1 Voir à ce sujet les remarques de Veyne, 1988, p. 19-22.
2 Voir aussi Passeron, 1991, p. 257-258.
3 Nous pouvons penser en effet qu’il existe d’autres expressions du détail particulier que la distraction ou l’engagement minimal.
4 Voir France, 1982.
5 Voir aussi Wright, 1991.
6 Cette explication est d’autant plus plausible que l’on sait qu’à la fin du siècle dernier, la photographie était largement utilisée dans la production d’informations ethnologiques. La photographie, c’est alors la supériorité technologique, métaphore du pouvoir colonial, et une perception réaliste qui authentifie l’objet ethnologique représenté sous la forme typique et stéréotypée du spécimen. Les Notes and Queries, le manuel ethnographique de l’époque, valorise la photographie par laquelle l’observateur traite de faits non remis en cause et, de là, transmissibles à d’autres chercheurs. Portman, un anthropologue, pense que presque chaque activité de la vie quotidienne peut être photographiée. Un peu plus tard, Malinowski pense encore que les photographies peuvent aider à contrôler les notes de terrain et à reformuler certaines affirmations. Mais progressivement, la crise de confiance va s’instaurer. L’effet dénotatif de la photographie se laisse absorber par les dangers de la connotation : trucage, effets esthétiques… La surface de la photographie effraie et son autorité est de plus en plus incertaine. S’impose la dimension objectivante du texte ethnologique qui veut se démarquer d’autres genres (récits de voyage…), et le travail de terrain, de plus en plus important, prend le rôle de la photographie pour attester la présence de l’observateur. Voir, pour toutes ces informations, le livre collectif coordonné par Edwards et, en particulier, les articles de Edwards, 1992 ; Scherer, 1992 ; Poignant, 1992 ; et Pinney, 1992.
7 D’où bien sûr la responsabilité scientifique de l’observateur justifiant ses options photographiques, identifiant les images et assurant au corpus recueilli et présenté une bonne force de conviction.
8 Pour toutes ces données épistémologiques, voir Dubois, 1983.
9 Voir, pour une application de ces principes photographiques et textuels, Piette, 1992.
10 Voir aussi Piette, 1992 et 1996.
11 Voir Livet, 1993.
12 Voir pour ces réflexions, l’article de Piper, 1991.
13 Pour une critique de l’opposition individu-société, voir l’article de Dubet, 1990.
14 Ces commentaires connectent directement à la perspective théorique proposée par Yves Barel (1989) et qui n’est pas sans rappeler, à certains égards, celle de Luc Boltanski et Laurent Thévenot. « Aucune énumération, écrit Barel, aussi complète et minutieuse soit-elle, des rôles sociaux tenus par un individu n’épuisera jamais la réalité de cet individu. Qu’on ne se méprenne pas : il s’agit de bien autre chose que de dire simplement que l’individu, outre l’être social qu’il est, est aussi un être biologique, psychologique, moral ou une conscience immergée dans un inconscient. Tout cela est vrai, mais c’est aussi comme être social que la réalité ne peut pas être socialement exprimée jusqu’au bout. Si l’on y réfléchit, on a là une conséquence du fait qu’un individu, comme une société, a un potentiel d’universalité qui n’est jamais actualisable jusqu’à son terme » (p.190-191). La vision théorique de Barel est précisée de manière intéressante pour notre propos : « l’écart entre l’individu concret et ses rôles est théorisable, ce qui signifie qu’on ne doit pas le tenir pour quantité négligeable quand on s’efforce de comprendre la vie quotidienne et le sort historique d’une société » (p. 192-193). Il se fait que l’option systémiste de Barel le maintient dans une perspective sociologique par laquelle il reste accroché à une lecture en termes de rôle social et de stratégies en l’occurrence « doubles » servant à réguler et à reproduire le système et correspondant globalement à un jeu de double pertinence plutôt qu’à un rapport entre généralité et particularité. Les choix analytiques de Boltanski et Thévenot, directement centrés sur les capacités des hommes, ont l’avantage heuristique de focaliser l’attention sur les formes ethnographiques de l’action.
15 À ce propos, un court article d’Adam Kendon insiste sur la capacité d’attention différentielle aux comportements des autres et permettant de distinguer les éléments insignifiants des autres. De l’enquête, il ressort que des gestes associés au discours sont en premier lieu perçus comme « délibérés », « conscients », tandis que les autres sont davantage jugés comme « naturels », « ordinaires » et « sans significations » (Kendon, 1978).
16 Voir Groupe µ, 1978, Hucheon, 1981 ; et Kerbrat-Orecchini, 1980.