coude par rupture des ligaments et désarticulation pour le lot provenant du sondage I. Pour celui du sondage V, la partition se faisait par un coup de tranchet porté soit sur la diaphyse ou l’extrémité distale de l’humérus, soit sur la partie proximale du radio‑cubitus. Seule cette seconde méthode avait, jusque‑là, été repérée dans les sites corses du Bas Moyen Age. La désarticulation au couteau est une pratique semble‑t‑il plus rare, qui témoigne d’un souci de ne pas laisser d’esquilles d’os dans le morceau de viande.
392L’épaule (viande portée par la scapula et l’humérus) était en général cuite telle quelle, puis découpée en « tranches » (parts individuelles), le couteau venant butter contre l’os en laissant de fines incisions (25 % des diaphyses humérales et 75 % des fragments de scapulas). Pour le sondage I, dans un cas sur dix et uniquement pour les animaux adultes, l’épaule était subdivisée en deux ou trois morceaux par désarticulation scapulo‑humérale et/ou par coupure de la scapula à la moitié ou au tiers proximal de sa longueur.
393Le membre postérieur était séparé du tronc par rupture du coxal à hauteur de la cavité acétabulaire par un coup de tranchet, selon une méthode déjà observée dans les autres sites médiévaux corses. La tête du fémur, souvent écaillée lors de cette opération, restait dans le gigot, mais la partie caudale du coxal en était parfois éliminée, sans doute postérieurement à la séparation tronc‑membre. Distalement, le gigot était isolé du pied par rupture des tendons fléchisseurs des doigts (diaphyse du métatarse) et par désarticulation du tarse au niveau de l’astragale et du calcanéum, exceptionnellement par coupure au tranchet de la partie distale de la diaphyse tibiale. Comme l’épaule, le gigot était débité en parts individuelles, ainsi qu’en témoignent les nombreuses traces de décarnisation sur les diaphyses fémorales et tibiales.
394L’échine était dépecée en trois tronçons, suivant le plan anatomique, par des coups de tranchet portés sur la première ou la deuxième lombaire d’une part, et sur le sacrum, en arrière de l’articulation sacro‑iliaque d’autre part. La queue devait être cuisinée telle quelle. Le segment lombaire était en revanche soigneusement préparé : parfois on levait les filets et faux‑filets en s’aidant du tranchet, d’arrière en avant, pour sectionner à la base les apophyses transverses des vertèbres ; ces dernières restaient alors dans les deux longs morceaux de viande ainsi libérés. Mais, de manière plus raffinée et plus fréquente (60 % des cas), on procédait en contournant les apophyses transverses au couteau, de façon à libérer des filets entièrement désossés. On apportait beaucoup moins de soin au segment thoracique, qui était grossièrement débité en tronçons de 2 à 4 vertèbres. On peut d’ailleurs se demander si, à l’encontre de l’interprétation proposée par la fig. 256, la viande qui se trouve de part et d’autre du rachis (noix) n’était pas laissée attenante au plat de côte supérieur. Dans ce cas, il faut imaginer l’extraction d’une portion d’axe vertébral pratiquement dépourvue de viande qui n’aurait pu servir qu’à enrichir un bouillon en graisse et moelle (cette pratique est attestée dans certains textes médiévaux ; cf. Audoin‑Rouzeau 1983).
395Par des coups de tranchet sur la face interne des côtes, à une dizaine de centimètres (minimum 5 cm ; maximum 14 cm) de leur cassure ou articulation proximale, la cage thoracique était séparée en trois bandelettes, la poitrine et deux plats de côtes étroits mais riches en viande.
396La découpe des Caprinés se caractérise donc par l’emploi de la technique du « déséchinage », nouvelle par rapport à celles de la Préhistoire, mais moins moderne que celle employée au Bas Moyen Age. Elle est également marquée par un certain souci d’éliminer les esquilles osseuses des portions de viande (désarticulation du coude et de la cheville, désossage des filets lombaires), sensiblement plus net dans le sondage I que dans le sondage V. Une assez grande variation dans la position des coups de tranchet montre cependant que le travail n’était pas normalisé. Il s’agit plutôt d’une découpe artisanale, qui trahit la main de l’éleveur plus que celle d’un boucher attitré.
397L’essentiel de ces caractéristiques se retrouve dans la découpe du Porc et du Bœuf.
3.14.5.2. La découpe du porc
398Nous n’avons aucun renseignement sur la découpe du cou et de la tête, si ce n’est que la symphyse mandibulaire était parfois fendue dans le plan sagittal (sondage V), peut‑être pour faciliter le prélèvement de la langue, et que la viande des joues était râclée sur l’os.
399En ce qui concerne le tronc, l’essentiel de ce qui a été dit pour les Caprinés vaut aussi pour le Porc : « déséchinage », éviscération dorsale, levée des filets lombaires par désossage soigneux au couteau, libération d’un plat de côtes étroit (5 à 10 cm)... Mais il n’est pas sûr que la poitrine, beaucoup plus ample que pour les Caprinés, soit restée d’une pièce (fente longitudinale ?), et nous n’avons pas d’éléments pour décrire le débitage du segment thoracique du rachis.
400La découpe des membres diffère de celle observée pour les Caprinés (fig. 257).

• Fig. 257 – Reconstitution de la découpe bouchère employée à Castellu pour les membres antérieurs (A) et postérieurs (B) des Suinés.
401L’antérieur était découpé en trois ou quatre parties. La palette était séparée du bras par des coups de tranchet sur le col de l’omoplate, à des niveaux variables. Le bras était séparé du jambonneau avant par des coups de tranchet sur l’extrémité distale de l’humérus (sondage V), mais la plupart du temps on préférait désarticuler le coude (sondage I). Dans certains cas (sanglier ?) cependant, bras et avant‑bras étaient cuisinés d’une pièce, comme le montre la position des traces de feu sur un ensemble humérus‑radius‑ulna remonté du sondage I. Il est enfin probable que la main était libérée par désarticulation du poignet.
402Le membre postérieur était séparé du tronc par un coup de tranchet parasagittal sur l’aile du sacrum, puis par un second, sagittal cette fois, sur la symphyse pubienne (curieusement, ce dernier était donné sur la face ventrale de l’os). Le jambon ainsi libéré comportait la totalité du coxal, mais nous n’avons aucune indication sur la manière dont il était ensuite raccourci (à la « lyonnaise » ou à la « parisienne » ?), ni même s’il l’était. Il est également impossible de préciser comment on séparait le jambon de la crosse, mais plusieurs traces indiquent une désarticulation entre la première et la seconde rangée du tarse ou entre cette dernière et les métatarsiens.
3.14.5.3. La découpe du bœuf (fig. 258)
403En ce qui concerne la découpe de gros, il est à peu près certain que les membres étaient disjoints du tronc par levée de l’omoplate et par désarticulation sacro‑iliaque, et que c’est à hauteur de l’axis que la tête était séparée du cou. Mais le prélèvement de ce dernier derrière la septième cervicale n’est qu’hypothétique, et l’éventualité d’une rupture du rachis en avant de la première lombaire n’est suggérée que par l’observation d’un traitement différent des segments dorsal et lombaire. Par ailleurs, nos connaissances sur le traitement du tronc et l’éviscération résultent de déductions plus que d’observations. Les vertèbres thoraciques et les tiers proximaux des côtes étant indemnes, il faut éliminer les éventualités d’une découpe sagittale et d’un « déséchinage ». La découpe transverse des côtes, toujours pratiquée à partir de la face interne, interdit d’invoquer, l’ouverture latérale. La fente ventrale sagittale ou parasagittale est donc la seule envisageable, mais reste invérifiable en l’absence d’éléments sternaux significatifs.
404La découpe de demi‑gros est plus facile à décrire, morceau par morceau. En ce qui concerne la tête, les cornes étaient éliminées par un coup de tranchet à la base. Un autre, porté sur le frontal, juste au‑dessus des orbites, permettait l’ouverture de la boite crânienne et l’accès à la cervelle. La mâchoire inférieure était séparée par un coup de tranchet sur la branche montante ou, plus souvent, par désarticulation. La langue était prélevée au couteau, par la rupture de l’insertion du digastrique sur la symphyse mandibulaire, et par action sur l’arc hyoïde. Le traitement de la région nasale est plus énigmatique : l’un des frontaux est tranché tout près de sa limite antérieure et deux nasaux portent des traces d’une coupure médiane faite à partir de la face interne. Les modalités et finalités de cet acte nous échappent.
405Le cou était découpé en larges tranches transversales.
406Une fois ouverte, la cage thoracique était débitée en deux demi‑poitrines (dans l’hypothèse de l’ouverture ventrale), en deux longues bandelettes de plat de côte d’une largeur d’environ 10 cm (minimum 7 cm ; maximum 16 cm), et en une échine dans laquelle étaient incluses, outre les vertèbres thoraciques indivises, des portions proximales de côtes mesurant entre 7 et 12 cm, exceptionnellement jusqu’à 20 cm. Ce dernier morceau était débité en « côtelettes » d’une épaisseur variable (la valeur d’un corps vertébral en moyenne). Les coups de tranchet étaient portés sur la face ventrale du rachis et venaient mourir en butée sur les post‑zygapophyses, provoquant la rupture de l’épine dorsale très près de son enracinement. Cela élimine catégoriquement la possibilité que l’axe vertébral ait pu être isolé de la noix pour être utilisé en « os à bouillir ». Il fallait en effet que la viande soit encore sur les vertèbres pour assurer une stabilité suffisante au morceau lorsqu’on portait le coup de tranchet sur la face ventrale de ces dernières. Pour le tronçon lombaire, les filets étaient prélevés par rupture parasagittale des apophyses transverses des vertèbres, le tranchet agissant à partir de la face ventrale.
