Groupe d’Argonne
p. 195‑207
Texte intégral
1Ce groupe de production (fig. 1 et 2) comprend plusieurs ateliers répartis aux IIe, IIIe s. sur une vingtaine de km au maximum, principalement dans les vallées et les clairières et à la lisière des forêts argonnaises. Ces ateliers ont eu entre eux des liens plus ou moins étroits et la connaissance que l’on en a varie de l’un à l’autre suivant l’importance des travaux de terrain qui y ont été consacrés (qui vont des fouilles étendues aux prospections de surface ou au simple repérage) ; à la réserve des découvertes récentes, ces travaux sont essentiellement dus au Dr. Meunier de 1886 à 1925, avec, à partir de 1907, la collaboration de son gendre G. Chenet qui lui a succédé.
2À l’exception de ceux de la vallée de la Biesme à la limite est du département de la Marne, ces ateliers sont situés dans le département de la Meuse. Ils appartenaient dans [’Antiquité à la Gaule Belgique, plus précisément — semble‑t‑il — à l’extrémité occidentale de la ciuitas des Mediomatrici, aux confins des Remi et des Leuci. Leur implantation était essentiellement rurale et isolée, à l’exception de celle de l’atelier de Lavoye qui appartenait à une agglomération industrielle. Les voies de communication terrestres — auxquelles ils devaient être reliés par des diverticules — facilitaient les relations avec les voies fluviales d’exportation (Meuse et Aisne en particulier). La forêt d’Argonne culmine vers 300 m et les vallées y sont orientées nord‑nord‑ouest/sud‑sud‑est. Stratégiquement elle a toujours été réputée au cours de l’histoire comme étant de pénétration difficile dans le sens est‑ouest.
3La matière première essentielle était constituée des argiles d’un gris bleuâtre de l’étage albien reposant sur les sables verts de l’infra‑crétacé ; les dégraissants étaient fournis par les sables proches des argiles précitées (sans apports cristallins). L’eau provenait des sources et rus proches, dus aux argiles imperméables ; le bois se trouvait en abondance (feuillus plus que résineux) à proximité immédiate.
4Les produits argonnais ne semblent pas avoir fait l’objet jusqu’ici d’analyses en vue de définition physico‑chimique et dont les résultats aient été publiés.
5Le matériel sigillé argonnais se caractérise généralement par une pâte de teinte saumon, sans trace de dégraissants cristallins. Parfois l’âme reste pâle, voire grise, par manque d’oxydation de l’argile naturelle. L’engobe, dans les produits précoces, possède la teinte coraline des produits contemporains de Gaule centrale, mais dès le milieu du iie s. la teinte devient rouge orangé, témoignant d’une cuisson oxydante à température un peu moins élevée.
■ Bibliographie (ouvrages et articles d’ensemble)
6CHENET (G.), GAUDRON (G.). — La Céramique sigillée d’Argonne des iie et iiie siècles. Paris, 1955. (VIe suppl. à Gallia) (avec bibliographie des travaux antérieurs).
7CHENET (G.). — La Céramique gallo‑romaine d’Argonne du ive siècle et la terre sigillée décorée à la molette. Mâcon, 1941.
8HOFMANN (B.). — Catalogue des poinçons pour moules à vases sigillés des décorateurs argonnais. Ogam, no 117‑120, 1968, pp. 203‑307, pl. 94‑128.
9FÔLZER (E.). — Die Bilderschüsseln der ostgallischen Sigillata‑Manufakturen. Bonn, 1913 (IV. Lavoye und seine Filialen Les Allieux und Avocourt, pp. 37‑41, pl. VII).
10HOFMANN (B.). — Verbindungen zwischen den Reliefschüsseln der Argonnen Töpfereien und Rheinzabern. R.C.R.F. Acta XI/XII, 1969‑1970, pp. 30‑33.
11HOFMANN (B.). — La Céramique argonnaise ornée au moule. R.C.R.F. Acta III, 1961, pp. 23‑33.
12HOFMANN (B.). — Catalogue des estampilles sur vaisselle sigillée, 2e partie. Groupe d’archéologie antique du T.C.F. Notice technique no 22, 1972 (Argonne, pp. 16‑21, pl. V‑VIII).
13HOFMANN (B.). — L’Argonne témoin de l’évolution des techniques céramiques au cours du iie s. R.C.R.F. Acta XIX/XX, 1979, pp. 214‑235 (11 fig.).
■ Collections principales et lieux de conservation connus en 1984
14Après un choix de pièces provenant de Lavoye entrées au Musée des antiquités nationales, à Saint‑Germain‑en‑Laye en 1924, la collection provenant des fouilles du Dr. Meunier et de G. Chenet a été remise, grâce aux soins de G. Goudron, en 1945‑1946 au même musée où elle a été classée par B. Hofmann et P.‑H. Mitard, vers 1960. Des éléments moins importants en nombre sont conservés au musée d’Argonne à Varennes‑en‑Argonne (en particulier le matériel provenant de l’atelier de la forêt de Hesse).
Lavoye
15À l’exception d’un four, celui de Messirius, à la sortie sud‑ouest du bourg de Lavoye, les installations de l’atelier ont été découvertes essentiellement à l’ouest de cette localité, au lieu‑dit La Vérine, sur le territoire de la commune d’Autrecourt (canton de Triancourt‑en‑Argonne, arrondissement de Bar‑le‑Duc) ; altitude 211 m.
■ Circonstances de la découverte et état du site
16Signalé dès 1844 après la découverte fortuite d’un four en 1834, le site a été régulièrement fouillé de 1886 à 1925. Sa superficie présumée atteint plus de 30 ha.
