Les quartiers marchands en Arabie : Aden et Zabid
p. 224-225
Texte intégral
1Comme d’autres régions du monde islamique médiéval, l’Arabie occidentale connaît, à partir des xe et xie siècles, un phénomène de littoralisation qui conduit à la densification du peuplement des régions côtières bordant la mer Rouge, au développement de l’activité de ses principaux ports ou à l’apparition de nouveaux, comme l’éphémère « hub » commercial de Sharma.
2Parmi ces ports, Aden occupe une place singulière, en raison de sa rade protégée, qui en fait une halte incontournable depuis l’Antiquité. Bien que principalement tourné vers le golfe Persique, le boom du commerce maritime à l’époque abbasside bénéficie aussi à Aden qui accueille quelques grands navires venus de l’Inde. Le rattachement du Yémen à la sphère fatimide à partir du milieu du xie siècle change toutefois la donne : la circulation des navires entre le Yémen et l’Égypte s’intensifie, sous la forme d’un convoi maritime annuel saisonnier de gros navires, appelé kārim. Les sources de la Geniza* du Caire offrent un éclairage inédit sur les activités qui se développent entre le xie et le xiiie siècle (cf p. 266-267).
3Le port, lové sur une île volcanique reliée au continent par un simple pont, se dote d’un dispositif de défense impressionnant (muraille et forteresses) et d’un système douanier, encore perfectionné avec l’arrivée des Ayyubides (1171, cf p. 88-89) et l’établissement du sultanat rasūlide (1229‑1454). Les archives du port d’Aden conservées pour cette période témoignent d’un commerce ouvert aux vastes horizons de l’Inde, de la Chine, de l’Afrique de l’Est, du Golfe et de la mer Rouge, mais aussi largement connecté avec l’intérieur de la Péninsule, qui exporte en masse chevaux et plantes tinctoriales (garance).
4Les entrepôts se déploient autour de la douane (furḍa) dont le bâtiment occupe une place centrale sur le front de mer. Placée sous le regard du pouvoir sultanien, qui y installe un palais d’agrément (al- Sa'āda et al-Manzar), la cité voit également fleurir les institutions religieuses sunnites*, qui en font un relais de l’islamisation des nouveaux mondes indien et africain de l’Islam.
5Située au cœur d’une riche vallée côtière de la mer Rouge, mise en valeur à partir du ixe siècle, la ville de Zabid connaît un essor parallèle, alimenté par une économie agraire diversifiée, combinant céréaliculture de plaine irriguée, palmeraies et vergers. Les revenus fonciers et fiscaux, accumulés dans la ville forte, nourrissent l’émergence d’une classe de propriétaires urbains et de serviteurs du pouvoir qui réinvestissent leurs biens dans des bâtiments de prestige religieux (madrasas, mosquées) ou civils (belles demeures) qui donnent à cette ville le statut d’une quasi-capitale.
Le port d’Aden et ses installations commerciales (xe-xve siècle).

Activités commerciales et artisanales à Zabid, xiiie-xve siècle.

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