407Le membre antérieur était tronçonné en une petite dizaine de morceaux (fig. 258), fort semblables à ceux mis en évidence dans la découpe médiévale de La Charité‑sur‑Loire (Audoin‑Rouzeau 1983). Les coupures étaient achevées au tranchet, sauf au niveau du coude et de l’articulation proximale du poignet, où l’on procédait par désarticulation, une fois de plus.
408Pour le membre postérieur, le coxal était coupé en trois morceaux, ce qui laisse à penser, en dépit de l’absence de traces sur les cavités acétabulaires et sur les têtes fémorales, que ces dernières étaient séparées du bassin par désarticulation. Plusieurs diaphyses de fémurs sont sectionnées, mais il est difficile de décider si cet acte avait pour but la découpe bouchère ou l’artisanat de l’os. Il n’y a pas de marque sur les éléments du genou, mais il est probable qu’ici encore on procédait par désarticulation. Un vigoureux coup de tranchet sur le tibia provoquait la séparation de la jambe et du tarse. L’extrémité proximale était aussi parfois tranchée de la même façon, et isolée du tarse. Mais un articulé entre une extrémité distale de tibia et les trois principaux os de la cheville prouve que ce n’était pas la règle. D’ailleurs, aucune trace de disjonction des différents éléments n’a été observée au sein du tarse. Les métatarsiens étaient coupés par un coup transverse médian. Plusieurs marques de désarticulation de la première et de la seconde phalanges laissent à penser que les pieds étaient désossés pour leur consommation (ici encore, on note de nombreuses ressemblances avec les découpes mises en évidence dans le site médiéval de La Charité‑sur‑Loire).
3.14.5.4. La découpe du cerf
409Les éléments sont trop peu nombreux pour décrire l’ensemble du dépeçage boucher du Cerf. Quatre côtes contiguës issues du même individu permettent cependant d’éliminer le « déséchinage », et d’imaginer une ouverture ventrale de laçage thoracique, comme pour le Bœuf. Elles ont en effet été décapitées par des coups de tranchet portés depuis l’intérieur. Elles ont, par ailleurs, été coupées à environ 7 cm de leur insertion vertébrale pour libérer au moins un plat de côte.
3.14.5.5. La découpe du poulet
410Contrairement aux cas précédents, il s’agit uniquement d’une découpe culinaire, presque anecdotique car éminemment variable, uniquement pratiquée au couteau, ce qui n’était pas le cas pour les poulets du site médiéval tardif de Bonifacio, où les pattes étaient sectionnées par un coup de tranchet à hauteur de l’articulation intratarsale. Les quelques traces observables résultent de la désarticulation sporadique de l’épaule, du coude et du genou. La forme des brûlures distales sur une poulie fémorale indique que cette dernière n’était pas systématique. En revanche, la désarticulation intratarsale semble avoir été plus fréquente.
3.14.5.6. La cuisson des morceaux
411A cette question, les ossements apportent des réponses souvent moins précises que les ustensiles de cuisine. Ils livrent cependant au moins deux indicateurs utiles, les traces de brûlure et de décarnisation.
412Les premières sont rares à Castellu, puisqu’elles n’affectent que 4 % des ossements déterminés du sondage I et 1,5 % de ceux du sondage V. Ces chiffres ne sont cependant guère significatifs car ils prennent en compte des traces d’ustion fortuites, intervenues postérieurement à la consommation. Seules les brûlures localisées aux portions dépourvues de chair (brûlures distales, par exemple) (Vigne, Marinval‑Vigne 1983) sont réellement utilisables. Elles n’intéressent qu’une infime partie des ossements (0,5 %), ce qui témoigne clairement que la cuisson au contact direct de la source de chaleur était une pratique exceptionnelle.
413Les traces de décarnisation, qui n’apparaissent sur l’os que lorsque la viande a été grillée ou rôtie, affectent moins de 2 % des restes déterminés. Cela montre que la viande était le plus souvent bouillie.
414Toutefois de minimes différences apparaissent entre les espèces, qui indiquent peut‑être que la viande des Caprinés (surtout les épaules et gigots), était un peu plus souvent grillée que celle des Porcs (2,4 % contre 0,8 % d’os portant des traces de décharnement). A cet égard, le Bœuf et le Poulet occupent des positions intermédiaires, avec respectivement 1,3 et 1,4 %.
415Il faut enfin rappeler qu’au cours du repas intervenait une ultime fragmentation alimentaire des os longs pour faciliter l’accès à la moelle. Mais il n’est pas impossible que l’os ait été « battu » à l’intérieur de la viande avant la cuisson, selon une pratique consignée au xviiie s. (La cuisinière bourgeoise, 1767, cité par Audoin‑Rouzeau 1983).
3.14.6. L’artisanat de l’os
416Les sondages de Castellu ont livré deux catégories bien distinctes de pièces osseuses façonnées.
417La première est constituée d’un petit nombre d’objets finis, souvent richement décorés, décrits plus haut (cf. § 3.8). Il nous a été donné d’en observer une vingtaine, exclusivement issus du sondage I : les huit pièces dont les origines anatomiques et zoologiques sont déterminables renvoient à des côtes ou omoplates d’un Bovidé peut‑être un peu plus grand que le Bœuf décrit ci‑dessus. L’absence de tels objets en cours de façonnage indique que leur fabrication n’était pas le fait des habitants de Castellu qui ont alimenté les dépotoirs trouvés dans les sondages I, IV et V.
418La seconde catégorie d’os travaillés, qu’il nous revient de décrire ici, est plus richement documentée (170 restes au moins) et ne comporte que des ébauches, voire des chutes, d’objets qui sont manifestement sans rapport avec ceux du premier lot. De plus, ils sont tous extraits de squelettes morphologiquement identiques à ceux décrits ci‑dessus. Tout cela indique que ces restes sont ceux d’un artisanat pratiqué par les groupes humains qui ont rejeté leurs déchets dans les structures mises au jour, et peut‑être même uniquement par celui qui a alimenté surtout le dépotoir du sondage V (cf. supra).
419Il est malheureusement impossible de proposer une interprétation quant à la destination des objets de cette catégorie. Aussi nous contenterons‑nous de chercher à comprendre, par leur description, les gestes de l’artisan, plus que leur finalité.
3.14.6.1. L’extraction de la matière osseuse
420Le tableau IX montre que l’artisan choisissait préférentiellement les os de Caprinés, qui sont aussi les plus abondants dans la faune. La répartition anatomique des traces d’extraction témoigne de la recherche d’au moins deux types de formes : les plaquettes et les cylindres creux.

• Tableau IX – Répartition anatomique et zoologique des pièces osseuses travaillées à Castellu (les trois fragments de bois de Cerf ne sont pas pris en compte ici).
421Quatre scapulas et un coxal portent les marques d’une extraction à la scie d’une partie plane, fine, à faces parallèles. Par cette opération, chaque omoplate de Capriné livrait deux plaquettes de taille inégale, l’outil séparant l’apophyse épineuse le plus près possible de son enracinement sur le corps de l’os. Un exemplaire témoigne qu’avant cette opération, l’artisan procédait au découpage transverse de l’épine scapulaire en sous‑unités de 2 ou 3 cm de long. Par leur forme plus régulière, ces pièces devaient être plus prisées que celles issues du plat de la scapula. Pour le Bœuf, c’est la plaquette sous‑épineuse qui fut prélevée à l’aide d’un outil semblable, en longeant l’apophyse épineuse ; on note par ailleurs la tentative échouée d’extraction de l’épine sciatique d’un coxal.
422L’extraction de cylindres creux se faisait en tronçonnant les os longs (et le merrain de Cerf) en segments de 5 à 10 cm. Cette fois, ce n’est pas un trait de scie qui a entraîné la coupure (sauf dans un cas), mais de petits coups de tranchet répétés tout autour de la diaphyse. Pour ce travail, on choisissait les parties dont la forme naturelle s’approche le plus du cylindre : diaphyse de métatarsien, à laquelle on pouvait conserver l’épiphyse proximale (fig. 259b), et diaphyse tibiale comprise entre le premier tiers ou la moitié de l’os et la zone où s’amorce l’épaississement de l’épiphyse distale (fig. 259a). La présence de la cavité médullaire devait avoir un certain intérêt pour la fabrication des objets, puisque les fragments de merrain de Cerf ont été évidés de leur spongiosa après tronçonnement.

• Fig. 259 – Quelques objets en os de Caprinés, façonnés à Castellu. – a. Mode d’extraction de cylindres creux dans la diaphyse tibiale et obtention d’objets retaillés et polis. – b et c. Métatarsiens ruginés (R) et épannelés (b) ou perforés (c). – d. Humérus perforé sur la face médiale. – e. Diaphyse fémorale perforée de part en part.
423Signalons par ailleurs que trois gros éclats de diaphyses tibiales de Bœuf et Capriné ont servi de billot pour un travail au tranchet (sur des matières molles ?).