■ Contexte historico‑géographique
17L’atelier faisait partie d’un centre industriel : la station antique de Lavoye, à laquelle a succédé un village mérovingien dont la nécropole a été fouillée et a fourni 367 sépultures (JOFFROY (R.). — Le Cimetière de Lavoye, nécropole mérovingienne. Paris, 1974).
18L’atelier se trouvait à proximité immédiate du croisement de deux routes considérées comme antiques : celle allant de Châlons‑sur‑Marne à Verdun par le gué de Lavoye, sur la rivière l’Aire (axe est‑ouest) et celle allant du camp de Foins, sous Bar‑le‑Duc, via Dun, sous Verdun, à Arlon, en Belgique (axe sud‑nord). La voie romaine de Reims à Metz passait à 9 km au nord. Par ailleurs Lavoye est sur l’Aire, affluent de la rive droite de l’Aisne, elle‑même affluent de l’Oise qui se jette dans la Seine.
19La datation est avant tout indirecte, fondée sur l’étude de l’évolution des décors sur vases ornés et, d’une façon plus générale, sur la diffusion vers les sites consommateurs datés par rapport à celle des autres ateliers. La période allant de 130 à 140 semble correspondre au début de la production sigillée ; celle‑ci paraît de peu postérieure à celle de l’atelier du Pont‑des‑Rèmes mais se poursuit jusqu’au iiie s. notamment avec la forme Drag. 45.
20L’atelier a participé au déploiement général, au cours du règne d’Hadrien, des lieux de production de la sigillée vers le nord‑est, provoqué par l’accroissement de la demande en Rhénanie (renforcée militairement) et par la mise en valeur des richesses agricoles du nord de la Gaule. C’est le phénomène bien connu en économie industrielle du rapprochement des lieux de production par rapport à leur clientèle. D’autres activités artisanales sont archéologiquement attestées sur le site qui a fourni, outre des vestiges d’habitations, des traces de fours à fondre le fer, de fours de verriers et d’ateliers de bronziers.
■ Activité céramique
21Une industrie de type « gallo‑belge » antérieure à celle de la sigillée est bien attestée sur le site, trois fours de ce type ont été découverts dans l’angle nord‑est du croisement de voies mentionné ci‑dessus. Malgré la fabrication de sigillée, les techniques de production à feu réducteur continuèrent à être utilisées pour la céramique dite « commune ». Lors du déclin de la sigillée, à partir de la fin du iie s., des productions du même type continuèrent (fig. 3 et 4) : gobelets parfois moulés, tels que ceux du « gobeletier de Lavoye » ; gobelets à engobe noir. Outre les techniques naissantes qui, vers la fin du iie s. marquent le début du Bas Empire et se poursuivent jusqu’au milieu du iiie : vases incisés, barbotinés, à reliefs d’applique en forme de mufle de lion... se manifeste ici une renaissance dans la technique de la sigillée : la céramique ornée à la molette, accompagnée de formes unies contemporaines, probablement produite dès la fin du iiie s., bien qu’on n’ait pas de preuve absolue. En tout cas au cours des trois derniers quarts du iie s. la sigillée constitue la production la plus importante.
22En ce qui concerne la décoration, Lavoye est un atelier‑jalon, du moins au début ; les décorateurs de moules les plus anciens, Tribunus, Toccius, Tocca, ont de nombreux poinçons‑matrices communs avec les décorateurs de Gaule centrale. Par la suite, les décorateurs plus récents, Germanus, Africanus, en possèdent beaucoup d’identiques à ceux des décorateurs rhénans, ce qui trahit un véritable trafic de ces poinçons. De plus, sur le plan local, cet atelier peut être considéré comme une métropole en raison de l’importance de sa production par rapport à celle des autres ateliers argonnais.
■ Définition archéologique du matériel sigillé
23Bien qu’un poinçon à rosette‑signature ait été découvert, les estampilles sont avant tout épigraphiques ; les marques illisibles sont pratiquement inexistantes. Les cartouches sont de forme rectangulaire allongée, mais il convient de signaler deux marques inscrites en rond dans un cercle : CVRTIO (rétrograde) et NASSOFE, et une marque en fer à cheval : TOCCAF (rétrograde). Des graffites ont été observés, sur moule uniquement.
24Les formes de sigillée lisse représentées dans les productions de l’atelier sont les suivantes : Drag. 18, 18/ 31, 27, 32, 33, 40, 46, Curle 15(?), Walters 79, Drag. 45 (si l’on veut considérer cette forme comme lisse malgré le déversoir orné). Environ une quinzaine de potiers locaux sont bien identifiables par leurs exportations ; plus de 80 ont travaillé à Lavoye. La différence vient de marques mal identifiables qui ne se retrouvent pas en diffusion ou peuvent être confondues avec celles d’homonymes d’autres ateliers. Une particularité notable : le terme OFFICINA et ses abréviations OF, OFFI... sont absents de la totalité des marques connues.
25En ce qui concerne la sigillée décorée au moule c’est essentiellement la forme Drag. 37 qui est fabriquée, beaucoup plus rarement le type Drag. 30. Mentionnons toutefois les productions du gobeletier Eburus, de Lavoye, obtenues à partir de moules bi‑valves (exemple unique chez les fabricants de sigillée moulée) et dont les vases étaient cuits à feu réducteur donnant une teinte gris ardoise. La décoration au moule est pratiquée jusqu’au début du iiie s. alors que vers la fin du iie s. apparaissent les techniques de l’incision et de la barbotine pour l’ornementation de gobelets ovoïdes (forme Déchelette 72), ainsi que du relief d’applique (essentiellement mufles de lion sur mortiers Drag. 45). Le décor de guillochis à la roulette est également employé sur des variétés des formes Drag. 30, 37, 49, aux iie et iiie s.
