Le relevé des oeuvres pariétales paléolithiques
|Chapitre 1. Diachronie et évolution technique du relevé
Texte intégral
1.1. Les précurseurs : 1878‑1900
1Les dernières décennies du xixe s. correspondent à une longue période d’incertitude pour le développement des recherches sur l’art pariétal paléolithique, A l’aube de l’épanouissement d’un phénomène archéologique aussi prestigieux que celui‑ci, le scepticisme des inventeurs, l’incrédulité, voire la suspicion des détracteurs, sont autant de symptômes précurseurs et inhérents à de telles découvertes. Certains préférèrent se réfugier dans un mutisme prudent, d’autres, en revanche, notèrent scrupuleusement chaque détail observé.
1.1.1. Jules Ollier de Marichard – Grotte d’Ebbou
2Au début du siècle dernier, le sieur Claustres, instituteur à Capoulet, puis en 1866 le Dr. Garrigou, révélaient chacun sous forme de notes manuscrites, la présence de « dessins » dans la grotte de Niaux, en Ariège. De même, entre 1871 et 1873, Jules Ollier de Marichard, à la suite de l’exploration de la grotte d’Ebbou, en Ardèche, écrivait : « […] j’ai pu ainsi observer dans l’argile grasse des griffures typiques de l’Ursus speleus ou du grand felix des cavernes, ainsi que des silhouettes animales esquissées sur les parois d’un grand couloir » (Ollier de Marichard 1973 : 28).
3Si l’ancienneté de ces graphismes pariétaux fut pressentie dès cette époque, leur attribution précise à une « culture » du Paléolithique supérieur ne fut jamais évoquée.
1.1.2. Léopold Chiron – Grotte de Chabot
4Il faut cependant attendre 1878 pour qu’un autre instituteur, Léopold Chiron, attache une importance plus grande à ces manifestations graphiques, sans pourtant avoir réellement conscience de leur caractère paléolithique. Un article, rédigé en 1889 sous le titre : « Note sur les dessins de la grotte de Chabot » et publié dans le Bulletin de la société d’anthropologie de Lyon, rapporte ses observations : « En examinant les parois de la grotte, je remarquai les lignes gravées dans le rocher, à plus de 5 mm de profondeur. Je distinguai peu à peu sur la paroi de droite des lignes représentant probablement des oiseaux, les ailes ouvertes. Sur la paroi de gauche, un arc tendu et cinq ou six personnages enchevêtrés. J’en fis d’abord un estampage puis, plus tard, je photographiai le tout » (Chiron 1889 : 96‑ 97).
5Il semblerait donc que cet auteur ait été le premier à avoir réalisé le relevé d’une œuvre pariétale paléolithique par estampage et son enregistrement sur support photographique. Cette communication présentée à la Société d’anthropologie de Lyon fut suivie d’un débat animé au cours duquel les hypothèses formulées par E. Chantre l’emportèrent, en attribuant l’origine de ces motifs à « l’âge de la pierre polie ».
6Quelques années plus tard, en 1893, L. Chiron rédigeait une seconde note : « Le Magdaléen du Bas‑Vivarais », dans la Revue archéologique, littéraire et pittoresque illustrée du Vivarais. Ce texte retrace son passage de 1878 dans cette grotte de Chabot. Il rapporte les mêmes remarques sur les représentations graphiques révélées par les parois de la caverne, quelques années auparavant, mais deux phototypies illustraient ses propos (fig. 1‑2).

● Fig. 1 – Gravures de la paroi de gauche, grotte de Chabot (Gard).
Photographie : L. Chiron, 1878‑1889 (Chiron 1893).

● Fig. 2 – Gravures de la paroi de droite, grotte de Chabot (Gard).
Photographie : L. Chiron, 1878‑1889 (Chiron 1893).
7La localisation des gravures à l’entrée de la cavité, dans une zone encore éclairée par la lumière du jour, facilita sans aucun doute la prise de vues photographiques de ces œuvres pariétales. Il est probable que L. Chiron se servit de plaques ou de films au gélatino‑bromure d’argent, procédé nouveau pour l’époque et d’une mise en œuvre facilitée par l’absence de préparation initiale. Vers les années 1878‑1880, ce type d’émulsion devait supplanter celle au collodium sec, matériau trop peu sensible et d’une conservation trop aléatoire sous sa forme latente.
1.1.3. Marcelino de Sautuola – Grotte d’Altamira
8Si l’interprétation exacte des figures de la grotte de Chabot échappa quelque peu à l’analyse thématique de L. Chiron, il ne fallut, en revanche, que très peu de temps à Maria Sanz de Sautuola pour lire avec beaucoup de précision les représentations animales du Grand Plafond de la grotte d’Altamira, figures qu’elle découvrit en 1879. L’année suivante, son père, Marcelino de Sautuola, devait publier une brochure au sein de laquelle il relatait cette découverte et donnait une description très détaillée des fresques. Il fit paraître cette monographie à Santander sous le titre : Breves apuntes sobre algunos objectos prehistoricos de la provincia de Santander.
9Au cours de l’année écoulée, il eut le temps de relever à vue une partie de l’art pariétal présent dans cette cavité. Quatre planches illustraient ses observations et l’une d’elles, en particulier, reproduisait les représentations du Grand Plafond (fig. 3). Il faut mentionner, la même année, une tentative de prises de vues photographiques des peintures à l’aide d’un éclairage électrique portatif fourni par le professeur Escalante. Ces phototypes seraient donc les premiers à avoir été réalisés sur ce thème, dans un espace souterrain au sein duquel aucune lumière naturelle ne pénétrait.

● Fig. 3 – Relevé des fresques du Grand Plafond, grotte d’Altamira, Santander (Espagne). 1879‑1880 (Cartailhac 1908).
10Pour M. de Sautuola, l’appartenance de ces vestiges pariétaux à une « culture » préhistorique semblait fondée, mais le milieu scientifique de ce temps ne partagea pas cette conviction. Notre propos n’est pas d’évoquer les controverses que de telles prises de position suscitèrent. Rappelons seulement qu’en 1881 E. Harlé fut envoyé sur place, en tant qu’expert de la direction du bulletin Matériaux pour l’histoire de l’Homme. Son rapport fit l’objet d’une note à laquelle étaient joints le relevé planimétrique du sanctuaire paléolithique (fig. 4), les reproductions de signes tectiformes et d’un capridé (fig. 5). Cette dernière figure, bien que d’un intérêt secondaire eu égard aux extraordinaires peintures du Grand Plafond, est la première à avoir été publiée en France. C’est par mesure conservatoire que E. Harlé en fit une rapide esquisse, car une coulée stalagmitique en occultait partiellement les contours. L’évolution de ce phénomène menaçait de rendre sa lecture de plus en plus problématique.

● Fig. 5 – Capridé relevé en 1881 par E. Harlé, grotte d’Altamira, Santander (Espagne) (Harlé 1881).
1.1.4. Émile Rivière – Grotte de la Mouthe
11C’est précisément en France, mais environ vingt années plus tard et à la suite de nouvelles découvertes, que l’existence d’un art pariétal paléolithique va peu à peu s’imposer. Les fouilles d’Emile Rivière dans une cavité proche du hameau de La Mouthe, en Dordogne, permirent de reconnaître au cœur de cette grotte des manifestations graphiques pariétales semblables à celles reconnues par L. Chiron. Le 8 avril 1895, E. Berthoumeyrou, L. Ferrier, E. Barthélémy et A. Laborie s’engageaient dans un couloir très bas et décelaient la présence de gravures après une progression fastidieuse sur plusieurs dizaines de mètres. Le 24 juin de la même année, E. Rivière vint les authentifier et poursuivit ses recherches au cours des mois qui suivirent, août et septembre, puis en mars, avril, septembre et novembre 1896 : « Je suis retourné à La Mouthe à plusieurs reprises […] pour […] y relever à la fois par estampage et la photographie, ses gravures et ses peintures à l’ocre » (Rivière 1897 : 2).
1.1.4.1. La lottinoplastie
12L’information relative à la méthodologie appliquée à l’analyse et à la reproduction des motifs pariétaux s’avère très fragmentaire et dispensée avec parcimonie. Les premiers auteurs observèrent une certaine discrétion sur la nature des matériaux et des matériels utilisés ou sur le type d’éclairage dont ils se servaient. E. Rivière évoque toutefois le procédé de Lottin de Laval pour l’estampage des gravures : « Ils [les animaux] sont gravés en creux à même la roche, pour la plupart, assez superficiellement, de sorte que l’estampage en est souvent fort difficile. Cependant, j’ai pu prendre, par le procédé de Lottin de Laval, ceux de deux animaux : un bison, ‑ c’est le seul, […], dont l’estampage ait tout à fait réussi – et un autre animal, dont le train de derrière semble être celui d’un bovidé, tandis que la tête, malheureusement un peu fruste, paraît être celle d’un Equidé à la crinière courte et hérissée, […] » (Rivière 1897 : 14‑15).
13Ce procédé, ou lottinoplastie, mis au point par Lottin de Laval en 1835, permettait la prise d’empreinte des bas‑reliefs ou des inscriptions, à l’aide de feuilles de papier préencollées que l’on appliquait les unes sur les autres en tamponnant. Le support, à base de papier, devait au préalable être humecté pour le rendre plus malléable. Ce matériau ainsi traité pénétrait plus facilement et plus profondément dans les creux naturels ou les incisions d’origine anthropique, pour épouser avec une plus grande fidélité les moindres aspérités de la roche en place. Cette première phase était suivie d’un séchage. Ensuite seulement on séparait le moule du support lithique. Cette dernière opération ne présente aucune difficulté dans des conditions thermohygrométriques normales, mais il en est tout autrement en milieu souterrain. Les échecs successifs enregistrés par E. Rivière eurent pour origine, sans aucun doute, la présence d’une humidité relative au taux très élevé, rendant impossible toute évaporation suffisante de l’eau absorbée par le papier. Dans ce contexte, en effet, le degré hygrométrique de l’air ambiant se situe généralement autour de 98 %.
1.1.4.2. La prise d’empreinte
14Après l’estampage par lottinoplastie, il pratiqua la prise d’empreinte de certaines plages gravées, soit au plâtre, soit à l’argile, notamment celles du grand taureau de la première salle (fig. 6), du bison de la salle suivante et d’un des deux rennes tachetés. Un des moulages, celui du bos, figurait à l’Exposition universelle de 1900, à Paris, manifestation qui donna au grand public la possibilité d’observer le premier témoignage paléolithique issu des grottes du sud de la France. Cette série d’estampages n’a pas été d’une totale innocuité, aussi bien pour les œuvres préhistoriques que pour la paroi rocheuse. Après plus d’un demi‑siècle, les stigmates du moulage sont encore apparents. L’huile lithargée, utilisée pour pallier l’adhérence du plâtre ou de l’argile au support, fixa depuis toutes les impuretés contenues dans l’air ambiant. Actuellement, les séquelles de cette opération se présentent sous la forme d’un quadrillage noir, qu’un éclairage frontal laisse très bien apparaître (fig. 7).

● Fig. 7 – Stigmates d’estampage décelables sous la forme d’un quadrillage régulier, grotte de La Mouthe (Dordogne).
1.1.4.3. La photographie
15Les informations relatives aux méthodes de relevé photographique sont tout aussi peu explicites que les précédentes. E. Rivière sollicita toutefois le concours de Ch. Durand, attaché à la Carte géologique de France. Après de nombreux essais infructueux, ce dernier réussit à produire cinq clichés sur lesquels on ne devine qu’une image difficilement exploitable (fig. 8‑9) : « J’ai l’honneur de soumettre les photographies au jugement de l’Académie, photographies que nous sommes parvenus à obtenir, après de nombreux essais d’éclairage, qu’avec une intensité de lumière égale à 150 bougies environ et un minimum de six heures de pose » (Rivière 1897 : 2).

● Fig. 8 – Renne tacheté, grotte de La Mouthe (Dordogne).
Photographie : Ch. Durand, 1895‑1897 (Rivière 1897).