3.14.6.2. La préparation des surfaces osseuses
424La diaphyse de nombreux tibias, métapodes (surtout le postérieur), fémurs, humérus, radius (dans cet ordre de fréquence) ainsi que quelques rares fragments d’autres parties du squelette ont été débarrassés du périoste et des minimes aspérités par rugination.il s’agit en majorité d’os de Caprinés. L’observation des nombreuses traces de broutage de la lame (fig. 259b et c) et les expérimentations que nous avons faites indiquent qu’on procédait sans outil spécialisé, de la manière la plus simple : l’artisan tenait une épiphyse d’une main et râclait la diaphyse, de la prise vers l’extrémité libre, à l’aide d’un simple couteau tenu dans l’autre main. De nombreux os ont été rejetés sans autre préparation, et parfois même bien avant que celle‑ci ne soit achevée. A tel point qu’on se demande si certains d’entre eux (notamment des portions distales de diaphyses d’humérus, des ischiums de porc, des fragments de scapulas...) n’ont pas été râclés par jeu ou par habitude, sans intention artisanale.
425Trois os ont été grossièrement épannelés sur toute ou partie de leur surface. Pour l’un d’entre eux (fibula de porc, os pour lequel on pourra par ailleurs s’étonner du peu d’intérêt que lui ont témoigné les artisans de Castellu), le râclage est allé jusqu’à la cavité médullaire. Cette pièce laisse à penser qu’une telle opération relevait également de la rugination, exécutée avec plus d’insistance, l’extrémité libre de l’os reposant, cette fois, sur un support. C’est sans doute par la même méthode qu’on a réduit à un « cylindre » l’épiphyse proximale de l’un des métatarsiens de Mouton travaillés (fig. 259b).
426Trois fragments de merrain de Cerf et une vingtaine de diaphyses humérales et tibiales portent les traces d’un polissage en général assez poussé. Pour les secondes, cette opération est intervenue soit avant l’extraction d’un cylindre osseux (cf. supra), soit après. Les humérus, en revanche, n’ont subi aucune autre intervention artisanale. La technique utilisée pour le polissage n’apparaît pas clairement, mais le résultat est tel qu’il masque totalement les traces de rugination, sauf pour deux diaphyses humérales. Notons d’ailleurs que deux des trois fragments de merrain ont appartenu à la même portion de bois, comme le montre leur remontage imparfait (déformation taphonomique). Il s’agit donc peut‑être d’un objet fini, utilisé, cassé, puis jeté aux ordures. Mais alors, à quoi a‑t‑il servi ?
3.14.6.3. La retaille des cylindres creux
427Deux ou trois cylindres osseux (diaphyses de tibia de Capriné) ont subi une étape supplémentaire : l’une des extrémités était affinée en tronc‑de‑cône par un épanne‑lage grossier (au tranchet ?) tout autour de la coupure (fig. 259a), un peu comme on taille un crayon neuf. Un second polissage venait alors émousser les arêtes apparues au cours de cette opération.
3.14.6.4. Les perforations
428Le cortex osseux diaphysaire de trois pièces a été perforé à l’aide d’une perceuse rotative ou semi‑rotative. Deux d’entre elles (humérus, fémur, fig. 259d, e) n’ont subi aucune autre préparation. La troisième est un cylindre de diaphyse tibiale préalablement poli avec soin.
429Un autre type de perforation se trouve au centre de la surface articulaire proximale de trois métatarsiens débarrassés de leur épiphyse distale. L’un d’entre eux avait été ruginé auparavant. Le trou a été obtenu par élargissement, à l’aide de la pointe d’une lame, d’une perforation ménagée au préalable, sans doute au niveau de la fossette synoviale (fig. 259 c).
430Aucune de ces perforations ne montre de trace suggérant qu’un lien ait jamais été passé dans le trou.
3.14.7. Conclusion
431Grâce à l’abondance des restes et à la position chronologique du site, dont l’intérêt a été souligné en introduction, la faune de Castellu a livré des informations de tout premier ordre.
432Dans le domaine de la zoologie, elle permet d’avancer une date antérieure ou égale au vie s. pour l’introduction anthropique du Cerf et du Rat dans l’île, et confirme l’absence, à cette époque, de taxons dont on connaît encore mal l’histoire en Corse, tels le Lièvre, le Lapin...
433En ce qui concerne l’élevage, les races domestiques de Castellu témoignent, par comparaison avec celles de la fin de l’âge du Fer, des sensibles améliorations de format intervenues pour les Bovins et les Ovins durant la période d’occupation romaine de l’île. Confrontées à celles de la fin du Moyen Age et à celles, traditionnelles, de la période actuelle, elles permettent d’avancer que les porcs et les moutons de Corse n’ont guère changé d’aspect depuis le vie s. ap. J.‑C. Mais cela n’implique pas l’absence de progrès zootechniques durant le Moyen Age, puisque les chèvres (et peut‑être les vaches) ont subi une évolution morphologique durant cette période. De plus, Castellu démontre qu’il s’y est également produit une amélioration de la maîtrise démographique des troupeaux, et, partant, de leur rentabilité économique.
434Le site cortenais a livré, par ailleurs, les premières données médiévales –certes modestes– sur l’élevage des Equidés et sur l’aviculture corses.
435Les ossements extraits de ces deux dépotoirs, sans doute alimentés par de petits groupes humains contemporains aux habitudes et aux activités légèrement différentes, apportent également des témoignages sur les autres pratiques quotidiennes. L’exportation de viande de veau (vers les régions côtières ?) est attestée, et l’importation de produits de la mer a été évoquée. La chasse, d’un apport alimentaire faible mais non négligeable, était diversifiée. Les techniques bouchères et culinaires, si révélatrices de la personnalité de chaque groupe humain, témoignent d’un certain raffinement. La découpe était pratiquée par chaque groupe familial, selon des traditions différentes de celles observées sur l’île au Néolithique et au Bas Moyen Age, mais proches, dans leur esprit, de celles qu’on connaît ailleurs sur le continent avant le xie‑xiie s. Dans la cuisine, la viande était le plus souvent bouillie et l’on recherchait la moelle des os longs. Les nombreuses pièces osseuses en cours de façonnage traduisent les gestes des artisans, sans toutefois en livrer les finalités.
436Là n’est d’ailleurs pas la seule question qui reste en suspens à la suite de cette étude. Bien des hypothèses ont été avancées qui attendent l’extension des fouilles sur le site, et la découverte d’autres ensembles fauniques de l’Antiquité et du Haut Moyen Age, en Corse comme sur le continent, où les points de comparaison sont encore trop rares en domaine méditerranéen.
3.14.8. Annexe ostéométrique
437Toutes les dimensions sont données en millimètres, Les chiffres portés entre parenthèses correspondent, sauf indication contraire, à des mesures imprécises. Les mensurations sont celles décrites par A. von den Driesch (1976). Nous en avons ajouté quelques‑unes, décrites par ailleurs (Vigne 1988a).
Abréviations
438a : articulation
C : Capra
d : distal
d % : déviation standard (= [s/x] x 100)
DAP : diamètre antéro‑postérieur
DT : diamètre transverse
H : hauteur
L : longueur
M : maximum (maximal)
Mc : métacarpe
Mt : métatarse
m : minimum (minimal)
N : nombre de pièces mesurées
O/C : Ovis ou Capra
Om : Ovis artimon musimon
Osp : Ovis sp.
s : écart type
SI : sondage I
SIV : sondage IV
SV : sondage V
x : moyenne
439Toutes les autres abréviations sont tirées de l’ouvrage de A. von den Driesch (1976).
3.14.8.1. Erinaceus europaeus
Maxillaire |
|
L rangée polycuspide |
16,3 |
DAP 2e polycuspide |
5,5 |
DT 2e polycuspide |
5,8 |
3.14.8.2. Rattus rattus
440Entre parenthèses figurent les mesures des os longs sans les épiphyses.
3.14.8.3. Sus scrofa
3.14.8.4. Cervus elaphus
3.14.8.5. Bos taurus
3.14.8.6. Caprini
3.14.8.7. Equus
3.14.8.8. Buteo sp.
Mandibule |
|
GL |
51,6 |
LS |
9,6 |
3.14.8.9. Alectoris sp.
3.14.8.10. Columba
3.14.8.11. Gallus domesticus
3.15. Analyse des paléosemences : graines et fruits (fig. 260‑261, tableaux X‑XI)
3.15.1. Introduction
441Les vestiges paléocarpologiques découverts dans un niveau daté du vie s. de n. è. du site de Castellu (Corte) proviennent d’un prélèvement noté « sond. I US 116 » effectué en vue d’une recherche de la microfaune. Lors du tamisage d’environ 60 litres de sédiment sur des mailles de 2 et 0,5 mm, 47 restes de paléosemences furent recueillis. Rares sont les informations de nature paléocarpologique actuellement disponibles pour cette période en France. Aussi, ces quelques macrofossiles méritent‑ils une attention particulière en dépit de la méthode de récupération quelque peu sommaire qui permit leur découverte.
3.15.2. Résultats et commentaires
442Parmi les vestiges collectés, 44 sont carbonisés et 3 minéralisés (tableau X). Ce deuxième type de fossilisation a lieu lorsque les éléments végétaux sont en présence, au moment de leur enfouissement, d’eau chargée en sels minéraux tels que les ions calcium qui, en réagissant avec des ions phosphate, forment un complexe de précipitation dans les tissus végétaux. Les origines de ces substances minérales sont diverses : excréments, ossements de Poisson et/ou de Mammifères... mais la présence de calcium dépend surtout de la nature du sol d’ensevelissement (calcarifère) (Green 1979 : 279‑284). On peut estimer, à partir de ces remarques, que les paléosemences correspondraient davantage à des détritus.
