1 Les dictionnaires Sindhi-English de la période coloniale traduisent ṭikāṇo par lieu de résidence de faqīr hindous ou temple sikh. Voir par exemple Shirt et al. 1879 : 200.

2 La question n’a jamais été abordée de front par les chercheurs. En revanche, ils y font référence lorsqu’ils s’intéressent à la culture religieuse des Sindhis hindous, en particulier dans les travaux consacrés à l’Inde. Voir en particulier Ramey 2008. Voir également Boivin 2012b.

3 Nimāṇo Faqīr (1888-1963) était une hindoue originaire de Shikarpur dans le nord du Sind. Elle avait été initiée au soufisme par Sakhī Qabūl Muḥammad, le maître de la dargāh de Sachal Sarmast située à Daraza près de Khairpur. Mūlchand Faqīr (1883- 1962) appartenait à une famille hindoue de Sehwan Sharif qui avait la charge de faire la procession de la mendī. Il avait été initié par Sayyid Rakhiyyal Shāh.

4 Falzon (2004 : 60) exagère quand il prétend qu’il s’agit d’une invention des Sindhis qui ont migré en Inde à partir de 1947.

5 Hinglaj est situé dans le Baloutchistan et non dans le Sind mais les hindous qui gèrent le sanctuaire sont sindhis.

6 Les Lohāṇa constituaient la caste hindoue dominante qui était spécialisée dans le commerce. D’après les sources britanniques, ils représentaient plus de la moitié des hindous, qui formaient eux-mêmes entre 20 et 25 % de la population totale du Sindh.

7 Une description d’autres darḅār peut être trouvée dans le récent livre de Kalhoro 2014.

8 Voir par exemple Burton 1852 : 333.

9 On observe un même déficit de travaux en ce qui concerne les espaces des soufis en général ; voir cependant Mayeur-Jaouen 2000. Sur le sous-continent indien, la meilleure approche est celle que H.A. Khan (2009) a consacrée aux dargāh sohrawardies d’époque médiévale à Utch, dans le sud du Panjab pakistanais.

10 Le texte persan des inscriptions est accompagné d’une traduction en anglais dans Khan 1962.

11 Il faut enfin signaler que depuis quelques années, le ministère des biens religieux du Sindh (Awqaf Department) s’est lancé dans une politique de standardisation des sanctuaires soufis. En 1960, le président Ayyūb Khān avait nationalisé une partie des biens religieux du Pakistan, en particulier des dargāh. Par la suite, le Pakistan étant un État fédéral, c’est le ministère du gouvernement du Sindh qui en a reçu la gestion. Depuis les années 1990, l’Awqaf Department rénove ou reconstruit les dargāh sur un même modèle architectural, et y ajoute mosquées et madrasa. On peut parler d’un processus d’islamisation.

12 Les disciples de Rochaldās ont publié plusieurs ouvrages, dont certains en anglais. Steven Ramey a consacré quelques pages à Rochaldās (Ramey 2008 : 87-94). Ce qui suit provient principalement du petit ouvrage de Chandirāmāṇī s.d.

13 Pour commémorer le martyr de l’imām Ḥusayn à Kerbela, des cénotaphes miniatures, dénommés ta`zīa, sont paradés dans les rues les dix premiers jours du mois au son criard des sharnā`ī, sortes de petits hautbois. Malgré l’origine shī`ite de ces commémorations, elles étaient ouvertes à toutes les confessions.

14 Dans Sind and its Sufis, Jethmal Parsram écrit que Quṭub `Alī Shāh lui a parlé d’un lieu qui est la source du soufisme et où il n’existe aucune différence entre le soufisme et l’hindouisme (Parsram 1924 : 80-81). Il apparaît qu’il s’agit de Hinglaj, que les musulmans dénomment Nani.

15 La notion de likal n’est pas sans rappeler le principe de dissimulation légale (taqiyya) en contexte musulman, et de celui de guptī (les cachés) en contexte ismaélien.