● Fig. 9 – Bison de la découverte, grotte de La Mouthe (Dordogne).
Photographie : Ch. Durand, 1895‑1897 (Rivière 1897).
16Ces quelques, lignes dénoncent les causes d’insuccès, à l’origine des médiocres résultats obtenus. L’éclairement des vestiges anthropiques fut rendu possible par l’emploi d’une ou plusieurs sources lumineuses totalisant une intensité de 150 cd environ, en supposant que l’auteur fasse allusion à l’unité photométrique lorsqu’il mentionne le terme bougie. L’utilisation d’une torche à gouttière, source de lumière artificielle pourtant très répandue a été écartée. Il s’agissait de répartir un mélange de magnésium et de chlorate de sodium que l’on enflammait ensuite à l’aide d’une amorce. Cet instrument avait comme principal inconvénient de provoquer un véritable nuage de magnésie qui retombait lentement. Son usage sous terre, dans un espace très limité, très confiné, s’avérait peu approprié. Pour cette raison, sans doute, Ch. Durand se tourna vers une source d’énergie lumineuse continue, telle que les lampes à pétrole, l’acétylène étant à cette époque d’un usage peu courant.
17Le matériel photosensible, commercialisé à la fin du siècle dernier, se présentait sous forme de plaques ou de films. Il était de type orthochromatique. Les émulsions panchromatiques, c’est‑à‑dire sensibles à toutes les radiations visibles du spectre solaire, donc de réponse pratiquement équivalente à la sensibilité spectrale de l’œil, n’ont été utilisées qu’à partir des années trente.
18Les lampes introduites dans la grotte de La Mouthe par Ch. Durand dispensaient une lumière au spectre très décalé vers les radiations orange et rouges avec une absence totale d’émission dans les bleus et, à un moindre degré, dans les verts. A l’inverse, le matériel photosensible employé conjointement avec ce type d’éclairage était susceptible d’enregistrer les émissions ultraviolettes, bleues et possédait une sensibilité moindre dans les verts. Ces émulsions aux qualités incontestables lors d’une utilisation en lumière naturelle s’avéraient cependant médiocres pour enregistrer un sujet éclairé par un autre type de lumière, tel que celui issu d’une lampe à pétrole ou d’une ampoule électrique à filament de carbone, dont les températures de couleur n’excèdent jamais 1 950 K (fig. 10). A cette particularité s’ajoutaient les conséquences d’une trop longue exposition, dont le principal effet est de réduire la sensibilité des émulsions (écarts de réciprocité ou effet Schwartzschild), d’où des temps d’exposition prohibitifs. Cette inadéquation suffit à elle seule à expliquer l’impossibilité d’obtenir des documents photographiques corrects des gravures et des peintures pariétales.

● Fig. 10 – Effet photochimique. La sensibilité d’une émulsion est subordonnée à la qualité de la lumière à laquelle elle est insolée. La courbe résultante traduit cet effet. La conséquence première est une réduction notable des performances photométriques.
19Il est à noter qu’afin d’améliorer la lecture des phototypes et pallier les insuffisances chromatiques des émulsions, on accentuait à la craie les délinéaments des motifs originaux : « Il est fâcheux que pour faciliter la photographie, on ait repassé un trait sur les contours des figures » (Martel 1930 : 43).
20Le recours à de telles méthodes de mise en valeur des représentations pariétales n’était cependant qu’exceptionnel ; toutefois, la retouche des documents photographiques se révélait une
1.1.4.4. Les premiers décalques
21L’obstination de E. Rivière à établir, puis à imposer à ses pairs l’identité paléolithique des figures de La Mouthe, l’incita à concevoir ce site comme un véritable laboratoire, au sein duquel furent expérimentés tous les procédés de relevé, dont les différentes grandes lignes perdureront jusqu’à nos jours.
22Il semble que seule la méthode de relevé par superposition d’un papier translucide maintenu au contact de la paroi pour le décalque des tracés paléolithiques lui donna entière satisfaction. Elle se prêtait beaucoup plus aisément à une analyse ultérieure et à la publication que la photographie, aux possibilités alors insuffisamment performantes (fig. 11‑12). Ce procédé d’enregistrement des données par décalque, simple à mettre en œuvre, ne réclamait la participation d’aucun spécialiste. De plus, la réalisation d’un relevé par rapport aux méthodes précédemment évoquées s’effectuait dans des temps beaucoup plus courts, pour des résultats essentiels et immédiatement exploitables.

● Fig. 11 – Panneau de la salle des bisons, grotte de La Mouthe.
Relevé E. Rivière, 1900 (Rivière 1905).
1.1.5. François Daleau – Grotte de Pair‑Non‑Pair
23Les recherches menées par E. Rivière dans la grotte de La Mouthe depuis 1895 peuvent être mises en parallèle avec celles que dirigeait F. Daleau à Pair‑Non‑Pair, en Gironde, cavité dont les gravures repérées dès le 27 décembre 1883 ne furent pourtant interprétées que bien plus tard, en août 1896. Les deux hommes se connaissaient et confrontaient quelquefois leurs résultats.
24La localisation des gravures, à proximité du porche d’entrée de ce site, facilita grandement leur relevé, qui, dans l’immédiat, se fit à vue (fig. 13). Les figures furent ensuite photographiées, éclairées par la lumière du jour, et une partie des documents ainsi collectés publiée dans les Actes de la société archéologique de Bordeaux, en 1897. A chacune des quatre phototypies, consacrées aux œuvres les plus remarquables de la cavité, était joint leur croquis de lecture (fig. 14). L’excellente qualité, à la fois des prises de vues réalisées par Th. Amtmann et des reproductions, est à souligner. Par la suite, en 1898, F. Daleau fera façonner les moulages des œuvres majeures de ce site. Ils seront acheminés deux ans plus tard à Paris pour figurer à l’Exposition universelle de 1900.

● Fig. 13 – Relevé à vue des gravures de la grotte de Pair‑Non‑Pair (Gironde).
Extrait du Carnet d’Excursions de F. Daleau, 1896. Coll. Musée d’Aquitaine.

● Fig. 14 – Photographie et croquis de lecture de « l’ Agnus Dei », grotte de Pair‑Non‑Pair.
Photographie : Th. Amtmann, relevé F. Daleau, 1897 (Daleau 1897).
25L’étroite association du mobilier en place, appartenant aux niveaux du Périgordien supérieur notamment, et des œuvres pariétales de cette cavité, conjoncture très rarement rencontrée, argumenta en faveur d’une reconnaissance de l’art pariétal comme d’un phénomène archéologique dont l’origine paléolithique semblait de plus en plus affirmée.
1.1.6. Felix Regnault – Grotte de Marsoulas
26Toute découverte apportait chaque année la preuve tangible de la présence dans les grottes d’une iconographie préhistorique, dont la distribution géographique s’étendait maintenant à la chaîne pyrénéenne. En effet, au cours de l’année 1897, F. Régnault devait signaler dans la grotte de Marsoulas, en Haute‑Garonne, les premières œuvres pariétales de cette région. Le 20 avril, il confia à L. Jammes les travaux de reproduction au lavis de ces peintures (fig. 15). Invité par l’inventeur, E. Rivière, pourtant ardent défenseur de ces thèses, ne reconnut pas comme préhistoriques ces figures, ou plus précisément, émit quelques réserves quant à leur contemporanéité avec celles des sites de La Mouthe ou de Pair‑Non‑Pair. La saturation élevée des couleurs de cette fresque abusa la critique. Quelques pas supplémentaires sur le chemin de la vérité restaient à franchir.

● Fig. 15 – Relevé du panneau principal orné, grotte de Marsoulas (Hte‑Garonne).
Dessin de L. Jammes, 1897 (Régnault 1903).
1.2. L’œuvre de l’Abbé Henri Breuil
27Nous ne prétendons pas retracer dans ces quelques lignes l’intégralité de l’œuvre scientifique de l’abbé Henri Breuil. Nous évoquerons seulement les étapes importantes qui marquèrent aussi bien la vie de ce chercheur que le milieu de la préhistoire en général et le domaine de l’art pariétal en particulier.
1.2.1. La reconnaissance de l’art pariétal paléolithique
28Nous observons au tout début de ce siècle une quasi‑simultanéité entre la naissance d’une vocation pour une discipline en partie orientée sur l’art des grottes et des abris et l’amorce d’une prise de conscience de ce phénomène archéologique par l’ensemble de la communauté scientifique.
29« Je désirais me faire une opinion personnelle basée sur l’examen direct des représentations animales de La Mouthe […] J’ai passé près de cinq heures, à les étudier, et c’est sans réserve que j’admets leur authenticité » (Anonyme 1967 : 18). Cette prise de position ferme, induite par les travaux de E. Rivière, fut corroborée par ses observations faites au cours de ses visites de 1898 et de 1899 à Pair‑Non‑Pair. Le contexte archéologique de cette cavité, contexte qui faisait défaut à La Mouthe, au sein duquel l’association de l’art et des niveaux archéologiques en place marquaient leur contemporanéité, orienta son jugement.
30L’objectif initial des premiers chercheurs s’assimilait à une reconnaissance de leurs découvertes, démarche qui les incita à reproduire avec une grande vérité les manifestations graphiques et picturales paléolithiques. En conséquence, ils usèrent surtout de l’estampage, du moulage et de la photographie. Il était impératif de démontrer l’existence de cet art spécifique du domaine souterrain naturel et de mettre en exergue l’étroite association de l’œuvre anthropique et de la paroi. La reproduction s’identifiait alors davantage à un fac‑similé qu’à un simple relevé.
31Dès les premiers travaux de l’abbé Breuil cette notion sembla quelque peu s’estomper, étant entendu que l’art pariétal paléolithique était reconnu, depuis peu, en tant que tel. Il le fut officiellement au cours de l’excursion de l’Association française pour l’avancement des sciences, en août 1902, sur le site de La Mouthe. Favoriser cet aspect du problème ne se révélait donc plus indispensable.
32A partir de 1900 les découvertes se multiplièrent, aussi bien dans le sud de la France que dans le nord de l’Espagne. Il était donc indispensable pour H. Breuil d’élaborer une méthodologie mieux adaptée à une action rapide et fiable. Il écarta l’estampage, procédé trop lourd à mettre en œuvre et trop encombrant pour un inventaire exhaustif. Il préféra à la photographie le relevé à vue pour les supports fragiles et la copie par décalque pour les parois moins friables. Cette action se limita, du moins pour les gravures, à une reconnaissance des formes et des contours des figures animales et des signes. Au stade final de la reproduction, les informations relatives à la largeur ou à la profondeur du tracé n’étaient pas portées. La détermination de l’imagerie paléolithique primait sur l’analyse technologique du tracé ou la recherche des rapports entre l’œuvre et son support.
1.2.2. Méthodologie
33En octobre 1900, à la demande de E. Rivière, l’abbé Breuil réalisa ses premiers relevés dans la grotte de La Mouthe (fig. 16). A partir de 1901 ils furent reproduits à plusieurs reprises, notamment dans le Bulletin de la société d’anthropologie de Paris et les Mémoires de l’académie des sciences (fig. 17).

● Fig. 16 – Bouquetin, salle de la Hutte, grotte de La Mouthe.
Relevé H. Breuil, 1900. Coll. Musée du Périgord.

● Fig. 17 – Equidé (17a) et cervidé (17b), salle des Rennes, mammouth (17c), salle de la Hutte, grotte de La Mouthe (Dordogne).
Relevés H. Breuil, 1900 (Rivière 1901).
34Sa méthode de travail nous est rapportée en ces termes : « Utilisant un papier cristal, celui des fleuristes, après l’avoir vigoureusement froissé afin qu’il adhère plus facilement à la surface irrégulière de la paroi rocheuse, H. Breuil exécutait un calque direct du dessin gravé à l’aide d’un gros crayon bleu gras. Un éclairage, généralement placé sur la gauche, était maintenu ou au contraire déplacé selon les incidences successives, de façon à obtenir une lumière frisante mettant en relief les traits des gravures à calquer. Plusieurs feuilles de papier cristal étant nécessaires, parfois, pour le relevé complet d’un élément, H. Breuil utilisait alors des points de repère pour le raccordement ultérieur des divers calques. Le calque direct terminé, l’œuvre d’art ainsi relevée était reportée à l’encre de Chine sur un papier blanc » (Anonyme 1967 : 68) (fig. 18).