443Douze taxons ont été reconnus. La catégorie des fruitiers est représentée par sept espèces ligneuses : elle est constituée par plus de 72 % des restes se rapportant principalement à des parties peu digestibles des fruits –noyaux, coques et pépins– si l’on excepte la moitié de poire sauvage (Pirus amygdaliformis) (fig. 261).
3.15.2.1. Les céréales
444Sont présentes deux espèces très communes dans les champs durant le Haut Moyen Age en France continentale : Triticum aestivo‑compactum (le Froment) et Hordeum vulgare (l’Orge vêtue). Aucun des caryopses découverts ne porte traces de ses glumelles. Ces enveloppes, adhérentes au grain après sa maturation chez l’Orge vêtue, persistent très souvent même après une carbonisation. Ce ne peut être le cas pour Triticum aestivo‑compactum qui est un Blé nu : les glumelles libèrent le grain mûr. Toutefois, l’absence de ces éléments suggère que les grains ont été décortiqués. L’insuffisance du nombre de caryopses limite la validité de cette hypothèse.
445Les mensurations des grains de Triticum aestivo‑compactum sont très analogues à celles des exemplaires de Cucuruzzu (Lévie, Corse, cf. De Lanfranchi, Marinval 1984 : 67‑72) découverts dans des niveaux de l’âge du Bronze : 4,5 x 2,9 x 2,6 mm (tableau XI et fig. 260, A). Les indices longueur/largeur sont identiques : 1,56 pour Corte et 1,55 pour Cucuruzzu. Les valeurs témoignent du développement normal et complet des caryopses et de l’appartenance à un même type de population. Nous nous garderons de formuler une interprétation quant à l’identité des dimensions des grains de Blé de l’âge du Bronze et du Haut Moyen Age en présence de si peu d’individus.
446Le grain d’Hordeum vulgare (fig. 260, B) de Corte a une longueur nettement supérieure à ceux de Cucuruzzu : 4,9 x 3,5 x 2,5 mm (tableau XI). Les rapports longueur/ largeur diffèrent singulièrement : 2,3 pour Corte et 1,4 pour Cucuruzzu. Ces différences ne peuvent être interprétées dans la mesure où un seul grain fut découvert à Corte.

• Fig. 260 – A. Triticum aestivo‑compactum (Froment) : caryopse carbonisé. – B. Hordeum vulgare (Orge vêtue) : caryopse carbonisé. – C. Vitis vinifera (Vigne cultivée) : graine carbonisée. – D. Polygonum convolvulus (Renouée liseron) : akène carbonisé. – E. Prunus spinosa (Prunellier) : 1/2 endocarpe carbonisé.

• Tableau XI – Dimensions de quelques paléosemences (en mm). L = longueur, I = largeur, e = épaisseur, Nm = nombre de restes mesurés.
3.15.2.2. Les fruitiers
447Si la position de plante cultivée est évidente pour Vitis vinifera (fig. 260, C) et Prunus persica, elle demeure plus ambiguë en ce qui concerne Prunus spinosa (fig. 260, E), Corylus avellana, Olea europaea, Pirus amygdaliformis et Juglans regia. En effet, ces arbres croissent spontanément en région méditerranéenne, le Noisetier se rencontrant plutôt dans les zones montagneuses de cette aire. Leurs fruits peuvent donc avoir été cueillis sans que les plantes‑mères aient fait l’objet d’une culture attentive. Aussi ne pouvons‑nous les considérer ni comme strictement sauvages ni comme des végétaux cultivés.
448La découverte d’une moitié longitudinale de fruit de Poirier à feuilles d’Amandier (Pirus amygdaliformis) est intéressante (fig. 261). Cette espèce typiquement méditerranéenne forme des fructifications parfaitement comestibles.
449Elle évoque les trouvailles de demi‑pommes carbonisées au Néolithique et à l’âge du Bronze dans le Midi de la France et en Suisse. Cependant, à Corte, la poire ne semble pas avoir été coupée volontairement. Elle ne montre aucune trace de section nette. Néanmoins, l’idée d’un séchage du fruit frais au‑dessus d’un feu qui a pu provoquer un grillage excessif et rendre la denrée impropre à la consommation, ne peut être exclue.
3.15.2.3. Les plantes sauvages
450Deux taxons d’herbacées sauvages ont été identifiés (tableau X). Chacun n’est représenté que par un seul individu carbonisé.
Polygonum convolvulus (renouée liseron)
451Cette espèce (fig. 260, D) est une des mauvaises herbes les plus communes sur les sols acides cultivés en céréales. Elle peut croître également dans les zones de déchets anthropiques. Les akènes renferment une proportion intéressante de farine comestible. Ils ont donc pu être l’objet d’une cueillette et être consommés sous forme moulue ou grillée (Couplan 1984).
Gallum sp. (Gaillet)
452L’état de conservation peu satisfaisant de la semence de Gaillet n’a pas permis une identification du fruit jusqu’à l’espèce. Le genre Galium comprend quelques adventices culturales des Céréales, d’autres espèces se développent en sous‑bois. Les akènes peuvent être torréfiés et consommés (Couplan 1984).
3.15.3. Signification écologique des espèces identifiées
453Une tentative de restitution du paysage demeure délicate avec si peu de restes ; de surcroît, la plupart des taxons reconnus ne sont pas de bons indicateurs de conditions écologiques précises.
454L’ensemble des données paléocarpologiques révèle l’image d’un milieu plutôt ouvert de zones cultivées (vignobles, céréales, oliveraies ?...). Pirus amygdaliformis et Juglans regia affectent les endroits ensoleillés. Tandis que le premier croît dans des stations sèches, le second préfère les sols suffisamment alimentés en eau et bien drainés. Le Noisetier et le Prunellier se développent dans des bois assez clairs, en lisière, ou peuvent être entretenus et exploités dans des boqueteaux.
455Les conditions édaphiques et climatiques de la région de Corte s’avèrent compatibles avec l’implantation et le développement local de tels végétaux.
3.15.4. Conclusion
456L’attribution des vestiges paléocarpologiques carbonisés à un rejet de détritus semble être confirmée par plusieurs indices : le processus de minéralisation de certains pépins de raisin qui fut sans doute favorisé par la proximité d’ossements, l’abondance des parties ligneuses non assimilables par l’organisme humain et une moitié de poire calcinée.
457Par ailleurs certaines déformations ont été remarquées sur des caryopses de Triticum aestivo‑compactum, telles qu’une dépression sur une des faces latérales et quelques asymétries. Ces observations révèlent que l’intensité et la violence du feu sont à l’origine de ces altérations tandis que les grains adhéraient les uns aux autres. En conséquence, les paléosemences proviendraient de vidanges de foyers (?) domestiques (?) accumulées dans un espace à fonction de dépotoir.
458Les pépins de raisin minéralisés laissent envisager un second type d’élimination des déchets (moût issu des opérations vinicoles par exemple...).
459Les espèces végétales mentionnées dans les niveaux du Haut Moyen Age sont déjà bien attestées à l’époque gallo‑romaine en France continentale. Témoins d’une exploitation accusée de l’environnement floristique, elles constituent des données d’autant plus précieuses sur l’alimentation végétale humaine et les activités agricoles, semble‑t‑il diversifiées dans la région de Corte, que les références paléocarpologiques concernant le VIe s. de n. è. demeurent très indigentes.
Notes de fin
1 Je remercie vivement M. S. Tortorella pour ses suggestions précieuses.
2 Ostia IV : 7 ; Humphrey 1976 : 55. En général, sur le problème de la chronologie initiale, cf. Hayes 1977 : 281.
3 Parmi celles‑ci nous considérons aussi les formes fig. 29 et 32 qui devaient avoir des dimensions plus importantes que les coupes à proprement parler. Par conséquent, la décision de lesplacer parmi les coupes à listel a été dictée surtout en considération d’un critère strictement morphologique et non pas en fonction de son utilisation.
4 La fig. 20, in Humphrey 1978 : 68, illustre bien la distribution chronologique et l’évolution de la morphologie de ces types.
5 Humphrey 1976 : 88‑89 ; la classe 1 est divisée en trois sous‑classes qui correspondent à trois phases différentes de développement du listel, lequel a tendance dans le temps à avoir une longueur moindre et à devenir plus épais. La classe 2, caractérisée par le listel placé immédiatement au‑dessous du bord du vase, a une définition plus incertaine et elle correspond à une phase chronologique postérieure à celle de la classe 1 : en effet, alors que la première est plutôt répandue à partir du début du ve s. et jusqu’au vie s., la seconde est plutôt caractéristique du viie s. ; les exemplaires de Castellu semblent appartenir plutôt à la première classe.
6 Humphrey 1976 : 89 ; cette hypothèse semble confirmée par la faible épaisseur des parois de ce type de mortier. De plus, le nombre des éclats de pierres sur le fond et leurs dimensions semblent se réduire au cours des vie et viie s. (Fulford, Peacock 1984 : 199).
7 D. P. S. Peacock s’est occupé de façon spécifique des fragments de pierres découverts sur le fond des mortiers de Carthage et a démontré qu’ils proviennent de pierres volcaniques de Sardaigne (Fulford, Peacock 1984 : 27).
8 Des flanged bowls ont été également découverts à Bérénice où ils semblent cependant rares et n’appartiennent peut‑être pas à des productions locales : Riley 1979 : 361. Par analogie avec notre fig. 27 : Riley 1979 : 362, D 1024, fig. 131.
