Les quartiers marchands en Iran : Merv

Camille Rhoné-Quer

p. 228-229


Texte intégral

1L’oasis de Merv bénéficie de nombreux atouts en faveur de son dynamisme commercial : d’une superficie de 1 000 hectares environ, cet espace fut, dès ­l’Antiquité, le lieu de productions locales variées, grâce à la fertilité que lui conférait le delta du Murghab, et du fait de ses nombreux ateliers. Ses activités commer­ciales profitèrent de sa position sur les Routes de la soie dès cette époque.

2À plusieurs reprises dans l’histoire de l’Islam médiéval, la ville fut le siège du pouvoir régional : au début du ixe siècle, la capitale politique de la province fut transférée par les gouverneurs tahirides à Nichapur, mais Merv demeura le centre commercial du Khorasan. Elle devint ensuite l’une des capitales politiques régionales des Seljukides dès les années 1030- 1040. Diverses structures urbaines et péri- urbaines facilitaient les échanges : outre les caravansérails* (cf p. 276- 277), Merv comptait des marchés importants. Le chahārsū, couvert d’une coupole, correspondait au centre du marché de Sulṭān Qalʿa* et se trouvait au carrefour des deux axes routiers orientés est-ouest et nord- sud. Des changeurs sont signalés à proximité.

3Avant les destructions mongoles de 1221, du viiie au début du xiiie siècle, l’oasis jouissait d’une grande prospérité, ce qui contribua largement à l’expansion de la ville (cf p. 124‑125). Toutefois, cette prospérité subit une courte inflexion à la fin du xe siècle, dans un contexte marqué par les difficultés voire les destructions liées aux tensions sociales, au factionnalisme et aux désordres politiques sous les derniers émirs* samanides.

4La production agricole reposait en particulier sur un système d’irrigation étroitement encadré par un personnel chargé de son contrôle et de son entretien. Les géographes arabes et persans du xe siècle affirment que, dans l’ancienne citadelle ou sur les rives du canal qui l’alimentait, étaient cultivés des légumes et des fruits dont des melons que l’on séchait et exportait. Étaient aussi récoltés ou produits à Merv des dattes, des raisins, de l’huile de sésame, du fromage, des racines d’asa fœtida, des condiments, du vinaigre, des astragales gommifères récoltées dans le désert environnant. À cela s’ajoutaient la soie grège, les fils et voiles de soie, le coton brut ou manufacturé. Les artisans étaient présents aussi bien dans la ville (artisans du métal et/ou fabricants d’armes dans Gavur Qalʿa/Gyaur Kala, orfèvres et joailliers dans Sulṭān Qalʿa) que dans ses faubourgs occidentaux (potiers, briquetiers).

« Ferula assa-Fœtula », Plantes médicinales de Köhlers, 1887.

Le latex de l’asa foetida, une fois durci, forme des gommes-résines destinées notamment à un usage culinaire et médicinal.

« Merv est une grande ville. […] C’est un endroit agréable et florissant […]. Merv produit du bon coton (pambah), des racines d’asa foetida (ušturghāz), des douceurs (filātah), du vinaigre (sirkah), des condiments (ābkāmah), des tissus de soie […]. »
Anonyme persan, Les limites du monde du Mashreq au Maghreb, p. 94 (ouvrage rédigé en 982‑983). Trad. inédite : C. Rhoné-Quer.

Les quartiers marchands à Merv.


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