● Fig. 18 – Relevé au crayon gras d’un motif pariétal sur feuille de papier cristal préalablement froissée afin d’accroître sa plasticité pour lui faire épouser avec beaucoup plus de facilité le relief de la paroi (Anonyme 1967).
1.2.3. Le relevé du grand plafond de la grotte d’Altamira
35Son expérience du relevé se limitait alors à quelques opérations ponctuelles effectuées au cours des années 1900, 1901 et 1902 dans la grotte de La Mouthe, celles des Combarelles, de Font‑de‑Gaume et de Marsoulas, lorsqu’à partir du 1er octobre 1902 et sous l’autorité de E. Cartailhac, il entreprit le relevé, dans son intégralité, du Grand Plafond de la grotte d’Altamira, en Espagne. Leur démarche eut pour origine la visite de la grotte de Marsoulas. Les interprétations issues des observations faites dans cette cavité confirmaient celles réalisées dans les cavernes du Périgord noir. Le moment était venu d’admettre et de conforter les hypothèses échafaudées sur les œuvres pariétales d’Altamira quelque vingt années auparavant par M. de Sautuola.
36Les travaux de reproduction demandèrent trois semaines de travail fastidieux. Dans sa monographie sur cette grotte H. Breuil nous expose brièvement l’action qu’il a menée au cours de son premier séjour : « Sur un premier croquis très sommaire, fait à main levée, des dimensions étaient inscrites au fur et à mesure que l’un de nous, étendu sur le sol, indiquait à son compagnon les points extrêmes de l’espace à mensurer [sic]. Ensuite, par un travail exécuté au décimètre à l’échelle d’un cinquième, toujours en vue de la fresque originale, un dessin au crayon était dressé ; toutes les fois qu’il était nécessaire, de nouvelles mensurations venaient contrôler les premières. Ensuite le dessin au crayon était reporté par décalque en bleu sur une seule feuille de papier qui recevait l’exécution de la figure en couleur, exécutée au pastel et à l’estampe, toujours en face de l’original antique. La vivacité des couleurs anciennes des fresques d’Altamira est généralement assez grande pour que le copiste moderne n’ait pas besoin de les accentuer, mais dans la caverne elles se marient avec la teinte roussâtre du fond rocheux, tandis que la blancheur du papier donne à nos reproductions une brusquerie de relief et de contour qui n’est pas conforme à l’impression produite par la vue des fresques elles‑mêmes. Pour plusieurs animaux, nous nous sommes heurtés à de particulières difficultés, par suite de leur situation sur des bosses en haut relief. Nous avons alors pris tout d’abord le dessin très exact et mensuré avec précision les contours de chacun, ensuite, nous avons supposé un aplanissement régulier de toute la bosse qui maintienne chaque partie à une distance constante de la périphérie. Par ce moyen nous avons obtenu des projections planes aussi exactes que possible. En aucun cas, la photographie ne peut saisir plus d’une face de ces bosses, et le contour opposé à la lumière ou à l’objectif disparaît totalement » (Cartailhac 1906 : 78) (fig. 19).

● Fig. 19 – Relevé d’un dessin de cervidé, grotte d’Altamira (Espagne). En cartouche, croquis servant de support aux mensurations, esquisse au crayon exécutée in situ à l’échelle 1/5. D’après H. Breuil, 1902 (Cartailhac 1906),
1.2.4. Font‑de‑Gaume
37Ces procédés d’analyse, simples mais relativement précis, devaient être exploités pendant plus d’un demi‑siècle par H. Breuil. D’Altamira à Font‑de‑Gaume, du Périgord aux Pyrénées, du Levant espagnol à l’Afrique du Sud, les relevés se multiplièrent. Son activité exceptionnelle est à l’origine d’un corpus imposant dont une des particularités réside dans son homogénéité. Le fait qu’une même personne se soit astreinte pendant des années à observer une certaine continuité dans sa méthodologie conduit en quelque sorte à une normalisation des résultats acquis. Cette particularité favorisa l’analyse comparative des œuvres pariétales paléolithiques, donnant ainsi la possibilité d’amorcer une approche statistique des problèmes qui s’y rattachent, notamment ceux relatifs à la chronologie de cet art des grottes et des abris, à la recherche d’une unité ou d’une évolution stylistique des œuvres.
38Le travail de relevé des peintures et des gravures de la grotte de Font‑de‑Gaume, ébauché peu de temps après la découverte, à la fin de l’été 1901, se poursuivit jusqu’en 1906. La première phase des opérations de copie, déjà éprouvée à La Mouthe, reste inchangée. La qualité de la paroi rocheuse permettait d’apposer un support translucide et donc le décalque direct des tracés paléolithiques. Seul le report sur une feuille opaque subit quelques modifications : « A Font‑de‑Gaume, les fresques présentent une grande résistance, et peuvent être calquées sans difficulté, chose qui était impossible à Altamira. Aussi M. Breuil a‑t‑il calqué toutes les figures à leur vraie grandeur ; il a réduit leur silhouette à une échelle uniforme de un cinquième, au moyen de la chambre claire ; sur ce croquis réduit, un dessin plus détaillé et plus fouillé était exécuté, et ensuite le pastel définitif. Toutes ces opérations ont été faites sur place ; aucun coup de crayon ou d’estompe n’a été donné en dehors de la grotte, exception faite, naturellement, du travail de réduction. […] Nous nous sommes préoccupés d’obtenir des photographies, permettant de se rendre compte de l’état réel des fresques. Après bien des efforts infructueux nous avons pu obtenir des épreuves utilisables comme contrôle des relevés […] » (Capitan 1910 : 17‑18).
39L’utilisation de la chambre claire ne fut effective que pour le relevé des peintures. Les gravures, en fait, ne réclamaient qu’une seule intervention par figure, comme ce fut le cas pour la grotte des Combarelles, découverte elle aussi en septembre 1901. Elle fit également l’objet d’une importante monographie.
1.2.5. Espagne et Afrique du Sud
40Sollicité pour toute nouvelle découverte, H. Breuil intervenait sur chaque site afin d’en étudier les témoignages paléolithiques et relever les vestiges pariétaux, Combarelles et Font‑de‑Gaume puis Bernifal et Teyjat. A partir de 1906, il rejoignit en Espagne H. Alcalde del Rio et le père Lorenzo Sierra pour une étude des grottes Cantabriques : « […] il revit avec eux les dessins peints et gravés de Covalanas, de la Haza, de Hornos et de Castillo ; il retoucha les relevés déjà faits, les augmenta de nombreux dessins déchiffrés pour la première fois, et soigneusement copiés » (Alcalde del Rio 1912 : V‑VI).
41Bien qu’appartenant à une culture postpaléolithique, nous ne pouvons passer sous silence le travail considérable réalisé par H. Breuil sur les peintures et gravures rupestres de la péninsule Ibérique. Plusieurs missions furent nécessaires, échelonnées sur cinq années, de 1912 à 1918, et totalisant deux cent cinquante jours de terrain. Il en fut de même, mais beaucoup plus tard, pour les recherches effectuées en Afrique du Sud pendant et après la Seconde Guerre mondiale. Au cours de longs séjours, en collaboration avec M.‑E. Boyle, ils inventorièrent et relevèrent les innombrables vestiges d’un art schématique présent dans de nombreux abris.
1.2.6. Ariège
42Entre‑temps, de nouvelles découvertes retinrent son attention, en Espagne d’abord, avec La Pasiega et La Pileta (1911), puis en France, avec le Tuc‑d’Audoubert (1912) et la grotte des Trois‑Frères (1914). L’étude et la publication des relevés des deux grottes espagnoles s’effectuèrent dans des délais très brefs (1913‑1915). Il n’en fut pas de même pour les cavités jumelles de l’Ariège. L’extraordinaire enchevêtrement des multiples figures surtout gravées de ces deux sanctuaires contraignit H. Breuil à séjourner dans cette région un mois d’été par an, en 1912 puis de 1930 à 1938. Le remarquable et fastidieux travail de relevé qu’il entreprit jour après jour est certainement l’un des piliers majeurs de l’œuvre monumentale de ce chercheur (fig. 20) : « […] je me mis à décalquer les effroyables chevelus du « Sanctuaire » et les autres figures des Trois‑Frères. J’étais alors littéralement noyé dans la masse de ces feuilles de décalques » (Anonyme 1967 : 45).

● Fig. 20 – Relevé du volet dextre du panneau central de l’Abside, grotte des Trois‑Frères (Ariège).
Relevé H. Breuil, 1930‑ 1938 (Bégouën 1958).
43Le 2 juillet 1940, un accident le priva momentanément de ses facultés visuelles. Il ne recouvra la vue que quelques semaines plus tard. Cet épisode marqua un ralentissement sensible de son activité au sein des grottes profondes : « Les années ayant couru, j’ai dépassé le seuil de la vieillesse et dû renoncer à relever personnellement les grottes découvertes dans les Pyrénées par MM. Casteret et Trombe (Montespan, La Bastide), et durant ou depuis la guerre, dans la basse vallée du Rhône, principalement par l’abbé Glory » (Breuil 1952 : 16).
44Malgré l’extraordinaire découverte que représentait Lascaux, il ne fit qu’ébaucher seulement une campagne de relevé, notamment dans le diverticule aux Félins et le diverticule Axial. Il chargea par la suite F. Windel de la réalisation de la couverture photographique de cette cavité et M. Thaon des premiers travaux de décalque. Celui‑ci limita son action à la copie de certaines figures de la salle des Taureaux et du diverticule Axial à l’aide d’une chambre claire (fig. 21).

● Fig. 21 – Les chevaux » chinois », diverticule Axial, grotte de Lascaux.
Relevé M. Thaon, 1940‑1945
1.2.7. Amédée Lemozi – Grotte de Pech‑Merle
45Nous ne pouvons toutefois clore ce chapitre sans citer les travaux de l’abbé Amédée Lemozi, contemporain de l’abbé Breuil, et évoquer brièvement le procédé de copie qu’il créa en 1923 pour le relevé du panneau des Hiéroglyphes de la grotte de Pech‑Merle, dans le département du Lot.
46Reprenant la méthode du carroyage, communément utilisée par les copistes pour reproduire à l’échelle souhaitée les dessins ou les tableaux de Maîtres, il l’adapta aux conditions particulières dictées par la localisation « plafonnante » et les vastes proportions du sujet étudié : « Nous avons dû circonscrire les parties du plafond gravé avec des cordes se coupant en petits losanges. En prenant successivement chaque losange, le travail nous a été plus facile » (Lemozi 1929 : 41).
47Les points d’ancrage des cordes, disposés de manière très aléatoire à la périphérie du panneau à relever, supposaient la formation de quadrilatères irréguliers qu’il cotait avec précision et reproduisait en fonction de l’échelle fixée. L’écartement par rapport à la paroi de la grille ainsi construite devait être minimum, afin de réduire les erreurs de parallaxe. Le relevé proprement dit des tracés digités, dont l’aire d’exécution fut arbitrairement fractionnée, s’effectuait à vue. Les éléments de la mosaïque étaient par la suite regroupés puis assemblés. C’est sans doute en France le seul exemple d’utilisation d’un carroyage pour la reproduction des motifs pariétaux, méthode pourtant très développée dans l’étude de l’art sous abri ou sur bloc, notamment en Australie.
48La restitution finale de certains relevés issus de cette méthode ou du procédé traditionnel de décalque s’accompagnait quelquefois d’une évocation de l’environnement immédiat des figures, démarche préfigurant le souci du contexte qui, de nos jours, tient une place prépondérante dans les recherches (fig. 22).
1.3. La période transitoire
49A ce travail, systématique et monolithique, assumé dans sa presque totalité par H. Breuil, succéda une période transitoire au cours de laquelle ses disciples mirent à profit son enseignement, tout en conservant l’emploi des techniques traditionnelles de relevé maintes fois sollicitées au cours des longues incursions dans l’espace hypogé paléolithique. Au crépuscule de sa vie, il consentit à prendre des dispositions testamentaires relatives à son œuvre scientifique, commencée avec ce siècle, mais qu’il ne put achever.
1.3.1. André Glory – Grotte de Lascaux
50Son plus proche collaborateur, l’abbé A. Glory, se vit confier cette mission ; mais il devait décéder onze ans plus tard, le 29 juillet 1966.
51L’activité d’A. Glory fut dominée par les recherches qu’il engagea aussi bien dans les grottes de l’Ardèche qu’en Dordogne et notamment dans la grotte de Lascaux, sous la direction de H. Breuil, du moins pendant les premières années. C’est ainsi que, de 1952 à 1962, il acheva le relevé des gravures et des peintures du Passage, de l’Abside (fig. 23), du Puits et du cabinet des Félins, mais il ne put terminer celui de la Nef. Il accumula les documents graphiques ainsi réalisés et conserva pour étude le matériel archéologique provenant des fouilles menées près de l’entrée et à la base du Puits. Les résultats acquis ne furent analysés et publiés que beaucoup plus tard.

