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La prospection archéologique

 | 
Alain Ferdière
, 
Elisabeth Zadora-Rio

Les modes d’échantillonnage

Recherches sur l’habitat antique dans la dépression permienne du Var (France)

Fiona Cameron

Zusammenfassung

En 1981 et 1982, un programme de prospections systématiques a été entrepris dans la dépression permienne, grande plaine qui s’étend de Toulon à Fréjus. Ce programme sera la base d’une étude sur l’évolution de l’habitat et la répartition des sites de la fin de l’Age du Fer au début du Haut Moyen Age dans cette région. A cause de la grande étendue de cette plaine, il fallait choisir un système d’échantillonnage. Dans une région mal connue, on a décidé de commencer par un échantillon au hasard de 20 %, dans une zone de 60 km9. A partir de l’expérience de la première saison de travail, on a choisi un système de bandes de 1,5 km de large, traversant la dépression à quatre endroits différents, à cause des problèmes d’accès. Les bandes étaient mises en place subjectivement, dans les zones où l’on peut avoir accès à une proportion importante de terrains. Vu les effets de la viticulture sur les vestiges anciens, un système de hiérarchie des sites a été utilisé, qui a pour base la qualité des trouvailles et non la dimension de la concentration. Durant ce programme, il est apparu évident que le système d’échantillonnage au hasard peut être un bon point de départ dans une région assez mal connue, mais il faut reconnaître que les emplacements des habitats anciens ont été choisis subjectivement et qu’on peut donc les rechercher de la même manière.

Volltext

  • 1 BRUN (J.‑P.), ANTONETTI (J.). — Inventaire archéologique de la Commune de Rocbaron. Annales de la S (...)

1Dans le cadre d’un inventaire des sites archéologiques engagé par le Centre de Documentation Archéologique du Var (C.D.A.V.) à Toulon, un certain nombre de communes du sud du Var ont été déjà examinées1. Jusqu’à présent, cependant, des problèmes financiers et de temps ont empêché l’exécution d’un programme de prospections systématiques. En 1981 et 1982, grâce à des bourses d’étude de l’institut d’Archéologie de l’Université de Londres, on a entrepris un tel programme au nord‑est de Toulon dans la dépression permienne (fig. 1). Ce programme sera la base d’une étude sur l’évolution de l’habitat et la répartition des sites, de la fin de l’Age du Fer jusqu’au début du Haut Moyen Age, dans cette grande plaine qui forme une des plus vastes étendues de terres cultivables de toute la région. Quelques communes de la dépression ont déjà été prospectées par l’équipe du C.D.A.V. et, de plus, les chantiers de fouilles importants qui y ont été menés permettront d’éclairer les résultats des prospections. Le travail a porté, pendant l’été 1981, sur les communes de Puget‑Ville, Carnoules et Pignans, alors assez mal connues, et, en 1982, sur la commune de Gonfaron, où se trouvent plusieurs sites intéressants.

• 1. Situation de la dépression permienne à l’époque gallo‑romaine.

2La dépression permienne, ainsi nommée à cause de son origine géologique, est une grande plaine qui s’étend de la côte méditerranéenne à l’est de Toulon jusqu’à Fréjus, où elle se nomme plutôt « basse vallée de l’Argens ». Longeant le massif cristallin des Maures, elle le sépare des plateaux calcaires qui se trouvent à l’ouest et possède les caractéristiques des deux régions. Elle est en général formée de trois zones bien délimitées : une zone de collines, aux pentes raides couvertes d’une dense garrigue ou de forêts ; une petite zone, en bas de pente, caractérisée par des cultures en terrasses ; et enfin la plaine elle‑même, d’une étendue très variable, présentant une légère pente vers le sud‑est. La plaine est irriguée par des ruisseaux descendant des massifs calcaires à l’ouest, mais la plupart sont à sec en été. Les sols de la dépression comprennent des sédiments argilo‑calcaires, des alluvions gris‑jaunâtre, des graviers autour des ruisseaux et, plus près du massif des Maures, des sols schisteux. Cette région convient bien à l’agriculture mais son rôle comme voie de communication doit aussi être souligné. De nos jours, l’autoroute, prolongée par la route nationale et le chemin de fer, l’emprunte pour relier Toulon à Fréjus et à la route de l’Italie.

3A l’époque gallo‑romaine, la via Aurélia suivait à peu près le même tracé que l’autoroute Fréjus‑Aix, jalonnée par les stations routières de Matavo (Cabosse) et Forum Voconii (Les Blaïs, près de Vidauban) (Boyer, Février 1959 : 162‑185). Il est fort vraisemblable qu’une route située dans l’axe de la dépression permienne reliait Forum Voconii à la côte méditerranéenne et aux villes côtières de Telo Martius (Toulon) et Olbia‑Pomponiana (Hyères). De plus, une route maritime fréquentée longeait la côte, comme en témoignent de nombreuses épaves de toutes époques. La plaine elle‑même pourrait avoir été centuriée à l’époque romaine. Cette hypothèse a été faite à partir de photographies aériennes (Soyer 1973 : 197 sq.), mais reste encore à prouver sur le terrain.