16 Décoction à base de chanvre indien, auquel on peut ajouter du lait et d’autres plantes aromatiques.

17 Pour ce qui concerne Nimāṇo Faqīr (1888-1963), le récit nous apprend que son murshid l’avait autorisée à émigrer en Inde tout en lui demandant de fonder une branche de la dargāh de Sachal Sarmast située à Daraza, dans le nord du Sindh. Un troisième soufi, Mūlchand Faqīr (1883- 1962), décida quant à lui de ne pas émigrer, contrairement à son principal disciple, Gehīmal Motwānī (1904-1971).

18 Sur les pèlerinages hindous du Pakistan, on dispose maintenant de la thèse de Schaflechner (2014).

19 Sachal Sarmast est un des plus grands poètes soufis du Sindh. Il appartenait au lignage des sajjāda nashīn de Daraza, près de Khairpur, qui avaient fondé au début du xviii^e siècle une communauté soufie affiliée à la Qādiriyya. Sachal Sarmast a composé son œuvre en sindhi, siraiki et persan. Il est surnommé le Ḥallāj du Sindh, non pas qu’il ait été martyrisé mais parce que comme lui, il exprime ouvertement que la finalité du soufisme est la divinisation du soufi. Il utilise à de nombreuses reprises la formule d’al-Ḥusayn Manṣūr al-Ḥallāj « Je suis Dieu » (ānā al-ḥaqq), qui valut à ce dernier d’être pendu à Bagdad en 922. En outre, Sachal Sarmast place la musique au centre de la pratique soufie. À l’instar de Quṭub `Alī Shāh, c’est un wujūdī, comme en témoignent ses vers : « Parfois il (Dieu) est chrétien, parfois il est Ahmad, parfois il est Hanuman ».

20 Le terme kuṭīr renvoie à l’idée d’ermitage (terme employé par nombre de sadhu en Himalaya) ou de lieu de retraite (je remercie Rémy Delage pour cette information). Chez les Sindhis hindous, il est cependant un équivalent de darḅār. C’est la forme hindie du sindhi kuṭiyyā, qui était utilisée pour désigner un sanctuaire qui n’était pas le centre principal d’une tradition donnée. Voir Boivin 2012b.

21 Falzon (2004 : 53) les identifie comme étant caractéristiques de l’espace de culte sikh, ce qui est excessif. Les éléments qu’il donne sont également ceux des sanctuaires soufis, comme le langar.

22 N’ayant pu rencontrer cette dernière qui vit à Mumbai, je n’ai aucune information sur Dādī Gangā, si ce n’est qu’elle était une disciple de Rochaldās et qu’elle est décédée.

23 Pūdyā est l’équivalent sindhi de pūjā.

24 Le chant mast qalandar existe sous diverses formes. Il loue l’extase, connue sous le nom d’enivrement ou mast, comme but suprême de la voie soufie qui peut être atteint à travers la danse, le dhamāl. Il fait directement référence à La`l Shahbāz Qalandar et à Sehwan Sharif. Le chant connut un grand succès à partir des années 1970 et d’innombrables versions ont été enregistrées au Pakistan comme en Inde.

25 Les Kānūngo sont un groupe hindou dont le nom vient probablement du terme qui désignait un fonctionnaire de l’époque moghole chargé de collecter les impôts.

26 Maître spirituel indien originaire de l’Andhra Pradesh auquel de nombreux miracles étaient attribués. Il acquit une immense popularité en Inde et à l’étranger qui lui valut des critiques féroces. Il prétendait être une incarnation de Krishna.

27 Bullhe Shāh (1680-1758) était un soufi panjabi très populaire dont la poésie chante l’extase comme mode d’accès à la fusion avec Dieu. Mīrābāī (1498-1547 ?) était une princesse du Mewar, dans le sud de l’actuel Rajasthan, qui composa des poèmes lyriques exprimant la dévotion envers Krishna. Ses compositions font partie des répertoires des soufis de l’Inde et du Pakistan.