● Fig. 23 ‑ Ensemble des bouquetins, Abside, grotte de Lascaux,
Relevé A. Glory, 1953‑1962. Coll. M.H.
52Le bilan remarquable des deux premières années passées à déchiffrer la quasi‑totalité des figures de cette grotte et des neuf années suivantes à réaliser leur relevé permet d’avancer le chiffre de 1 433 représentations identifiées, dont la plupart furent copiées. L’inextricable enchevêtrement des figures gravées appartenant au secteur sud de la cavité et en particulier à la zone médiane, plus communément appelée Abside, ainsi qu’au diverticule aux Félins, détermina une approche plus rigoureuse et un matériel mieux adapté.
53Il procéda au relevé planimétrique de l’espace considéré puis à sa sectorialisation. La ségrégation des motifs anthropiques et des accidents naturels était facilitée par l’emploi d’éclairages portatifs, pouvant être déplacés à volonté afin de mieux cerner les tracés incisés. La localisation plus précise de chaque élément pictural était rendue possible par un repérage exact, s’appuyant sur les figures isolées ou les plus visibles. L’accès au registre supérieur de la rotonde aux Cerfs nécessita la pose d’un échafaudage tubulaire, ce qui facilita la détermination puis le décalque des figures. L’abbé Glory choisit un transfert de l’image sur un matériau transparent, en l’occurrence une pellicule cellulosique ou cellophane, imprégnée de matière caoutchoutée afin de la rendre inaltérable à l’humidité. Le calcaire, très pulvérulent par endroits, interdisait cependant d’apposer directement et dans sa totalité le plan récepteur sur la paroi. Seuls quelques points plus sains du support lithique permettaient le contact direct d’un côté seulement du calque sur la paroi, tandis que l’autre extrémité était maintenue par un ou deux aides. Un crayon gras et un assortiment de crayons de couleur rendaient plus intelligible la différenciation des vestiges paléolithiques et des contours naturels, des fissures ou de la calcite. Les tracés peints étaient dissociés des gravures et reportés sur des calques différents.
54L’enregistrement achevé, le document était ensuite tendu sur une planche à dessin pour un contrôle et un renforcement des lignes principales. Une dernière vérification consistait à replacer cette copie dans sa position initiale. Les mensurations prises in situ permettaient le réajustement de chaque élément de la mosaïque, opération réalisée au pied du panneau original. L’assemblage se poursuivait en laboratoire, où le montage ainsi obtenu était, par la suite, réduit à l’échelle 1/5 ou 1/10, à l’aide d’une chambre claire.
1.3.2. Les premiers problèmes de conservation
55Au cours des jours passés sous terre à suivre les contours des tracés paléolithiques, A. Glory décela les premiers symptômes d’altération de ce milieu, phénomènes consécutifs aux visites touristiques dont la grotte faisait l’objet. Simultanément les autorités chargées de la surveillance et de la conservation du site engagèrent une action susceptible d’enrayer ce mécanisme évolutif. Les indices se révélaient par la formation de gouttelettes d’eau perlant à l’interface roche‑air. Celles‑ci entraînaient dans leur chute les pigments d’origine anthropique. Une étude approfondie permit d’établir que l’excès de gaz carbonique, induit par la respiration des visiteurs, provoquait une acidification de la vapeur d’eau expirée. En se condensant sur les parois, elle favorisait une corrosion des matériaux carbonatés, support des pigments anthropiques. Des causes naturelles amplifiaient ce phénomène, l’une liée à la configuration de la cavité au profil longitudinal descendant, configuration favorisant la stagnation du gaz carbonique, l’autre induite par la présence, à la base du Puits, d’une source intermittente du même gaz, issu des niveaux inférieurs du réseau, secteur resté jusqu’à présent impénétrable.
56En 1958, la Conservation régionale des monuments historiques d’Aquitaine, sous la direction de M. Sarradet, mit en œuvre l’implantation, sur les premiers mètres de la galerie, d’une machine de régénération de l’atmosphère dont le principe de renouvellement de l’air s’identifiait à celui des sous‑marins. Elle permettait un dépoussiérage et une décarbonatation de l’air, ainsi qu’une stabilisation de la température à 14° C et une humidification assurant un taux d’hygrométrie voisin du point de rosée (98 %). Le cours des visites n’en fut pas pour autant modifié et son régime maintenu à un niveau supérieur à mille huit cents visiteurs par jour.
57Cependant, quelques années plus tard, en hiver 1962‑1963 plus précisément, on vit assez rapidement se développer des taches vertes à proximité de certaines figures de la salle des Taureaux (sabot arrière droit du deuxième taureau) et du diverticule Axial (paroi droite de la galerie). Près de l’orifice de reprise d’air de l’installation de climatisation, le phénomène était beaucoup plus accentué. Ces taches vertes sur les parois dénonçaient la présence de colonies d’algues apportées antérieurement par les touristes et entretenues par un éclairage peu atténué et un système de régénération de l’air mal adapté à ce milieu.
58En mars 1963, le ministère des Affaires culturelles désigna alors une commission pour une étude scientifique de sauvegarde des peintures et des gravures et fit fermer la grotte le 20 avril de la même année. Mais, après avoir mis un terme à la fréquentation intensive du site, on n’enregistra cependant aucune décrue du nombre de colonies algales qui migraient rapidement et se développaient pourtant sans apport organique extérieur, ni lumière excessive. Une étude plus minutieuse, menée par le docteur Pochon et les professeurs Laporte et Lefèvre, apporta des arguments nouveaux. En fait, l’entretien de ce phénomène, voire son extension, étaient favorisés par un milieu riche en bactéries les plus diverses. De la destruction de ces micro‑organismes dépendait la résorption de la contamination algale.
59Un traitement chimique antibactérien à base de pénicilline, d’auréomycine et de streptomycine, associé à une pulvérisation dans l’atmosphère de solutions formolées à faible concentration eurent raison de cette pollution, car très rapidement on enregistra un net recul puis une disparition totale de la « lèpre verte ».
60Parallèlement au développement de ces bioaltéragènes, on observa la formation de légers voiles carbonatés à la hauteur de la frise des Cerfs en particulier. Une surveillance constante des paramètres thermiques et hygrométriques s’avéra nécessaire. Actuellement, une circulation naturelle de l’air permet des échanges gazeux, régulée par des sas, maintenant un écart annuel de température n’excédant pas le demi‑degré. Seule une installation frigorifique, à l’entrée de la cavité, se substitue, en automne, aux variations saisonnières du débit des eaux de ruissellement de l’entrée qui entretiennent naturellement un point froid et autorisent les échanges thermiques entre les différentes parties de cet espace souterrain.
61Les visites annulées, les altéragènes éliminés et les conditions climatiques recréées sont autant de faits qui redonnèrent aux œuvres pariétales de la grotte de Lascaux leur éclat initial, du moins au jour de leur découverte.
62Les prises de position, consécutives à l’apparition puis à l’évolution des altéragènes et celles relatives aux travaux de conservation dont la cavité fait l’objet depuis, eurent pour effet de provoquer une sensibilisation aux problèmes de conservation aussi bien de la part du monde scientifique que du grand public. Il devint alors évident que l’espace souterrain, loin d’être figé, évoluait beaucoup plus rapidement qu’on ne le supposait, sous des contraintes naturelles certes, mais aussi anthropiques. Les conséquences découlant des observations faites sur ce site provoquèrent la mise en place d’une réglementation beaucoup plus stricte des conditions d’ouverture aux touristes des grottes et des abris ornés. Un contingentement des visites, fixé de manière spécifique à chaque cavité, et une surveillance accrue des parois et des sols de circulation s’imposèrent.
63Les sites sensibles, tels que Font‑de‑Gaume, Niaux, La Mouthe, Baume‑Latrone, la Tête‑du‑Lion ou Gargas, entre autres, sont, à l’heure actuelle et à l’image de Lascaux, régulièrement suivis, cette opération étant assurée par le Laboratoire de recherche des monuments historiques.
64Les travaux de recherche sur l’art pariétal paléolithique sont désormais soumis à autorisation, délivrée par la Sous‑direction de l’archéologie, Direction du patrimoine, après avis favorable du Conseil supérieur de la recherche archéologique et de la IVe section de la Commission supérieure des monuments historiques, section « grottes ornées » qui fixent les modalités de réalisation des relevés. A l’issue de chaque campagne de relevé, les documents graphiques et photographiques sont mis en dépôt au Département d’art pariétal du Centre national de préhistoire pour en assurer la conservation. Outre ce rôle conservatoire, ce service, de création récente, a pour vocation de répondre aux impératifs de la recherche, en regroupant toute l’information relative au domaine souterrain en général et à l’art pariétal préhistorique et protohistorique en particulier et constituer ainsi une banque de données à la disposition des chercheurs et éventuellement des médias.
65Pure coïncidence ou évolution normale de la technologie appliquée aux relevés, dès cette époque, on remarque une certaine métamorphose des procédés d’enregistrement graphique des vestiges pariétaux. Nous sommes alors fort éloignés de l’emploi de la lottinoplastie, de l’estampage au plâtre ou à l’argile ou du relevé sur papier translucide amené au contact des figures pariétales. La commercialisation de nouveaux matériaux aux qualités optiques et mécaniques remarquables suscita une approche moins abrupte des œuvres et une observation maximum de l’intégrité de la paroi rocheuse. Les efforts portèrent sur la recherche d’instruments de mesure mieux adaptés aux contraintes imposées par ce milieu, c’est‑à‑dire d’une totale innocuité pour les représentations pariétales et l’élaboration de matériels d’enregistrement plus précis, autorisant une restitution fidèle de la forme et des composantes chromatiques du sujet.
1.3.3. Le relevé des gravures de Bara‑Bahau
66Déjà en 1955 A. Glory mit en œuvre une procédure originale lors du relevé des gravures de la grotte de Bara‑Bahau. La faible résistance de la roche en place, qualifiée de « fromage blanc », dicta une approche spécifique. Il fit dresser des échafaudages jusqu’à la voûte, puis amena une grande feuille transparente parallèlement à la paroi en encorbellement, sur laquelle il put prendre appui pour effectuer le travail de copie : « […] avec le concours de deux aides qui maintenaient à quelques centimètres des figures une grande plaque semi‑rigide en plexiglas, il décalqua les gravures en projection sur la plaque à l’aide de crayons spéciaux. Les dessins compartimentés furent reportés sur des coupons de papier cellophane et l’ensemble des cellophanes furent ensuite assemblés dans un atelier de dessin. On déroula sur ces fragiles panneaux exécutés dans la grotte, de larges bandes de papier translucide Canson, sur lesquelles furent reportées au crayon comté [sic] les figures définitives. Ces tapisseries ornées de grands animaux, suspendues aux murs de l’atelier, ont été finalement réduites au dixième à la chambre claire. Cette méthode […] laquelle demande 14 opérations successives, élimine ainsi toute fantaisie personnelle, garantit les formes des dessins, fait ressortir des détails qui échappent à la photographie et sauvegarde surtout les lignes authentiques » (Glory 1955 : 11) (fig. 24).