26Le décor des vases moulés est d’abord construit de façon anarchique à partir de poinçons qui auraient pu servir initialement à illustrer des thèmes particuliers ; par la suite les poinçons sont regroupés en vue de la figuration de thèmes classiques : scènes de chasse ou de combat, érotiques. Près de quinze noms de décorateurs de moules (marques intradécoratives) ont été observés. Il faut ajouter à ces styles une série de décors caractéristiques du début du IIIe s. attribués aux « anonymes du four D ». La production locale de moules est attestée par la découverte de poinçons‑matrices à décors (fleuron bilobé notamment). Toutes les signatures observables sur vases décorés au moule proviennent d’empreintes sur moules.
27En résumé, à part les caractéristiques techniques et les assemblages de motifs (certains motifs mineurs étant essentiels pour l’identification) les productions ornées au moule de Lavoye ne présentent pas d’originalité particulière. Seul le gobeletier Eburus a utilisé des motifs bien caractéristiques, parfois mélangés à d’autres moins originaux.
■ La fabrication
28Les outils recueillis sur le site sont bien décrits dans l’ouvrage de Chenet et Goudron, 1955 (voir bibliographie d’ensemble ci‑dessus) au chapitre II. Ils comprennent : lissoirs en silex, crapaudines de pivots de tours, poinçons‑marques, poinçons à décor, moules à Drag. 37 et à gobelets, supports de cuisson de divers types. Les moules furent généralement signés en position intra‑décorative, provoquant l’apparition des noms sur les vases qui en étaient issus. Mais il existe de nombreux moules, recueillis dans l’atelier, où les noms étaient inscrits à la pointe sèche sur le fond interne: ceux‑ci, qui seraient apparus en relief sur les vases, disparaissaient lors de la fixation du pied. Les supports de cuisson signés ne comportent que des graffites correspondant à des signes ou des abréviations (essentiel à ce sujet Chenet et Goudron, op. cit., fig. 41 ).
29Dix‑huit fours ont été découverts et fouillés : classés de A à R, certains ne sont pas mentionnés par Chenet et Goudron (op. cit.), mais la série est confirmée par les documents annotés conservés au Musée des antiquités nationales. Certains cependant datent du IVe s. ou auraient été réutilisés à cette époque. Seul le plan du four E (utilisé au IVe s., mais remontant peut‑être au IIIe) a été publié. Par suite de la disparition des notes de fouilles du Dr. Meunier et G. Chenet, que même G. Goudron n’a pu consulter, les autres plans ne sont pas connus. On peut supposer d’après l’exemple du four E que toute la sigillée était cuite dans des fours mouflés permettant la cuisson oxydante ; mais tous les autres fours argonnais publiés sont donnés comme fours à cuisson réductrice et accompagnés du matériel correspondant.
■ Les potiers
30Les marques recueillies ne fournissent aucune attestation épigraphique de tria nomina, ni d’esclaves ou d’affranchis. Quelques associations de potiers ont été reconnues, attestées par la présence de E, pour ET, entre les deux noms ; c’est le cas de lustus associé à Memor et Tribunus. Par ailleurs certaines homonymies (cas de Gesatus, Tocca) pourraient correspondre à des déplacements d’un atelier de l’Est à un autre, dans les deux sens. Dans le cas où des noms n’apparaissent que sur moules il est probable que ce n’est pas l’individu qui s’est déplacé mais les moules qui ont fait, comme ailleurs, l’objet d’un trafic (cf. Tocca à Blickweiler, Gesatus à Ittenwiller).
■ La diffusion
31La diffusion intéressa les vallées de l’Aisne, de l’Oise et de la Seine, la Belgique par la vallée de la Meuse et toute la vallée du Rhin à partir de la plaine de Francfort jusqu’en Hollande. Cette production laissait une place à celle des ateliers contemporains de Heiligenberg et Ittenwiller jusqu’au milieu du iie s. On constate dès cette époque un retrait progressif de la vallée du Rhin et la mise en route de l’atelier de Rheinzabern ; mais l’actuelle Belgique et le nord de la France restaient desservis ; les motifs sur sigillée moulée étaient alors d’origine rhénane (voir bibliographie). Cette diffusion se fit par les voies fluviales et l’axe routier, allant vers la plaine du Rhin. Vers la Grande‑Bretagne, les embarquements semblent s’être faits à l’embouchure du Rhin plutôt qu’à partir des ports gaulois de la Manche, contrairement à ce qui a eu lieu pour les produits de la Gaule centrale.
■ Bibliographie
32Voir ci‑dessus ouvrages et articles d’ensemble, où Lavoye occupe une large place.
■ Responsable actuel du site
33Le Directeur des Antiquités historiques de la région de Lorraine.
Pont‑des‑Rèmes (Vallée de la Biesme)
34Le lieu‑dit correspondant relève de la commune de Florent‑en‑Argonne, canton et arrondissement de Sainte‑Ménéhould, département de la Marne ; altitude environ 155 m.
35Dans la vallée de la Biesme ont été fouillées ou repérées deux autres officines : au lieu‑dit Vau‑Régnier, à 1 000 m au nord/nord‑ouest du Pont‑des‑Rèmes (même commune), altitude d’environ 155 m ; au lieu‑dit Bois‑le‑Prince, commune de Lachalade (Meuse), à environ 3 000 m au nord du Pont‑des‑Rèmes, altitude 155 m.