9 Frova 1977 : pl. 3373 ; elle est indiquée dans le texte comme ceramica grezza (céramique grossière) : id. 1977 : 646.
10 Arcelin‑Pradelle, Laubenheimer 1985 : le problème se pose, dans ce cas‑là, même pour un travail au tour rapide.
11 Les fragments fig. 69 et semblables ont une lèvre de la même allure, mais qui tend plutôt au triangle.
12 Le phénomène est très clair dans les couches du grand remblai des Terme del Nuotatore à Ostie (Ostia V, à paraître).
13 Comme, par ex., à Sétif (Février 1965 : fig. 26, F1,C1,14‑15 ; C 3 b, 35‑36 ; fig. 27 F 1 et 2, C 4, 55 ; fig. 28, GH C 2,113‑115 ; fig. 29, GH 1 et 2, 86‑88 ; fig. 30, H 2, C 3, 33, etc. ; Février 1971 : 119, fig. 25, 16‑17 ; 120, fig. 126, 18‑19 ; 121, fig. 27, 29‑30, modelées), à Bérénice (Riley 1979 : 270, fig. 106, 540‑546), à Albintimilium (Lamboglia 1950 : 152‑153, fig. 87, 133‑134 ; 176‑177, fig. 102, 27).
14 Sardaigne : Moravetti 1976 : 84, no 484, pl. XXIX, associée à une lampe du type Deneauve VIII B. Porto Torres : Maetzke 1965 : 339, fig. 15. La datation du contexte dans l’Antiquité tardive devrait être reprise et mieux précisée sur la base des connaissances actuelles. Villedieu 1984 : 314, fig. 199 (type 36, p. 164) : 2e moitié ve‑vie s. Dans les couches de la même époque que j’ai fouillées en 1976, ces formes étaient également bien représentées. Sur le problème des survivances de traditions indigènes, Villedieu 1984 : 155‑156.
15 Albintimilium : Lamboglia 1950 : page 152, nos 133‑134, fig. 87, à page 503 ; ve s. Carthage : Fulford, Peacock 1984 : p. 162, no 20, 1‑2, fig. 58 ; p. 163‑165, fabrique 1.6, datation : 500‑575 ; floruit ante 535‑550 ; Ibidem : p. 164, no 32, 1‑2, fig. 59 ; p. 166, fabrique 1.9, datation : 1er moitié du vie s. Hayes 1976 : p. 58, no 62, fig. 4, à p. 57, 1re moitié du vie s. Cf. aussi page 98, C 27 et page 99, fig. 15. Luni : Frova 1973 : col. 425, CM 2673, pl. 75,25 ; id. 1977 : 649, CS 1438, 1, pl. 337, 1.
16 Frova 1973 : col. 423, CM 615, 1, pl. 75, 13 ; id. 1977 : 209, CM 11279/8, pl. 135, 1 (2emoitié ive‑ve s.) ; p. 603, fig. 5 ; p. 625 (groupe daté de la moitié du iiie au ve s.) ; p. 528, K 315/11, pl. 273, 4 (groupe 40) ; p. 649, CS 1438/1, pl. 337, 3 (fouille médiévale),
17 Classe : Gelichi 1983 : 124‑125, 6.41‑6.45 (vies.) ; Brogiolo, Gelichi 1986 : p. 295, pl. III à p. 298, no 4 (Antiquité tardive – Haut Moyen Age). Luni : Frova 1977 : p. 648, CS 1005/12, pl. 334, 3. Carthage : Fulford, Peacock 1984 : 165, no 27, 8‑11, fig. 59 à p. 164 (handmade) ; p. 197, no 4.4, fig. 75 à p. 196.
18 Il est assez rare de trouver de la céramique modelée dans les tombes, et il faut donc se limiter à des fouilles d’habitat. La rareté des comparaisons possibles est soulignée aussi, pour Carthage, par Fulford (Fulford, Peacock 1984 : 229).
19 A cause du manque de fonds, ce qui est particulièrement grave pour cette classe de matériel, pour laquelle « careful fabric analysis is not a luxury but an essential part of the discussion » (Peacock 1982 : 89).
20 Dans les Marches : Maetzke 1978 ; un exemplaire avec listel, fait au tour, sans anse (p. 101‑102, fig. 4, no 2) ; avec anse sur le sommet et trous en bas (p. 104, fig. 5 à p. 103, no 7 ; p. 112‑113, fig. 10 à p. 111). A Classe : Brogiolo, Gelichi 1986 : exemplaires au tour avec prise à languette et trou (p. 295, pl. III à p. 298, nos 3 et 5). Antiquité tardive – Haut Moyen Age ; avec cordon plastique le long de la paroi et anse sur le sommet (p. 300, pl. VII à p. 306) A Rome : Ricci 1986 : p. 539, pl. XII à p. 532, nos8‑9,11 : xe ‑xiie s.
21 Brogiolo, Gelichi 1986 : p. 300, pl. V à p. 302, nos 3‑4 (au moins xe s.) ; p. 312, pl. XI à p. 313, no 4 (xive‑xve s.).
22 Fulford, Peacock 1984 : 164, fig. 59, nos 28, 1 et 2 : « lid or possibly bowl... with roughly smoothed surfaces and thin horizontal protrusion or lug about midway between rim and base ». Le dessin étant de dimensions très réduites, cette comparaison conserve un caractère provisoire.
23 S. Keay, par exemple, a tenté de créer une typologie pour les amphores de cette famille découvertes en Catalogne. Au‑delà de la vaste bibliographie qu’il a recueillie, de l’excellente documentation graphique et du grand nombre des exemplaires recensés, la typologie suggérée n’apparaît pas toujours très convaincante, Les récipients cylindriques de grandes dimensions ont été regroupés par types différents et leurs variantes, selon des critères difficiles à partager. Cf. Keay 1984 : types XXXV, XXXVI, LXI, LXII, LXXXV, etc.
24 L’argile du col découvert dans l’épave de St‑Gervais II, daté de la fin du vie ou du début du viie s., ne semble pas être africaine (Jézégou 1983 : 203).
25 Epave de St‑Gervais II, cf. Jézégou 1983 : p. 202‑205, pl. 91, 1 ; 92,1 ‑2. Quatre exemplaires découverts à 200 m de l’épave de St‑Gervais maintenant au dépôt des Amis de Fos, et un col provenant du golfe de Fos, cités par Jézégou 1983 : 204‑205.
26 Lamboglia 1956 : 738, fig. 7 (11‑12). Des fragments attribuables à cette famille de récipient ont été découverts récemment durant la fouille de l’église paléochrétienne de San Calocero à Albenga dirigée par P. Pergola depuis 1985 (cf. les comptes rendus annuels dans la chronique des fouilles de l’Ecole française de Rome, dans les MEFRA, depuis 1986). Les amphores y avaient été utilisées pour la construction de la voûte en berceau destinée à soutenir la nef latérale gauche de l’édifice.
27 Volpe 1985c : p. 158, no 22, pl. III ; p. 164, no 40, pl. V. L’exemplaire no 22, typologiquement comparable aux fragments de Castellu, y est par contre attribué à la production tripolitaine de deux siècles auparavant. Le fragment no 40, à haut bandeau vertical et de pâte marron, n’est pas identifié par l’auteur, mais je crois pouvoir suggérer, avec prudence, un rapprochement possible avec certains exemplaires découverts à proximité du temple de Cybèle sur le Palatin, avec le col de St‑Gervais qui présente une inscription peinte, avec l’amphore de Civitavecchia, avec certains récipients d’Aquileia, avec l’amphore de Syracuse, avec le col provenant de l’épave de St‑Gervais II, etc.
28 Ostia IV : 219‑220. J’aurais plutôt tendance à inverser ce processus logique, et par conséquent chronologique. Compte tenu de l’indubitable parenté étymologique avec spathe, et donc avec une allusion directe à l’élément formel, il apparaît plutôt que l’idée de mesure ne précède pas, mais suit, le concept de récipient de transport. De la spathe/petite épée, l’amphore rappelle la forme et elle en prend le nom qui, par extension, finit progressivement par indiquer aussi l’unité de mesure liée de quelque manière à la capacité de l’amphore elle‑même. Une autre difficulté, elle aussi importante, est donnée en outre par le calcul de la mesure en litres équivalente au spation. D’après Segré (1928 : 33‑34) il équivaudrait à 48 setiers alexandrins, ou à 2/3 de kentenarion, c’est‑à‑dire 23,28 I. Une telle quantité constitue au moins le double du contenu moyen de l’amphore cylindrique fuselée de production africaine. Les amphores d’origine égyptienne, parmi lesquelles pourrait être identifié le spation des papyrus présentent des capacités différentes, mais elles ne semblent jamais dépasser 16 ou 17 I (cf. Egloff 1977 : forme Kellia 172), On en retire l’impression que le rapport entre le récipient et l’unité de mesure ne dut pas être très étroit. On peut encore observer, en allant dans le sens des affirmations précédentes, que l’unité de mesure spation aurait pu difficilement donner naissance à des récipients de transport du même nom mais de capacités différentes : cette incohérence aurait pu entraîner des confusions dangereuses. Au contraire, le processus inverse apparaît moins engageant : aujourd’hui, par exemple, nul ne peut confondre l’unité de mesure « baril », utilisée pour le pétrole, avec le récipient homonyme qui présente différentes capacités et qui est destiné à la conservation de produits de nature différente.