● Fig. 24 – Panneau du registre supérieur regroupant chevaux, aurochs et bison, grotte de Bara‑Bahau.
Relevé A. Glory, 1955 (Glory 1955).
1.3.4. Les travaux de Léon Pales
67L’orientation méthodologique de ces vingt dernières années allait être donnée consécutivement aux recherches engagées dès 1956 par L. Pales sur le mobilier magdalénien de la grotte de La Marche, près de Lussac‑les‑Châteaux dans la Vienne. Ces travaux transposés et adaptés au contexte souterrain se révèlent comme les fondements mêmes de la démarche actuelle.
68Cette étude des gravures paléolithiques incisées sur plaquettes et sur blocs rocheux issus des fouilles menées dans cette cavité impliqua l’utilisation conjointe de la photographie, de l’estampage et du calque. D’une manière générale, le processus d’analyse et de relevé se déroulait ainsi :
-
examen des accidents naturels du support lithique afin d’y déceler d’éventuelles traces d’aménagements, et prise en compte de la nature même du matériau ;
-
analyse de la pièce pour rechercher les rapports entre le ou les thèmes gravés et sa morphologie générale ou locale, pouvant suggérer dans certains cas une silhouette animale ou humaine, commune aux thèmes traditionnels de l’iconographie préhistorique, dénonçant ainsi une prédestination du bloc brut et une implication possible du contour dans le choix du sujet esquissé ;
-
lecture des gravures, à l’œil nu ou à travers une loupe ordinaire, éclairées par une lumière artificielle soit diffuse ou dirigée, soit les deux habilement conjuguées ; l’emploi d’une binoculaire était rendu nécessaire pour l’analyse technologique du trait ;
-
décalque direct de l’original pour les pièces suffisamment grandes et ne présentant pas de détails trop ténus ;
-
photographie sous divers angles d’éclairage et décalques à partir de ces documents pour les motifs miniaturisés ;
-
estampage à la plastiline et photographie de l’empreinte afin de restituer au sujet sa position d’origine et faciliter l’analyse technologique du trait, relative non seulement à son profil mais aussi à sa continuité ;
-
traduction de chaque sujet isolé sur le plan tableau par une couleur sélective ;
-
mise au net des relevés sur bristol, en usant d’une table lumineuse.
69Chaque phase s’accompagnait d’une référence constante à l’original, mais toutes n’intervenaient pas nécessairement dans l’étude, car certaines pièces, très sobrement décorées, révélaient un tracé simplifié et net ne justifiant en aucun cas une approche plus fine.
70Cette méthode, menée avec une rigueur mathématique et fondée sur l’enregistrement total des traits, suggéra la réalisation de relevés de très haut niveau (fig. 25). Cependant, son application au domaine souterrain ne peut être que partielle, car les conditions d’observation dans ce milieu nécessitent, par rapport à celles rencontrées en laboratoire, une adaptation spécifique à la fois à la grotte à étudier et à l’œuvre à relever. Pourtant, les grandes lignes de cette méthodologie seront ultérieurement reprises et modifiées en conséquence pour répondre, d’une part, au changement de milieu et, d’autre part, à l’évolution technologique qui caractérise la période suivante.

● Fig. 25 – Enchevêtrement d’incisions sur un petit bloc de calcaire. L’analyse révéla la présence de nombreuses figures parmi lesquelles un mammouth, un équidé, deux anthropomorphes et un ours.
Relevé L. Pales (Pales 1981).
1.4. Les recherches actuelles
71Les découvertes reconnues d’art pariétal paléolithique en France ont été le fait d’archéologues et de spéléologues, ces derniers plus présents surtout après la Seconde Guerre mondiale. Peu fréquentes sont les inventions fortuites, mais en contrepartie souvent plus spectaculaires, comme celles de Lascaux ou de Gabillou par exemple. Cet état de fait souligne l’intentionnalité qui caractérise cette approche et témoigne des difficultés rencontrées au cours des campagnes de prospection au sein du monde souterrain.
1.4.1. Prospection et caractérisation des recherches
72L’histogramme événementiel (fig. 26), traduisant la chronologie des découvertes par périodes quinquennales, rend compte de l’évolution quantitative des inventions de grottes et abris ornés réalisées de la fin du siècle dernier à nos jours. On remarque que la courbe enveloppe accuse une double inflexion, soulignant un ralentissement des activités, phénomène imputable aux guerres de 1914‑1918 et de 1939‑1940. L’accroissement progressif du nombre d’adeptes de la spéléologie a permis de compenser, voire, de renverser l’inévitable infléchissement qui aurait dû marquer cette évolution si la fréquence des prospections était restée constante.