■ Circonstances de la découverte et état du site
36Repéré en décembre 1911 grâce à des vestiges de surface, l’atelier du Pont‑des‑Rèmes a été fouillé en 1912. Au Vau‑Régnier, des sondages ont révélé en 1912 l’emplacement d’un four dégagé en janvier 1914 et attestant bien la présence d’un atelier, avec un moule et des fragments décorés et lisses de mêmes types que ceux du Pont‑des‑Rèmes. Mais les documents ont été détruits en 1914‑1915. Au lieu‑dit Bois‑le‑Prince, c’est la découverte en 1919 d’un fragment de moule très altéré et celle en 1927 d’un amas de gaize calcinée devant provenir d’un four qui font présumer la présence proche d’une officine ; mais le sol antique a été bouleversé par des extractions d’argile au xixe s. C’est donc au seul atelier du Pont‑des‑Rèmes que — sauf mention contraire — sont consacrées les indications qui suivent.
■ Contexte historico‑géographique
37Cet atelier est situé au bord d’un minuscule ruisseau, dit du Voyot, se déversant dans la Biesme, affluent de la rive droite de l’Aisne et dont le confluent est en amont de celui de l’Aire (rivière de Lavoye).
38Sa datation indirecte se fait par référence à l’atelier de Lavoye et aux sites datés consommateurs. Elle semble antérieure de quelques années au début de l’atelier de Lavoye.
■ Activité céramique
39Seule la production de sigillée est attestée ici. La durée de production y a été courte et tout se passe comme si les potiers s’étaient ensuite déplacés vers Lavoye (8 noms de potiers communs aux deux ateliers, nombreuses identités de motifs sur moules). On n’a rencontré sur place aucune production postérieure à la sigillée.
40Il s’agit d’un atelier jalon entre les ateliers de Gaule centrale et les premières productions de sigillée en Argonne. L’étude des motifs utilisés pour les moules en donne la preuve.
■ Définition archéologique du matériel sigillé
41La matière, pâte et engobe, présente les caractéristiques habituelles des produits argonnais mais on peut noter l’absence de produits témoignant d’une cuisson oxydante incomplète (sauf accidents, par exemple les rebuts de cuisson).
42Les estampilles sont essentiellement épigraphiques mais on connaît aussi dans cet atelier des marques anépigraphes (rosettes‑signatures et même représentation d’un vase à deux anses).
43Les formes de sigillée lisse représentées dans les productions de l’atelier (fig. 5) sont les suivantes : Drag. 18, 18/31, 31, 27, 32, 33, 35/36, 38, 40, 46, Curle 15 et 21 et terrines diverses à rapprocher des Drag. 44. Environ 5 potiers sont bien identifiables par leurs exportations, mais 25 noms ont été repérés sur les produits des fouilles. La différence tient à des noms à diffusion inexistante, des homonymes et à quelques marques de lecture difficile.
44En sigillée décorée la forme Drag. 37 est seule utilisée pour la décoration au moule (fig. 5). Autres techniques employées : roulette à guillochis sur quelques Drag. 37, barbotine sur les formes Drag. 35/36 (à « feuilles d’eau » sur le bord). Le décor des vases moulés est exécuté de façon anarchique à partir de poinçons ayant pu servir à composer des scènes. Aucun nom de décorateur de moules n’est connu localement. Mais l’un d’eux, Toccius, attesté à Lavoye également par des vases unis, a pu être repéré grâce à l’identité des poinçons qui décorent un vase exporté et, par ailleurs, des produits signés du potier. Dans ce cas la signature était en position intradécorative sur le moule. Pour caractériser la production de l’atelier, les motifs mineurs restent essentiels bien que certains d’entre eux se retrouvent aussi à Lavoye.
■ La fabrication
45Des outils ont été recueillis sur le site : moules à Drag. 37, supports de cuisson de types variés (voir Chenet et Goudron, 1955, chap. II). Au Pont‑des‑Rèmes, un seul four (A) a été fouillé et bien décrit dans les publications. Un autre de même type a été découvert au Vau‑Régnier. Il s’agissait de fours en ovale allongé, proche du rectangle. Le four A se complétait à l’avant par la chaufferie, sur le côté par une fosse à tremper l’argile et l’ensemble était protégé des eaux d’infiltration par une tranchée‑drainage se terminant dans un puisard.
■ Les potiers
46Au Pont‑des‑Rèmes, les marques recueillies ne fournissent aucune attestation épigraphique de tria nomina, ni d’esclaves ou d’affranchis. On ne connaît pas de relations de filiation ou d’association de potiers. Il est probable que les spécialistes de la sigillée sont arrivés sur le site en venant de Gaule centrale puis, au bout d’une période assez courte, se sont déplacés vers l’atelier de Lavoye et peut‑être aussi vers d’autres ateliers argonnais. Des identités de noms sur vases unis (8 avec Lavoye, 3 avec Avocourt/Champ‑des‑Bierres, 3 avec Les Allieux), ainsi que les motifs utilisés sur certains moules constituent des indices en ce sens.
■ La diffusion
47Bien que moins abondante, elle est comparable à celle de Lavoye, du moins pour la première période de diffusion de cet atelier.
■ Bibliographie
48CHENET (G.). — L’Atelier céramique gallo‑romain du Pont‑des‑Rèmes‑Florent (Marne). Bull. Soc. Archéol. Champenoise, 1913, pp. 47‑98 (9 pl., 1 fig.). Résumé dans Chenet et Goudron.