29 Cf. supra, note 23, ainsi que Egloff 1977:108‑119 ; je pense également à la forme LR 7 de Riley.
30 Ce matériel est en cours d’étude ; ces deux fouilles sont conduites dans le cadre d’un projet commun de l’École française de Rome, du CNRS et de la Soprintendenza archeologica de Rome, dans la zone de la Vigna Barberini (chantier dirigé par P. Pergola, secteur de St‑Bonaventure ; cf. les comptes rendus annuels dans la chronique des fouilles de l’Ecole française de Rome, dans les MEFRA, depuis 1986).
31 La première synthèse relative aux problèmes spécifiques posés par ce petit récipient se trouve dans Ostia IV, p. 218‑219, 282, avec un recueil préliminaire de comparaisons publiées. Les fouilles des Terme del Nuotatore, où les stratigraphies ne vont pas au‑delà de la fin du ive s., n’ont livré aucune de ces petites amphores, qui sont absentes également des matériels découverts à l’occasion des fouilles de la basilique des saints Pierre et Marcellin sur la via Labicana (ive s.) ; cf Manacorda 1981 : 1053, avec une bibliographie complémentaire à la note 9.
32 Il est superflu à ce propos de rappeler que les cartes de distribution sont toujours le fruit d’une schématisation et d’une simplification. La première limite est donnée par l’impossibilité de quantifier les produits attestés : un, dix ou cent exemplaires découverts dans un même site sont représentés par le même symbole graphique et les différentes solutions proposées n’ont guère donné de résultats satisfaisants. En second lieu, il faut aussi tenir compte du fait qu’une concentration plus importante d’objets dans une région donnée peut n’être que le reflet de l’intérêt particulier apporté à la recherche archéologique de ce pays, à l’état plus avancé des publications spécialisées ou plus simplement encore, au hasard des découvertes elles‑mêmes. Malgré cela, il est toujours possible de tirer de la rédaction de ces cartes l’indication de tendances significatives et de visualiser utilement l’ampleur de la diffusion d’un récipient et l’étendue du marché que représentaient les produits qu’il servait à transporter. On ne pourra au contraire obtenir aucune indication sur l’augmentation ou la contraction, en termes de quantité, de l’exportation de ce récipient.
33 Cf. Maioli 1980 : 226, fig. 7‑8, pl. XXXVIII ; Stoppioni Piccoli 1983 : 140‑141, fig. 8.20, 8.24. Ces spatia, considérés comme une production locale, furent remployés dans la construction du mur d’un four de potier. L’argile, de couleur rougeâtre, a été mise en rapport, par M.‑P. Jézégou, avec la petite amphore d’Apollonia publiée par Riley : Jézégou 1983 ; 243‑244. Il faut cependant considérer avec la plus grande prudence des comparaisons de ce genre, probablement suggérées sans prélèvement ni analyse des pâtes. En outre, les exemplaires publiées par M.L. Stoppioni Piccoli appartiennent sûrement à la classe des grands spatia, alors qu’on ne peut rien conclure à partir des photos publiées dans l’article de M. G. Maioli.
34 Egloff 1977 : 112, no 164 ; 113, no 169 ; l’amphore apparaît dans de nombreuses autres typologies, réalisées en général à partir de découvertes relatives à une aire régionale déterminée. Pour la péninsule ibérique : Beltran Lloris 1970 : type 82 ; Keay 1984 : type LIII ; pour la Britannia : Thomas 1959 : type Bii ; pour les régions du Pont et du Danube : Kuzmanov 1973 : type XIII ; Scorpan 1975 : type VIIIB, etc.
35 Un exemplaire de Ballana se réfère sûrement à l’huile (Emery, Kirwan 1938 :401‑405) ; un titulus relatif au vin se trouve sur l’amphore découverte à Rome (église des saints Jean et Paul), alors que des traces de résine ont été relevées sur un autre récipient de Tarragone (Catalogne) : cf. De Rossi 1890 : pl. III, fig. 1 ; Keay 1984 : 271 ; les inscriptions mentionnant l’unité de mesure égyptienne αρταβη sont relatives au blé ou à d’autres denrées.
36 Panella 1983a : 55. Même les autres fouilles internationales de Carthage offrent des indications semblables : la LR 1 apparaît dans un contexte du 1er quart du ve s. dans un secteur fouillé par la mission britannique (Fulford, Peacock 1984 : 199). Dans le secteur fouillé par l’université du Michigan des fragments relatifs à la forme Kellia 164 sont datés de la 1re moitié du vie s. (Humphrey 1978b : 120).
37 Saints Pierre et Marcellin : Manacorda 1981. Il est intéressant de noter que manquent presque totalement dans ce dépôt les formes attestées à Castellu : aussi bien les spatia de petites dimensions que les récipients cylindriques de grandes dimensions, comme les LR 1, sont absents. Seuls les spatia de plus grandes dimensions enregistrent une présence significative, étant donné que le début de leur production est sensiblement antérieur à celui des autres formes, Taberna devant le temple de Cybèle : sondage 0 (350‑390 ap, J.‑C. environ). La LR 1 est absente en outre des stratigraphies du ive s. de la pièce XVI des Terme del Nuotatore à Ostie. Autres tabernae du Palatin : sondages A et L. taberna P (450‑490 ap. J.‑C. environ). Les amphores de production orientale découvertes dans ces contextes du Palatin sont en cours d’études et elles seront publiées par F. Pacetti.
38 La liste détaillée des sites et la bibliographie qui s’y rapporte ne sont pas données ici ; cette recherche a été conduite par F. Pacetti pour la publication du matériel de production orientale qui provient de la fouille des alentours du temple de la Magna Mater en cours détude. Je remercie F. Pacetti de ses conseils et de la réalisation de la carte de distribution mise à jour qu’il m’autorise à publier ici.
39 Keay distingue les argiles relatives à deux types : Fabric 32 pour le type LXXIX, et Fabric 34 pour le type LXX. En réalité, sa description semble plutôt faire état de deux échantillons extrêmement proches, dont les différences ne semblent concerner que des détails secondaires : Keay 1984 : 465‑466.
40 Weitzmann 1972 : 1 : « The obstacle presented by the pagan ivories is that there exists no corpus which could serve as a guide and provide points of orientation for dating and localisation », mais à cette époque les travaux de Béal n’existaient pas encore.
41 Strzygowski 1902 : 12‑16, fig. 5‑11 : plaquette, musée d’Alexandrie. Longhurst 1927 : 17, pl. III, inv. A 164‑1920 : pyxide, Victoria and Albert Muséum ; 20, pl. IV, inv. 623‑1884 : panneau de coffret ; 20, pl. IV, inv. A 165‑1920. Strzygowski 1904 : 172‑179, nos 7060‑7069, pl. XI‑XIII, fig. 232‑236 : coffrets, musée du Caire. Marangou 1976 : pl. 47 A : plaquette, musée de Vienne ; pl. 4 A, p. 88 : os courbe, musée du Louvre (inv. DOA 9060). Kanzler 1903 :1, pl. IV, 2 : disque, Bibliothèque Vaticane. Enfin, trois plaquettes du Metropolitan Muséum (Neg. D. A. I. 81 ‑ 5711‑5713). Les parties grattées étaient destinées à être remplies de pâtes colorées.
42 Comme, par exemple, dans le cas d’un couvercle de Corinthe (Davidson 1952 : 134, no 943, pl. 68) ou d’un autre de Zugmantel (SJ, V, 1913 II, pl. IV, 37). Un couvercle rectangulaire, sans appendices ni découpages est conservé au musée d’Alava (Alava 1983 : 175) et a un décor semblable au nôtre. Les trois objets mentionnés ont deux trous proches, probablement pour fixer une poignée.
43 Des baguettes identiques ont été trouvées à Montmaurin (Fouet 1969 : pl. LVIII) mais on n’a pas de précisions stratigraphiques, sauf une indication vague au ive s. Elément en forme de colonne : à Montmaurin (ibidem) ; aux musées de Berlin (Wulff 1909 : 123, no 451, pl. XX, provenant d’Egypte) ; de la fouille de l’église septentrionale d’Hesban (Lawlor 1980 : 102, pl. LXI, nos 121, 125, 137‑138, conservés au musée de Madaba) (époque byzantine).
44 Sardaigne : peigne en os de la nécropole de Scoglio Lungo (PortoTorres), daté au moins du vie s., cf. Maetzke 1965 : p. 344‑ 345, fig. 19c à la p. 343. Toscane : peigne en ivoire provenant de la fouille de thermes à San Gaetano di Vada (Rosignano marittimo), au Museo Civico de Rosignano (inv. prov. 499, nég. D. A. I. 82.2851 ). Je remercie la Soprintendenza archeologica per la Toscana des renseignements sur la provenance. Deux exemplaires provenant des fouilles de Luni : Frova 1973 : col. 565, inv. CM 637, pl. 139, 29 ; id. 1977 : 664, inv. T 68, pl. 331 (daté du viie s., post 640). Provence : peigne en os de la grotte de la Fourbine, cf. Congés 1983 : 357‑358, no 50, fig. 8.
45 Cf. à ce propos la bibliographie suivante, non exhaustive, donnée à titre indicatif : Mengarelli 1902 : 146‑342 et pl. ; Menghin 1977 : 37, pl. 10, 1 ; Werner 1961 ; Faider Feytmans 1970 ; Harhoiu 1977 ; Arrhenius 1985.
46 Mes remerciements les plus vifs vont à M. O. von Hessen pour les suggestions qu’il a bien voulu me fournir, avec ces indications bibliographiques ; Barrière Flavy 1892 : pl. VI ; Zeiss 1934 : pl. 6 et 9 ; Keltenfürst 1985 : 432.
