La prospection archéologique
| ,La prospection et les inventaires régionaux
La commune de Sint‑Martens‑Latem (Belgique)
Résumé
Depuis le mois d’octobre 1979 jusqu’au mois de mai 1981, une prospection archéologique a été effectuée à Sint‑Martens‑Latem, une commune située aux environs de Gent (Gand) au milieu de la Flandre sablonneuse. La combinaison d’une prospection systématique du terrain avec une étude des autres sources disponibles offre la possibilité de détecter un grand nombre de sites dans la région choisie. Pour une approche systématique de la deuxième phase, l’enregistrement et la description des données rassemblées, il est nécessaire d’utiliser une fiche très diversifiée et d’employer un seul système de dossier pour la description analytique de chaque site. Le travail se termine par l’interprétation des trouvailles archéologiques et cela sur deux niveaux : une interprétation de chaque site individuel et une interprétation en forme de synthèse qui place tous les sites détectés dans leur contexte chronologique et régional.
Texte intégral
- 1 VERMEULEN (F.). — Sint-Martens-Latem. Archaeologisch Inventons Vlaanderen, I, Gent, 1983.
1Nous avons l’intention de présenter le dossier de recherche d’une étude archéologique entreprise récemment, dans le cadre d’un mémoire de licence à l’Université de Gand1. Nous allons surtout mettre l’accent sur quelques aspects méthodologiques de cette étude, tels que par exemple le mode d’enregistrement des données.
- 2 Pour une description plus détaillée de ce cadre morphologique nous nous référons à : DAELS (L.), VE (...)
2Il nous faut d’abord définir succinctement la région concernée. D’octobre 1979 à mai 1981, une prospection systématique a eu lieu sur le territoire de la commune de Sint‑Martens‑Latem. Cette commune, qui se trouve au sud‑ouest de Gand, fait partie de la Flandre sablonneuse. Du point de vue des paysages, Sint‑Martens‑Latem présente une morphologie très variée et intéressante. La topographie généralement assez plane dans ce paysage de la Lys alterne avec un micro‑relief bien développé. Cette alternance topographique et des différences d’ordre pédologique et agricole permettent de définir cinq types de paysages différents. On y trouve d’abord la zone alluviale de la Lys, basse et humide, qui est en majeure partie occupée par des prés ; ensuite une zone sablonneuse plus élevée, qui présente un caractère paysager plutôt ouvert et qui a été mise en culture depuis des siècles. On y dénombre également deux dépressions à occupation des sols très variée ; et enfin une partie de la commune est recouverte par des terrains plus élevés, à topographie dunaire prononcée, et couverts de bois2.
3Non seulement cette remarquable variété du cadre physique, mais aussi les avantages indéniables de l’ordre de la géographie historique que cette commune pouvait nous offrir, justifiaient pleinement le choix de cette unité pour ce type de recherche. Il ne faut pas non plus négliger le fait que le chercheur était familiarisé tant avec la commune elle‑même qu’avec ses habitants.
- 3 Voir la contribution de P. Fasham sur l’initiation à la prospection au sol (Approaches to fieldwalk (...)
- 4 C’est surtout par la méthode dite régressive, mentionnée par F. Verhaeghe ailleurs dans cet ouvrage (...)
4Du point de vue méthodologique, ce type de recherche peut se subdiviser en deux grandes parties, d’une part un volet analytique et d’autre part un volet plus synthétique. L’analyse comprend la détection, l’enregistrement et l’interprétation de tous les vestiges et sites archéologiques de la région concernée. A la base de la détection se trouve la prospection systématique exécutée suivant la méthode habituelle de fieldwalking, c’est‑à‑dire que l’on parcourt l’unité de travail choisie en récupérant le matériel découvert en surface et en notant toutes les anomalies qui pourraient témoigner d’une activité humaine dans le passé3. Parallèlement à cette recherche, on fait appel à toutes les sources qui peuvent fournir des renseignements concernant la reconstruction du paysage dans le passé4. Nous citons plus particulièrement les cartes anciennes ou récentes, les photographies aériennes, les documents historiques, les renseignements fournis par la population locale, les sondages pédologiques et enfin les renseignements provenant des musées et de la littérature archéologique et historique.
5Un deuxième élément fondamental de cette recherche concerne la méthode d’enregistrement. Il va de soi qu’un inventaire archéologique régional doit être basé sur un enregistrement systématique de toutes les données disponibles et nécessaires. C’est d’ailleurs la seule manière d’obtenir des renseignements totalement uniformes qui permettent de comparer différents sites entre eux. C’est dans cette optique que nous avons utilisé un type de fiche systématique qui tient compte d’un certain nombre de données objectives concernant chaque site (fig. 1). Chaque fiche archéologique reçoit un numéro d’ordre qui permet de se référer au site et qui correspond également à un dossier où ce site et cette découverte sont étudiés de façon analytique et détaillée. Ces fiches sont datées et remplies dès le moment où l’une ou l’autre découverte est considérée comme suffisamment importante. En cas de doute ou de découverte incertaine, on peut toujours remplir une fiche et constituer un dossier. De nouvelles données peuvent toutefois rendre cette fiche et ce dossier inutiles, de telle sorte que l’on peut alors les éliminer. Ce fait n’a pas d’influence sur la numérotation d’ensemble.