■ Responsable actuel du site
49Le Directeur des Antiquités historiques de la région de Champagne‑Ardenne.
Clermont‑en‑Argonne
50Cet atelier se situait à la lisière orientale de la forêt d’Argonne, au sud du village de Lochères, mais sur le territoire de la commune de Clermont‑en‑Argonne. Il a été découvert vers 1900 à l’occasion d’extractions de phosphate. Son existence est attestée par les restes de plusieurs fours à terre sigillée avec nombreux supports de cuisson et vases unis. L’atelier se trouvait un peu au sud de la voie romaine de Reims à Metz. Les vases unis découverts auraient daté du IIe s.; certains portaient des estampilles qui n’ont pas été conservées. On ne sait rien de plus sur cet atelier.
■ Responsable actuel du site
51Le Directeur des Antiquités historiques de la région de Lorraine.
Centre de production : les Allieux, la Caouette, Le Champ‑des‑Bierres, la forêt de Hesse
52Les ateliers en cause (communes de Vauquois et d’Avocourt essentiellement) sont groupés dans un espace de 5 km de longueur au maximum dans le sens est‑ouest et de 4 dans le sens nord‑sud. Leur proximité implique des relations plus ou moins étroites que confirment parfois les découvertes qui y ont été faites. Mais notre connaissance reste limitée en raison de l’insuffisance des travaux de fouilles dont le développement a été stoppé par la guerre 1914‑1918, laquelle a provoqué en outre des bouleversements du sol à l’emplacement de certains de ces sites.
Les allieux
53C’est un lieu‑dit du territoire de la commune de Vauquois, canton de Varennes‑en‑Argonne, arrondissement de Verdun, département de la Meuse, dans une clairière bordée à l’est par la forêt de Hesse ; altitude de 215 à 220 m.
■ Circonstances de la découverte et état du site
54Repéré en 1905 d’après les vestiges de surface, le site a fait l’objet de sondages en 1909‑1910 de la part de G. Chenet (Les Allieux A). À 300 m à l’est, dans la partie boisée voisine, ont été découverts lors de travaux militaires en 1915, puis ultérieurement, un four de gobeletier et des amas de céramiques du ive s. (Les Allieux B). La clairière ayant été agrandie vers le nord‑est, une grande étendue de vestiges a été mise en évidence et, en 1981, des découvertes ont été faites par Guy Fournier (chef du secteur de Varennes à l’Office national des Forêts) à la bordure nord‑est, le long du chemin rural du Quart‑en‑Réserve (Les Allieux C).
55L’existence d’un atelier est attestée par la découverte d’un four et de supports de cuisson aux Allieux A, de vestiges de plusieurs fours, de supports de cuisson et de fragments de moules aux Allieux C.
56Le site est en prairie pour les Allieux A, replanté en chênes pour les Allieux C. La superficie présumée atteint plusieurs hectares, dont 1 ha environ pour les Allieux C.
■ Contexte historico‑géographique
57La clairière constitue le début d’une vallée alimentée par la fontaine de la Gaille, légèrement en aval du site et sensiblement de même orientation que celle de la Buante dont relèvent les autres ateliers du groupe. Les deux vallées sont séparées par une ligne de crête.
58D’après les documents recueillis, l’atelier est contemporain de celui de Lavoye. Il a continué à travailler aux iiie et ive s.
■ Activité céramique
59Il n’a pas été signalé sur le site de production céramique antérieure à la sigillée. En revanche, l’atelier a eu une importante activité dans le domaine de la céramique ornée à la molette (fin iie‑ive s.).
60L’importance approximative de la sigillée par rapport aux autres produits est difficile à déterminer, mais des gobelets noirs ainsi que des gobelets métallescents sablés à âme saumon (fin iie, début iiie s.) ont été produits en quantités importantes à proximité, en forêt de Hesse. L’atelier peut être considéré comme satellite de celui de Lavoye d’après le décor des moules.
■ Définition archéologique du matériel sigillé
61Des formes de sigillée lisse ont été repérées aux Allieux C : Drag. 18/31, 33, 40, Curle 15 (et Drag. 45). Aux Allieux A, on n’a pas d’indications à ce sujet, en dehors du fait que la forme Drag. 45 est bien représentée. Une vingtaine de noms de potiers ont été découverts sur l’ensemble du site, dont deux (plus un de lecture incertaine) aux Allieux C.
62Pour la sigillée décorée la décoration au moule n’a été signalée que sur la forme Drag. 37 ; les motifs en sont comparables à ceux de Lavoye. Aucun nom de décorateur de moules n’a été relevé. La technique du relief d’applique est employée sur la forme Drag. 45 (à déversoir orné d’un mufle de lion) qui est bien représentée dans l’atelier (8 types ou variétés de reliefs différents, dont 2 aux Allieux C).
■ La fabrication
63Divers outils ont été découverts sur le site : des supports de cuisson (aux Allieux A, B et C), des fragments de moules à Drag. 37 (aux Allieux A et C), 6 moules à reliefs d’applique (têtes de lion déversoirs pour Drag. 45). De nombreux supports de cuisson portent des graffites avant cuisson, mais Chenet les date du ive s. Un four à sigillée sûr (en ce qui concerne l’époque étudiée) a été découvert aux Allieux A, plusieurs autres, probables, aux Allieux C.
■ La diffusion
64Les Drag. 45 esquissent une diffusion vers la Bourgogne, la région au nord de la Seine jusqu’à Rouen et la Belgique.