47 Vágó Bóna 1976 : 191‑192, pl. 4, 361 ; pl. 8, 133/2 ; pl. 13, 1001/1‑2, 1005/1 ; pl. 15, 1050/6‑7 ; pl. 23, 1236/11, parmi les exemples possibles.
48 A propos des clous dans l’Antiquité, je renvoie au Dict. Ant, 1, 2, Paris 1887, s. v. clavus (Saglio), col. 1238‑1242. Sur les techniques de forgeage et plus généralement sur le travail des métaux, cf. Strong, Brown 1976 :143‑198 ; Healy 1978 :139‑198.
49 Dans un village de montagne d’Italie, entre le Piémont et le Val d’Aoste, se trouve un habitat où a été découverte une pièce destinée à une utilisation artisanale, comme cela est démontré, entre autres, par la découverte d’instruments de travail pour le forgeage des métaux. Bien qu’il s’agisse d’un contexte chronologique fort différent, du xviiie s., on y trouve des éléments de comparaison fort intéressants. Cf. Cima, Nisbet 1982 : 483‑502,
50 La bibliographie concernant le mobilier de plomb est relativement peu importante. En l’état actuel, il n’existe à ma connaissance aucune étude spécifique sur la typologie de ce type de matériel. Des découvertes sont cependant signalées, ça et là, dans le cadre plus général de publications et de rapports de fouilles.
51 Il faut signaler à ce propos l’importance de la contribution que fournissent les travaux de M. G. Celuzza et M. Todaro sur les productions de matériaux de construction de terre cuite provenant d’une part de la fouille de Settefinestre en Etrurie, et d’autre part, de la Crypta Balbi à Rome ; cf. Ricci 1985 : 33‑39 et Todaro 1985.
52 Pour un panorama complet relatif aux fours de l’Antiquité et à leurs productions de céramique et de matériaux de construction, cf. Cuomo di Caprio 1981 et 1982.
53 Cf. TLL s. v. mola, § β L’on manque cependant d’études générales. Malgré la fréquence des découvertes (cf. par ex. Fouet 1969 : 192), nous ne possédons à l’heure actuelle que des synthèses partielles relatives aux meules fabriquées en Grande‑Bretagne (Curwen 1937 et 1941 ; Gordon Childe 1943) et au Portugal (Corréia Borges 1978 et 1979).
Table des illustrations
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Légende | • Fig. 22 à 25 –Sigillée africaine. – 22. Frag, de fond, décor Hayes 1972 : 112. – 23. Frag. de rebord de cruche, forme Boninu 1972‑ 73 : 42. – 24. Frag. de fond de coupe, décor Hayes 1972 : 311. – 25. Frag. de fond, décor Hayes 1972 : A (ii)‑(iii). |
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Légende | • Fig. 26 à 47 – Céramique commune – 26‑29. Coupes à listel et mortiers. – 30‑31. Mortiers. – 32. Frag. de bord de mortier avec bec verseur. – 33‑35. Coupes à listel. – 36‑39. Formes ouvertes. – 40‑47. Cruches. |
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Légende | • Fig. 48 à 64 – Céramique commune. – 48‑49. Bouteilles. – 50. Frag. de bec verseur. – 51‑59. Fonds divers. – 60, 62. Poids de métier à tisser. – 61. Coupe à listel. – 63. Cruche. – 64. Frag. de forme ouverte (?). |
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Légende | • Fig. 65 à 76 – Céramique de cuisine. – 65‑69. Ollae ourlées par une lèvre bien détachée de la panse, au profil quadrangulaire. Le fond est légèrement courbe. – 70‑76. Marmites à bord rentrant, épaissi, en amande, avec éléments de préhension sur l’épaule. |
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Légende | • Fig. 77 à 94 – Céramique de cuisine. – 77‑83. Frag. de rebord d’olla à lèvre plane, plus ou moins épaissie. – 84‑86. Frag. de marmite à listel, à paroi presque verticale. – 87. Vase à lèvre décorée, avec appendice cylindrique creux. – 88. Vase campaniforme à profil continu. – 89. Vase à lèvre presque triangulaire. – 90. Vase campaniforme à lèvre presque carrée. – 91. Frag. de lèvre déformé ouverte. – 92‑94. Frag. de couvercles. |
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Légende | • Fig. 95 à 106 – Céramique de cuisine – 95. Frag. de prise centrale de couvercle. – 96‑100. Frag. de rebord de couvercles. – 101‑104. Frag. de fonds. – 105. Frag. de paroi décorée d’incisions. – 106. Frag. de fond. |
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Légende | • Fig. 107 à 113 – Céramique modelée. – 107. Frag. de gros vase modelé en forme de dolium. – 108. Grand vase modelé de forme tronconique. – 109. Vase campaniforme modelé avec éléments de préhension. – 110‑111. Deux frag. d’ourlets de formes modelées ouvertes. – 112. Disque fragmentaire modelé. – 113. Frag. de couvercle (?) modelé, avec marli. |
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Légende | • Fig. 114 à 125 – Amphores. – 114‑115. Amphores cylindriques de grandes dimensions de l’Antiquité tardive. – 116‑117. Amphores cylindriques fuselées de l’Antiquité tardive dites spatia. – 118‑125. Amphores cylindriques fuselées de petites dimensions. |
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Légende | • Fig. 126 à 129 – Amphores. – 126. Late Roman Amphora 1, Kellia 164. – 127. Productions non identifiées ; formes Keay LXX. – 128. Productions non identifiées ; formes Keay LXXIX. – 129. Amphore non identifiée. |
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Légende | • Fig. 130 – Carte de diffusion des amphores cylindriques de grandes dimensions. |
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Légende | • Fig. 131 – Carte de diffusion des amphores cylindriques fuselées (spatia). |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/34190/img-11.jpg |
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Légende | • Fig. 132 – Carte de diffusion des amphores cylindriques fuselées de petites dimensions. |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/34190/img-12.jpg |
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Légende | • Fig. 133 – Carte de diffusion de la Late Roman Amphora 1. |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/34190/img-13.jpg |
Fichier | image/jpeg, 57k |
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Légende | • Fig. 134 – Carte de diffusion des formes Keay LXX et LXXIX. |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/34190/img-14.jpg |
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Légende | • Fig. 135 – Plaquette en os avec la représentation d’une Néréide nageant à côté d’un ketos. |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/34190/img-15.jpg |
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Légende | • Fig. 136 à 160, 162 – Os travaillé. – 136. Schéma de la décoration végétale géométrisée des éléments des fig. 137‑139. – 137‑139. Eléments de décor, appartenant vraisemblablement à un coffret. – 140. Schéma de la décoration géométrique des éléments des fig. 141‑142. – 141‑142. Eléments de décor, appartenant vraisemblablement à un coffret. – 143. Schéma de la décoration végétale géométrisée de l’élément de la fig. 144. – 144. Elément de décor, appartenant vraisemblablement à un coffret. – 145‑147. Eléments à décor végétal stylisé, appartenant vraisemblablement à un coffret. – 148‑150. Eléments de revêtement. – 151. Fragment de baguette en forme de colonne torse à base attique. – 152‑153. Deux baguettes, faisant partie d’un cadre. – 154. Schéma de la décoration de la côte centrale d’un peigne (cf. fig. 155‑156). – 155‑156. Deux fragments de côte centrale d’un peigne. – 157‑160. Quatre éléments dentés d’un peigne. – 162. Développement graphique du décor d’une pyxide fragmentaire : des deux côtés d’un arbre ou buisson sont représentés un oiseau (à gauche) et un amour (à droite). |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/34190/img-16.jpg |
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Légende | • Fig. 161 – Elément central de peigne décoré avec la représentation d’une Néréide nageant à côté d’un cheval marin. Sur la face postérieure on peut voir clairement les traces du travail pour la création des dents. |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/34190/img-17.jpg |
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Légende | • Fig. 163 à 171 – Os travaillé. – 163. Elément de boîte à glissière ; sur l’une des faces on peut lire des lettres, vraisemblablement en rapport avec l’assemblage des différents éléments. – 164. Aiguille fragmentaire. – 165. Prise de couvercle de pyxide. – 166. Appendice terminal d’un objet non identifié. – 167. Fuseau fragmentaire. – 168. Couvercle rectangulaire de boîte. – 169. Appendice terminal de prise. – 170‑171. Deux fragments de charnière moulurée. |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/34190/img-18.jpg |
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Légende | • Fig. 172 à 190 – Bronzes. – 172‑175. Fibules à arc. – 176. Fibule cloisonnée ovale. – 177. Boucle de ceinture. – 178. Boucle d’oreille. – 179‑180. Bagues. – 181‑183. Bossettes. – 184. Petite spatule. – 185. Manche. – 186. Pointe de fuseau. – 187. Agrafe à double crochet. – 188. Applique. – 189. Poids. – 190. Prise de récipient. |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/34190/img-19.jpg |
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Légende | • Fig. 191 à 226 – Fers. – 191‑193 et 195‑202. Clous à tête circulaire. – 194. Clou à tête hémisphérique. – 203. Tige à deux têtes coniques. – 204‑205. Crampons en forme de U. – 206. Crochet de suspension (? ). – 207‑210. Eléments de suspension (?). – 211‑212. Crochets. – 213. Anneau circulaire. – 214‑215. Tiges rectangulaires. – 216‑224. Couteaux. – 225‑226. Stylets. |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/34190/img-20.jpg |
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Légende | • Fig. 227 à 233 – Fers. – 227. Outil. – 228‑229. Coins. – 230. Pointe creuse d’arme. – 231. Mors de cheval. – 232. Ardillon de boucle. – 233. Fragment de plaquette linguiforme. |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/34190/img-21.jpg |