4Il fallait choisir la méthode de prospection la plus adaptée à la région. Vu l’étendue de la zone, il était impossible de la prospecter entièrement. Des problèmes financiers et de temps nous ont obligés à choisir une méthode d’échantillonnage. Puisque cette région n’avait fait l’objet d’aucun programme de prospections systématiques, il nous a semblé utile de commencer par un échantillonnage au hasard. Pour l’année 1981, nous avons choisi une zone de quelque 60 km2, dans les communes de Puget‑Ville, Carnoules et Pignans pour commencer le programme ; nous les avons divisées en carrés de 500 m de côté d’après les coordonnées Lambert, sur une carte à l’échelle 1/25 000. Les carrés ont été ensuite numérotés en deux séries afin de séparer les carrés situés dans la zone des collines de ceux de la plaine, et un échantillonnage de 20 % fut choisi par table de hasard. La zone de prospection a traversé toute la dépression, en comprenant des zones de collines, de bas de pentes et de plaine. Pendant deux mois (été 1981), nous avons couvert 9 km2, en prospectant les champs tous les 10 m. Quelque quinze sites inconnus, surtout de l’époque gallo‑romaine, ont été trouvés pendant cette opération. Les sites ont été décrits sur des fiches indiquant l’emplacement, la topographie, le type de sol, l’état de conservation, l’étendue, les cultures modernes ou la végétation (vignes, terre arable, etc.) et une liste des trouvailles.

5Après cette première saison de travail, il est devenu évident que les trois zones, collines, bas de pentes et plaine, posaient des problèmes différents et il fut donc possible de choisir le système le plus efficace pour prospecter cette région. En fait, dans la zone des collines, il y a des problèmes d’accès, à cause des forêts qui sont souvent vraiment impénétrables. On peut suivre les nombreux petits chemins de chasseurs, mais, en plusieurs endroits, il est impossible de marcher à travers les arbres. Il semble, de plus, que c’est dans cette zone, au sommet des collines, que se trouvent la plupart des oppida de l’Age du Fer, des sites paléochrétiens et des villages du Haut Moyen Age.

6Dans la zone en bas de pente, les problèmes d’accès sont dus à des facteurs humains : les villes modernes commencent à apparaître partout. C’est surtout autour des villages, à proximité de Toulon et de la côte méditerranéenne, que l’on trouve ces nouveaux bâtiments avec leurs clôtures de propriété privée et leurs chiens méchants ; il devient de plus en plus difficile de prospecter dans cette zone. Pourtant, c’est souvent à cause des constructions nouvelles que des vestiges anciens sont révélés. Il semble cependant que, la plupart du temps, les sites disparaissent sans aucune trace. Or, il est fort possible que cette zone ait contenu la plus grande concentration d’habitats anciens, pour les mêmes raisons qui y attirent les constructions actuelles. Il est vrai cependant que, dans la dépression permienne, la plupart des villages modernes se trouvent en bas de pente et que ceux qui sont au sommet des collines ont une origine plus ancienne.

7La majeure partie de la superficie de la dépression permienne se trouve dans la zone centrale de la plaine. Les accès sont plus aisés et on peut prospecter au moins 80 %, ou même 90 % des terrains. Presque toutes les parcelles sont aujourd’hui plantées de vignes, et, mis à part des champs en friche, la visibilité au sol est toujours bonne. Nous avons donc décidé de travailler selon un système de bandes de 1,5 km de large comprenant chacune les trois zones. Pourtant, si l’on choisit les emplacements des bandes par table de hasard, on risque de tomber sur les villages ou des zones impossibles à prospecter. Il a donc semblé plus efficace de mettre les bandes en place subjectivement, dans les régions où l’on peut être sûr d’avoir accès à une proportion importante des terrains. Nous avons déterminé en sus quelques zones de prospection pour résoudre des problèmes particuliers, comme, par exemple, ceux posés par la proximité relative de deux grandes villae romaines, afin de les mettre en relation entre elles.