■ Bibliographie
65Voir ouvrages et articles d’ensemble.
■ Responsable actuel du site
66Le Directeur des Antiquités historiques de la région de Lorraine.
La Caouette
67Le site est à la limite des communes de Vauquois et d’Avocourt, canton de Varennes‑en‑Argonne, arrondissement de Verdun, département de la Meuse ; altitude d’environ 220 m.
■ Contexte historico‑géographique
68Découvert et fouillé par G. Chenet entre 1912 et 1914 (après avoir été signalé en 1881), le site se trouve non loin (rive gauche) de la Buante, petit affluent de la rive droite de l’Aire, elle‑même affluent de l’Aisne qui se jette dans l’Oise. Il est tout proche de la « voie romaine unissant Senon à la Croix‑de‑Pierre et ainsi à la voie de Reims à Metz » (G. Chenet).
69La datation, indirecte, est fournie par les décors et la diffusion des produits: l’atelier semble contemporain de celui du Pont‑des‑Rèmes et légèrement antérieur à celui de Lavoye (moules moins usés, selon Chenet ‑ Goudron, 1955).
■ Activité céramique
70Aucune industrie céramique antérieure ni d’autre industrie céramique contemporaine de la production de la sigillée n’ont été signalées. En revanche un atelier de production de céramique ornée à la molette du ive s. a été découvert au Pont‑des‑Quatre‑Enfants, de l’autre côté de la Buante, à environ 500 m.
71Avec les productions de Tocca, La Caouette constitue un atelier‑jalon avec la Gaule centrale en raison de l’identité de certains motifs. Par la suite l’atelier semble être devenu un satellite de Lavoye.
■ Définition archéologique du matériel sigillé
72La forme des vases de sigillée lisse n’a pas été notée. Trois potiers sont signalés. Seule la décoration au moule paraît connue sur formes Drag. 37. Les décors appellent les mêmes observations qu’à Lavoye. Un décorateur de moules est bien attesté (Tocca). Seul l’assemblage de motifs propres à chaque décorateur permet de caractériser une production déterminée.
■ La fabrication
73À noter une signature intradécorative sur moule (Tocca). Trois fours au moins ont été découverts.
■ Les potiers
74Pour les migrations un cas significatif, celui de Tocca, qui a travaillé initialement à Blickweiler (50 % de sa production en Drag. 27, antérieurs au milieu du iie s., mais aucun vase moulé signé); il s’est établi à La Caouette où il commença à réaliser des moules signés et continua à fabriquer des vases unis. Il semble avoir terminé ses activités à Lavoye avec des productions moulées et unies, d’après l’étude détaillée des documents recueillis dans les ateliers argonnais.
■ La diffusion
75Elle est comparable à celle des produits de Lavoye.
■ Bibliographie
76Voir ouvrages et articles d’ensemble.
■ Responsable actuel
77Le Directeur des Antiquités historiques de la région de Lorraine.
Avocourt ‑ Le Champ‑des‑Bierres
78Le site occupe le plateau au nord d’Avocourt, canton de Varennes‑en‑Argonne, arrondissement de Verdun, département de la Meuse ; il s’étend sur le lieu‑dit Le Champ‑des‑Bierres et ses environs ; au nord vers La Ville‑de‑Paseas; à l’ouest le long du chemin conduisant à la forêt et au‑delà de celui‑ci ; à l’est sur les pentes de L’Argentière et, au delà de la route de Malaucourt, au Moustier ; altitude d’environ 245 à 260 m.
■ Circonstances de la découverte
79Des sondages avaient été pratiqués par G. Chenet avant 1914 mais ces gisements ont été bouleversés par la guerre. Des découvertes de surface y ont encore lieu régulièrement. Superficie présumée : une soixantaine d’hectares.
■ Contexte historico‑géographique
80L’implantation de l’atelier a un caractère rural, mais G. Chenet supposait l’existence sur le plateau d’un centre industriel, comme à Lavoye. Par ailleurs « le site est traversé en partie par la voie romaine unissant Senon à La Croix‑de‑Saint‑Pierre et ainsi à la voie de Reims à Metz » (G. Chenet). Il domine un ru qui alimente la Buante (voir ci‑dessus, notice sur La Caouette). La céramique recueillie (formes, marques, décors) permet de dater l’atelier du IIe s., avec prolongation au iiie s. (pour les Drag. 45).
■ Activité céramique
81Aucune industrie céramique antérieure ni industrie céramique autre, contemporaine de la production sigillée, ne sont attestées sur le site. En revanche des productions de céramique ornée à la molette du ive s. ont existé tant sur le plateau même qu’à l’ouest du chemin de la forêt (au Pré des Blanches).
■ Définition archéologique du matériel sigillé
82Les estampilles sont principalement épigraphiques mais diverses marques anépigraphes (rosettes) ont été recueillies sur le site.
83Les formes de sigillée lisse suivantes ont été recueillies en prospection : Drag. 18/31, 31, 32, 33, 36, 38 (et 45). Une vingtaine de noms de potiers ont été découverts, dont 4 à L’Argentière.
84La décoration au moule n’a été signalée que sur forme Drag. 37. Un décorateur de moules paraît possible : Tribunus, à moins que le moule en cause ne corresponde à une livraison de Lavoye. Par ailleurs une série peu connue témoigne de l’existence de décors décadents bien caractéristiques et imputables à Vitalis. La décoration de guillochis à la roulette a été signalée également à L’Argentière. La technique du relief d’applique est employée sur la forme Drag. 45 (déversoir orné d’un mufle de lion) qui est particulièrement bien représentée dans l’atelier (11 types de reliefs différents connus jusque là).