● Fig. 26 – Chronologie des découvertes de grottes et abris ornés regroupées par périodes quinquennales.
73Le fait marquant des recherches engagées depuis ces dernières années est assurément le caractère pluridisciplinaire des équipes. Chaque intervention sur le site implique, actuellement, outre l’activité traditionnelle, l’intégration d’éléments d’étude émanant d’horizons aussi distincts que l’ethnologie, la karstologie ou la climatologie, mais aussi la photogrammétrie, la statistique ou l’informatique.
74L’accélération du rythme des découvertes eut pour effet l’augmentation du nombre de chercheurs. Parallèlement à ces faits, la nécessité d’une méthodologie adaptée aux particularités du sujet étudié entraîna un foisonnement en même temps qu’une amélioration des procédés de relevé qu’un souci de conservation, lié aux œuvres préhistoriques, favorisa. Le matériel et les types de projections initiaux restent inchangés, à savoir : le relevé par projection de l’image anthropique sur un support transparent, l’estampage et la photographie. Plusieurs opérations menées au cours de cette période, aussi bien en Ardèche, en Ariège, dans le Lot ou en Dordogne, reflètent cet état nouveau.
1.4.2. Le relevé sur support transparent
1.4.2.1. Le procédé L. Chabredier
75En 1964, à l’instigation du ministère de la Culture et en collaboration avec L. Chabredier, J. Combier, directeur des Antiquités préhistoriques de la région Rhône‑Alpes, fut chargé d’organiser une campagne de relevés des gravures et des peintures paléolithiques des gorges de l’Ardèche et notamment celles des grottes du Colombier, de Chabot, d’Ebbou, du Figuier, d’Oullins et de la Tête‑du‑Lion. Désirant d’une part répondre aux impératifs présents, et, d’autre part obtenir des résultats répétitifs et donc comparables, L. Chabredier mit au point une méthode originale de transfert de l’image pariétale.
76Sur des châssis modulaires en bois ou métalliques étaient tendues des feuilles transparentes de polychlorure de vinyle. Les dimensions des éléments combinables des cadres s’échelonnaient entre 24 et 130 cm, écart imposé par les proportions minimales des figures et l’exiguïté des conduits. Un tripode soutenait cette armature, qu’un système de rotules, de crémaillères et de tubes coulissants aidait à amener dans sa position optimale de travail. La hauteur et l’inclinaison du plan tableau pouvaient ainsi être réglées avec précision et avec facilité. La projection virtuelle du tracé anthropique sur le support synthétique positionné subparallèlement à la paroi était orthogonale. Un bras articulé permettait le déplacement dans le plan tableau d’une lunette à réticule, fixée à son extrémité libre, pour suivre les contours incisés ou peints, les accidents rocheux, les fissures, les cupules, les placages d’argile et les encroûtements, tout en conservant l’orthogonalité de la projection.
77Le tracé, synchrone au déplacement du réticule, s’opérait par l’intermédiaire de crayons, aux couleurs spécifiques de la nature des éléments relevés. La peinture à l’huile, seul matériau adhérant convenablement au PVC, traduisait les aplats, mais les temps de séchage s’avéraient très longs.
78En préambule, il enregistrait les dimensions du sujet prises par triangulation, valeurs qu’il consignait sur un croquis esquissé à vue ou à la chambre claire. Parallèlement, il lui annexait les données relatives à l’orientation et à l’inclinaison du cadre, lues sur éclimètre et contrôlées par des niveaux à bulle ou à bille. En atelier les différents relevés étaient ensuite aboutés et reportés sur du papier calque, puis transposés sur du papier à dessin ou sur une toile en vue de la restitution définitive.
79Un dispositif fondé sur un principe analogue a été élaboré puis expérimenté par M. Archambeau, de 1978 à 1983 pour le relevé des représentations anthropomorphes de la grotte des Combarelles I. Le caractère modulaire du cadre ne fut pas retenu, car l’exiguïté de la galerie et la relative similitude de proportions des sujets étudiés justifiaient l’emploi d’un seul type de châssis aux cotes limitées à 50 x 50 cm. Une vitre se substituait à la feuille de polychlorure de vinyle, artifice qui conférait au plan tableau la rigidité nécessaire à l’appréciation du relief traduit ultérieurement en courbes de niveau. Le cadre était assimilable à un repère cartésien orthonormé, lui‑même partie intégrante du référentiel défini par la cavité. Un index monté sur deux axes perpendiculaires et actionné par des vis micrométriques autorisait la localisation (X, Y) de chaque point du support lithique dont on désirait mesurer l’écartement (Z) par rapport au plan tableau. Le nombre de points semés par surface unité variait en fonction du profil plus ou moins tourmenté du sujet et suivant la fidélité de représentation « altimétrique » souhaitée. Le dessin précis des contours anthropiques était assuré par un montage associant au traceur un rai de lumière, maintenu rigoureusement perpendiculaire au plan récepteur. L’ensemble, fixé sur un pied photographique, s’orientait grâce à une tête pivotante montée sur une crémaillère.
80Le travail en laboratoire se limitait à une retranscription sur calque des données graphiques enregistrées, complétée par une analyse des traits, rendus suivant un code précis, et du support, révélé par des courbes de niveau.
1.4.2.2. Le relevé des gravures de l’Aldène
81Un procédé reprenant partiellement celui créé par L. Chabredier, mais déployé sur une surface beaucoup plus importante, fut expérimenté sur le site de l’Aldène, dans le département de l’Hérault. En 1973 et 1974, deux missions dirigées par L. Pales furent nécessaires pour le relevé exhaustif des gravures de cette cavité.
82L’espace gravé se développait sur les deux parois subverticales et parallèles d’une galerie étroite sensiblement rectiligne. Les panneaux situés de part et d’autre de ce couloir présentaient une disproportion marquée du nombre de représentations incisées d’une paroi à l’autre. La localisation des motifs, à quelques mètres au‑dessus du sol actuel, impliqua la mise en place d’un échafaudage tubulaire. La configuration privilégiée de cette galerie, favorisée surtout par la verticalité et la relative régularité des parois, dicta l’approche méthodologique du relevé qui nous est rapportée en ces termes : « Nous avons déterminé […] un point absolu 0, matérialisé dans la paroi […] par une cheville métallique ; à l’autre bout de la galerie […] nous avons fixé […] un second point de façon telle qu’un fil les reliant passe à proximité de la paroi […] où la densité décorative est la plus forte ; il s’agit d’un fil de fer galvanisé tendu sous pression, résistant donc aux variations hygrométriques et permettant la suspension des calques par unité et ensemble sans déformation notable. […] . Chaque calque porte la trace dessinée du fil de suspension (l’horizontale pratique) [...]. Ainsi nous avons effectué une sorte de quadrillage avec les supports plastiques de façon telle que la position des figures et des tracés entre eux soit invariable [...]. [...] pour pallier les distorsions inhérentes au relevé par projection […] nous avons fait des relevés supplémentaires directs ou approchés (selon la résistance du support) ; […] à plusieurs reprises nous avons complété les relevés directs par celui d’une photographie, soit une diapositive projetée sur un écran soit une photographie portée à grandeur naturelle ; […] la reproduction sur papier « optalux » en grandeur naturelle est alors effectuée, compte tenu des informations fournies par les documents réunis ; les rectifications, les aménagements de perspective, les conventions graphiques […] sont analysés puis transcrits dans le cadre de la projection générale définie par le relevé total plan » (Vialou 1979 : 15‑17).
83L’appréciation de l’orthogonalité de la projection d’un point objet sur le plan récepteur se faisait à vue, par opposition au procédé L. Chabredier qui optait pour l’emploi d’un viseur, mais l’absence de cet instrument n’apporta que des aberrations mineures, car l’écartement maximum du support par rapport à la roche encaissante n’excédait jamais 35 cm. L’ensemble des tracés fut relevé, qu’ils fussent d’origine anthropique, même d’intérêt secondaire, c’est‑à‑dire ne participant pas obligatoirement à la construction d’une figure, ou d’origine animale, comme les griffades d’ours par exemple, respectant en cela le protocole déjà établi pour le relevé des gravures sur les plaquettes de la grotte de La Marche.
84Un modèle de recherche, tel que celui énoncé précédemment, ne peut être adopté qu’en fonction de son aptitude à se plier aux exigences dictées par la morphologie des parois et la localisation des peintures ou des gravures.
1.4.2.3. La mission J. Clottes‑D. Vialou à Niaux
85Sous l’égide du ministère de la Culture, une équipe de recherche dirigée conjointement par J. Clottes et D. Vialou procéda, en 1981, au relevé des œuvres du Salon Noir de la grotte de Niaux, en Ariège, puis, l’année suivante, à celui de la totalité des figures ornant les autres parois de cette cavité. Cette mission fut suscitée par le souci de fixer, du moins sur le papier, l’état, à un moment donné, de toutes les manifestations pariétales, peintes ou gravées ; les contours de certains motifs évoluaient sous l’effet de causes mécaniques naturelles, mal définies jusqu’à présent. Les premiers effets apparurent peu après 1976 et se révélèrent par une vermiculation des pigments qui migraient à l’interface roche‑air. Parallèlement à la nécessité d’enrayer ce phénomène d’altération, il était impératif de mener une action susceptible d’enregistrer un maximum d’informations, facilement archivables, et de procéder à une transcription optimale des vestiges pariétaux.
86Si la grotte de l’Aldène fut un site privilégié par la régularité des parois et leur verticalité relative, la méthode employée dut évoluer sensiblement pour répondre aux conditions imposées par les multiples enfoncements et alcôves successifs tels qu’ils se présentent à Niaux.
87La méthodologie éprouvée sur la grotte de l’Aldène était fondée sur l’enregistrement des données à la fois par la photographie et par décalque des figures sur un support en matériau synthétique ; quelques améliorations furent apportées, induites non seulement par la morphologie des parois, mais aussi par les progrès constants de la technologie photographique. Les reliefs très accentués incitèrent à opter pour un relevé polyédrique sur feuilles transparentes maintenues parallèlement à la paroi grâce à une armature métallique épousant approximativement les variations du relief. Ce report général s’identifiait à un calque directeur ; il regroupait la totalité des figures d’un même panneau ou de plusieurs panneaux juxtaposés, autorisant en cela le positionnement précis des figures. Chaque élément décoratif était ensuite isolé et traité de manière à consigner tous les détails aussi bien anthropiques que naturels (fig. 27). Un relevé photographique, en lumière du jour et ultraviolette, complétait cet enregistrement.
1.4.3. Le relevé par estampage
88Après les fastidieux travaux d’estampage réalisés à la fin du siècle dernier par E. Rivière dans la grotte de La Mouthe, ce moyen d’investigation, lourd à mettre en œuvre et non sans conséquence pour les figures, ne tint par la suite qu’un rôle marginal. Notons seulement que peu de temps après la découverte des Combarelles, L. Capitan et D. Peyrony réalisèrent l’estampage de certaines représentations de cette cavité, et en particulier celle de la « Lionne ».
89Il fallut attendre cependant la mise au point de matériaux mieux adaptés pour qu’à nouveau ce procédé s’intégre partiellement dans la méthodologie appliquée au relevé des œuvres pariétales. Les résines élastomères silicones, aux performances mécaniques élevées et aux possibilités d’utilisation plus souple et d’une quasi‑innocuité pour l’objet à reproduire, se substituèrent aux matériaux traditionnels.
90En décembre 1965 et avril 1966, L. Balout et l’abbé A. Glory procédèrent en Périgord, puis dans le Lot, à la prise d’empreinte de certaines figures, notamment celle au tracé profondément incisé de la représentation humaine de la grotte de Saint‑Cirq, plus communément désignée sous le nom de « Sorcier », celle du bison de La Grèze et du panneau gravé de Roucadour. L’élastomère employé était le R.T.V. S 5 335. Un tel document s’avérait d’un intérêt certain dans la recherche d’une meilleure lecture des vestiges paléolithiques.
91En 1970, M. Lorblanchet, dans le cadre d’une étude de la grotte de Sainte‑Eulalie, dans le Lot, associa l’estampage aux procédés classiques de relevé. Cette activité cependant ne fut effective que dans l’éventualité d’un support lithique sain, afin de prévenir toute altération de l’œuvre considérée. Une action de même nature fut tentée par Cl. Barrière pour l’analyse des gravures sur blocs, détachés d’un plancher stalagmitique de la grotte de la Mairie à Teyjat. Elle permit en outre de reconnaître une figure supplémentaire d’équidé, noyée dans les tracés multiples qui caractérisent ce panneau.
92Cette forme de relevé appelait à une spécialisation. M. Garcia aborda cette activité par le biais des manifestations anthropiques autres que pariétales, telles que les empreintes de pieds ou de mains, vestiges subsistant surtout dans les grottes du secteur méridional du Massif central, comme l’Aldène, ou de la chaîne pyrénéenne, comme Niaux ou Fontanet. Par la suite, il devait étendre cette méthode au relevé des griffades d’ours et à celui des gravures anthropiques.
93L’estampage est appréhendé de nos jours comme un moyen d’investigation ponctuel. Dans l’immédiat, le recours à de tels procédés n’intervient que pour des opérations limitées dans l’espace et sur des motifs gravés très ténus ou des tracés fortement imbriqués.
1.4.4. Le relevé photographique
94Au cours de ces cent dernières années, l’emploi de la photographie, en tant qu’instrument de relevé, semble suivre une évolution différente par rapport aux méthodes plus traditionnelles. A la fin du xixe s., la photographie participa à la reconnaissance de l’art des grottes et des abris, en tant que document susceptible d’apporter la preuve nécessaire à l’authentification de ces manifestations pariétales. Plus tard, elle apparut comme un instrument d’intérêt secondaire essentiellement voué à l’illustration. Signalons cependant les remarquables travaux de M. Bégouën consécutifs aux découvertes des grottes des Trois‑Frères et du Tuc‑d’Audoubert. Il fixa sur plaques de verre orthochromatiques la majorité des figures de ces deux cavités. Notons aussi que ce même chercheur obtint les premiers documents couleur sur émulsion Autochrome.
95Ce n’est que depuis peu, et consécutivement à la commercialisation de films aux distributions spectrales plus étendues, et aux possibilités d’informatisation du traitement des phototypes, que les applications de la photographie vont se diversifier, et, par ce moyen, s’identifier à un véritable instrument d’analyse susceptible d’apporter des informations complémentaires, suppléant en cela aux procédés usuels.
1.4.4.1. La photographie analytique
96Tout travail de synthèse repose d’une part sur une parfaite appréhension des motifs étudiés ainsi que de leur environnement et, d’autre part, sur une information graphique, topographique et iconographique aussi exhaustive que possible. Le document photographique, par le taux d’informations très élevé qu’il renferme, est en mesure de répondre pour une large part à ces conditions.
97A. Laming‑Emperaire puis A. Leroi‑Gourhan prirent parallèlement en compte ce moyen d’acquisition de données, dans le cadre d’une approche analytique et statistique des témoignages pariétaux. Le relevé, limité au document photographique non traité, mais quelquefois doublé d’un croquis de lecture, fut nécessaire et suffisant. Cet important travail de relevé, dû en grande partie à J. Vertut et utilisé pour étayer les différentes thèses proposées, parut respectivement sous les titres, La signification de l’art rupestre paléolithique en 1962 et Préhistoire de l’art occidental en 1965.
98La souplesse du procédé incita la plupart des chercheurs à l’intégrer comme moyen d’investigation, lui donnant une importance plus ou moins grande selon les desseins fixés et la nature du contexte à étudier. La facilité d’emploi des appareils 35 mm, notamment, et le prix de revient très abordable des émulsions furent des arguments suffisamment convaincants pour être adoptés par la majorité. Cependant, la qualité d’un document et la quantité d’informations contenues, aussi bien topographiques que chromatiques, sont en photographie synonyme de grand format. Ces propriétés déterminantes amenèrent certains, dont nous sommes, à opter pour la pratique de tels instruments. Mais, si un usage ponctuel est quelquefois envisagé, un emploi systématique demeure exceptionnel. Les travaux de M. Dauvois dans la grotte du Portel en Ariège sont en ce sens à citer. A partir de 1980, il entreprit le relevé stéréo‑photographique intégral des témoignages pariétaux de cette cavité. La chambre utilisée était une 10 x 12,5 cm, format autorisant une restitution grandeur nature, ou plus, sur support papier couleur ou noir et blanc de la totalité des représentations, même de grandes dimensions.
1.4.4.2. La traduction du relief
99La transcription du relief fut un problème maintes fois évoqué ; mais il demeure encore de nos jours non résolu ou subordonné essentiellement à l’estampage. Les difficultés d’enregistrement de la troisième dimension et surtout les difficultés de traduction ultérieure sur un plan ont pour origine aussi bien des facteurs économiques que matériels. Le coût relativement élevé d’une restitution photogrammétrique n’a pas favorisé son développement. Hormis l’exemple donné par la grotte de Lascaux, intervention initialement menée dans un but surtout conservatoire plutôt qu’analytique, les relevés ayant fait appel à ce procédé restent cependant exceptionnels. Seul M. Lorblanchet l’intégra dans l’étude de la Frise Noire de la grotte de Pech‑Merle (fig. 28). Ce moyen d’investigation s’avère, semble‑t‑il, d’un usage pertinent ; mais il se heurte cependant au fait que la restitution ne peut, pour l’instant, être assurée que par un spécialiste de la photogrammétrie : « Un relevé idéal aussi fidèle et précis dans le rendu des dessins pariétaux que dans celui des formes du support devrait donc être un relevé photogrammétrique effectué par un spécialiste de l’art pariétal car le relevé photogrammétrique est fondé sur une lecture photographique qui comporte bien entendu une part d’interprétation et qui réclame donc une connaissance parfaite de la paroi ornée à reproduire » (M. Lorblanchet 1979 : 183).

● Fig. 28 – Relevé photogrammétrique de la Frise Noire, grotte du Pech‑Merle (Lot). D’après M.‑P. Lebel (Lorblanchet1982).
100Animé par un même souci, nous devions développer une instrumentation autorisant l’appréciation du relief marqué par les tracés incisés et par leur environnement lithique immédiat. Elle s’est traduite par l’élaboration de systèmes optiques appropriés au relevé aussi bien des profils de traits gravés, même finement, que de celui de sections de galerie. La restitution filaire de ces données est complétée par un relevé stéréophotographique des surfaces étudiées.
1.4.4.3. Le relevé multispectral
101Les premiers pas vers l’analyse des peintures par filtrage différentiel de la lumière commencent peu après la découverte de la grotte de Lascaux, en 1940, sanctuaire qui en fut le lieu d’expérimentation. Chargé de réaliser les études préliminaires sur ce site par l’abbé Breuil, alors dans l’incapacité de mener à bien cette tâche, F. Windels réussit à fixer les premières images infrarouges en noir et blanc d’une fresque paléolithique, grâce à l’emploi de lampes au tungstène (1948). Le but poursuivi devait permettre de répondre aux problèmes posés par les superpositions des peintures et d’établir ainsi une chronologie relative de leur réalisation. Quatre clichés de ce type figurent dans la monographie Dagand Alain2022-04-26T22:06:00DALascaux, « Chapelle Sixtine » de la Préhistoire (fig. 29).