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Légende | • Fig. 234 à 238 – Matériaux de construction en terre cuite. – 234‑236. Tegulae. – 237. Imbrices. – 236. Tegula mammata. |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/34190/img-22.jpg |
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Légende | Tableau IV – Matériaux de construction de terre cuite (tableau récapitulatif). Le premier chiffre correspond aux nombres de fragments, le second aux pourcentages. |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/34190/img-23.jpg |
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Légende | • Fig. 239 à 243 – Meules et mortier. – 239. Meule dormante. – 240‑241. Meules courantes. – 242‑243. Mortier en pierre. |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/34190/img-24.jpg |
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Légende | • Fig. 244 – Fréquence des parties du squelette exprimée en nombre minimal. Les effets de la destruction différentielle apparaissent nettement pour les dents les plus fragiles, les éléments du squelette axial et les épiphyses les moins ossifiées des os longs. La comparaison des graphes A et B met en évidence une moins bonne conservation relative des éléments du squelette appendiculaire dans le sondage V, qui s’explique par une plus grande activité des chiens. A = Caprini du sondage V ; B = Caprini du sondage I ; C = Suinae du sondage I ; D = Bovinae du sondage I, 1 = chevilles osseuses ; 2 = crâne ; 3 = M3 sup. ; 4 = M1‑2 sup. ; 5 = P3‑4 sup. ; 6 = D3‑4 sup. ; 7= C sup. ; 8 = Isup. ; 9 = M3 inf. ; 10 = M1‑2 inf. ; 11 = P3‑4 inf. ; 12 = D3‑4 inf. ; 13 = C inf. ; 14 = I inf. ; 15 = mandibule ; 16 = hyoïde ; 17 = vertèbres cervicales ; 18 = vertèbres thoraciques ; 19 = vertèbres lombaires ; 20 = vertèbres sacrées et caudales ; 21 = côtes ; 22 = sternum ; 23 = scapula ; 24 = coxal ; 25 = humérus ; 26 = fémur ; 27 = radius ; 28 = ulna ; 29 = tibia ; 30 = fibula ; 31 = carpe ; 32 = tarse ; 33 = métacarpe ; 34 = métatarse ; 35 = phalange I ; 36 = phalange II ; 37 = phalange III ; 38 = rotule ; P = épiphyse proximale ; D = épiphyse distale. |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/34190/img-25.jpg |
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Légende | • Fig. 245 – Comparaison des proportions relatives des quatre principaux taxons domestiques dans les trois locus étudiés : le sondage V se différencie des deux autres qui montrent, entre eux, une forte parenté. |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/34190/img-26.jpg |
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Légende | • Tableau V – Composition de la faune de Castel lu, exprimée en nombre de restes (NR), en nombre minimal d’individus (NMI) et en poids d’os (Pds). |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/34190/img-27.jpg |
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Légende | • Tableau VI – Répartition par sexe et âge des canines définitives de Suinés (Sus scrofa) du sondage I. |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/34190/img-28.jpg |
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Légende | • Fig. 246 – Courbe d’âges d’abattage des Suinés (Sus scrofa) de Castellu, exprimée en nombre de dents (en haut) et nombre d’individus (en bas). Pour la méthode de calcul, cf, Vigne 1988a. |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/34190/img-29.jpg |
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Légende | • Fig. 247 – Morphologie de la tête des Suinés (Sus scrofa) de Castellu : A = profils crâniens (n = Nasion ; les flèches indiquent l’avant) ; B = rangées alvéolaires et dentaire en vue occlusale (de haut en bas et de gauche à droite : maxillaire gauche adulte, maxillaire droit jeune, maxillaire gauche adulte, mandibule droite adulte ; les flèches indiquent l’avant et la position de l’axe de symétrie) ; C = profils mentonniers de la symphyse mandibulaire, |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/34190/img-30.jpg |
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Légende | • Fig. 248 – Comparaison de la taille des Bovins (Bos taurus) de Castellu, exprimée par la longueur latérale de l’astragale, avec celle d’autres populations corses (d’après Vigne 1988). 1 = âge des Métaux (N = 4) ; 2 = Castellu (N = 33 ; x = 59,1 ; s = 3,1) ; 3 = Bas Moyen Age de l’intérieur montagneux de l’île (Capula, Castello d’Istria, Ota ; N = 11) ; 4 = Bonifacio (XIVe‑XVIe s, ; N = 28) ; 5 = Aleria (citerne du domus au dolium, XVe‑XVIe s. ; N = 17) ; 6 = vachettes corses actuelles de race traditionnelle (musée de Lévie). |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/34190/img-31.jpg |
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Légende | • Fig. 249 – Courbe d’âges d’abattage des Bovinés (Bos taurus) de Castellu, exprimée en nombre de dents (en haut) et nombre d’individus (en bas). Pour la méthode de calcul, cf. Vigne 1988a. |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/34190/img-32.jpg |
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Légende | • Fig. 250 – Morphologie des chevilles osseuses d’Ovins (Ovis) de Castellu ; A = Bélier domestique (O. aries) ; B = Brebis domestique ; C = Mouflon (O. ammon musimon) mâle ; les flèches indiquent l’avant et la position de l’axe de symétrie. |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/34190/img-33.jpg |
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Légende | • Fig. 251 – Description métrique des populations de Caprines (Caprini) de Castellu. Les abréviations sont celles utilisées dans l’annexe ostéométrique. |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/34190/img-34.jpg |
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Légende | • Fig. 252 – Sections transverses basales des chevilles osseuses des Caprins adultes (Capra hircus) de Castellu (f = femelle ; m = mâle ; les flèches indiquent l’avant et la position de l’axe de symétrie). |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/34190/img-35.jpg |
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Légende | • Fig. 253 – Courbe d’âges d’abattage des Caprinés (Caprini) de Castellu, exprimée en nombre de dents (NR) et nombre d’individus (NMI). Pour la méthode de calcul, cf. Vigne 1988a. |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/34190/img-36.jpg |
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Légende | • Tableau VII – Répartition par sexe et âge des cornillons et coxaux (d’après les critères de Boessneck 1964) de Caprinés (Caprini) de Castellu. |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/34190/img-37.jpg |
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Légende | • Tableau VIII – Evaluation des poids de viande et abats (PVA) et des rendements en viande (PVA/NMI) des animaux consommés du sondage I (PP = poids vif ; RB = rendement boucher ; NMI = nombre minimal d’individus). La méthode utilisée est exposée dans Vigne 1988a. |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/34190/img-38.jpg |
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Légende | • Fig. 254 – Proportion relative des Mammifères domestiques consommés de Castellu (B), exprimée en poids de viande et abats (PVA) et comparée à celles obtenues pour les autres sites médiévaux de région montagneuse (A) et de plaine côtière (C) (d’après Vigne 1988a). Au sein des Caprini, les pourcentages de Chèvre (en blanc) et de Mouton (en noir) ont été évalués sur la base du nombre de restes. |
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Légende | • Fig. 255 – Rendements bouchers (PVA/NMI) des Caprinés (Caprini) et Suinés (Sus scrofa) de Castellu, resitués dans l’évolution des rendements bouchers observés en Corse depuis l’âge du Fer(d’après Vigne 1988a). Une telle représentation n’aurait aucun sens pour le Bœuf, puisque la faune de Castellu est dépourvue de veaux. |
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Légende | • Fig. 256 – Reconstitution de la découpe bouchère employée à Castellu pour le Mouton et la Chèvre. |
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Légende | • Fig. 257 – Reconstitution de la découpe bouchère employée à Castellu pour les membres antérieurs (A) et postérieurs (B) des Suinés. |
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Légende | • Fig. 258 – Reconstitution de la découpe bouchère employée à Castellu pour le Bœuf. |
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Légende | • Tableau IX – Répartition anatomique et zoologique des pièces osseuses travaillées à Castellu (les trois fragments de bois de Cerf ne sont pas pris en compte ici). |
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Légende | • Fig. 259 – Quelques objets en os de Caprinés, façonnés à Castellu. – a. Mode d’extraction de cylindres creux dans la diaphyse tibiale et obtention d’objets retaillés et polis. – b et c. Métatarsiens ruginés (R) et épannelés (b) ou perforés (c). – d. Humérus perforé sur la face médiale. – e. Diaphyse fémorale perforée de part en part. |
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Légende | • Tableau X – Liste des taxons découverts. |
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Légende | • Fig. 260 – A. Triticum aestivo‑compactum (Froment) : caryopse carbonisé. – B. Hordeum vulgare (Orge vêtue) : caryopse carbonisé. – C. Vitis vinifera (Vigne cultivée) : graine carbonisée. – D. Polygonum convolvulus (Renouée liseron) : akène carbonisé. – E. Prunus spinosa (Prunellier) : 1/2 endocarpe carbonisé. |
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Légende | • Fig. 261 – Moitié longitudinale de fruit de Poirier à feuilles d’Amandier (Pirus amygdaliformis). |
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Légende | • Tableau XI – Dimensions de quelques paléosemences (en mm). L = longueur, I = largeur, e = épaisseur, Nm = nombre de restes mesurés. |
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© Éditions de la Maison des sciences de l’homme, 1989