■ La fabrication
85Des outils ont été découverts sur le site en sondages ou en prospections : un galet lissoir, des accessoires d’enfournement divers, des fragments de moules. Au moins 5 fours ont été décelés dont 1 fouillé, au moins partiellement, avec sa chaufferie, à L’Argentière.
■ Les potiers
86Une dizaine de potiers du Champ‑des‑Bierres se retrouvent à Lavoye, 4 au Pont‑des‑Rèmes (et 4 aux Allieux, mais il s’agit là du même groupe d’ateliers).
■ La diffusion
87Les formes Drag. 45 du llles. ont été diffusées dans le nord‑est de la Gaule, en Belgique et sur le limes rhénan.
■ Bibliographie
88Voir les ouvrages et articles d’ensemble.
89CHENET (G.). — Les Potiers gallo‑romains d’Avocourt en Hesse. R.A., V, 1917, pp. 150‑157 (cartes des emplacements).
90GUILLAUME (J.). — Nouvelles découvertes de signatures de potiers gallo‑romains en Argonne. C.L., n. s. 22e année, no 3 — juillet 1970, pp. 65‑72 (1 pi.).
91MITARD (P.‑H.). — Mortiers Drag 45 de la Gaule de l’est : l’atelier argonnais du Champ‑de‑Bierres à Avocourt (Meuse). R.C.R.F. Acta XIX/XX, 1979, pp. 85‑95 (fig. et carte).
■ Responsable actuel du site
92Le Directeur des Antiquités historiques de la région de Lorraine.
La forêt de Hesse
93Outre les fours et dépôts proches de la lisière occidentale de la forêt rattachés à l’atelier des Allieux, l’existence d’officines a été reconnue par G. Chenet dans la partie centrale de la forêt: aux abords du Rendez‑vous‑de‑chasse, commune d’Avocourt, en 1910 (vases unis et bols décorés manqués probablement du IIe s.); au lieu‑dit Le Haut‑Mulard, commune d’Aubréville, mais à 500 m environ au nord‑ouest du point précédent, en 1914 (vases estampillés DISETO.FE, nombreux gobelets noirs ou métallescents, grandes cruches à deux anses). On ne sait rien de plus au sujet de ces officines ; mais un nouvel atelier a été découvert récemment près de la lisière nord à 3 km environ plus à l’est, à 1 900 m sud‑sud‑est du centre d’Avocourt et c’est celui‑ci qui a pris le nom d’« atelier de la forêt de Hesse ».
94Le terrain sur lequel a été découvert l’atelier se trouve dans le département de la Meuse, arrondissement de Verdun, canton de Varennes, territoire des communes d’Avocourt et de Dombasle, dans la forêt de Hesse, parcelle 56 ; altitude d’environ 250 m.
■ Circonstances de la découverte et état du site
95Le site archéologique en question a été découvert durant l’hiver de 1977 à 1978 par M. Guérin, maire de Varennes, et Mme Guérin, lors d’une promenade faite en forêt de Hesse. Par la suite des sondages furent entrepris à deux reprises, sondages dont l’exécution fut confiée à une équipe de la S.H.A.L., section de Sarrebourg, dirigée par le R.P. Morand Hartmann. Sur le terrain, peu de temps après la découverte, les nombreux tessons rencontrés en surface se groupaient par endroits, révélant à coup sûr l’existence d’ateliers isolés. Les sondages ont été remblayés. Malheureusement le four qui avait été mis au jour et trouvé dans un excellent état n’a pu être protégé à temps avant les rigueurs de l’hiver et au printemps suivant le gel l’avait totalement ruiné. Il est difficile d’estimer la superficie occupée par l’officine dont une bonne partie ne se trouve pas dans la zone déboisée : en tout cas il doit s’agir au minimum d’une surface de 500 x 500 m avec des extensions probables dans la forêt voisine.
■ Contexte historico‑géographique
96Le site se trouve en territoire médiomatrique, en Gaule Belgique, à peu de distance du territoire des Rèmes dont la capitale, Reims, était une cité fédérée tandis que Diuodurum‑Metz était fort probablement de statut stipendiaire. L’officine a une implantation rurale et fait partie de tout un groupe (cf. B. Hofmann et P.‑H. Mitard). Rien n’est connu de son éventuelle insertion dans une cadastration antique. Le site est à quelque distance de la voie romaine Reims‑Strasbourg et de deux autres voies antiques (Châlons‑sur‑Marne à Verdun et Bar‑le‑Duc à Arlon). D’autre part, la Meuse se trouve à environ 15 km. Il semble que dans l’Antiquité la forêt ait été importante.
97L’argile affleure en quantité, cependant nous n’en connaissons pas les caractéristiques, et les sables avoisinent. Ruisseaux et sources abondent. Le bois dont on dispose aujourd’hui est essentiellement du hêtre et du frêne ; nous manquons de renseignements pour l’Antiquité.
98La datation de l’atelier n’est pas encore établie de façon précise mais doit correspondre, du moins pour la période d’activité principale, à l’époque antonine (cf. par exemple les formes de la sigillée unie). L’existence d’autres activités industrielles ou artisanales a été constatée à proximité pour l’Antiquité : verreries, forges et bien entendu le bois et les artisanats qui en découlent, sans qu’il existe de textes à ce sujet. L’Argonne a sans doute été de tout temps une voie de passage. Toutefois nous ne connaissons pas de traces d’installations militaires.