● Fig. 29 – Bovidés, salle des Taureaux, grotte de Lascaux.
Cliché infrarouge F. Windels, 1948 (Windels 1948).
102Mais ce n’est qu’au début des années 1970 et sous l’impulsion de A. Marshack, que l’on voit, d’une part, réapparaître l’usage des émulsions infrarouges pour le relevé des peintures et, d’autre part, poindre l’emploi de la photographie de fluorescence ultraviolette, cette dernière appliquée en particulier aux fresques du Salon Noir de Niaux.
103Parallèlement à ces travaux, nous menions une action similaire dans la grotte de Bernifal, en Dordogne. Elle fut complétée par une analyse en lumière monochromatique, artifice favorisant la sélection de l’information qu’un traitement ultérieur permet d’optimiser. Mais ce n’est qu’après une étude approfondie des différents éléments entrant dans le processus photographique, source de lumière, émulsions, optiques, traitement chimique, nature de la roche et des pigments anthropiques, que nous sommes parvenu à cerner tous les paramètres.
1.4.4.4. Le traitement de l’information
104La nécessité d’optimiser les relevés obtenus par photographie et faciliter leur interprétation nous incita à nous tourner vers l’analyse des phototypes par le traitement d’image, méthode communément utilisée, notamment en astronomie ou en cartographie. En 1974 nous devions réunir les documents et les éléments nécessaires pour nous permettre d’accéder à cette nouvelle voie qui dans un premier temps se limita au procédé chimique. Les sociétés Agfa et Kodak distribuaient sur le marché un kit de traitement, l’un faisant appel à un film spécial l’Agfa‑contour, l’autre découlant de recherches effectuées par la société Kodak‑Pathé, en collaboration avec l’Institut géographique national. Nous avons testé ces deux possibilités, chacune présentant des avantages et des inconvénients, mais, pour des raisons de conservation à long terme des produits chimiques et des surfaces sensibles, nous avons préféré le procédé Kodak au procédé Agfa.
105Au tout début des années 80, l’accès à une nouvelle forme de traitement, plus rapide à mettre en œuvre et aux possibilités d’analyse beaucoup plus vastes, nous incita à saisir l’aubaine qui s’offrait à nous d’utiliser l’outil informatique. Mais seules quelques unités de recherche en France étaient susceptibles de répondre favorablement à notre demande et en particulier l’Institut d’optique d’Orsay, à qui nous devons les premières images. Ce n’est que depuis peu et avec l’arrivée sur le marché, d’une part, de micro‑ordinateurs aux performances élevées, pour un investissement modeste et un coût d’exploitation modéré et, d’autre part, de caméras CCD (Charge Coupled Device), linéaires ou matricielles, que cette forme d’analyse va quelque peu se démocratiser et favoriser l’extension de cette méthode.
1.5. Définitions du relevé
106Cette évocation des différentes méthodes de relevé, qui, pour certaines d’entre elles perdurent depuis plus d’un siècle et dont la finalité tendait en fait vers une meilleure lecture des motifs pariétaux et une plus grande facilité de diffusion de l’information qui s’y rattachait, nous a conduit à remarquer une évolution au sein même de la définition du relevé. Celle‑ci a pris forme consécutivement aux objectifs préétablis et en fonction des possibilités matérielles dont on disposait à chaque période.
107Nous pouvons définir trois époques, toutes de durées sensiblement équivalentes. Chacune se singularise par des critères multiples, définis aussi bien par l’approche du contexte, que par les résultats acquis et les interprétations qui en ont été données. La nature du matériel engagé dans ces recherches, fonction des progrès réalisés au cours des ans, n’a pas été d’une totale neutralité sur la conduite des analyses successives.
1.5.1. Témoignage
108La période initiale, concrétisée par la naissance de cette nouvelle discipline, s’étend approximativement de 1878 à 1900. Dans cet intervalle de temps les premiers inventeurs eurent à convaincre la communauté scientifique de l’authenticité paléolithique des figurations. Pour répondre au scepticisme des détracteurs, ils se trouvèrent dans l’obligation d’argumenter leur interprétation et de diffuser leurs découvertes avec les moyens techniques limités de l’époque. Ils procédèrent donc à un véritable transfert des images pariétales qui, du site où elles furent élaborées, permit leur déplacement vers des lieux plus propices à l’observation. Afin d’accomplir cette opération, ils usèrent aussi bien de la vérité photographique que de la réalité du moulage. Aucune intervention manuelle directe, qui aurait pu conduire à une part d’interprétation, ne s’interposa entre le sujet original et la copie. Seule la matière participa à la reproduction, argile, plâtre ou système optique.
109Il en fut ainsi pour L. Chiron, qui, dès les premières découvertes de 1878, estampa d’abord les gravures de la grotte de Chabot et les photographia par la suite. F. Daleau adopta à Pair‑Non‑Pair une démarche similaire. Seul un croquis de lecture des clichés photographiques était joint à la publication, mais son intérêt résidait essentiellement dans le déchiffrement quelquefois fastidieux du document fondamental, la photographie.
110L’exemple le plus significatif de cette période nous est donné par E. Rivière, qui, durant les années suivant la découverte des figurations de la grotte de La Mouthe, s’astreignit à perfectionner les moyens de reproduction dont il disposait alors et qui étaient susceptibles de répondre favorablement à ses aspirations ; mais tous ne donnèrent pas les résultats escomptés. Il expérimenta tour à tour la lottinoplastie, qui s’avéra peu adaptée à ce milieu trop humide, puis l’estampage. Ce dernier procédé, le plus saisissant par son rendu final, apporta une contribution appréciable à la connaissance des vestiges anthropiques de ce milieu et incita le ministère de l’Instruction publique à solliciter E. Rivière pour sa participation à l’Exposition universelle de 1900. Un des moulages figura dans la galerie d’anthropologie du palais du Trocadéro, à Paris. Il rendait ainsi accessible au public l’art des grottes et des abris.
111Ainsi, le relevé tel qu’on le concevait dans les dernières décennies du xixe s. s’identifiait surtout à un fac‑similé. Il apportait la preuve peu contestable de l’existence d’un art sur paroi que les fouilles de F. Daleau attribuèrent à une « culture » du Paléolithique. Sa justification s’apparentait à un témoignage.
1.5.2. Recensement
112La longue quête de H. Breuil, qui pendant plus d’une cinquantaine d’années l’amena à parcourir les grottes et les abris ornés du sud de la France, de l’Espagne et de l’Afrique, nécessita des moyens technologiques beaucoup plus mobiles et mieux adaptés à tous les différents aspects de l’exercice. Les résultats devaient être facilement consultables et réduits à un encombrement minimal. La reconnaissance définitive de l’art pariétal en 1902 et les découvertes de plus en plus fréquentes nécessitèrent une méthodologie à la fois simple dans sa mise en œuvre et fiable. Ses premiers essais, en 1900, dans la grotte de La Mouthe, furent certainement concluants car il conserva jusqu’en 1952 le même procédé de copie des gravures ou des peintures, date à laquelle sa vue défaillante et son âge avancé ne lui permirent plus d’exercer de telles activités. Il dut alors renoncer à l’étude des grottes d’accès trop difficile pour consacrer les dix dernières années de sa vie à achever l’œuvre commencée avec ce siècle.
113Cette deuxième phase de l’évolution des recherches sur l’art pariétal fut dominée par la préoccupation de réunir dans un minimum de temps un maximum d’informations. Parallèlement à ce travail systématique de relevé, on observe une volonté de définir les éléments du bestiaire et de la symbolique paléolithique. C’est avant tout un travail de déchiffrement des tracés et des thèmes. L’objectif du relevé était donc double, recensement et détermination des figures pariétales.
1.5.3. Analyse
114La troisième et dernière phase de cette évolution est de loin la plus complexe à cerner avec précision, car elle correspond à un véritable « buissonnement » des recherches. L’éclatement du noyau d’activité engendré par l’abbé Breuil entraîna une prolifération des « écoles » et avec elles une disparité des procédés de reproduction, phénomène suscité par un besoin d’ouverture vers de nouveaux thèmes d’étude. L’impulsion d’un tel mouvement est en partie liée aux travaux que dirigeait L. Pales, dès 1956, sur les plaquettes de La Marche. La méthodologie appliquée à la lecture des manifestations graphiques de ce mobilier dut être quelque peu modifiée pour une adaptation plus contraignante au domaine souterrain.
115Tout déchiffrer et tout rapporter, pour une meilleure compréhension du geste de l’artiste paléolithique sont en fait les mots clés de la démarche actuelle. Un des premiers chercheurs à avoir choisi cette voie fut certainement M. Lorblanchet. Les travaux initiaux les plus significatifs de cette évolution prirent forme dans la grotte de Sainte‑Eulalie, dans le Lot, sanctuaire d’entrée, se rapportant au Magdalénien moyen.
116« Possédant une bonne connaissance des caractéristiques d’ensemble du site, […] nous avons pu alors entrer dans les détails et procéder à un examen approfondi de la paroi gravée, en nous intéressant, non seulement aux figures mais aussi à leur support. […], nous avons multiplié les clichés photographiques ; 520 négatifs en noir ont donné environ 1 500 agrandissements sur papier auxquels s’ajoutent les diapositives en noir et en couleur. La photographie n’est pas une simple illustration des relevés ; elle est avant tout un moyen de déchiffrement. Chaque motif a été pris dans son ensemble et dans ses détails sous des éclairages variables […]. Très souvent lorsque le motif était complexe, embrouillé, partiellement effacé ou lorsqu’il était de taille réduite […] nous prenions en outre des empreintes locales avec de la plastiline ou des silicones puis suivaient une série d’agrandissements photographiques de l’empreinte et de l’original, leurs calques et de nouveaux calques directs. Finalement, les comparaisons entre ces divers documents éclairés par de constantes vérifications devant la paroi, aboutissaient à un relevé définitif qui avait quelques chances de serrer étroitement la réalité […]. Nous étudiâmes ensuite la technique de la gravure en examinant toutes les figures avec une loupe binoculaire puis à l’aide de macrophotographies directes et des photographies des sections d’empreintes de traits […]. Enfin au cours de cet ensemble d’analyses minutieuses pendant la fréquentation constante et intime de la paroi nous avons été amenés à faire de nombreuses observations sur les conditions de conservation des figures et sur l’état de leur support [...]. Ainsi le mauvais état des fresques de Sainte‑Eulalie […], obligea à prendre de nombreuses précautions dans les relevés, à multiplier et à varier les procédés sans jamais toutefois devenir l’esclave de l’un d’eux puisqu’ils pouvaient être différents suivant les panneaux, c’est‑à‑dire en tenant à conserver toujours une certaine souplesse de méthode et d’esprit » (Lorblanchet 1973 : 16‑19).
117Ce passage témoigne des modalités d’approche de ce contexte. Il révèle en outre une des préoccupations majeures actuelles, liée à la conservation des œuvres. La recherche des témoins d’altération antérieurs ou postérieurs aux motifs anthropiques, outre son intérêt quant à la connaissance de l’histoire ou du devenir des figures, peut faciliter la compréhension des modes de construction des ensembles et permettre d’esquisser une chronologie relative dans le positionnement des éléments iconographiques, entre autres.
118De la frise originale au stade achevé du ou des relevés, la démarche adoptée par les différentes équipes se calque sur le même modèle, avec cependant quelques variantes dues aux procédés utilisés pour l’enregistrement des données et aux conditions de report. Mais le cheminement reste inchangé :
-
observation du sujet étudié, à l’œil nu et à la loupe binoculaire ;
-
mensurations précises, complétées par des coupes pour les tracés incisés ;
-
relevé des vestiges pariétaux, anthropiques ou naturels, soit sur support transparent, soit par photographie ou estampage, soit par l’emploi conjugué de ces trois modes de transfert ;
-
référence à l’original pour un premier contrôle ;
-
restitution définitive ;
-
ultime confrontation avec l’original.
119Le relevé traditionnel des motifs peints, gravés ou sculptés traduit les contours de l’œuvre par un dessin précis sur le plan dimensionnel et fidèle à une vision d’ensemble du sujet. Seule l’emprise topographique du sujet est considérée.
120Plusieurs démarches tentent actuellement d’intégrer au relevé des observations supplémentaires se rapportant, entre autres, à la technologie des tracés anthropiques peints ou gravés, aux rapports entre le sujet et la surface décorée, à l’analyse micromorphologique du support lithique et microclimatologique du site, ou à l’identification des stigmates d’altération.
121Certaines initiatives peuvent être rapportées, ainsi par exemple celle de B. et G. Delluc. Ils favorisèrent dans leurs observations l’analyse technologique des tracés incisés, larges ou profonds, ce qui permit, d’une part, de définir les caractéristiques du trait, à section courbe, angulaire ou recticurviligne et de spécifier le profil abattu ou modelé de ses bords et, d’autre part, de préciser l’état de préparation de la paroi.
122Plus particulièrement motivée par les relations entre la morphologie du support lithique et les représentations pariétales, M. Lejeune s’attacha, quant à elle, à une recherche des motifs préhistoriques intégrant aux délinéaments les accidents ou les reliefs naturels tels que les fissures, le concrétionnement ou les aspérités, formations suffisamment évocatrices d’un quelconque élément de l’anatomie animale ou humaine pour avoir été reconnues.
123L’influence du support sur l’implantation ou l’orientation des figures suggéra à F. Soleilhavoup d’aborder le problème par le biais de l’analyse micromorphologique du support, indiquant que le relevé ne peut prendre un caractère véritablement objectif que si l’on adopte une démarche de naturaliste avant de considérer les faits anthropiques. Notons que ces derniers travaux ne portent, pour l’instant, que sur une période postérieure au Paléolithique.
124Une première tentative de travail en équipe se dessina de 1964 à 1967, sous la direction de A. Roussot, lors du relevé des motifs pariétaux de la grotte de Nancy, en Dordogne. L’étude des graphismes fut menée conjointement avec celle du mobilier issu des fouilles entreprises sous le porche d’entrée de la cavité. Une analyse climatologique du milieu souterrain, réalisée par C. Andrieux, apporta sa contribution pour préciser les conditions de conservation des œuvres aussi bien pariétales que mobilières.
125Au cours de recherches engagées dans la grotte de Sainte‑Eulalie, M. Lorblanchet devait regrouper autour des activités traditionnelles des compétences multiples relevant de la paléontologie, de la géomorphologie et de la climatologie. La totalité de la surface ornée fut investie et cartographiée. Au relevé des tracés préhistoriques devait s’associer celui traduisant l’état de la paroi, définissant les plages concrétionnées, lustrées, cryogélivées, les zones de desquamation et de formations différenciées telles que les gouttières, les cupules, les fissures et les microcanaux. Cette tentative s’est poursuivie dans la grotte des Escabasses (1972‑ 1974) puis à Pech‑Merle. Un des panneaux majeurs de cette cavité, la Frise Noire, fit plus particulièrement l’objet d’une analyse approfondie. L’enregistrement des données topographiques, d’origine anthropique ou naturelle, nécessita la contribution de la photographie. Une première couverture, effectuée dans des conditions normales de prise de vues, fut complétée par une seconde série, mais prise en lumière infrarouge. Le photomontage résultant de cette phase initiale favorisa le positionnement des éléments picturaux sur feuilles d’acétate de cellulose. A la carte de répartition ainsi établie M. Lorblanchet adjoignit un relevé en courbes de niveau et plusieurs sections verticales de la paroi étudiée. Ce fond topographique devait par la suite servir de support à l’information tirée des observations relatives à la géologie et à la climatologie (fig. 30, 31, 32).