6Les données les plus importantes que l’on trouve sur cette fiche concernent le nom de la commune, la description de l’objet et la localisation de la découverte sur une carte topographique récente. De plus, ces fiches sont conçues de telle sorte que l’on peut faire une distinction entre les données topographiques du site, le lieu de dépôt des trouvailles, les circonstances de la découverte, la description des objets, la chronologie, l’état de conservation et l’analyse éventuelle de l’objet, les illustrations et éventuellement la bibliographie concernée. Ces renseignements, quoique sommaires, sont essentiels et se réfèrent à une description détaillée du site ou de la découverte dans un dossier archéologique qui a également été construit de façon systématique. Un premier chapitre concerne à nouveau la localisation précise et détaillée du site. On y trouve les coordonnées des cartes topographiques et pédologiques, suivies d’une énumération des parcelles cadastrales anciennes et modernes. On peut considérer la localisation sur carte topographique comme étant la localisation‑type. Ce chapitre est suivi d’une description du contexte général dans lequel le site se trouve. Y sont reprises des informations concernant le caractère des sols, la localisation générale dans la commune, la hauteur du terrain, le contexte archéologique immédiat du site et éventuellement l’accès aux terrains étudiés. Dans un troisième paragraphe sont regroupées les données purement archéologiques. Nous entendons par là une description très détaillée des terrains où les découvertes ont été faites, une énumération de tous les résultats obtenus par la prospection (avec mention des dates, circonstances, constatations, etc.), et enfin une discussion analytique détaillée du matériel. D’anciennes découvertes ou fouilles sur le site sont aussi reprises dans ce chapitre archéologique. Un quatrième paragraphe contient une description et une discussion des données extraites d’autres sources. Celles‑ci, que nous avons déjà énumérées, fournissent des renseignements moins complets que le terrain et le matériel archéologique, mais permettent parfois d’expliquer certains phénomènes si elles sont utilisées à bon escient.
7L’interprétation enfin peut être considérée comme le dernier volet de l’analyse. Par la coordination de tous les renseignements, on tente de définir pour chaque site le caractère spécifique, l’aspect original, la datation, etc. Si l’on veut bien comprendre certains de ces renseignements, il apparaît souvent que l’on doit se référer aux informations provenant d’autres sites. Cette interprétation reste toutefois limitée au site.
8Du point de vue pratique, on peut subdiviser la partie analytique en quatre volets : les fiches archéologiques, les dossiers archéologiques, les cartes et plans et enfin une partie illustrative. Ces quatre éléments peuvent être considérés comme des annexes à la partie synthétique.
9Le texte de synthèse comprend d’abord une introduction où sont abondamment décrites les méthodes de détection, d’enregistrement et d’interprétation. Les sources utilisées sont également soumises à la critique et les problèmes de base exposés. La suite est axée plus spécifiquement sur la zone étudiée, dans le cas présent la commune de Sint‑Martens‑Latem. Il va de soi que chaque étude régionale doit être basée sur une connaissance approfondie du milieu naturel. Cette connaissance s’acquiert en premier lieu lors de la prospection. Par ailleurs, on ne peut nier que l’habitat et l’occupation du sol dans le passé aient été grandement conditionnés par l’état des sols. Afin de mieux apprécier le rapport entre l’habitat et le soi et afin de mieux comprendre le développement du paysage actuel, il est nécessaire d’étudier en détail le cadre naturel de cette région. Outre cette étude de la géologie, de la pédologie et des caractères morphologiques du paysage de la région concernée, il faut également prendre en considération les éléments essentiels du paysage culturel de Sint‑Martens‑Latem. Cela ne concerne pas uniquement l’habitat et le réseau routier, mais également le système agraire et l’organisation parcellaire du territoire. Cette description, que l’on peut considérer comme une photographie de la situation actuelle, comprend une série de caractéristiques du paysage culturel, qui par leur aspect trop général ne sont pas prises en considération par l’enregistrement normal avec fiches et dossiers. Nous pensons plus spécialement à la morphologie générale des parcelles et au système de drainage dans la région.
- 5 Nous remercions vivement J. Bourgeois de nous avoir aidé à traduire ce texte du néerlandais.
10Le noyau de ce texte de synthèse comprend l’interprétation globale des données archéologiques disponibles. Ces résultats sont d’abord décrits sommairement par période (avec référence aux fiches et dossiers) pour être ensuite mis en rapport avec le fonds historique et géographique connu. On peut ainsi tenter de mieux comprendre l’évolution qui a mené au paysage culturel actuel. Cette synthèse pourrait enfin s’achever par des considérations sur l’apport réel de la prospection à la méthodologie de la recherche dans une région donnée5.
11(Traduction J. BOURGEOIS et F. VERMEULEN)
Notes
1 VERMEULEN (F.). — Sint-Martens-Latem. Archaeologisch Inventons Vlaanderen, I, Gent, 1983.
2 Pour une description plus détaillée de ce cadre morphologique nous nous référons à : DAELS (L.), VERHOEVE (A.). — Het landschap van Sint-Martens-Latem, verleden, heden en toekomst. Jaarboek Heemkring Scheldeveld, V, 1974, pp. 27-51.
3 Voir la contribution de P. Fasham sur l’initiation à la prospection au sol (Approaches to fieldwalking). Il faut toutefois remarquer que pour la prospection au sol à Sint-Martens-Latem, l’intervalle de marche sur terre arable était nettement plus petit (3 ou 4 m) que la distance usuelle pour le fieldwalking en Angleterre.
4 C’est surtout par la méthode dite régressive, mentionnée par F. Verhaeghe ailleurs dans cet ouvrage, que l’on fait appel à ces sources.
5 Nous remercions vivement J. Bourgeois de nous avoir aidé à traduire ce texte du néerlandais.
Table des illustrations
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Légende | • 1. Fiche archéologique : base de la prospection du terrain (par J. Nenquin). |
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Fichier | image/jpeg, 87k |
© Éditions de la Maison des sciences de l’homme, 1986