■ Activité céramique
99La plus grande activité de l’atelier se situe probablement dans le deuxième quart du IIe s. A‑t‑il subi les contrecoups de la crise dont nous avons parlé, vers 160‑ 170, ou bien au contraire en a‑t‑il profité ? En tout cas il semble que certains potiers qui s’étaient installés, soit dans les officines de la rive droite du Rhin, soit dans celles de la rive gauche, aient fini par refluer vers l’Argonne au moment où la pression barbare s’accentuait.
100Il est encore trop tôt pour estimer avec précision la place de la sigillée dans la production totale qui, comme nous le savons, comprenait également de la céramique vernissée et de la céramique commune. La sigillée semble cependant avoir été la première production de l’atelier. Pour l’instant nous ne connaissons aucune production tardive. Il est à peu près certain que cet atelier de la forêt de Hesse fait partie du groupe des officines argonnaises, mais nous ne savons pas à quel titre.
■ Définition archéologique du matériel sigillé
101La pâte correspond au no 6 de la table de R. Steiger et le film au no 16 de cette même table.
102La plus grande partie des estampilles sont épigraphiques dans des cartouches rectangulaires aux angles tantôt arrondis, tantôt aigus. Certains de ces cartouches sont de dimensions plus grandes que la normale (par exemple 24 x 6 mm). Certaines cales de four portent une estampille épigraphique. L’étude n’a pas encore été suffisamment poussée pour citer un chiffre quelconque de potiers, tant pour la sigillée unie que pour la sigillée ornée. Pour la sigillée unie on peut cependant noter les formes Drag. 32, 40, 18/31, 33, 46, ainsi que des mortiers comme Curle 21 ou Drag. 45. Un premier aperçu sur la sigillée ornée semble nous ramener à des motifs décoratifs et à des scènes rencontrés dans les autres ateliers d’Argonne. En outre la forme Drag. 45 est bien attestée par la découverte d’un moule et par de nombreux reliefs déversoirs (mufles de lion), appartenant à une dizaine de types différents, dont deux particulièrement importants par leur diffusion qui couvre tout le nord de la France à partir de la vallée de la Seine, ainsi que la Belgique et la Hollande. L’un de ces types se situe parmi les plus précoces (180‑190).
■ La fabrication
103À part les cales et autres accessoires de cuisson, on ne signale pas d’outillage. Environ vingt fours ont été décelés dont deux seulement ont été fouillés et trouvés en excellent état. Il s’agit de fours de forme ronde avec sole d’un diamètre d’1 m, enfermés dans un massif de gaize d’une épaisseur de 0,60 m ; à part ces fours, les seules installations rencontrées ont été deux aires dallées qui représentent peut‑être des sols d’ateliers.
■ Les potiers
104En ce qui concerne les potiers, il a déjà souvent été question de la position des potiers d’Argonne par rapport aux autres potiers de la Gaule de l’est (cf. notamment : CHENET (G.), GAUDRON (G.). — La Céramique sigillée d’Argonne des iie et iiie siècles. Paris, 1955 ; LUTZ (M.). — L’Atelier de Saturninus et de Satto à Mittelbronn (Moselle). Paris, 1970 et la bibliographie citée dans cet ouvrage).
■ La diffusion
105Cf. Chenet, Goudron, op. cit., fig. 54, p. 210. Cette distribution est surtout sensible sur le Rhin et aux Pays‑Bas. Mais on signalait récemment la présence de sigillée d’Argonne également à Budapest et même à Ankara.
■ Bibliographie
106LUTZ (M.). — Où il est à nouveau question de céramique antique d’Argonne. Horizon d’Argonne, Bar‑le‑Duc, 1981‑1983, pp. 12‑16.
■ Collection principale et lieu de conservation
107Le mobilier provenant de la forêt de Hesse est conservé au musée de Varennes‑en‑Argonne.
■ Responsable actuel du site
108Le Directeur des Antiquités historiques de la région de Lorraine.
Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
Mottes castrales en Provence
Les origines de la fortification privée au Moyen Âge
Daniel Mouton
2008
Géoarchéologie de sites préhistoriques
Le Gardon (Ain), Montou (Pyrénées-Orientales) et Saint-Alban (Isère)
Dominique Sordoillet
2009
L’enceinte des premier et second âges du Fer de La Fosse Touzé (Courseulles-sur Mer, Calvados)
Entre résidence aristocratique et place de collecte monumentale
Ivan Jahier (dir.)
2011
Lyon, Saint-Georges
Archéologie, environnement et histoire d’un espace fluvial en bord de Saône
Grégoire Ayala (dir.)
2012
Les gisements précolombiens de la Baie Orientale
Campements du Mésoindien et du Néoindien sur l’île de Saint-Martin (Petites Antilles)
Dominique Bonnissent (dir.)
2013
L’Îlot du palais de justice d’Épinal (Vosges)
Formation et développement d’un espace urbain au Moyen Âge et à l’époque moderne
Yves Henigfeld et Philippe Kuchler (dir.)
2014
Bettencourt-Saint-Ouen (Somme)
Cinq occupations paléolithiques au début de la dernière glaciation
Jean-Luc Locht (dir.)
2002
Campements mésolithiques en Bresse jurassienne
Choisey et Ruffey-sur-Seille
Frédéric Séara, Sylvain Rotillon et Christophe Cupillard (dir.)
2002
Productions agricoles, stockage et finage en Montagne Noire médiévale
Le grenier castral de Durfort (Tarn)
Marie-Pierre Ruas
2002