● Fig. 30 – Carte morphologique de la Frise Noire, grotte du Pech‑Merle.
Relevé M. Lorblanchet (Lorblanchet 1982).

● Fig. 31 – Carte des amplitudes thermiques maximales observées au cours d’un cycle annuel. D’après J. Brunet et P. Vidal (Brunet 1982).
126Les fonctions du relevé sont donc actuellement multiples. Il doit rendre compte de la position topographique des figures, de la nature et de la qualité des tracés, c’est‑à‑dire de leur aspect technologique. En outre, il fait fonction de document déterminant, support de l’information relative à la localisation des zones altérées, se rapportant aussi bien aux figures qu’à la roche en place. Les analyses multiples des phénomènes d’origine chimique, microbiologique ou géologique sont menées simultanément, démarche qui confère aux recherches un caractère pluridisciplinaire. Cette série d’observations est ensuite traduite schématiquement en un document explicatif. La restitution par le dessin de toutes les observations enregistrées in situ s’appuie sur des symboles conventionnels entraînant une élimination de tous les détails n’appartenant pas au thème développé, mais donnant en contrepartie une lecture beaucoup plus claire et immédiate du document. Cette étape du relevé s’apparente à un travail de cartographie. Elle implique une codification des phénomènes pariétaux. Les synthèses de ces différents volets de recherche, correspondant chacun à des disciplines bien individualisées, figurent indifféremment sur une même copie ou séparément de manière à ce qu’elles soient compréhensibles par tous.
127L’expression du relevé, telle qu’elle est envisagée actuellement, tend à associer aux données topographiques de la paroi, du sujet et de son environnement immédiat, leurs analyses thématiques.
1.5.4. Conclusion
128La synthèse d’un siècle d’évolution des objectifs poursuivis et partiellement traduits par l’amélioration continue des méthodes de relevé se résume ainsi :
-
de 1878 à 1900, témoignage ;
-
de 1900 à 1950, déchiffrement et recensement ;
-
de 1950 à nos jours, analyse et conservation.
129Le ou les critères définissant chacune des trois phases, que nous avons arbitrairement isolées, se retrouvent de manière récursive associés à la période suivante.
Table des illustrations
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Légende | ● Fig. 1 – Gravures de la paroi de gauche, grotte de Chabot (Gard). |
Crédits | Photographie : L. Chiron, 1878‑1889 (Chiron 1893). |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/32965/img-1.jpg |
Fichier | image/jpeg, 199k |
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Légende | ● Fig. 2 – Gravures de la paroi de droite, grotte de Chabot (Gard). |
Crédits | Photographie : L. Chiron, 1878‑1889 (Chiron 1893). |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/32965/img-2.jpg |
Fichier | image/jpeg, 86k |
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Légende | ● Fig. 3 – Relevé des fresques du Grand Plafond, grotte d’Altamira, Santander (Espagne). 1879‑1880 (Cartailhac 1908). |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/32965/img-3.jpg |
Fichier | image/jpeg, 116k |
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Légende | ● Fig. 4 – Relevé planimétrique de la grotte d’Altamira par E. Harlé, 1881 (Harlé 1881). |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/32965/img-4.jpg |
Fichier | image/jpeg, 52k |
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Légende | ● Fig. 5 – Capridé relevé en 1881 par E. Harlé, grotte d’Altamira, Santander (Espagne) (Harlé 1881). |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/32965/img-5.jpg |
Fichier | image/jpeg, 28k |
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Légende | ● Fig. 6 – Taureau de la première salle, paroi gauche, grotte de La Mouthe (Dordogne). |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/32965/img-6.jpg |
Fichier | image/jpeg, 296k |
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Légende | ● Fig. 7 – Stigmates d’estampage décelables sous la forme d’un quadrillage régulier, grotte de La Mouthe (Dordogne). |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/32965/img-7.jpg |
Fichier | image/jpeg, 270k |
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Légende | ● Fig. 8 – Renne tacheté, grotte de La Mouthe (Dordogne). |
Crédits | Photographie : Ch. Durand, 1895‑1897 (Rivière 1897). |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/32965/img-8.jpg |
Fichier | image/jpeg, 48k |
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Légende | ● Fig. 9 – Bison de la découverte, grotte de La Mouthe (Dordogne). |
Crédits | Photographie : Ch. Durand, 1895‑1897 (Rivière 1897). |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/32965/img-9.jpg |
Fichier | image/jpeg, 51k |
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Légende | ● Fig. 10 – Effet photochimique. La sensibilité d’une émulsion est subordonnée à la qualité de la lumière à laquelle elle est insolée. La courbe résultante traduit cet effet. La conséquence première est une réduction notable des performances photométriques. |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/32965/img-10.jpg |
Fichier | image/jpeg, 56k |
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Légende | ● Fig. 11 – Panneau de la salle des bisons, grotte de La Mouthe. |
Crédits | Relevé E. Rivière, 1900 (Rivière 1905). |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/32965/img-11.jpg |
Fichier | image/jpeg, 36k |
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Légende | ● Fig. 12 – La Hutte, grotte de La Mouthe. |
Crédits | Relevé E. Rivière, 1900, Coll. Musée du Périgord. |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/32965/img-12.jpg |
Fichier | image/jpeg, 245k |
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Légende | ● Fig. 13 – Relevé à vue des gravures de la grotte de Pair‑Non‑Pair (Gironde). |
Crédits | Extrait du Carnet d’Excursions de F. Daleau, 1896. Coll. Musée d’Aquitaine. |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/32965/img-13.jpg |
Fichier | image/jpeg, 135k |
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Légende | ● Fig. 14 – Photographie et croquis de lecture de « l’ Agnus Dei », grotte de Pair‑Non‑Pair. |
Crédits | Photographie : Th. Amtmann, relevé F. Daleau, 1897 (Daleau 1897). |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/32965/img-14.jpg |
Fichier | image/jpeg, 144k |
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Légende | ● Fig. 15 – Relevé du panneau principal orné, grotte de Marsoulas (Hte‑Garonne). |
Crédits | Dessin de L. Jammes, 1897 (Régnault 1903). |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/32965/img-15.jpg |
Fichier | image/jpeg, 41k |
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Légende | ● Fig. 16 – Bouquetin, salle de la Hutte, grotte de La Mouthe. |
Crédits | Relevé H. Breuil, 1900. Coll. Musée du Périgord. |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/32965/img-16.jpg |
Fichier | image/jpeg, 168k |
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Légende | ● Fig. 17 – Equidé (17a) et cervidé (17b), salle des Rennes, mammouth (17c), salle de la Hutte, grotte de La Mouthe (Dordogne). |
Crédits | Relevés H. Breuil, 1900 (Rivière 1901). |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/32965/img-17.jpg |
Fichier | image/jpeg, 55k |
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Légende | ● Fig. 18 – Relevé au crayon gras d’un motif pariétal sur feuille de papier cristal préalablement froissée afin d’accroître sa plasticité pour lui faire épouser avec beaucoup plus de facilité le relief de la paroi (Anonyme 1967). |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/32965/img-18.jpg |
Fichier | image/jpeg, 183k |
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Légende | ● Fig. 19 – Relevé d’un dessin de cervidé, grotte d’Altamira (Espagne). En cartouche, croquis servant de support aux mensurations, esquisse au crayon exécutée in situ à l’échelle 1/5. D’après H. Breuil, 1902 (Cartailhac 1906), |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/32965/img-19.jpg |
Fichier | image/jpeg, 142k |
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Légende | ● Fig. 20 – Relevé du volet dextre du panneau central de l’Abside, grotte des Trois‑Frères (Ariège). |
Crédits | Relevé H. Breuil, 1930‑ 1938 (Bégouën 1958). |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/32965/img-20.jpg |
Fichier | image/jpeg, 266k |
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Légende | ● Fig. 21 – Les chevaux » chinois », diverticule Axial, grotte de Lascaux. |
Crédits | Relevé M. Thaon, 1940‑1945 |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/32965/img-21.jpg |
Fichier | image/jpeg, 48k |
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Légende | ● Fig. 22 – Bouquetin, grotte de Marcenac (Lot) |
Crédits | Relevé A. Lemozi, vers 1959 (Lemozi 1965). |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/32965/img-22.jpg |
Fichier | image/jpeg, 58k |
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Légende | ● Fig. 23 ‑ Ensemble des bouquetins, Abside, grotte de Lascaux, |
Crédits | Relevé A. Glory, 1953‑1962. Coll. M.H. |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/32965/img-23.jpg |
Fichier | image/jpeg, 192k |
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Légende | ● Fig. 24 – Panneau du registre supérieur regroupant chevaux, aurochs et bison, grotte de Bara‑Bahau. |
Crédits | Relevé A. Glory, 1955 (Glory 1955). |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/32965/img-24.jpg |
Fichier | image/jpeg, 109k |
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Légende | ● Fig. 25 – Enchevêtrement d’incisions sur un petit bloc de calcaire. L’analyse révéla la présence de nombreuses figures parmi lesquelles un mammouth, un équidé, deux anthropomorphes et un ours. |
Crédits | Relevé L. Pales (Pales 1981). |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/32965/img-25.jpg |
Fichier | image/jpeg, 190k |
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Légende | ● Fig. 26 – Chronologie des découvertes de grottes et abris ornés regroupées par périodes quinquennales. |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/32965/img-26.jpg |
Fichier | image/jpeg, 67k |
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Légende | ● Fig. 27 – Bouquetin du Salon Noir, grotte de Niaux (Ariège). Relevé J. Glottes, 1981. |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/32965/img-27.jpg |
Fichier | image/jpeg, 85k |
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Légende | ● Fig. 28 – Relevé photogrammétrique de la Frise Noire, grotte du Pech‑Merle (Lot). D’après M.‑P. Lebel (Lorblanchet1982). |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/32965/img-28.jpg |
Fichier | image/jpeg, 326k |
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Légende | ● Fig. 29 – Bovidés, salle des Taureaux, grotte de Lascaux. |
Crédits | Cliché infrarouge F. Windels, 1948 (Windels 1948). |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/32965/img-29.jpg |
Fichier | image/jpeg, 164k |
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Légende | ● Fig. 30 – Carte morphologique de la Frise Noire, grotte du Pech‑Merle. |
Crédits | Relevé M. Lorblanchet (Lorblanchet 1982). |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/32965/img-30.jpg |
Fichier | image/jpeg, 155k |
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Légende | ● Fig. 31 – Carte des amplitudes thermiques maximales observées au cours d’un cycle annuel. D’après J. Brunet et P. Vidal (Brunet 1982). |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/32965/img-31.jpg |
Fichier | image/jpeg, 125k |
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Légende | ● Fig. 32 – Analyse géomorphologique de la Frise Noire. D’après Ph. Renault (Renault 1982). |
URL | http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/32965/img-32.jpg |
Fichier | image/jpeg, 127k |
© Éditions de la Maison des sciences de l’homme, 1987