Les lieux d’étapes
p. 276-277
Texte intégral
1L’expansion latine vers le monde musulman a entraîné la mise en place d’infrastructures d’accueil, les fondouks* (ou fondachi en italien), pour les marchands qui y séjournaient pour la durée de leurs escales ou de manière plus pérenne.
2Prévus dans les traités de trêve et de paix à partir du xiie siècle, ils étaient un espace réservé à chaque nation, sur lequel les consuls exerçaient la souveraineté de leur métropole. Les ports les plus importants, mais aussi certaines villes de l’intérieur, disposaient de plusieurs de ces établissements, situés souvent à l’extérieur des murs, ou au moins en marge de l’espace urbain, près des douanes et des quais du port. Ces bâtiments, sur le modèle des fondouks* urbains du monde islamique, se présentaient comme un espace fermé par une porte, disposant de pièces de stockage ou d’ateliers au rez-de-chaussée et de chambres dans les étages. On y trouvait également une chapelle, souvent une taverne, et parfois un four. C’étaient donc des lieux de vie dans lesquels les marchands trouvaient un environnement familier, autant qu’un lieu de contact et d’échanges économiques.
3D. V.
Les fondouks chrétiens dans les villes musulmanes (xiiie-xve siècle).

« À Alexandrie, chaque port chrétien a son fondaco et son consul. Le fondaco est un bâtiment élevé pour les marchands d’une ville ou d’une région, par exemple, le fondaco de Gênes, le fondaco des Vénitiens, le fondaco de Marseille, le fondaco des Catalans. Chaque marchand de cette ville ou région doit se rendre à ce fondaco et y apporter les marchandises qu’il a avec lui, selon les ordres du consul. Ce consul est à la tête de l’établissement et de tous ceux qui y habitent ; sans son accord et sa présence, aucun marchand de la ville ou de la région qu’il représente ne peut entrer dans la ville ni y introduire ses marchandises. »
Christiane Deluz, « Le voyage de Symon Semeonis d’Irlande en Terre sainte. Symon Semeonis xive siècle », p. 973‑974.
4Au moins dès l’époque abbasside, le monde islamique médiéval fut parsemé de lieux d’accueil (caravansérails*, khans*, ribats*, manzil-s*, fondouks) destinés à accueillir les voyageurs sur les routes et en contexte urbain.
5Ces constructions, espacées généralement de 25-30 km soit la distance d’une étape (marḥala) parcourue en une journée par les caravanes marchandes lourdement chargées et les voyageurs ordinaires, ont contribué au maillage du territoire. Répondant à des enjeux économiques et stratégiques, revêtant parfois des dimensions palatiales, elles assuraient une protection contre les attaques et les dangers naturels, en particulier en contexte aride ou montagnard : murs fortifiés, comme le Kampir Dival entourant l’oasis de Boukhara, cour centrale pour les animaux et les marchandises, citerne ou puits constituèrent des éléments récurrents de ces lieux d’accueil. Inspirés de pratiques antiques, ils furent financés par les dirigeants politiques et les membres des élites économiques, notamment par la mise en place de waqf-s* (cf p. 130‑131). Les messagers officiels, membres du barīd* (système postal, cf p. 294‑295), bénéficiaient de relais postaux facilitant leurs déplacements à des vitesses et sur des distances bien supérieures.
6C. R.-Q.
Les lieux d’étapes routiers sur l’axe Merv-Boukhara.

Ribāt-i Mālik, caravansérail sur la route de la soie entre Boukhara et Samarcande, xie siècle.

© Paris, Mashreq-Maghreb, 1992.

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