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Le relevé des oeuvres pariétales paléolithiques

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Norbert Aujoulat

Introduction

Texte intégral

1Les recherches menées depuis près d’un siècle sur l’art des grottes et des abris et que l’on peut identifier à une archéologie pariétale, reposent en partie sur l’analyse graphique des témoignages peints, sculptés ou gravés, étude concrétisée, entre autres, par la reproduction des motifs considérés. Cette démarche a pour finalité une meilleure lecture des tracés anthropiques extraits de leur environnement naturel, formations calciques, fissures, dépôts argileux, ou isolés des manifestations parasites ayant pu altérer plus ou moins l’image initiale, telles que les graffiti, les traces de frottements ou les stigmates d’enlèvements de matière. Ce transfert de l’image paléolithique implique donc une méthodologie spécifique et un matériel parfaitement adapté aux conditions très particulières dictées par le domaine souterrain. Le document achevé relève obligatoirement d’un dessin interprété mais explicatif.

2Cette étude est donc à la fois un essai de synthèse des travaux relatifs au relevé de l’art paléolithique présent au sein des grottes et des abris, et le résultat de plusieurs années de recherches personnelles. Elle a pour but de réunir sous le même titre l’ensemble des méthodes sollicitées à cette fin, depuis les découvertes de la fin du siècle dernier jusqu’à nos jours.

3L’évolution des techniques d’enregistrement des données graphiques sera évoquée dans un premier temps. Développement des méthodes, mais aussi évolution de l’expression du relevé qui, partant d’une simple reconnaissance des formes, animales ou non figuratives, a, jusqu’à nos jours, ostensiblement mué en une convergence thématique, associant aux observations archéologiques les remarques d’ordre climatique ou géomorphologique, entre autres.

4Nous avons voulu montrer qu’il était possible, à l’aide de moyens aussi conventionnels que l’appareil photographique et l’ordinateur, d’une part d’optimiser la perception du message paléolithique et, d’autre part, de réduire notablement la subjectivité dans l’appréhension graphique de chaque témoignage pariétal, caractère toujours présent lors d’un relevé manuel. Le rôle de ces deux instruments d’analyse, conjointement utilisés, peut, dans certaines circonstances, s’avérer complémentaire des procédés plus traditionnels, tels que le relevé sur support transparent ou la prise d’empreinte. Cependant, ce mode d’investigation peut à lui seul se présenter comme pertinent au cours de l’étude de la majorité des sites ornés.

5L’instrument photographique se révèle être un auxiliaire précieux pour l’aide à l’analyse et à l’interprétation des manifestations pariétales paléolithiques. Mais il semble pourtant que son apparente facilité d’emploi dissimule en partie ses remarquables facultés d’adaptation au milieu souterrain, ses capacités de stockage d’informations très supérieures à n’importe quel autre moyen d’enregistrement actuellement utilisé dans ce domaine et ses possibilités très étendues d’évolution.

6Plusieurs autres raisons plaident en faveur de cet outil. Sur le site tout d’abord, sa mise en œuvre nécessite un matériel peu encombrant et facile à manipuler. En outre, l’enregistrement à distance, ou télédétection, préserve le support lithique et l’œuvre originale à la fois de gestes malencontreux et d’un échauffement local de la paroi résultant de notre présence à proximité immédiate. Les temps d’intervention, enfin, se trouvent considérablement réduits au regard des méthodes traditionnelles de copie sur support transparent.

7Supériorité de l’œil photographique sur l’œil humain qui ne se limite pas essentiellement à un élargissement de la bande spectrale perçue mais, à l’inverse, a aussi la possibilité de sélectionner un secteur très limité ou préférentiel des radiations réfléchies, ou analyse multispectrale, favorisant ainsi la neutralisation des signaux parasites et donc un accroissement notable du contraste du motif considéré par rapport à son support naturel. Les données chromatiques relatives à la roche en place et celles relatives aux pigments utilisés par l’homme, sont, en effet, bien souvent très proches, car de composition minéralogique et de concentration en éléments métalliques semblables. Cette similitude se traduit par un adoucissement du contraste du dessin paléolithique. L’optimisation de l’enregistrement photographique du sujet passera donc par une recherche d’un filtrage spécifique, susceptible de différencier le pigment anthropique du pigment naturel de la paroi.

8Cette première étape, concernant l’enregistrement des données suppose consécutivement une optimisation de leur traitement en laboratoire. La voie chimique que nous avons envisagée dans un premier temps, et notamment les équidensités, apporta incontestablement des résultats positifs, mais ceux‑ci ont été notablement affinés et les délais opérationnels considérablement réduits par un traitement automatique des images. Les possibilités offertes par cette technique, initialement élaborée à des fins militaires, astronomiques et cartographiques, sont très étendues ; nous ne donnerons au cours de cette étude que les premiers résultats.

9Le relevé d’une œuvre pariétale ne se conçoit pas sans une quantification de son environnement immédiat et une localisation précise du motif dans son site d’élaboration. Cette perspective nous a incité à mettre au point un matériel de mesure, fondé sur les profils lumineux. Celui‑ci permet d’appréhender et d’enregistrer les moindres variations du relief des parois ainsi que le volume général des galeries. Les données graphiques et numériques recueillies sont ensuite traitées automatiquement par ordinateur.

10Nous avons conçu cette étude comme une introduction à la théorie photographique et aux techniques d’enregistrement et de traitement automatique des données morphochromatiques, appliquées, pour la circonstance, à l’art pariétal paléolithique, chaque phase de cette analyse reposant sur des exemples très didactiques. Cette démarche permet en outre de souligner la rigueur à laquelle une telle approche est soumise car encadrée par des lois physico‑chimiques bien définies et des contraintes conservatoires strictes.

© Éditions de la Maison des sciences de l’homme, 1987

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