8La viticulture, qui est si répandue dans la dépression permienne, en bas de pente ainsi qu’au milieu de la plaine, pose quelques problèmes particuliers et il faut étudier ses effets sur le terrain par rapport aux vestiges archéologiques et à leur état de conservation. Bien que les champs de vignes ne soient pas souvent labourés, les tracteurs passent entre les vignes plusieurs fois par mois (traitements chimiques divers, etc.). Le résultat est que les trouvailles de surface sont très abîmées. C’est souvent sur les sillons qui ne sont pas touchés par les machines que l’on peut trouver les plus grands tessons. De plus, l’éparpillement des trouvailles peut couvrir une étendue disproportionnée par rapport à l’importance du site. Récemment, on a commencé à arracher les vignes tous les quinze ou vingt ans et à labourer les champs très profondément. Les défoncements se font à l’aide d’une grande charrue, la « balance », qui peut pénétrer jusqu’à 80 cm de profondeur. Cette charrue est suivie par un camion et, quand elle rencontre de gros blocs de pierre, voire des blocs d’architecture ancienne, ils sont ramassés et immédiatement emportés. On peut imaginer facilement le dommage fait aux vestiges archéologiques. Par ailleurs, les sites n’étant pas souvent labourés, il y a rarement des vestiges nouveaux qui remontent en surface et, lorsqu’on ramasse tous les tessons d’un site donné, il arrive qu’il soit très difficile d’en retrouver par la suite. Il est aussi très difficile de voir des traces sur les photographies aériennes dans les zones plantées en vignes.

9A cause de l’état de conservation des vestiges, on est obligé de chercher un système de hiérarchie des sites d’époque romaine dans lequel la superficie de l’éparpillement ne soit pas le critère le plus important. De toute façon, il est toujours très difficile de distinguer entre certaines catégories de fermes ou villae et, quand les étendues sont importantes, il est plus judicieux de les classer en fonction de la qualité des trouvailles. Nous avons tenté de distinguer les catégories suivantes :

10— villa : présence d’objets témoignant d’un certain luxe (mosaïque, colonnes, peintures, marbres, fragments d’architecture, par exemple) ;

11— ferme : absence d’objets de luxe, mais proportion importante de céramiques fines ou communes (souvent les deux), éventuellement présence de verre, de tuiles, dolia, etc ;

12— cabane : quelques morceaux de tuiles et peut‑être de dolia, céramique commune, etc. ;

13— tombes: surtout os, morceaux de tuiles, sans dolia, etc. ; mais elles sont souvent difficiles à distinguer des cabanes, car il y a des tombes utilisant des amphores et des dolia.

• 2. Emplacement des bandes de prospection.

14Durant les années 1981 et 1982, nous avons effectué les prospections de la bande II (fig. 2) et commencé celles de la bande V ; mais il faudra quelques années de plus pour achever tout le programme. Nous espérons pouvoir mettre l’habitat rural de la dépression permienne en relation avec la géologie et la topographie de celle‑ci, avec l’habitat urbain, et peut‑être établir son évolution chronologique, au moins pour l’époque gallo‑romaine. Cependant, il semble évident que, pour mener à bien un tel programme de prospections systématiques, il faut choisir une méthode de travail conforme aux objectifs et adaptée à la région étudiée. Bien que le système d’échantillonnage au hasard puisse être un bon point de départ dans une région assez mal connue, il est trop dangereux de tenter de comprendre toute l’occupation du sol à partir d’une base de 20%. De plus, il faut aussi reconnaître l’importance des informations que l’on peut avoir par les contacts avec les gens de la localité, prospecteurs locaux, propriétaires et paysans, maires de communes, etc. Enfin, puisque les emplacements des habitats anciens ont été choisis subjectivement, il faut les rechercher de la même façon.

15(Traduction F. CAMERON et P. BRUN)

Literaturverzeichnis

Bibliographie

Agulhon 1970 : AGULHON (M.). — La Vie sociale en Provence intérieure au lendemain de la Révolution. Paris, 1970.

Boyer. Février 1959 : BOYER (R.), FÉVRIER (P.‑A.). — Stations routières romaines de Provence. Revue d’Etudes Ligures, t. XXVI, 1959.

Livet 1962 : LIVET (R.). — Habitat rural et structures agraires en Basse Provence. Aix‑en‑Provence, 1962.

Soyer 1973‑1974 : SOYER (J.). — Les Centuriations de Provence. Revue Archéologique de Norbonnaise, t. VI et VII, 1973 et 1974.

Anmerkungen

1 BRUN (J.‑P.), ANTONETTI (J.). — Inventaire archéologique de la Commune de Rocbaron. Annales de la Société des Sciences Naturelles et d’Archéologie de Toulon et du Var, 1977. BRUN (J.‑P.). — Recherches sur les villages gallo‑romains situés à l’ouest de Toulon. Toulon‑Aix‑en‑Provence, 1977, Multigraphie (collection C. Bottin).
GALLIAND (S.), PASQUALINI (M.), REYNIER (J.). ‑ Carte Archéologique de la Commune de Taradeau. Annales de la Société des Sciences Naturelles et d’Archéologie de Toulon et du Var. Par ailleurs un programme de prospection des communes de l’ouest varois est en cours sous la direction de M. H. Ribot.

Abbildungsverzeichnis

Bildunterschrift • 1. Situation de la dépression permienne à l’époque gallo‑romaine.
URL http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/31833/img-1.jpg
Datei image/jpeg, 67k
Bildunterschrift • 2. Emplacement des bandes de prospection.
URL http://books.openedition.org/editionsmsh/docannexe/image/31833/img-2.jpg
Datei image/jpeg, 106k

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